NAPOLÉON DANS SA JEUNESSE

 

1769-1793

§ 12. — EN CORSE (1er JANVIER - 1er JUIN 1788).

 

 

Presque tout de suite après avoir reçu sa prolongation de congé. Napoléon est en route. Il arrive le 1er janvier 1788 en Corse[1], où on l'attend avec impatience. Lui absent, Joseph absent, sa mère n'a personne qui lui serve de secrétaire, d'interprète, de solliciteur près des autorités. Elle est accablée de besogne dans sa maison, n'ayant point de bonne, obligée d'entretenir elle-même les quatre enfants en bas-âge qu'elle a gardés près d'elle : Louis qui a dix ans, Pauline qui en a huit, Caroline qui en a six, Jérôme qui en a quatre. Ce ne sont point là des exagérations. Voici la lettre que Mme Bonaparte écrit à ce moment à Pise à son fils Joseph[2].

Très cher fils,

Par la lettre de votre oncle, vous apprendrez ce que vous devez faire. Il veut que vous passiez docteur. Vous savez l'état de la famille et, pour cela, il est inutile de vous dire de faire le moins de dépense possible. Nous sommes sans servante. Ainsi faites ce qui sera possible pour m'en ramener une avec vous. Je voudrais une femme d'un certain âge, qui ne fût pas trop jeune, mais qui fût déjà femme de quarante ans et fût pour la maison et non pour les champs, seulement qu'elle fasse notre lessive, et, si elle ne veut pas la faire, il ne m'importe, mais qu'elle fasse notre petite cuisine et qu'elle sache coudre et repasser et qu'elle soit dévouée. C'est cela que je voudrais, puisque, depuis mon mal de doigt, je ne suis plus en état de faire un point. Ayez à cœur de faire ce que vous pourrez. Vous me demanderez ce que vous pouvez lui donner de salaire et je vous réponds : le moins que vous pouvez, mais pour que vous vous régliez, je vous dirai trois à quatre francs par mois, que la femme soit bonne et puis vingt sous de plus ou de moins ne font rien, car j'en ai grand besoin.

M. l'abbé Colonna dit que vous n'oubliez pas ses commissions. et en particulier celle de la servante.

Vos sœurs et frères vous embrassent et vous disent de leur apporter un chapeau de paille pour l'été. Grand maman, Mamucia Caterina, et vos oncles et tantes vous saluent. Moi je vous embrasse et vous souhaite un bon retour. N'oubliez rien de ce que je vous écris.

Votre très affectionnée mère.

Outre les soins domestiques, il faut que Mme Bonaparte s'efforce de tirer quelque parti de cette Pépinière à propos de laquelle Napoléon est allé solliciter à Paris, et qu'il faut s'efforcer de liquider si l'on prétend en être payé. Dès le retour de son fils, elle lui fait donc écrire en son nom, à l'Intendant, la lettre suivante[3] :

Ajaccio 12 février 1788

Monsieur,

Mmes Angela-Maria Pietra-Santa, Pietra-Costa, M. Barrois et plusieurs autres personnes désirant avoir des mûriers sur ma pépinière m'avaient demandé des renseignements sur les démarches à faire pour obtenir votre ordonnance.

En conséquence, ils avaient fait faire des trous et demandé à messieurs les officiers municipaux des certificats précédés d'une descente dans les endroits où ils avaient fait travailler.

M. le Podestat a répondu que l'ordonnance que vous avez fait afficher pour cet objet ne leur ayant pas été communiquée, ils n'étaient pas dans le cas de faire ce travail.

Je me suis en conséquence adressée à votre subdélégué afin de ne perdre aucun temps qui est précieux dans cette saison. Après diverses recherches dans ses cartons, M. Souiris n'en a pas trouvé de copie. Je prends donc la liberté de vous prier de vouloir bien communiquer votre ordonnance à messieurs les officiers municipaux ou de prendre tout autre parti qui puisse faire cesser cet incident.

Quoique la saison soit un peu avancée, je crois que cela ne doit pas vous empêcher de délivrer des ordonnances aux habitants des marines, l'air étant plus tempéré et le terrain plus arrosé.

Je suis avec le plus profond respect

Monsieur, votre très humble et très obéissante servante

Veuve de BUONAPARTE.

Après avoir obtenu de livrer ses arbres aux particuliers, il faut que Mme Bonaparte en sollicite le paiement : c'est ce qu'elle demande en divers mémoires dont son fils est naturellement le rédacteur. Voici l'un de ces mémoires adressé à Monsieur de la Guillaumie, intendant de l'île de Corse à Bastia[4].

12 avril 1788.

Monsieur,

Par la lettre du 12 novembre 1787 que vous me fîtes l'honneur de m'écrire, vous me disiez que, du moment où j'aurais achevé la livraison de cette année, vous m'auriez fait toucher la valeur de ces arbres : actuellement je viens d'en livrer, à différents particuliers, sur les ordonnances que vous aviez données, le nombre de 3600, plus celui de 500 sur des billets particuliers de votre subdélégué, en conséquence du pouvoir qu'il m'a communiqué, en tout 4110 arbres mûriers. J'ose donc vous prier d'effectuer la promesse que vous avez eu la bonté de me faire.

J'étais dans le cas de livrer cette année un bien plus grand nombre d'arbres. J'ai toujours attendu que quelqu'un vint me présenter quelqu'une de vos ordonnances et c'est avec surprise que je vois, aujourd'hui où la saison ne permet plus pour cette année aucune plantation, que vos ordonnances se sont bornées à un si petit nombre. Je comprends facilement que le manque de cultivateurs ou de demandes en a été la cause, mais il n'en est pas moins vrai que cela me porte grand préjudice, et une année de cultivation de plus que je suis obligée de donner à 5 ou 6.000 arbres me forme un accroissement de dépense de plus d'un sol par arbre.

En vérité, je me trouve singulièrement lésée dans cette entreprise, mais je n'étourdirai pas vos oreilles par de nouvelles plaintes. La bonté dont vous m'avez toujours honorée m'est assez garant de votre impuissance à y remédier. Du moins, j'oserais me flatter que vous contribuerez un peu à me soulager en m'accordant le prix des arbres délivrés, ce qui me parait bien juste, y ayant d'ailleurs été autorisée par le ministre ; ce serait abuser de votre complaisance que de vous exposer les différents torts que j'ai éprouvés dans cette affaire ; j'espère donc de votre bonté.

Si j'osais renouveler à votre souvenir l'affaire du marais delle Salini, je vous représenterais que le printemps est la saison favorable pour les travaux ou réparations dans cet endroit où l'abondance des eaux s'oppose aux travaux de l'hiver et l'infection de l'air à ceux de l'été.

Je suis avec le plus profond respect, Monsieur,

votre très humble et très obéissante servante.

Veuve de BUONAPARTE.

Pour obtenir ce paiement, pour faire sa cour à l'intendant, peut-être pour recueillir des documents sur l'histoire de Corse qu'il méditait d'écrire, Napoléon, durant ce congé, passa à diverses reprises plusieurs jours à Bastia, où il alla comme de juste rendre visite à ses camarades de l'artillerie qui s'y trouvaient en garnison[5]. Il ne paraît pas qu'il leur ait plu. Son esprit n'était nullement tourné aux amusements qui étaient de leur goût ; ses conversations ne portaient que sur les matières politiques, qui étaient lettre morte pour la plupart, et son patriotisme corse semblait à ces continentaux un outrage à la monarchie.

Ce patriotisme, il l'exaltait dans la société des vieux soldats de Paoli, dont il recueillait les souvenirs, dont il recevait les quelques pièces imprimées, la plupart clandestinement, où se trouvent consignés les actes de la République et les hauts faits de la guerre de l'Indépendance[6] : précieuse collection dont il ne s'est point séparé et qui lui a servi à écrire ses lettres sur la Corse, peut-être même un ouvrage plus considérable et qui n'est point retrouvé.

Il fallait pourtant qu'il pensât à retourner à son régiment dont il était absent de fait depuis le 1er septembre 1786[7]. Joseph Bonaparte ne pouvait tarder à revenir de Pise et s'annonçait pour les premiers jours de mai par la lettre suivante :

A Monsieur[8],

Monsieur de Buonaparte, archidiacre de la cathédrale d'Ajaccio

à Ajaccio.

Très affectionné oncle, très chère mère et frères.

J'ai reçu vos lettres avec les 80 écus que vous m'avez envoyés pour soutenir ma thèse, ce qui se fera dans peu de jours. Le Vannucchi sera mon président ; le 1er mai, je partirai s'il se présente une occasion pour Bastia.

Je suis dans le doute si je reverrai Napoléon à mon arrivée à Ajaccio... Ma mère avait bien raison quand elle disait à votre Seigneurie être inutiles les conseils que lui inspirait son paternel amour, et comme un nouveau signe de celui-ci, avec plaisir j'ai vu sa crainte, n'ayant jamais pensé à des Voyages chevaleresques à Florence, parce que, bien que corporellement en Toscane, j'ai suivi par la pensée tous les événements fâcheux de la maison et que je me suis trouvé vivre en même temps à Pise et à Ajaccio. Mais voici que sonne la cloche qui m'appelle à entendre le Lampredi. Ce serait un crime de perdre une leçon de cet homme éloquent, ne devant plus l'entendre que quelques jours. Je me réserve à jouir de votre conversation en, temps plus opportun.

De Bastia, je vous donnerai de mes nouvelles.

Je suis de vos seigneuries le très affectionné neveu, fils et frère.

Pise, 18 avril 1788.

Le patron est arrivé le 16 à Livourne.

Au dos :

Le patron porteur de la présente est prié de la mettre à la poste à Bastia.

Napoléon eut la joie de voir Joseph[9] et de l'embrasser avant son départ. Le 1er juin, il se mit en route pour Auxonne, où son régiment était en garnison depuis le mois de décembre précédent.

 

Il existe une légende suivant laquelle Napoléon se serait trouvé, en 1788, à Strasbourg, où il aurait, au théâtre, applaudi la Saint-Hubert, à laquelle il aurait même adressé un madrigal[10]. Selon quelques-uns, c'est à Marseille : selon d'autres, à Paris, alors que Bonaparte était capitaine en non-activité ; mais à Paris, à Strasbourg ou à Marseille, la chose est aussi peu vraisemblable, car on a vu par les seuls vers authentiques de Napoléon qu'il ignorait la métrique du vers français ; pourtant, à l'appui de ce prétendu séjour à Strasbourg, je rencontre une affirmation qui est de nature à jeter quelque doute dans les esprits. Lorsque j'arrivai à Strasbourg (dans l'été de 1788), dit M. de Metternich[11], le jeune Napoléon Bonaparte venait de quitter cette ville. Il y avait fini ses études spéciales comme officier au régiment d'artillerie qui y était en garnison. J'eus les mêmes professeurs de mathématiques et d'escrime que lui. Le professeur d'escrime, un M. Justet, vint me voir à Strasbourg en 1806 et me dit : N'est-ce pas un singulier hasard qui m'a appelé à vous donner des leçons d'escrime peu de temps après en avoir donné à Napoléon ?

Ce témoignage semble précis et pourtant il est impossible de l'admettre. Tout au plus pourrait-on supposer que ce maître d'armes, ayant donné des leçons à Bonaparte à Valence, était venu ensuite s'établir à Strasbourg, mais il n'est fait nulle mention de lui dans aucun document.

 

On a dit d'autre part que Bonaparte, au commencement d'avril 1788, s'était rendu à Paris en passant par Lyon ; qu'il était venu voir sa sœur à Saint-Cyr, qu'il avait retrouvé des Mazis à Paris, qu'il avait plusieurs fois fait visite à l'abbé Raynal et qu'il avait été admis à l'intimité de ses déjeuners scientifiques[12]. Tout cela est impossible, puisque Bonaparte n'est parti pour Auxonne que le 1er juin. La date suffit ; mais, de plus, aucun des faits allégués ne soutiendrait l'examen.

 

NOTE COMPLÉMENTAIRE SUR JOSEPH

 

On a vu par la lettre ci-dessus de Joseph quelle était sa position à Pise, quelles étaient ses protestations d'économie, quelles étaient les recommandations de son oncle et de sa mère à ce sujet. Comment concilier ces faits avec le récit que fait Joseph dans ses mémoires (I, 34). Je fus, dit-il, présenté à Pise au cardinal de Brienne. Il m'offrit l'occasion d'être connu du grand-duc Léopold qui se trouvait alors dans cette ville. Quelques mois après, le ministre de France, le comte Louis de Durfort, me présenta au Grand-Duc, à Florence, pour obtenir mon admission dans l'ordre de Saint-Etienne. La seule personne de notre nom qui vécut alors en Toscane attachait à cette admission la fin d'un procès intenté pour la succession de celui de ses parents qui avait appelé notre père à cet héritage. J'obtins un rescrit favorable. Si ità est, ità fiat, dit le Grand-Duc. Il voulut bien lui-même le remettre en ma présence au grand-chancelier de l'ordre, le commandeur Inghirami, avec la seule condition que celui de ma famille qui entrerait dans son ordre s'établirait en Toscane.

Tout cela est impossible : M. de Brienne n'était pas cardinal en 87, et il ne pouvait se trouver à Pise puisque, le 20 avril, il avait été nommé chef du Conseil royal des Finances, qu'il ne sortit du ministère que le 8 août 1788, et que durant ce temps il n'eut guère le loisir de se promener en Italie. Le Grand-Duc n'est point venu à Pise à cette époque. Il est absolument contre les principes que le comte Louis de Durfort ait pris sur lui, sans ordre de sa cour, de présenter officiellement au Grand-Duc un Français qui, n'étant point présenté à la cour de France, ne remplissait aucune des conditions obligées pour obtenir cette faveur. Il est plus contre les principes encore qu'il ait pu le recommander pour un ordre étranger. Enfin, le placet de Joseph au Grand-Duc, placet qui ne porte aucune des mentions que Joseph rapporte, est en date, non de 1786, comme l'a dit M. de Coston (II, 64), non de 1787, comme le dit Joseph, mais de 1789. Il a été retrouvé par M. Biagi dans les Archives de Pise. Coston en avait donné une traduction incomplète. Voici la traduction du texte intégral — Archives de Pise, ordre de Saint-Étienne, Filza 80 ; seconda di suppliche e informazioni dell'anno 1789, dal n° 111 al 220.

 

Au Conseil de l'Ordre.

Altesse Royale,

Joseph Buonaparte de Corse, et fils de Charles Buonaparte, le plus humble serviteur de Votre Altesse Royale, lui représente avec le plus profond respect que sa famille, à présent domiciliée en Corse, a tiré son ancienne origine de la Toscane et en particulier de Florence où, au temps de la République Florentine, elle a joui des premiers honneurs et s'est alliée par le sang avec les premières familles comme sont les Albizzi, les Alberti, les Tornabuoni, les Attavanti et autres semblables, et par diverses combinaisons politiques qui se produisirent dans les siècles éloignés, dans les Républiques d'Italie, ladite famille Buonaparte, divisée alors en plusieurs branches, et suivant le parti Gibelin, fut contrainte d'abandonner la cité de Florence, et se réfugia en plusieurs États ; et conséquemment, le rameau du Suppliant se transporta à Sarzane, alors petite république, où il fut admis aux premiers honneurs et décoré des premiers emplois, ayant par la suite contracté les mariages et les alliances les plus honorables avec la famille Malaspina et autres illustres familles. Représente en outre le Suppliant que au milieu de tant d'événements et de révolutions qui se produisirent pour lors en Italie, sa famille se transporta en Corse, fixa sa résidence dans la cité d'Ajaccio où la famille Buonaparte fut toujours distinguée et regardée comme noble, comme il constate des Lettres de la République de Gênes qui déclarent Geronimo Buonaparte chef des nobles anciens de ladite cité, dans laquelle les Buonaparte de Corse se trouvèrent alliés avec les familles Colonna, de Bozzi, d'Ornano, Durazzo et Lomellino de Gênes et se trouvèrent jouir des droits seigneuriaux du fief de Bozzi.

Représente en outre que la Corse étant passée sous la domination du Roi de France, le père du Suppliant fut reconnu noble et d'ancienne noblesse et prouvée à plus de deux cents ans, qu'il fut admis au nombre des douze gentilshommes représentant la nation entière et nommé, par l'Assemblée générale, député de la Noblesse près S. M. le Roi Très Chrétien, lequel se plut, par lettres de 1779, à authentiquer la noblesse de cette famille, et depuis, ayant fait ses preuves, Napoléon, frère cadet du Suppliant fut nommé par S. M. un des élèves de l'École royale et militaire de Brienne, d'où il passa à l'École de Paris et de là au grade d'officier dans le corps royal de l'artillerie.

Il représente enfin que, en conséquence de la qualité de sa famille, Marianne Buonaparte, sœur de celui qui parle, a eu l'honneur d'être nommée par le même roi de France à une place d'élève au couvent de Saint-Louis à Saint-Cyr établi par Louis XIV pour l'éducation des jeunes dames, lesquelles places et grâces ne peuvent être obtenues sans avoir fait d'abord les preuves exigées au moins de quatre générations de noblesse.

Sur de tels documents, la famille Buonaparte ayant toujours été considérée comme originaire de Toscane et descendante de ce Jean Buonaparte qui fut garant pour la République Florentine dans la célèbre paix conclue par le cardinal Latino, et par ainsi toujours reconnue par les Buonaparte demeurant en Toscane, le Suppliant, mû donc par le désir de reconnaître son ancienne patrie, n'a pas douté de recourir au Trône très clément de V. A. R. pour la supplier humblement de daigner lui accorder la grâce de pouvoir prendre l'habit de justice du noble ordre de Saint-Étienne, pour que, avec cette nouvelle décoration, le Suppliant ait toujours lieu et occasion de plus en plus de montrer à V. A. R. la profonde vénération et la plus fidèle obéissance, qui est bien due à la très respectable personne de Votre Altesse Royale et à toute sa très auguste famille.

Moi Joseph Bonaparte, je supplie comme dessus manu propria...

 

Le rapport du Conseil est signé :

Cav. Onofrio della Mosca, grand connétable ;

Cav. Niccolo Siminetti, grand prieur ;

Giacinto Viviani, vice-chancelier ;

Il est ainsi conçu :

Le Conseil de l'Ordre considérant que le Suppliant est de nation étrangère, et que le nombre des chevaliers étrangers dépasse le nombre de 80 réglé par la loi motu proprio du 8 mars 1786 remet la solution de la demande à la volonté Magistrale.

Au bas est écrit :

Son Altesse Royale a donné ce rescrit : Le Suppliant est admis à fournir les preuves de son origine toscane et l'affaire sera représentée.

Le 10 septembre 1789,

Joseph ne pouvait en ignorer, car une copie de ces pièces[13] avait été levée pour lui le 2 mars 1805.

 

 

 



[1] Époques de ma vie : Arrivé le 1er septembre 1786, j'en suis parti le 12 septembre 1777, pour Paris, d'où je suis reparti pour Corse, où je suis arrivé le 1er janvier, d'où je suis parti le 1er juin pour Auxonne.

[2] Inédit, Archives Levie-Ramolino. Nous donnons la traduction littérale.

[3] Iung, II, 343.

[4] Iung, I, 345.

[5] Je donne ici le témoignage tel qu'il se trouve dans les Souvenirs d'un officier royaliste, par M. de R... (de Roman), t. Ier, p. 117. Il faut noter que M. de Roman est un royaliste exalté et que, par la suite il eut des démêlés assez vifs avec Napoléon : En 1788, M. Buonaparte, nommé depuis peu lieutenant d'artillerie, arriva en Corse pour y passer son semestre. Il était notre camarade ; il vint nous voir tous à ce titre et, suivant l'usage, nous l'engageâmes à dîner les uns après les autres, pour faire plus ample connaissance. Il était un peu plus jeune que moi. Son entrée dans le corps datait de deux ans après la mienne. Sa figure ne me revint pas du tout, son caractère encore moins, et son esprit était si sec et si sentencieux pour un jeune homme de son âge, un officier français, que je n'eus jamais la pensée d'en faire mon ami. Mes connaissances étaient trop peu étendues sur les gouvernements anciens et modernes pour discuter avec lui ce sujet favori de ses conversations. Aussi, quand je lui donnais à dîner, à mon tour, ce qui arriva trois ou quatre fois cette année-là, je m'en allais après le café, le laissant aux prises avec un de nos capitaines, bien plus capable que moi de faire assaut avec un si vaillant champion. Mes camarades n'y voyaient, comme moi, que du ridicule et du pédantisme. Nous croyions même que ce ton doctoral qu'il prenait était sans conséquence jusqu'à un certain jour, qu'il argumenta si fort sur les droits des nations en général, y faisant même figurer la sienne, Stufete gentes ! que nous n'en revînmes pas d'étonnement, surtout lorsqu'il dit en parlant de leurs assemblées d'États qu'il était question de convoquer, ce que M. de Barrin cherchait à retarder, suivant en cela les errements de son prédécesseur, qu'il était bien surprenant que M. de Barrin eût la pensée de vouloir les priver de délibérer sur leurs intérêts ajoutant d'un ton menaçant : M. de Barrin ne connaît pas les Corses ; il verra ce qu'ils peuvent. Cette parole échappée nous donna la mesure de son caractère. Un de nos camarades lui répondit : Est-ce que vous useriez de votre épée contre le représentant du Roi ? Il ne répondit rien...

Nous nous séparâmes froidement, et c'est la dernière fois que ce ci-devant camarade me fit l'honneur de dîner avec moi...

[6] Voir les imprimés et les manuscrits relatifs à la Corse qui se trouvent dans les papiers de Napoléon du Fonds Libri :

[7] Il ne faudrait pas s'étonner des fréquents congés qu'obtient Napoléon, et il convient de regarder un peu ce qui se faisait pour d'autres officiers. Je prends pour exemple ce M. de Roman dont les mémoires détaillés indiquent assez bien le temps qu'il a passé à son régiment : Élève de Verdun, il est reçu lieutenant au Corps royal à la fin de septembre 1784. Il a un congé de six mois et une prolongation ; après dix-huit mois de présence au régiment, il a un semestre ; s'embarque le 27 mai 1787 pour la Corse où sa compagnie tient garnison ; et dès le mois de septembre 1788, obtient un congé à solde entière pendant lequel il parcourt toute l'Italie. Il rentre à son régiment au plus tôt en avril 89. En septembre 90, il a un semestre, repart en congé de trois mois en 91, etc.

[8] Inédit. Archives Levie-Ramolino.

[9] Il résulte des recherches faites par M. Biagi dans les Archives de l'Université de Pise, que Joseph n'a point fréquenté d'une façon habituelle les cours de l'Université. Il ne se trouve aucun certificat de fréquentation (rassegna) à son nom. Il a été, comme son-père, Dottorato forestiere. Il a subi son examen le 24 avril 1788 et est inscrit en ces termes sur les registres : N° 1783. Il sre Giuseppe del sre de Carlo Buonaparte di Ajaccio in Corsica si dottorò in utroque jure ; Laureò il sre avvto Vannucchi, decreto Monsre vicario generale Fabri e rogo il sre De Pacchioni, cancelliere arcivescovile.

[10] Voici ce madrigal :

Romains, qui vous vantez d'une illustre origine,

Voyez d'où dépendait votre empire naissant,

Didon n'a pas d'attrait assez puissant

Pour retarder la fuite où son amant s'obstine,

Mais si l'autre Didon, ornement de ces lieux,

Eût été reine de Carthage,

Il eût pour la servir abandonné ses Dieux

Et votre beau pays serait encore sauvage.

Je crois bien que c'est Mme d'Abrantès (XV, 353, 1re édit.) qui a la première donné ces vers.

[11] Mémoires, édit. Plon, I, 6.

[12] Coston, I, 119 et 120.

[13] Bibliothèque nationale de Florence. — Manuscrits Passerini.