Dans son édition de Salluste, — une des meilleures sans contredit et des plus consciencieuses que nous ayons, — R. Jacobs a fait cette remarque sur le discours que l’historien prête à Caton (Catilina, 52) : Caton avait à ce moment trente-deux ans et était tribun désigné. On ne croirait pas, d’après plusieurs passages de ce discours, que l’orateur fût alors aussi jeune. Au même chapitre, § 13, R. Jacobs rapproche du texte de Salluste : Bene et composite C. Cæsar paulo ante in hoc ordine de vita et morte disseruit, credo falsa existumans ea, quæ de inferis memorantur, divorso itinere malos a bonis loca tætra, inculta, fœda atque formidulosa habere, ce passage du Phédon (ch. 62) : έπειδάν άφίκωνται οί τετελευτηκότες είς τόν τόπον οί ό δαίμων έκαστον κομίζει, πρώτον μέν διεδικάσαντο οί τε καλώς καί οσίως βιώσαντες καί οί μή.....[1] Il termine sa note par ces mots : C’est un fait bien connu que Caton relut le Phédon à Utique avant de se tuer[2]. La pensée du commentateur se laisse facilement deviner pour lui, Salluste, en composant ce discours, songe moins à caractériser un moment particulier de la vie de Caton que l’ensemble de sa physionomie. Il achève le portrait du tribun désigné de 691 par des souvenirs empruntés à la suite de ses actions. On se propose simplement ici de développer les indications fournies par R. Jacobs. Si restreinte que soit cette étude, elle permettra peut-être d’analyser et de définir les procédés que Salluste a mis en usage dans la composition de ses discours. I A l’aide des témoignages de Cicéron, de Dion Cassius, de Suétone, de Plutarque, d’Appien, on peut reconstituer le récit de la séance tenue par le sénat, le jour des nones de décembre, pour statuer sur le sort de P. Lentulus Sura et de ses complices. Les circonstances étaient graves et le débat, quand on en considère la suite et le moment, présente un intérêt vraiment dramatique. Dans l’enceinte du sénat, les avis restent longtemps partagés ; l’assemblée hésite, n’osant assumer la responsabilité d’une répression qu’elle voudrait cependant, tant elle est effrayée par l’entreprise de Catilina, aussi prompte et aussi énergique que possible ; entre le péril présent que Cicéron et Q. Lututius Catulus lui dénoncent avec véhémence, et les conséquences d’une décision dont César lui démontre l’illégalité, elle ne se résout pas à prendre parti, déconcertée par la versatilité de Silanus, inclinant, par lassitude et par faiblesse, à se ranger à l’opinion de Tib. Néron qui propose l’ajournement, jusqu’au moment où l’intervention décisive de Caton raffermit les courages. Au dehors, ce sont les chevaliers qui se pressent aux portes du temple de la Concorde, qui s’irritent des lenteurs du sénat, dont les clameurs viennent troubler la délibération, qui même, s’il faut en croire Suétone, auraient fait irruption dans la salle des séances, cherchant pour les frapper ceux qu’ils soupçonnaient d’être favorables à la conjuration[3]. Salluste a bien compris l’importance de cette délibération ; il lui a réservé dans son récit une place considérable, hais on remarquera que les incidents de la séance sont chez lui singulièrement simplifiés. A la différence des historiens modernes qui recherchent volontiers l’effet et la vérité dans le détail anecdotique, son esprit est plutôt porté à l’abstraction. Il calme, il pacifie en quelque sorte cette séance, qui, dans la réalité, a été si tumultueuse, et sa narration ne laisse guère soupçonner que le sénat ait été en proie à une aussi vive agitation. Il n’est même pas fait mention de la 4° Catilinaire : Cicéron préside le débat ; il ne paraît pas y intervenir directement. De même le discours de Catulus est passé sous silence. L’avis ouvert par Tib. Néron n’est indiqué que par une brève allusion, comme l’opinion de Silanus et son changement d’attitude[4]. Quant aux violences des chevaliers, aux menaces qu’ils ont dirigées contre la vie de César, Salluste, sans supprimer cet épisode, a eu soin de le reporter à un autre chapitre[5], de telle sorte qu’il n’existe aucun lien, d’après lui, entre cette émotion de l’ordre équestre et la position prise par César dans le débat. On peut croire qu’elle a été l’effet d’une humeur trop impressionnable, trop prompte à s’effrayer, comme l’historien le dit en termes exprès[6], ou encore, comme il le laisserait volontiers entendre, qu’elle a été provoquée par les manœuvres des ennemis personnels de César, Catulus et C. Pison. En somme, la séance des nones de décembre est tout entière pour Salluste dans les deux discours de César et de Caton. Tout se réduit pour lui à un grand débat oratoire, oh les deux politiques en présence sont nettement opposées l’une à l’autre. Encore a-t-il laissé de côté les répliques violentes, les propos outrageants que César et Caton auraient échangés, et, dans le discours même de Caton, il ne reste rien ou presque rien de cette véhémence indignée, de ces emportements de langage, dont le souvenir se retrouve dans Plutarque[7]. Si l’on voulait porter un jugement d’ensemble sur cet épisode de Catilina, il y aurait lieu de rechercher à quelles intentions, à quelles arrière-pensées politiques l’historien a pu obéir[8]. Ici, il suffit d’avoir marqué le caractère général de la délibération telle que Salluste la présente. Assez indifférent à la mise en scène, il ne songe nullement à nous donner l’illusion d’un débat véritable. Le discours qu’il met dans la bouche de Caton, semble au premier abord très peu capable de vaincre les hésitations d’une assemblée et de surmonter les résistances de l’intérêt ou de la peur. Tout ce qui n’est qu’accessoire a été résolument écarté, de parti pris. Sacrifiant tout le reste, l’écrivain a mis directement en présence César et Caton, l’un rappelant le sénat au respect de la légalité, l’autre tout occupé du danger de l’État et soutenant qu’il faut, pour des périls exceptionnels, des mesures exceptionnelles aussi. Cette préoccupation de l’historien est rendue plus apparente encore par la comparaison en règle qu’il institue au chapitre LIVe entre les deux personnages. Il voudrait donner à entendre que ce parallèle était nécessaire, qu’il était comme imposé par le sujet lui-même[9]. C’est une assertion qu’il est difficile d’admettre ; ce qui est vrai, c’est que Caton, dés le lendemain de sa mort, était devenu, pour ses ennemis aussi bien que pour ses amis, le représentant des idées républicaines, personnifiant l’ancien régime en face de la dictature fondée par César[10]. On comprend dés lors que Salluste ait cédé à la tentation d’établir et de développer une comparaison que tous ses contemporains faisaient autour de lui. Elle répondait, sinon à une nécessité de son sujet, du moins aux préoccupations de l’opinion publique et de l’écrivain lui-même. Il n’y a donc pas lieu de s’étonner que, en composant le discours de Caton, il ait eu devant les yeux l’ensemble de la vie et du caractère de son personnage, qu’il ne se soit pas astreint à ne le considérer qu’à cette date particulière de 691, mais qu’il ait embrassé par la pensée son existence tout entière. II Il est évident, en effet, comme le dit R. Jacobs, qu’il y a, dans ce discours de Caton, plus d’un développement qui conviendrait mieux à un orateur plus avancé en âge. On croirait, à lire le texte de Salluste, que le tribun désigné de 691, que ce jeune homme de trente-deux ans a déjà derrière lui un long passé politique. Il fait allusion à ce rôle de censeur des mœurs qu’il remplit depuis longtemps et aux inimitiés qu’il s’est attirées par sa franchise : Sæpe numero, patres conscripti, multa verba in hoc ordine feci ; sæpe de luxuria atque avaritia nostrorum civium questus sum, multosque mortalis es, causa advorsos habeo[11]. Et ce n’est pas seulement dans tel ou tel passage, mais dans l’ensemble, dans le ton du discours que l’on retrouve cet accent de gravité et d’autorité morale. Sans doute, Caton a eu de très bonne heure une grande réputation d’austérité et de vertu. Nous avons conservé le plaidoyer pour Murena, prononcé par Cicéron quelques jours à peine avant les nones de décembre. Au milieu même des railleries dont l’orateur poursuit Caton et ses maîtres stoïciens, on voit qu’il ne peut se défendre d’un véritable respect pour son adversaire : Venio nunc ad M. Catonem, quod est firmamentum ac robur totius accusationis.....[12] L’avocat est entraîné par les besoins de sa cause à tourner en ridicule les doctrines de Caton, mais au fond il a une sincère estime pour son caractère. Il y a même quelque chose de touchant dans l’hommage rendu par Cicéron à un homme de cet âge : il emploie des ménagements de toute sorte pour marquer qu’il est en désaccord avec l’accusateur de Murène, il le blâme de la manière la plus délicate[13] et, avec le peuple romain tout entier, il s’incline devant les vertus de son contradicteur. Salluste reste donc dans la vraisemblance historique, lorsqu’il prête à Caton la phrase qui a été citée plus haut et d’autres du même genre ; on ne niera pas cependant qu’il la dépasse quelque peu. Il a devant les yeux et il reproduit l’image de Caton, telle qu’elle s’était conservée dans la mémoire des contemporains. A son personnage qui ne fait guère que de débuter dans la vie publique, il attribue par avance, comme s’il anticipait sur la suite des événements, cette expérience, cette autorité que les années seules devaient mûrir et consommer. Ce n’est pas tout ; non seulement le caractère de Caton a été idéalisé après sa mort, mais, malgré des différences très appréciables, il semble que, de bonne heure, il se soit fait une sorte de confusion dans l’esprit des Romains entre Caton le Censeur et Caton d’Utique. A leur insu, leur imagination va chercher dans les souvenirs du premier des traits qui viennent s’ajouter au caractère du second. Salluste avait beaucoup lu, beaucoup pratiqué les ouvrages du vieux Caton. Pour lui, comme pour ses contemporains, la vertu des deux Caton est, si l’on peut s’exprimer ainsi, un bien de famille, un patrimoine commun, indivis, où l’on ne distingue plus nettement ce qui appartient à l’aïeul de ce qui appartient au descendant. Dans l’un, on voyait la personnification des anciennes mœurs, de la simplicité, de la parcimonie des premiers siècles ; l’autre était mort en même temps que la liberté, refusant de survivre aux institutions républicaines et d’assister au triomphe du nouveau régime, inauguré par César. Tous les deux étaient les représentants du passé, des temps et des choses qui avaient disparu sans retour. C’en était assez pour que l’imagination populaire, sans se laisser arrêter par les différences qui les séparaient, associât leurs deux noms. Aussi, on croirait parfois entendre, dans le discours de Salluste, comme un écho de la voix du vieux Caton. On y lit plus d’une phrase que le rude défenseur de la loi Oppia n’aurait pas désavouée. A l’exemple de son aïeul, le Caton de Salluste s’élève contre le luxe des hommes de son temps et leur reproche leur mollesse. Comme s’il se défiait du patriotisme des sénateurs, il prend soin de leur montrer que la conjuration ne menace pas seulement la république, mais ces palais, ces maisons de campagne, ces statues, ces tableaux qu’ils préfèrent à la république elle-même[14]. Il n’entretient aucune illusion sur le compte de cette aristocratie, qu’il cherche à protéger contre les entreprises de Catilina et sa propre faiblesse. Il sait et il dit nettement que Rome est envahie par la corruption, que les vertus d’autrefois sont oubliées, que les fils ne valent pas les pères et qu’ils ont perdu ces grandes et fortes qualités, qui avaient fondé, dans des temps meilleurs, la puissance et la prospérité de la république[15]. Il accuse cette décadence ; cette perversion de l’esprit public, qui, ayant faussé jusqu’au sens des mots, décore de noms magnifiques les pratiques les plus condamnables et les plus funestes à l’État[16]. Pour mieux flétrir les mœurs contemporaines, il demande à l’antiquité, et une antiquité déjà lointaine, des exemples de sévérité qu’il propose à l’imitation de ses auditeurs, et, alors qu’ils hésitent à frapper les complices de Catilina, il leur rappelle T. Manlius Torquatus, jugeant et condamnant à mort son propre fils[17]. Cette verve satirique qui animait l’éloquence de l’ancien Caton, cette admiration pour les ancêtres qu’il exprimait à tout propos, cette humeur grondeuse et cette franchise qui ne connaissait aucun ménagement, tous ces traits distinctifs de son caractère et de son style se retrouvent dans le texte de Salluste[18]. Cependant, sur un point, la ressemblance cesse. En combattant l’avis ouvert par Silanus, César avait soutenu qu’il n’y avait pas lieu de prononcer la peine de mort contre les conjurés, qu’on’ se donnait ainsi les apparences de la cruauté, et cela bien inutilement, puisque la mort était le terme de tous les maux et que tout finissait avec elle[19]. Comment le vieux Caton aurait-il répondu à cette profession de foi épicurienne ! On sait qu’il n’aimait rien de ce qui venait de la Grèce, et la philosophie encore moins que le reste[20]. Il avait fait interdire le séjour de Rome à Carnéade ; il était superstitieux à l’excès, conservateur en religion comme en toutes choses, préférant les vieux dieux nationaux à tous les systèmes et à toutes les théories des Grecs. On s’imagine sans peine de quelle colère il aurait été transporté. Il aurait dénoncé avec indignation les maximes de César comme contraires à la république. Aucune parole, à son gré, n’aurait été assez forte pour les flétrir et il aurait traité, pour le moins, l’auteur de cette déclaration impie, comme il traitait les médecins, qui étaient de tous les novateurs ceux qu’il détestait le plus. Au contraire, son descendant est un disciple de la philosophie grecque[21]. Il était difficile de prêter à cet adepte convaincu du stoïcisme les boutades et les emportements qui, très convenables au caractère de son aïeul, auraient été chez lui dépourvus de toute vraisemblance. Salluste s’est bien gardé de commettre cette faute. A l’incrédulité philosophique de César, à ses négations, Caton oppose, non pas la colère ou le sarcasme, mais l’affirmation d’une croyance fondée sur la philosophie. Celui qui, avant de mourir, se fortifiera par la lecture de Platon dans sa foi à l’immortalité de lame, se devait à lui-même de protester contre le matérialisme de César. Il le fait par la phrase qui a été citée au début dans cette étude, et dans laquelle R. Jacobs croit retrouver une conformité remarquable avec les doctrines du Phédon. Faut-il aller plus loin et penser[22] que Salluste a voulu rappeler, par voie d’allusion, cette lecture suprême du Phédon ? Il serait téméraire de l’armer. En tous cas, bien qu’il y ait une analogie frappante entre les termes dont se sert l’historien, et les termes mêmes de Platon, ce serait attacher une importance excessive à ces deux mots, divorso itinere. Tout ce qu’il est permis de dire et ce que l’on croirait volontiers, c’est que le souvenir de cette lecture était lié dans la pensée de Salluste à celui de Caton. Sans voir dans cette ressemblance, que Jacobs a relevée et qu’il parait avoir accusée trop nettement, une allusion volontaire et directe, on a peut-être le droit d’y voir l’effet d’une vague réminiscence, qui aura flotté devant l’esprit de Salluste et aura pu lui dicter, presque à son insu, le choix de ses expressions. Par cet exemple particulier, on a essayé de montrer quel est l’art de Salluste dans ses discours. C’est un fait bien connu que, à l’imitation de Thucydide, il dédaigne les qualités de pure forme, celles qui produiraient l’illusion de la véritable éloquence, et qu’il se propose avant tout d’expliquer, par le moyen de ses harangues, aussi clairement, aussi complètement qu’il lui est possible, et la signification des événements et le caractère des hommes qui les dirigent. Mieux que tout autre peut-être, le discours inséré au 52e chapitre du Catilina se prêtait à l’étude qu’on voulait faire. En l’examinant à un autre point de vue, il serait aisé de prouver que la nature et l’importance politique du débat, porté devant le Sénat aux nones de décembre, y sont très nettement définies. En considérant uniquement le personnage de Caton, on a pu se rendre compte de la manière dont l’écrivain comprenait la peinture des caractères. Il ne s’astreint pas à une fidélité minutieuse, il ne s’embarrasse même pas trop de la vraisemblance, qu’il sacrifie à la recherche de la vérité générale. Sa pensée, dépassant le moment précis où le discours est prononcé, va prendre, dans l’existence entière de l’orateur qu’il met en scène, tous les traits qui sont de nature à le faire mieux connaître. Le personnage, ainsi présenté, n’est point une abstraction, car tout ce qui constitue sa personnalité, sa physionomie propre, est très fortement marqué ; mais le portrait, tracé par l’écrivain, a quelque chose d’idéal, puisqu’on y trouve rassemblées, ramassées en un seul moment et dans une seule action, ces qualités diverses qui, dans la réalité, ne se manifestent que d’une manière successive. Il n’y a peut-être rien de plus remarquable, dans le génie de Salluste, que ce goût de la vérité générale, que cette habileté à la découvrir et à la mettre en pleine lumière. C’est parce qu’il possède cette force d’esprit et ce que l’on pourrait appeler cette puissance de concentration, qu’il a excellé dans les portraits. De même, pour ses descriptions et pour ses récits. Que l’on étudie à ce point de vue, dans le Jugurtha, l’histoire des campagnes de l’année romaine. on serait parfois en droit de désirer des informations plus détaillées ; mais, à défaut d’un itinéraire toujours exact et minutieux, l’écrivain sait marquer chaque campagne par des traits distincts, en choisissant pour chacune d’elles l’épisode le plus caractéristique, par exemple, pour la première année de Metellus, la bataille du Muthul[23], et, pour la seconde, l’expédition sur Thala[24]. Il découvre ainsi successivement les différents aspects de la guerre africaine, et ses peintures sont d’autant plus vraies qu’elles sont moins chargées de détails ou, pour mieux dire, ne contiennent que des détails expressifs. En cela, comme en beaucoup d’autres choses, il est l’élève de Thucydide[25] ; mais, parcs que cette méthode, naturelle à l’historien grec, est chez lui le produit d’une imitation savante et laborieuse, on ne lui contestera pas cependant le mérite d’avoir su se l’approprier. Annales
de la Facultés des Lettres de Bordeaux — 1881 |
[1] Il eût été plus exact de mettra en regard du texte de Salluste cet autre passage du Phédon (ch. 57), où les mots mêmes de l’historien latin divorso itinere se trouvent annoncée et, en quelque sorte, commentés par avance.
[2] Ce souvenir avait déjà été rappelé par Dietsch dans une note sur le même passage (édition de 1843).
[3] Suétone, Vit. Cæsar, 14. — Détail significatif, le paisible Atticus était a la tête de cette bande armée : Equitatus te signifero ne principe. (Cicéron, Ad Att., II, 1.) En admettant même que les expressions de Cicéron soient quelque peu exagérées, le fait de la présence d’Atticus ne paraît pas contestable.
[4] Cf. Catilina, 50, 4.
[5] Cf. Catilina, 49, 4.
[6] Animi mobilitate impulsi (Catilina, 49, 4.)
[7] Cat. min., 23 et 24.
[8] Sans vouloir traiter ici ce sujet, je crois devoir réfuter une opinion qui a été souvent exprimée. On explique le silence que l’historien garde sur la 4e Catilinaire par la jalousie et la haine qu’il aurait nourries contre Cicéron. Mais, en réalité, c’est Caton qui a joué le rôle décisif dans cette délibération des nones de décembre ; c’est lui qui a entraîné le sénat, et son discours, sinon au point de vue littéraire, du moins historiquement et politiquement, est beaucoup plus important que la 4e Catilinaire. Du moment qu’il ne reproduisait pas tous les détails du débat, il était naturel que Salluste mit au premier plan le personnage de Caton plutôt que celui du consul. Brutus, qui n’est nullement un ennemi de Cicéron, avait déjà fait la même chose dans son éloge de Caton, au grand scandale, il est vrai, de Cicéron, qui s’en plaint amèrement à Atticus (ad Att. XII, 21). — D’une manière générale, il me semble que l’on s’est beaucoup exagéré la malveillance qui aurait animé Salluste contre Cicéron, et cela pour avoir souvent tenu trop de compte des déclamations apocryphes.
[9] Sed memoria mea, ingenti virtute, divorsis moribus fuere viri duo, M. Cato et C. Cæsar ; quos quoniam res obtulerat, silentio præterite non fuit consilium.... (Catilina, 53, 6.)
[10] Il suffit de se rappeler le Caton de Cicéron et l’Anti-Caton de César.
[11] Catilina, 52, 7.
[12] Pro Mur., 28.
[13] Pro Mur., 29 : Non mulla peccas, inquit ille fortissimo viro senior magister ; sed, si peccas, te regere possum. At ego te verissime dixerim peccare nihil....
[14] Catilina, 52, 5.
[15] Catilina, 52, § 21-23.
[16] Catilina, 52, § 11.
[17] Catilina, 52, § 30-31.
[18] On objectera peut-être qu’ils se retrouvent également dans le discoure que l’historien met dans la bouche de Marius (Jugurtha, 85) ; nulle part, en effet, Salluste n’a fait plue d’emprunts à Caton l’ancien. Mais ce fait, qui est incontestable, ne me paraît pas contredire les idées qui viennent d’être exposées. Il prouve simplement que Caton le Censeur était si bien, pour les Romaine en général et pour Salluste en particulier, le représentant du passé et des vieilles mœurs qu’il était presque impossible de blâmer le présent et les masure nouvelles sans que son souvenir se présentai immédiatement à l’esprit. L’historien songe à lui, quand il fait parler Marius, comme il y avait songé, quand il avait fait parler Caton d’Utique. Dans le dernier cas, ce souvenir était d’autant plus naturel qu’il était amené par la similitude du nom et par certaines ressemblances, très réelles, entre les deux Caton. On peut voir, d’ailleurs, par un passage de Cicéron (Pro Mur., 31), que Caton d’Utique ce vantait lui-même de ressembler à son bisaïeul et le prenait pour modèle. Il est donc bien permis de penser que Salluste, voulant caractériser son personnage de la manière la plus générale, lui a attribué quelques-uns des traités du premier Caton.
[19] Catilina, 51, 20.
[20] Plutarque dit de lui : ώλως φιλοσοφία προσκεκρουκώς. (Cat. maj., 23.)
[21] Entre beaucoup d’autres témoignages, il suffira de citer celui de Pline (H. N., VII, 30, 113) qui montre bien que jamais, quelles que fussent ses occupations, Caton ne pouvait renoncer à la philosophie, â cette étude de son choix : Utirencis Cato unum ex tribunatu militum philosophum, alterum ex Cypria legatione deportavit. Cicéron, dans un passage du De Finibus (III, 2) nous le représente comme un lecteur insatiable ; il lisait jusque dans le sénat, pendant les séances (in ipsa curia soleret legere sæpe).
[22] Cette pensée semble être venue à l’esprit de R. Jacobs ; du moins, la fin de sa note le laisserait croire.
[23] Jugurtha, 48-53.
[24] Jugurtha, 75-76.
[25] Sur cette question des emprunte de toute sorte faits par Salluste à Thucydide, on peut consulter la dissertation de Laureck. De C. Sallustii rispi Cingenio, acte rationeque dicendi. Accedit comparatio cum Thucydide et Tacito. (Ahrweiler, 1873.) Bien que le travail de Laureck soit parfois superficiel et souvent écourté, surtout dans la deuxième partie, il contient plus d’une remarque judicieuse.