Le 23
mars, Poncet et Renard avaient clos leur interrogatoire. Il semblait qu'ils
n'eussent plus qu'à en faire rapport à la Chambre, et cependant les séances
succédaient aux séances, les mois aux mois, sans qu'il y fût question de
Foucquet, du moins publiquement. C'est qu'en somme, ce long document, qui ne
tenait pas moins de cent quarante-sept rôles[1], justifiait plutôt le
surintendant qu'il ne le livrait à ses accusateurs. Ces
derniers le comprirent. Aussi mit-on du monde en campagne pour contrôler les
dires de Foucquet. Chose assez étrange, Le Tellier fit compulser le greffe du
Parlement de Bretagne pour chercher une pièce qui était aux mains de Colbert
ou de Talon[2]. Pendant
tous ces délais, un homme n'était pas content, l'avocat Gomont. L'arrêt du 3
mars, fondement du procès, rédigé sans sa participation,
ne le satisfaisait nullement, ny en son
exposé, ny en son dispositif. On lui communiquait chaque jour les procès-verbaux de l'interrogatoire
de Foucquet, et chaque jour il constatait de grandes modifications apportées
à son plan, des additions, des retranchements. Rien n'en restait. Enfin, on
ne parlait plus d'obtenir une décision du Conseil du Roi pour fortifier l'establissement de la Chambre de justice[3]. De
guerre lasse, Gomont voulut bien se persuader que l'arrêt du 3 mars était
meilleur que s'il l'eût rédigé lui-même ; qu'on avait eu raison d'équivoquer,
de ne parler qu'en termes généraux sur les
finances, de prendre l'occasion du procès de M. Bruant et de ne point faire
mention du crime de lèse-majesté, qu'un arrest du Conseil auroit causé plus
de soupçon que donné d'autorité. Gomont était surtout bon serviteur. Je n'ay jamais, dit-il, parlé à qui que ce soit
ny de l'arrest du 3 mars nv du deffault de l'obtention d'arrest du Conseil,
et j'ay toujours soutenu que la procédure estoit valable, affirmation d'autant plus
méritoire que l'honnête avocat était convaincu du contraire. Mais il
ne put s'empêcher de blâmer les interrogatoires. Le Tellier les critiquait
aussi, et en l'ordre et en tout ce qu'ils
contiennent. On
avait demandé beaucoup de choses inutiles, sans presser (serrer) aucun fait
considérable. Malgré
cela, huit jours après, Gomont présente un rapport à la conférence du Louvre, devant Le Tellier, Colbert, Foucault. Nonobstant le changement des faits, il y avoit de quoy
condamner M. Foucquet et par les faits et par les responses. La conférence ne fut pas
convaincue ; en tout cas, on ne résolut rien. Gomont se remit au travail, commença
un inventaire de production. Il notait toutes les pièces pouvant servir tant
à l'accusation qu'à la défense. Il affirme, et il faut croire à sa sincérité,
que peut-être on n'a jamais entrepris ny
conduict un procès criminel avec si peu de passion. Je n'ay jamais remarqué d'autres
sentiments que ceux de la justice, et, en ma présence, il n'en a jamais esté
parlé en d'autres termes. J'ay dit plusieurs fois, et il est véritable, que
je ne m'en serois jamais mêlé ou que je l'aurois abandonné, si j'avois
recongneu qu'on y eust agy autrement. Gomont
n'était pas dans le secret. Selon
lui encore, il ne fallait pas prolonger la durée de la Chambre. Elle causoit tant de maux, par sa réputation et par ses effets
dedans et dehors le royaume, qu'il sembloit que sa continuation estoit plus
désadvantageuse que n'auroit esté l'absolution de M. Foucquet, supposé qu'il
y eust lieu de l'absoudre. Enfin,
on avait assez de preuves et assez de faits pour obtenir la condamnation de
l'accusé. Tous ceux qu'on ajouterait nuiraient plutôt qu'ils ne serviraient à
l'affaire, et par leur diversité la
pourvoient ruiner. Gomont
insistait donc pour avoir jugement à la Pentecôte. Ses patrons
s'offensèrent de son insistance. Ils ne
faisaient encore qu'une petite guerre d'escarmouches. Gomont,
très sincère, un peu naïf, avait, à certains jours, des lueurs. C'est lui, il
le croyait du moins, qui avait présenté Berryer à Talon, et depuis, dit-il, j'aurois bien plustot
eu besoin de M. Berryer que M. Berryer de moy. Ce
dernier portait l'affaire sur un nouveau terrain, celui des procès-verbaux de
l'Épargne. L'aliénation des octrois, celle
des quatre cent mille livres de rente, le détournement des six millions
avaient fait l'objet des conférences, où
beaucoup de choses estoient dictes, avoue Gomont, qui passoient ma
cognôissance1[4]. Malgré
tous ces conciliabules, on ne parlait plus du procès. Gomont rompit encore le
silence, insistant pour qu'on ne différât ni la procédure ni le jugement. Ses
raisons ne manquaient pas de sens. La
poursuitte différée d'un crime change les esprits, comme sy le crime estoit
changé. C'est un effet du temps, et particulièrement aux crimes où le publicq
est intéressé, où l'on ne manque jamais de sévir d'abord contre le criminel,
d'entrer par après en compassion pour luy, parce qu'on crie toujours contre
ceux qui sont en place. Quoi
qu'il pût dire, ceux qui étaient en place hésitaient toujours. Laissant
Foucquet, ils abordèrent les commis. Le 17
avril, Poncet et Renard interrogèrent Pellisson. On ignorait alors que
l'éloquent discours au Roi fût l'œuvre de cet académicien, en apparence
plutôt voué au culte des muses qu'à celui des finances. C'était un homme de
mœurs douces et platoniques, à la faconde méridionale, qui parlerait
volontiers, au moins le croyait-on ; car, tout au rebours, Pellisson répondit
seulement qu'il ne voulait pas répondre, qu'il déclinait la compétence de la
Chambre et réclamait un conseil. Un arrêt rejette immédiatement son
déclinatoire. Il n'en tient compte[5]. Impossible de rien tirer de ce
bonhomme crépu, têtu, poli. On
passe à un autre. Talon fait arrêter, mettre au secret le financier Monnerot.
Aussitôt, la femme de ce dernier, qu'on n'avait pas exilée comme précédemment
Mme Foucquet, proteste contre cette arrestation arbitraire, présente requête
à la Chambre de justice, demande que son mari soit interrogé, conformément
aux ordonnances, et relaxé. Talon
se retranche derrière un ordre verbal du Roi. Il faut
d'abord inventorier les papiers saisis ; ensuite on interrogera Monnerot.
Autrement, on irait contre l'ordre en matière
criminelle et contre l'intention du Roy[6]. Évidemment,
le ton autoritaire du procureur général déplaisait à la Chambre. Talon
retiré, les commissaires s'élèvent contre ces arrestations arbitraires,
faites sans mandat de justice. Il faudrait au moins un ordre écrit du
souverain, et non un ordre verbal. Catinat conclut à ce que Monnerot soit
interrogé ; du Verdier, à ce qu'il soit élargi. Toutefois, par un retour à la
prudence, on arrêta que Talon prendrait l'avis du Roi[7]. Naturellement, Monnerot resta
sous les verrous, séquestré. Ces
velléités de résistance n'en inquiétaient pas moins les habiles et les
prudents. C'était
le moment de se défiler. Choart trouva moyen de s'en aller. Le Tellier tira
de ce guêpier son fils Louvois, remplacé par Ferriol, conseiller au Parlement
de Metz (21
mai 1662). Il
était temps. Le 22 mai 1662, après un rapport sur ce fameux détournement de
six millions de livres, dont on faisait grand bruit dans le public, comme si
depuis Henri IV on avait jamais vu six millions ensemble dans le trésor royal[8], Talon requit solennellement
des poursuites contre Jeannin de Castille, trésorier de l'Épargne, Bruant,
Gour-ville, Pellisson, et tous ceux qui se
trouveront directement ou indirectement avoir reçu les deniers provenant des
billets expédiés pour et au lieu de l'ordonnance de six millions[9]. La Chambre rendit un arrêt
conforme, sauf en ce qui concernait cette dernière phrase, visant des
inconnus. Trois jours après, le procureur général revenait à la charge, et il
était décidé, par deux arrêts, que Foucquet serait interrogé sur les faits
résultant d'un interrogatoire de Jeannin, comme sur tous autres qui seraient
articulés par le ministère public[10]. Le gros
Jeannin, assez brave homme, mais de nature molle et aimant ses aises,
galantin jovial et grotesque[11], ne tint pas, même un jour,
contre le malheur qui s'abattait sur lui. Il se déchargea de tout sur
Foucquet, prétendant avoir des ordres écrits[12]. Monnerot garda mieux son
sang-froid, mais ses réponses ne paraissent pas très franches. A-t-il eu des
registres ? — Non. — Son caissier en a-t-il tenu ? — Non. — Et son commis ? —
Non plus. Pressé, poussé à bout, il déclare qu'il a fait à Bruant certains
payements. Pas un mot d'ailleurs contre Foucquet. Un sieur Douillet, témoin
entendu 'pour un billet de trois cent mille livres, sorte de pot-de-vin qu'il
aurait donné à Nicolas, ne sait même pas de quoi on lui parle[13]. Quatre
autres témoins comparaissent sans qu'on en tire plus d'éclaircissements[14]. Talon ne se déconcerte pas. Il
requiert pour la forme l'arrestation de Monnerot, emprisonné depuis un mois,
se réservant de prendre contre lui, Jeannin et Foucquet, telles conclusions
que de droit. En même temps, il demande l'annulation par la Chambre de quatre
cent mille livres de rente constituées et vendues aux gens d'affaires. Comme
le premier président Lamoignon discutait cette suppression de rentes, Voisin,
beau-frère de Talon, se permit de l'interrompre, disant qu'il se faisait
tard. Lamoignon se ficha. De telles
interruptions vont contre l'ordre et la discipline. Si les choses continuent
de la sorte, il faudra quitter la place et informer le Roi[15]. Vaine protestation. Quelques
minutes après, un arrêt était rendu, conforme aux conclusions du procureur
général. Ce
dernier se sentait en veine. Le G juin, au rapport de Pussort et Voisin, il
annonce qu'il a découvert, dans les papiers de Bruant, la preuve qu'on a volé
le Roi dans un traité de l'aliénation des octrois. L'agent de la fraude est
un certain Baron, parent du sieur de Bruc, frère de Mme du Plessis-Bellière,
l'amie de Foucquet. Plaise à la Chambre annuler le traité, ordonner que
Foucquet sera interrogé sur ce détournement. Lamoignon tente une dernière
fois de résister. L'affaire est d'importance et mérite qu'on en rende compte
au Roi. Résistance inutile. On passe outre[16]. Six
millions détournés par Jeannin, plus huit cent quarante-sept mille livres par
Ronquerolles et Jeannin, plus quatre cent mille livres de rentes, plus les
octrois, tout cela constituait une forte base d'accusation et un sérieux
préjugé de culpabilité. Poncet et Renard, confirmés dans leur mission,
reprirent leurs visites quotidiennes au donjon de Vincennes. C'est
encore Gomont qui fut chargé de dresser le questionnaire. Au fond, mécontent
de ce qu'on l'avait tenu à l'écart de la procédure dirigée contre Jeannin et
les autres, il n'en laissait rien voir et travaillait au commandement[17]. Depuis
deux mois et demi, le prisonnier n'avait vu personne, si ce n'est, à Pâques,
un confesseur, le Père Eyneuve. A vrai dire, on ne pouvait le contraindre à
manquer à une loi de l'Église, et le péché fût retombé sur le Roi lui-même.
Le confesseur est encore accordé à la Pentecôte[18]. On paraissait ainsi tenir les
promesses faites en mars dernier. D'abord,
Foucquet demanda aux deux commissaires si l'on avait statué sur son
déclinatoire de compétence. — Non. Ils n'avaient point encore fait leur
rapport à la Chambre ; ils venaient même pour compléter l'interrogatoire sur
quelques points omis. Peut-être aurait-il été juste de communiquer au prévenu
les arrêts du 22 mai, du 3 et du 5 juin, portant que lui, Foucquet, serait
interrogé, ainsi que Jeannin et Monnerot, sur certains faits déterminés. On
n'en fit rien[19]. On rusa avec cet homme sans
défense, qui se contenta de renouveler ses protestations, notamment contre la
présence de Talon et de Voisin parmi ses juges. Sur les
six millions de billets du Trésor qu'on aurait dû annuler, Foucquet déclara
se bien souvenir de l'ordonnance qui les avait créés, mais ne pas connaître
le bénéficiaire, un sieur Duval, les ordonnances s'expédiant toujours le nom
en blanc. Cela se passait en 1658 ; il était gravement malade, presque à la
mort, ce qui avait jeté beaucoup de trouble dans les esprits de ses commis. —
Soit, mais pourquoi n'a-t-il pas ensuite retiré l'ordonnance de remise, et
déchiré ces billets sans cause ? — D'abord cet ordre, il l'a donné. Si ces
commis ne l'ont pas exécuté, il faut s'en prendre aux difficultés du temps.
Le Roi, à son tour, était tombé malade à Dunkerque[20]. De grandes séditions éclataient
de toutes parts. C'étaient les nobles en Normandie, les sabotiers en Sologne.
On courait au plus pressé[21]. Les
commissaires insistent. Foucquet ne s'est-il pas entendu avec Bruant et
Gourville, pour effacer le vice d'origine de ces billets, les faire circuler
d'un trésorier à l'autre, de manière à en toucher un jour la valeur, au
préjudice du Roi ? — Non, et il est même probable que le Roi n'a subi aucun
préjudice, que ces billets n'ont été présentés à la caisse royale qu'en vertu
d'assignations valables, et que le Roi a été libéré de véritables dettes.
D'autres billets, non contestés, doivent être restés inutiles dans les
cassettes des créanciers du Roi, et y resteront à jamais, parce qu'il ne
suffit pas d'avoir un billet pour être payé ; il faut encore produire un
titre établissant que le Roi a bien reçu l'avance, le montant du prêt dont ce
billet n'est que le signe. Ces
explications étaient tellement concluantes que les commissaires, ne sachant
que dire, demandèrent à Foucquet s'il voulait s'en rapporter aux déclarations
de Jeannin, son ami, son parent. Il esquiva très adroitement le piège ; il a
confiance en Jeannin, mais on a pu tromper Jeannin[22]. Le
prisonnier répond également bien sur un vieux billet de trois cent mille
livres, remontant à 1643, et qu'il aurait passé en payement du droit de marc
d'or, puis sur le traité des octrois. La séance dura de trois heures jusqu'à
huit heures du soir, sans que Foucquet donnât prise une seule fois à ses
adversaires. Pour
l'amadouer, on fit signer au Roi une lettre l'autorisant à prendre l'air de
temps à autre sur la terrasse du donjon. Le prince allait jusqu'à dire qu'il
lui était très agréable d'accorder cette grâce aux sollicitations de Mme
Foucquet. C'était peu de chose en soi, et cependant beaucoup pour un homme
enfermé depuis si longtemps entre les quatre murs d'une prison[23]. Si le
Roi paraissait s'adoucir, les commissaires, par contre, posaient des
questions de plus en plus brutales. Foucquet
ne s'est-il pas approprié un million quatre cent quatre-vingt-huit mille six
cent trente-six livres de remise sur les cinq grosses fermes ? Le chiffre est
précis. — Non. — N'a-t-il pas à cette fin pris des intermédiaires ? — Non
[24]. Foucquet
n'a-t-il pas gratifié Mme de Guise d'une somme de 100.000 francs ? — Oui ; le
Cardinal l'a su ; c'était un remboursement, une indemnité, si l'on veut, pour
une dette ancienne remontant à 1619, et que le Roi n'avait pas payée. Feu M.
le Cardinal ne s'est-il pas plaint du désordre de l'administration des
finances ? — Non. Le Cardinal et lui, Foucquet, étaient bien d'accord sur ce
point qu'il existait des abus, que les gens d'affaires profitaient des
difficultés politiques ; mais Mazarin voulait être le maître, et recevait les
plus clairs deniers[25]. L'interrogatoire
tournait toujours dans le même cercle, et toujours, en voulant atteindre
Foucquet vivant, on touchait Mazarin mort. Les commissaires se décident à
poser une dernière question. N'a-t-il pas, étant surintendant, fait Épargne
chez lui ? en d'autres termes, n'a-t-il pas manié, donné, reçu les deniers du
Roi, agi comme trésorier, lui qui ne devait être qu'ordonnateur ? Foucquet
voit la portée du coup. Sa réponse est topique, probante. Les deniers que ses
commis ont pu donner ou recevoir étaient deniers non du Roi, mais de lui,
Foucquet. Il l'a déjà dit, lorsqu'on l'a interrogé en mars[26]. Comme
la première fois encore, c'est le prisonnier qui s'oppose à la clôture de
l'interrogatoire (12 juin).
Il renouvelle son intention de se pourvoir auprès du Roi, devant le Parlement.
Il demande un conseil, les moyens d'écrire, ses papiers surtout,
indispensables pour répondre à toutes les questions qu'on lui pose. On se
bitte de lui donner acte de ses réserves, de rédiger le procès-verbal de la
séance, qu'il consent à signer avec ses protestations accoutumées[27]. Dès le
lendemain, Poncet et Renard commencèrent à faire rapport de leur mission, ce
qui ne prit pas moins de quatre séances (13, 16, 17, 18 juin). De
l'avis général, le surintendant s'était fort habilement exprimé[28]. De leur
côté, les commissaires se montraient satisfaits ; mais le méthodique Gomont
ne partageait pas leur satisfaction. Quand on lui communiqua l'interrogatoire
de Foucquet : Je fus fort estonné, dit-il, de voir qu'on ne l'avoit interrogé sur aucun de mes
fuicts, et qu'on l'avoit interrogé sur d'autres, qui n'estoient en façon
quelconque de ma cognoissance. Gomont apprit plus tard qu'on avait suivi un plan dressé par
Berryer. On fut d'ailleurs, en haut lieu, si peu content de ce second
interrogatoire, qu'on le supprima, soit que
M. Bernier ayt jugé de luy-mème qu'il estoit inutille, soit que d'autres
agent porté le mesme jugement[29]. Peu après, dans une nouvelle
conférence, Gomont s'expliqua avec son abnégation habituelle, trouvant toutes
choses bien, comme sy elles avoient esté
faictes, dit-il, de mon consentement, par mon ordre et par mes advis. Mais, comme à chaque séance on
changeait les décisions précédentes, il se résolut à tenir à part lui des
sortes de procès-verbaux, afin de pouvoir rendre compte à l'occasion[30]. Néanmoins,
Poncet conclut en disant que par la lecture des pièces, la déclaration d'un
sieur Chatelain, dont on n'avait pas parlé jusqu'alors, Foucquet se trouvait
suffisamment chargé d'abus et de malversations dans les finances ; qu'en
outre, l'escrit par lui reconnu prouvait assez qu'il auroit volontiers sacrifié sa sûreté particulière à la
tranquillité publique[31]. RECOMMANDATION
DE L'ACCUSÉ. 155 C'était
la première fois qu'on mettait en avant cet écrit, pour servir de base à une
accusation de crime d'État. La
Chambre, qui n'était pas dans le secret de tous ces dissentiments intérieurs,
arrêta que le sieur Foucquet, ci-devant surintendant des finances, serait
recommandé, que Deslandes, ex-gouverneur de Concarneau, serait appréhendé, le
président Maridor assigné ; Maridor et Deslandes étaient nommés dans l'escrit. Cette
satisfaction donnée à l'accusation, on comprit qu'il y avait aussi lieu de
penser à l'accusé. Le commissaire Fayet fut d'avis de lui donner un conseil ;
un autre, le sieur Françon, de lui communiquer les inventaires de ses papiers[32]. Ce dernier ne se doutait pas
assurément de la bombe qu'il venait de jeter au milieu de ce procès.
Communiquer les inventaires, donner un conseil à un accusé de crimes d'État,
cela ne s'est jamais vu ! Ce serait trahir le secret du Roi ! Lamoignon intervient.
Il est vrai qu'on ne donne pas d'avocat aux accusés de lèse-majesté au
premier chef, mais rescrit ne constitue pas un crime de cette qualité ; ce
chef d'accusation n'est qu'incident ; la Chambre n'a le droit d'en connaître
qu'accessoirement aux malversations[33]. Un
jour, Colbert cherchant à pressentir l'opinion du premier président, avait
reçu cette réponse qu'un juge ne révèle pas son avis si ce n'est sur les
fleurs de lis. C'était bien en juge et sur les fleurs de lis que Lamoignon
venait de parler. Colbert
et Talon comprirent ; à partir de ce jour-là,
ils ne songèrent plus qu'à se débarrasser de ce dévot. Aux
termes des ordonnances, tout accusé arrêté devait être immédiatement
interrogé. Or Foucquet n'avait été prisonnier, légalement, qu'au jour de la
recommandation signifiée à d'Artagnan. Les interrogatoires précédents ne
valaient donc que comme conversations. Seules, de nouvelles questions, de
nouvelles réponses pouvaient satisfaire à la loi, et surtout passer pour une
reconnaissance par l'accusé de la compétence de la Chambre. Comment obtenir
cet acquiescement ? On
continua d'agir d'une manière détournée. L'arrêt
de recommandation, notifié à d'Artagnan, ce qui était bien inutile, ne fut
pas signifié à Foucquet, quoique je ne fusse
pas difficile à trouver,
fit remarquer plus tard ce malheureux qu'on voulait tenir dans l'ignorance[34]. Puis, le piège dressé, les
commissaires Poncet et Renard se représentèrent au donjon (21 mars 1662). Poncet,
insinuant, doucereux, commença par dire au prisonnier qu'on désirait encore
quelques petits éclaircissements. Foucquet de demander s'il n'y avait rien de
nouveau, si la Chambre n'avait pas statué sur ses réclamations. Poncet de
répondre que l'arrêt du 3 mars a prescrit des informations, qu'on a entendu
depuis peu certains témoins ; c'est sur leurs dépositions qu'on veut
interroger aujourd'hui ; le tout en vertu de l'arrêt du 3 mars[35]. Soit. Cependant, Foucquet
serait bien aise de savoir si la Chambre a vu ses interrogatoires. L'honnête
Renard prend alors la parole et déclare qu'il y a eu arrêt en conséquence.
Foucquet demande à en voir le texte. Par malheur, le greffier Foucault ne l'a
pas apporté. Poncet
rentre en scène. Il n'est pas question de nouvel arrêt, mais seulement de
celui du 3 mars. Peine perdue. Le prisonnier a l'oreille fine, et l'isolement
a redoublé sa perspicacité naturelle ; il soupçonne quelque ruse. Jusque-là,
confiant dans la Chambre, il a bien voulu répondre ; mais puisque ses
interrogatoires ont été vus et qu'on ne lui produit aucun arrêt, loin de là,
puisqu'on resserre ses liens, qu'on lui refuse les moyens d'écrire et un
conseil, il ne répondra plus. Les récusations contre Talon, son ennemi
personnel, n'ont pas besoin de preuves. Il demande acte de sa protestation[36]. Grâce à la droiture de Renard,
la ruse de Poncet et de Foucault avortait. Dès le
lendemain 22, on rendait compte à la Chambre de ce qui s'était passé la
veille. Elle
trouva sans doute quelque fondement à la résistance de l'accusé. Selon
Lefèvre d'Ormesson, on devait donner à Foucquet les moyens d'écrire. Grande
discussion. Enfin,
Lamoignon suggéra cet expédient que Foucquet écrirait ses moyens de
récusation en présence des commissaires, ce qui fut décidé, avec cette
réserve, ce retentum, comme on disait en style de
palais, que cela ne serait que sous le bon plaisir du Roi[37]. Le Roi
apparaît de plus en plus comme le juge effectif de Foucquet. Quatre
jours après, Poncet étant malade, Renard seul, mais toujours suivi de
Foucault, porte à Vincennes l'arrêt du 22. Foucquet le lit avec soin, cherche
dans les considérants quelques indications de l'autre arrêt rendu sur le
rapport de ses interrogatoires. C'était prévu. Pas de mentions d'arrêt, si ce
n'est de celui du 3 mars. De plus en plus défiant, l'accusé refuse de répondre.
Foucault explique alors qu'il a remis à d'Artagnan un ordre du Roi autorisant
Foucquet à écrire en présence des commissaires. Il s'attire une réponse
indignée. Un tel procédé est sans exemple ! Il n'est pas pratique : il faut
du temps pour rédiger. Ce serait un assujettissement trop pénible pour les
commissaires et pour lui, Foucquet, malade d'une fièvre quarte depuis onze
mois. Précisément, c'est son jour de fièvre[38]. Foucault
juge bon de faire un pas en avant. Il obtiendra pour l'accusé, il s'en fait
fort, la faculté de travailler seul, sous les yeux de d'Artagnan. En ce cas,
que fera Foucquet ? il le prie de le dire. — Foucquet agira selon les circonstances.
Puis, le prisonnier se tourne vers Renard, qui lui inspire plus de confiance,
l'adjure de porter ses protestations au Parlement, dont il est le seul
représentant. Renard
ne répond pas, revient à la Chambre, fait son rapport. Talon requiert qu'il
soit procédé contre Foucquet comme contre un muet. Plusieurs juges trouvent
les conclusions trop rigoureuses. On arrête que l'accusé sera tenu de
répondre, sinon il sera fait droit aux conclusions du procureur général.
Renard repart aussitôt pour Vincennes. Foucault, cette fois, n'a pas oublié
l'arrêt. Il le montre, ainsi que les réquisitions menaçantes du procureur
général. Le prisonnier, loin de s'intimider, réitère ses protestations contre
Talon. En vain renouvelle-t-on l'offre de papier, de plumes et d'encre, à
charge d'écrire sous les yeux de d'Artagnan. Foucquet refuse[39]. Pour
toute réponse, le jour même, Talon fait décider que l'accusé sera jugé comme
un muet, et, le lendemain, on signifie l'arrêt à Foucquet, qui proteste
énergiquement. Alors, Foucault, désespérant de la violence, a de nouveau
recours à la ruse. Il fait entrer d'Artagnan. Le
mousquetaire a reçu ce matin même un ordre du Roi permettant au prisonnier
d'écrire en liberté ; seulement, le papier lui sera donné par compte, et les
commissaires ne pourront recevoir d'autre écrit que ses récusations. Cette
offre n'est pas acceptée. Alors, le greffier tire de sa poche une autre
lettre du Roi, portant la même date, ordonnant à d'Artagnan de laisser au
prisonnier telle liberté d'agir que MM. les commissaires indiqueraient.
C'était un indigne marchandage. Le
procédé parut si grossier, que Renard intervint honnêtement pour déclarer à
Foucquet que le premier ordre seul était valable. Le
prisonnier comprend le parti qu'il peut tirer de la fausse manœuvre de
Foucault. Son génie de procureur se réveille. Il requiert (le mot est de lui)
la transcription des deux ordres du Roi au procès-verbal de la séance.
Foucault, pour parer le coup, interpelle d'Artagnan. Peut-il permettre cette
transcription ? Le mousquetaire comprend à demi-mot, et, pour couper court, se
retire. Foucquet ne se décourage pas. Il demande qu'on constate au moins
l'empêchement suscité par le greffier. Puis, voyant que cette contestation
faisait peine à Renard, dont il venait d'éprouver la sincérité et la vertu, il
n'insiste pas, s'attaquant seulement à Foucault[40]. Du 1er
au 6 juillet 1662, à trois reprises, Renard revient interpeller le
prisonnier, le sommer de répondre. Foucquet reste inébranlable. Son esprit
juridique se révolte contre cette procédure pleine de nullités, plus
semblable à une oppression qu'à une instruction judiciaire. Traiter un homme
qui parle comme un muet, un prisonnier réclamant ses juges naturels comme un
contumace, ne pas garder les délais prescrits par les ordonnances, donner des
arrêts de jour à jour, signifier les uns, non les autres, et à un homme qui
n'avait pas même le droit d'écrire librement ! c'était une persécution[41] ! On ne
pouvait si bien garder le secret de ces odieuses procédures qu'il ne
transpirât au dehors. Vers la
fin de juin 1662, Pellisson, toujours à la Bastille, reprit la plume ou ce
qui, pour lui, remplaçait la plume. Il établit que tout accusé à trois
secours dans son infortune ; nous dirions aujourd'hui un triple droit : de se
plaindre de l'incompétence du juge, non seulement à ce juge, mais à son juge
naturel ; de relever ses reproches contre ses juges ; d'avoir un conseil
habile et fidèle. Tout sera-t-il renversé à l'égard de M. Foucquet[42] ? On ne soutient plus que
l'édit de création de la Chambre de justice ait entendu déroger aux
privilèges, mais, dit-on, Foucquet n'est pas privilégié ? Erreur. Il l'est
trois fois, comme noble, comme ministre, comme vétéran du Parlement. Il
s'agit de deux crimes : malversations d'un surintendant ; crime d'État. L'un
et l'autre échappent à la juridiction de la Chambre de justice. Si les
lettres de provision des surintendants portent qu'ils n'ont de compte à
rendre qu'au Roi, c'est que depuis l'injuste procès fait à M. de La
Vieuville, personne n'eût, sans cette clause, accepté cette fonction. Quant au crime d'État, nul juge
n'est moins compétent que la Chambre, bornée aux matières de finances par
l'édit de son établissement, qui, autrement, n'eût pas été enregistré par les
Cours souveraines, aucune n'ayant, depuis l'ordonnance de Blois, vérifié ni
approuvé nulle commission extraordinaire pour le seul fait des finances[43]. Pellisson
s'avançait trop. Chalais avait été jugé et condamné à mort par commissaires,
et certes, ce n'était pas pour matière de finances. Au
surplus, la maxime inviolable du palais et du parquet est qu'en cas de
juridiction, l'ordinaire attire l'extraordinaire. Le crime d'État est plus grave que celui de péculat, et le seul juge compétent de
ce crime, c'est le Parlement. Les
procédures faites contre Foucquet sont donc irrégulières. On n'ose s'en expliquer encore au public, qui ne les
ignore pas entièrement[44]. Un
conseil doit être donné aux accusés, même avant les confrontations. Ils s'en
serviraient, dit-on, pour déguiser la vérité ! N'y a-t-il que ce seul danger ? Et celui qu'ils soient opprimés par des
ennemis n'est-il pas plus grand ? L'accusateur aura-t-il mille conseils dès
l'entrée du procès pour attaquer, et l'accusé n'en aura-t-il point pour se
défendre ? Foucquet
a répondu pendant dix jours avant que d'être
accusé et qu'il y eût aucun décret contre lui, sur toutes les actions de sa
vie, jusqu'aux moindres,
par soumission aux ordres du Roi. A cette heure, il a besoin d'un avocat pour
démêler la subtilité de tant de procédures dirigées contre lui. La
Chambre use de rigueur et se rend d'autant plus suspecte. Un de ses arrêts
porte qu'on offrira à Foucquet du papier et de l'encre pour écrire seulement
les requêtes qu'il lui adresserait, non celles qu'il demande avec instance de
présenter au Parlement, refus dont on aura
peine à trouver aucun exemple ancien ou nouveau, qui ne choque pas moins le
respect dû à ce corps auguste par la Chambre de justice même, que l'équité
naturelle et la liberté publique[45]. Un
second mémoire ne tarda pas à venir à la rescousse du premier[46]. M. Talon menace de traiter
Foucquet comme un muet, lui qui a répondu pendant cinq semaines. Il a eu,
dit-on, des nouvelles ; quelque esprit
familier l'a averti de ne plus parler. Oui, certes, et bien familier, car c'est le sien
même. Il se tait, maintenant qu'il est accusé, parce que son privilège serait
perdu s'il parlait. On veut qu'il dise : Je
me rends ; je reconnais mon juge. Que ce juge se demande à son tour : Si j'étais tombé dans la
disgrâce du prince, si l'on avait saisi mes papiers, sans inventaires, les livrant
aux auteurs de ma perte, dérobant les plus utiles à ma défense ; si je
trouvais parmi mes commissaires des ennemis acharnés, s'il me sembloit que cette commission, prête à se réduire
en taxe pour tout le monde, ne cherchât autre sang que le mien, que je fusse
la victime piaculaire, le malheureux qu'il faudroit jeter dans la mer avant
que d'apaiser la tempête, si je n'avois ni conseil ni liberté, si on ne me
pressoit de parler que pour mieux m'accabler, ferois-je bien de parler ou de
me taire ? Feroit-on bien de me traiter en muet et en contumax ? Non, sans
doute. Je ne ferai donc point à autrui ce que je trouverois si mauvois si on
me le faisoit à moi-même[47]. En
guise de réponse, le 4 juillet un arrêt du Conseil d'État ordonna que toute
la procédure commencée contre le surintendant fût apportée au greffe de cette
juridiction. On le signifie le 5 à Foucquet et, dès le 6, à Saint-Germain, le
Conseil, Sa Majesté y siégeant, rendait un nouvel arrêt très
long, très étudié, décidant que, nonobstant le déclinatoire de l'accusé, son
procès serait fait et parfait par la Chambre de justice, que Foucquet ne
pourrait se pourvoir ailleurs, ni tous autres juges, même le Parlement,
recevoir ses pourvois. Cet
acte de la juridiction dite gracieuse, sans doute parce qu'elle porte souvent
le coup de grâce, fut signifié le 12 au prisonnier. Foucquet
ne s'étonna pas. Homme du métier, il démêla vite les défauts de cette
procédure. Le 5 au soir, le greffier Foucault était encore à Vincennes ;
rentré en ville à la nuit, comment avait-il pu avertir la Chambre, prendre
ses ordres, réunir son dossier, porter le tout à Saint-Germain ? Même en
arrivant à cette résidence avant l'aube, même en éveillant son collègue le
greffier du Conseil et MM. les conseillers, encore avait-il fallu prendre le
temps de faire désigner un rapporteur. Ce rapporteur a dû lire des pièces
longues, nombreuses, car l'arrêt le dit formellement, toutes ont été vues et
examinées. Or, ce jour même, à midi, l'arrêt était délibéré, rédigé,
prononcé. Certes,
la forme est surprenante ; mais que penser du fond ? Un arrêt se rend-il sans
réquisitoire, sans audition de la partie qui décline la compétence ?
Opposera-t-on ces termes d'un considérant : Le
Roy estant bien informé des moyens dont le Sr Foucquet prétend se servir. Comment, sans lumière surnaturelle,
savoir ce que pense et prétend un homme enfermé, n'ayant commerce avec qui
que ce soit[48] ? On abuse du nom du Roi. Ce
que Foucquet ne savait pas très nettement, c'est que le Roi, au contraire,
avait abusé de son autorité sur ses conseillers. Malgré
cette intervention du jeune Louis XIV, l'esprit de corps demeurait si vivace
dans les Compagnies, que le 13 juillet suivant la Chambre des comptes
s'assemblait pour réclamer comme son justiciable Bruant, commis de Foucquet,
principal auteur des crimes dont le surintendant était réputé le complice. La
Cour des aides se préparait à défendre ses privilèges violés dans la personne
de M. de Maridor[49]. Bien plus, le 15 et le 18
juillet, au Parlement, les conseillers des enquêtes demandèrent l'assemblée
des Chambres, sous un prétexte quelconque, et le président dut y consentir
pour le 4 août[50]. Par une
remarquable coïncidence, dès le lendemain, trois femmes se rendaient devant
la Grand'Chambre, s'agenouillaient, présentant une requête. C'étaient la
mère, la femme et la fille de Foucquet, qui réclamaient la protection de la
Cour pour leur fils, leur mari, leur père, poursuivi devant des commissaires
choisis. Lamoignon leur dit qu'elles eussent
à se lever et qu'elles pouvoient remettre la requête, sur le bureau qui étoit
près d'elles. Le
Parlement esquivait ainsi une acceptation immédiate et formelle de cette
protestation. Ces
pauvres femmes retirées, on lut le document. Foucquet revendiquait son
privilège de vétéran, s'opposait aux lettres de création de la Chambre de
justice. Par deux nouvelles requêtes, apportées le 27, il demanda encore que
défenses fussent faites à la Chambre de continuer ses poursuites, que les
sieurs Berryer et Foucault fussent contraints de lui rendre ses papiers. Le 19
juillet, la Grand'Chambre avait décidé seulement que le procureur général
porterait la requête au Roi, la Cour ne voulant délibérer à ce sujet qu'après
avoir informé Sa Majesté. Le 27, on alla un peu plus loin. Le procureur
général devait supplier très humblement le Roi de trouver bon que la Cour
délibérât[51]. Le
mardi 1" août, Lamoignon, tous les présidents de chambre et six
conseillers se rendaient à Saint-Germain, où ils étaient reçus au vieux
château par Louis en personne. On avait voulu donner à la séance un certain
apparat. A côté du Prince étaient le chancelier Séguier, Turenne, Villeroy,
les secrétaires d'État d'Aligre, de Sève, etc. Séguier déclara que Sa
Majesté, satisfaite du premier procédé de la Cour, était au contraire fort
mécontente du second, et de ce qu'après les défenses faites par son procureur
général, on se fût permis de lire les requêtes et de délibérer ; il leur
défendait d'en recevoir aucune, sous peine d'encourir l'indignation de Sa
Majesté, qui avait statué par un arrêt solennel sur les réclamations du sieur
Foucquet. Le
jeune Prince accentua ces paroles déjà si sévères. Il espérait bien qu'à
l'avenir pas un conseiller n'oserait, au mépris de ses ordres, recevoir
aucune requête ; il interdisait au président de laisser en délibérer, comme
au procureur général de conclure à ce sujet. Quant à la soustraction des
papiers, c'était lui, le Roi, qui avait ordonné à Colbert de saisir ceux de
Foucquet qui intéressaient le secret de l'État ; Colbert n'avait pas touché
aux autres. Lamoignon se crut obligé de répondre quelques mots. La Cour avait
délibéré, mais seulement pour arrêter qu'elle ne délibérerait pas qu'auparavant elle n'eût su si le Roi l'avoit agréable. — Je vous ai fait savoir ma volonté, répliqua Louis
sèchement, je ne doute pas qu'elle ne soit suivie et exécutée. Colbert
se trouvait couvert par cette déclaration ; mais Louis se découvrait de plus
en plus. La
députation revint à Paris très découragée. Le 4
août suivant, les Chambres s'assemblaient pourtant, mais pour décider que des
humbles prières et supplications seraient adressées au seigneur Roi, afin
d'obtenir qu'on ne retranchât pas un quartier des augmentations de gages[52]. Foucquet
n'avait que trop bien réussi dans la domestication du Parlement. Mme
Foucquet qui croyait encore, sinon dans la clémence, du moins dans la justice
de Louis XIV, écrivit une lettre si fière qu'on se demande si l'on a osé la
faire parvenir à son adresse : Si je ne sers
mon mary, je sers du moins Votre Majesté en lui disant ce qu'aucun autre que
moy n'ose luy dire. L'arrêt du 4 juillet est un des indignes artifices de nos
ennemis. Pas un du Conseil ne le croit juste ; la Chambre se croit.
incompétente. Pendant que le Roi décharge sa conscience sur les juges, les
juges déclarent qu'ils obéissent aux ordres du Roi. Mais ce qui va étonner
Paris, la France, l'Europe, c'est que Colbert ait eu la hardiesse d'assister
au Conseil, lui adversaire déclaré du Surintendant, qu'il a voué à la mort.
L'un est pauvre, l'autre riche de douze millions'[53]. Colbert fit la sourde oreille. Cependant,
on procédait aux confrontations entre les témoins et le prisonnier[54]. Cette partie de l'instruction
dura près de deux mois, du 18 juillet au 13 septembre. Séances peu
nombreuses, séparées par de longs intervalles. On agissait sans méthode, sans
objectif. Sur 101 témoins entendus, vingt seulement furent confrontés[55]. Quand les commissaires
voulurent tirer Jeannin de la Bastille pour le mener à Vincennes, le
gouverneur refusa de se dessaisir d'un prisonnier si précieux, sans ordre du
Roi ou de Le Tellier[56]. Foucquet,
d'ailleurs, persistait dans son attitude très habile. En somme, pour ce
malheureux, séquestré depuis bientôt un an, ces confrontations devaient jeter
un grand jour dans son cachot si obscur. Des questions posées par Poncet et
Renard, il avait pu tirer quelques inductions des projets de ses ennemis. A
cette heure, il allait savoir sur quelle base on avait échafaudé cette
machine. Par une fiction de droit, il était censé muet, mais non sourd. Grâce
une force extraordinaire d'attention et de mémoire, cet homme, sans le
secours de plume ni de papier, retint dans leurs plus petits détails une
centaine de dépositions lues à la hâte et s'en prévalut au moment opportun. Tous
les témoins ne s'en tirèrent pas sans horions. Qui osait-on lui confronter ?
Un Maissat, qu'il avait fait mettre à la Bastille sur ordre de Mazarin ; un
Tabouret, dont il a fait exécuter le beau-frère ! Tabouret qui s'est sauvé,
puis qui revient avec un sauf-conduit, uniquement pour déposer contre
l'accusé. Tabouret,
tout interloqué, répond qu'il honore très fort M. Foucquet, qu'il ne l'a pas
connu comme son ennemi. Que parle-t-on de fuite ! il s'est rendu aux eaux de
Vicq en Auvergne, sur ordonnance du médecin. Il se remet et débite sa
déposition. En 1656, quand on fit le prêt de Guyenne, de Lorme le contraignit
à prendre des associés, à donner deux cent vingt mille livres, qu'il disoit estre pour le sieur Foucquet[57]. De plus, il versa six mille
livres en or à Delorme, en gratification
extraordinaire ;
plus tard, il y ajouta vingt-six mille livres, mais indirectement. En 166I,
ne pouvant approcher le surintendant, il vit Pellisson. Avec ce dernier, pas de bribe. Mais Gourville vint le trouver, exigea vingt mille livres pour
Mme du Plessis-Bellière : Sans cela, les
affaires n'iroient pas !
L'argent donné, les affaires n'avancèrent pas plus. Tabouret s'en plaignit à
Fontainebleau à la dame : C'est vray, répondit-elle, que vous et messieurs de votre compagnie en avez
généreusement bien usé, et je ferai en sorte, auprès de M. le Surintendant,
que vous en aurez contentement[58]. Quant au traité des Six
millions, il s'est efforcé de faire déchirer les billets. Foucquet,
ne pouvant discuter avec le témoin, protesta seulement contre ces
allégations. La
déposition de Monnerot présenta un caractère plus favorable. Foucquet,
cherchant de l'argent pour le siège de Dunkerque, promettait tout, puis,
l'argent obtenu, modifiait le traité en faveur de l'État. Encore ne se
prêtait-il plus, dès 1659, à l'exécution des taxes, élargissant les
prisonniers, levant les garnisons[59]. L'ensemble
de ces témoignages chargeait Gourville plus que Foucquet. Bernard,
l'ex-commis, renia d'abord son maître ; l'accusé recevait confusément toutes
sommes, à titre public, à titre privé. Foucquet faisait l'Épargne chez lui.
Mais survenait-il des dépenses pressées, il y affectait son argent, celui de
ses amis. C'est ainsi qu'il est dû à lui, Bernard, plus d'un million, assigné
sur de très méchants fonds. Celui qui a tout embrouillé, c'est Bruant. On
espérait beaucoup de la confrontation de Marin, intendant des finances, qu'on
n'avait pas osé interroger sans la permission de Colbert, son parent. Marin
ne dit rien. Impossible
de tirer un mot de M. de La Basinière, trésorier de l'Épargne, beau-frère de
Voisin. Voyait-il les traités ? Non. Les ordonnances de 1655, de 1659 sont
cependant formelles ! — Il ne les connaît pas. Il a suivi l'ordre accoutumé ;
n'y ayant quasi plus de règlement dans les finances que l'usage, chaque
surintendant en faisait un à sa mode[60]. Les trésoriers de l'Épargne ne
sont point chargés de contrôler les surintendants. Il y aurait péril éminent
à le faire. — On le presse, il se dérobe. On insiste, il se tait. Cette
confrontation fut la dernière. Malgré
le défaut de méthode de ce second acte de la procédure, l'accusé reconnut
qu'on se proposait de le poursuivre du chef de malversations et de péculat, à
raison d'opérations sur le Marc d'or, sur le Convoi de Bordeaux, sur
l'aliénation des tailles, de pensions prises des fermiers des gabelles, d'un
détournement de six millions, d'une usurpation de fonction pour avoir fait
l'Épargne chez lui, surintendant, c'est-à-dire confondit le maniement des
fonds et l'ordonnancement. Les actes de sa vie les plus méritoires étaient
retournés contre lui. Il put
voir, en revanche, qu'on ne lui confrontait ni Pellisson, ni Bruant, ni
Gourville, l'unique confident de son ancien projet de défense contre le
Cardinal. Quand
Poncet et Renard, leur besogne finie, lurent à Foucquet un arrêt du 7
septembre, déjà vieux de neuf jours, aux termes duquel un conseil lui était
accordé, il répondit très pertinemment. On lui représentait tout à coup les
faits nombreux d'une charge difficile, exercée dans un temps troublé, alors
que le Cardinal commandait en France, prenait directement les trois quarts
des recettes, promettant, de tout couvrir à l'heure du besoin, de donner des
décharges, qu'on ne recevait pas plus que ses comptes qu'il faisoit faire, refaire, corriger, et qui n'ont jamais paru. Qui
organise cette procédure contre lui ? Foucquet le devine, c'est Talon, son
ennemi. C'est lui qui a suggéré l'idée de l'arrêt du Conseil du 7 juillet, en
vue d'enlever d'avance à sa victime le droit de protester contre la Chambre.
Son acharnement à la perte de l'accusé lui fait oublier les règles de la
procédure. Le 12 septembre, cinq jours après l'arrêt du 7, qui a clos les
informations, Talon a entendu La Basinière, qui a fait passer tant de vieux
billets fournis par Mme Talon, douairière. Pourquoi cette violation de la loi
? — Parce que La Basinière est le beau-frère de M. Voisin, un des juges. M.
Voisin, révoqué de l'intendance d'Auvergne ! Voisin, qui en veut à l'accusé
pour l'avoir combattu lorsqu'il ambitionnait la charge de prévôt des
marchands ! Et Foucquet de raconter tout au long son démêlé à ce sujet avec
le maréchal Fabert et le Cardinal. En bonne justice, Voisin ne peut pas être
son juge[61] ! Pour la
seconde fois, Foucquet se redressait et faisait face. Dès le
lendemain, un arrêt repousse ses remontrances[62] et lui est signifié. Le même
jour, sans se déconcerter, le prisonnier répond qu'en vain on lui offre un
conseil. Pour consulter utilement, il a besoin de revoir ses papiers et qu'on
l'autorise à compulser les registres des comptables[63]. Les
deux conseillers, simples porteurs de paroles, retournent à Paris. Après cinq
jours de réflexion, la Chambre décide (25 septembre) qu'on délivrera à Foucquet
copie des procès-verbaux d'apposition de scellés en ses maisons, des
inventaires des papiers saisis, et qu'on passera outre au jugement du procès.
De la communication des papiers eux-mêmes, pas un mot[64]. Ce fut
comme une passe d'armes. L'arrêt du 25 est signifié le même jour à Foucquet,
qui réitère la demande de ses archives. 11 désigne comme conseils Auzanet et
Lhoste, avocats, Jannart, substitut au Parlement, Mignier et de Marandé, plus
experts en matière de finances, et ce, sous réserve de ses privilèges et de
son droit[65]. Le
lendemain 26, Talon conclut à ce qu'un conseil soit donné à Foucquet, mais à
charge de communiquer en présence du greffier de la Chambre, c'est-à-dire en
présence de Foucault. C'était condamner l'accusé au silence. Poncet
commença à révéler ses sentiments hostiles. A Foucquet, accusé de péculat et
de malversations, on pouvait donner un conseil libre ; au ministre accusé de
crime d'État, on doit le refuser. Ainsi Foucquet en avait-il usé lui-même
contre M. de Chenailles, en ne l'admettant à voir ses avocats qu'en présence
d'un greffier. Le coup
était habile ; mais Pussort, avec sa brutalité naturelle, dépassa toute mesure.
Les instructions publiques à Rome servaient de prétexte aux plus grandes déclamations[66]. Les empereurs corrigèrent cet
abus. Il n'est pas besoin de conseil pour dire la vérité. Au contraire, dicat ex ore suo. Gizaucourt,
Brillac, Baussan, Voisin, Ferriol, Noguès, Ayrault furent de cet avis[67]. Alors, intervint Renard ; il
ne voyait rien qui pût empêcher de donner à Foucquet un conseil libre,
l'entretenant en particulier et hors la
présence des officiers. Bossu,
Moussy, Masnau, Catinat, Le Cornier, Le Féron, Phélyppeaux partagent cette
manière de voir. En somme, huit voix contre neuf. Le
président Lamoignon prend alors la parole. Le crime d'État, imputé à
Foucquet, n'est pas un pur crime d'État ; il est mixte et compliqué de
malversations ; on n'en a pas principalement et premièrement saisi la Chambre
; il n'y est arrivé qu'à l'état d'incident. Liberté entière doit donc être
donnée à l'accusé[68]. Fayet
insinue que, si la présence du greffier, M. Foucault, cause quelque peine à
l'accusé, on pourrait commettre une autre personne ; mais Raffelis objecte
qu'on doit exécuter le premier avis et accorder un conseil libre, et l'arrêt
est résolu en ce sens, qu'on permettra à Foucquet de conférer avec ses
conseils, Lhoste et Auzanet[69]. Ce ne fut que six jours après, le 2 octobre, que Talon se décida à notifier à l'accusé cet arrêt qui changeait toute la face de la procédure. Grâce à ces conférences, si tardivement autorisées en principe, un rayon de lumière éclairera bientôt les obscurités du procès ; la connaissance de mille faits inconnus va, comme un flot d'air vif, pénétrer dans la prison où l'accusé est tenu depuis plus de treize mois au secret le plus absolu. |
[1]
Défenses, t. VI, p. 59. Production de Talon.
[2]
Archives de la Bastille, t. II, p. 43.
[3]
Notes manuscrites de Gomont. Bibl. Mazarine.
[4]
Sur ces procès-verbaux, V. Bibl. nat., ms. fr. Joly de Fleury, 2395, f° 150 à
173, inventaire de production des procès-verbaux de l'Épargne. Le premier
procès-verbal est daté du 20 juillet 1662.
[5]
Bibl. nat., Ve de Colbert, n° 235.
[6]
Bibl. nat., Ve de Colbert, n° 235, f° 194.
[7]
Bibl. nat., Ve de Colbert, n° 235, f° 195.
[8]
PELLISSON, Œuvres
diverses, t. II, p. 143. Deuxième discours au Roi.
[9]
Bibl. nat., ms. Ve de Colbert, n° 235, f° 215.
[10]
Ms. Ve de Colbert, n° 235, f° 217, 220. 25 mai et 1er juin 1662.
[11]
BUSSY-RABUTIN, Histoire
amoureuse des Gaules, t. I, p. 24.
[12]
Défenses, t. VI, p. 61. Production de Talon.
[13]
Ms. Ve de Colbert, n° 235, f° 223.
[14]
Marguisio, Dalibert, Languet, Hochereau.
[15]
Ms. Ve de Colbert, n° 235, f° 226.
[16]
Ms. Ve de Colbert, n° 235, f° 234.
[17]
Notes de Gomont. Ms. de la Bibl. Mazarine.
[18]
Défenses, t. XVI, p. 339.
[19]
Défenses, t. XVI, p. 310, 311. Récit de Foucquet confirmé par celui de
Foucault. Ms. Ve de Colbert, n° 235, f° 153.
[20]
Foucquet veut dire devant Dunkerque, à Mardyck. Nous conservons sa réponse
comme il l'a faite.
[21]
Ms. Ve de Colbert, n° 235, f° 455. Interrogatoire.
[22]
Bibl. nat., ms. cité, f° 155 v°.
[23]
Dans le ms. Colbert, n° 235, l'ordre est daté du 8 juin 1662, de même dans le
ms. de l'Arsenal, qui contient la première rédaction du procès par Foucault. M.
Ravaisson, Archives de la Bastille, t. II, p. 14, indique à tort la date du 5
juin.
[24]
Ms. Ve de Colbert, n° 235, f° 182.
[25]
Ms. Ve de Colbert, n° 235, f° 184.
[26]
Ms. Ve de Colbert, n° 235, f° 185.
[27]
Ms. Ve de Colbert, n° 235, f° 189. Interrogatoire. Défenses, t. XVI, p.
279. Récit de Foucquet.
[28]
ORMESSON, Journal,
t. II, p. 17.
[29]
Notes de Gomont. Ms. de la Bibl. Mazarine, 1448.
[30]
Ms. de la Bibl. Mazarine, 1448. Conférence du 13 octobre 1662. Le texte de
l'interrogatoire se trouve dans le manuscrit de Foucault ; il ne parait pas
avoir été communiqué à Foucquet. Il n'a pas été imprimé.
[31]
Ma. Ve de Colbert. n° 235, f° 160 v°.
[32]
Me. Ve de Colbert, n° 235, f° 192.
[33]
Me. Ve de Colbert, n° 235, f° 193.
[34]
Défenses, t. XVI, p. 312.
[35]
Défenses, t. XVI, p. 280. Récit de Foucquet.
[36]
Défenses, t. XVI, p. 283. Récit de Foucquet, rédigé vers la fin de 1682,
en octobre vraisemblablement, en vue d'une publication. Il a reproduit devant
Poncet ses affirmations qui n'ont pas été démenties.
[37]
Ms. Ve de Colbert, n° 235, f° 199 v°.
[38]
Ms. Ve de Colbert, n° 233, f° 201. Défenses, t. XVI, p. 288.
[39]
Défenses, t. XVI, p. 285.
[40]
Défenses, t. XVI, p. 286.
[41]
Ms. Ve de Colbert, n° 235, f° 207 v°. Défenses, t. XVI, p. 289.
[42]
Considérations sommaires sur le procès de M. Foucquet. PELLISSON, Œuvres
diverses, t. III, p. 2.
[43]
PELLISSON, Œuvres
diverses, t. III, p. 17.
[44]
PELLISSON, Œuvres
diverses, t. III, p. 22.
[45]
PELLISSON, Œuvres
diverses, t. III, p. 35.
[46]
Suite des considérations sommaires sur le procès de M. Foucquet. PELLISSON, Œuvres
diverses, t. III, p. 36. Cette suite est postérieure à la menace de traiter
Foucquet comme un muet, antérieure à l'arrêt qui porte qu'on le jugera comme
muet (18 septembre 1662), et antérieure à la désignation des avocats de
Foucquet.
[47]
PELLISSON, Œuvres
diverses, t. III, p. 69.
[48]
Défenses, t. VI, p. 400.
[49]
RAVAISSON, Archives
de la Bastille, t. II, p. 53.
[50]
RAVAISSON, Archives
de la Bastille, t. II, p. 53.
[51]
Archives de la Bastille, t. II, p. 53 ; Défenses,
t. IV, p. 55, 56.
[52]
RAVAISSON, Archives
de la Bastille, t. II, p. 64.
[53]
RAVAISSON, Archives
de la Bastille, t. II, p. 60, 30 juillet 1662.
[54]
Bibl. nat., ms. Ve de Colbert, n° 235, du f° 240 au f° 275.
[55]
Les confrontations nous sont conservées par le ms. 235 des Cinq cents de COLBERT (f° 226 à 312).
Elles ont duré du 18 juillet au 9 septembre 1662 ; vingt-neuf témoins furent
confrontés : 18 JUILLET
: Maissat (f° 226), Hiérosme de Nouveau (f° 229), Thomas Bonneau (f° 231),
Adrien Bence (f° 232), Pierre Baron (f° 234). — 19 JUILLET : Cl. Chastelain (10235), Pierre
Aubert (f° 240), Yves Mallet (f° 242), Claude Coquille (f° 245), Michel Damont
(f° 246). 31 JUILLET
: Sébastien Cazel (f° 250), Georges Pellissary (f° 252), Henri Bibault (f°
254), Rolland Gruin (f° 257). — 5 AOÜT : Charles Gluin (f° 259), Nicolas de Fremont (f° 261). — 9 AOÛT : Le Coq (f°
267), Jacques Charpentier (f° 270), Louis Fauveau (f° 272), Simon Le Noir (f°
275), Pierre Chartier (f° 279). — 11 AOÛT : Jean Le Fèvre de Bornay (f° 212), Henri Piètre (f° 288).
— 9 SEPTEMBRE :
Pierre Maissat (f° 289), Pierre Perrin (f° 291), Nicolas Rollot (f° 293),
Claude Girardin (f° 295), Martin Tabouret (f° 298), Charles Bernard (f° 312).
[56]
RAVAISSON, Archives
de la Bastille, t. II, p. 54. M. de Besmaux à Colbert, 18 juillet 1662.
[57]
18 juillet 1662. Ms. Ve de Colbert, n° 235, f° 230 ; 9 septembre, ibid.,
f° 299.
[58]
Ms. Ve de Colbert, n° 235, f° 299 à 300.
[59]
Défenses, t. IX, p. 10-28.
[60]
Bibl. nat. Ve de Colbert, n° 235, f° 43.
[61]
Colbert, Ve, 235, f° 55, 59 Séances des 16 et 19 septembre 1662. Défenses,
t. IV, p. 2 ; t. XVI, p. 319.
[62]
Colbert, Ve, 235, f' 55.
[63]
Défenses, t. IV, p. 2.
[64]
Défenses, t. IV, p. 2. Colbert, Ve, 235, f° 59 v°.
[65]
Défenses, t. IV ; ms. Ve de Colbert, n° 235. Ravaisson, Archives de
la Bastille, t. II, p. 81.
[66]
Colbert, Ve, 235, p. 59. M. Ravaisson, Archives de la Bastille, t. II, p
83, a lu réclamations.
[67]
Ms. Ve de Colbert, n° 233.
[68]
M. Ravaisson a oublié le mot pur et remplacé compliqué par complice.
[69]
Défenses, t. IV, p. 2 ; t. XVI, p. 320.