DÉFAUT D'UNION ENTRE LES CITÉS GAULOISES. GUERRES PARTICULIÈRES : DEFAITES SUCCESSIVES.
Consuls : Cn. Domitius Calvinus et M. Valerius Messala.César, s'attendant pour
beaucoup de raisons à un plus grand soulèvement de Nous devons faire remarquer ici que ces trois légions de
renfort pour la guerre de Gaule, qui furent ainsi tirées de § I. — Incursion de César dans le pays des Nerviens, dans celui des Sénons et dans celui des Ménapiens. Après la mort d'Indutiomare, les Trévires avaient déféré le commandement suprême à ses proches, qui obtinrent la promesse d’un secours de quelques-unes des peuplades germaines, mais non des plus voisines, et qui s'entendirent avec Ambiorix. Informé de ces menées et voyant que de tous les côtés on se préparait à la guerre : que les Nerviens, les Aduatiques et les Ménapiens, unis à tous les Germains cisrhénans, étaient en armes[2] ; que les Sénons ne se rendaient point à ses ordres et se concertaient avec les Carnutes et avec d'autres cités voisines ; que les Trévires envoyaient sans cesse des émissaires solliciter du secours des Germains, César pensa qu'il devait lui-même entreprendre au plus tôt la guerre. C'est pourquoi, avant la fin de l’hiver, réunissant les quatre légions les plus rapprochées, il se jeta à l'improviste sur le territoire des Nerviens ; et, avant qu'ils pussent se rassembler et s'enfuir, il leur prit un grand nombre d'hommes et de bestiaux, qu'il abandonna aux soldats à titre de butin, il ravagea leurs champs, et les força à lui livrer des otages[3]. Cette entreprise terminée, il ramena les légions dans leurs quartiers d'hiver. Le printemps venu, il convoqua
l'assemblée de Cette partie de Ce plan arrêté, César envoya les
bagages de toute l’armée, avec deux légions, auprès de Labienus ; et
lui-même, avec cinq légions sans bagages, s'achemina vers le pays des
Ménapiens. Les Ménapiens, se croyant abrités par la nature de leur pays, n'avaient
rassemblé aucunes troupes ; ils s'enfuient de toutes parts dans les
forêts et les marais, avec ce qu'ils peuvent emporter de leurs biens[5]. César met une partie des troupes sous les ordres du
lieutenant C. Fabius, une autre sous ceux du questeur M. Crassus ; et,
faisant jeter promptement des ponts, il pénètre dans le pays de trois côtés à
la fois, incendie les habitations et les villages, s'empare de beaucoup d’hommes
et de troupeaux. Les Ménapiens, ainsi forcés de demander la paix, lui
envoient des députés à cet effet. César se fait livrer des otages et déclare
aux Ménapiens qu'il les tiendra pour ennemis s'ils reçoivent Ambiorix ou ses
envoyés. Ceci bien convenu, il laisse chez eux l’Atrébate Commius avec de la
cavalerie, en le chargeant de les surveiller ; et il part lui-même pour se
rendre chez les Trévires. § II. — Deuxième défaite des Trévires par Labienus. Pendant ces expéditions de César,
les Trévires, après avoir rassemblé beaucoup de troupes d'infanterie et de
cavalerie, se disposaient à attaquer de nouveau Labienus et la légion avec
laquelle il avait passé l’hiver dans leur pays. Déjà ils n'étaient plus
qu'à deux journées de marche de son camp, lorsqu'ils apprirent que les
deux autres légions envoyées par César y étaient arrivées. Alors ils
campèrent eux-mêmes à quinze milles de distance, avec l'intention d'attendre
là les renforts qui devaient leur venir de Labienus ne songeait point à la
passer, et ne pensait pas que les Trévires eux-mêmes se décidassent spontanément
à la franchir. Ceux-ci, chaque jour, comptaient de plus en plus voir arriver
les Germains. Dans cette situation, Labienus déclare en plein conseil que,
puisque les Germains approchent, dit-on, il ne veut pas mettre en
péril son sort avec celui de l'armée, et qu'il décampera le lendemain matin. Ceci
est promptement rapporté aux Trévires ; car il était bien naturel que, parmi
tant de cavaliers gaulois qui se trouvaient avec les Romains, quelques-uns
fussent favorables aux intérêts de L'ennemi était campé si près que ses vedettes l'informent de ce départ avant la venue du jour. A peine l'arrière-garde des Romains était-elle sortie des retranchements, que les Gaulois, croyant qu'ils fuient, et sans vouloir attendre l’arrivée des Germains, n'hésitent pas à traverser la rivière et à engager le combat dans une position désavantageuse[8]. Labienus revient sur eux. Ils ne supportent pas même le premier choc, et, prenant la fuite, ils se jettent dans les forêts voisines. Labienus les fait poursuivre par la cavalerie, en tue un grand nombre, fait beaucoup de prisonniers ; et, peu de jours après, il reçoit la soumission de toute la cité des Trévires. Les Germains qui venaient au secours des Trévires, apprenant leur défaite, retournèrent chez eux, accompagnés des proches d'Indutiomare, qui avaient été les auteurs de la défection de cette cité, et qui prirent le parti de s'exiler. Le premier rang et l'autorité suprême furent dès lors attribués à Cingetorix, que nous avons dit être resté dans le devoir depuis le commencement. On voit très-bien ici la subtilité paradoxale du langage de César, l'habileté avec laquelle il parvient à fausser le sens des mots les plus usuels. A l'entendre, d'une part, la défection, c'est l’acte des proches du chef légitime de la cité, qui l’ont aidé à la défendre, au prix de sa tête, contre l’étranger ; d'autre part, la fidélité au devoir, c'est l’acte de celui qui, pour se faire élever au pouvoir suprême par la force étrangère et contrairement à la volonté des citoyens, a aidé l’étranger à se rendre maître de la cité et à faire couper la tête au chef suprême. Peut-il effectivement exister un devoir et une fidélité du citoyen à l’égard de l’envahisseur de la cité ? Aussi Caton, qui avait percé à jour l'habileté sophistique du langage de César, s'écriait-il dans le sénat, en réfutant son opinion favorable à Catilina : En vérité, depuis quelque temps, nous ne connaissons plus ici le véritable nom des choses[9]... § III. — Deuxième expédition de César en Germanie. Arrivé du pays des Ménapiens chez les Trévires, César résolut de passer le Rhin, pour deux motifs : l'un, que les Germains avaient envoyé contre lui des secours aux Trévires, et l'autre, qu'il ne voulait pas qu'Ambiorix trouvât un refuge auprès d'eux. Ce projet arrêté, il entreprit de jeter un pont sur le fleuve, un peu au-dessus de fouirait où il avait précédemment fait passer l’armée[10]. Les soldats y mirent une grande ardeur, et en peu de jours ce deuxième pont fut établi de la même manière que le premier. César, après avoir laissé une forte garde à la tête du nouveau pont, du côté des Trévires, lit passer au-delà du fleuve tout le reste de l'armée et la cavalerie. Les Ubiens protestèrent en sa présence qu'ils n'avaient aucunement participé à la guerre contre les Romains, et lui exposèrent que les Suèves seuls avaient envoyé du secours aux Gaulois. César, s'étant assuré qu'ils disaient vrai, les chargea d'envoyer chez les Suèves un grand nombre d'éclaireurs (ou plutôt d'espions) pour reconnaître ce qui s'y passait. Peu de jours après, on vint lui apprendre que, avertis de l'arrivée des Romains, les Suèves et leurs alliés, avec toutes leurs troupes et toutes celles de leurs alliés, s'étaient retirés au fond de leur pays, où se trouve une forêt d'une immense étendue, appelée Bacenis, qui sépare les Suèves des Chérusques, et que les Suèves avaient résolu d'attendre les légions à l'entrée de cette forêt[11]... Sur ces renseignements, César ne jugea point à propos de s'avancer plus loin en Germanie ; il repassa le Rhin, fit détruire le pont sur une étendue de deux cents pieds, du côté du territoire des Ubiens, fit fortifier l'extrémité opposée, et y laissa le jeune C. Volcatius Tullus avec une garde de douze cohortes. § IV. — César lance l'armée et appelle tous les brigands de bonne volonté à la recherche d'Ambiorix et au pillage des Éburons. Accident à Aduatuca : mise à feu et à sang du pays des Éburons. Accon, roi des Sénons, livré au supplice. Puis, les blés commençant à
mûrir, César fit partir en avant contre Ambiorix L. Minucius Basilus avec
toute la cavalerie, à travers la forêt des Ardennes, qui est la plus
grande de toute Basilus se conforme à ses ordres.
Après une marche rapide à laquelle personne ne s'attendait, il surprend
une grande partie de la population dans les champs[13] ; et, sur les indications qu'il en reçoit, il pousse à un
certain endroit où Ambiorix se tenait,
sans défiance, avec quelques cavaliers,
et réussit à lui enlever par surprise ses équipages de guerre, ses chars et
ses chevaux. Mais le chef gaulois eut l'heureuse fortune d'échapper de sa
personne à ce péril soudain. Son habitation était entourée d'un bois —
comme le sont presque toutes les habitations des Gaulois, qui, pour se mettre
à l'abri des chaleurs, recherchent le voisinage des forêts et des eaux
courantes —, et là, dans un étroit passage, ses
compagnons et ses amis dévoués ayant pu soutenir et arrêter un instant la
charge des cavaliers de Basilus, il leur fut possible d'amener à Ambiorix un
cheval, sur lequel il s'élança et se trouva bientôt hors de toute atteinte
sous le couvert des bois. On ignore, dit César, si ce fut à dessein ou faute de temps qu'Ambiorix n'avait
point rassemblé ses troupes autour de lui ; mais, ce qui est certain, c'est
qu'il fit secrètement donner avis, de tous les côtés dans la campagne, que
chacun eût à pourvoir à son propre salut. Les uns se réfugièrent dans la
forêt des Ardennes, les autres dans les marais y attenants, et ceux qui
n'étaient pas éloignés de l'Océan se cachèrent dans les îles que forment lès
marées ; un grand nombre s'expatrièrent et cherchèrent un asile chez des peuples
très-éloignés. Cativulce, roi de la moitié des Éburons, qui s'était associé à
l'entreprise d'Ambiorix et qui était très-avancé en âge, ne pouvant supporter
ni les fatigues de la guerre ni celles de la fuite, prit le parti, après
avoir chargé de malédictions Ambiorix, qui l’avait entraîné dans cette
entreprise, de s'empoisonner avec le fruit de l'if, arbre qui croit en
abondance dans Les Sègnes et les Condruses[15], peuples originaires de Puis, il divisa l’armée en
trois corps et fit réunir les bagages de toutes les légions à Aduatuca.
C'est le nom d’un fort situé presque au milieu du territoire des Éburons,
et où Titurius et Arunculeius avaient précédemment établi leurs quartiers d’hiver.
César choisissait ce lieu, non-seulement à cause de sa convenance à d'autres
égards, mais encore parce que, les retranchements élevés Tannée précédente
étant parfaitement conservés, les soldats se trouvaient dispensés d'autant de
travail. Il y laissa pour garde la quatorzième légion, l'une des trois
qui avaient été récemment amenées d'Italie. Il confia le commandement de
cette légion et du camp à Quintus Tullius Cicéron, et lui laissa de plus deux
cents cavaliers. Des trois corps d'armée, il envoya T. Labienus avec trois
légions du côté de l'Océan, dans les contrées qui touchent aux
Ménapiens (c'est-à-dire au nord du
pays des Éburons) ; et C. Trebonius, avec un même
nombre de légions, dans les contrées limitrophes des Aduatiques (c'est-à-dire à l'ouest) ; lui-même résolut de se rendre, avec les trois autres
légions[18], sur les rives de la Sambre[19], qui se jette dans Il n'y avait chez les Éburons,
comme on l’a vu plus haut (est-il dit
dans les Commentaires), ni corps de
troupes prêtes à combattre, ni postes ou places-fortes garnies de défenseurs
sous les armes ; mais la multitude était dispersée de tous les côtés. Chacun
s'était réfugié çà et là, soit dans quelque vallée écartée, soit dans quelque
fourré des bois, soit dans quelque marais impraticable, suivant qu'il avait
espéré pouvoir s'y défendre ou bien s'y cacher. Ces divers lieux étaient
connus dans le voisinage, et il fallait prendre beaucoup de précautions, non
pour le salut de toute l’armée à la fois, laquelle en masse n'avait rien à
craindre, mais pour le salut des soldats isolés, qui faisait partie du salut
commun de l'armée. Car, en même temps que l’avidité du butin entraînait
trop loin beaucoup de soldats, les forêts, dont les chemins étaient
difficiles et couverts, ne leur permettaient pas de marcher en troupes. Si
César voulait atteindre son but et détruire cette race de scélérats[21], il lui fallait envoyer çà et là de nombreux détachements
et éparpiller les soldats ; s'il voulait retenir les manipules sous les
enseignes, comme le demandait la discipline d'une armée romaine, la
difficulté des lieux protégeait les barbares ; et même ils poussaient
l'audace jusqu’à s'embusquer tous séparément pour surprendre les légionnaires
et les envelopper lorsqu'ils se trouvaient dispersés[22]. Au milieu de telles difficultés, on avait bien soin de
prendre toutes les précautions possibles, à ce point que, malgré l’ardeur de
vengeance qui animait toute l’armée, on aimait encore mieux négliger quelque
chose dans la dévastation du pays, que delà pousser à fond en perdant pour
cela quelques soldats. Mais César envoie des courriers aux cités limitrophes
; il les appelle toutes, par l’appât du butin, au pillage des Éburons, afin
que dans leurs forêts la vie de ces Gaulois soit encore plus en péril que
celle des légionnaires ; et en même temps afin que, cernée par une si grande
multitude d’ennemis, la race et le nom de cette cité disparaissent, en
expiation de son crime. Un grand nombre de pillards accourent de tous les
côtés[23]. La dévastation était exercée
sur tous les points du territoire des Éburons, et l'on approchait du septième jour, que César avait
fixé pour l'époque de son retour auprès de la légion laissée à la garde des
bagages. La renommée avait porté au-delà du Rhin, chez les Germains, cette
nouvelle : — On pille les Éburons, et tout
le monde est appelé à venir prendre part au butin[24]. — Les Sicambres, qui sont très-près du Rhin,
rassemblent deux mille cavaliers ; ils passent le fleuve sur des
bateaux et des radeaux, à trente milles au-dessous du lieu où se trouvaient
les restes du pont, et où César avait laissé une garde[25] ; ils entrent sur les premières terres des Éburons qui se
trouvent là devant eux y et s'emparent d'un grand nombre de fugitifs isolés
et de beaucoup de bestiaux, dont les barbares sont très-désireux. Attirés par
le butin, ils poussent en avant. Ce ne sont pas eux que les marais ou les
forêts arrêtent, nés qu'ils sont m milieu des guerres et du brigandage[26]. Ils demandent aux captifs : Où est César ? Ils
apprennent qu'il est parti pour aller au loin, et qu'aussi
toute l'armée s'est éloignée. Alors un des captifs, s'adressant aux Sicambres
: — Pouvez-vous bien, dit-il, poursuivre un si misérable et si mince butin, quand il ne tient qu'à
vous de faire un coup de fortune ? En trois heures vous pouvez parvenir à
Aduatuca, où formée romaine a réuni toutes ses richesses. La garde y est si
peu nombreuse qu'elle ne pourrait même pas garnir le rempart, et que personne
n'oserait sortir des retranchements. — A
l'espoir qu'on fait briller à leurs yeux, les Germains laissent là et cachent
dans les bois le butin qu'ils avaient déjà fait ; puis, guidés par le même
captif qui leur avait donné ces indications, ils courent à Aduatuca. On était au septième jour
depuis le départ de César : Cicéron, qui avait jusqu'alors, suivant ses
instructions, retenu tout le monde dans le camp, ne recevant aucune nouvelle
de son retour, et doutant qu'il pût à un jour près tenir sa promesse, avait
envoyé dans le voisinage cinq cohortes (environ trois mille légionnaires),
pour couper des blés, dans un lieu qu’une simple colline séparait du camp.
Il leur avait adjoint une compagnie d'environ trois cents autres légionnaires
qui avaient été laissés comme malades au moment du départ de l'armée, et qui
depuis lors avaient recouvré la santé. De plus, il avait autorisé une multitude
de valets de l’armée à les suivre avec un grand nombre de bêtes de somme.
A ce moment même, par hasard, surviennent les cavaliers germains, qui, sans
s’arrêter dans leur course au débouché d’un bois voisin, se précipitent à la
porte décumane[27], et tachent de faire irruption dans le camp même. Les
soldats, qui se trouvent ainsi chargés à l'improviste, se troublent, et à
peine la cohorte de garde peut-elle tenir ferme contre cette attaque subite. Les
ennemis se répandent autour du camp pour tâcher d’y pénétrer par quelque
autre point. Ce n'est pas trop de tous les soldats pour défendre les portes
; mais partout ailleurs la difficulté du terrain et la force des
retranchements suffisent pour arrêter les ennemis. L'agitation, le tumulte et
la terreur remplissent le camp.... Un
centurion primipile, P. Sextius Baculus, quoique malade et n'ayant rien mangé
depuis cinq jours, donne l'exemple du sang-froid et du courage à la défense
d'une porte ; d’autres se joignent à lui : on se rassure ; quelques soldats
prennent position sur les retranchements. Cependant les troupes qui étaient
allées au blé entendent des clameurs du côté du camp. Les cavaliers (qui régulièrement accompagnent chaque cohorte) prennent l'avance, et reconnaissent la grandeur du péril.
Mais il ne se trouve là aucun abri où l'on puisse se réfugier ; les soldats des
cinq cohortes nouvellement levées tournent leurs regards vers les tribuns
et les centurions, en attendant leurs ordres. Les plus braves se troublent
dans cette situation imprévue. Les barbares, en apercevant de loin les
enseignes, croient d'abord que les légions reviennent, et ils abandonnent
l'attaque du camp ; mais ensuite, à la vue de si peu de troupes, ils les
chargent de toutes parts. Les valets courent à un tertre voisin ;
mais, vivement chassés de là, ils se rejettent vers les enseignes et les
manipules ; ce qui augmente l'effroi des soldats. De ceux-ci, les uns veulent
qu'on forme le coin[28] pour s'ouvrir un passage jusqu'au camp ; les autres
veulent qu'on prenne position sur une hauteur et que tous partagent le même
sort. Les trois cents vétérans, réunis sous les ordres de C.
Trebonius, s'ouvrent un passage à travers les ennemis, et parviennent au
camp sains et saufs, tous sans exception, en sauvant encore par leur
courage les valets et les cavaliers qui se précipitent sur leurs pas. Quant
aux cinq cohortes, qui avaient d'abord pris position sur une hauteur, ne
sachant ni persister dans cette résolution, ni imiter le mouvement rapide qui
avait sauvé les autres, elles cherchent à faire retraite vers le camp et
s'engagent dans une position désavantageuse. Les centurions s'y font tuer en
combattant pour écarter les barbares, et, grâce à leur courage, une partie
des soldats peuvent encore regagner le camp ; les autres sont entourés par
les barbares et périssent. Les Germains, ayant perdu tout
espoir de forcer le camp, dont ils voyaient les retranchements garnis de
défenseurs, repassèrent le Rhin avec le butin qu'ils avaient déposé dans les
bois. Et telle fut la terreur qui persista dans le camp, même après leur départ,
que, la nuit suivante, C. Volusenus envoyé en avant avec la cavalerie s'y
étant présenté, on ne voulut pas croire sur sa parole que César arrivait
derrière lui, ramenant l'armée saine et sauve. La terreur s'était emparée
de tous à ce point qu'ils en avaient presque perdu l'esprit, prétendant que
toute l'armée avait été détruite, que la cavalerie seule avait pu se sauver,
et soutenant que, si l'armée était saine et sauve, les Germains n'auraient
point osé attaquer le camp. L'arrivée de
César dissipa cette terreur[29]. Partant de nouveau d'Aduatuca
pour écraser les Éburons, César lança dans toutes les directions la
multitude de pillards appelés des cités limitrophes. Tous les villages et
toutes les habitations que chacun pouvait apercevoir étaient incendiés ; de
toutes parts on poussait devant soi le butin[30] ; non-seulement les blés étaient consommés par une si
grande multitude d’hommes et de bêtes de somme, mais encore ils avaient été,
cette année-là, en majeure partie versés par le mauvais temps et les pluies ;
de sorte que, si quelque Éburon pouvait parvenir à se soustraire à toutes les
recherches, néanmoins il semblait encore qu’il dût périr de faim après le
départ de l’armée[31]. Et par la dissémination d'une si girande armée dans tout
le pays, souvent on en vint à mettre la main sur des hommes qui affirmaient,
non-seulement qu'ils avaient vu passer Ambiorix dans sa fuite, mais même
qu'il ne pouvait pas encore être tout à fait hors de vue ; de sorte que, dans
l'espoir de l'atteindre et dans la conviction de mériter ainsi d'être comblé
de faveurs par César, on faisait des efforts presque surnaturels, tant
on y mettait d'ardeur, et que souvent il s'en fallut de bien peu qu'on
n'atteignît ce but de toutes les aspirations. Mais toujours Ambiorix, à la
faveur des forêts et des défilés du pays, sut se cacher et s'échapper ; et
enfin, profitant des ténèbres de la nuit, il gagna sans être aperçu d'autres
régions et d'autres retraites, accompagné seulement de quatre cavaliers,
auxquels seuls il osait confier sa vie. Après avoir dévasté ces contrées,
César ramena l'armée, diminuée de deux cohortes (douze cents hommes),
à Durocortorum des Rhèmes[32]. Il y convoqua l’assemblée de On le voit, c'est toujours de la part de César même langage et mêmes moyens politiques ! Lui, qui prit dans le sénat romain la défense de Catilina et tâcha de le faire échapper à la juste rigueur des lois, il appelle ici conjuration, complot, l'entente de deux cités pour recouvrer la liberté perdue : liberté qu'il leur a enlevée lui-même en s'entendant avec quelques traîtres de ces mêmes cités ; et il amène devant l'assemblée des chefs gaulois le digne roi des Sénons qui a été le promoteur de cette généreuse entreprise, et, sous la pression des légions, il le fait condamner à mort par les Gaulois eux-mêmes. Quel triste rôle de part et d'autre ! Quelle confusion captieuse du fait de la force avec le droit moral ! Quelques autres Gaulois,
redoutant le jugement, prirent la fuite. Après leur avoir interdit le feu et
l'eau[34], César plaça les légions en quartiers d’hiver, deux
chez les Trévires, deux chez les Lingons, et les six autres chez les Sénons,
à Agendicum[35]. Puis, quand il eut pourvu aux vivres, il partit,
suivant son habitude, pour aller tenir rassemblée en Italie. § V. — Conclusions sommaires concernant cette première époque de la guerre. De tous les faits dont nous venons de suivre l'histoire, durant les six premières années de cette lutte de nos ancêtres contre les Romains envahissant le territoire propre de leur race, nous pouvons conclure : 1° Que les cités-mères de la vieille Gaule ont commis cette même faute qui avait déjà été si fatale à leurs colonies émigrées en Italie, la faute politique dont parle Tacite, d'avoir combattu isolément, au lieu de s'être réunies contre l'ennemi commun ; et que, par suite de cette faute capitale, elles ont dû succomber aussi toutes, les unes après les autres, devant la puissante et nombreuse armée de Jules César, comme l'indique le sentencieux historien, en ces termes : — Et rien ne nous sert davantage contre les plus puissantes nations, que leur défaut d’entente commune ; il est rare que deux ou trois de leurs cités se réunissent pour repousser un danger commun ; de sorte que, combattant isolément, toutes en viennent à être vaincues[36] ; 2° Que Jules César, à l'imitation de la politique perfide
et peu honorable du sénat romain contre les Gaulois d'Italie, n'a cessé de
semer la discorde parmi les cités de 3° Que la supériorité incomparable des armes des légions,
avec leurs compagnies d'ouvriers, leurs équipages et leurs machines de
guerre, l'habitude des campements, la science et la pratique de l'attaque des
places, ont rendu bien facile à César la conquête de 4° Que César porta ainsi la guerre dans toute la vieille Gaule, de cité en cité, en prenant toujours l'offensive sous de vains prétextes, ou même sans en alléguer aucun ; qu'il fit massacrer ou vendre pour l'esclavage des multitudes de Gaulois, jusqu'à détruire plus ou moins complètement cinq ou six peuples distincts : d'abord les Helvètes avec leurs alliés, puis les Vénètes, les Aduatiques, les Usipètes avec les Tenchtères, et enfin les Éburons ; ce qui commence à démontrer la véracité du texte de Suétone où il est dit que César poussa la guerre de Gaule avec une fureur sauvage[37]. A l'époque de cette guerre où nous arrivons maintenant, de tout le territoire gaulois envahi par César et compris (ainsi que le rappelle Suétone) entre les Pyrénées, la ligne des Cévennes, le haut Rhône, les Alpes, le Rhin et l'Océan, il ne restait plus que deux contrées où le conquérant n'eût pas encore conduit les légions, à savoir, deux contrées qui présentent de grandes montagnes. En effet, du côté de l'est, César n'avait pas pénétré dans les montagnes des Vosges. Là, deux peuples, les Lingons[38] et les Leuces[39], lui prêtaient leur appui plus ou moins volontaire ; mais le récit ne dit rien de la soumission des Médiomatrices[40], placés entre les Leuces et les Trévires. S'étaient-ils soumis ou alliés à César contre Arioviste, comme firent les Leuces, les Lingons et les Séquanes, alors que César, guidé par Divitiac, marcha contre ce Germain entre les Vosges et les monts Jura ? ou bien s'étaient-ils, depuis lors, unis aux Trévires, limitrophes de leur cité, et avaient-ils combattu avec eux et partagé leur sort ? Du côté du sud, à la frontière même de la province de
César et au cœur de César en avait fait le tour à l'opposé de Et cependant, à cette heure suprême, nous allons voir un
jeune guerrier de |
[1] Duplicatoque earum cohortium numero, quas cum Q. Titurio amiserat. — Évidemment, d'après ce texte, les légions de César étaient composées chacune de dix cohortes, ainsi que nous l'avons admis dans nos préliminaires ; et César, qui avait précédemment tout au moins huit légions, en a maintenant au moins neuf et cinq cohortes.
[2] Nous allons voir plus loin qu'aucun de ces peuples n'était réellement en armes, et que cette assertion de César n'est qu'un prétexte dont il se sert pour couvrir la fureur de ses vengeances, dont le lecteur va pouvoir juger.
[3] On reconnaît ici avec certitude que les Nerviens n'étaient nullement sous les armes, bien que César l'ait affirmé plus haut.
[4]
On voit que César jouait complètement le rôle de protecteur de
[5] Ainsi les Ménapiens non plus n'étaient point en armes, malgré l'affirmation précédente de César. Il est donc en contradiction avec lui-même, et l'on en doit conclure qu'il s'agit ici d'incursions dévastatrices, poussées spontanément parmi ces trois cités gauloises.
[6] On voit ici, avec toute certitude, que trois légions de l'armée de Gaule étaient composées de trente cohortes. Ainsi, chaque légion se composait réellement de dix cohortes, comme nous l'avons admis dans nos préliminaires sur les moyens militaires de César en Gaule.
[7] Nous signalons ici au lecteur ces expressions du texte qui doivent nous servir d'appui dans une discussion importante qu'on trouvera plus loin.
[8] Nouvelle preuve de la facilité avec laquelle on pouvait tromper la race gauloise et la faire tomber dans un piège, en flattant sa confiance dans sa propre force militaire.
[9] Salluste, Catilina, LII.
[10] Ce deuxième pont sur le Rhin fût établit comme on va le voir ci-après, du territoire des Trévires (rive gauche), au territoire des Ubiens (rive droite) ; ce qui le place approximativement au voisinage de Coblentz. Or, comme il était situé sur le cours du fleuve un peu au-dessus du premier, dit César, il s'ensuit que ce premier pont, dont la position n'a point été indiquée précédemment dans le texte, doit avoir été établi un peu plus bas que Coblentz, et par conséquent non bien loin de Bonn.
[11] Ici César a intercalé dans le récit de la guerre une notice sur les mœurs et les coutumes des Gaulois et des Germains.
[12]
Millibusque amplius quingentis — plus de
500 milles (plus de
[13] On voit encore ici que les Éburons n'étaient point en armes, contrairement à l'affirmation précédente de César.
[14] Doit-on bien ajouter foi à ces malédictions que César place dans la bouche de Cativulce ? La mort de ce digne et courageux Gaulois ne ressemble-t-elle pas plutôt à celle que Caton se donna lui-même à Utique, six ans plus tard et dans des circonstances tout à fait semblables ?
[15] Ces deux peuples occupaient la région méridionale du pays de Liège. Les Condruses étaient dans le Condroz (au sud-ouest de Liège) ; et probablement les Sègnes étaient dans le pays contigu au Condroz du côté de l'ouest.
[16] Explorata re quæstione captivorum. — Probablement le véritable sens de ce passage est celui-ci : en faisant donner la question aux captifs. Mais, dans le doute, nous avons dû adopter l'autre sens, qui est plus favorable à l'auteur du récit.
[17] Si ita fecissent, fines eorum se violaturum negavit. — On voit par là que César va passer sur le territoire de ces peuples. Il est important de le remarquer.
[18] César avait donc alors en Gaule plus de onze légions, à savoir, douze cohortes, laissées précédemment à la garde du pont du Rhin, et dix légions qui figurent ici.
[19]
Il y a dans le texte : — Ad flumen Scaldim, quod in
finit in Mosam, extr-masque Arduennæ partes ire constituit... VI, XXXII. — Voilà encore
ici une erreur géographique évidente, qu'on ne saurait imputer à César, et que
nous avons dû rectifier comme l'a proposé Hubert, cité par Hotman, et comme le
veut la nature des choses, en substituant Sabim
à Scaldim, c'est-à-dire
En effet : 1° L'Escaut ne se jette point dans
[20] Où était situé ce point de ralliement de l'armée de César, Aduatuca ?
L'emplacement du fort d'Aduatuca des Éburons a été l'objet de beaucoup de recherches de la part d'illustres savants de France, de Belgique et d'Allemagne, dont nous avons plusieurs publications sous les yeux. Oserions-nous dire qu'on n'y a peut-être pas apporté une méthode assez rigoureuse et qu'il serait possible de restreindre davantage l'incertitude qui règne encore à ce sujet, au moyen d'un Tableau synoptique de toutes les données que fournissent les divers textes de César ? Qu'on nous permette de présenter ce tableau.
Pour éviter toute confusion des choses, il est bien entendu ici que le nom d'Aduatuca, tout court, indiquera, comme dans les Commentaires (VI, XXXI), ce fort situé presque au milieu du territoire des Éburons, où Sabinus et Cotta avaient été placés en quartiers d'hiver : fort que nous distinguons nettement, soit de l’oppidum des Aduatiques situé chez ce dernier peuple sur des rochers très-escarpés, et dont César parle aussi, mais qu'il ne nomme point (II, XXIX) ; soit de la ville des Tongres, désignée au temps d'Auguste sous ce même nom, Adualtica ou Atuatuca Tungrorum, et dont nous dirons un mot à la fin de cette note.
Rappelons d'abord une remarque que nous avons faite en son lieu et dont on doit tenir compte ici, à savoir : que César n'indique nullement dans quelle direction, à partir d'Aduatuca, se mirent en marche les quinze cohortes de Sabinus et Cotta (V, XXXI). On a admis jusqu'à ce jour qu'elles se dirigèrent sur le camp de Cicéron, en se fondant pour cela sur cette parole de Sabinus dans le sein du conseil : Ad proximam legionem perventuros (V, XXIX). Mais il est certain, d'après le style habituel de César aussi bien que d'après la grammaire, que cette expression, proximam, n'offre rien de comparatifs et qu'elle indique simplement une légion très-rapprochée d'Aduatuca, comme étaient l'une et l'autre légion, aussi bien celle de Labienus que celle de Cicéron. Or, celle de Cicéron étant du côté de l'ouest et chez les Nerviens, ennemis des Romains, tandis que celle de Labienus était du côté du sud-ouest et chez les Rhèmes, amis des Romains, et Labienus lui-même étant le principal lieutenant de César, il était naturel que, pour faire retraite d'Aduatuca, les quinze cohortes allassent se réfugier auprès de Labienus plutôt qu'auprès de Cicéron. Et, de fait, les quelques fuyards qui échappèrent à la mort se dirigèrent sur le camp de Labienus (V, XXXII). Par conséquent, c'est plutôt dans la direction du camp de Labienus qu'il faut chercher la grande vallée où les quinze cohortes furent écrasées après leur sortie d'Aduatuca, que dans la direction du camp de Cicéron, comme on l'a fait, parait-il, jusqu'à ce jour.
Quelle était la distance d'Aduatuca au camp de Cicéron,
à celui de Labienus, et la distance de ces deux camps entre eux ? — A cet
égard, les textes fournissent trois données assez précises, à savoir (d'après
la collation des manuscrits par André Frigell) : 1° que le camp de Cicéron se
trouvait à environ 50 milles (
Traçons ce triangle sur un morceau de papier, à l'échelle de la carte qu'on voudra consulter ; découpons-le exactement ; plaçons-le sur la carte, la base tournée au sud-est, le sommet au nord-ouest, et inscrivons-y, à l'angle est, l'initiale d'Aduatuca, à l'angle nord-ouest celle de Cicéron, et à l'angle sud celle de Labienus. On aura ainsi un petit moyen géographique très-simple pour contrôler et discuter clairement toutes les opinions émises au sujet de la position relative de ces trois lieux sur le terrain. Car il est obligatoire pour tous que ces trois lieux soient très-approximativement dans la position relative des trois sommets du triangle présenté sur la carte : ou bien il faut renoncer aux indications fournies par César et rester dans le vague. Usons donc nous-même tout d'abord de ce moyen.
Quelle était la position d'Aduatuca par rapport au pays
des Éburons, à celui des Rhèmes et à celui des Nerviens ? — Nous connaissons
assez exactement la position du camp de Labienus. Il était placé aux confins
des Trévires, chez les Rhèmes (V, XXIV) : plaçons le
point correspondant du triangle sur un lieu convenable de cette frontière, près
de Bouillon, au nord-est de Sedan. — Le camp de Cicéron était placé chez les
Nerviens ; amenons le point correspondant sur le territoire des Nerviens ; il coïnciderait assez exactement avec
la position de Gembloux (déjà adoptée par
Fixons les idées en disant simplement qu'Aduatuca des Éburons parait avoir été situé dans les environs de Spa ; ou même tout près de Spa, si l'on veut placer le camp de Cicéron à Temploux, près de Namur. Tenons-nous-en à cette approximation, et vérifions ce premier aperçu par le rapprochement de tous les autres textes de César qui s'y rattachent.
Quelle était la situation géographique d'Aduatuca par
rapport au Rhin et à
Aduatuca se trouvait presque au milieu du territoire
des Éburons (VI, XXXI).
— La plus grande partie des Saurons était entre
Aduatuca était près du Rhin, dit César par la bouche de Titurius (V, XXIX). — Et pour dire cela, lui qui connaissait bien la position exacte d'Aduatuca, il s'exprime ainsi : Subesse Rhenum ; comme si nous disions en français : le Rhin est là derrière nous : le Rhin est à deux pas de nous. Mais le rôle de Titurius est d'exagérer un peu dans l'intérêt de l’opinion qu'il soutient avec force ; son expression s'applique donc assez bien à la situation géographique de Spa, qui est à trois journées de marche du Rhin.
Ambiorix, partant d'Aduatuca avec ses cavaliers, pour
se rendre chez les Aduatiques, qui
étaient limitrophes de ses États, poussa la marche de jour et de nuit. — Cum equitatu in Aduaticos, qui erant ejus regni finitimi,
profit ciscitur : neque diem neque noctem intermittit (V, XXXVII). —
Évidemment ces expressions de César impliquent l'idée d'une longue traite
accomplie pour se rendre d'Aduatuca dans
le pays des Aduatiques (province de
Namur). Or, comme le pays des Aduatiques
était contigu à la rive gauche de
Nous venons de voir ci-dessus que César, à son deuxième
retour de Germanie, a repassé le Rhin à la hauteur du territoire des Trévires
(VI, VIII et XXVIII), c'est-à-dire
entre Bonn et Coblentz ; que de là, d'abord il a lancé sa cavalerie à travers la
forêt des Ardennes ; puis, qu'il l'a suivie lui-même avec toute l'armée
(probablement par la grande voie qui vient des bords du Rhin passer à Malmédy
et Spa) ; qu'il est arrivé ainsi à Aduatuca,
y a laissé tous les bagages, et a divisé l’armée en trois corps, afin de battre
le pays dans trois directions à la fois. Or, pour une armée dirigée ainsi, du
confluent de
Enfin, nous allons voir ci-après deux mille cavaliers
sicambres, accourant au pillage des Éburons sur l'invitation expresse de César,
passer le Rhin à trente milles (
On peut donc conclure, en définitive et par de bonnes raisons :
1° Que le véritable emplacement de l'Aduatuca des Éburons ne saurait être notablement éloigné de la région où se trouve aujourd'hui Spa ;
2° Que, dans cette région, ce fort a pu être placé au
nord et à environ deux mille pas (
Un dernier mot. Plusieurs savants, d'une autorité dont
on doit tenir grand compte, se fondant sur la similitude du nom d'Aduatuca,
mentionné par César, et sur le fait historique que les Tongres sont venus, sous
Auguste, occuper le pays des Éburons exterminés par César, ont admis que l'Aduatuca des Éburons (dont César a parlé dans les
termes qu'on vient de lire) était situé à la place même où l'on voit encore
aujourd'hui l'Aduatuca des Tongres, la ville de Tongres, qui est effectivement
indiquée dans l'itinéraire d'Antonin, dans Ptolémée, dans Ammien Marcellin,
sous le nom plus ou moins exact de Aduatuca
Tungrorum. Or, 1° il est clair que la position géographique de la
ville de Tongres ne se trouve ni entre
[21] En effet : quels scélérats ! Des hommes qui avaient osé défendre leur pays contre l'invasion romaine. Voilà, de la part de César, un trait d'audace morale qui mérite bien qu'on le signale.
[22] Voici donc les légionnaires en butte à une guerre de partisans (guérillas), cela ne nous paraîtrait guère explicable, si nous ne nous rappelions que ces hardis Gaulois d'Ambiorix devaient être armés des glaives des quinze cohortes qu’ils avaient précédemment écrasées dans une vallée de leur territoire.
[23] VI, XXXIII.
[24] VI, XXXIV.
[25] Probablement donc, d'après ce que nous avons dit plus haut, ce passage du Rhin par les Sicambres eut lieu très-près de Bonn.
[26] VI, XXXIV.
[27] La plus grande porte du camp, qui était placée par derrière, relativement à la position du camp en face de l'ennemi. Aduatuca des Éburons était donc bien un simple camp retranché.
[28] Qu'on se range en forme de coin, pour fendre la foule des ennemis.
[29]
Sic omnium animos timor præoccupaverat, ut pæne
alienata mente, deletis omnibus copiis equilatum tantum se ex fuga recepisse
dicerent ; neque, incolumi exercitu, Germanos castra oppugnaturos fuisse
contenderent. — Ce texte, et en général tout ce que César raconte
ici de la terreur délirante de celle quatorzième légion, nouvellement levée en
Italie, confirment pleinement les observations que nous avons présentées plus
haut sur le véritable motif qui, l’année précédente et dans ce même fort
d'Aduatuca, avait poussé les quinze cohortes de Sabinus et Cotta à en sortir.
En effet : de même que la quatorzième légion, les quinze cohortes étaient
composées de soldats nouvellement levés dans
[30] Le butin ; il faut entendre par ce mot (que nous employons ici pour rendre le mot latin præda) aussi bien l'espèce humaine que les troupeaux et tout le reste.
[31] Il semblerait impossible de pousser plus loin cette basse et atroce vengeance de la défaite de Sabinus et Cotta. Néanmoins César, qui parle si souvent de sa clémence, ne voudra pas se contenter de l’affreuse probabilité qu’il vient de signaler ; et deux ans plus tard, sans nouveau motif, nous le verrons de nouveau, dans ce pays des Éburons, traquer de la même manière ceux qui auront pu lui échapper la première fois.
[32] Aujourd'hui Reims.
[33] De Accone... more majorum supplicium sumpsit. — Accon fut exécuté par les légionnaires. Dans ce genre de supplice, l'homme tout nu était suspendu par le cou, la tête prise dans une fourche, à l'extrémité supérieure d'un poteau solidement planté ; puis, il était battu de verges jusqu'à la mort. (Suétone, Nero Claudius Cæsar, XLIX.)
[34] C'est-à-dire après avoir défendu à tout le monde de les admettre au foyer ou à la table, ou sous le toit, ou dans la ville.
[35] Aujourd'hui Sens.
[36] Tacite, Agricola, XII. — Le texte nous a servi d'épigraphe pour cette PREMIÈRE ÉPOQUE de la guerre de Gaule.
[37] Suétone, Julius Cæsar, XXIV.
[38] Peuple qui occupait le pays de Langres, étendu à l'est jusqu'aux sommets des Vosges.
[39] Peuple du pays de Toul.
[40] Peuple du pays de Metz, étendu au sud-est jusqu'au Rhin.