HISTOIRE DE LA RÉGENCE PENDANT LA MINORITÉ DE LOUIS XV

TOME PREMIER

 

CHAPITRE VI. — L’opposition à la bulle Unigenitus (2 septembre 1715 - 12 novembre 1716).

 

 

Reniement de la politique religieuse. — La bulle Unigenitus, comment reçue et publiée ? — L’Instruction pastorale. — Les évêques opposants disgraciés. — La Bulle reçue par le Parlement et la Faculté de théologie. — Revirement des débuts de la Régence. — Haine contre les Jésuites. — Travaux de l’Assemblée du clergé. — Le sermon du P. de via Motte. — Rigueurs contre les Jésuites. — Rétractation de la Faculté de théologie. — Dispute générale. — Méthodes d’apaisement : le silence, l’envoi des négociateurs. — Mandements épiscopaux. — Libelles. — Brefs et bulles. — Lettre ostensible du Régent au cardinal de la Trémoille. — Accueil fait par le Pape. — Congrégation cardinalice. — Bruits d’accommodement. — Mesure spirituelle contre les Jésuites. — Dispositions du Sacré-Collège. — Lassitude en France. — Nouvelles mesures contre les Jésuites.

 

Revirement de la politique religieuse

« Le 1er septembre 1715, quelques heures après la mort de Louis XIV, le cardinal de Noailles, mandé par le Régent, était arrivé à Versailles d’où la disgrâce le tenait éloigné depuis plus d’un an et demi. Le dédain du duc d’Orléans pour les discussions théologiques, son incrédulité éclatante ne permettaient pas de lui supposer aucune opinion dans la querelle religieuse qui déchirait l’Église de France ; tout au plus ses sympathies l’eussent-elles attiré vers le parti le plus maltraité sous le règne qui venait de finir si la question en litige ne s’était ramenée pour lui à une affaire personnelle. Au cours de la journée décisive du 2 septembre, dans la Grand’Chambre, les jansénistes soutenaient les prétentions du duc d’Orléans contre celles du duc du Maine qui ralliait à sa cause les ultramontains. Victorieux, le Régent se montra magnifique et donna au cardinal la présidence du Conseil de conscience. Pour un homme qu’on s'apprêtait à « décardinaliser » quelques jours auparavant[1], l’événement était notable ; en un moment il éclaira l’opinion.

 

La bulle Unigenitus - Comment reçue

Celle-ci se passionnait pour la querelle qui, depuis deux ans, avait transformé une discussion théologique de tout repos en unie polémique confessionnelle sans pitié. Pendant six mois, le mercredi de chaque semaine, une congrégation de cinq cardinaux flanqués de onze théologiens, causait du livre du Père Quesnel et d’autre chose. Comme ils ne concluaient guère, ils eurent ordre de tenir deux séances hebdomadaires. Ensuite, le pape lui-même y vint en personne et, après dix-huit mois de discussions la sentence pontificale fut insérée dans la bulle Unigenitus datée du 8 septembre 1713 et qui arriva, le 25, à Fontainebleau. En quelques heures la Cour fut instruite et la nouvelle gagna Paris et, de là, les provinces[2]. Le texte passait bientôt de main en main et Daguesseau, toujours perspicace, écrivait dans son journal que cette bulle serait « la croix, non seulement des théologiens, mais des premiers magistrats du royaume[3] ». L’évêque de Senez, Jean Soanen ne peut se tenir d’appeler « vraie tempête ce nouveau décret qui fait trembler, dit-il, pour l’Église de France[4]. » Le P. Le Tellier triomphait. « Il comptait nous dit Daguesseau, le nombre des propositions condamnées, comme César aurait pu compter celui de ses victoires : Cent une propositions condamnées, s’écriait-il, quelle honte pour les approbateurs d’un tel livre[5]. » A Rome, le pape gémissait, dit-on, épanchait son chagrin dans le sein d’un ami qui lui demandait pourquoi cette censure de cent une propositions : « Eh, monsieur Amelot, monsieur Amelot, que vouliez-vous que je fisse, je me suis battu à la perche, pour en retrancher, mais le P. Le Tellier avait dit au Roi qu’il y avait dans ce livre plus de cent propositions censurables ; il n’a pas voulu passer pour menteur, et on m’a tenu le pied sur la gorge pour en mettre plus de cent, pour montrer qu’il avait dit vrai, et je n’en ai mis qu’une de plus. Voyez, voyez, monsieur Amelot, comment j’aurais pu faire autrement[6]. »

 

Et publiée ?

Il s'agissait de recevoir la Bulle, Daguesseau souhaitait la voir déposée au greffe du Parlement[7], le ministre Voysin songeait à une assemblée générale du clergé, Fénelon suggéra de « faire d’abord à Paris une assemblée de trente ou quarante, tant cardinaux qu’archevêques et évêques pour accepter la bulle d’une manière courte, claire, précise, pure, simple et absolue. Le procès-verbal de cette assemblée peut servir de modèle à ceux des provinces. On peut y dresser un modèle de mandement que les provinces suivront aussi[8]. »

Le cardinal de Noailles s’empressa de désavouer l’approbation donnée jadis par lui au livre condamné (28 septembre), et, deux semaines plus tard, il chercha dans un discours à justifier cette approbation[9] (16 octobre). Ces fluctuations s’expliquaient par l’inquiétude générale des esprits. Chacun parlait de la bulle à sa manière et le pape s’inquiétait de l’accueil qui lui serait fait en France[10]. Après de longs délais, une commission établit un rapport qui demanda six séances. Le rapport conclut que la bulle contenait la doctrine de l’Église et que l’assemblée ouverte le 16 octobre l’acceptait avec respect et soumission, s’associait aux condamnations prononcées par le pape et arrêterait, avant sa séparation un modèle d'Instruction pastorale. Quarante évêques adhérèrent à l’avis de la commission. Neuf autres voulurent attendre l’Instruction pastorale, afin de conformer leur conduite a celle du cardinal de Noailles dont l’adhésion eût entraîné le reste des opposants, mais il fut impossible de l’obtenir. On lui proposa de concerter avec lui l’Instruction pastorale, il s’y refusa.

 

L’instruction pastorale

Le 1er février, cette Instruction fut approuvée par quarante évêques et Noailles, parlant au nom de huit autres, soutint que le dissentiment ne portait pas sur la foi mais que lui et les siens réclamaient des explications. Cette opposition ne détourna pas rassemblée d’adopter l’Instruction pastorale, mais le résultat commençait à donner de l’inquiétude. « Si la bulle était à refaire, écrivait le cardinal de la Trémoille, notre ambassadeur à Rome, Sa Sainteté y prendrait plus de garde qu’elle n’a fait[11] » et Polignac, plus prévoyant, disait : « Si le pape traite le cardinal de Noailles avec rigueur et le veut forcer sans autre cérémonie à signer la Constitution, voilà un homme cabré avec toute sa suite, qui résistera jusqu’au bout et qui se laissera pousser aux dernières extrémités[12]. » Ce qui ramassait quelques années d’histoire en quelques lignes.

 

Les évêques opposants disgraciés

Le résultat le plus certain et le plus durable de l’assemblée avait consisté à couper en deux partis irréconciliables l’épiscopat français. L’assemblée s’était séparée le 5 février et, le surlendemain, Noailles recevait du chancelier de Pontchartrain l’ordre de ne plus se présenter à Versailles[13]. Ses partisans furent également frappés, ayant reçu l’ordre de regagner leurs diocèses dans les trois jours. Ils obéirent, mais l’un d’eux, l’évêque de Senez écrivait au cardinal de Noailles : « Après tout, au pis aller, un appel au concile général serait-il si extraordinaire, si criminel, puisque la France l’a souvent employé légitimement pour arrêter Rome... A Dieu ne plaise qu’on en vienne là ! On ne prend l’émétique qu’à l’extrémité[14]. » Après le tour des évêques vint le tour des magistrats. Le 9 février 1714, le président de Mesme et les gens du Roi furent appelés à Versailles. Louis XIV fut vif, presque violent et menaçant. Il dit qu’on ne jouât pas avec lui qu’on s’en trouverait mal, « il avait le pied levé sur eux et s’ils faisaient la moindre bronchade, il leur marcherait à deux pieds sur le ventre. Il ajouta que le chemin n’était pas long de son cabinet à la Bastille[15] ». Tout cet appareil avait pour but d’imposer l’enregistrement pur et simple de la Bulle.

 

La bulle reçue par le Parlement et la Faculté de théologie

Le 14 février, Joly de Fleury, avocat-général requit l’enregistrement qui ne fut retardé quelques instants que par une fougueuse improvisation de l’abbé Pucelle, conseiller-clerc ; et tout fut voté, tellement que Louis XIV put écrire : « J’ai été obligé de modérer le zèle de mon Parlement de Paris[16]. » Dix membres seulement avaient osé appuyer l’opposition de l’abbé[17]. La bulle fut envoyée à tous les évêques ainsi que l’instruction pastorale. Plus de soixante-dix de ceux qui vivaient dans les provinces se joignirent aux quarante de l’assemblée de sorte que la Constitution se trouva reçue dans plus de cent diocèses ; quelques évêques tinrent une conduite particulière : six ne publièrent pas la bulle, un l’expliqua par un mandement, deux autres firent de même, trois ou quatre eurent une conduite mitoyenne ; tous les autres, au nombre d’environ cent dix, acceptèrent unanimement. Le 5 mars, la bulle fut reçue à la pluralité des suffrages par la Faculté de théologie de Paris. Noailles cherchait à gagner du temps, il y réussit pendant six mois sous prétexte de travailler à une Instruction pastorale. Le 17 octobre 1714, il envoya son projet qui parut insuffisant et le Roi envoya à Rome Amelot de Chaillou solliciter du pape un concile où on jugerait les opposants. Des lettres de Rome, datées du 13 août 1715, arrivèrent à Paris au lendemain de la mort du Roi et apprirent que les cardinaux de Rohan et de Bissy avaient demandé au pape, de la part de Louis XIV, la convocation d’un concile national, l’envoi de légats pontificaux et la décardinalisation du cardinal de Noailles. C’est sur ces entrefaites que s’ouvrait la Régence, et Paris janséniste répétait avec satisfaction la réponse du duc d’Orléans à Rohan et à Bissy qui lui représentaient que le feu Roi les avait chargés de finir au plus tôt l’affaire de la Constitution. « Et moi, Messieurs, dit le Régent, je vous en tiens déchargés ; ainsi n’y pensez plus[18]. » Et les Parisiens de conclure que la Constitution perd quatre-vingt-quinze pour cent[19].

 

Revirement des débuts de la Régence - Haine contre les Jésuites

Après la cassation du testament du Roi, l’autorité du Régent semblait n’avoir, de longtemps, rien à craindre. Le nonce Bentivoglio, les Jésuites et les évêques constitutionnaires pensaient néanmoins s’opposer efficacement par leurs cabales à la fortune renaissante du cardinal de Noailles. Le nonce attirait chez lui, par pelotons, et quelquefois la nuit, les plus emportés, concertait avec eux des mesures pour prolonger l’assemblée du clergé jusqu’à la fin de novembre afin d’avoir toujours sous la main un corps épiscopal en état de résister à Noailles et à ses partisans. Ces brouillons allaient jusqu’à insinuer que le Saint-Père prendrait fort mal la nomination du cardinal à la tête de affaires ecclésiastiques, que le père Le Tellier devait faire partie du Conseil de conscience, que les Jésuites enfin s’ils n’étaient amis utiles pouvaient devenir ennemis redoutables. Le cardinal éclairait le Régent et lui rappelait ce que, depuis douze ans, les Jésuites avaient tenté pour détruire entièrement les libertés de l’Église gallicane et y substituer en France la doctrine de l’infaillibilité pontificale. Le prince ne voulut rien régler sur ce sujet avant que sa Régence eût été confirmée en lit de justice[20], mais il n’attendit pas pour ouvrir les portes de la Bastille et de Vincennes à quelques prisonniers. Saint-Simon a imaginé un malheureux enfermé depuis trente-cinq ans « qui ne sachant plus où donner de la tête », demande en grâce d’être logé, nourri, vêtu dans le Château le reste de ses jours » ; on l’y retrouvera le 14 juillet 1789 ! Dangeau se contente d’avancer qu’on libéra « beaucoup » de prisonniers ; Buvat, plus exact, parle de quatre ecclésiastiques : Lenoir, d’Albizzi et [Duplessis ?] auxquels il associe l'abbé Servien dont l’internement relevait non du jansénisme mais de la morale ; un pamphlet de l’année 1726 parle aussi de quatre prisonniers à la Bastille et deux à Vincennes[21]. C’est à ce chiffre que paraît s’être borné l’arbitraire royal.

 

Haine contre les Jésuites

Le Père de la Rue[22], le Père du Trévou[23] se donnaient de grands mouvements pour sauver du naufrage le P. Le Tellier, sur qui le Régent prenait sa revanche[24], disant que le cardinal n’ayant plus à craindre d’être Etranglé parle jésuite, tout devait s’aplanir promptement[25]. On ne saurait dire à quel point était poussée l’animosité contre les Jésuites. Chaque jour ils recueillaient dans Paris une nouvelle mésaventure. Comme le cardinal traversait le Pont-Neuf, un jésuite ne le salua pas ; aussitôt un officier le saisit au collet et lui crie : « De la part de tous les diables, tu salueras ton archevêque ! » Les Dames de la Halle se qualifiaient entre elles de « Jésuite » et « pire qu’un Jésuite[26] ». Toutes les disgrâces qui atteignaient les religieux étaient applaudies, commentées, exagérées. Un jour on raconte que le P. Le Tellier, pour sauver sa pension de 2.000 écus a consenti à livrer au Régent beaucoup de papiers qu’il détenait par devers lui[27] ; un autre jour sa pension n’est plus que de quatre mille livres, réduites à quatre cents[28] ; bientôt on saura qu’un matin, sa messe dite, l’ancien confesseur ayant vendu ses chevaux et son carrosse, congédié les gens, s’est retiré à Amiens[29], l’évêque de Bourges ayant refusé de le recevoir dans son diocèse[30] ; sa dernière étape sera à La Flèche où il mourra oublié.

 

Travaux de l'Assemblée du Clergé

On avait d’autres sujets de préoccupation. Dès le 1er octobre, la Faculté de Théologie de Paris se réunissait au complet, c’est-à-dire avec tous ses docteurs exclus ou exilés et au syndic Le Rouge substituait le syndic Ravechet aussi pieux qu’instruit, et intraitable sur la question de la Bulle[31]. Sa réputation était telle, même à Rome, qu’on n’était pas éloigné d’y découvrir une aggravation du choix fait de Noailles pour la présidence du Conseil de conscience. Le cardinal Fabroni, qui entraînait le Sacré-Collège vers les rigueurs aggravées de violences, trouvait dans le nonce Bentivoglio un collaborateur animé des mêmes passions et partisan des mêmes moyens. Ils n’oubliaient rien pour faire durer l’Assemblée du clergé, nonobstant le désir publiquement exprimé par le Régent de sa prochaine clôture[32]. Cette Assemblée offrait le regrettable spectacle de discussions d’où la gravité était bannie et remplacée par des « paroles vives et piquantes ». Son principal souci portait sur l’examen de deux écrits : les Hexaples et le Témoignage de la vérité dans l’Eglise. Le premier de ces ouvrages consistait en une collection de passages des Pères servant à justifier la doctrine du Père Quesnel ; le deuxième subordonnait les pasteurs à leur troupeau. Avant la mort du Roi, la censure n’était pas douteuse, il n’en allait plus de même après cet événement.

Il y eut presque autant de variations que de séances » ; les uns alléguaient le bien de la paix, les autres soutenaient que le silence serait une lâcheté. Finalement les deux livres furent condamnés avec des qualifications très fortes. Le Régent fit interdire l’impression de ces censures et leur transcription dans les registres, alors les évêques en tirèrent eux-mêmes des copies pour les emporter dans leurs diocèses, contresignées par les secrétaires de l’Assemblée[33].

 

Le sermon du P. de la Motte

Cette solution dérangeait tous les plans des constitutionnaires qui pouvaient à grand’peine contenir leurs sentiments. Dans leurs correspondances avec Rome, les Jésuites ne se privaient pas de dénigrer le Régent, prince incapable, faible, versatile[34] ; mais le papier souffre tout. Un des leurs porta plus loin l’audace. Prêchant, le 20 octobre, dans la cathédrale de Rouen, le Père de la. Motte s’écriait : « Hélas ! mes chers Frères, ce pieux monarque est mort dans un temps où nous avions le plus besoin de lui pour la destruction de l’hérésie. Il n’a pas plutôt été mort, que, quinze jours après, on a vu avec surprise des gens que la sagesse du Roi avait fait mettre dans les fers et dans les cachots, pour porter la peine due à leurs crimes et à leur rébellion, en sortir avec éclat et être élevés à des dignités dont quinze jours auparavant ils n’auraient osé regarder le titre. N’est-il pas surprenant de voir que ceux qui sont à la tête des affaires renversent aujourd’hui ce que la sagesse du Roi avait établi ? N’est-il pas étonnant de voir ce petit homme bouffi d’orgueil, sans science et sans mérite, gouverner la religion et l’État ?[35] »

 

Rigueurs contre les Jésuites

Un instant stupéfait, ahuri d’une telle audace, l’auditoire se ressaisit et tout s’ébranla : l’antique officialité d’abord, puis l’archevêque, le gouverneur de Normandie, le procureur-général du Parlement, et le sieur Pinard, marchand, et le sieur Campion, et le sieur Caumont, et la demoiselle Duval... ; entre temps le jésuite était conduit au vieux-château ; interrogé en public, il nia tout, se retira de la Société, s’éclipsa. Cette ardeur provocatrice avait saisi également le Père Hardouin qui s’était mis en tête, en ce même mois d’octobre de faire paraître sa Collectio Conciliorum dont la Préface, dédiée au feu Roi, traitait Noailles et son groupe de schismatiques[36], aussi le public accueillait avec plaisir la nouvelle de l’exil des membres les plus remuants de la Société, les pères Daniel, Doucin, Lallemand, Hardouin et Germont[37]. Dangeau écrit tranquillement dans son Journal : « On croit qu’il y en aura encore quelques autres qui auront le même ordre ; on a ôté à plusieurs de leur Compagnie le pouvoir de confesser et aucun de ceux à qui on a laissé la permission n’a le pouvoir d’aller confesser dans les couvents. M. l’évêque de Metz a interdit tous les jésuites de son diocèse et on croit que M. de Verdun les a interdits aussi dans le sien[38]. » La Gazette de la Régence, qui enregistre la même nouvelle, ajoute, et on l’en croit sans peine, que tous les révérends pères sont fort mortifiés[39]. L’abbé Dorsanne, leur adversaire, trouve fort bonne cette mesure qui n’épargne que douze jésuites que « ce coup humilia et consterna prodigieusement » ainsi que « tous leurs amis. Mais il fut, dit-il, si fort approuvé du public qu’ils n’osèrent s’en plaindre[40]. » Quelques Ursulines du faubourg Saint-Jacques se désolèrent, Paris s’occupa d’autre chose et se divertit d’une répartie du cardinal de Noailles au cardinal de Bissy. Celui-ci était venu visiter son collègue avec l’espoir de lui persuader les avantages que l’Église de France retirerait d’un concile national, il le conjurait de se dépouiller comme lui, Bissy, s’était dépouillé. « Dépouillé, dit Noailles en le toisant de la tête aux pieds, dépouillé ! Il me semble pourtant que je ne vous ai jamais trouvé si bien vêtu : je ne sais pas ce que vous avez quitté, mais je sais bien ce que vous avez acquis. Pour moi, je n’ai pas besoin de me dépouiller, n’ayant qu’un seul habit ; il est vrai qu’on avait voulu m’en dépouiller, mais Dieu me l’avait donné et il me l’a conservé[41]. »

 

Rétractation de la Faculté de Théologie

Ces anecdotes aident à connaître l’état de l’opinion de plus en plus hostile à la Bulle. La Faculté de théologie de Paris était transformée en une façon de champ clos, où le nouveau syndic Ravechet, agent-général de cette Faculté ; entraînait tous ses confrères à la bataille. Ravechet avait entrepris de faire rapporter les résolutions prises sous le syndic Le Rouge, son prédécesseur, dont le zèle constitutionnaire avait fait recevoir la Bulle. Après quelques mesures préparatoires qui révélaient la nouvelle tendance, Ravechet soutint que la Faculté avait bien enregistré la constitution, mais ne l’avait pas acceptée. On pouvait s’attendre dès lors à ce que la réunion désignée sous le nom de Prima mensis de Sorbonne serait plus que vive. En effet, le 2 décembre 1715, il s’y passa beaucoup de choses dont on croit, disait Dangeau, que le pape ne sera pas content ; ils ont déclaré à la pluralité des voix, et des voix en grand nombre, qu’ils n’avaient jamais eu l’intention de recevoir la bulle Unigenitus, et que ce qu’ils avaient fait en cela n’était que pour obéir au feu Roi[42]. » « Dieu merci ! écrit l’auteur de la Gazette, voilà la pauvre Constitution, à vau-l’eau de toutes parts, et nous voilà de parfaits hérétiques dans l’esprit du Saint-Père que beaucoup de docteurs disent être hérétique. Je vous jure ma foi et ma parole que, si la censure vient de Rome, elle ne m’empêchera pas de dormir[43]. » Trois jours après, le 5, nouvelle assemblée en Sorbonne qui confirme lès décisions du lundi précédent[44] par cent quarante voix sur cent soixante votants[45].

 

Dispute générale

Le nonce menaça d’aller bouder en Avignon, puis se ravisa ; le cardinal de Rohan parla de renvoyer à la Faculté ses lettres de docteur qu’il tenait d’elle, se remua beaucoup (dans son lit où la goutte le retenait) et s’évapora en discours[46]. C’était peut-être ce qu’il y avait de meilleur puisque les évêques du parti de Noailles ne s’entendaient pas entre eux. Presque tous s’étaient rendus à Paris pour se concerter sur la conduite à tenir, ils parlaient beaucoup et on était surpris de constater qu’ils soutenaient des opinions différentes. Les uns disaient que le livre du P. Quesnel était bon, qu’on ne pouvait le condamner, que la Constitution était mauvaise, qu’on ne pouvait la recevoir. Les autres croyaient que le livre n’était pas sans de grands défauts et que la constitution pouvait être reçue avec une explication[47]. Les évêques de Montpellier et de Senez étaient ceux qui se montraient « les plus opposés à toute voie de conciliation », ce dont « leurs meilleurs amis ne pouvaient s’empêcher de les blâmer ». Chaque parti nuisait au parti opposé avec un acharnement que la bonne foi excuse, peut-être, à défaut de la justice et de la charité. Noailles avait défendu « sous peine de suspense encourue ipso facto, à tout ecclésiastique de son diocèse d’accepter la bulle indépendamment de son autorité[48] » et l’évêque de Toulon avait déclaré repousser des ordres sacrés les jeunes ecclésiastiques qui auraient fait leurs études aux facultés de théologie hostiles à la bulle[49]. Le parlement d’Aix annule ce dernier mandement, comme le Parlement de Paris supprime un mémoire qui invite les évêques « à se remuer, à s’assembler, à délibérer, à se concerter dans les provinces, à s’unir au nonce et à agir avec lui[50] » ; le conseil d’Etat relève trois curés de la ville de Reims de l’excommunication portée par leur archevêque pour refus d’accepter la Constitution[51]. Pendant que la Faculté de théologie de Reims rétracte son adhésion à la bulle, la Faculté de théologie de Poitiers y donne la sienne[52] et l’évêque d’Amiens oblige les ecclésiastiques de son diocèse qui ont pris leurs degrés à la Faculté de théologie de Paris d’aller recevoir les ordres sacrés à Sens[53].

 

Méthodes d’apaisements : le silence

Partout la discorde s’étale avec une sorte de complaisance ; il semble qu’on songe bien moins à soutenir son point de vue qu’à ruiner celui du contradicteur. Le Régent s’est, un instant, le silence flatté de ramener le calme en fermant les bouches par une lettre de cachet. Au moment où les docteurs de Sorbonne allaient rouvrir la dispute, le syndic Ravechet donna lecture de cette lettre : « M. le Syndic, vous ayant ci-devant défendu de faire imprimer les décrets de Sorbonne touchant la Constitution, je vous, défends aujourd’hui de recevoir aucune opposition qui regarde cette affaire et je veux qu’on n’en parle davantage[54]. » La Sorbonne se taira donc, ce jour-là, mais ce jour-là seulement, et ne manquera pas de se plaindre au Régent du procédé. Celui-ci s’excusera aussitôt, protestera qu’il n’a pas envoyé une lettre de cachet ni un ordre, mais seulement adressé une prière et exhortation et que, de sa vie, il ne contraindra aucune assemblée[55].

C’est aussi le silence qu’on préconise à Rome[56] : un silence par Déclaration du Roi enregistrée au Parlement ! Mais ceci ne fait pas l’affaire du parti de Noailles qui veut parler et écrire. C’est ainsi qu’on proposa, autant pour gagner du temps que pour mettre les opposants dans l’embarras, une lettre des évêques constitutionnaires au Régent pour lui demander d’obtenir du Pape une explication de la bulle. Cette manœuvre n’eut pas le résultat qu’on en attendait. Dix-huit évêques signèrent cette lettre qu’on représenta comme un aveu que la bulle, au dire de ses partisans, avait besoin d’explications ; en sorte que plusieurs retirèrent leur signature[57].

 

L’envoi de négociateurs

Cependant les évêques opposants continuaient à travailler aux deux ouvrages qu’ils avaient promis pour le 22 mars, tâchant de n’y rien laisser paraître qui put offenser la Cour romaine ; mais ne s’entendant guère entre eux[58]. Quand ce travail fut achevé, on l’envoya à Hume par les soins d’un abbé Chevallier et du P. de la Borde, oratorien[59] qui, ainsi que l’écrit Buvat, « partirent le 17 avril pour aller à Rome tâcher de faire changer de sentiment au sujet de la Constitution[60]. » Ils se rendaient là-bas « au nom du Roi » et « de la part de tous les théologiens et de tous les Ordres du royaume[61]. » Ces deux négociateurs étaient trop peu modérés de caractère pour qu’on fut en droit d’attendre un résultat de leur mission.

 

Mandements épiscopaux

D’ailleurs tout concourrait à enflammer les esprits. Dès le 11 mars, un mandement de l’évêque de Marseille, Belzunce, sonnait la charge avec une ardeur qui se retrouvera en des circonstances plus tragiques et ornait de quelques injures, qui n’étaient sans doute pas de lui, une érudition dont ses amis l’avaient fourni[62].

L’évêque de Toulon renchérit sur son collègue avec un luxe d’épithètes tout méridional[63], mais il laissait, ainsi qu’il convient à un suffragant, la palme à son métropolitain, Forbin-Janson, archevêque d’Arles, qui déclara dans son mandement « que ceux qui refuseraient d’accepter la Constitution et de s’y soumettre en tout ce qu’elle contenait, étaient certainement plus excommuniés que ne le fut Adam après avoir mangé le fruit défendu[64]. » L’évêque de Castres trouva mieux encore, administrant la communion pascale aux chanoines de son église cathédrale, il s’approcha du théologal, tenant l’hostie entre les doigts, et, modifiant la formule, dit en la déposant sur la langue : Corpus Domini nostri Jesu Christi convertat te in vitam aeternam. Amen[65]. Après de semblables exemples pouvait-on s’étonner d’entendre l’évêque de Chalons sur-Saône avancer que la Constitution était « règle de foi », ce que condamnait le parlement de Dijon[66], tandis que le parlement d’Aix dénonçait ces « écoles où l’on veut faire passer comme le point le plus essentiel de la religion l'obéissance aveugle et sans borne pour le pape[67]. » Les mandements des évêques d’Apt, de Grasse n’étaient pas plus ménagés[68].

 

Libelles

Mais il n’y avait pas que les mandements, les libelles se multipliaient de telle sorte qu'on ne savait plus à qui entendre ; imprimés ou manuscrits, avoués ou non désavoués par des évêques, réfutés et applaudis, supprimés et contredits, ces pamphlets se débitaient en grand nombre, sous le titre alarmant de Tocsins[69]. Jansénistes et Jésuites y prodiguaient pêle-mêle accusations, arguments, insinuations, invectives et inepties. A qui veut, de nos jours, prendre une connaissance personnelle de cette littérature polémique il faut des réserves inépuisables de patience[70]. L’anecdote survient heureusement pour varier cette monotonie. L’archevêque de Vienne, Crillon, expédie à ses curés une condamnation de la Bulle avec injonction de la lire au prône. Ceux-ci se soumettent, mais le curé Murette ne fait que d’entamer la série des anathèmes épiscopaux lorsqu’un de ses paroissiens se lève, Capitaine de cavalerie réformé. Il proteste, se déclare offensé d’une condamnation des Hexaples, qualifie la Constitution de « bête monstrueuse », le Mandement et la censure, d’« ouvrages de pures ténèbres » et s’en prend alors à l’archevêque qui a de bons bénéfices dont le moindre eut suffi pour nourrir les douze apôtres. Le reste était à l’avenant et exposé en style militaire. Cette protestation « cavalière » fit la joie du Palais Royal et de tout Paris[71].

 

Brefs et bulles

La Sorbonne, elle, ne souriait pas. A la Prima mensis d’avril elle prit, nous dit Dangeau, « des partis violents[72] » et Buvat, toujours l’oreille aux aguets, apprend qu’« elle s’assembla en grand nombre, et il y fut résolu d’appeler de cette Constitution au Parlement, au Roi, à M. le Régent, au concile général futur, au Pape et à tous les évêques du monde chrétien[73] ». « Aux incartades le nonce répondait par des maladresses. Il demanda une audience du Régent pour lui remettre un bref pontifical. L’usage voulait qu’il en donnât copie, préalablement à la présentation au chef de l’État[74]. Bentivoglio déclara que s’il n’approchait pas le Régent, le Pape n’admettrait plus devant lui notre ambassadeur. En réalité, il avait reçu trois brefs ; un, très vif, adressé au Régent ; un autre contenant des monitions au cardinal de Noailles et à la Sorbonne ; un troisième qui cassait le Conseil de conscience[75]. C’était une revanche sur la Prima mensis d’avril[76]. Sur ce terrain, il était malaisé de dire où on s’arrêterait. Le Pape refusait-il les bulles aux nouveaux évêques qui refusaient de s’engager préalablement contre la bulle, on lui répliquait qu’on ne manquait pas, en France, de précédents pour s’en passer[77]. Le nonce se plaignait-il du plaidoyer de la Grand’Chambre au sujet de la Constitution et de la licence des avocats, le Régent lui répondait : « Monsieur le nonce, ce sont vos gens qui ont commencé la querelle, il paraît juste que les autres se défendent[78]. » Déjà, certains répandaient la rumeur de la rupture du Concordat de 1515 et du rétablissement pur et simple de la Pragmatique sanction, au risque d’encourir toutes les excommunications du monde. On élèverait le petit Roi dans des sentiments favorables aux maximes gallicanes et au lieu d’un confesseur jésuite il s’adresserait à son curé[79].

L’auteur de la Gazette, qui recueille complaisamment ces on-dit, observe avec raison que « sur le fait de la religion, les affaires s’aigrissent de plus en plus[80]. » Le Pape traitait notre ambassadeur avec peu d’égards et l’opinion blâmait le cardinal de la Trémouille de cette condescendance à l’égard d’un pontife « auprès duquel il savait bien qu’on ne gagne rien à être trop bon, parce qu’il ne ménage que ceux qui savent se faire craindre. » Déjà on pouvait prévoir que l’abbé Chevalier et le P. de la Borde échoueraient dans leur négociation nonobstant la sagesse et la modération de tout ce qu’il leur était recommandé de faire valoir pour éclairer le Saint-Père sur les suites funestes qu’entraînerait la publicité tôt où tard inévitable des Instructions remises aux deux négociateurs. Le Régent, que ces querelles théologiques excédaient, espéra faire impression sur l’esprit de Clément XI en exposant, lui-même, au cardinal de la Trémouille les besoins si graves de l’Église de France.

 

Lettre ostensible du Régent au cardinal de la Trémouille

Le Pape, disait-il, a trop d’expérience pour ignorer qu’il ne peut imposer une loi lorsqu’il lui faut ménager les esprits, négocier et traiter avec eux, obtenir de la persuasion ce que ne lui donnerait pas l'autorité. Le temps, loin d’apaiser les préventions, y avait ajouté l’aigreur dont témoignaient les démarches des Facultés de théologie et les mandements épiscopaux. La période d’une régence ne semblait que trop favorable aux brouillons, car « quelque prévention que tous les ordres du royaume aient marqué pour le duc d’Orléans, Sa Sainteté ne saurait ignorer que l’autorité d’un Régent ne peut être égale à celle d’un Roi. La minorité est regardée, même par les esprits les plus modérés, comme un temps où l’autorité absolue ne saurait presque être employée sans s’exposer à la commettre : où les lois doivent régner plus souverainement que le Roi même, et où les formes établies par le droit public du Royaume sont absolument inviolables. Telle est la véritable situation d’un Régent, et Sa Sainteté peut juger à combien de ménagements, de précautions, de condescendances elle l’engage dans une affaire de cette nature, et surtout dans les premiers mois d’un gouvernement, qui tient en quelque manière le milieu entre une autorité absolue et une entière liberté. » La conduite et les arguments des évêques du parti de Noailles étaient exposés avec précision, les voies de conciliation étudiées avec le désir d’y entrer, les objections prévues, les difficultés aplanies et la condition posée, une fois pour toutes, qu’on ne réduirait jamais ces évêques à une acceptation pure et simple.

Pour induire le Pape à consentir à une interprétation, le Régent disait encore : « La Puissance royale qui s’exerce avec un empira plus absolu que l’autorité ecclésiastique, ne croit rien perdre de ses droits quand elle interprète elle-même ses décisions. Qu’elle le fasse de son propre mouvement, ou sur les remontrances de ses sujets, elle ne croit pas avilir sa majesté ; et l’on a été si éloigné de trouver en cela quelque chose qui déroge à l’autorité du souverain, qu’on le regarde au contraire comme an de ses privilèges, en établissant cette règle générale que c’est à l’auteur de la loi qu’il est réservé de l’interpréter. » L’interprétation ne suppose point erreur dans la décision à expliquer mais obscurité d’une part et incertitude d’autre part. La bulle avait été reçue non pas absolument mais relativement et, pour ainsi dire, à l’essai. N’était-ce pas de cette même façon que l'avaient reçue les prélats du monde chrétien dont on faisait sonner si haut le consentement silencieux et équivoque. « Qui sait s’ils ne diffèrent pas de le rompre, parce qu’ils savent qu’il y a un certain nombre de prélats qui ont déclaré qu’ils avaient des doutes sur le véritable esprit de la Constitution, et que, sans vouloir se commettre personnellement, ils attendent avec prudence que les doutes soient levés, pour prendre leur dernière résolution ? » Afin de ménager la susceptibilité du Souverain Pontife, le Régent suggérait au Saint-Père de lui adresser, à lui-même et non aux évêques, les explications tant souhaitées ; la même conduite pouvait être suivie pour le Corps de Doctrine : « Il suffirait, disait le prince, qu’il me fît l’honneur de m’écrire ses sentiments, et il ne lui en couterait qu’un seul mot pour finir la plus grande affaire qu’il y ait eu dans l’Église depuis plusieurs siècles. » Si tous ces moyens étaient repoussés, la France se trouverait réduite à la convocation d’un concile national dont les conséquences auraient leurs inconvénients. « Je voudrais que le Pape fût en état d’en juger par lui-même ; et quand Sa Sainteté aurait vu de près les esprits aussi échauffés qu’ils le sont, les Évêques animés contre les Universités, et les Universités contre les Évêques ; l’épiscopat divisé, le second Ordre entraîné dans la même division, excepté que le plus grand nombre paraît être pour les [non Acceptants] : en un mot, le schisme prêt à éclater de toutes parts, je prendrais la liberté de demander à Sa Sainteté s’il m’est, je ne dis pas permis, mais même possible, d’attendre tranquillement un événement si triste[81]. »

 

Accueil fait par le pape

Ces avances, que le Régent avait trop intérêt à faire pour qu’on ne pût mettre en doute leur sincérité, étaient vouées à un échec. En Italie, le Pape n’était rien moins que pacifique ; en France toutes les nouvelles arrivées de Rome produisaient l’effet de l’huile sur la flamme. On assurait que le Pape avait agité en plein consistoire la décardinalisation de Noailles[82], au moment où le Régent s’entremettait pour procurer la réconciliation entre Noailles et Rohan[83] et au moment où l’archevêque d’Arles « d’une parfaite bêtise et d’une ignorance crasse » se comparant à l’ânesse de Balaam, « brayait » un avertissement suprême à Noailles qu’il voyait prêt à rouler aux abîmes[84]. Et ce fut pis encore quand on apprit la réception faite au cardinal de la Trémouille porteur de la lettre du Régent :

« Que pensez-vous de ce qu’on nous propose ? » demanda Clément XI.

« Je crois que Votre Sainteté pourrait entrer dans ces expédients, » dit le cardinal.

« Ce serait bouleverser tout l’ordre de l’Église » répliqua le Saint-Père qui, pour empêcher son interlocuteur de placer un mot, entama un monologue interminable. Le cardinal saisit une seconde, entre deux phrases pour jeter le nom de l’abbé Chevalier ; mais le Pape, ayant repris haleine, se récria, protesta que sachant sa commission il ne le pouvait pas entendre. La Trémouille insista, mais ne put rien obtenir. Un cardinal italien vint sonder l’abbé qui, voulant parler au Pape en personne, « se tint sur les hauteurs[85]. » L’italien désappointé décida le Saint-Père à convoquer une Congrégation générale des cardinaux présents à Rome et aux environs[86] (27 juin). La Trémouille ne consentit à y assister qu’après s’être informé des sujets qu’on y traiterait.

 

Congrégation cardinalice

La loquacité de Clément XI s’y donna carrière ; quand la fatigue se fit sentir il larmoya, sanglota, aspira longuement et repartit de plus belle. Après les trois brefs adressés au nonce et refusés par le Régent, vint une lettre du cardinal de Noailles, vieille de onze ans. A peine lue, le pape la saisit, l’étudia, en pesa tous les mots, s’attendrit derechef, transforma le Sacré-Collège en Synagogue, ensuite en Sanhédrin et répéta à cinq ou six reprises qu’il ne pouvait différer le châtiment sans péché mortel. Comment s’y prendre ? Toute la question était là. Un cardinal hasarda de dire que c’était affaire au Maître des cérémonies ; un autre, Grimaldi, opina pour qu’on s’adressât à un avocat. On allait dévier, le Pape abrégea et dit qu’il donnait à chacun quinze jours de réflexion, après quoi il interrogerait sur la conduite à l’égard des évêques désobéissants, des Parlements, des bulles, de la Sorbonne et du traitement à faire à l’abbé Chevalier. La séance avait duré quatre heures et le secret en était confié à cent quatorze personnes !

 

Bruits d'accommodement

Cette Congrégation — c’est le nom qu’on donne à ces sortes d’assemblées — ne donna pas les fruits qu’on en attendait. Les cardinaux Ottoboni et Patrizzi proposèrent de laisser le cardinal de Noailles « accepter là Constitution à sa mode[87] » ; Fabroni eut préféré «moins de bruit et plus d’effet » ; l’abbé Chevalier avait lu ces lignes du cardinal Davia : « il y a déjà longtemps que je m’aperçois qu’il sera difficile, ou plutôt qu’il nous est impossible de sortir du jeu sans perte, et toute la question est de savoir si elle sera grande ou petite[88]. » Ces sentiments ne laissaient pas que d’être connus en France où on n’oubliait rien pour terminer l'affaire indépendamment du Pape. Le 14 août, le Régent avait remis à Noailles des projets d’acceptation dressés par le Procureur-Général dans l’espoir de faire admettre le Corps de Doctrine par tous les évêques de France dont l’unanimité ne permettrait pas au Pape de se dérober. Et voici que, le 18 août, Clément XI recevait notre ambassadeur et semblait disposé à approuver le Corps de Doctrine ; bien plus, le 20, il envoyait en France le jésuite Lafitau, en qui il avait confiance, pour conférer avec Je Régent sur les moyens d’approuver le Corps de Doctrine et d’accepter la Constitution[89]. Il y avait dans l’air des idées d’accommodement[90], mais en descendant sur terre on y trouvait les mêmes passions qui avaient tout perdu. Le P. de la Ferté, jésuite, prêchant à Chaillot devant la reine d’Angleterre, se mit dans le cas de se faire arrêter et n’obtint l’indulgence du Régent que sur le témoignage de cette princesse qu’apparemment le prédicateur n’avait rien dit de fâcheux que pendant le temps qu’il la vit dormir[91]. Le Régent souriait et laissait courir, mais Noailles ne riait jamais à propos de jésuites.

 

Mesure spirituelle contre les jésuites

Le mardi 18 août[92], au lieu d’envoyer aux révérends pères le renouvellement des pouvoirs pour la confession et la prédication expirés le 15 août, le cardinal leur envoya son secrétaire chargé de remerciements pour leurs services passés et de l’interdiction de les continuer plus longtemps, et même de faire des catéchismes. A la suite du P. Gaillard, confesseur de la reine d’Angleterre, les autres confesseurs épargnés : les pères du Trévou, de Linières et Martinot attachés au Régent, à Madame et à la duchesse de Berry n’étaient pas absorbés par leurs pénitents ; le père de la Rue jouissait dans la direction spirituelle de la femme du Régent de loisirs prolongés. Cette déférence du cardinal pour des apôtres si notoirement inoccupés amusa Paris comme une épigramme. « La sainte société ne soit où elle en est, dit la Gazette ; tout Paris ricane de ces bons Pères[93] » et Buvat ajoute d’un air entendu : « Les jésuites ont depuis avoué que cet interdit leur-faisait tort au moins de deux mille livres par an[94]. » Mais le P. de la Rue ne se décourageait pas. « Peut-être en viendra-t-on, disait-il, à nous interdire nous aussi, mais cependant nous cinq, nous nous disposons à faire l’ouvrage que faisaient tous les autres, dussions-nous en crever[95]. » Les évêques de Châlons, de Metz, de Montpellier et de Verdun suivirent l’exemple du cardinal de Noailles[96].

 

Dispositions du Sacré Collège

Ce coup fut si sensible qu’il décida vingt-cinq évêques à une démarche remarquable. Ils remirent au Régent une Déclaration authentique de la manière dont ils avaient accepté la Constitution du 8 septembre 1718, ne voulant pas qu’il fut dit que la Culte avait été reçue « purement et simplement », mais « relativement à l’Instruction pastorale[97]. » Cette pièce fut envoyée à Rome où l’abbé Chevalier, à force d’obstination, obtenait audience des cardinaux, tantôt l’un tantôt l’autre, et leur expliquait infatigablement cette acceptation relative de la bulle. Toutes les Eminences ne lui réservaient pas le même accueil : aux premiers mots d’accommodement, Fabroni parla d’infaillibilité ;

Cassano s’embarqua dans un sermon ; Valemani pleurnicha et se tut, il était en enfance. Les cardinaux Albanie d’Adda, Cazoni servaient de parure diplomatique au Sacré-Collège ; Davia et Olivieri comptaient pour peu de chose. Quant au cardinal de la Trémouille il considérait l’abbé comme un surveillant, un espion et, pis que cela à ses yeux, un suppléant chargé de conduire ce que lui-même était devenu incapable de terminer. Circonvenu par les Jésuites, par les Italiens, touché par le prestige du Pape, il adoptait les maximes ultramontaines les plus intransigeantes[98].

Au Palais-Royal on savait à quoi s’en tenir sur le zèle et les moyens du cardinal et on ferait à son nouveau projet d’acceptation  l’accueil à prévoir. D’ailleurs, il en était de même à Rome, Chevallier entrant en conférence avec les cardinaux Ferrari et Tolomei s’était entendu dire par ce dernier : « Le Saint-Père se moque de vous, des cardinaux et du public[99]. » La plupart des cardinaux n’étaient pas fâchés de voir en quel embarras leur collègue Fabroni avait jeté le Saint-Père qui n’écoutait que lui et quelques jésuites insaisissables. Tout ce qui, dans le Sacré-Collège était à la dévotion ou à la solde de l’Empereur entretenait du mieux possible un conflit si désavantageux à la France et à son gouvernement.

 

Lassitude en France

Pendant ce temps on conférait par-devant le Régent, sans résultat[100] ; on assemblait des évêques à l'Hôtel de Soubise pour donner lecture du Corps de Doctrine que le cardinal de Rohan croyait « plus propre à nuire qu’à édifier. » Bref « tous ces discours faisaient désespérer d’une paix prompte et entière[101]. » Le public n’y prêtait plus qu’une attention intermittente ; ces subtilités de casuistes le déroutaient. A l’issue des conférences tenues par les évêques, ceux-ci se répandaient en éloges sur le Corps de Doctrine : « une des plus belles et des plus savantes dissertations qui eût paru depuis long-tems : où étaient recueillis un grand nombre de principaux points de la religion dont les principes sont développés avec une érudition profonde » ; mais toutes ces louanges ne s'adressaient qu’à l’ouvrage considéré en lui-même et disparaissaient dès qu’on le rapportait à la Constitution. Le naïf Dangeau n’entendait rien à ces finesses et croyait « revoir l’union dans l'Église[102]. » Buvat entendait dire que Noailles a rebuté de la longueur de ce différend, était résolu de le finir de son côté en acceptant la Constitution pour complaire au Pape et au Régent[103]. » Ce qui était certain c’était la lassitude générale. Le 10 octobre on se sépara en s'ajournant au 20 novembre[104].

 

Nouvelles mesures contre les jésuites

Dans cet intervalle on présageait la paix, on eut une nouvelle escarmouche[105]. Le P. de la Ferté, jésuite, avait été désigné pour prêcher devant le Roi, avant le 18 août où tous les pouvoirs furent éteints pour ceux de son Ordre. A l’approche de la Toussaint, sans aucune démarche de sa part ni de celle de ses supérieurs, il annonça qu’il prêcherait au Louvre et poussa la bravade jusqu’à aller essayer la chaire de la chapelle des Tuileries. Le cardinal, instruit par des rumeurs, en parla au Régent qui s’associa à ses critiques et l’abbé Couturier fut désigné et agréé. La veille de la fête, le prince harcelé par les courtisans[106], changea d’opinion et désigna le P. de la Ferté qui monta en chaire et apostropha le jeune Roi en ces termes : « Il me semble, Sire, voir l’âme du Roi votre bisaïeul à genoux au pied du trône du Dieu tout-puissant, lui demander de donner à Votre Majesté le même zèle et la même fermeté qu’il a eue pendant toute sa vie pour défendre et pour protéger l’Église de France contre toutes sortes d’hérésies nouvelles, et surtout contre celles qui l’affligent actuellement[107]. » Le cardinal de Noailles, retenu dans sa cathédrale par la solennité du jour, se plaignit au Régent qui lui donna raison, avoua sa « sottise », son désir de la réparer et sacrifia le P. de la Ferté au ressentiment du cardinal. Déjà les curés de Paris prenaient feu et flamme, puis le Chapitre de Notre-Dame donna l’assaut, réclamant une punition exemplaire qui éclata le 12 novembre. Dès le matin l’huissier Morice, de l’Officialité, vint signifier dans les formes au P. Martinot provincial, au P. Richebourg supérieur de la maison professe, et aux supérieurs du collège et du noviciat, révocation de tous pouvoirs ci-devant donnés et défense de prêcher et de confesser dans toute l’étendue du diocèse. Les P.P. Gaillard, de Linières et du Trévou furent épargnés cette fois encore, mais on n’osa plus faire mention d’un confesseur quelconque de la duchesse de Berry[108].

 

 

 



[1] Journal de M. l'abbé Dorsanne... contenant tout ce qui s'est passé à Rome et en France dans l'affaire de la Constitution Unigenitus, in-4°, Rome [Amsterdam], 1753, t. I, p. 222.

[2] J. A. Le Roy, Le Gallicanisme au XVIIIe siècle. La France et Rome de 1700 à 1715, in-8°, Paris. 1892, p. 463.

[3] Collection Adrien Le Paige, Mémoire de Daguesseau, dans A. Le Roi, op. cit., p. 465.

[4] M. de Senez au cardinal de Noailles 25 octobre 1713, dans La Vie et les Lettres de... J. Soanen (par J.-B. Gaultier), in-4°, Cologne 1750, t. II, p. 36.

[5] Mémoire cité de Daguesseau, op. cit., p. 467.

[6] Saint-Simon, Mémoires, 1906, t. VIII, p. 246.

[7] Mémoire cité de Daguesseau, op. cit., p. 472.

[8] Fénelon au marquis de Fénelon, 11 septembre 1713, dans Œuvres, édit. des Sulpiciens, t. VIII, p. 471.

[9] Arch. nat., I, 438 : Discours de M. le cardinal de Noailles ; Dangeau, Journal, t. XV, p. 9 ; 16 octobre 1713.

[10] Arch. des Aff. Etrang., Rome, 530 : le cardinal de la Trémoille au Roi, 21 octobre 1713.

[11] Arch. Aff. Etrang., Rome, t. 535 ; le cardinal de la Trémoille à M. de Torcy, 6, 15, 20 février 1714.

[12] Bibl. nat., ms. 17748 ; lettre de l'abbé de Polignac, 8 février 1714.

[13] Dorsanne, Journal, t. I, p. 100.

[14] Soanen, Lettres, t. I, p. 68.

[15] Collection Adrien Le Paige : Récit de M. Joly de Fleury, premier avocat général, de ce qui s’est passé relativement à la bulle depuis l’arrivée de cette Constitution jusqu’à la mort de Louis XIV, dans Le Roy, op. cit., p. 561.

[16] Arch. Aff. Etrang., Rome, t. 536 : le Roi au cardinal de la Trémoille, 1er avril 1714.

[17] Dorsanne, Journal, t. I, p. 103.

[18] J. Buvat, Journal, t. I, p. 99, Dorsanne, Journal, t. I, p. 226.

[19] Gazette de la Régence, 6 septembre 1715, p. 11.

[20] Dorsanne, Journal, t. I, p. 225-226 ; Villefore, Anecdotes ou mémoires secrets sur la constitution Unigenitus, in-16, Utrecht, 1731, t. I, p. 4-8.

[21] Dangeau, Journal, t. XVI, p. 171 ; Additions de Saint-Simon, p. 171-172 ; Preuves de la liberté de l'Eglise de France dans Inacceptation de la Constitution ou Recueil des ordres émanés de l’autorité séculière pour faire recevoir la Bulle, in-4°, 1726 ; Buvat, Journal, t. I, p. 372.

[22] Gazette de la Régence, p. 16.

[23] Dorsanne, Journal, t. I, p. 226.

[24] Buvat, Journal, t. I, p. 50.

[25] Dorsanne, Journal, t. I, p. 226.

[26] Dorsanne, Journal, t. I, p. 227.

[27] Dangeau, Journal, t. XVI, p. 222, 26 octobre 1715.

[28] Buvat, Journal, t. I, p. 111.

[29] Buvat, Journal, t. I, p. 112-113 ; Gazette de la Régence, p. 70 ; 10 février, 1716.

[30] Dangeau, Journal, t. XVI, p. 253 ; 30 décembre 1715.

[31] Dorsanne, Journal, t. I, p. 229.

[32] Dorsanne, Journal, t. I, p. 227.

[33] Dangeau, Journal, t. I, p. 225, 31 octobre 1715.

[34] Dorsanne, Journal, t. I, p. 235.

[35] Sermon sur la foi prêché par le P. de la Motte, jésuite, dans l’église cathédrale de Rouen, le 20 d’octobre 1715, in-12. Rouen ; voir C. Sommervogel, Bibliothèque des écrivains de la Compagnie de Jésus, in-4°, Paris, 7894, t. V, col. 1339-1340 ; N. Weiss, Deux cris du cœur, 1642, 1715, dans Bulletin de la Société du protestantisme français, 1893, p. 553.

[36] Dorsanne, Journal, t. I, p. 231.

[37] Buvat, Journal, t. I, p. 111, 113, Dangeau, Journal, t. XVI, p. 242 ; 22 novembre ; Gazette de la Régence, p. 26 : 25 novembre 1715.

[38] Dangeau, Journal, t. XVI, p. 242-243 ; 22 novembre 1715.

[39] Dorsanne, Journal, t. I, p. 237 ; Gazette, p. 26. La décision du cardinal de Noailles est du 20 novembre 1715.

[40] Dorsanne, Journal, t. I, p. 238 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 34.

[41] Villefore, Anecdotes, t. II, p. 33 ; 16 novembre 1715.

[42] Dangeau, Journal, t. XVI, p. 254 ; 2 décembre 1715.

[43] Dorsanne, Journal, t. I. p. 239 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 38 ; Gazette, p. 30 ; 6 décembre 1715.

[44] Dangeau, Journal, t. XVI, p. 257 ; 5 décembre ; Gazette, p. 32 ; 9 décembre 1715, Dorsanne, Journal, t. I, p. 240, Villefore, Anecdotes, t. II, p. 40.

[45] Dorsanne, Journal, t. I, p. 240.

[46] Dorsanne, Journal, t. I, p. 240-241 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 40-41.

[47] Dorsanne, Journal, t. I, p. 242.

[48] Picot, Mémoires pour servir à l’histoire ecclésiastique pendant le XVIIIe siècle, 3e édit., in-8°, Paris, 1853, t. I, p. 382.

[49] Buvat, op. cit., t. I, p. 134-135 ; Déclaration de Mgr l’illustrissime et réverendissime évêque de Toulon, 14 mars 1716 ; Mandement dudit, 25 avril ; Dorsanne, op. cit., t. I, p. 203.

[50] Mémoire pour le corps des évêques qui ont reçu la constitution Unigenitus, supprimé par arrêt du Parlement, du 4 avril 1716.

[51] Buvat, Journal, t. I, p. 118-119, 138-139, 142 ; Dorsanne, Journal, t. I, p. 265-267.

[52] Buvat, Journal, t. I, p. 118.

[53] Buvat, Journal, t. I, p. 138.

[54] Dorsanne, Journal, t. I, p. 247 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 49 ; Gazette, p. 54.

[55] Gazette, p. 58 ; 17 janvier 1716.

[56] Villefore, op. cit., t. II, p. 42.

[57] Dangeau, Journal, t. XVI, p. 269 : 24 décembre 1715 ; p. 271.

[58] Dorsanne, Journal, t. I, p. 258-269.

[59] Dorsanne, Journal, t. I, p. 259 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 67.

[60] Buvat, Journal, t. I, p. 138.

[61] Dorsanne, Journal, t. I, p. 259.

[62] Villefore, Anecdotes, t. II, p. 70-71.

[63] Dorsanne, Journal, t. I, p. 263, 267 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 74-79 ; Buvat, Journal, t. I, p. 140, 142 ; Dangeau, Journal, t. XVI, p. 355 ; 3 avril 1716, p. 368, 372.

[64] Buvat, Journal, t. I, p. 142.

[65] Buvat, Journal, t. I, p. 140.

[66] Villefore, Anecdotes, t. II, p. 72-73.

[67] Villefore, Anecdotes, t. II, p. 75.

[68] Dorsanne, Journal, t. I, p. 267, 269.

[69] Dorsanne, Journal, t. I, p. 262 ; Buvat, Journal, t. I, p. 152, 154 ; Dangeau, Journal, t. XVI,-p. 357 ; Saint-Simon, Mémoires (1858), t. XVII, p. 334 ; C. Sommervogel, op. cit., t. III, p. 162, n° 14 et 15.

[70] Dorsanne, Journal, t. I, p. 262, 268 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 77 ; Mémoire pour le Corps des Pasteurs qui ont reçu la Constitution ; Réfutation de deux mémoires séditieux qui ont paru à la fin de Février 1716 touchant l’acceptation de la Constitution ; Réponse d’un théologien à un prélat sur le refus que M. le cardinal de Noailles a fait de continuer les pouvoirs aux P. Jésuites ; Lettres d’un théologien à un évêque sur cette question importante : S’il est permis d’approuver les Jésuites pour prêcher et pour confesser.

[71] Villefore, Anecdotes, t. II, p. 70 ; 19 avril 1716 ; Gazette, p. 76.

[72] Dangeau, Journal, t. XVI, p. 355 ; 3 avril 1716.

[73] Buvat, Journal, t. I, p. 139 ; 3 avril 1716.

[74] Dangeau, Journal, t. XVI, p. 380 ; 16 mai 1716 ; p. 381 ; 18 mai ; p. 384 ; 22 mai.

[75] Dorsanne, Journal, t. I, p. 264 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 81-82 ; Buvat, Journal, t. I, p. 141 ; 12 mai 1716 ; Dangeau, Journal, t. XVI, p. 395 ; 12 juin.

[76] Buvat, Journal, t. I, p. 145 ; Gazette, p. 79-80 ; 18 mai 1716.

[77] Buvat, Journal, t. I, p. 145.

[78] Gazette, p. 80-81 ; 22 mai 1716.

[79] Gazette, p. 86 ; 19 juin.

[80] Dorsanne, Journal, t. I, p. 269-271 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 85-93.

[81] Dorsanne, Journal, t. I, p. 269-271 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 85-93.

[82] Buvat, Journal, t. I, p. 158.

[83] Dorsanne, Journal, t. I, p. 272 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 95.

[84] Villefore, Anecdotes, t. II, p. 96-97 ; l’épithète accolée au nom de l’archevêque d’Arles est de Saint-Simon.

[85] Villefore, Anecdotes, t. II, p. 102.

[86] Dorsanne, Journal, t. I, p. 227 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 103.

[87] Le Cardinal Ottoboni à l'abbé Tamisier, 30 juin, dans Dorsanne, Journal, t. I, p. 379.

[88] Dorsanne, Journal, t. I, p. 281.

[89] Dorsanne, Journal, t. I, p. 288.

[90] Dangeau, Journal, t. XVI, p. 426 ; 9 août 1716.

[91] Gazette de la Régence, p. 102 ; 7 août 1716.

[92] Dangeau, Journal, t. XVI, p. 431 ; 18 août 1716.

[93] Gazette, p. 104, 21 août.

[94] Buvat, Journal, t. I, p. 164.

[95] Gazette, p. 105.

[96] Picot, op. cit., t. I, p. 386.

[97] Dorsanne, Journal, t. I, p. 290-291 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 110-116.

[98] Dorsanne, Journal, t. I, p. 281 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 123.

[99] Villefore, Anecdotes, t. II, p. 125.

[100] Dorsanne, Journal, t. I, p. 294 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 137 ; Dangeau, Journal, t. XVI, p. 454 ; 16 septembre ; Buvat, Journal, t. I, p. 167.

[101] Dorsanne, Journal, t. I, p. 294 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 139 ; Dangeau, Journal, t. XVI, p. 454.

[102] Dangeau, Journal, t. I, XVI, p. 466, 1er octobre 1716.

[103] Buvat, Journal, t. I, p. 180.

[104] Dangeau, Journal, t. XVI, p. 471 ; 10 octobre 1716 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 145.

[105] Dorsanne, Journal, t. I, p. 296 ; Villefore, Anecdotes, t. II, p. 153 ; Dangeau, Journal, t. XVI, p. 481, 482.

[106] Buvat, op. cit., t. I, p. 191 ; Dorsanne, Journal, t. I, p. 296.

[107] Buvat, op. cit., t. I, p. 190.

[108] Dangeau, Journal, t. I, p. 488 ; 12 novembre ; Buvat, Journal, t. I, p. 192-193. La duchesse l’avait congédié ; le curé de sa paroisse suffisait à sa dévotion.