VERCINGÉTORIX

 

CHAPITRE XX. — SOUMISSION DE LA GAULE ET MORT DE VERCINGÉTORIX.

 

 

I. César se réconcilie avec les Éduens et les Arvernes. — II. Organisation de la résistance par les chefs patriotes. — III. Campagnes de 51. Destinées des différents chefs. — IV. Départ de César et vaines espérances de soulèvement. — V. Rôle des Gaulois dans l’armée de César et dans les guerres civiles. — VI. Triomphe de César et exécution de Vercingétorix.

 

I

Vercingétorix aux mains de César, les destinées de la Gaule s’accomplirent rapidement. Il ne restait au proconsul qu’à ramener à lui ses anciens amis, et à punir les obstinés.

Il bénéficia (l’abord de nombreuses défections. Si la Gaule ne connut pas alors la trahison brutale, celle qui livre à l’ennemi le corps du chef, elle vit celle qui désavoue l’allié vaincu, qui renie ses sentiments et ses espérances.

Après Vercingétorix, les autres chefs assiégés se donnèrent à leur tour, les armes furent apportées, et César opéra la mainmise du vainqueur sur tous les hommes et sur toutes les choses qui se trouvaient dans Alésia.

Il avait accepté, sans le dire peut-être expressément, que Vercingétorix servit de victime expiatoire aux deux principales nations. Car il se hâta de faire un triage parmi ses prisonniers : il réserva le sort des Arvernes et des Éduens, hommes et chefs, au nombre d’environ 20.000. Le reste des vaincus furent distribués comme esclaves entre les soldats de toute l’armée : le moindre combattant put avoir son captif.

Les Éduens et les Arvernes étaient prêts à tout pour recouvrer la liberté et quelque chose de plus. Par leur intermédiaire, César n’eut pas de peine à s’entendre avec leurs compatriotes de Gergovie et de Bibracte. II se rendit chez les Éduens, il y reçut l’hommage public de leur peuple, il y accueillit les députés arvernes, qui se mirent à sa merci : j’imagine qu’Épathnact, le très grand ami du peuple romain, était parmi ces derniers. Aux uns et aux autres il restitua leurs concitoyens pris dans les combats et lors de la reddition d’Alésia, renonçant à exercer sur eux et sur leur nation les droits de la victoire. Lui-même s’établit au Mont Beuvray, quartier général, pendant l’été, de la Gaule soulevée, et pendant l’hiver, de César vainqueur. A Rome, on remercia les dieux par vingt jours d’actions de grâces.

Les deux nations qui avaient dirigé la lutte se retrouvèrent dans la même situation politique qu’il y avait un an. Les Éduens redevinrent les alliés du peuple romain, et recouvrèrent leur clientèle et leur autorité dans la Gaule : César les inscrira à nouveau parmi les cités fédérées de l’Empire, à côté des Rèmes et des Lingons. Il déclarera les Arvernes une cité libre, il ne toucha pas à son épée, consacrée aux dieux gaulois dans un de leurs temples, et les anciens sujets ou rivaux de Vercingétorix purent se croire deux fois autonomes, parce qu’ils ne devaient ni l’obéissance à un roi ni le tribut au peuple romain.

Mais cette alliance entre Éduens et Romains, cette liberté des Arvernes étaient, l’année précédente, sinon réelles, du moins encore apparentes. Désormais, elles ne seront même pas précaires, et ces mots ne valent plus que comme les formules les plus élégantes de l’incorporation à l’empire.

 

II

A l’honneur de la Gaule, ce double exemple ne fut pas suivi par la majorité des tribus. Les survivants des amis de Vercingétorix étaient décidés à tenir encore. De nouveaux pourparlers s’engagèrent entre les chefs et entre les cités. — On répétait de plus en plus que César arriverait dans quelques mois au terme de son commandement ; et, si les vaincus avouaient que toute lutte d’ensemble ne pouvait finir que par l’écrasement de la Gaule, ils espéraient encore venir à bout de leur adversaire en le forçant à disséminer ses légions : qu’on lève partout des armées, qu’on suscite la guerre sur tous les points, qu’on allume des incendies de toutes parts, et le proconsul, affamé et éperdu dans un pays saccagé, n’aura ni le temps, ni les troupes, ni les vivres nécessaires pour réduire à l’impuissance un ennemi insaisissable. Qu’il ne fût pas dit que la Gaule eût manqué de constance avant d’avoir manqué d’hommes. — C’était le meilleur des plans de Vercingétorix que reprenaient ses anciens auxiliaires : le Cadurque Lucter, le Sénon Drappès, l’Aude. Dumuac, Gutuatr le Carnute, Sur l’Éduen, Comm l’Atrébate, sans parler du chef des Bellovaques Correus et de l’Eburon Ambiorix, toujours vivant.

Quatre groupes de combattants se dessinèrent dans le cours de l’hiver.

Au Nord, dans le bassin de Paris, les Bellovaques, sur l’ordre de Correus, se levèrent en masse, et furent rejoints par les Ambiens, les Atrébates, les Calètes, les Véliocasses et les Aulerques : Belges et Celtes fraternisèrent. Comm apporta à cette armée l’appui de son expérience, et se chargea notamment de lui assurer quelques auxiliaires germains pour tenir tète à ceux de César. — Au Nord-Est, les Trévires, chez qui Sur s’était réfugié, firent leur paix avec les Germains, et acceptèrent leur concours : peu importait aux Transrhénans de combattre tour à tour les Romains et les Gaulois. De ce côté, Ambiorix avait encore reparu. — Au Centre, Dumnac assiégeait Poitiers, toujours fidèle aux Romains. Il avait une assez nombreuse armée, et se sentait soutenu par les Carnutes, les Bituriges et les peuples de l’Armorique. — Au Sud enfin, Lucter et Drappès organisaient la résistance dans les régions du Limousin et du Quercy, ce qui n’était pas sans danger pour la province romaine elle-même.

Les huit chefs que nous venons de citer, donnèrent, par leur persévérance, un démenti au jugement que César avait porté sur les Gaulois, et que d’ailleurs Alésia avait confirmé : Toujours prêt à entrer gaiement en campagne, ce peuple faiblit dès qu’il s’agit de résister au malheur. Ceux-là du moins, quoique appartenant aux nations les plus diverses, surent imiter Vercingétorix, et demeurer fidèles à leur cause jusqu’à la prison ou à la mort.

 

III

Mais leur plan échoua. D’abord parce que les cités, comme les Bituriges avant le siège d’Avaricum, ne firent pas les sacrifices nécessaires. Ensuite parce que César ne donna pas aux chefs le temps de se concerter : débarrassé de Vercingétorix, il redevint ce = prodige de célérité » qu’admirait Cicéron.

Il rentra en campagne trois mois après la chute d’Alésia, le 25 décembre 52. Deux incursions rapides chez les Bituriges et les Carnutes décidèrent ceux-là à se soumettre, ceux-ci à se disperser. Gutuatr ne fut pas pris, mais César laissa deux légions à Génabum, et les conjurés du Centre et du Sud, Dumnac, Drappès et Lucter, furent séparés de Comm et de la ligue bellovaque.

César se tourna alors contre ces derniers. Comm, Correus et leurs alliés firent tout ce qui était humainement possible pour n’être point vaincus. Ils suivirent les levons de Vercingétorix, ils rompirent avec toutes les habitudes de la témérité barbare, choisissant pour leurs camps des positions imprenables, essayant d’affamer leur adversaire, fuyant les grandes batailles, évitant d’être bloqués, recourant même à d’assez bons stratagèmes. Mais à ta fin le proconsul put les contraindre à combattre, c’est-à-dire à se faire vaincre, et Correus, ne voulant pas se livrer, s’arrangea de manière à se faire tuer. Comm échappa, ainsi que toujours, et il recula vers le Nord avec ses cavaliers, essayant peut-être de donner la main aux combattants de la Meuse et de la Moselle.

Ceux-ci curent affaire tour à tour à César et à Labienus. Le premier brûla et pilla une fois de plus le pays éburon : mais Ambiorix fut introuvable. Labienus, plus heureux que son proconsul, battit sérieusement les Trévires et les Germains, et s’empara des chefs, y compris Sur l’Éduen. Les rangs des patriotes s’éclaircissaient rapidement.

Les combats furent aussi nombreux et aussi graves au centre et au sud de la Gaule, où commandaient deux légats de César. — Celui de la Loire, le méthodique C. Fabius, procéda avec ordre. Il eut raison des troupes de Dumnac, dans une bataille, montra les légions romaines une fois encore aux Carnutes, et reçut la soumission de l’Armorique. Mais lui aussi ne put saisir son principal adversaire : Dumnac s’enfuit très loin, et disparut au Nord-Ouest vers la fin des terres gauloises.

C. Caninius Rébilus, dans la vallée de la Dordogne, eut en face de lui les deux plus aventureux compagnons d’armes de Vercingétorix, Drappès et Lucter. Ils avaient réuni à eux les bandes fugitives, conçu l’audacieux projet de prendre l’offensive dans la Narbonnaise même, et d’y faire cette guerre de pillages et de vengeances que Vercingétorix avait tenté deux fois d’y soulever. Rébilus parvint à les entraver ; ils gagnèrent alors Uxellodunum sur la Dordogne, avec la même dextérité que leur ancien chef s’était réfugié dans Gergovie.

Uxellodunum était imprenable de vive force. Pour n’avoir point à redouter un blocus, les deux chefs se hâtèrent d’y accumuler les vivres. Lucter pensait sans cesse au sort d’Alésia, qu’il avait failli partager : elle avait été vaincue autant par la faim que par les armes. Et, avec une continuité de confiance qui le distingue des autres Gaulois, il espérait, s’il échappait à la famine, échapper aussi aux Romains, et peut-être même, par la force de son exemple, décider la Gaule à résister jusqu’au départ de César. Par malheur, il se laissa vaincre par le légat et rejeter hors de la place. Drappès à son tour fut battu et pris. Mais les défenseurs d’Uxellodunum ne se découragèrent pas, aussi tenaces que leurs chefs. Alors César arriva.

La marche de César, depuis la Meuse jusqu’à la Dordogne, marqua la Gaule d’une traînée sanglante. Chez les Carnutes, visités une troisième fois de l’année par les armées romaines, il put enfin, après une étonnante chasse à l’homme, mettre la main sur Gutuatr. Lui et ses légions avaient à tout prix besoin, pour être en règle avec les dieux de Rome, du corps de l’homme qui avait donné le signal de la lutte à toute la Gaule et à Vercingétorix lui-même. L’exécution dit chef carnute fut faite en vue de toute l’armée, et il semble que César ait permis à chaque soldat de prendre un peu du sang de celui qui avait versé le premier sang romain. Il fut battu de verges par tous ceux qui se présentèrent, et il n’était guère plus qu’un cadavre quand on se décida à le frapper de la hache.

A Uxellodunum, César, ne pouvant recourir à la force ou à la famine, essaya d’un moyen plus sûr encore, la soif. I1 bloqua par une terrasse l’accès de la principale source, il la capta ensuite par des conduits souterrains. Les défenseurs de la ville, se sentant, comme Vercingétorix dans Alésia, abandonnés par leurs dieux, se rendirent à César. Il leur lit couper les mains, et les renvoya, vivants et libres, et montrant par toute la Gaule leurs bras mutilés, signe indélébile de la vengeance du peuple romain. Drappès, qui était prisonnier, se laissa mourir de faim ; Lucter fut pris par l’Arverne Épalhnact, qui le livra à César.

Comm, Dumnac et Ambiorix restaient encore. Connu battit les routes jusqu’à l’hiver, harcelant les convois des Romains, espérant toujours amener quelque révolte et voir poindre quelque allié. Mais, quand il fut presque seul, traqué de toutes parts, il parut se lasser et se rendre, assez habile d’ailleurs pour obtenir la vie et la liberté. Il finit par regagner davantage : car de tous les chefs gaulois que connut César, ce fut celui qui avait l’esprit le plus fertile en ressources. Il put s’évader de la surveillance où le tenaient les Romains ; il s’embarqua pour la Bretagne ; il échappa, par une dernière ruse, à la poursuite des vaisseaux ennemis que commandait, disait-on, César lui-même. Il trouva dans l’île quelques amis, y fut rejoint par des Atrébates, et réussit à fonder un peuple sur les bords de la Tamise, que son fils gouverna plus tard comme roi. Des survivants de la conjuration de 52, Comm fut le seul qui parvint à demeurer à la fois chef de tribu et libre de l’étranger. Dumnac et Ambiorix ne gardèrent l’indépendance qu’à la condition de se cacher, aux deux extrémités opposées de la Celtique, celui-là peut-être en Armorique, celui-ci en Flandre. La Gaule put encore offrir, dans ses plus lointains marécages, un inviolable asile aux derniers émules de Vercingétorix.

 

IV

César resta au delà des Alpes un an encore. Mais il négligea ces derniers repaires de l’indépendance pour se consacrer tout entier à organiser et à pacifier sa conquête. Il avait épuisé la Gaule, dans ces huit années de guerre, par des massacres d’hommes et des ramas de captifs ; il l’avait terrifiée, dans les dernières campagnes, par les exécutions d’Avaricum et d’Uxellodunum ; il la contenait, depuis la chute d’Alésia, par la soumission des Arvernes et des Éduens : il passa l’année (50) à se la concilier par sa politique. Aussi, quand, à l’approche de l’hiver, il la quitta pour ne plus revenir, personne ne bougea.

Derrière César, les légions s’acheminèrent à leur tour vers le Midi, et l’armée qui avait dompté la Gaule l’évacua pour chercher d’autres champs de bataille.

A ce moment-là, quelques Gaulois paraissent avoir souhaité une dernière aventure. Les bardes reprirent leurs lyres et chantèrent les gloires d’autrefois. Les druides immolèrent à leurs dieux de nouvelles victimes humaines. Prêtres et poètes, qui fournissaient à la Gaule indépendante ses moissons de poèmes et de sacrifices, perdaient avec la domination latine leur influence et leur gagne-pain : ils espéraient que les guerres civiles de Rome, en rappelant les légions, laisseraient place à la revanche celtique.

Mais ceux qui conseillèrent de telles illusions, étaient ceux qui n’avaient point à se battre, et leurs dieux ne suscitèrent aucun chef pour reprendre l’œuvre de Vercingétorix.

 

V

Ce renoncement à l’indépendance s’expliquait aussi par d’autres motifs que la lassitude, la crainte, ou le respect de César.

Tous ceux qui avaient survécu des Gaulois capables de monter à cheval et de paraître en rang de bataille, le proconsul des Gaules les appela à lui et leur montra des combats à livrer dans le monde entier. Ces hommes partaient toujours allègrement pour la guerre, et n’étaient timides que dans la détresse. Ils trouveraient, près de leur proconsul devenu dictateur, la certitude du butin et la joie de la lutte sans la crainte du lendemain.

Avant même que la guerre civile éclatât, on disait à Rome (décembre 50), que César aurait sous ses ordres autant de cavaliers qu’il voudrait : la Gaule les lui donnerait sans compter. Il en fut ainsi. La première année (49), il fit venir en Espagne trois mille Gaulois, tous membres de la haute noblesse ; et pour être sûr qu’ils répondissent à son appel, il les avait désignés un par un, tels qu’il les avait connus comme alliés ou adversaires’ si on se demande où pouvaient être alors Viridomar et Éporédorix, qu’on ne les cherche pas ailleurs que dans le camp de César, préfets des cavaliers éduens auxiliaires du peuple romain. Il n’a pas besoin de fantassins gaulois, inhabiles à combattre chez eux et hors de chez eux ; mais il envoie chercher les coureurs ligures, les piétons aquitains, et ces archers rutènes dont Vercingétorix lui a montré la valeur. Toutes ces troupes franchirent les Pyrénées, avec un long convoi de bagages et de chars, semblables à une nouvelle migration de Celtes.

César continua à drainer vers le Sud ce que les nouvelles générations de Gaulois fournissaient de meilleurs comme combattants. Il reçut des hommes sans relâche, et jusqu’à dix mille cavaliers. Il les promena à sa suite en Espagne, en Italie, en Grèce, en Égypte, en Afrique enfin. S’il y en eut quelques-uns qui répugnèrent à le servir, ils eurent la ressource de le combattre sous les ordres de Pompée ou de Labienus, devenu l’ennemi de son ancien proconsul. Comme on les faisait marcher contre des chefs romains, leur amour-propre celtique était satisfait : en un sens, ils conquéraient le Capitole, et de plus, le Phare d’Alexandrie et les ruines de Carthage. Les poètes de chez eux ne célèbreraient jamais de plus longues équipées que celles où César les conviait ; et les Gaulois eurent rarement un plus bel exploit à raconter que celui de la plaine d’Hadrumète, où moins de trente cavaliers de leur race chargèrent et dispersèrent deux mille chevaux ennemis.

Ces chevauchées durèrent trois ans et prirent fin en Afrique (printemps de 46), quand on eut achevé le circuit de la Mer Romaine. Il se passa, dans les dernières rencontres, des faits mémorables. Les Gaulois de Labienus et les Gaulois de César se trouvèrent en présence : durant les suspensions d’armes, ils se rapprochaient, et s’entretenaient en amis de leurs pensées communes ; aux heures de combat, ils s’entre-tuaient dans une lutte fratricide qui rappelait les temps des Arvernes et des Éduens. Un jour, ils firent les uns des autres un formidable massacre, et César, survenu après la bataille, aperçut toute la plaine jonchée de cadavres gaulois, corps merveilleux de beauté et d’une stature grandiose. De ces hommes, les uns l’avaient suivi è son départ de la Gaule, d’autres l’avaient rejoint è sa demande : et ils étaient morts pour défendre César ou Labienus, comme leurs frères d’Alésia avaient péri pour les combattre.

 

VI

Vercingétorix vivait encore. Si quelque bruit du dehors parvenait aux oreilles du prisonnier, il put apprendre toutes ces choses : — que les Gaulois, ses amis ou ses ennemis d’autrefois, ne se battaient plus que pour le compte du peuple romain ; que leurs nations semblaient perdre jusqu’au souvenir des campagnes d’Avaricum, de Gergovie et d’Alésia ; que ces batailles d’Afrique, où tant de Celtes périrent du fait de César, étaient comme le dernier épisode de la destruction de la patrie gauloise.

Cette même année, le dictateur, vainqueur de l’Afrique, revint à Rome, et eut assez de loisirs pour triompher solennellement de tous les ennemis qu’il avait vaincus, à commencer par les Gaulois.

C’est à la glorification de leur défaite que fut consacrée la première journée de son triomphe (juin 46).

Dans le cortège, des écriteaux et des tableaux rappelaient au peuple ce qu’avait été la guerre des Gaules : trente batailles rangées, livrées en présence de César, 800 places prises de force, 300 tribus soumises, trois millions d’hommes combattus, un million de tués, un million de pris. Des hommes portaient les dépouilles précieuses, les armes des vaincus, l’or des temples, les bijoux des chefs. Et, derrière les victimes destinées aux dieux, la Gaule apparut elle-même, en la personne de Vercingétorix enchaîné.

Le dernier acte de son sacrifice s’accomplit le soir même. Il avait vu le triomphe de son vainqueur, il ne lui restait plus qu’à mourir. Au moment où le cortège, sortant du Forum, gravit les pentes du Capitole à la lueur des lampadaires que portaient quarante éléphants, le roi des Arvernes fut conduit dans la prison creusée au pied de la montagne sacrée ; et pendant que César amenait ses autres victimes à Jupiter, Vercingétorix fut mis à mort[1].

 

 

 



[1] Voyez la note VII à la fin du volume.