Le cardinal de Bernis ne se bornait plus à gémir sur les malheurs du siècle. Oubliant la réserve que lui commandaient les devoirs de sa charge, il passait insensiblement à la contre-révolution militante, il ne répugnait pas à apporter au parti de l'émigration le secours de ses lumières et l'appui de son influence. Bientôt, il fera figure d'une sorte de ministre consultant du comte d'Artois, en attendant qu'il devienne, comme il l'espérait, le premier ministre de la Restauration. A partir de la fin de 1789, il faisait passer au prince, alors à Turin, par l'intermédiaire du comte de Vaudreuil, des avis oraux, puis écrits, de moins en moins réservés. Si M. Frédéric Masson avait connu, au moment où il composait son panégyrique du cardinal, la correspondance qu'échangeaient Vaudreuil et le comte d'Artois[1], peut-être eût-il mis moins d'ardeur à faire l'éloge de la correction et de la modération de son héros. Déjà Bernis avait fait un accueil chaleureux aux premiers émigrés arrivés à Rome. Sa parenté avec les Polignac suffisait à excuser ses empressements. Quand il apprit la venue probable du comte d'Artois et du prince de Condé, il se hâta d'écrire à Vaudreuil que, malgré la suppression des dîmes et de ses autres revenus, il recevrait avec amour, respect et magnificence le frère de son Roi et les princes de son sang, surtout Monseigneur le comte d'Artois, qui lui avait marqué de la bonté et qu'il honorait et chérissait[2]. Vaudreuil fut ravi de ce langage auquel il ne s'attendait pas. Voilà parler en noble et digne Français ! s'écriait-il. La réception espérée n'eut pas lieu. Lecomte d'Artois resta à Turin à la cour de son beau-père. Seul Vaudreuil vint à Rome rejoindre la duchesse de Polignac, sa tondre amie. Il y fut vite l'intime du cardinal. Bernis n'est plus pour lui que le divin cardinal. Il admire son génie, qu'il compare à celui de Richelieu, et il conseille à plusieurs reprises au comte d'Artois de le choisir comme premier ministre, le jour de la Restauration. Au début, le divin cardinal, le bonhomme, comme Vaudreuil l'appelle encore familièrement, avait mis quelque réserve dans ses épanchements[3]. Il avait fait quelques difficultés pour donner au comte d'Artois les conseils que Vaudreuil lui demandait. Il voulait, disait-il, être autorisé par le roi à jouer ce rôle de conseiller, et Vaudreuil priait le prince d'intervenir auprès de son frère pour obtenir cette autorisation, qui ne vint jamais. En attendant, Bernis causait et Vaudreuil écrivait. Les premiers conseils du cardinal furent longtemps, c'est une justice de le reconnaître, empreints d'une certaine modération. Il fait dire au prince de ne rien faire sans se mettre d'accord avec le roi. Il lui montre les inconvénients qu'aurait sa venue à Rome, etc. Mais peu à peu le bonhomme se laisse aller à moins de retenue. Il conseille d'agir sur la cour d'Espagne et il promet d'employer son influence auprès de Florida-Blanca pour le gagner à la cause[4]. Vaudreuil, ayant conseillé au comte d'Artois de lancer un manifeste, ajoutait, comme s'il était sûr de la collaboration de Bernis : Il faut que M. Marie[5] le fasse (ce manifeste), le digère et le communique par une occasion sûre ou par un exprès au bonhomme[6]. Ceci était écrit dès le 5 décembre 1789. Quand Vaudreuil quittera Rome pour Venise, en mai 1790, Bernis remplacera ses communications orales par des communications écrites que son correspondant résumait fidèlement ou copiait intégralement à l'usage du comte d'Artois. A la fin même, Bernis écrira directement à l'abbé Marie, secrétaire du prince, mais en prenant la précaution de se faire renvoyer ses lettres[7]. Nous savons maintenant de quel cœur le Richelieu de l'émigration remplissait auprès du Saint-Siège la mission de conciliation qui lui incombait. Les intérêts de la France se confondaient pour lui avec ses rancunes passionnées d'aristocrate et d'homme d'Église et avec ses ambitions de futur premier ministre. Quand il se targuera auprès de Montmorin du succès qu'il aurait remporté en empêchant le pape de déclarer la guerre à la Révolution dès mars 1790, nous saurons ce que valent les éloges qu'il se décerne à lui-même pour son rôle de modérateur. Qu'il s'entendit bien avec Pie VI, qu'il eût sur lui de l'influence, cela n'était d'ailleurs pas étonnant. Ils pensaient de même. Mais laissons-lui la parole. Il n'est pas un vote de la Constituante qu'il ne critique avec amertume. Dès qu'il est question d'acquitter les dettes de la royauté avec les biens d'Église, il s'indigne et proteste : On nous a regardés comme des usurpateurs... Est-ce que nous ne sommes pas Français et citoyens du même empire et. les frères légitimes de nos frères ? Qui a le droit de nous déclarer bâtards et de nous déshériter ?...[8] Imitant, ou plutôt devançant la tactique de l'abbé Maury, il ne manque pas d'insinuer que l'Assemblée en veut à la religion, qu'il confond avec l'Église, et il démontre — non peut-être sans quelque ironie — à son ministre philosophe l'utilité de la religion qui est nécessaire au bonheur, au bon ordre et à la tranquillité et félicité publiques. C'est à peine si la noblesse lui parait moins utile que le clergé : Les seigneurs ne sont plus redoutables qu'à nos ennemis. Pourquoi les dépouillerait-on des droits légitimés par l'ancienne Constitution et que le concours des siècles a convertis en vraies propriétés ?[9] Quand il apprend le vote du décret du 2 novembre, il revient encore sur le même thème, sans crainte de fatiguer les oreilles de Montmorin : ... Le coup mortel, depuis longtemps annoncé, a donc été porté au clergé de France dans le temps même que cet ordre ne se refusait à aucun sacrifice pour le bien de l'État Je souhaite bien sincèrement que ce dépouillement ne porte aucune atteinte à la religion, à l'éducation, aux mœurs, au soulagement des pauvres, au rétablissement du crédit, de la circulation, de l'ordre et de la paix intérieure[10]. Quelle différence entre ce langage et celui d'un Boisgelin ! II Combattre l'impiété et surtout la franc-maçonnerie qui la propage, telle est la grande occupation de Bernis et du pape pendant les mois de décembre 1789 et de janvier ; 1790. Le Saint-Office a fait arrêter Cagliostro dans la nuit du 27 au 28 décembre 1789[11]. Bernis en informe Montmorin et, fidèle écho des bruits de la curie, accuse la secte des illuminés d'avoir préparé le complot qui ébranle les trônes et l'Église : Le tribunal du Saint-Office continue à faire des recherches pour découvrir si Cagliostro, profitant des assemblées clandestines des francs-maçons solennellement proscrites à Rome par les bulles de Clément XII et de Benoit XIV. n'est pas le chef de cette secte d'illuminés qui commence ici à inquiéter le gouvernement. Cette même secte, qui fait de grands progrès en Allemagne et un peu partout, à l'aide de cérémonies mystérieuses, qu'on nomme ici égyptiennes, sème universellement un esprit d'insurrection et de révolte contre l'ancienne autorité du gouvernement. On prétend que la politique de certaines puissances en tire parti pour remplir des eues ambitieuses et que l'argent ne manque pas à ces prétendus illuminés, qui, sous le prétexte de la liberté, travaillent sourdement et efficacement contre toute autorité et surtout contre celle du Souverain Pontife. On a trouvé, dit-on, dans les papiers de Cagliostro une prophétie qui annonce que Pie VI sera le dernier pape et que ses Etats seront enlevés à l'Église...[12] Les jeunes peintres élèves de l'Académie de France avaient formé une loge maçonnique dans l'atelier de l'un d'eux, le peintre Belle[13]. La police du pape y fit une perquisition le jour même de l'arrestation de Cagliostro. Bernis, au lieu de protéger nos nationaux, dénonça à Montmorin leur esprit a d'indépendance et d'irréligion et se lava les mains de la mésaventure qui leur arrivait : Presque tous les jeunes gens d'un certain ordre parmi les artistes associés à la franc-maçonnerie, sont soupçonnés, depuis la détention de Cagliostro, d'être attachés aux opinions des illuminés. La loge des francs-maçons, au reste, depuis quelque temps à Rome s'est trouvée placée dans l'atelier d'un jeune peintre français fort recommandé, nommé Belle. On a mis sous le scellé tous les effets, papiers et livres qui se sont trouvés dans son laboratoire. Par égards pour le nom français, on n'a point arrêté encore ce jeune homme, mais on lui a conseillé ou de faire sa déclaration devant le commissaire du Saint-Office (et alors il n'aura plus rien à craindre) ou de se mettre en sûreté. J'ignore quel parti il prendra ; je crains qu'il n'écoute les conseils de têtes trop échauffées. Quant à moi, qui ne connais pas le procès qui s'instruit au Saint-Office, je n'entre point dans ces discussions, mais je ne laisse ignorer à personne que des étrangers, quels qu'ils soient, doivent respecter les lois de chaque gouvernement qui les a reçus et accueillis et que les assemblées de francs-maçons ont été solennellement proscrites à Rome par les bulles de Clément XII et de Benoît XIV, qu'il faut s'y soumettre ou se résoudre à quitter le séjour de cette capitale et de l'État ecclésiastique[14]. Le plus compromis des artistes de l'Académie, Belle, par peur du Saint-Office, se décida à quitter Rome et à retourner en France. Bernis ne fit rien pour le retenir, au contraire. Le jeune peintre nommé Belle, qui a beaucoup de talent et, à ce qu'on m'assure, d'honnêteté, mais qui avait prêté son atelier à la franc-maçonnerie, proscrite à Rome, n'ayant pas cru pouvoir manquer aux serments de ce singulier institut, en révélant ses secrets au Saint-Office, a pris le parti sage de retourner en France auprès de son père, un des directeurs de la manufacture des Gobelins...[15] Montmorin, qui était probablement maçon lui-même, dut bien rire des étranges frayeurs que la maçonnerie causait au cardinal et au Saint-Office I Il ne put s'empêcher de lui dire ce qu'il pensait du prétendu complot des illuminés et de leur action sur la Révolution : ... Il y a sans doute beaucoup de causes qui ont contribué à monter les esprits au point où ils sont, mais il ne parait pas qu'en France les mystères nés de la franc-maçonnerie aient produit d'autre effet que de ruiner quelques dupes. Nous ne connaissons les illuminés d'Allemagne que par un assez médiocre ouvrage d'une personne qui était à. Berlin dans le temps où ils faisaient le plus de bruit[16]. Il y a peut-être des gens qui cherchent à accrocher quelques soupers en faisant des prosélytes de la franc-maçonnerie égyptienne, mais Calliostro (sic) n'avait pas assez d'esprit pour faire secte, et ceux qui l'ont écouté un moment n'osent pas s'en vanter. D'ailleurs, les clubs ont fait fermer les loges et on est si occupé de politique qu'il serait impossible de fréquenter des assemblées on il est, dit-on, expressément défendu d'en parler...[17] Ruiner quelques dupes, accrocher quelques soupers, c'est à cela que Montmorin réduisait dédaigneusement le complot de ces illuminés que Bernis et le pape considéraient et traitaient comme des ennemis redoutables ! La conduite du Saint-Office lui parut du dernier grotesque. Il ne l'envoya pas dire à Bernis : ... Il est juste que le Pape maintienne les lois de ses prédécesseurs et surtout que Sa Sainteté arrête les fausses doctrines qui pourraient s'introduire sous l'ombre de la franc-maçonnerie, mais je désirerais qu'on évitât de donner trop d'importance à des bagatelles et d'exposer les tribunaux romains à voir leurs procédures tournées en ridicule...[18] Bernis se le tint pour dit. Il ne reparla plus de la maçonnerie. III Ses longues dépêches étaient alors assez vides. Depuis la solution provisoire de l'affaire des annates, la papauté semblait résignée aux événements. Bernis rassurait Montmorin : Sa Sainteté parait résolue à ne pas s'écarter du système de prudence qu'elle a observé jusqu'ici, écrivait-il le 17 novembre. La Cour de Rome continue à être sage et réfléchie, ajoutait-il, le 2 décembre. Elle gémit en silence de la ruine prochaine du haut clergé du royaume. Elle prévoit que les évêques, vrais successeurs des apôtres, perdront insensiblement leur juridiction ; que celle du chef de l'Église souffrira notablement de cette perte ; que la hiérarchie n'étant plus respectée, la religion catholique elle-même s'affaiblira et cessera ensuite d'être la sauvegarde la plus sùre des mœurs, de l'ordre et de la subordination. Mais, malgré toutes ces réflexions, le pape et son conseil se fient aux promesses de l'Évangile, se rassurent sur la piété de Leurs Majestés et sur leur attachement au centre de l'unité, et pensent qu'en rompant le silence dans ces temps d'agitation et de trouble, ils ne feraient qu'augmenter le mal, sans espoir d'y remédier efficacement...[19] Montmorin n'en demandait pas davantage. Mais, en janvier, les dispositions de la papauté furent moins bonnes. Le décret des 9-27 novembre 1789 avait suspendu la nomination à tous les bénéfices autres que les cures. Cette suspension était une atteinte aux droits du Saint-Siège qui nommait, directement ou indirectement, en vertu du Concordat, à un certain nombre de bénéfices de toute nature. Le pape, qui avait accepté la suppression des annates, mesure autrement grave, résolut de ne pas tenir compte du vote de l'Assemblée au sujet de la nomination aux bénéfices. C'était, sur un point de détail, rallumer le conflit qu'il avait lui-même éteint en septembre sur un point bien plus important. Ce qui était plus caractéristique encore de la nouvelle politique du Saint-Siège, c'était la forme donnée à la protestation. Pie VI, pour la première fois, invoquait les canons. Pour la première fois, il n'engageait pas de négociation avec le gouvernement français avant d'agir ; il agissait comme si les votes de la Constituante n'existaient pas à ses yeux. Voici en quels termes généraux, peut-être généraux à dessein, Bernis prévint Montmorin : ... On est très bien informé à Rome que la nomination de tous les bénéfices de France, excepté les cures, est suspendue. Mais on ne croit pas qu'on puisse séparer les évêchés des bénéfices à charge d'âmes, ni que l'existence canonique des chapitres ne constitue pas essentiellement avec l'évêque l'organisation de l'Église de chaque diocèse...[20] Nous voyons apparaître ici, pour la première fois sous cette forme, l'argument qui sera le grand cheval de bataille des réfractaires, l'argument qu'ils ne cesseront bientôt plus d'opposer à toutes les réformes de la Constituante : Les canons de l'Église sont en contradiction avec vos décrets. Vous légiférez sur une matière qui vous est étrangère ! Chose remarquable, Bernis, on reproduisant l'argument, semblait le trouver irréfutable et le prendre à son compte ! Justement la prévôté[21] de Saint-Pierre-le-Jeune, à Strasbourg, bénéfice à la nomination de Rome, était vacante. Montmorin s'était empressé d'avertir Bernis qu'il y aurait du danger à violer le décret de l'Assemblée par une nomination précipitée. Mais sa lettre arriva trop tard. La nomination était déjà faite : ... D'après vos judicieuses réflexions, Monsieur, j'ai prévenu le Pape et son sage ministre du danger qu'il y aurait nommer à la prévôté de Saint-Pierre-le-Jeune vacante à Strasbourg et des conséquences fâcheuses qui pourraient en résulter pour le Saint-Siège et j'ai prié Sa Sainteté de suspendre cette nomination... P.-S. ... J'apprends dans le moment que, dès samedi dernier, 6 de ce mois, le Pape, à mon insu, a nommé M. Dora, suffragant de Strasbourg, à la prévôté de Saint-Pierre-le-Jeune — dont j'ignorais alors la vacance —, d'après les sollicitations de M. le cardinal de Rohan et de quelques membres de ce chapitre, que j'ignorais également à cette époque... En pareil cas, Sa Sainteté se trouvera toujours fort embarrassée, ayant à craindre d'un côté, si elle nomme selon son droit, d'aigrir l'Assemblée nationale, et, de l'autre, d'être exposée à l'insurrection des évêques et des chapitres, qui ne manqueraient pas de conférer les bénéfices vacants et prendraient acte pour avancer que le pape, en ne nommant pas, aurait renoncé à son droit par le fait...[22] Zelada s'excusa sans doute d'une façon honnête, mais revendiqua dans toute son ampleur le droit du Saint-Siège : L'insinuation de ce digne ministre (Montmorin), écriait-il à Bernis le 9 février, est arrivée trop tard... Le cardinal de Zelada doit observer que, quand même l'on aurait fait plus tôt au pape l'insinuation dont il s'agit, Sa Sainteté n'aurait pas pu s'empêcher de procéder à cette collation, afin d'empêcher que d'autres ne nommassent à sa place, si Elle avait différé, ce qui aurait porté le plus grave préjudice au Saint-Siège apostolique. Votre Éminence voit bien — et M. comte de Montmorin, qui est si sage et éclairé, le verra aussi — qu'il s'agit d'un droit dont il n'est pas permis au Souverain Pontife de négliger la conservation...[23] Montmorin avait bien vu, dès le principe, toute la portée de cette affaire, minuscule en apparence. Si le pape invoquait maintenant les canons pour entraver l'application des réformes de l'Assemblée, le conflit commençait seulement. On n'était pas près d'en voir la fin ! Où était la limite du pouvoir civil et du pouvoir spirituel ? Qui était compétent pour tracer cette limite ? Qu'est-ce qui constituait l'Église dans chaque diocèse ? Qu'est-ce qui ne la constituait pas ? Questions insolubles, d'où pouvaient sortir, au gré des parties en présence, toutes les querelles ! Au premier avertissement de Bernis, Montmorin avait répondu sur-le-champ : ... Je crois, Monseigneur, que, pour ne faire naître aucun incident fâcheux pour le clergé, il convient de ne pas s'attacher dans ce moment à examiner ce qui peut ou non être considéré comme constituant l'Église de chaque diocèse et d'éviter d'agir à cet égard d'après les canons. Les canonicats ont été mis hors de la ligne des bénéfices à charge d'âmes. Nommer à ceux qui viendraient à vaquer, ce serait donner lieu à de nouvelles discussions sur ce point et peut-être risquer d'amener une division qui priverait les églises cathédrales d'une grande partie des sujets nécessaires pour la décence du culte...[24] Quand il apprit que le pape avait passé outre et que la nomination était faite, Montmorin ne se borna pas à exprimer son mécontentement. Il y joignit pour le Saint-Siège un avertissement significatif : ... Je souhaite que la nomination du prévôt du chapitre de Saint-Pierre-le-Jeune de Strasbourg ne donne lieu à aucune réclamation. J'avais écrit à Votre Éminence, au moment où j'avais appris la vacance. La raison qui a déterminé Sa Sainteté à faire cette nomination est très bonne eu égard à l'ancien ordre de choses ; reste à savoir si elle s'adaptera au nouveau...[25] Tout était là, en effet. Si la papauté voulait éviter à tout prix une lutte ouverte contre la Révolution, lutte où elle risquait de perdre à la fois et sa domination temporelle en France et son autorité spirituelle sur une bonne partie du clergé français, elle comprendrait que le nouvel ordre de choses exigeait une politique nouvelle. Elle continuerait la tactique Inaugurée lors de l'affaire des annates, elle plierait provisoirement devant les circonstances. Montmorin essayait de la convaincre que cette politique-là était la meilleure, car le nouvel ordre était inévitable. Mais il est visible que Pie VI écoutait de moins en moins les conseils de prudence et de modération. Chaque jour exigeait de lui un sacrifice de plus. Avignon et le Comtat étaient en pleine désobéissance. La Constituante poursuivait imperturbablement son œuvre. Jusqu'où devrait-il donc reculer ? La besogne de conciliation qui incombait à Bernis devenait donc de plus en plus difficile, et Bernis était l'homme du monde le moins capable de la remplir. Comment aurait-il persuadé le pape de supporter l'inévitable, quand lui-même, Bernis, consacrait toutes ses forces à éviter cet inévitable ? Il a conscience de sa situation fausse, c'est une justice à lui rendre. Derechef, il craint qu'on ne le rappelle, ou qu'on ne lui donne un suppléant, tellement il s'y attend ! Le 6 janvier, il s'était plaint d'être épié par l'abbé de Fonbonne, qui aurait écrit mille pauvretés contre lui. L'abbé de Fonbonne, personnage assez équivoque, avait la réputation d'être employé dans les missions secrètes à l'étranger[26]. La coterie du comte d'Artois s'en défiait alors et Bernis pensait comme la coterie. En février, les plaintes de Bernis recommencent sur de nouveaux frais. On ne se borne plus à le faire espionner par un agent secret. On s'apprête à lui donner un suppléant dans la personne d'un archevêque qui recevrait à Rome une mission officielle. il ne peut contenir son indignation : ... Je n'ai pas voulu jusqu'ici, mande-t-il à Montmorin, vous parler du bruit qui a couru universellement et qui se renouvelle de nouveau, de la prochaine arrivée à Rome, de M. l'archevêque de Paris, qu'on dit chargé de commissions auprès du Saint-Siège. On avait d'abord annoncé qu'il devait négocier ici l'affaire des annates, laquelle a été terminée, autant qu'elle peut l'étre, vu les circonstances présentes, dans l'espace d'un courrier à l'autre. Je ne crois pas, quel que soit ce prélat, qu'il puisse avoir ici plus de considération et de crédit que moi, et ce serait me donner un dégoût gratuit et sans utilité pour les affaires, que de l'en charger, sans que j'eusse demandé son concours et son appui. Je suis sûr, Monsieur, que TOUS êtes trop honnête et trop de mes amis pour adopter un pareil projet, dont le moindre inconvénient serait d'être d'une parfaite inutilité, puisque l'expérience de vingt et un ans a prouvé que j'ai toujours terminé ici les affaires à la satisfaction réciproque...[27] Montmorin ne nia pas que le bruit dont s'alarmait le cardinal n'eût eu quelque fondement, mais il donna, des missions projetées, une explication ingénieuse et vraisemblable : ... J'ai été plus d'une fois sur le point d'annoncer à Votre Éminence le départ de quelques-uns des prélats députés à l'Assemblée nationale pour aller traiter à Rome les objets qui intéressent cette Cour parmi ceux que l'Assemblée a décrétés relativement au clergé et à ses biens. Ces missions projetées ne pouvaient, à aucun égard, nuire à la considération de Votre Éminence ni diminuer l'opinion que le public a généralement de ses talents et de son crédit à Rome. Personne ne s'y serait trompé. On aurait bien vu que les prélats qui sollicitaient une commission passagère désiraient surtout avoir un prétexte honorable pour s'absenter[28]. Je ne vois rien de décidé jusqu'à présent à cet égard, mais je ne serais pas surpris que M. l'archevêque de Paris, qui, bien moins pour lui-même que pour pouvoir secourir les malheureux, doit désirer de conserver les revenus de son archevêché, ait pensé à solliciter une mission qui le mettrait dans le cas prévu par l'Assemblée nationale dans laquelle peut-être pense-t-il que sa présence aurait quelque inconvénient[29]. Ceci, Monseigneur, n'est qu'une conjecture, mais suffira pour donner à Votre Éminence une idée précise de ce qu'elle doit penser des missions extraordinaires dont elle entendra parler...[30] Avant l'envoi de la lettre, la conjecture de Montmorin devenait pour lui une certitude. L'archevêque de Paris et d'autres prélats avaient réellement fait des démarches auprès du roi pour être chargés de missions à Rome, de missions quelconques. Seulement Montmorin n'en avait rien su qu'après coup. Il mit à ses dépêches ce post-scriptum : Il est vrai, Monseigneur, que M. l'archevêque de Paris avait vivement désiré d'être chargé d'une mission quelconque à Rome ; il n'était même pas le seul prélat qui eût témoigné ce désir, mais Sa Majesté a trouvé qu'il ne serait peut-être pas sans inconvénient de s'y prêter. Si cet arrangement eût dû avoir lieu, j'aurais sûrement eu l'honneur de vous en prévenir. Une fois pour toutes, je supplie Votre Éminence de vouloir bien n'ajouter foi à aucun bruit de ce genre, s'ils se répétaient, et d'être bien persuadé que, dans tous les cas, il ne sera rien fait qui puisse l'intéresser sans qu'elle soit prévenue à l'avance et sans son aveu... IV Le pape avait laissé passer sans mot dire la suppression des dîmes et la nationalisation des biens d'Église, mais l'abolition des vœux monastiques et le refus de décréter le catholicisme religion d'État lui parurent un attentat contre lequel il devait s'élever, La victoire qu'il venait de remporter en Belgique sur l'empereur Joseph II, réduit à retirer ses édits de réforme religieuse, l'avait probablement exalté[31]. Il s'était dit sans doute qu'une révolte cléricale et aristocratique en France aurait peut-être le même succès que l'insurrection belge qui triomphait. Déjà le nonce avait fait une démarche auprès de Montmorin au sujet de la suppression des vœux monastiques. Montmorin s'était borné à avertir Bernis, sans lui donner du reste d'instructions particulières : ... Votre Éminence apprendra la manière dont l'Assemblée nationale a terminé samedi dernier la discussion sur les ordres religieux. M. le Nonce est venu pour m'en parler dans un moment où j'étais chez le Roi. Je sais qu'il en est profondément affecté. Il ne m'est pas possible d'entretenir aujourd'hui Votre Éminence sur cet événement qui va sans doute faire une sensation à Rome...[32] Bernis partageait l'émotion du pape et de son entourage. Il répondit à Montmorin qu'il avait bien de la peine à calmer les inquiétudes du pape, et discrètement il lui rappela l'issue de la politique religieuse de l'empereur aux Pays-Bas : ... J'ai bien de la peine à calmer des inquiétudes qui tiennent de si près à la religion. Il ne doit pas être difficile de concevoir combien grandes doivent être les craintes du Saint-Siège. On ne peut toucher à l'organisation d'une religion anciennement établie sans remuer les esprits et avouer le fanatisme. L'Empereur n'a perdu les Pays-Bas que par l'oubli de cette maxime...[33] Montmorin, comme s'il trouvait inutile de discuter, se borna, comme d'ordinaire, à affirmer que les événements en France étaient irrésistibles. ... J'aime mieux ne point entretenir Votre Éminence de l'état actuel de l'Église de France et de ses rapports futurs avec le Saint-Siège, que de lui retracer des réflexions dont aucune ne lui a échappé. Le nouvel ordre de choses, qui ne fait que commencer à s'introduire ici, présente tant de changements qu'il est impossible d'assigner leurs effets et leur terme. La Cour de Rome ne pourrait que se compromettre en risquant la moindre démarche...[34] Deux jours après qu'il avait envoyé cette dépêche Montmorin recevait une nouvelle lettre de Bernis écrite sur le ton solennel réservé aux graves circonstances. Le pape était décidé à adresser une encyclique aux évêques de France pour condamner l'œuvre de la Constituante 1 Bernis se hâtait de prévenir Montmorin et de dégager sa responsabilité d'une rupture qu'il croyait fatale. Ce n'était pas sa faute, à lui Bernis ! Ce n'était pas davantage la faute du pape, qui avait fait preuve d'une modération si longue ! ... Vous devez bien croire, Monsieur, qu'après tout ce qui a été décidé en France contre la teneur des traités et concordats avec le Saint-Siège, qu'après les atteintes portées à la juridiction du Pape, reconnue et respectée dans les États catholiques, qu'après la manière dont on a traité, sans intelligence avec Home, les corps religieux, qu'après tout ce qui s'est fait et se projette encore au détriment du clergé séculier, la Cour romaine est dans la consternation et que le murmure contre le silence du pape devient général, en sorte que Pie VI sera bientôt forcé à le rompre. J'ai gouverné ce pays-ci pendant vingt et un ans dans des circonstances difficiles et délicates, parce que la piété du Roi et la sagesse de son conseil ont eu égard à mes représentations et m'ont accordé des adoucissements et des tempéraments, au moyen desquels j'ai pu contenir la chaleur du zèle et l'effervescence des esprits. Mais aujourd'hui que, sans égard et sans aucune convenance pour le chef de l'Église, on détruit tout ce qui était légalement établi et que la Religion catholique parait elle-même courir de grands risques, je ne saurais répondre des résolutions qui sont prises. Je peux seulement assurer avec vérité qu'il ne dépendra pas de moi qu'elles ne soient sages et modérées. Le devoir, la conscience et l'honneur forceront Pie VI malgré lui à rompre le silence que, par de bonnes vues, je lui avais fait observer si longtemps. Il comprend bien que ses exhortations et ses réclamations seront inutiles ; mais le cri de la conscience, de l'honneur et de la réputation l'obligent, devant Dieu et devant les hommes, à faire ce qui dépend de lui ; après quoi, il n'aura aucun reproche à se faire à lui-même et l'honneur du Saint-Siège sera sauvé... P.-S. — On vient de m'avertir que le pape était décidé à écrire en France, sans doute aux évêques. J'ai l'honneur, Monsieur, de vous en prévenir, afin que vous ayez le temps de vous expliques' avec M. le Nonce et de prendre vos mesures. Il ne me parait pas possible que les lettres et brefs puissent être expédiés par notre courrier qui part ce soir, mais cette expédition peut se faire samedi par la poste de Turin. Cette voie est plus courte et les lettres du samedi par Turin arrivent en même temps à Paris que celles qui partent le mercredi par la poste de France. J'ai prodigué les conseils les plus sages au Pape et à ses ministres, j'ai été même obligé de m'expliquer avec force dans les conversations où il règne une très grande chaleur depuis les derniers arrêtés et décrets. Dieu veuille que Pie VI, en satisfaisant son honneur et sa conscience, n'augmente pas le mal, au lieu de le diminuer ! Mes avis qui, jusqu'à ce jour, ont été prédominants, n'ont plus la même force, parce que la Cour de Rome a vu enfin très clairement que sa modération n'avait même pas obtenu au Saint-Siège les plus simples égards. Il n'est pas vraisemblable, d'après le passé, qu'on ne me communique pas la résolution prise par le pape, mais il est bien à craindre qu'on ne se croie pas obligé de les suivre...[35] Cependant l'encyclique, déjà arrêtée en secret, ne fut pas envoyée. Bernis, averti par le ministre d'Espagne, vit le pape et, après une conférence de deux heures, obtint qu'il ne précipiterait rien. Le pape remplaça l'encyclique par une allocution qu'il prononça en consistoire secret, le 29 mars[36]. Dès le 16 mars, Bernis pouvait tranquilliser Montmorin. Celui-ci, qui avait d'abord manifesté d'assez vives inquiétudes[37], reprenait confiance, peut-être un peu bien vite, et songeait même à recourir au pape pour aplanir les difficultés d'exécution que présentaient certains décrets de l'Assemblée. Le cardinal de La Rochefoucauld ayant écrit au pape pour lui demander des instructions sur la sécularisation des moines récemment sortis des couvents, Montmorin priait Bernis de diriger la réponse qu'on lui fera et il ajoutait dans son optimisme : Il est certain que Sa Sainteté peut contribuer au bonheur de beaucoup d'individus des ordres monastiques par la manière dont elle conciliera ce que les circonstances exigent avec les règles établies pour les vœux. Il l'est également qu'en facilitant l'exécution des plans de l'Assemblée nationale sur ce point autant qu'il est en elle, elle peut prévenir des résolutions plus embarrassantes et amortir l'effet de quelques opinions qui ne sont pas encore devenues unanimes dans l'Assemblée. Je ne particulariserai rien à cet égard. Votre Éminence est trop instruite de la rapidité avec laquelle les idées se propagent parmi un grand nombre d'hommes réunis pour ne pas connaître combien il est utile de ne pas multiplier les questions sur des matières délicates...[38] Bernis n'eut pas besoin de diriger la réponse du pape au cardinal de La Rochefoucauld. Cette réponse était envoyée dès le 31 mars et elle était telle que Montmorin pouvait la souhaiter. Pie VI accordait au cardinal et aux évêques les pouvoirs qui lui étaient demandés pour dispenser des vœux monastiques[39]. Il facilitait donc indirectement l'exécution des décrets. Montmorin, qui ne s'attendait pas à une solution si favorable succédant à de graves menaces de conflit, s'enhardit à justifier en quelque sorte l’œuvre religieuse de la Constituante, ce qu'il n'avait pas encore osé faire jusque-là. Il s'appliquait en même temps à rassurer Bernis sur le sort des prélats. L'Assemblée, sans doute, réformerait les institutions, mais elle respecterait les intérêts des individus. C'était toucher Bernis à l'endroit sensible. ... Votre Éminence aura sûrement déjà connaissance les derniers décrets de l'Assemblée relativement aux biens du clergé[40]. Je ne ferai à cet égard qu'une réflexion, mais je ne saurais me dispenser d'observer que ce qui se passe tans ce moment n'est pas l'ouvrage d'un jour. Il y a bien longtemps que les esprits fermentent sur cette matière et la crise était parvenue au point que nulle force humaine ne pouvait s'opposer à ce qui vient d'arriver. Les seuls vœux qu'on puisse se permettre sont en faveur des titulaires. J'en fais à cet égard de bien sincères et je crois que les dispositions d'une grande partie des membres de l'Assemblée n'y sont pas défavorables, et, pourvu qu'aucunes démarches, qui ne seraient pas extrêmement modérées, ne viennent pas à la traverse, j'espère que les individus ne seront pas très maltraités...[41] Quelques jours plus tard commencera la discussion de la constitution civile du clergé. En prévision des nouveaux conflits qu'il redoutait, Montmorin avait besoin de s'armer de courage et de confiance. S'il avait lu l'allocution secrète prononcée par le pape au consistoire du 29 mars[42], il ne pouvait se méprendre sur la pensée véritable de Pie VI et de ses conseillers. Dès ses premiers mots, Pie VI avait marqué la raison profonde du conflit entre la Révolution et l'Église, en dénonçant le dessein formé par les révolutionnaires de subordonner la religion à la politique. Très délibérément, il avait censuré l'œuvre politique des Constituants au même titre que leur œuvre religieuse, l'une et l'autre étant inspirées des mêmes principes. Au nombre des décrets qu'il condamnait, il avait désigné clairement cette déclaration des droits, à laquelle pourtant des archevêques avaient collaboré. Il avait protesté contre la souveraineté du peuple au même titre que contre la liberté de penser et la tolérance religieuse, contre l'accessibilité des non-catholiques à tous les emplois publics au même titre que contre l'abolition des vœux monastiques. Bien mieux, il avait condamné la nationalisation des biens d'Église, à laquelle pourtant les évêques de l'Assemblée s'étaient résignés. Bref, Pie VI s'était exprimé comme aurait pu le faire le plus violent des prélats aristocrates, presque dans les mêmes termes que le curé Rougane. S'il gardait encore ses condamnations secrètes, c'était à regret ; il avait bien soin de le dire et de s'en excuser. Mais à qui aurait-il pu s'adresser ? aux évêques ? ils sont privés de toute autorité et chassés de leurs sièges (comme Juigné) ; au clergé ? il est ruiné et renversé, on lui interdit de s'assembler ; au roi Très Chrétien ? mais l'autorité royale n'existe plus que de nom ; au peuple ? mais il obéit a un concile de philosophes et il parait séduit par l'apparence d'une vaine liberté. Le pape se taira donc provisoirement, mais son silence ne sera pas perpétuel. Dès qu'il pourra parler sans dommage et sans péril pour personne, il parlera, il en prend l'engagement. Il n'attend qu'une occasion propice, il l'attend avec impatience. Retenons cet aveu du Souverain Pontife. S'il n'a pas condamné publiquement l'œuvre de la Constituante dès mars 1790, c'est uniquement pour des raisons d'opportunité. Mais dès cette date, la rupture existait virtuellement entre la Révolution et le Saint-Siège. Or, la constitution civile du clergé n'avait pas commencé d'être discutée. De toute façon, la constitution civile du clergé n'aura donc qu'une part restreinte à la rupture définitive. Elle en sera peut-être l'occasion, elle n'en fut pas la cause, ou tout au moins la cause unique. |
[1] Correspondance intime du comte de Vaudreuil et du comte d'Artois pendant l'émigration, publiée par Léonce Pingaud. Plon, 1889, 2 vol. in-8°.
[2] Lettre de Vaudreuil au comte d'Artois du 17 septembre 1789, dans L. Pingaud, t. I, p. 13.
[3] Cf. la lettre de Vaudreuil du 7 novembre 1789.
[4] Bernis était très lié avec Florida-Blanca. Je vois dans l'Histoire de l'Émigration de M. E. Daudet (L I, p. 18) que Florida-Blanca prit des mesures sanitaires (sic) contre la Révolution dès la fin de 1789, c'est-à-dire qu'il ferma la frontière aux journaux français et expulsa de Madrid beaucoup d'étrangers. Un arrêté de l'inquisition prohiba nommément 39 ouvrages, livres ou feuilles périodiques venant de France. Les journaux de Paris furent arrêtés à la frontière et les ambassadeurs seuls eurent la possibilité de les recevoir. (Geoffroy de Grandmaison. L'ambassade française en Espagne pendant la Révolution (1789-1804). Plon, 1892, in-8. p. 9). L'action de Bernis y fut-elle pour quelque chose ?
[5] L'abbé Marie, aumônier et secrétaire du comte d'Artois.
[6] Correspondance, t. I, p. 50.
[7] Cf. lettre de Vaudreuil du 9 octobre 1790, dans Léonce Pingaud, t. I, p. 334.
[8] Arch. des Affaires étrangères, reg. 911, 23 septembre 1789.
[9] Lettre du 30 septembre 1789.
[10] Lettre du 17 novembre 1789.
[11] Cagliostro était arrivé à Rome à la fin de mai 1789. Il avait demandé à être reçu par le secrétaire d'État et avait fini par se faire recevoir. Devenu suspect, il fut arrêté avec sa femme. Sa femme fut mise au couvent, lui au château Saint-Ange. Cf. dans la Correspondance des directeurs de l'Académie de France à Rome publiée par A. de Montaiglon et Jules Guiffrey les lettres de Ménageot du 3 juin et du 30 décembre 1789, t. XV, p. 335 et 373.
[12] Dépêche du 6 janvier 1790. Archives des Affaires étrangères, registre 912.
[13] Fils d'un membre de l'Académie des beaux-arts, Belle était en surnombre à l'Académie de France. Il logeait en ville. Le directeur de l'Académie, Ménageot, a fait l'éloge de ce jeune artiste tout à fait intéressant par son amour pour l'étude, son honnêteté et son attachement pour ses amis les pensionnaires avec lesquels il a toujours vécu dans la meilleure intelligence Correspondance citée, lettre du 19 août 1759.
[14] Dépêche du 20 janvier 1790.
Le ton de cette lettre est bien différent de celui des lettres qu'écrivait alors Ménageot sur la même affaire. Il est vrai que Ménageot finit par être influencé par Bernis et par con-saler à Belle de quitter Rome. Voir la Correspondance citée.
[15] Dépêche du 27 janvier 1790.
[16] Il s'agit probablement du livre de Mirabeau, La Monarchie prussienne, qui contient au tome IV, livre VIII, une étude sur l'illuminisme. Il est curieux de voir Montmorin qualifier le livre d'assez médiocre ouvrage. Le véritable auteur de l'ouvrage était un Français domicilié à Brunswick, Mauvillon.
[17] Dépêche du 26 janvier 1790.
[18] Dépêche du 9 février 1790.
[19] Rome, 2 décembre 1789.
[20] Dépêche du 20 janvier 1790, reçue le 4 février.
[21] Prévôté, dignité du chanoine le premier en titre dans une cathédrale.
[22] Rome, 10 février 1790.
[23] Billet de Zelada annexé à la dépêche de Bernis du 10 février.
L'affaire de la prévôté de Strasbourg n'est pas le seul conflit provoqué par l'application du décret suspendant la nomination aux bénéfices n'ayant pas charge d'âmes. Je lis dans les feuilles de travail du comité ecclésiastique, à la date du 12 avril 1790 : M. de Saint-Priest, ministre secrétaire d'État, écrit au comité au sujet du sieur Aubert, pourvu en Cour de Rome par une bulle du 3 décembre dernier d'un canonicat de l'église collégiale de la Réale, diocèse de Perpignan, qui demande à M. de Saint-Priest l'expédition des bulles d'attache nécessaires. Ce ministre observe qu'il n'y trouve aucune difficulté parce que le décret qui ordonne de surseoir à toute nomination de bénéfice n'a été enregistré au Conseil supérieur du Roussillon que le 9 décembre suivant. II prie le comité de l'autoriser à expédier les lettres d'attache. Avis du comité : Il a déjà été répondu à M. de Saint-Priest qu'à l'époque du 3 décembre 1789 les bulles de la Cour de Rome relativement à l'obtention des bénéfices ne pouvaient avoir d'effet. Arch. nat., DXIX, 99.
[24] Paris, 9 février 1790.
[25] Paris, 2 mars 1790.
[26] On trouvera des renseignements intéressants sur l'abbé de Fonbonne au début de l'émigration dans les Mémoires du duc des Cars, Plon, 1890, t. II, p. 195 et suiv. Bernis écrit à Montmorin le 29 septembre 1790 : L'abbé de Fonbonne, que vous connaissez bien, est un de ceux (des Français) que l'on a arrêtés ; il l'a été non loin de Rome, et, comme on l'avait traité trop durement, je lui ai fait rendre la liberté. Le gouvernement (romain) a ses raisons que je ne saurais lui demander pour lui interdire le séjour de Rome et de l'État ecclésiastique...
[27] Rome, 10 février 1790.
[28] On a vu plus haut, au chapitre précédent, que l'archevêque de Reims, n'ayant pu obtenir la mission à Rome qu'il demandait, avait donné sa démission, à la fin de décembre 1789, sous prétexte de maladie.
[29] Le décret des 5-14 janvier 1790 avait ordonné le séquestre des revenus des bénéficiers absents du royaume. Or, Juigné, archevêque de Paris, était dans le cas du décret.
[30] Dépêche du 2 mars 1790.
[31] Cf. dans le Journal ecclésiastique (mars 1790) le bref du pape au cardinal de Frankenberg, archevêque de Malines, en date du 23 janvier 1790. Le pape annonce à l'archevêque que l'empereur a révoqué ses édits et rends les choses en l'ancien état.
[32] Dépêche du 16 février 1790.
[33] Dépêche du 3 mars 1790.
[34] Dépêche du 23 mars 1790.
[35] Dépêche du 10 mars 1790, reçue le 25.
[36] Dépêche de Bernis du 16 mars, reçue le 1er avril.
[37] Dans sa dépêche du 30 mars.
[38] Dépêche du 13 avril 1790.
[39] Le bref du pape au cardinal de La Rochefoucauld a été publié dans Theiner, Documents inédits. t. I, p. 4-5.
[40] Les décrets qui confiaient aux départements et aux districts l'administration des biens d'Église.
[41] Paris, 29 avril 1790.
[42] Publiée par Theiner, t. I, p. 1-4.