On le voit, la milice eut sur les destinées de Rome une influence considérable. D'autres, historiens et philosophes, montreront mieux que nous comment elle fut l'instrument de la grandeur et de la ruine des Romains. Pour nous, en essayant d'indiquer par quelques considérations générales l'importance de son rôle historique, nous avons voulu prouver l'utilité du travail que nous entreprenons. Car, si la milice joue un grand rôle dans l'histoire générale de Rome, il ne peut être inutile de l'étudier en particulier, de l'analyser, de la considérer en elle-même dans toutes ses parties, et d'en acquérir par là une connaissance aussi exacte, aussi complète que possible. Pour procéder avec ordre dans cette étude, nous la diviserons en quatre parties. 1° Nous examinerons d'abord la composition de l'armée. Après avoir indiqué les différentes sortes de soldats, leurs armes offensives et défensives, nous dirons ce qu'était la légion ; de combien de fantassins et de cavaliers elle se composait ; comment elle se divisait en corps de troupes se subdivisant eux-mêmes en parties égales ; quels étaient les officiers de ces divisions et de ces subdivisions, et comment ils se servaient de la musique et des enseignes pour transmettre leurs ordres et rallier leurs soldats. 2° L'armée composée, nous essayerons de la faire manœuvrer. Polybe nous la montrera dans ses campements : nous la mettrons en marche, nous la dirigerons dans les pays ennemis, dans les montagnes, à travers les rivières, traînant à sa suite ses catapultes et ses balistes ; nous la rangerons en bataille devant les troupes carthaginoises de Cannes et de Zama ; nous la conduirons sous les murs de Numance et d'Alésia, avec ses machines d'approche et ses machines de sape, dans ses lignes de circonvallation, ses tranchées et ses mines. 3° Puis nous examinerons l'état de la marine romaine, pour faire manœuvrer sur les flots l'armée que nous aurons fait manœuvrer sur terre. Nous verrons construire avec une étonnante rapidité ces flottes immenses, composées de birèmes, de trirèmes, de quadrirèmes... etc. ; et, après les avoir examinées en détail dans le port d'Ostie, nous les couvrirons de légions qu'elles transporteront soit en Afrique, sous la conduite de Scipion, soit en Bretagne, sous celle de J. César. Sur leurs vaisseaux les soldats romains se battront de plain-pied comme sur la terre ferme ; avec eux ils iront assiéger les villes maritimes. 4° Enfin, nous étudierons toute la discipline et l'organisation administrative de la milice. Nous dirons comment les soldats étaient recrutés, choisis avec soin par les officiers supérieurs, exercés à tous les travaux militaires, punis sévèrement aux moindres fautes, récompensés honorablement quand ils le méritaient ; comment l'État les payait, les nourrissait, les habillait, les soignait dans leurs maladies, et les honorait dans leur vieillesse de précieux privilèges. Et dans toutes ces questions, qu'elles aient rapport soit à la composition de l'armée, soit à la tactique, soit à l'administration, nous nous attacherons toujours à distinguer d'une manière précise les principaux changements survenus aux différentes époques. |