Aux
premiers temps de la monarchie capétienne, les revenus du Roi ne différaient
guère de ceux que possédait tout seigneur vivant de son domaine, fermes,
forêts, rivières, droits de justice, de sceau, de monnayage. Par contre,
aucune charge, si ce n'est celle du propriétaire foncier. — En temps de
guerre, les vassaux servaient à leurs frais. Le Roi entretenait son donjon,
comme son palais ou ses étables. Les villes se fortifiaient avec leurs
deniers. Point de travaux publics proprement dits. Routes, ponts, ports
étaient construits et entretenus par des corporations locales qui levaient
des taxes spéciales. — Le prince exerçait à peine un droit de contrôle.
Partant, peu ou point d'organisation financière. Un intendant, un argentier
suffisaient au service de leur maître[1]. La
royauté étendit son action, prit ou accepta le soin de satisfaire à certaines
nécessités de justice, d'ordre, de circulation, de défense commune, et, à
cette fin, elle eut besoin d'aide. Le mot ne sonnait pas mal aux oreilles. Il
associait le sujet à son prince et surtout ne tirait pas à conséquence pour
l'avenir. Aussi appela-t-on ces impôts aides libres, aides gracieuses[2]. On contrôlait leur levée au
moyen de tailles, menues branches fendues en deux, entaillées par le
contribuable qui en gardait une moitié et par le receveur qui conservait
l'autre[3]. Les
impôts sont comme ces familles de plantes qui se propagent avec des
variations infinies d'espèce. Bientôt on eut l'aide et la taille, perçues
d'après des états dressés sur rouleaux de parchemin. Le mot
de taille désigna plus spécialement la capitation, les impôts sur le bien
foncier, les impôts directs. Celui
d'aide resta propre aux charges indirectes mises sur les marchandises, le sel
excepté. Bien
entendu, l'exception faite pour le sel n'avait d'autre objet que de lui faire
porter un impôt spécial, la gabelle. Voilà
les grandes divisions des finances ; mais que de subdivisions ! Si nos
gouvernants ont péché souvent dans l'emploi des fonds, on doit reconnaître
que dans l'art d'en extraire des contribuables ils ont possédé, de bonne
heure, l'habileté de financiers consommés. Ainsi,
c'est un axiome que le meilleur impôt est celui qui, s'ajoutant à un autre,
se perçoit sans frais, sans titre nouveau, comme les centimes additionnels. Quand
la taille, d'abord extraordinaire, eut été rendue ordinaire par Charles VII,
vint Louis XI qui l'augmenta du tiers, puis v ajouta, par forme de crue,
le taillon[4]. Taillon et taille étaient
censés correspondre à l'entretien des troupes en campagne. Vers le milieu du
seizième siècle, on les surchargea du droit dit de subsistance, dont le
payement devait exempter les bourgeois du logement des soldats pendant
l'hiver, ce qui, avoue assez naïvement un
publiciste du dix-septième siècle, ne se pratique pas toujours[5]. Avec une intention aussi bonne
et aussi peu efficace, pour éviter aux paysans d'être foulés par les troupes
en marche, on préleva l'impôt d'étappe, toujours en surchargeant le
rôle des tailles. Toutes
sortes de personnes, privilégiées ou non, payaient les aides : droits sur les
vins et sur leur déplacement, droits sur le bétail ou pied fourché, sur les
bois ouvrés et à bâtir, sur la marque du fer, etc. On
ajouta un droit, dit de gros ou du vingtième, prélevé sur le propriétaire
vendant le vin de son cru. Enfin,
comme certaines villes étaient exemptes de tailles, on tourna ce privilège en
imposant à l'entrée certaines denrées alimentaires, vins, cidres,
eaux-de-vie, viandes, volailles, beurre, neufs, fromage, fruits, légumes. La
table ou pancarte des droits d'aides ne
comprenait pas moins de cent quarante-huit articles[6]. L'impôt
sur le sel se percevait avec une grande simplicité de forme, ce qui
naturellement avait conduit à le rendre de plus en plus lourd. A cet égard,
la France était divisée en trois régions, dites du grand parti, du moyen
parti et du franc-salé ou pays rédimé. Voilà
les trois grandes formes d'impositions. Mais si c'est un axiome qu'il est
plus simple de surcharger un impôt existant que d'en créer un nouveau, il est
également vrai que le besoin d'argent fait passer par-dessus l'inconvénient
des complications. On levait au nom du Roi beaucoup d'autres droits, par
exemple, droits de douane foraine de
Languedoc et de Provence, ceux de grosses fermes, convoi de Bordeaux, fermes
de la rivière de Seine, crue d'Ingrande-sur-Loire, anciens dix sols de Paris,
nouveaux dix sols de Paris, trente sols de Paris, etc. On comptait, vers 1653,
environ cinquante impôts de ce genre, produisant de 10 à 12 millions de
livres. Il faut
donner une place à part aux parties casuelles, droit prélevé par le Roi en
échange de l'hérédité des offices. En
somme, à divers titres, directement ou indirectement, on percevait chaque
année de 80 à 100 millions de livres. On conservait bien comme un souvenir
l'idée d'un vote des États, autorisant ces perceptions[7]. C'était même une des grandes
revendications des frondeurs. Mais le gouvernement royal avait affirmé sa
victoire, en 1652, en requérant du Parlement l'enregistrement, sans
discussion, d'édits financiers. Le dernier coup était porté et l'impôt fixé
désormais au bon plaisir du Roi. Passons
à l'examen des divers modes de perception. On faisoit, il y a des siècles,
un estat, au commencement de chacune année, des fonds qui s'y devoient
recevoir, qui estoient certains et réglez comme ceux des particuliers,
sçavoir : du revenu des domaines du Roy, de celuy de ses autres fermes et des
tailles, qui venoient réglément de quartier en quartier. — On faisoit un
autre estat de toute la dépense de la même année, qui n'excédoit pas la
recepte, et mettant entre les mains du trésorier de l'Épargne l'un et l'autre
de ces estats, il payoit aux dénommez en l'Estat des dépenses les deniers,
dont il faisoit par quartier le recouvrement des fermiers et receveurs
compris en l'Estat de recepte ; et toute la Sur-Intendance estoit faite1[8]. — Mais, depuis bien longtemps,
il n'était plus question de ce budget patriarcal. Voici
comment on agissait en 1654, au début de la surintendance de Fouquet : Après qu'il a esté arresté au conseil du Roy la somme
qu'il plaît à Sa Majesté de lever sur son peuple, on envoie des commissions
aux Trésoriers Généraux de France, establis aux bureaux des généralités[9]. En fait, deux commissions
étaient expédiées, l'une pour les tailles,
taillons et crues,
l'autre pour la subsistance, aux bureaux des vingt-trois
généralités, dont six étaient dites de pays d'États. L'intendant,
présidant l'audience du bureau des trésoriers de France, répartissait la
somme entre les élections ou arrondissements de la généralité[10]. Un
trésorier de France et des fonctionnaires appelés élus établissaient le rôle
des paroisses et y expédiaient une seule commission, portant, par articles
séparés, tant pour la subsistance, tant pour la taille et crue, tant pour le
taillon et la solde[11]. L'assiette
de l'impôt ainsi établie, la perception était faite par des collecteurs
spécialement préposés à cette fin. Les
deniers étaient payables à cinq termes : 15 novembre, 15 janvier, 15 avril,
15 juillet, 15 octobre. On pouvait réclamer, mais sans retardation du payement[12]. Les
collecteurs de paroisse portaient les deniers aux receveurs de l'élection ;
ceux-là devaient, chaque quartier[13], les voiturer, partie aux
receveurs généraux établis dans les généralités pour la recette des tailles,
crues, etc. ; partie aux trésoriers provinciaux des ponts et chaussées pour
la somme à eux allouée. Le
taillon avait ses receveurs particuliers, qui versaient leurs deniers aux
mains de receveurs généraux également spéciaux. Les uns
et les autres avaient en main l'état des sommes à percevoir[14]. Après délivrance sur place aux
parties prenantes des deniers leur revenant, l'excédent des recettes sur les
dépenses ordonnancées était enfin versé à l'épargne. L'épargne
ou trésor royal était comme la mer dans
laquelle, ainsi que ruisseaux et rivières, se viennent rendre toutes les
receptes, tant générales que particulières[15]. Un notable volume de ce flot
d'argent se perdait dans les sables de ces recettes. On
vient de voir comment se percevaient les tailles, les aides et impôts
assimilés. Les
parties casuelles avaient leurs trésoriers qui, en 1653, étaient quatre :
l'ancien, l'alternatif, le triennal, le quatriennal, exerçant chacun tous les
ans. Les
gabelles étaient concédées à forfait à des fermiers, achetant le sel aux
salines et le revendant, après avoir payé le droit du Roi. A part
une brève spécification des bases de l'impôt, rien dans les ordonnances, rien
dans l'acte d'adjudication ne déterminait les obligations respectives du
contribuable et du fermier. L'affermage
avait paru si commode et le fermier si accommodant, qu'on appliqua ce régime
à toutes les recettes. Malgré la remise de six deniers pour livre (2 ½ p. 100), les collecteurs, agents de la
perception directe, redoutaient les conséquences de leur responsabilité et
discutaient. De plus, mille liens les rattachaient aux redevables. Au
contraire, les commis des fermiers étaient inaccessibles. Des compagnies de
fusiliers, entretenus à leurs frais, avaient promptement raison des
récalcitrants. Le Roy met les tailles en
party quand bon luy semble,
dit en 1656 le rédacteur semi-officiel du Vray estat de la France, quoy que cette façon de les lever ait causé plusieurs fois
de grands désordres ; mais c'est le moyen de trouver plus promptement de
l'argent dans une nécessité pressante. Or cette nécessité était chronique. Enfin,
tant pour les recettes directes que pour le prix des fermes, l'épargne était
le centre ou plutôt l'abîme commun. François
Ier n'avait qu'un trésorier de l'épargne remplaçant l'ancien et unique
receveur général des rois. L'office devint alternatif sous Henri II, triennal
sous Louis XIII. La Régente avait voulu le faire quatriennal, mais les trois
trésoriers anciens rachetèrent le quatrième titre moyennant 650.000 livres.
Ces offices se vendaient un million. Ils ne rapportaient pourtant que 12.000
livres de gages ; mais à ce maigre traitement s'ajoutaient trois deniers (1 ¼ p. 100) pour livre, c'est-à-dire pour
livre reçue ou payée. Sur un mouvement de fonds de 200.000.000 de livres,
c'était une remise de deux millions et demi à partager entre trois. Les
trésoriers de l'épargne distribuaient les deniers
du Roy aux
trésoriers des maisons royales, aux trésoriers ordinaires et extraordinaires
des guerres[16], à ceux de la marine, à ceux
des gardes, des Suisses, au trésorier général de l'artillerie, des
fortifications, aux payeurs des rentes de l'Hôtel de ville, que nous avons
vus si souvent inquiets, aux paveurs des cours souveraines, etc., etc.
Plusieurs de ces charges répondaient à un besoin. Le plus grand nombre
n'avait été érigé en office qu'afin d'être vendu. L'impôt engendrait l'impôt.
Chacun de ces payeurs prélevait sa remise. Le lien
entre les agents de la recette et ceux de la dépense était formé par le
contrôleur général et par le surintendant des finances. Le
contrôle général, création assez récente, d'abord simple commission, ensuite
érigé en titre d'office par Mazarin en faveur de Particelli d'Émeri,
consistait dans la tenue d'un registre de toutes les finances et dans
l'examen des quittances. En 1654, la charge avait deux titulaires, MM. Camus
et Menardeau-Chompré. Les
contrôleurs étaient assistés par douze intendants, qui constituaient un conseil
ou plutôt un corps de rapporteurs aux conseils, soit de direction, soit des
finances. Au
sommet de la hiérarchie siégeait le surintendant, ordonnateur suprême. Il dispose absolument des finances du Roy, sans estre obligé
d'en rendre compte. C'est luy qui fait un estat du revenu du Roy, et de la
despense à laquelle il doit estre employé[17]. Ces
termes si remarquables dont se sert le Vray estat de la France se
trouvent dans les commissions de Servient et de Foucquet. Ils signifiaient
exactement que les surintendants ne dépendaient que du Roi, dont ils
répartissaient les deniers à qui de droit. C'était le prince qui visait son
budget de recettes et de dépenses, et, comme les surintendants représentaient
le prince, ils n'étaient justiciables que de lui seul et non des cours
supérieures établies pour connaître des questions de finances et des droits
du Roi. En
effet, une Chambre des comptes existait depuis des siècles avec mission
d'examiner et d'arrêter les comptes de ceux qui maniaient les deniers royaux
; la Cour des aides jugeait en dernier ressort des contestations en matière
d'impôts déjà soumises aux élus ; ces fonctions sont accomplies de nos jours
par la Cour des comptes et le Conseil d'État jugeant au contentieux. Évidemment,
ce n'est pas par le défaut d'institutions, encore moins d'ordonnances, que
péchait le régime financier de ce temps-là. Ceux qui affectent de n'y voir
que trouble et confusion ne l'ont pas étudié. Philippe-Auguste, saint Louis,
Philippe le Bel, Charles V, François Pr surtout, enfin Henri IV, avaient
appliqué leur volonté et celle d'habiles ministres au règlement des finances.
Mais s'il semble à première vue que rien ne doive être si facile à régler que
des nombres, l'expérience des siècles passés, comme celle de nos jours,
témoigne que rien n'échappe plus souvent et plus aisément à toute loi. Chez
les redevables, la fraude et la misère ; chez les comptables, la cupidité ou
la négligence ; chez les chefs, rois, empereurs ou assemblées, tous ces
défauts réunis ont constamment conspiré contre cet ordre et cet équilibre que
le peuple, pris en niasse, ne cesse de réclamer et que chaque citoyen, en son
particulier, s'efforce de détruire à son profit. Ce coup
d'œil donné à l'ensemble du régime des finances vers 1654, rappelons
sommairement ce qui s'était passé en cette matière depuis cinquante ans.
C'est un préambule indispensable à l'histoire de la surintendance de
Foucquet. Henri
1V et Sully, n'engageant que des dépenses inférieures de 3 à 4 millions aux
recettes, faisaient face à l'imprévu et économisaient par ce bon ménage 700.000
livres par an, si bien qu'ils avaient amassé 5 millions à la Bastille, 2 millions
à l'Épargne. Le Roi mort, le ministre dut se retirer, chargé de biens et
encore plus de haine. Les conseillers de la régente Marie de Médicis n'eurent
pas de peine à persuader qu'il fallait abolir la surintendance, fonction qui
donnait au titulaire trop d'autorité. Mieux valait la partager entre gens de
robe longue, plus accommodants que les hommes d'épée. On
découvrit ou l'on reproduisit cet argument qu'un roi qui thésaurise appauvrit
son peuple, qu'il suffisait d'équilibrer la recette et la dépense. Quant aux
trésors amassés dans la Bastille, on les prodigua soi-disant pour en acquérir
d'autres dans le cœur des grands[18]. En deux années, la direction
des finances épuisa les économies de dix ans. C'était cependant le temps de
Jeannin, l'homme de bien[19], et du rigide Maupeou, ces deux
maîtres de Nicolas Foucquet. Un instant, Jeannin songea à s'adresser aux
États, mais on préféra recourir aux expédients. En reportant le déficit de
l'année courante sur l'année future, c'est-à-dire en empruntant, en
suspendant l'amortissement des dettes anciennes[20], on gagna l'année 1617. Des
gens de robe, on passa aux gens de sac et de corde, tels que Barbin, un
partisan. Quand
le Trésor est vide, les ministres n'y durent guère. Concini
assassiné, Barbin mis à la Bastille, on reprit Jeannin pour un temps ; puis
on rétablit (1619)
la charge de surintendant en faveur d'un homme d'épée, Schomberg[21], brave militaire aux mains
nettes, à la tête vide[22], qui ne volait pas, mais
laissait voler[23]. On lui reprocha d'escompter
les revenus à venir, alors que tous les revenus présents étaient dépensés. En
moins de deux ans, ce serait aujourd'hui un long ministère, il fut usé et remplacé
par le marquis de La Vieuville. Nous
entrons dans l'histoire contemporaine de Foucquet. La Vieuville,
issu d'une famille bretonne, entré d'abord dans les emplois militaires,
était, par sa mère Catherine d'O, petit-neveu d'un surintendant, et par sa
femme, Marie Bouclier de Beaumarchais, gendre d'un trésorier de l'Épargne[24]. Personnellement homme de
valeur, mais peu scrupuleux, il commença par faire exiler son protecteur Sillery.
Économe, presque avare, dépensant peu pour lui-même et menant très petit
train, il était dur aux autres, surtout aux courtisans, dont il diminuait ou
supprimait les pensions[25]. En politique, il avait des
vues toutes personnelles. Ses idées n'étaient pas sans grandeur et tendaient
à l'abaissement de la maison d'Autriche. C'était aussi le grand projet de
Richelieu, qui ne tarda pas à prendre ombrage des visées politiques de ce
collègue ambitieux. Deux
libelles parurent : Le mot à l'oreille de monsieur le marquis de La
Vieuville, et La voix publique. On s'en prenait d'abord au caractère
hautain du surintendant. Les bonnes paroles coûtent peu, et il n'en donnait
même pas aux solliciteurs ! Vous les laissez
ruminer deux heures tout à l'aise dans votre galerie, dit le pamphlétaire,
afin qu'ils n'oublient rien qui les fasse revenir une autre fois. Des dames, des grandes dames
restent jusqu'à trois heures. Encore n'en reçoit-on que deux ou trois, afin
que les autres reviennent. Enfin, Monseigneur sort de sa chambre, traverse la
galerie, sans se tourner vers personne, comme
une image en procession.
On lui ôte le chapeau ; on lui fait des révérences qu'il ne rend pas. Que si
un plus hardi l'assiège, il entre en avertin (maladie d'entêtement), se plaint, crie le plus fort,
refuse tout. Ce n'est pas feu M. le président
Jeannin qui en eût usé ainsi. Il n'avoit refusé jatnais audience à qui que ce
fût, écoutant les grands avec respect, les petits avec douceur, et tant les
uns que les autres, sans rabrouer personne. Vous ne donnez rien à gagner ; a grand vice en un
homme de votre condition n. Vous rendez le Roi avare ! Voilà le grand mot
lâché. Ceux même que le Roi veut faire payer
particulièrement, vous leur refusez... Ce fut un des
chefs d'accusation contre Enguerrand de Marigny[26]. La
Vieuville avait le tort d'ajouter au refus une sorte d'ironie. Lui
apportait-on des ordonnances de comptant, c'est-à-dire des mandats à vue, il
étendait les bras, les rapprochait, les étendait encore, comme s'il nageait,
manière de dire : Il n'y a pas de fonds[27]. Tort plus grave, il déplaisait
à Richelieu, dont la fortune s'affermissait alors. C'en était trop. On
insinua que le surintendant nourrissait de dangereux projets. Il s'était
occupé d'armements maritimes ; c'est qu'il voulait être amiral et s'assurer d'un cheval de bois pour transporter les
voileries de son beau-père et les siennes. Il avait marchandé les gouvernements de Blavet,
de Sedan, de Calais. Il est périlleux, disait-on au Roi, de confier des places frontières à ceux qui ont le
maniement de votre bourse[28]. Le feu roi n'avait jamais
voulu donner aucune forteresse à Sully. Enfin,
et l'on peut à ce trait reconnaître d'où partait le coup, on prétendit que le
marquis voulait animer Monsieur contre la Reine mère, semant la division où l'amour devroit être inviolable[29]. C'est avec ce même propos
qu'on allait faire périr Chalais. La
Vieuville ne profita pas plus que les autres hommes de sa propre expérience.
Il ne crut pas possible qu'on lui cassât les
os comme il avait
fait à Sillery et à Puisieux, son fils. Le Roi, d'ailleurs, continuait de lui
montrer bon visage. Un jour, du fond de son appartement dans le vieux château
de Saint-Germain, il entendit un bruit confus ; les marmitons, armés de
poêles et de chaudrons, carillonnaient. C'était Monsieur qui lui donnait
cette sérénade, en forme de boute-selle[30]. Le ministre s'attendait tout
au plus à quelque ordre d'exil dans sa maison des champs. Mais un exempt et
quatre archers du corps de la garde entrèrent, le saisirent, le firent monter
dans un carrosse bien attelé et l'emmenèrent au château d'Amboise. En même
temps, on envahissait le logis de Beaumarchais, son beau-père, qui s'enfuit
d'abord en Poitou, puis jusqu'en l'île de Noirmoutier[31]. Nous avons été réduits à cette nécessité, dit le Roi, par
la continuation de la mauvaise conduite dudit de La Vieuville, qui a esté jusqu'à
ce point que de changer sans notre sçeu les résolutions prises en notre
présence, de traiter avec des ambassadeurs résidens auprès de notre personne,
contre notre ordre, nous supposer divers avis, à dessein de nous donner
ombrage de ceux en qui nous pouvons avoir sûrement confiance, et rejetter sur
nous la haine qu'il s'est attirée en exerçant ses passions contre les
particuliers[32]. Des
dénonciateurs jurant sur leur vie que 600.000 écus au moins étaient cachés
dans la maison du surintendant, le Roi y envoie. On fouille jusque dans les
coffres aux langes des enfants. On ne trouve quasi rien. Sans se décontenancer,
les mêmes gens insinuent que les trésors sont ailleurs. Vite on érige une Chambre ardente. Les poursuites commencent. Un financier est arrêté,
jugé, pendu. Les autres s'enfuient. On les pend en effigie. Une procédure est
entamée contre La Vieuville. Richelieu prétend qu'on prouva certains faits de
concussion. Toujours est-il que, de son propre aveu, la Chambre ne rendit
aucun arrêt sur ce chef. Au bout
de six mois, le Cardinal découvrait qu'il faisait lui-même fausse route. Les
sources de l'argent étaient taries. Il traita avec les financiers, et,
moyennant une composition de sept millions, la Chambre de justice fut
révoquée. La
Vieuville n'en resta pas moins séquestré dans le château d'Amboise, sans
pouvoir écrire une ligne à sa femme. Un an et demi se passa avant qu'on
l'interrogeât. Quand ses parents intercédaient pour lui, les nouveaux
ministres se contentaient de répondre : Il
faut avoir patience. Le Roi est encore trop irrité. On ferait plus de mal que
de bien à M. de La Vieuville en priant Sa Majesté de lui accorder quelque
adoucissement... A
la fin, le malheureux parvint à s'évader. Aussitôt
libre, il publia une Apologie à la fois éloquente et habile[33], et qui a bien pu servir plus
tard de modèle à Pellisson prenant la défense de Foucquet. Ce dernier avait
alors tout au plus dix ans et demi ; mais, élevé dans la famille Maupeou, au
milieu de fonctionnaires des finances, cette disgrâce éclatante de La
Vieuville dut frapper son imagination d'enfant[34]. Le
procureur général de la Chambre était René de Maupeou, oncle de Nicolas
Foucquet. Plus tard, quand cet autre surintendant fut soumis à de semblables
et pires épreuves, on ne put s'empêcher d'évoquer les souvenirs de La
Vieuville[35]. La
surintendance fut partagée entre deux titulaires. Richelieu formula cette
maxime que deux hommes, piqués de jalousie, ne s'entendraient pas pour piller
les deniers de l'Épargne, chacun craignant
d'estre descouvert par son collègue. Il les voulait d'ailleurs ni trop pauvres ni trop
puissants[36]. Les gens d'épée furent encore
une fois proscrits, et ceux de robe préférés. Bochart de Champigni et Michel de
Marillac parurent présenter les conditions désirées. Courte illusion.
Marillac, d'abord conseiller au Parlement de Paris, puis maître des requêtes,
homme austère, mais violent et borné, mit les financiers, Richelieu le dit
lui-même, en tel desarroy, que ceux qui se
conduisoient avec le plus d'innocence dans leurs charges ne sçavoient où
donner de la tête[37]. Renonçant
aux magistrats, ne voulant pas retourner aux militaires, le Cardinal fit
choix d'un diplomate, de Coiffier, marquis d'Effiat, petit-neveu de Ruzé,
l'ancien ministre de Henri IV. C'est
une vérité d'expérience que les ministres et les domestiques trouvent tout en
mauvais état dans la maison où ils entrent. D'Effiat ne fit pas exception à
la règle. Voici son premier rapport : Ce sont
choses publiques ; la confusion des finances estoit telle qu'il n'estoit plus
permis de veoir les comptes des comptables. Leur demandait-on de l'argent, ils répondaient
qu'ils étaient en avance, et qu'au lieu de
debvoir de l'argent, il leur en estoit deub... Tout ce qu'on
en pouvoit tirer, c'étoient des prêts et qu'ils faisoient des propres deniers
du Roy, à des intérêtz si grands, qu'ils mangeoient tout le principal. Ils
n'avoieut pas compté depuis cinq ans. Ses prédécesseurs, Marillac et Champigni, voyant
devant eux une montaigne de papiers, se
trouvant chargés d'affaires, ne pouvoient prendre le loisir pour y vacquer,
tant ils estoient pressés de despenses[38]. Désordre complet. Il
paraît d'ailleurs que d'Effiat possédait une telle dextérité pour manier
et ramener les esprits les plus difficiles, qu'il détermina les financiers
à lui faire des avances, et au denier dix, alors qu'on payait précédemment
dix-huit et vingt pour cent. Il assura le payement des rentes et des charges
ordinaires du royaume. Trait caractéristique de son administration resté
presque inaperçu, il obtint des capitalistes du temps cette preuve de
confiance, refusée à tous ses prédécesseurs, qu'ils prêtèrent leur argent,
non sur garanties spéciales, aliénation de revenus ou création d'offices à
vendre, mais sur le seul crédit de l'État[39]. Bref, c'était un véritable
ministre des finances[40]. Pendant six ans, il rétablit,
sinon l'ordre, au moins l'économie dans le maniement des deniers royaux. Un méchant
esprit, Tallemant, prétend qu'il apprit à
voler à ceux qui l'ont suivi[41]. Cet art était connu bien avant
d'Effiat. On doit même dire en faveur du surintendant qu'il mit l'honneur
au-dessus de l'argent, puisqu'on le réclamer sa part des fatigues et des
dangers de la guerre, à ce point qu'il y périt en 1632, après avoir mérité le
bâton de maréchal de France[42]. D'Effiat
mort, Richelieu en revint à son principe d'avoir deux surintendants. Bullion
et Bouthilier furent nommés conjointement à cette charge. L'un et l'autre
avaient passé par le Parlement de Paris, mais en étaient sortis pour
s'attacher plus directement au service personnel du Roi. Claude Bouthilier,
d'origine angoumoise, était particulièrement agréable à Richelieu. Malgré
cette faveur, ce fut Claude de Bullion qui prit le pas et attira à lui les
affaires. Successivement conseiller au Parlement, maitre des requêtes, puis
conseiller d'État, il avait servi Richelieu dans les affaires les plus
délicates. C'était un homme très maitre de lui, n'obligeant personne, dur,
fiscal. Possesseur d'une assez grande fortune avant d'entrer dans les
finances, il se laissait comparer à ces vases auquel l'Océan entier ne pourrait ajouter
une goutte[43]. Ce n'est pas lui qui se
ruinait en festins, moins encore en bâtiments. Achetait-il une terre, il démolissait le manoir et tout ce
qui coûtait comme entretien[44]. D'allure bourgeoise, il
appelait madame la surintendante la grosse
amie. Le physique
répondait au moral. L'homme était petit, gras, rond comme un baril. Sire,
dit un jour Richelieu au roi Louis XIII, ce
serait une plaisante chose que de voir cette figure avec le cordon bleu[45]. Et Bullion fut nommé trésorier
des Ordres, charge qui donnait droit d'en porter les insignes, ou plutôt la
livrée. Malgré ces plaisanteries, le Cardinal affectionnait un surintendant
qui lui procurait à heure dite les sommes nécessaires à sa politique[46]. En finances, l'œuvre
particulière de Bullion fut l'édit de 1634 sur le règlement des tailles,
soumettant à cette imposition tous les prétendus exempts[47], et jusqu'aux commensaux du
Roi. Pour favoriser le placement des effets publics, on ordonna que les
intérêts des prêts civils ne pourraient, sous peine de la perte du capital,
dépasser le denier dix-huit, 5,55 pour 100[48]. A en croire l'exposé des
motifs, le profit excessif que tiroient les
particuliers des constitutions de rente auroit fait négliger le commerce et
attiré la ruine de la plupart de la noblesse. Malgré
ces défenses, il fallut en revenir aux expédients accoutumés : aliénation des
tailles, ventes d'offices, trafic sur les monnaies, taxes sur les aisés.
Enfin, pendant huit ans (1632-1640), Bullion fit face aux nécessités de la guerre.
Cette application aux affaires ne l'empêcha ni de s'amuser ni d'arrondir sa
fortune. Pour ses plaisirs, il les prenait dans les prix doux, hors barrière,
aux alentours du Jardin des Plantes, une de ses fondations[49]. Quant à sa fortune, il la
quadrupla par son économie[50]. Une seule fois, il céda au
goût du jour, à la manie de bâtir. Il construisit, près du Palais-Royal, un
hôtel qui porta son nom, où l'on remarquait deux galeries peintes, l'une par
Blanchard, l'autre par Vouet[51]. A peine mettait-on la dernière
main à cette splendide demeure, que Bullion mourut subitement d'un coup
d'apoplexie, en 1640. Richelieu
ne donna pas de collègue à Bouthilier, qui resta seul surintendant. Bouthilier,
homme aimable, se montra très accueillant, donnant audience à tous, répondant
vite aux demandes[52], généreux en paroles et en
politesse. Il n'en révoqua pas moins les anoblissements accordés depuis
trente ans ; mais l'acte capital de son passage aux affaires fut un règlement
sur la répartition des tailles, enlevée aux trésoriers de France et aux élus
pour être attribuée aux intendants. On
diminuait les frais de perception et le nombre des privilèges ; par contre,
l'impôt devint plus arbitraire[53]. Les intendants mirent les
tailles en parti, c'est-à-dire les vendirent à des partisans, à des
traitants, qui perçurent l'impôt à l'aide de compagnies de fusiliers. Tant
que la forte main de Richelieu soutint les agents du fisc et leurs associés,
le peuple paya, ou, s'il murmura et se révolta, il fut promptement et
durement rappelé à l'obéissance. Mais le Cardinal mourut, et la force
gouvernementale disparut avec lui. De 1610
à 1643, on avait aliéné 40 millions de revenus, pour en retirer un capital de
200 millions, dépensés sans profit. C'était emprunter en moyenne à 20 pour
100. En 1644, les créances sur l'État ne trouvaient preneur public qu'à 50
pour 100 de perte[54]. Les revenus de l'année
courante et de deux exercices futurs, 1645, 1646, étaient entièrement
consommés. Or,
cette pénurie du Trésor et cet escompte des ressources à venir coïncidaient
avec l'avènement d'une régente à l'âme
libérale et dont la générosité, longtemps comprimée, était en quelque sorte
obligatoire. A côté d'elle, un nouveau ministre, Mazarin, étranger avant à
faire sa fortune et celle d'une famille mourant de faim en Italie. Aussi
Bouthilier, qui avait dû, pour plaire à son patron Richelieu, tout refuser à
la souveraine, fut immédiatement remercié. En son
lieu on nomma le comte d'Avaux, qui partit bientôt comme plénipotentiaire au
congrès de Munster, et le président de Bailleul, qui resta seul chargé de la
surintendance[55]. Bailleul,
issu d'une vieille et bonne famille normande, après avoir été conseiller,
puis président au Parlement de Paris, s'était acquis une certaine popularité
comme prévôt des marchands[56]. Personnellement, il était
agréable à la régente[57]. Au surplus, homme aimable, de
caractère égal, d'abord facile, il possédait toutes les qualités extérieures
d'un ministre[58]. Par malheur, là se bornait son
mérite. Aussi le pouvoir effectif passa-t-il promptement aux mains d'un agent
en sous-ordre, le contrôleur général Particelli d'Émeri, placé à ce poste par
le prudent et calculateur Mazarin[59]. Michel
Particelli, fils de Dominique et de Marie Scarron, était d'origine italienne
comme son patron. Sa famille avait fait une première étape à Lyon et s'y
était signalée par une banqueroute célèbre. Il avait lui-même commis plus
d'un méfait. On en plaisantait en disant que Particelli avait été pendu à
Lyon pendant que d Émeri se sauvait à Paris[60]. Tel quel, Richelieu l'avait
jugé digne d'une intendance. On le trouve en Languedoc dans le temps de la
révolte de Montmorency, où il fit preuve d'une grande souplesse, pour ne pas
dire plus[61]. C'était
d'ailleurs un homme très habile. D'Effiat et Bailleul avaient été séduits par
sa facilité à compter de tête, qualité toujours rare, surtout en ce temps où
le système décimal n'était pas connu. Aucun scrupule ne le gênait. Pour
satisfaire la Reine, Mazarin et lui-même, il eut recours à tous les
expédients que lui fournit son esprit inventif. Rien ne l'arrêtait, ni la justice,
ni la pitié, ni le désespoir des misérables. Il ne perdait pas son temps en
études sur les meilleurs moyens de répartir les charges rendues nécessaires
par un régime militaire nouveau. Ses vues étaient aussi courtes que
perçantes. S'il ne fut pas, comme on l'a dit, l'inventeur de la solidarité
entre les contribuables, il rendit l'application de ce principe plus
fréquente et plus impitoyable. Un village tardait-il à paver les taxes, un
des habitants était saisi, emprisonné, ses biens vendus pour la dette
commune. Un moment, on compta vingt-trois mille prisonniers de cette qualité.
Cinq mille périrent dans les prisons. C'est
l'époque où Nicolas Foucquet débutait comme intendant du Dauphiné, au milieu
de terribles révoltes[62]. Il faut
encore voir Émeri sous un autre jour. C'est de lui que date la réputation des
surintendants comme hommes de luxe et de plaisir, assurés de conquêtes
faciles. Fils du Lucquois Particelli et de Marie Scarron, une Lyonnaise[63] d'origine piémontaise, rien
d'étonnant s'il présentait le type italien. Son portrait le montre avec de
grands traits, ressemblant à Mazarin, mais sans l'air noble du Cardinal[64]. D'Émeri possédait, en quelque
sorte de naissance, le goût des arts. La Chevrette, sa maison de campagne, à
Saint-Denis, était célèbre pour la beauté de ses jardins et surtout de ses
eaux jaillissantes. Il y reçut souvent la reine Anne d'Autriche et le jeune
Louis XIV[65]. On sait encore qu'il
collectionna les belles tapisseries et les peintures de maîtres. Il avait
même un certain goût pour les sujets érotiques. Quand il mourut, sa femme,
une Le Camus, en fit détruire un certain nombre, sans souci de leur valeur
artistique[66]. N'aimant
pas la beauté qu'en peinture, il allait de la courtisane Marion à la grande
dame, marquise ou duchesse, n'en trouvant pas de cruelles[67], n'en cherchant pas. Vers 1648,
le surintendant atteignait la soixantaine sans s'être corrigé de ces défauts
de jeunesse. Comme il n'avait pas l'humeur avare, ses mains, si rapaces à certaines
heures, laissaient aussi parfois l'argent couler entre leurs doigts.
Regardant son fils, Thoré, un grand benêt, et son gendre La Vrillière, un
avaricieux, il se déclarait incapable d'économiser pour ces gens-là. Sa
prodigalité aurait pu être considérée comme une demi-vertu, tout au moins
comme l'atténuation de sa cupidité. Tout au contraire, on lui en voulut bien
plus qu'à ses économes prédécesseurs. Dans un
pamphlet du temps, le Démon de la maltôte, Satan reproche à un
partisan ses grandes dépenses. Que voulois-tu, répond l'accusé, que je fisse de tant de biens, sinon pour en passer le
temps et en faire des amies ?[68] Cette excuse ne paraît avoir
désarmé ni le diable ni le populaire, surtout les gens de robe. Il y a toujours dans les grandes compagnies, dit un de ces derniers, des personnes jalouses et envieuses des prospérités et des
dignités de ceux qui sont au gouvernement. — Les traitants, ajoute-t-il, attiroient la haine publique sur eux par leurs dépenses
prodigieuses en festins, bâtiments, meubles, gros mariages, dans la nécessité
publique[69]. Autre
justice à lui rendre, d'Émeri, qui devait sa fortune à Richelieu et à
d'Effiat, dont l'esprit inventif avait depuis le commencement de la régence
fourni toutes les combinaisons financières, qui passait pour donner seul le
mouvement au conseil d'en haut[70], avait le caractère très fier
et ne s'inclinait point comme les autres devant le despotisme de Mazarin.
Aussi ce dernier, au premier orage de la Fronde, s'empressa-t-il, comme on
l'a vu, de sacrifier le surintendant[71]. A vrai
dire, le véritable sacrifice fut celui des créanciers du Roi, événement déjà
mentionné dans un précédent chapitre, mais qu'il est utile de raconter ici
plus en détail. Les 30
juin, 2 et 3 juillet 1649, le Parlement, dans la fameuse chambre de Saint-Louis,
avait révoqué toutes les assignations sur les revenus du Roi, avec défense de
payer aucun récépissé de l'Épargne, sauf à être
pourvu pour leur remboursement et intérêt légitime en temps et lieu, en
connoissance de cause[72].
C'était bel et bien une banqueroute. D'Émeri protestait contre ces arrêts.
Mazarin, feignant d'épouser ses idées, se rendit, le 8 juillet, dans une
assemblée de parlementaires au palais du Luxembourg, et témoigna de ses
scrupules : Ce seroit faire manquer de foy au
Roy que de reculer les prests ou de les rayer... Un président
repartit vertement qu'on ne craignait pas de manquer de foy à tous les gens
d'honneur du royaume, et qu'à présent, on faisoit difficulté d'en manquer à
cent mille coquins qui avoient volé le Roy et qui s'estoient enrichis des
dépouilles de son peuple[73]. Alors Mazarin, dans un grand discours et bien délié, se hâta de remercier le Parlement pour la grande obligation que le Roi lui avoit ; les ministres n'eussent osé
faire ces propositions pour conserver la foi
et la réputation publique
; mais à présent qu'elles viennent de la Cour, le Roi s'en servira avec avantage
sans pouvoir être accusé de manquement de parole, puisqu'il le fera par le jugement de cette compagnie[74]. Dès le
lendemain, 9 juillet, sur les onze heures du matin, Le Tellier abordait son
collègue Émeri, encore plongé dans ses comptes, et lui signifiait la décision
du maître. Malgré sa finesse, ce dernier ne s'attendait pas à ce coup. Sans
phis se troubler, il s'empressa de mettre en sûreté la cassette aux papiers
les plus précieux et se retira à Tanlay, très tranquille, sachant bien qu'on
ne le pousserait pas à bout, parce qu'on
craignait qu'il ne parlast[75]. Au premier moment, il s'éleva
bien contre lui une immense clameur, mais qui se perdit dans le tumulte des
barricades et surtout dans le fracas des ruines causées par la banqueroute de
l'État. Mazarin
remplaça Émeri par La Meilleraye, grand maître de l'artillerie, homme de
guerre médiocre, financier nul. Le Cardinal, très petit clerc en finances,
était trop intelligent pour ne pas adopter l'idée de garder, pour les besoins
courants, les revenus affectés au service de la dette. On
escomptait depuis longtemps et pour plusieurs années d'avance le produit des
impôts. Le Roi empruntait et les employés de l'Épargne souscrivaient pour lui
des billets, comme aujourd'hui l'on émet des bons du Trésor. Subitement, en
juillet 1648, le gouvernement décréta que tout remboursement serait ajourné ;
c'était une Manière de consolider la dette sans demander l'agrément des
créanciers de l'État. De plus, on décida que tous ces créanciers avant abusé
de la bonne foi du prince ou de la dureté des temps pour prêter à de gros
intérêts, on leur imposerait une réduction de capital. Autre économie, ce
capital réduit ne recevrait plus que six pour cent d'intérêt. Sur ce, dit un
contemporain, grand étonnement de ceux qui
ont fait des prêts au Roy[76]. On ne
s'en douterait pas en lisant ce que Mazarin écrivait le lendemain à
l'ambassadeur de France en Hollande. Il prétend luy faire voir évidemment que Dieu aime beaucoup cette
couronne, la conduisant à son plus grand bien par des voies qui y
paroissoient directement opposées. Toutes ces divisions (de la Fronde) ont
produit que S. M., du consentement des traitans qui l'ont assistée jusqu'ici
et à leur entière satisfaction, parce qu'ils appréhendoient pis, a reculé
leur assignation et assuré un fonds certain pour la continuation de la guerre. On avoit mangé toute l'année
courante et les deux suivantes, et on a trouvé le moyen de la remanger une seconde
fois, S. M. rentrant dans tous ses revenus et ne donnant à ceux à qui elle
doit que l'intérêt de leur argent fixé pour cent. Pour
plus de clarté, le Cardinal ajoute : Le
revenu est de soixante millions ; en abandonnant six millions pour l'intérêt
de cent millions qu'on ne remboursera pas, il restera une somme nette de
cinquante-quatre millions. J'oubliois de vous faire remarquer un autre avantage
bien considérable, c'est que, par la résolution que le Roy a prise de
retrancher les 15 pour 100 qu'il donnoit d'intérêt, il a gagné en un instant
cinquante millions, pour lesquels les traitans avoient de bonnes assignations
aussy bien que pour le principal de leurs debtes[77]. Voilà
le prototype des banqueroutes d'État[78]. A l'excuse
de Mazarin, il faut dire que la plupart des magistrats provoquaient cette
mesure. Le 23 et le 24 juillet, on revint au Parlement sur cette affaire des prêts.
Quelques-uns opinaient à les reculer à une meilleure saison, les autres, qui l'emportoient de beaucoup, à les rayer entièrement, et
à décréter contre ceux qui les avoient faits[79]. La
conséquence ne se fit pas attendre. Les financiers, partisans ou traitants,
faisaient alors le service des banques de dépôt de nos jours.
Ecclésiastiques, gentilshommes, bourgeois leur confiaient leur argent à faire
valoir, soit parce que les sommes étaient trop petites pour faire l'objet de
prêts directs, soit, raison plus déterminante, parce qu'on ne voulait pas
prêter immédiatement au Roi, de peur de coups de force, semblables à celui
dont Mazarin acceptait si volontiers l'idée[80]. A peine
la décision royale fut-elle connue, qu'on assiégea les bureaux des
financiers. L'affolement était si grand qu'un huissier fit vacarme chez un
homme d'affaires de Mazarin, prétendant tout saisir, pour une femme titulaire
d'une créance non échue de neuf mille livres[81]. Qu'on juge par-là du bruit
chez les personnes moins protégées. Aussitôt qu'ils eurent appris la
nomination d'un nouveau surintendant, les financiers s'empressèrent à la
porte de La Meilleraye, lui promettant qu'il
ne manqueroit pas d'argent, si la Reine pouvoit rabattre le caquet du Parlement. Or, jamais le Parlement
n'avait parlé plus haut. Subitement, toutes les bourses se fermèrent. Jeannin,
trésorier de l'Épargne, alors en exercice, c'est-à-dire obligé de subvenir
aux besoins du jour, eut de la peine à trouver vingt-cinq mille livres sur
son crédit et sur celui de toute sa parentèle[82]. De
cette parentèle était Nicolas Foucquet. Ce
futur surintendant assistait à la chute de Particelli d'Émeri, aux embarras
de son successeur, à cette effroyable banqueroute, la plus considérable qui
eût jusqu'alors ébranlé le crédit naissant de l'État. Par situation, par
tradition, par tempérament, il avait dû prendre parti contre le Parlement[83]. Au fond, son idée était faite
sur les banqueroutes comme moyen de soutenir les forces financières d'un
royaume. Il n'en était pas de pire. En effet, ou demanda bientôt à La
Meilleraye ce qu'il faisait de tout l'argent des contribuables depuis qu'il
le recevait sans payer les dettes ; or, le malheureux ne recevait rien. Dès le
mois d'août, on dut rendre un arrêt maintenant au profit des trésoriers de
l'Épargne le bénéfice de leurs assignations. C'était dire que tout irait comme ci-devant[84], ou plus mal, tant la
banqueroute engendrait sa défiance. On
vécut dès lors au jour le jour, sans même payer l'intérêt de la dette
consolidée. Un an
plus tard, le premier président Molé se plaignait à Le Tellier du peu de raison que l'on fait aux promesses. Puisqu'on a fait une
banqueroute générale, qu'on règle les
comptes, et qu'on promette l'intérêt[85]. On ne
régla rien, on promit tout, on obtint peu de chose. La Reine, Mazarin, Condé,
tous leurs partisans durent engager leur signature, leurs biens, leurs
bijoux. On cessa de payer les rentes de l'hôtel de ville de Paris, ces rentes
dont le payement entretenait le luxe dans les grandes maisons, subvenait à la
dépense ordinaire des médiocres familles ; les supprimer pour un quartier,
c'était plonger une foule de petites gens dans la misère[86]. On en
vint au grand remède, au changement de surintendant. La place était ardemment
briguée par le marquis de La Vieuville, le président de Maisons, enfin par
Émeri, qui s'était peu à peu rapproché de Paris. Ce fut ce dernier qui
l'obtint. Ce bouc émissaire de 1648 revint en 1649, du consentement du
Parlement[87], aux applaudissements des
rentiers. On eût dit que la foi publique[88] et la sécurité de la vie[89] rentraient avec lui. Par
malheur, Émeri souffrait alors d'une fièvre
automnale e, sorte
de fièvre quarte. En vain se fit-il saigner soixante fois, prit-il du vin
émétique cinquante fois, il dut se résigner à mourir. Il demanda à n'être
prévenu qu'un quart d'heure d'avance. C'était un sceptique. On ne trouva chez
lui que peu d'argent. Depuis le maréchal d'Effiat, aucun ministre des
finances n'était mort si pauvre[90]. Son fils en fut indigné (21 mai 1650). René de
Longueil, plus connu sous le nom de président de Maisons, qui, depuis
longtemps, ambitionnait la surintendance, l'obtint enfin, y fit preuve d'une
incapacité absolue, tomba, signe des temps, sous les réclamations des
financiers, ayant à leur tête cet agent d'affaires de Mazarin que nous avons
vu poursuivi, traqué, en 1648[91]. Autre symptôme des époques
troublées qui usent plus d'hommes qu'un pays ne saurait en élever : on
rappela La Vieuville, le surintendant disgracié, condamné, en 1625,
c'est-à-dire il y avait vingt-trois ans. Cette
tardive satisfaction coûta quatre cent mille livres de pot-de-vin données à
Mazarin[92], par ce revenant qui n'avait,
de ses réelles mais anciennes aptitudes, conservé qu'une certaine confiance
en lui. Que faire d'ailleurs quand Paris était en insurrection et le
surintendant contraint à errer en province ? On vivait au jour le jour,
d'expédients de toutes sortes. En 1652, lors de la rentrée du Roi dans sa
capitale, le vieux ministre de Louis XIII promit de tout remettre sur un
meilleur pied. Suivant la devise en forme de jeu de mots qu'il donna pour les
jetons du 1er janvier 1653, La Vieuville allait rajeunir la vieille ville.
Cinq jours après, il mourait, laissant, comme il l'avait trouvé, le Trésor
vide et les impôts consommés pour deux ou trois ans d'avance. C'est dans ces circonstances, après tant d'avertissements redoutables dans le passé, tant de présages sinistres pour l'avenir, que Foucquet assumait le fardeau de la surintendance, tant il est vrai que le vieux vaisseau de l'État, si battu des vents, si désemparé qu'il soit, n'a jamais manqué de pilotes parfois dévoués, souvent ambitieux et téméraires. |
[1]
Le meilleur traité sur cette matière est, à notre connaissance, celui que M. L.
Delisle a publié sous le titre Des revenus publics en Normandie, p. 66,
imprimé aussi dans la Bibl. de l'École des chertés, 2e série, t. V, p. 173.
[2]
V. une ordonnance du roi Jean, 30 mars 1350. Recueil des ordonnances, t.
II, p. 393. C'est le peuple qui était censé octroyer l'aide.
[3]
DELISLE, Des
revenus publics, p. 144. La moitié, gardée par le receveur, s'appelait la
souche ou le pied. C'est l'origine du livre à souche. Il n'y a pas vingt-cinq
ans que les boulangers en Normandie employaient encore ce mode de comptabilité.
[4]
Crue, accroissement, augmentation.
[5]
Le vray estat de la France, p. 215. Paris, 1854.
[6]
Bail général des aydes et domaines..., en date de 1887, édit. de veuve
Langrain et Prault. Paris, 1719, p. 5 à 19.
[7]
On lit encore dans le Vray estat de la France pour 1657, p. 486 : Certains subsides qu'on appelle tailles, qui d'abord ne se
levoient que pour quelque nécessité extraordinaire et urgente et du
consentement des trois Estats, qui s'assembloient pour ce sujet.
[8]
FOUCQUET, Défenses,
t. V, p. 100. Cf. L. DELISLE,
Des revenus publics en Normandie.
[9]
Le vray estat de la France, p. 215. Paris, 1654.
[10]
V. Déclaration du Roy, du 16 avril 1643, portant règlement sur le fait
des tailles, art. I à V. Nouveau Code des tailles, t. I, p. 370.
[11]
Déclaration du Roy, du 16 avril 1643, art. VI.
[12]
Déclaration du Roy, du 16 avril 1643, art. IX.
[13]
C'est le terme de la Déclaration, art. XIII.
[14]
Art. XIV de la Déclaration.
[15]
Le Vray estat..., p. 306.
[16]
Le trésorier ordinaire payait les anciens régiments, l'extraordinaire les
nouveaux.
[17]
Le Vray estat..., p. 309.
[18]
MONTGLAT, Mémoires,
p. 8.
[19]
TALLEMANT, Historiettes,
t. II, p. 382.
[20]
FORBONNAIS, Recherches
et considérations sur les finances de France, t. I, p. 294.
[21]
Henri de Schomberg, né en juillet 1575, maréchal de camp, général des troupes
allemandes au service de la France, ambassadeur en Allemagne (1617),
surintendant (1619), maréchal de France (1624), mort 17 septembre 1632.
[22]
TALLEMANT, Historiettes,
t. II, p. 282.
[23]
LECLERC, Vie
de Richelieu, t. I, p. 94.
[24]
LA CHESNAYE DES BOIS, Dictionnaire
généalogique, art. VIEUVILLE.
P. ANSELME, t.
II, p. 1488.
[25]
Mémoires du duc de Rohan, liv. 11.
[26]
Le mot à l'oreille de M. de La Vieuville, Recueil E, p. 195. Cf. VIALART, Histoire du
ministère du cardinal de Richelieu, t. I, p. 58.
[27]
TALLEMANT, Historiettes,
t. II, p. 282.
[28]
Mercure françois, 1624, p. 653, 668.
[29]
Mercure françois, 1624., p. 671. Levassor n'hésite pas à déclarer que
Richelieu faisait courir lui-même ces écrits. Histoire de Louis XIII, t. V, p.
39. Le Mercure a aussi enregistré un écrit intitulé : La France ou la
convalescence du Roy, que l'éditeur dit être sorti d'une bonne plume et
d'une âme toute royale. Mercure, 1624, p. 694. L'âme ne peut être autre
que celle de Marie de Médicis. La plume était au moins guidée par Richelieu.
Cf. SOREL, Bibliothèque
françoise, p. 360.
[30]
Mercure, 1624, p. 671. Cf. Mémoires d'un favori du duc d'Orléans,
publiés dans les Mémoires particuliers pour servir à l'histoire de France,
t. IV, p. 18. Paris, 1756. TALLEMANT, Historiettes, t. II, p. 81.
[31]
Mercure, 1624, p. 672.
[32]
Lettre de cachet envoyée par le Roi à MM. de la Cour de Parlement, le 13
août 1824. Recueil F, p. 51.
[33]
Apologie de M. de La Vieuville adressée à M. le Chancelier, 1825.
Recueil F, p. 54.
[34]
Richelieu, Mémoires, t. I, p. 308, prétend qu'on prouva contre l'accusé
des faits de trafic sur des rescriptions ; mais il reconnaît que la Chambre
arrêta la procédure ; le Cardinal prétendait d'ailleurs qu'il suffisait de
faire peur aux financiers et d'en tirer de l'argent.
[35]
Nous avons vu la même chose en nos jours quand
Foucquet fut arrêté. LEVASSOR, Histoire de Louis XIII, t. V, p. 39.
[36]
VIALART Histoire
du ministère du cardinal de Richelieu, t. I, p. 58 et 269. Cf. Mémoires
du Cardinal, t. I, p.308. Ces idées se retrouvent dans le Testament.
Ce dernier document et le premier sont tirés des Mémoires.
[37]
Histoire du ministère du cardinal de Richelieu, t. I, p. 58 et suiv. P.
ANSELME, Histoire
généalogique, t. I, p. 449 (1re édit.).
[38]
Lettres du cardinal de Richelieu, t. III, p. 207, 208, 209. État des
affaires du Roy au 1er juin 1626. Sous cette cote inexacte, je trouve un compte
rendu de d'Effiat, qu'il faut dater vraisemblablement de 1629, et qui a servi
de cadre pour son rapport à l'Assemblée des notables. V. FORBONNAIS, Recherches,
t. I, p. 389. L'auteur de l'État dit : Depuis deux
ans que je suis en charge, et parle des deux surintendans, ses prédécesseurs.
Cela suffit pour faire rendre la pièce à d'Effiat. Voyez aussi RICHELIEU, Mémoires,
t. III, p. 499.
[39]
Forbonnais a entrevu ce fait intéressant. Recherches, t. II, p. 7. Le Mercure
françois, 1628, p. 590, en donne tout l'honneur à d'Effiat : Il a trouvé sur son crédit six millions de livres.
[40]
Richelieu lui fit donner un témoignage public de satisfaction dans le Mercure,
pour l'an 1628, p. 589.
[41]
TALLEUANT, Historiettes,
t. II, p. 19.
[42]
Mercure françois, 1632, p. 524.
[43]
Tallemant, avec son habitude de railleur, a travesti les vers de Madelenet. A
l'en croire, le poète aurait comparé Bullion à un baril plein. Gab.
Madeleneti Carmina, p. 21. Parisiis, 1725. Notez que l'éloge n'était pas
banal, ni fait pour déplaire. Richelieu aimait les surintendants riches.
[44]
TALLEMANT, Historiettes,
t. II, p. 24. L'auteur compare Bullion et Foucquet, le magnifique, le prodigue.
[45]
TALLEMANT, Historiettes,
t. II, p. 21.
[46]
Citons encore une stance de l'ode de Madelenet, Carmina, p. 22.
[47]
Nouveau Code des tailles, t. I, p. 277.
[48]
FORBONNAIS, Recherches,
t. II, p. 33.
[49]
MADELENETI Carmina,
p. 23.
[50]
TALLEMANT, Historiettes,
t. II, p. 24.
[51]
BRICE, Description
de Paris, t. I, p. 350.
[52]
MADELENETI Carmina,
p. 27.
[53]
FORBONNAIS, Recherches
sur les finances, t. II, p. 55.
[54]
FORBONNAIS, Recherches,
t. II, p. 69, 71.
[55]
LA CHASTRE, Mémoires,
p. 48.
[56]
Il faut encore citer Madelenet, le poète attitré des surintendants : Carmina,
p. 47.
[57]
MADELENETI Carmina,
p. 47.
[58]
V. MADELENETI Carmina,
p. 45 et 47. Il ne faut pas croire que Madelenet décerne un éloge banal.
Certes, il ne pouvait ni ne voulait se livrer à aucune critique ; mais il tient
à ce que ses éloges soient donnés à propos.
[59]
ORMESSON, Mémoires,
t. I, p. 278, 280 ; MONTGLAT,
Mémoires, p. 195.
[60]
TALLEMANT, Historiettes,
t. III, p. 165.
[61]
Mémoires de M. de Montmorency, p. 226. Paris, 1655. Émeri y est appelé
Hemery.
[62]
MONTGLAT, Mémoires,
p. 195 ; O. TALON,
Mémoires, p. 317.
[63]
JAL, Dictionnaire
de biographie, art. Particelli ; Scarron.
[64]
Messire de Particelli, seigneur d'Émeri, contrôleur général des finances, par
Moncornet. Au fond, on voit une maison des champs, avec jet d'eau dans les
jardins et une treille.
[65]
Madelenet, Carmina, p. 65, vante les statues ornant le château, les
vergers, les vignes, les eaux jaillissantes.
[66]
TALLEMANT, Historiettes,
t. III, p. 172 ; MOLÉ,
Mémoires, t. III, p. 342.
[67]
TALLEMANT, Historiettes,
t. V, p. 100, édit. Monmerqué, 1840 ; COLBERT, Mémoires, p. 608, édit. Michaud.
On applique d'ordinaire à Foucquet le vers de Boileau :
Jamais surintendant ne trouva de cruelle (Satire
IX). Toutefois, la famille du poète avait connu intimement la famille
Particelli. Peut-être Boileau a-t-il visé d'Émeri ?
[68]
Le Partisan tenté du désespoir par le démon de la maltaute, etc. A
Rouen, par Berthelin, 1649, p. 8.
[69]
ORMESSON, Journal,
t. I, p. 559.
[70]
ORMESSON, Journal,
t. I, p. 557.
[71]
AUBERY, Histoire
de Mazarin, t. II, p. 311 ; GOULAS, Mémoires, t. II, p. 313.
[72]
Histoire du temps, p. 163.
[73]
Histoire du temps, p. 199.
[74]
O. TALON, Mémoires,
p. 247, au 8 juillet ; les Mémoires indiquent le renvoi de d'Émeri au 10
juillet. L'erreur est évidente.
[75]
DUBUISSON-AUBENAY, t. I, p. 34. L'Histoire
du temps, p. 157. Ce document, très hostile à d'Émeri, semble placer sa
révocation avant le 30 juin. C'est une erreur contre laquelle il importe de
précautionner les lecteurs. Si l'on n'établit pas une chronologie rigoureuse
des événements de cette époque, il est impossible de les comprendre, à plus
forte raison de les faire comprendre aux autres.
[76]
DUBUISSON-AUBENAY, t. I, p. 35.
[77]
Lettres de Mazarin, t. III, p. 159.
[78]
On avait déjà ajourné le remboursement des dettes, notamment à la fameuse
occasion du siège d'Amiens, mais jamais avec cette consolidation et cette
réduction consolidée.
[79]
Histoire du temps, p. 220. DUBUISSON-AUBENAY,
Journal des guerres civiles, t. I, p. 41.
[80]
FOUCQUET, Défenses.
[81]
DUBUISSON-AUBENAY, Journal,
t. I, p. 39. L'homme d'affaires était un sieur Doublet, de Troyes. Le
malheureux devait 3.600.000 livres empruntées à ses parents et amis pour prêts qu'il a faits au Roy. Ibid., p.
252. Il faillit être emprisonné pour dettes.
[82]
DUBUISSON-AUBENAY, Journal,
t. I, p. 42.
[83]
O. TALON, Mémoires,
p. 255. M. Foucquet, maitre des requêtes, lequel avoit
accès chez M. le cardinal Mazarin.
[84]
DUBUISSON-AUBENAY, Journal,
Journal, t. I, p. 43.
[85]
MOLÉ, Mémoires
publiés par la Société de l'histoire de France, t. III, p. 36.
[86]
O. TALON, Mémoires,
p. 369.
[87]
Il fit agréer en principe le rétablissement des intendants. O. TALON, Mémoires,
p. 371.
[88]
MADELENETI Carmina,
p. 64.
[89]
MADELENETI Carmina,
p. 64. Cf. DUBUISSON-AUBENAY, Journal,
t. I, p. 253, 254.
[90]
TALLEMANT, Historiettes,
t. V, p. 81, édit. Monmerqué.
[91]
DUBUISSON-AUBENAY,
Journal, t. II, p. 59, 69, 114.
[92]
BORDEAUX, Mémoires,
t. III, p. 33. Ces Mémoires ne peuvent pas être considérés comme
complètement apocryphes.