Le
lundi 27 décembre, sur les huit heures du matin, Foucault, assisté d'un
commis greffier et de quatre huissiers, se rendit à la Bastille pour
signifier à l'accusé l'arrêt de l'avant-veille. D'Artagnan fit descendre
Foucquet dans une vaste pièce située au-dessous de sa chambre. C'était
l'ancienne chapelle haute du château. Aux quatre coins, paraissaient encore
les emblèmes symboliques des quatre évangélistes, derniers vestiges du
caractère religieux du lieu. On y avait fait apporter d'avance une table et un
seul siège, pour Foucault. Interpellé
d'abord d'avoir à dire son nom : Vous le
connaissez assez,
répondit Foucquet ; et, comme Foucault insistait, alléguant l'usage : J'ai refusé de dire mon nom à la Chambre, pour sauvegarder
mon privilège ; au surplus, c'est à vous à me dire pourquoi sous me demandez
mon nom[1]. Sans pousser plus loin la
discussion, Foucault, prenant son bonnet qu'il avait posé sur la table, et
s'en couvrant, lut l'arrêt au prisonnier, resté debout, découvert, le chapeau
à la main. Cette lecture finie, Foucquet renouvelle ses protestations, en demande
acte. N'obtenant pas de réponse, il s'adresse aux témoins, les supplie de se
souvenir de ce refus. Pour couper court à cette scène émouvante, d'Artagnan
fait rentrer le condamné dans sa chambre. En même temps, Besmaux conduisait
La Vallée et Pecquet dans une autre pièce de la prison. Ces deux hommes de
cour fondaient en larmes, demandant à suivre leur maître. Qu'alloit-on faire de luy ? ne vouloit-on pas le faire
mourir ? Dans leur
désespoir, ils s'arrachaient les cheveux. D'Artagnan, par humanité, leur
envoya dire de se rassurer, et qu'il ne s'agissait que du bannissement. C'était
un dur, mais loyal soldat que d'Artagnan. Se trouvant seul avec Ormesson,
venu ce même matin pour reprendre les fameux registres de l'Épargne, il
l'embrassa et lui dit à l'oreille qu'il était un
illustre, on dirait
aujourd'hui un brave homme — Je n'entends rien, ajouta-t-il, à
toute cette affaire ; à mon retour, je viendrai vous entretenir. Foucault,
son expédition terminée, en rend compte au rapporteur, rédige avec lui le
procès-verbal de décharge des registres. Puis, Ormesson, conduit dans la
chambre occupée jusqu'alors par Foucquet, prend tous les papiers, simples
copies, parait-il, des pièces du procès[2]. S'il y en avait d'autres,
Besmaux avait eu le temps de les enlever. Comme l'honnête magistrat revenait,
Foucquet, de la fenêtre de la nouvelle chambre où on l'avait séquestré,
l'aperçut, lui cria qu'il était son très humble serviteur. Ormesson n'osa
répondre que par un salut ; mais il courut, le cœur serré, chez son amie
Sévigné, se soulager en lui racontant ce qu'il avait vu[3]. Sur les
onze heures, on fit monter Foucquet en carrosse, sans lui permettre de voir
personne de sa famille, pas même sa mère, pas même sa femme ni ses enfants.
On ne put si bien faire, toutefois, que le fidèle Laforêt ne parvint à se
placer sur le passage de son maitre. Foucquet, d'un geste amical, lui
témoigna toute sa reconnaissance. Je suis
ravi de vous voir ; je sais votre fidélité et votre affection. Dites à nos
femmes qu'elles ne s'abattent point ; que j'ai du courage de reste et que je
me porte bien[4]. Laforêt
était ce brave garçon qui, voyant le surintendant arrêté à Nantes, était
parti à la première minute à franc étrier pour Paris. S'il avait autrefois
servi son maitre jusque dans ses faiblesses, il lui resta non moins fidèle
dans le malheur, et dévoué jusqu'au sacrifice de sa vie. Spectacle
non moins surprenant, quand le carrosse sortit de la Bastille et franchit la
porte Saint-Antoine, tout le peuple acclama le prisonnier, le couvrant de
bénédictions[5]. Au jour de son arrestation, le
surintendant eût couru risque d'être pendu. Un jugement déloyal dans la procédure,
arbitraire dans l'application de la peine, cette peine elle-même cruellement
commuée en une sorte de mort perpétuelle, cette complète tyrannie avait
retourné les esprits. Ce fut comme un triomphe. Au fond de son carrosse,
entre les trois hommes qui le gardaient à vue, au milieu des cent cavaliers[6] de son escorte, Foucquet
paraissait calme, souriant à ce dernier souffle de la faveur populaire,
faveur sincère, cette fois. Le peuple n'avait rien compris aux chicanes du
procès ; il était devenu clair pour lui que Foucquet, prodigue peut-être,
jamais avare, n'était pas un de ces pleutres qui, chassés d'un pouvoir
malhonnêtement exercé, se retirent piteusement dans l'ignominie d'une fortune
faite à ses dépens. La
désignation de Pignerol comme lieu de captivité constituait déjà une première
peine. Nicolas, à chaque étape de ce triste convoi, put croire qu'il
redescendait le cours de sa vie. La
première couchée fut à Villeneuve Saint-Georges. Le lendemain, on passa par
Melun, presque en vue de Vaux, pour aller prendre le gîte du soir dans
quelque auberge à Fontainebleau, à deux pas de la Surintendance et de la
petite laiterie de la Mi-Voie. La pauvre Menneville expiait les faiblesses de
son cœur dans un couvent, où bientôt elle devait mourir, victime peut-être
innocente. Le
lendemain, nouveaux souvenirs, Moret à traverser, son vieux donjon, séjour
alors détesté, envié à cette heure. L'avant-dernier voyage du surintendant,
au temps de sa prospérité, s'était fait sur cette route, mais dans l'autre
sens, quand il revenait des Pyrénées, premier messager de la paix assurée,
personnellement vainqueur de ses ennemis, il le croyait du moins, s'apprêtant
à recevoir la soumission de Colbert abandonné par son maître Mazarin. À
Dijon, il avait parlé en maitre aux États ; à Lyon, il avait reçu les
ovations. Ce fut
bien pis, quand de Lyon il fallut gagner le Dauphiné, en suivant d'abord ces
rives du Rhône, où quelques lieues plus bas, à Valence, il avait failli être
précipité par une foule en fureur. C'est à Grenoble qu'il avait pour la
première fois exercé le pouvoir comme intendant. Il y revenait prisonnier. On
était en plein hiver, par un temps fort rude. Quelque chemin qu'on prit pour
gagner Embrun et Briançon, la neige et la glace les couvraient. À Embrun,
l'évêque d'Agde chercha à voir son frère au passage. On ne sait s'il y
réussit[7]. Après la première heure de
surexcitation à la sortie de Paris, et la première joie de ne plus sentir
peser sur ses épaules les lourdes voûtes de la Bastille, Foucquet avait été
repris par ses infirmités. On le sut bientôt à Paris, car on y suivait le prisonnier
jour par jour dans sa marche vers l'exil. Les amis s'alarmèrent. Des bruits
d'empoisonnement avaient couru. Quoi, déjà ![8] s'écria Mme de Sévigné. Alarme
vaine ; crainte injuste, au moins quant au Roi, trop enclin à la rancune,
mais incapable d'un pareil crime. D'Artagnan, au contraire, continuait à
donner à son captif de nombreuses preuves de bonté, relevant son courage, lui
répétant que tout allait bien. Il le couvrit de fourrures,
quand le convoi franchit les Alpes, en gravissant le mont Genèvre, vers le 10
janvier, par un froid partout rigoureux en cette saison, presque
insupportable au milieu de ces montagnes et dans ce col étroit de Cervière,
où le vent cingle le visage. On
atteignit enfin les fameuses portes Dauphinoises, anciennes frontières de la
France, Fenestrelle, où un pontife devait être un jour enfermé par un despote
populaire, plus dur que Louis XIV, puis le petit fort, à demi ruiné, de la
Pérouse. Enfin, le 16 janvier[9], au détour de la vallée, on
aperçut, se détachant sur le fond blanc des montagnes, une enceinte de
briques brunes, des maisons aux toits rouges, et par-dessus tout, dominant
les clochers des églises et de l'abbaye, le haut donjon de Pignerol. Pignerol
! Pendant le règne de Louis XIII, on n'avait parlé que de cette conquête. Le
père de Nicolas Foucquet était un des négociateurs qui en avaient apporté la
clef à Richelieu. Sept ans déjà passés, l'aimable et intelligente petite
Bretonne, Mlle de Trécesson, l'aurait fait rendre aux Piémontais, si le duc
de Savoie eût voulu épouser une Mazarini. Le mariage d'Espagne avait fait
avorter toutes ces combinaisons. Où était-elle à cette heure, cette nièce de
Mme du Plessis-Bellière ? Elle menait une existence assez agitée ; mariée à
un Cavour, puis chassée du Piémont, elle s'était retirée en Provence[10]. Autre
souvenir, le gouverneur de Pignerol était un sieur de Roncherolles, cousin de
Menneville, la belle et aimable fille d'honneur[11]. Pignerol
était alors une ville non pas italienne, non pas française non plus. On y
parlait piémontais, et cela suffisait pour qu'un étranger, un espion, un
conspirateur d'enlèvements s'y fit promptement reconnaître à son langage.
Entrer dans Pignerol était déjà difficile, mais il n'était permis à personne
de la ville de pénétrer dans la citadelle, à personne de la citadelle de
franchir la porte du donjon assigné pour séjour à Foucquet. Dans ce
donjon, situé au nord-est, divisé en plusieurs étages, on avait préparé une
chambre assez grande, de 26 pieds de long (8m,60) sur 12 pieds (3 mètres) de large, une autre un peu plus
petite, avec une grande garde-robe[12]. C'est là qu'on introduisit le
maître de Saint-Mandé, le seigneur de Vaux. D'Artagnan prit congé de Nicolas,
le laissant à la garde d'un de ses lieutenants, le sieur de Saint-Mars, qui,
dès le 20 décembre, avait été envoyé en avant à Pignerol, où il était arrivé
le 10 janvier pour préparer les logements[13]. Le
choix qu'on avait fait de Saint-Mars pour le garder ne déplut pas au
prisonnier. C'était déjà une vieille connaissance pour lui ; il l'avait vu
dans l'escorte qui de Nantes le conduisit à Angers, puis d'Angers à Amboise.
Peut-être même le connaissait-il de plus loin. Le brigadier, de son vrai nom,
s'appelait d'Auvergne ; son père, escuyer, sieur de Saint-Mars, servait comme
capitaine d'infanterie dans le régiment de Persan[14], que Foucquet avait eu sous ses
ordres lors du blocus de Paris en 1658. Louis
d'Auvergne, comme son régiment, avait suivi Condé dans sa lutte contre
Mazarin et s'était retiré à Bruxelles[15]. Bénigne, le fils, avait pris
ses grades parmi les mousquetaires. C'était un homme de quarante-trois ans
environ, grand, beau soldat, d'humeur assez gaie, mais rompu à la discipline,
suivant les ordres à la lettre, plutôt au-delà qu'en deçà. Colbert le
connaissait bien et lui avait donné des instructions en conséquence. Circonstance
aussi véritable que surprenante, le geôlier et le prisonnier, Saint-Mars et
Foucquet, étaient parents sans le savoir. Dans la descendance de Jean Bureau,
grand maitre de l'artillerie sous Charles VII, le savant Godefroy avait placé
les Castille-Villemareuil et Mme la surintendante. Or, en remontant à
plusieurs générations en arrière, on y trouvait aussi un sieur du Tremblay
allié à une famille Garreau ou Garrot. Précisément la mère de Saint-Mars
était issue de cette famille[16]. Une
grande dame, comme Mme Foucquet, ne considérait pas l'alliance d'un brigadier
de mousquetaires. Le brigadier eût peut-être agi autrement ; mais, sans
fortune, pris dans les troubles, il n'avait guère eu le temps de s'enquérir
des parents de sa mère. On peut
ajouter que, si la moindre reconnaissance de parenté se fût opérée
publiquement, la défiance de Colbert eût aussitôt changé le geôlier. Interdiction
absolue de toute communication du prisonnier avec qui que ce soit, de
vive-voix ou par écrit, de toute visite, de toute sortie, même pour se promener. Pas de plumes, pas d'encre, ni de papier. Des
livres, un à la fois, visité avant et après la lecture. Pour le service, un
valet, mais qui n'aura non plus de liberté
que ledict Foucquet,
moyennant quoi on lui allouera 600 livres de
gages. Quant à la
forme de la garde, on ne prescrivait rien. Saint-Mars se réglera sur ce qu'il a vu pratiquer par le sieur d'Artagnan, à Vincennes et à la Bastille[17]. Pour plus de sûreté, Louvois
donnait à Saint-Mars un surveillant, pour ne pas dire un espion, dans la
personne d'un sieur Damorezan, commissaire des guerres à Pignerol, qui lui
tenait par des liens plus étroits que légitimes[18]. Saint-Mars,
nommé capitaine d'une compagnie franche, commandait seul dans le donjon.
Suivant une méthode qui rappelait l'administration romaine, les provinces
réunies et les villes frontières étaient partagées entre les différents
ministres. Pignerol appartenait comme gouvernement au ministère de Le
Tellier. Cependant, les travaux neufs ou réparations concernaient celui de
Colbert. Saint-Mars était d'ailleurs résolu à rester agréable à l'un et à
l'autre de ces deux illustres. Il
s'appliqua d'abord à former sa compagnie. Quatre officiers, autant de bas
officiers, cinquante hommes, puis soixante[19]. Toute sa famille y entra, les
Formanoir, les Blainvilliers, braves gens, ayant reçu plus de coups à la
guerre que de pensions. L'entretien de tout ce monde, payé par abonnement,
était une source presque autorisée de petits profits. Avec un prisonnier pour
qui le Roi donnait 8.000 livres environ par an, 40.000 francs à la valeur de nos
jours, non compris les habits, les livres, etc., la situation devenait
acceptable. Enfin, et pour mettre le capitaine tout à fait en bonne
disposition, on paya la solde à partir du 1er janvier, bien qu'il n'eût pris
son service qu'à la fin du mois. On lui fit d'ailleurs fortement sentir le
prix de cette grâce[20]. Les
premiers mois de la captivité se passèrent sans difficultés trop grandes, si
ce n'est pour le choix d'un confesseur. C'était le seul, l'inévitable défaut
dans le solide réseau forgé autour du prisonnier. Le plus autoritaire des
Rois Catholiques n'aurait pas refusé un confesseur au plus dangereux de ses
ennemis. Captif et tyran s'inclinaient sous la même loi. Cependant, Foucquet
pouvait ne se confesser que pour obtenir des nouvelles. De là, nécessité de
choisir et de surveiller le confesseur. On en prit d'abord un du pays, puis
un autre, parlant français, précepteur chez le commissaire des guerres,
Damorezan. Cet ecclésiastique était de l'humeur souhaitée. Certes il ne
révélait pas les secrets de la confession, mais donnait des renseignements
utiles, par exemple, d'avoir à veiller aux livres empruntés pour Foucquet.
Aussitôt, Saint-Mars, renonçant aux emprunts, en acheta fort loin, à Turin, à
Lyon. On limita les confessions à quatre fois par an[21]. Le
printemps revint, faisant fondre les neiges sur les montagnes. Foucquet
demanda des lunettes d'approche. Puisqu'on lui défendait de sortir des quatre
murs de sa prison, ne pouvait-on pas lui permettre d'appeler à lui, par une
illusion d'optique, la montagne verdoyante, l'espace, l'apparence de la
liberté ? Louvois refusa. Le prisonnier a, dit-il, vraisemblablement dessein de s'en servir à quelque chose
contre le service de Sa Majesté. On avait vu dans la ville un homme suspect ; puis deux
domestiques du surintendant[22], qui cherchaient peut-être à
faire passer quelque billet à leur maître. Par un redoublement de sévérité,
le Roi n'avait plus voulu qu'on donnât au prisonnier des nouvelles de sa
famille. Une lettre de Mme Foucquet, remise à d'Artagnan, fut renvoyée au souverain
et gardée par lui[23]. Nicolas se plaignit de la
rigueur de Saint-Mars, qui transmit la plainte avec une scrupuleuse fidélité.
Cela lui valut un compliment sur son exactitude et un encouragement. Il faut faire son devoir et laisser parler ceux qui y
trouvent à dire[24]. Le Roi,
absolument implacable, de même qu'il avait commué le bannissement de Foucquet
en prison perpétuelle, trouva bon d'infliger à une famille innocente un exil
arbitraire. Le 21 décembre 1664, bien que ce fût un dimanche, le prévôt de
l'Isle enjoignit à Mme Foucquet la mère et à sa belle-fille de se rendre à
Montluçon, la marquise de Charost et à son mari de se retirer à Ancenis,
enfin à Gilles Foucquet, l'écuyer, de se tenir à Joinville en Champagne[25]. C'étaient ces braves gens qui,
à l'admiration générale, avaient si généreusement défendu leur mari, leur
fils, leur frère. Foucquet prisonnier, ses biens sous séquestre, ils
n'étaient pas faits pour donner de si grandes craintes. La
pauvre grand'mère, Marie de Maupeou, supplia le Roi de lui laisser au moins
son fils Gilles. Elle avait soixante-douze ans. Il l'assisterait à la fin
d'une vie qui apparemment ne serait pas longue. Gilles Foucquet lui-même,
abandonné par sa femme, Mlle d'Aumont, déclarait qu'il n'avait pas pour se nourrir, si on ne le laissait avec ses parents. Il fallut se rendre à
l'évidence. On autorisa d'abord Mme Foucquet la mère à habiter l'abbaye du
Parc-aux-Dames, auprès de sa fille, qui en était abbesse[26], puis Gilles à vivre auprès de
sa belle-sœur. Enfin, après un pénible marchandage, ces trois victimes
reçurent la permission d'habiter ensemble à Montluçon. Les
autres frères, bien que s'étant moins montrés dans le procès, ne furent pas
mieux traités. François Foucquet, l'archevêque de Narbonne, Louis, l'évêque
d'Agde, Basile, l'abbé, reçurent l'ordre de se rendre à Alençon, à
Villefranche, à Bazas[27]. Comme
les parents, on dispersa les amis et les serviteurs. Bailli, avocat au Grand
Conseil, fut exilé pour avoir dit à Gisaucourt de prendre garde en donnant
son avis, que la Compagnie serait déshonorée s'il suivait Colbert et Pussort[28]. Pecquet et La Vallée furent
gardés à la Bastille pendant quatre mois, par défiance, pour les empêcher de
conspirer. Pecquet offrit en vain de s'enfermer à Pignerol. Il avait montré
trop de talents divers en aidant Foucquet au cours du procès, en copiant ses
pièces. Cet homme admirable fut reconduit à Dieppe, où, tout en illustrant
son nom, il ne cessa jamais de veiller de loin sur la santé de son cher
maitre et ami[29]. Vit-on
jamais dévouements plus nobles, plus touchants ? Seul, le jeune Louis restait
inexorable, montrant toujours, même en dansant ses ballets, un front sévère
et hautain. La bonne Sévigné, obligée d'assister à ces fêtes, et comme mère
et parce qu'il ne lui était pas permis de laisser voir trop de peine, se
désolait à l'aspect de ce dur visage et murmurait ce vers : Forge più di timor che di
speranza[30]. Ce
jeune prince se trouvait, parait-il, plus lésé que Foucquet par l'arrêt du 20
décembre. Les juges l'avaient trahi. Colbert le lui prouvait. A quel
but devait tendre la Chambre ? À venger le peuple, à reprendre aux financiers
leurs profits. Qu'avait-elle
fait depuis trois ans et trois mois ? Au civil, elle a supprimé un million de
rentes sur les tailles ; imputé les arrérages sur le principal ; décidé le
retour au Roi des domaines aliénés depuis son avènement. Voilà tout. Au
criminel ? Elle a jugé Bruant, Gourville, par contumace. Colbert ne disait
pas qu'il avait fait échapper Gour-ville. Elle a condamné à mort deux ou
trois misérables. On n'a rien fait des trésoriers de l'Épargne, de Catelan,
de Boilève, de Delorme. Au surplus, que peut-on attendre d'une Chambre qui
n'a pas trouvé Foucquet assez criminel pour le condamner, lui convaincu par
l'aveu de son crime, par son écriture reconnue, par tant de millions
consommés ? Assurément, ces gens-là ne condamneront pas des trésoriers,
simples exécuteurs de ces désordres ; tout au plus frapperont-ils quelque
sergent. La corde n'est faite que pour les
coquins. Aussi
les prétentions des accusés vont en augmentant. Un Aubert allègue, pour sa
défense, qu'on n'a pas condamné à plus de 2.000.000 de livres les fermiers
des Gabelles, à qui le Roi doit sept millions. Un sieur Jacquier s'inscrit en
faux contre tous les procès-verbaux de l'Épargne et veut compenser ses dettes
avec ses créances sur le Roi. Et la Chambre l'admet ! C'est désormais sa
jurisprudence ! Les treize, qui ont esté
favorables au sieur Foucquet et qui sont les mesmes qui ont toujours esté
contraires à ce qui a esté advantageux au service du Roy, le seront encore en
toutes choses. Quant
aux neuf — les neuf qui avaient voté la mort —, ce sera beau s'ils se
maintiennent, abandonnés de tous, exposés aux insultes et aux affronts. Voici
ce que proposerait Colbert, si le Roi l'agréait. Continuer quand même la
séance de la Chambre jusqu'au départ du souverain pour Saint-Germain, lui
faire juger quelques procès criminels, les affaires d'Aubert et de Jacquier, dans le sens voulu, former sur le, tout une déclaration du Roi,
abolissant le crime et convertissant les recherches en taxes ; réunir les
biens des traitants au domaine royal, à charge des hypothèques. On payera les
créances véritables ; on emprisonnera les traitants. — Le Roi est jeune ; il
purgera, par la longue possession, les défauts possibles du titre ainsi
obtenu[31]. En
Conseil, Colbert avait proposé de fermer la Chambre. Le Roi devait porter au
Parlement un acte de confiscation de tous les biens des gens d'affaires.
C'est de Sève qui fit ajourner la décision[32]. Colbert, comme on l'a vu,
consentait bien à modifier la forme, pourvu qu'on lui abandonnât le fond.
C'est par là qu'il séduisait ce jeune prince, très avide comme son
conseiller, mais avec cette vue toute différente de pouvoir être aussi très
prodigue. Colbert
ne quittait pas aisément une idée. Il en voulait à la Chambre. Il fallait la
révoquer, composer une Chambre royale. En fin
de compte, on se décida pour une épuration. Dès le 11 février, Rocquesante
fut exilé à Quimper-Corentin. — On sait assez que le destin adresse là les gens quand il veut qu'on enrage. En annonçant à la Chambre la
décision du prince, Séguier laissa entendre qu'on serait allé plus loin, sans
certaines considérations. En d'autres termes, on aurait pu poursuivre
Rocquesante pour corruption. Lui et une dame de Rute avaient trafiqué avec Berryer.
Un comble ! Punir ce juge consciencieux ne suffisait pas, on voulait le
flétrir. Un arrêt fut rendu, sans délibéré, et Rocquesante livré à
Gisaucourt. En même
temps, on renvoya Du Verdier à Bordeaux. On inquiéta l'honnête Moussy,
l'héroïque Masnau. Ormesson se vit privé de la charge de son père, avec un
mot très dur. A la
rentrée de la Chambre de justice (12 janvier 1665), un premier arrêt ordonna que
des monitoires seraient partout publiés pour obtenir connaissance des biens
appartenant ou ayant appartenu au sieur Foucquet[33]. Tous les locataires, fermiers,
etc., du surintendant sont sommés d'avoir à produire leurs titres[34]. Foucquet
n'avait pas menti, ses créanciers se révélaient en grand nombre, et pour de
grosses sommes. La confiscation de tous les biens de leur débiteur, au seul
profit du Roi, ne pouvait les satisfaire. Aussi s'étaient-ils réunis, nommant
des directeurs. À leur requête, il fallut ordonner un récolement des meubles
à Vaux, à Saint-Mandé, à Paris, où depuis trois ans tout était au pillage[35]. On veilla à l'entretien des
magnifiques orangers de Saint-Mandé[36]. Le Roi les prit. Aussitôt,
le procureur général Chamillart intervient, expose à la Chambre qu'il a voulu
saisir les biens de Foucquet en vertu de l'arrêt du 20 décembre. Des
créanciers prétendent s'opposer à cette saisie ; ridicule prétention qui
réduirait le Roi à la simple perception de l'amende, à une confiscation
illusoire. C'est inadmissible ! Les créanciers n'ont rien à espérer[37]. Évidemment,
on voulait se dédommager sur les biens de ceux qu'on ne pouvait faire périr.
Les créanciers de Jeannin s'étant aussi opposés à la saisie de son actif,
alléguaient qu'on lui devait plus de six à sept millions, sur lesquels le Roi
pouvait se payer des huit cent mille livres de restitution. Séguier se
récria. Pas de compensation ! Ce chef de la justice ne parlait plus que par
maximes capables de donner de l'horreur à un
Turc[38]. Un
autre traitant, Jacquier, un de ceux que Colbert avait désignés aux
poursuites, s'était échappé. De sa retraite, il protestait avec une telle
énergie que Pussort eut peur et se fit récuser. Sainte-Hélène fut avisé qu'il
serait pris à partie, lui et sa postérité[39]. Tous
cependant ne s'en tiraient pas à si bon compte. Au cours de son procès,
Foucquet avait cité, comme preuve de l'amnistie accordée à tous les crimes,
l'exemple de Fargues, l'ex-gouverneur de Hesdin[40]. Est-ce ce souvenir ? est-ce un
autre incident qui ramena l'attention sur cet infortuné ? Toujours est-il
qu'il fut pris, jugé, pendu en quelques semaines. Il eut pour juge Machault,
le fils d'un des commissaires de Chalais, et non pas Lamoignon ; comme
Saint-Simon l'a dit ; mais Lamoignon eut le tort grave d'accepter les biens
de la victime. C'était relativement si peu de chose, que le Roi les donna,
tristes largesses, ensanglantant à la fois les mains qui les reçoivent et
celles qui les donnent. Une tempête
de confiscations soufflait sans relâche. Colbert, dans un Mémoire sur le
règlement des taxes, n'indiquait pas d'autre moyen : rechercher tous les
effets des gens d'affaires ; attacher un homme intelligent à la recherche des
vieux billets remboursés ; en distribuer la restitution. On entend bien
que, par distribuer, Colbert veut dire imposer. Une
cote mal taillée, voilà tout ! Les
effets (c'est-à-dire
les créances) de
ces gens-là une fois saisis, M. Chamillart en
a la liste, voir ce
qui leur sera dû par Foucquet. Le Roi le prendra en payement de leur propre
dette envers lui[41]. Pour
éviter la criaillerie, il sera bon de se rendre maitre d'une des prisons de
Paris, comme le For-l'Évêque, pour y mettre
tous les gens d'affaires
qu'on arrêtera, s'ils ne pavent leurs taxes. Au besoin, vider la Bastille de
tout ce qui s'y trouve à présent, même des criminels, le seul Jeannin
excepté. Ces gens-là y sont trop à leur aise ; il faut les fatiguer[42]. Comme
pour mieux marquer la volonté du gouvernement, le 1er juin 1665, le procureur
général près de la Chambre de justice requit la nomination d'un tuteur aux
enfants de Nicolas Foucquet, la désignation à cet effet d'un conseil
soi-disant de famille, uniquement composé d'étrangers, quatre d'un côté,
quatre de l'autre. Ainsi Foucquet était mort civilement et sa famille restait
placée, en dehors du droit commun, sous la juridiction de la Chambre[43]. Au
moment où l'on traitait l'infortuné prisonnier comme s'il n'était plus de ce
monde, peu s'en fallut que la fiction de droit ne devînt une réalité.
L'ingénieur chargé d'assurer son logement à Pignerol avait signalé comme
nécessaires certains travaux dans la citadelle, notamment la construction de
magasins à poudre, si l'on voulait retirer du donjon ces dépôts dangereux[44]. Vers le 18 juin, en plein
midi, une explosion formidable ébranlait l'édifice jusque dans ses
fondements. La foudre l'avait frappé, allumant les poudres amoncelées. Quand
Saint-Mars accourut, il aperçut d'abord un certain nombre de soldats blessés
ou mourants ; sous l'amas des décombres on cherchait Foucquet et son
domestique, et déjà on les tenait pour morts, quand on les aperçut réfugiés
et comme suspendus sur l'embrasure d'une fenêtre faisant saillie en dehors.
Le plancher de leur chambre avait sauté sans les emporter. Ils se trouvaient,
en quelque sorte, hors du donjon, dans la ville, en liberté[45]. A cette
nouvelle, ce fut une exclamation générale. Le ciel avait miraculeusement
sauvé Foucquet. Le ciel ratifiait la conduite d'Ormesson. Bien souvent ceux qui paroissent criminels devant les
hommes ne le sont pas devant Dieu[46]. Le
brave et honnête Ménage, versificateur à toute heure, mais vraiment poète ce
jour-là, inspiré par Mlle de Scudéry, par Mme de Sévigné, par la fidélité au
malheur, adressa au Roi une très belle supplique en vers latins. Ô Louis, que de vicissitudes ! Foucquet, jadis tant aimé
de toi ; Foucquet, tes délices, à qui tu confiais ta puissance, ton trésor,
le voilà condamné par toi, loin de ses chers enfants, loin de sa patrie. Dans
une haute prison, cent gardes se relèvent pour surveiller sa porte. Le ciel,
par quelle cause, on l'ignore, foudroie les gardes et la prison. L'un est
blessé, l'autre mourant. L'infortune est chose sacrée ; la foudre déchaînée
épargne l'infortuné. Il te reste sain et sauf, ô Louis. À ton tour, ô Louis,
image de la Divinité, d'imiter le Dieu suprême et de pardonner à ce
malheureux[47]. Le Roi
ne répondit pas. Louvois estima Foucquet très heureux d'avoir esté conservé dans un si grand désordre, alors qu'il y avait grand
sujet de le croire, lui et son valet, ensevelis sous les ruines[48]. Ce fut tout ; ce terrible
accident eut plutôt pour conséquence un redoublement de rigueur. Comme aucun
logement n'était entier dans le donjon, ni même dans la citadelle, on dut
conduire le prisonnier dans une maison de Pignerol, occupée par Damorezan, commissaire
des guerres[49]. Comble de fatalité, parmi les
débris des meubles brisés, on trouva des billets écrits par Foucquet, un
livre où certaine page exposée au feu laissa voir des caractères écrits à
l'encre sympathique. Un dossier de chaise renfermait des papiers. Le tout fut
envoyé à Louvois et au Roi. Le captif, très ingénieux, avec un os de chapon
faisait une plume ; avec du vin et de la suie, une encre excellente. À cela
pas de remède ; mais on peut l'empêcher d'avoir du papier, en le fouillant.
Le valet a trahi en n'avertissant pas. Il faut le réprimander sévèrement,
surtout savoir de lui comment cette encre sympathique a été composée[50]. On ne
laissa pas longtemps Foucquet dans Pignerol. Le 15 août, on le conduisit à la
Pérouse, petit fort situé sur la croupe d'une colline à quelques lieues à
l'ouest, en venant de France. Cet avant-poste, utile autrefois aux
Piémontais, à cette heure inutile aux Français, était presque abandonné. On
avait dû le remettre en état[51], mais quoi qu'on fit, le pauvre
malade qu'on y enferma sentit tomber sur lui la fraîcheur des murs
nouvellement recrépis de sa nouvelle prison, la huitième depuis sept ans. Une
année s'y écoula, sans autres incidents que ceux de l'éternelle lutte entre les
efforts de Foucquet pour écrire, donner ou recevoir des nouvelles, et
l'application de Saint-Mars à déjouer ces ruses incessantes. Un jour on
surprenait une plume, le lendemain du papier. Foucquet alors écrivit sur son
mouchoir. Louvois ordonna de fouiller le prisonnier tous les jours[52]. On remplaça le valet infidèle,
ce traître qui ne dénonçait pas son maitre. Le Roi d'abord n'avait point paru
soucieux de connaître les sentimens de M.
Foucquet ; mais Louvois
fit sentir la nuance. Le Roi craignait les fausses confidences ; il voulait
bien toutefois qu'on s'enquît auprès du valet de ce que faisait le prisonnier[53]. Surveillé
dans ses pensées, traqué dans ses faits et gestes, le malheureux finit par se
donner une occupation, qu'on ne connaît pas exactement. Elle marque bien, écrit le ministre à Saint-Mars, l'oisiveté dans laquelle il se trouve présentement. Il ne
faut pas s'estonner qu'un homme qui a eu une longue habitude au travail
s'aplique à de petites choses, pour s'occuper[54]. Cette
inaction forcée pendant ces longues heures d'un emprisonnement qui ne
comportait ni promenade, ni fenêtre ouverte, ni observation même lointaine de
la terre ou du ciel, ni nouvelles d'aucune sorte, même de la famille, était
la plus terrible des tortures que le Roi pût infliger à l'homme qui avait
tant travaillé pour lui. Foucquet, vers le mois de juin, tomba malade,
demanda le secours de son fidèle Pecquet. On le lui refusa durement. Cet homme, écrivit Louvois, ne luy rendra
jamais ses services, soit dans sa profession, soit dans le mestier d'un
simple valet[55]. On ne
pouvait pas être tendre pour Foucquet alors qu'on s'efforçait de tirer comme
conséquence de ce vaste procès, et comme consolation de son avortement, de
grands profits pécuniaires. Colbert,
avec le coup d'œil sûr d'un oiseau de proie, ne s'était pas trompé. Les
poursuites au criminel ne donneraient plus rien. On condamna aux galères un
pauvre diable de Gisors, appelé Lempereur. Ce fut tout, ou à peu près. On
finit, malgré Poncet, toujours hypocrite, à accorder une abolition à M. de
Guénégaud, admirablement défendu par sa femme, amie de Foucquet, amie de Mme
de Sévigné. Entre
temps, l'honnête Masnau avait surpris de nouvelles fraudes. Le propre
secrétaire du procureur général, Chamillart, copiait pour les Guénégaud les
pièces de l'instruction[56]. Évidemment, on ne prenait plus
au sérieux la Chambre de justice. Cette vieille machine de guerre pouvait
encore servir à quelques confiscations. Rien de plus. Le 14
juillet, on envoya à Vaux et à Saint-Mandé, faire le récolement des meubles,
le procureur Chamillart et le commissaire La Baulme. Ce dernier se fit
répéter l'ordre, tant la besogne lui répugnait[57]. Deux mois après, le pauvre
homme était renvoyé dans ses foyers[58]. Il partit, heureux d'être
libéré de ces corvées répugnantes. Tous les fermiers de Foucquet étaient
appelés à rendre compte[59]. La surveillance était exacte.
On avait signalé à l'hôtel de Chartres[60] des livres marqués aux armes de Foucquet. Ils furent saisis et, malgré
l'opposition de Jannart, substitut au Parlement, remis avec les autres
manuscrits en la bibliothèque du Roi. Toutes
ces procédures n'allaient pas à de grands résultats. Le Roi expulsa lui-même
la Chambre du Grand Arsenal dans le Petit Arsenal. C'est là que M. Guénégaud,
à genoux, écouta lire les lettres d'abolition de ses crimes[61]. Le 18 octobre 1666, on finit
par où Foucquet avait autrefois voulu commencer, par une transformation de
toutes ces poursuites en taxes, arbitrairement fixées à un total de 110
millions de livres[62]. L'exécution fut digne de la
conception. La Chambre conféra au Roi un droit d'hypothèque sur tous les
biens des gens d'affaires, par préférence à tous autres créanciers. En vain
quelques hommes de bon sens et d'équité protestèrent-ils contre cette violation
du droit commun. Cette confiscation à peine déguisée fut mise à exécution. En
vain allégua-t-on les familles ruinées, le crédit abattu, la foi publique
détruite. Rien ne valut. On sut et il faudrait ne jamais oublier qu'il y a
des temps où les particuliers ne peuvent se fier à la parole ou à la
signature des gouvernants. Rien ne fausse plus la conscience d'un peuple que
ces spoliations commises au nom de l'État, juge et partie. Le dépositaire de
l'autorité, prince ou chef d'État qui, par méchanceté, par abandon aux
passions mesquines des sous-ordres, réalise ces tristes profits, ruine le
trésor qu'il croit enrichir, et lui fait plus de mal que les pires
déprédations. Ces
décisions souveraines, rapaces et vexatoires, furent promulguées en séance
solennelle du Parlement, le 22 décembre 1666. C'était le coup de massue. Lamoignon commença par louer le Roi des
poursuites dirigées contre les financiers, il exprima la crainte toutefois
que cette guerre ne portât jusque sur les
innocents. L'avocat
général Bignon parla avec une grande vertu en
termes fort doux.
Le Roi se montrait sur son trosne, plein de
majesté et de terreur
; au-dessus cependant se voyait un autre
trosne... le cœur de ses sujets, où il devoit régner... le trosne où Dieu mesme prenoit plaisir à demeurer.
Puisque Votre Majesté veut estre obéie et qu'elle agit avec la plénitude
entière de sa puissance, par son très exprès commandement et par le seul
respect que nous devons à la présence de Sa Majesté, je requiers qu'il soit
mis lu, vu et registré. — Cette harangue, dit un contemporain, satisfit extrêmement toute la Compagnie ; mais le Rov
parut l'escouter avec peine[63]. Le plus
triste, c'est que Louise de La Vallière, si douce, si désintéressée, venue seule avec quelques autres damoiselles, assistait à cette séance,
spectatrice inconsciente de tant d'injustices accumulées, dont elle devait
être bientôt la victime expiatoire. Cette
cérémonie équivalait à l'enterrement de la Chambre, qui ne resta plus qu'à
l'état de fantôme pour enregistrer des décisions imposées, rendre des arrêts
faits d'avance chez le contrôleur général et tirer le dernier sou des 110
millions. Si peu de chose que fût ce corps judiciaire, on tint à en chasser
Masnau, Brilhac, Renard, Le Féron, Ormesson enfin. Croirait-on qu'on envoya
un mouchard en Picardie, où cet honnête homme avait été intendant, pour
chercher quelque prétexte à l'inquiéter et à le poursuivre[64] ? Si la
rancune de Colbert se chargeait des uns, le remords poursuivait et tuait les
autres. Il n'appartient pas à l'homme de se faire le héraut de la justice
divine ; mais il lui est donné de recueillir certains aveux. De celui de
Sainte-Hélène, sitôt qu'il eut eu achevé d'opiner, il se sentit frappé au
cœur, perdit le goût, l'appétit, sans pouvoir en revenir. Il avait opiné
selon sa conscience, et pourtant, répétait-il chez ses amis, il voudroit qu'il luy en eust cousté un bras et n'avoir jamais
opiné à la mort.
Ferriol, confident de ces remords, en éprouvait de non moins cruels. L'un et
l'autre moururent à bref délai[65], juges faibles, au fond braves
gens. Les Pussort et les Poncet ne se troublaient pas pour si peu. C'est
vers ce temps-là que fut accompli un acte vraiment étonnant et qu'on ne
saurait croire, si l'on n'en avait pas la preuve authentique. Colbert obtint
du Roi la permission de livrer au feu les papiers de Mazarin, dont il était
dépositaire, afin d'assurer ainsi le secret d'État et sa tranquillité
personnelle. Ce fut toute sa reddition de comptes. Il est à croire que dans
le brasier allumé pour détruire les pièces intéressant la mémoire du
Cardinal, on jeta celles qui auraient pu servir à la justification de
Foucquet[66]. Colbert,
cependant, touchait à l'apogée de sa fortune, mariant une de ses filles au
duc de Chevreuse, une fille de la Chevreuse à un de ses fils[67]. La chasse au Foucquet, à
l'ennemi commun, finissait par des mariages. Louise
de La Vallière aussi était faite duchesse, mais malgré elle ; les lettres
patentes de ce titre[68] non sollicité n'étaient au fond
que des lettres de congé. La nouvelle duchesse courait après le Roi, qui
courait après Mme de Montespan. À voir cette inconstance du jeune souverain,
on aurait pu espérer que sa colère contre le surintendant tomberait comme sa
passion pour la naïve demoiselle d'honneur. Mais, à mesure que ce prince si
remarquable montrait, chaque jour croissantes, les qualités d'un grand roi,
chaque jour aussi, par la force invincible du naturel et de l'éducation,
augmentait son monstrueux égoïsme. Assurément, il ne pouvait plus ressentir
de jalousie contre Foucquet ; mais il voulait ses trésors introuvables, ses
biens qui disparaissaient sous les dettes. Colbert avait habilement changé
l'objectif. Le Roi ne songeait plus à la confiscation du corps, si ce n'est
pour parvenir à celle de l'argent. Depuis
le 14 août 1666, Foucquet avait été réintégré dans le donjon de Pignerol[69]. Les jours, les mois, les ans,
allaient se passer désormais avec une régularité mortelle. Louvois consentit
bien à donner des livres, le Dictionnaire nouveau des rimes françoises,
les œuvres de saint Bonaventure, celles de Clavius, mathématicien du dernier
siècle ; mais il refusait celles de saint Jérôme et de saint Augustin. Simple
question d'argent peut-être ; car Louvois était très serré. S'il autorisait
la confection d'un habit d'hiver pour le prisonnier, il obligeait à faire resservir les collets à passements. Tout vieil habit sera repris,
de peur que Foucquet ne s'en serve pour corrompre son valet[70]. Vaine
précaution. Les valets sont toujours infidèles. Saint-Mars propose de les
enfermer, de manière qu'ils ne sortent que
par la mort. On
avait encore trouvé des pièces d'escritures prouvant que le prisonnier a Grande envie de négocier et de lier commerce. Il affectionnait une vue du côté des chapelles, sur la montagne. Ordre de la boucher
immédiatement. Il écrit sur ses rubans ; on ne lui en donnera que de noirs,
on mettra des doublures noires à son pourpoint. On installera une
blanchisseuse dans le donjon. Autre mesure. Une gratification de 1.200 livres
est accordée au confesseur, et en même temps on fait dire à Foucquet que cet
ecclésiastique n'est pas domestique de M. Damorezan, parti depuis plus d'un
an de Pignerol[71]. Cela devait donner confiance à
l'un et à l'autre. Le pénitent gardait toutefois quelque inquiétude. Il
demanda le supérieur des Jésuites ou le Père gardien des Capucins. Par un
même sentiment de défiance, on les lui refusa. L'infortuné
Foucquet ne passait point tout son temps en tentatives de correspondances. Il
s'appliquait à la contemplation des choses
spirituelles,
composait des traités dignes de l'approbation
de tout le monde.
La connaissance s'en était répandue dans le public, sans qu'on puisse deviner
par quelle voie. On y répétait que les disgrâces du surintendant qui le devoient apparemment accabler, au contraire, le portaient à un plus haut degré de perfection. On lui appliquait l'emblème du
ver à soie : Inclusum Tabor illustrat[72]. Ces traités avaient pour sujet
la piété, la religion, comme les Conseils de la sagesse, qu'on attribua plus
tard au prisonnier, et qui ne seraient pas une œuvre indigne de lui. C'était
un terrible séjour que celui de cette citadelle de Pignerol, l'hiver comme
ensevelie au fond d'un précipice de neiges et de glaces, l'été brûlée du
soleil, au milieu de rochers concentrant et gardant jusque dans la nuit la
lourde chaleur du jour. Les ardeurs de juin y étaient plus redoutables encore
que les frimas de janvier. À partir de 1667, la santé de Foucquet périclita
de nouveau. Le commencement de 1668 fut particulièrement pénible. Le maitre,
si l'on peut donner ce nom au captif, et les valets étaient malades.
Saint-Mars, redoutant quelque piège, redoublait de surveillance. Un jour, les
Récollets venant demander une pistole qu'un des valets leur avait promise, le
gouverneur la refusa. Cette aumône devait cacher quelque mystère. Vite, il en
écrit à Louvois[73]. Nouvelles précautions contre
Foucquet, qui en prend du chagrin[74]. Chagrin de prisonnier,
tentative d'évasion. En
conscience, le logement de l'infortuné était bien fait pour redoubler ses
aspirations à la liberté. Tout autour, au nord, à l'ouest, au sud, un cercle
infranchissable de rocs neigeux, formant comme la dernière enceinte de la
prison. Mais au levant, la vallée s'ouvre, s'élargit, laisse les regards
atteindre les belles et vastes plaines du Piémont. Si, chaque soir, le soleil
se couchait derrière les montagnes rendues par l'ombre plus effrayantes
encore, chaque matin, il se levait riant et lumineux sur ces horizons
ravissants, d'où l'on s'imaginait recevoir comme un parfum de vignes en
fleur, comme un souffle de liberté. Vers la
fin de l'année 1670, deux hommes, précisément en passant par l'Italie,
parvinrent à s'introduire dans Pignerol. L'un, le sieur de Valcroissant, se
faisait appeler Honeste[75], l'autre, le véritable chef de
l'expédition, était le fidèle Laforêt. Ce brave homme, bien muni d'argent,
voulait délivrer son maitre. Avec
quelques pistoles, il gagna plusieurs des soldats placés en sentinelle sous
les fenêtres de Foucquet et de ses valets, Champagne et La Rivière. Un plan
d'évasion se forma. Mais Saint-Mars était un gardien vigilant. De plus, comme
on l'a dit, il avait mis dans sa compagnie des neveux, des cousins, hommes
très sûrs, aux oreilles très fines. Le complot fut déjoué par quelque
indiscrétion de soldat. Laforêt
n'était pas homme à s'être coupé la retraite. Il avait fait à Nantes ses
preuves de diligence. Lui et son compagnon, alors qu'on les cherchait encore
dans Pignerol, avaient déjà gagné les terres neutres du Piémont et la grande
ville de Turin. Ils étaient sauvés ; ils le croyaient du moins. Mais
Saint-Mars n'était pas homme non plus à s'arrêter devant le premier obstacle.
Il agit sans perdre de temps, et bientôt le major de place de Turin, peu
soucieux du droit d'asile, surtout en matière politique, faisait arrêter les
réfugiés et les renvoyait à Pignerol. Furieux
de ce qu'il avait failli être surpris, le gouverneur fit deux lots des
coupables. Il réserva Honeste, personnage encore mystérieux ; quant au valet
et à ses soldats, ils lui appartenaient. Il assembla ses officiers, jugea,
condamna, exécuta sur-le-champ[76]. Le pauvre Laforêt fut pendu, ayant ainsi poussé le dévouement jusqu'à la mort. Foucquet put voir balancé à la potence le corps de ce fidèle serviteur. Que de douleurs, que de regrets, que de souvenirs durent s'emparer de lui ! Laforêt, qui l'avait servi jusque dans ses faiblesses, lui donnait sa vie aux jours d'infortune. Inutile sacrifice qui ne fit qu'augmenter la peine du prisonnier. Si Colbert et Talon eussent fait pendre le surintendant en 1664, aurait-il plus souffert ? |
[1]
FOUCAULT, Extraits
sommaires, t. X, p. 377.
[2]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 287.
[3]
On a quatre sources principales pour ces trois journées des 19, 20 et 21
décembre 1664 : ORMESSON,
Journal, t. II, p. 287 ; SÉVIGNÉ, lettres des 21 et 22 décembre ; Défenses, t. XV
I, p. 355 ; Extraits sommaires, t. X, f° 377.
[4]
SÉVIGNÉ, lettre
du 22 décembre. Dans l'édition de 1774, p. 315 (seconde édition), le texte
porte : Laforêt, son défunt écuyer. Or, Laforêt
ne mourut qu'en 1670. Cela indique une copie postérieure à cette date.
[5]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 287.
[6]
Sévigné parle de cinquante mousquetaires, mais Foucault (Extraits sommaires,
t. X, p. 384 ; Archives de la Bastille, t. II, p. 392), en compte cent.
[7]
JUGE, Etude
historique sur les Fouquet de Belle-Isle, p. 66. M. Juge publie le
testament de Louis Foucquet, évêque d'Agde (p. 71). Je regrette que la place me
manque pour le reproduire.
[8]
SÉVIGNÉ, lettre
du 26 décembre 1664.
[9]
La date du 16 s'induit d'une lettre de Louvois à Saint-Mars, 22 janvier 1665.
Arch. nat. K, 120, orig. DELORT,
Détention, t. I, p. 84.
[10]
Mlle de MONTPENSIER,
Mémoire, t. III, p. 360. Les aventures de Trécesson sont indiquées sous
la forme anonyme dans les Mémoires de Mme la comtesse de ***, attribués
à Saint-Évremond, Amsterdam, 1690. V. liv. V et VI, ce qui est dit de la
demoiselle de Bretagne.
[11]
État de la France pour 1658.
[12]
Lettre de l'ingénieur Levé à Colbert, 30 janvier 1665. Archives de la
Bastille, t. II, p. 397.
[13]
Louvois à Saint-Mars, 17 janvier 1665. Arch. nat. K, 120, 22, orig. DELORT, Détention,
t. II, p. 83.
[14]
Archives du château de Palteau, obligeamment communiquées par Mme la comtesse
de Sébeville.
[15]
V. dans le Cabinet historique, t. IX, p. 339, une lettre de Marigny à
Gaston d'Orléans. Il cite, à la suite du bon
béquillart Persan, Saint-Mars, etc.
[16]
Saint-Mars était né aux Menus près Montfort-l'Amaury. J'ai tiré ces détails des
archives du château de Palteau.
De plus, un savant aussi laborieux que courageux, aussi
instruit que perspicace, M. de Dion, a bien voulu me communiquer, avec une rare
générosité, les matériaux réunis par lui pour établir la généalogie des du
Tremblay, Saint-Mars, Formanoir, Blainvilliers. J'y ai trouvé la confirmation
absolue des indications que m'avaient fournies les archives de Palteau.
Si la place ne me manquait pas, je donnerais cette
généalogie en note à la fin de ce volume.
[17]
Œuvres de Louis XIV, t. VI, p. 371 ; DELORT, Détention des philosophes, t.
I, p. 25. L'original en aux Arch. nat., sect. hist. K, n° 120.
[18]
Louvois à Damorezan, 6 février. Archives de la Bastille, t. II, p. 399.
[19]
Louvois à Saint-Mars, 20 février 1665. Arch. nat. K, 120, 4, orig. DELORT, Détention,
t. I, p. 86. Louvois à Saint-Mars, 24 avril 1665. Arch. nat. K, 120, 9, orig. DELORT, t. I, p. 91.
[20]
Louvois à Saint-Mars, 15 mars 1665. Arch. nat. K, 120, 7, orig. DELORT, Détention,
t. I, p. 88.
[21]
Louvois à Saint-Mars, 20 février 1665. Arch. nat. K, 120, 4, orig. DELORT, Détention,
t. I, p. 86. Le même au même, 24 février 1665. Arch. nat. K, 120, 5, orig. DELORT, ibid.,
p. 87. Le même au même, 24 avril 1665, Arch. nat. K, 120, 9, orig. DELORT, ibid.,
t. I, p. 90. Louvois à Damorezan, 24 avril 1665. Archives de la Bastille,
t. II, p. 410.
[22]
Louvois à Saint-Mars, 3 mars 1665. Arch. nat. K, 120, 6, orig. DELORT, Détention,
t. I, p. 89. Louvois à Saint-Mars, 8 juin 1665. Arch. nat. K, 120, 10, orig. DELORT, ibid.,
p. 82.
[23]
Le Tellier à d'Artagnan,31 décembre 1664. Archives de la Bastille, t.
II, p. 394, d'après les Arch. de la guerre. — Louvois à Saint-Mars, 10
février 1665. Arch. nat. K, 120, 3, orig. DELORT, Détention, t. I, p. 85.
[24]
Louvois à Saint-Mars, 18 juin 1665. Arch. nat. K,120,11, orig. DELORT, Détention,
t. I, p. 92.
[25]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 285 ; SÉVIGNÉ,
lettre du 22 décembre 1664.
[26]
SÉVIGNÉ, lettre
du 22 décembre 1664.
[27]
Archives de la Bastille, t. II, p. 393.
[28]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 281 ; SÉVIGNÉ,
lettre du 22 décembre 1664.
[29]
La ville de Dieppe devrait bien consacrer par un monument, an moins par une
inscription, le souvenir de cet homme aussi habile dans son art que courageux
et dévoué.
[30]
SÉVIGNÉ, lettre
du 30 décembre 1664.
[31]
Mémoire sur la résolution à prendre pour la conclusion de la Chambre de
Justice, autogr. de Colbert. CLÉMENT, Lettres et Instructions, t. II, préf., p. CCVII. Ce mémoire est
daté de mars 1665 par Clément ; mais je le crois antérieur au mois de février.
On y parle de la durée de la Chambre, trois ans et trois mois, novembre 1661 à
janvier 1665. On y parle des Treize. Or, dès février, Rocquesante était exilé. Vraisemblablement,
le Mémoire est de février 1665. Cf. ORMESSON, t. II, p. 255.
[32]
Avant le 13 janvier 1665. ORMESSON, Journal, t. II, p. 294.
[33]
Extraits sommaires, t. X, f° 95. Bibl. nat., ms. fr., v° de Colbert, n°
237.
[34]
Extraits sommaires, t. X, f° 119 (5 février 1665).
[35]
26 février 1865. Extraits sommaires, t. X, f° 129 v°.
[36]
Extraits sommaires, t. X, f° 122. 21 janvier 1666. ORMESSON, Journal,
t. II, p. 316, 343. Archives de la Bastille, t. II, p. 403.
[37]
Extraits sommaires, t. X, f° 195 v°. 22 mai 1665. ORMESSON, Journal,
t. II, p. 362.
[38]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 362.
[39]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 361.
[40]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 339. Jusqu'à plus ample informé, Fargues ne méritait pas un tel
traitement.
[41]
COLBERT, Lettres
et Instructions, t. II, p. 1. M. Clément a donné à cette pièce la date de
1661, 1662. Elle est certainement de 1665.
[42]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 361.
[43]
Extraits sommaires, t. X, f° 209. Le tuteur devait être ce que nous
appelons un subrogé tuteur. En nomma-t-on un ? je l'ignore.
[44]
Sève à Colbert, Pignerol, 30 janvier 1665. Archives de la Bastille, t
II, p. 397, d'après la Correspondance de Colbert.
[45]
Louvois à Saint-Mars, 29 juin 1665. Arch. nat. K, 120, 12, orig. DELORT, Détention,
t. I, p. 93 ; ORMESSON,
Journal, t. II, p. 372 (29 juin 1665).
[46]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 372 ; Défenses, t. XVI, p. 356 ; Édit de 1668, t. XIII.
[47]
MENUCII POEMATA, 1680, p. 122.
Il faut remarquer le causa latet. Fulminæ, causa
latet, custodes et ferit arsem, Jupiter. J'ai traduit Jupiter par le
ciel. Ce sont libertés qu'on peut prendre avec Ménage. Cf. BACHOT.
[48]
Lettre du 14 juillet 1665. Arch. nat. K, 120, 15. DELORT, Détention, t. I, p. 103.
[49]
La ville de Pignerol, très modifiée du côté de la gare, a conservé dans le
centre son ancien caractère et beaucoup de vieilles maisons. Peut-être
pourrait-on y retrouver ce logis, qui a dû rester affecté à quelque service
public C'est une curieuse recherche à faire pour les archéologues locaux.
[50]
Louvois à Saint-Mars, 29 août 1665. Arch. nat. K, 120, 19. DELORT, t. II, p. 106.
L'ingénieur Levé à Colbert, 15 août 1665. Archives de la Bastille, t.
II, p. 453 ; et 21 août 1665.
[51]
Louvois à Saint-Mars, 26 juillet 1665. Arch. nat. K, 120, 16 et 18. DELORT, Détention,
t. I, p. 103, 105. Le Roy souhaite de les voir (ces papiers).
[52]
Lettres du 13 novembre 1665, 12 décembre 1665. Arch. nat. K, 120, 24, 25, 26,
27. DELORT, Détention,
t. I, p. 112, 115, 116, 117.
[53]
Louvois à Saint-Mars, 18 décembre 1863, 21 mai 1666. Arch. nat. K, 120, 26, 36.
DELORT, t. II,
p. 116, 122.
[54]
16 juin 1866. Arch. nat. K, 120, 38. DELORT, t. II, p. 125.
[55]
Lettre de conséquence de Mgr le marquis de Louvois, 4 juin 1666. Arch. nat. K,
120, 37. DELORT,
t. II, p. 123.
[56]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 373, etc.
[57]
Extraits sommaires, t. V, f° 4 v° et f° 6 v°. Bibl. nat., ms. Ve de
Colbert, n° 232.
[58]
Extraits sommaires, t. V, f° 74.
[59]
Meusnier, président de l'élection de Melun, rendra compte de la gestion des
biens du sieur Foucquet. Arrêt du 5 août 1665. Extraits sommaires, t. V,
f° 30 v°. Martin Mathieu, notaire, régisseur de Belle-Isle, Ch. Loréal,
receveur de la terre de Belle-Isle, Gilles Richard, fermier des biens judiciairement saisis en Brie, rendront compte. Ibid.,
f° 30 v°, 64, 88.
[60]
Extraits sommaires, t. V, f° 71. 17 septembre 1665.
[61]
Extraits sommaires, t. V, f° 99 v°.
[62]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 400, 401.
[63]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 430.
[64]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 403.
[65]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 531. Archives de la Bastille, t. III, p. 45. M. Ravaisson fait
une étrange réflexion et semble croire à des vengeances et à des
empoisonnements. Imagination pure.
[66]
Je dois la communication de ce fait curieux à M. A. Moranvillé, qui en a
découvert les preuves incontestables dans les arrêts du Conseil. Colbert poussa
la précaution jusqu'à faire ordonner par le Roi la suppression de l'ordonnance
qui avait autorisé l'incinération des papiers de Mazarin. M. Moranville se
propose de publier ce texte, dont l'authenticité ne fait aucun doute.
[67]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 513 (2 janvier, 1er février 1667).
[68]
Mai 1667.
[69]
Louvois à Saint-Mars. Arch. nat. K. 120, 43.
[70]
Louvois à Saint-Mars, 23 octobre 1666. Arch. nat. K, 120, 46. DELORT, Détention,
t. I, p. 117.
[71]
Louvois à Saint-Mars, 14 février 1667,18 décembre. Arch. nat. K, 120, 50, 54. DELORT, p. 139, 146.
[72]
Défenses, t. XVI, p. 356. Ce volume XVI n'est que la reproduction, sans
impression nouvelle, d'un volume paru en 1668 : Conclusion des Défenses
de M. Foucquet, 1668, sans lien d'impression. On y voit un cocon de ver à soie
avec la devise. Ces ouvrages se sont-ils trouvés parmi les papiers saisis ?
Foucquet a-t-il pu les faire passer par des voies inconnues ? Mystère. Quel
était le sujet de ces traités ? Des matières spirituelles. On ne saurait dire
plus.
[73]
Louvois à Saint-Mars, 26 mars 1669. Arch. nat. K, 120, 64. DELORT, Détention,
t. I, p. 154.
[74]
Louvois à Saint-Mars, 22 avril 1669. Arch. nat. K, 120,66. DELORT, Détention.
t. I, p. 155.
[75]
Valcroissant, château, canton de Lamotte-Ternaut, arrondissement de Semur,
canton de Saulieu (Côte-d'Or).
[76]
Louvois à Foucquet, 17 décembre 1669. Arch. nat. K, 120, 72, 73. DELORT, Détention,
t. 1, p. 159, 162.
Honeste et Valcroissant sont un seul et même
personnage. M. Chéruel, Mémoires, t. II, p. 533, a exprimé l'opinion
contraire, mais à tort.