I. — DÉSORDRES SOUS COMMODE. Nul empereur ne fut plus détesté que Commode, le fils de Marc-Aurèle[1]. Quand il sera mort, le sénat accumulera sur son nom des litanies d’injures, parricide, bourreau, faussaire, voleur, assassin, ennemi des dieux, traître à la patrie[2] : mais il oubliera le vice principal, le plus grave qu’on puisse reprocher à un chef d’Empire, la négligence[3]. Pendant les treize années de ce règne (180-192), l’autorité supérieure cessa de savoir gouverner, et les forces de destruction, que Marc-Aurèle avait réussi à contenir, travaillèrent de nouveau à disloquer le monde romain. Il n’y eut plus de règle en matière religieuse. Commode adora Mithra, Isis, la Hère, qui l’on voulut[4]. L’Empire, à l’exemple de l’âme impériale, devint un pandémonium où les dieux et les rites se mêlèrent dans une confusion extravagante[5]. Toute l’administration fut livrée à un désordre semblable. Le prince vendit les provinces à ses créatures[6], ce qui était un mal nouveau dans l’Empire, où les plus fâcheux des souverains, comme Néron et Caligula, se gardèrent de trop mal choisir les gouverneurs : à défaut de valeur morale, ils ne manquaient pas de prudence ou de bon sens. Commode, lui, resta une brute vulgaire. On s’habitua peu à peu, dans les Gaules, à vivre sans obéir. Des déserteurs quittaient l’armée, se réunissaient en bandes, livraient le pays au pillage, et l’on disait que leur nombre était incalculable[7]. Ce qui demeura de soldats à la frontière vaguaient hors des camps, et leurs officiers donnaient l’exemple de la débauche et de l’oisiveté[8]. Les historiens ont beau répéter que la province ne souffrait pas des vices impériaux : un maître, surtout mauvais, fait vite école. Les choses se gâtèrent jusqu’à la sédition. Un simple soldat, Maternus, devint en Gaule une sorte de roi des brigands, courant les campagnes, tenant tête aux magistrats, mettant les villes à rançon[9]. Aux armées, les soldats demandaient un autre empereur, moins par dégoût de l’Auguste actuel, que pour de nouvelles distributions d’or. Mais le mal s’arrêta là. Ce fut le pire des désordres, ce ne fut pas la ruine. D’abord, les provinciaux, Gaulois et autres, ne se mêlèrent pas à la soldatesque : le glorieux nom des Antonins, que portait Commode, ne pouvait de sitôt perdre son prestige parmi ceux qui vivaient dans l’Empire[10]. Puis, les Barbares, tremblant encore des défaites que leur avait infligées Marc-Aurèle, ne réussirent pas à donner la main aux brigands de l’intérieur[11]. Enfin, le grand empereur avait su former des généraux et des fonctionnaires dont son fils, bon gré mal gré, dut utiliser les services : Septime Sévère à Lyon[12], Didius Julianus[13] et Clodius Albinus[14] à Cologne, Pescennius Niger[15] et Pertinax[16] sur d’autres frontières. Et ils eurent, à la fin, raison des fauteurs de troubles, grâce à une énergie toute militaire, qui rappelait les meilleurs temps de la discipline romaine[17]. Marc-Aurèle, par delà le tombeau, sauvait l’Empire une dernière fois. II. — SAINT IRÉNÉE[18]. Seul des ennemis de Marc-Aurèle, le Christianisme prit sa revanche sur l’empereur disparu : les années qui suivirent la persécution de Lyon, furent les plus belles qu’il eût connues dans les Gaules. Il les dut en partie au fils même de son persécuteur : Commode, ami de tous les dieux, laissait les Chrétiens prier et prêcher à leur guise, et ils purent sans danger reprendre leurs campagnes de propagande[19]. La gloire des récents martyrs excitait les missionnaires, et leur sang, disaient les fidèles, était une semence de nouvelles églises[20]. Enfin, à la tête de l’assemblée de Lyon se trouvait comme évêque, non plus un vieillard insignifiant et paisible, mais un homme dans la force de l’âge, un maître d’espèce supérieure, Irénée[21], intelligent, énergique, actif, passionné, toujours prêt à écrire et à combattre, ayant le sens des réalités et la foi en l’avenir. Pour la première fois dans l’histoire de la Gaule chrétienne apparaît un prêtre qui soit vraiment conducteur d’hommes et chef d’église. Et cela nous annonce l’approche de temps nouveaux. Irénée fut d’abord un polémiste. Il travailla à débarrasser la pensée chrétienne des doctrines subtiles et vaines dont l’affublaient déjà les gnostiques de l’Orient. Contre ces théologiens raffinés et puérils, qui troublaient les âmes des humbles, qui éloignaient de l’Évangile les hommes de raison[22], il écrivit livres sur livres, il proclama dans tous la grandiose simplicité du dogme chrétien, ramené à Dieu le Père qui ordonne, à Dieu le Fils qui exécute, à l’Esprit Saint qui vivifie[23]. Il fut, à l’endroit de ces dévoyés, ironique, mordant, pressant, tenace et décisif[24]. Avec lui, la littérature chrétienne perdit un peu de cette innocente sérénité qu’avaient gardée les apologistes contemporains d’Antonin et de Marc-Aurèle ; elle cessa ses plaidoyers confiants et tranquilles pour multiplier les écrits de combat. Elle passa de la défensive à l’attaque, et se prépara à de plus grandes entreprises. Comment un tel prêtre, à l’âme de batailleur, n’eût-il pas provoqué de nouvelles missions dans les Gaules ? Irénée à Lyon, cet homme de travail et de lutte au centre et au plus fort de la vie gauloise, c’est le branle donné à l’assaut de l’Occident par les champions de l’Évangile[25]. De fait, au temps d’Irénée, voici que de nouvelles communautés chrétiennes s’aperçoivent en nombre autour de Lyon[26], à Autun[27], à Dijon[28], à Langres[29], à Valence[30], à Besançon[31] et, plus loin même, sur les bords du Rhin[32] : on eût dit que les successeurs des apôtres avaient déjà l’ambition d’arriver aux grandes armées de la frontière[33]. On hésite parfois à croire à l’existence de ces vieilles églises[34] : car elle n’est attestée que par des Vies de saints, de beaucoup postérieures à Irénée, et encombrées de miracles et d’invraisemblances sans nombre[35]. — Mais les Chrétiens, qui tenaient à avoir leurs archives, à conserver et à vénérer la mémoire de leurs athlètes et de leurs héros, qui, plus que toute autre religion de ce temps (et ce fut leur supériorité sur elles), eurent l’amour des belles narrations, le culte de leur propre histoire, comment les Chrétiens auraient-ils laissé se perdre à jamais le souvenir de leurs ancêtres dans la foi ? Que, dans ce qu’on racontait d’eux, il se soit groupé beaucoup de légendes et de faux bruits autour de très peu de faits exacts, cela est certain et dans la nature des choses : la vie d’un apôtre ou d’un prophète est si intimement mêlée à la vie des humbles, des crédules et des ignorants, que le récit en est aussitôt surchargé de mille épisodes surnaturels. A chaque génération de narrateurs qui rédigent et de croyants qui écoutent, la vérité initiale est davantage étouffée par une végétation parasite de réminiscences, d’anachronismes et de contes populaires. Il n’y en a pas moins une vérité initiale : et c’est, pour la période qui nous occupe, la fondation de nouvelles églises autour de Lyon, filles de l’évêque Irénée. De ce qu’il eut un tempérament fait pour la lutte et la conquête, ne voyons pas en lui une sorte de prophète intolérant. Je le regarderais plutôt comme un chef habile, un excellent homme d’État dans la cité de Dieu. Il est douteux qu’il se soit livré, à l’endroit des cultes publics, à des actes d’inutile provocation. La lecture de ses ouvrages fait songer à un esprit avisé, qui s’interdit les excès de langage. Ce n’est pas un ennemi de la culture classique. Il cite Homère, Hésiode et Pindare[36]. Cà et là, on sent un effort littéraire, on devine qu’il ne veut pas être traité de Barbare par ses compatriotes, les rhéteurs et les philosophes de la Grèce[37]. Il y avait alors, dans le monde des églises, un vif désir de s’entendre avec la pensée classique[38]. Revêtir des belles formes helléniques les saintes vérités de la foi, emprunter à la philosophie quelques–unes de ses théories ou de ses métaphores sur la nature et la raison afin de compléter les maigres ressources de la dogmatique ou du vocabulaire chrétiens : tel est le rêve que faisaient les plus intelligents des fidèles, et qui inspirait parfois au discours d’Irénée un vague parfum d’atticisme[39]. Ces vérités, qui sait même si le ciseau du sculpteur n’arriverait pas à les rendre vivantes et visibles, comme il le faisait pour les épisodes de l’histoire des dieux païens ? n’était-il point permis de présenter les mystères de la religion sous les figures aimables de l’art hellénique ? Quelques-uns le croyaient déjà. Un riche Chrétien de Provence fit reproduire sur son tombeau, en belles images humaines, les allégories les plus chères aux fidèles : le pêcheur de poissons, pareil à l’évangéliste qui capte les âmes pour les amener au salut, le berger diligent, qui retrouve la brebis égarée et la rend au père de famille, le bon maître d’école, qui enseigne à l’enfant les leçons de la vie nouvelle, tous ces gracieux symboles, nés autrefois dans la pensée de Jésus sous le ciel de l’Orient, le marbre grec a réussi à les traduire en scènes éloquentes et simples, qu’on dirait empruntées aux sculptures funéraires des stèles attiques[40]. D’est par de tels procédés qu’on amènerait au Christianisme les lettrés et les grands de l’Empire, qu’on le ferait sortir des foules vulgaires où il avait planté ses premières racines. Pour convertir la terre, la foi ne suffirait pas, et il fallait aussi de l’éloquence. A côté de sainte Blandine, l’église de Lyon avait eu son orateur, et un évêque comme Irénée était homme à savoir parler aux plus habiles des Grecs. Par là, Irénée servait en Occident la cause de la civilisation. Il contribua à révéler aux Gaulois les idées et la poésie même de l’Orient[41]. Dans ce monde de petites gens qu’il gouvernait, il introduisit l’habitude de la réflexion et de la discussion, il rendit familiers des propos qui s’inspiraient de pensées très nobles. C’est une justice que l’on n’a pas assez souvent rendus aux évêques et aux écrivains chrétiens. Ils ont forcé les humbles et les ignorants, si souvent négligés par les philosophes de la Grèce, à méditer sur de graves problèmes, à rêver sur des mystères ; ils les ont détournés des rites machinaux, des dévotions grossières ou stupides ; ils ont demandé à leur esprit un effort plus grand vers l’intelligence des choses et le sens de la beauté. Car, à savoir la lire, la vie du Christ, telle que les apôtres la racontaient, avait l’émouvante simplicité d’une œuvre d’art. Tout en s’opposant encore à l’Empire, le Christianisme s’apprêtait donc à continuer son œuvre, à propager comme lui la culture gréco-latine. On peut presque ajouter que, dès le temps d’Irénée, il se préparait, sans doute à son insu, à prendre la succession de cet Empire. Durant le règne de Commode, la coalition de ses églises est devenue plus forte, leurs rapports plus étroits : et, de cela aussi, il est probable qu’Irénée fut l’ouvrier principal. Remarquez que son poste d’évêque, Lyon, est à l’extrémité du monde chrétien, et que, cependant, il converse avec toutes les églises, il écrit et combat pour toutes, il est leur athlète commun. Quel signe visible de l’unité ! quelle preuve que, par–dessus les assemblées locales, il y a l’assemblée de tous, l’Église absolue ! Ce mot d’Église Universelle, je ne sais si personne l’a encore prononcé avec autant d’énergie et de conviction que le prêtre lyonnais. Irénée est le premier à l’avoir bien vue, cette Église, âme collective des fidèles, obéissant à des dogmes transmis d’âge en âge, par le Christ aux apôtres, par ceux-ci aux évêques. Il l’a vue dans le temps, formée par le lien ininterrompu de ses prophètes et de ses chefs, qu’une même pensée divine attache entre eut et réunit à leur Dieu[42]. Il l’a vue enfin dans l’espace, formée de mille sociétés diverses, qui échangent sans relâche leurs rêves et leurs deuils[43] ; et peut-être a-t-il déjà reconnu la loi du destin, et s’est-il incliné devant la primauté d’un évêque suprême, héritier du prince des apôtres[44], rival dans Rome de César Auguste. Aucun évêque de ce temps n’exerça sur les communautés chrétiennes une influence pareille à celle d’Irénée[45]. Presque toutes les idées qu’il a défendues, sont devenues dogmes et lois dans l’Église catholique. Elle peut se réclamer de lui comme d’un de ses principaux fondateurs. Or ce fondateur, grec d’origine, a vécu dans les Gaules toute sa vie d’évêque. C’est ce qui explique, je pense, qu’il ait si clairement compris l’intérêt de la grande communauté chrétienne. Il était le seul prêtre au monde qui connût à fond et les pensées de l’Orient, où il avait passé sa jeunesse, et les aspirations de l’Occident, qu’il était appelé à gouverner. Plus que personne, il pouvait trouver la chaîne solide qui unirait entre elles ces deux moitiés de l’Empire chrétien. Dans ce poste avancé de Lyon, isolé au milieu d’ennemis. perdu en une fourmilière d’hommes, il fallait qu’Irénée gardât l’esprit net et la décision prompte. Vivant dans la mêlée des combats, il jugeait à leur valeur les insipides bavardages, les tristes querelles de personnes qui gâtaient l’existence des collèges chrétiens d’Asie, trop nombreux pour ne point gaspiller leur temps. Irénée et les siens, aventurés chez les Barbares, eurent besoin, afin de soutenir leur effort et de préserver leur courage, de se sentir étroitement unis à l’Église Universelle[46]. — Cette Église, les Chrétiens d’Occident lui firent donc faire le progrès décisif : la Gaule et Lyon furent alors pour elle ce qu’ils étaient pour l’Empire romain[47], un ferment d’unité, une garantie de durée. III. — LA LUTTE ENTRE LES PRÉTENDANTS[48]. au moment où l’Église chrétienne, après cent cinquante ans d’obscurs efforts, devenait enfin une puissance solide[49], l’État romain courait de nouveaux dangers, et, comme après la mort de Néron, et pour les mêmes causes, son unité faillit se rompre. On avait égorgé Commode (192). Cela rouvrit la question de la succession à l’Empire : chacun des généraux illustres qu’avait formés Marc-Aurèle, eut le droit de prétendre à fonder une dynastie. A Rome, Pertinax[50] et Didius Julianus[51] ne durèrent pas. Septime Sévère[52] prit sans peine leur héritage, et se prépara à le défendre contre ses rivaux d’Occident et d’Orient. — C’étaient les légions du Danube qui l’avaient imposé à la capitale[53] : elles demeuraient les plus capables de dominer l’Empire et d’en assurer la cohésion. Septime se débarrassa d’abord de l’élu des légions asiatiques, Pescennius Niger (191). Puis, il se retourna du côté des armées occidentales. Les peuples et les soldats de la Gaule l’avaient accepté sans trop de peine[54]. Il était connu d’elle, à qui son gouvernement en Lyonnaise avait laissé de bons souvenirs. D’ailleurs, les troupes de Germanie manquaient en ce moment d’un chef célèbre[55]. Mais celles de Bretagne, presque aussi fortes, obéissaient à un glorieux consulaire, égal en mérite et en ambition aux quatre généraux qui venaient de se disputer l’Empire, Clodius Albinus[56]. Il se fit proclamer Auguste, et la guerre commença aussitôt en Occident (195-196)[57]. Elle fut la répétition de la lutte entre Vitellius et Othon. Mais cette fois, comme le point de départ des légions révoltées était la Tamise et non pas le Rhin, comme le maître de home eut par suite plus de temps pour marcher au-devant d’elles, ce fut la Gaule de Lyon, et non celle de Milan, qui supporta le poids des batailles[58]. Au surplus, ainsi qu’au temps de Vitellius, l’affaire se régla entre les armées, et nullement entre les provinces. Beaucoup de Gaulois, surtout dans le Nord, se déclarèrent pour Albinus[59] : et ce fut, sans doute, parce qu’il était plus près d’eux, et par là plus redoutable[60]. Lyon, de gré ou de force, lui ouvrit ses portes[61]. Mais en Narbonnaise, on resta fidèle à Septime[62], qui garda partout d’assez nombreux partisans[63]. Les garnisons du Rhin, elles aussi, se divisèrent entre les deux rivaux[64]. Rien, dans l’attitude des Gaulois, ne ressembla à une manifestation d’esprit régional, encore moins à un retour de souvenirs nationaux. On ne vit reparaître aucun héritier de ces bardes et de ces prophètes qui, cent vingt ans auparavant, au lendemain de la mort de Néron, avaient entonné des hymnes de révolte en l’honneur des fils des Celtes. Personne dans la Gaule ne pensait à ces vieilleries. Elle ne savait plus ce que signifiait ce mot de liberté, si cher encore aux contemporains de Maricc le Boïen. Si elle profita de la querelle entre Albinus et Sévère, ce fut pour s’entre-déchirer de la façon qui était habituelle à tous les peuples du monde romain. IV. — LES DÉSASTRES DE LYON. On vit alors, entre le Rhin et les Pyrénées, le triomphe de cette anarchie à laquelle le règne de Commode avait disposé les peuples. Du côté du fleuve, des soldats assiégèrent Trèves, fidèle à Septime, et d’autres la défendirent[65]. Toute autorité publique disparut. Le gouverneur de la Lyonnaise dut s’enfuir de Lyon. Un maître d’école s’improvisa chef de bandes, leva des troupes pour le compte de l’empereur de Rome, et s’en vint battre la campagne auprès du Confluent[66]. Enfin, les grandes masses d’hommes s’approchèrent. Albinus débarqua son armée à Boulogne, et l’amena vers Lyon, où lui-même installa son quartier général. Sévère conduisit la sienne par le Danube et la Suisse, et la rabattit ensuite dans la plaine de la Bourgogne[67]. Après les rencontres des avant-gardes, elles se heurtèrent toutes deux, comme cela était inévitable, aux portes de Lyon (19 février 197)[68]. La bataille de Lyon fut la plus grande qu’eût vue la Gaule depuis les heures d’Alésia : 150.000 hommes y combattirent. Septime Sévère l’emporta après beaucoup de sang versé[69], et Albinus se tua[70]. Vaincus et vainqueurs s’engouffrèrent dans Lyon pour s’y ménager une retraite ou s’en assurer la possession. Et à la fin, Septime ne put empêcher les soldats de piller la grande ville et d’y mettre le feu[71]. Sa victoire coûta cher à la Gaule. A la suite de ces horribles journées, il y eut sans doute des semaines de désordres et de violences. Exécutions et confiscations frappèrent les riches familles qui avaient eu le malheur d’accepter Albinus[72]. L’empereur dut faire pourchasser en Occident les bandes qui s’y étaient formées et qui espéraient bien s’y maintenir[73]. Lyon n’apparaissait plus que comme un monceau de cendres, et il est douteux qu’il puisse redevenir la magnifique cité où avaient trôné Caligula et Vitellius. Depuis la mort d’Hadrien, chaque lustre apportait à la Gaule romaine un peu plus de fatigue, une nouvelle sensation de décadence[74]. V. — LA DISCIPLINE DE L’EMPIRE SOUS SEPTIME SÉVÈRE. Septime Sévère réussit pourtant à ralentir cette décadence, dans la mesure où un homme pouvait le faire. Son règne, brillant renouveau de l’Empire après les hontes de Commode et des guerres civiles, acheva de faire croire au monde que, comme la nature, le peuple romain retrouverait toujours son printemps après les tristesses de l’hiver. Le nouvel empereur était, disait-on, l’homme de son nom[75]. Sa sévérité venait d’un âpre besoin de discipline. De même qu’après Néron, il fallait, après Commode, un empereur qui répare : Septime rappela Vespasien, avec un esprit plus large et un tempérament plus brutal. Du côté des frontières, l’attitude de l’Empire redevient fière et menaçante. Septime les visitait sans cesse[76], non seulement pour les inspecter à la manière d’Hadrien, mais encore pour les franchir à l’improviste, et frapper quelque grand coup chez les Barbares. Pendant les quinze années de son règne, aucun ennemi ne se montra sur la berge du Rhin ou au pied du rempart de Souabe[77]. Afin d’ôter aux Calédoniens d’Écosse la tentation de descendre vers le sud, il pénétra dans leur pays, et s’aventura jusqu’au dernier promontoire qui surplombe les mers du Nord (208)[78]. Lorsque la mort vint le prendre, il était à York en Bretagne, face à l’ennemi[79]. Par son sentiment du devoir impérial, ce rude soldat ressemblait à Marc-Aurèle, dont il vénérait la mémoire comme celle d’un père adoptif[80]. A l’intérieur, il suffit de quelques mois d’une souveraineté énergique pour que l’Empire recouvrât l’ordre matériel, l’accord social, la paix morale. Contre les Chrétiens, il prit une mesure qui nous paraît violente, mais qu’en bon empereur il jugea nécessaire pour réagir contre leurs efforts et leurs succès des dernières années : défense fut faite de propager la religion du Christ (202)[81]. C’était la meilleure manière d’éviter les troubles populaires que provoquaient les prêches des Chrétiens et d’empêcher une extension trop dangereuse de leur fraternelle coalition. Si belles que fussent les doctrines annoncées par sa parole, un apôtre ne pouvait passer aux yeux du prince que comme un fauteur de désordres et l’agent d’une puissance rivale. Septime tenait trop à être obéi pour laisser son édit à l’état de lettre morte. Autour de Lyon, à Lyon même, les progrès des églises s’arrêtent, comme si elles sont frappées d’un mal subit. Elles avaient besoin, pour s’étendre, d’une intense circulation de vie, que ce fût par l’action de la propagande ou par la passion du martyre. L’une et l’autre leur manquèrent sous Septime : il les tracassait sans les détruire, il leur enlevait tout moyen de conquête et toute occasion de gloire, il les faisait s’enliser dans une vie banale. Pour comble de malheur, leur chef même disparaissait : Irénée arrivait au terme de sa longue vie[82]. Pendant que le Christianisme semble perdre pied, la Hère et Mithra font de nouvelles conquêtes[83]. Il est visible que Septime Sévère les protège, non pas, comme Commode, par caprice de dévot, mais parce qu’il les juge vraiment capables de collaborer à l’unité et à la, puissance de l’État, d’accorder les âmes et de glorifier le prince. Les sacrifices chthoniens et solaires, les tauroboles ou baptêmes par le sang du taureau, se multiplient en Occident ; et presque toujours c’est pour le salut d’Auguste ou en l’honneur de la Maison Divine[84]. Soleil et Terre ne se séparent plus de l’empereur et de l’Empire, puisque après tout l’Empire fait corps avec le monde, que le Soleil est là pour l’éclairer et la Terre pour le soutenir. Celle-ci dans les villes, celui-là dans les camps, prenaient la place de Jupiter Capitolin. Peu importait à Septime la déchéance des dieux romains. Il était d’origine africaine, il s’était allié à des familles orientales, il vivait dans ces milieux puniques et syriens demeurés fidèles aux cultes astraux et chthoniens. Aucun empereur ne reçut aussi peu l’empreinte d’une éducation classique. Avec lui, l’esprit et les dieux de la terre vaincue s’imposaient à la Rome de Jupiter[85]. Cela n’empêchait pas le prince d’être le farouche défenseur de la discipline romaine. Mais cette discipline consistait, suivant lui, dans l’ordre et l’obéissance, et non pas dans l’observance aveugle des traditions. VI. — TRACES DE TRADITIONS CELTIQUES. C’est au temps de Septime et sans doute par suite de sa politique, que reparaissent brusquement dans les Gaules quelques-uns des plus vieux usages des nations celtiques. Jusque-là, sur les bornes itinéraires des routes de toutes les Gaules, on avait marqué les distances d’après la mesure romaine du mille. Mais les indigènes, du moins ceux des provinces chevelues, persistaient à parler de lieues dans l’usage courant, et il est probable que l’emploi simultané de ces deux systèmes était souvent la cause de fâcheuses erreurs. Afin de les éviter, Septime Sévère renonça au mille et le fit remplacer par la lieue sur les bornes des chemins des Trois Gaules. Au bon ordre dans l’administration il subordonnait les systèmes et les principes, et il savait accepter les leçons de l’expérience. Du moment que les Gaulois, depuis plus de deux siècles, ont montré une invincible fidélité à l’Empire, à quoi bon les gêner dans leurs habitudes, leur chercher des querelles de détail ? C’est pour cela que l’emploi juridique de la langue celtique, que la personnalité civile de dieux indigènes, sont formellement acceptés, en ce temps, par les jurisconsultes du conseil impérial[86]. Cette langue celtique s’entend de nouveau dans les camps[87]. A la faveur de la vogue des cultes solaires, le dieu gaulois Bélénus redevient populaire[88]. Il y a plus, le nom de druides ou de druidesses reparaît, et, bien qu’il en soit venu, par dégradations successives, à désigner les plus misérables diseurs de bonne aventure[89], ce n’en est pas moins une chose étrange, qu’il ait alors essayé de revivre. Après tout, sous ces empereurs à demi puniques, prêtres et dieux des nations vaincues pouvaient espérer un dernier regain de leur antique gloire. Mais aucun de ces faits n’était un symptôme grave. Ils se produisaient au lendemain de cette guerre d’Albinus où la Gaule avait précisément montré son profond oubli des pensées nationales. Ce n’étaient que phénomènes de surface : ils avaient la même portée et le même sens qu’eurent, au dix-neuvième siècle, dans la France romantique, le réveil des parlers locaux, le félibrige provençal et les bardes bretons. Cela voulait dire que la Gaule tenait à quelques habitudes et à quelques souvenirs, et qu’elle prit goût à les ranimer, pour se dégager de l’ennuyeuse uniformité qui enveloppait la vie de l’Empire. D’ailleurs, les hommes mêmes qui ont laissé se réveiller ce peu d’esprit provincial, Septime Sévère et son conseil, vont donner à l’unité de l’Empire romain la plus grandiose des sanctions. VII. — LA CITÉ DONNÉE À TOUT L’EMPIRE. Le principe de cette unité avait été, jusqu’alors, la souveraineté de Rome victorieuse sur les nations vaincues[90]. Mais cette formule dix fois séculaire, dont l’origine remontait au plus ancien droit de la Rome patricienne, paraissait injuste et surannée à ces nouveaux maîtres de l’Empire, fils d’Asiatiques ou de Carthaginois, habitués à juger et à régler les choses, non pas d’après la tradition d’un passé qui n’était point le leur, mais d’après les réalités de l’heure présente ou les lois éternelles de la raison. Mais quelle puissance de durée dans les formules du monde antique ! Depuis Pompée et Jules César on savait bien que le titre de citoyen romain appartiendrait un jour à tous les habitants de l’Empire : et il y aurait bientôt trois siècles qu’on attendait ce jour. Il s’était rapproché au temps de l’empereur Claude ; puis, il s’était reculé très loin. Vespasien et ses fils, Nerva et ses héritiers se gardèrent de répandre outre mesure le droit de bourgeoisie[91], sans doute afin de stimuler, par l’espérance de ce privilège, le zèle des soldats ou le dévouement des provinciaux. Marc-Aurèle fut obligé à se montrer plus généreux : pour résister aux périls de l’invasion, il lui fallut beaucoup de légionnaires, et il ne put les trouver qu’en créant dans les provinces des milliers de nouveaux citoyens[92]. Ce qui, d’ailleurs, ne pouvait répugner à son âme : n’avait-il point proclamé que le monde devait être une cité des égaux[93]. Les derniers pas pour atteindre à cet Empire idéal furent faits par Septime et son fils Caracalla. Le premier propagea sans scrupules le droit de bourgeoisie, moins comme une faveur insignifiante que comme une qualité nécessaire[94]. Le second édicta, par une loi solennelle, que tous les membres de l’Empire seraient désormais citoyens romains, que ce titre de citoyen serait à jamais le statut légal de tout être né dans la liberté[95]. Quelques historiens, anciens ou modernes, se sont complus à affaiblir la portée de la loi de Caracalla. Comme on a jugé ce prince incapable d’une belle chose, on n’a vu dans son édit qu’une mesure fiscale, l’obligation pour les provinciaux de payer les impôts jusque-là réservés aux citoyens romains[96]. —Je doute fort qu’il faille le rabaisser ainsi : tous les riches de l’Empire possédant depuis longtemps le droit de cité, l’octroi qu’on en fit aux autres ne fut pas d’un très gros rapport pour le fisc, et d’ailleurs, en devenant citoyens, les provinciaux échappaient à d’autres taxes d’État. Puis, Caracalla fut-il donc un très mauvais prince ? Écervelé, inconstant, maniaque, fourbe, violent et colère jusqu’à la cruauté, je reconnais en lui ces défauts et vices, et bien d’autres[97]. Mais il n’en eut pas moins l’amour de la gloire, un goût pour les choses grandioses ou colossales, l’intelligence des affaires de l’État, et, somme toute, un certain idéal[98]. Le fils de Septime a fort bien pu comprendre la beauté de l’édit qu’on lui fit signer. — Car le véritable rédacteur de cet édit, ce doit être l’admirable conseil d’Empire qui siégeait auprès de Caracalla, qui gouvernait le monde en son nom, et que Septime Sévère avait formé[99]. Là étaient les juristes Papinien[100], Paul[101], Macrin[102], Ulpien[103], d’autres encore, élevés en dehors de la routine romaine, venus des provinces les plus éloignées, et désireux, comme Marc-Aurèle leur premier maître, de plus de justice et d’égalité dans la loi et de plus de vérité dans le droit[104]. I.e nouvel édit réalisait ce désir. Assurément, il ne fit pas disparaître d’un coup la distinction entre citoyens et pérégrins les juristes de l’Empire ne brusquaient jamais les choses. Ils durent exclure de la cité romaine ceux qui ne faisaient point partie d’une société municipale, les affranchis qui étaient arrivés à la liberté par le droit indigène, peut-être aussi certaines catégories de prolétaires, de plébéiens des villes ou des campagnes, de salariés, serviteurs ou clients[105]. Mais la valeur de la loi n’en souffrait pas. Ces distinctions qui subsistent, tiennent à la vie sociale et non plus à la vie politique ; elles ont leur origine dans une condition civile[106] et non pas dans les souvenirs historiques. Ceux-ci sont bien abolis : il n’y a plus de vainqueurs et de vaincus, une cité romaine et des cités étrangères. La formulé vers laquelle le monde s’acheminait depuis un millénaire, vient enfin d’être prononcée. Il ne présente maintenant qu’une seule patrie, ayant une seule ville pour foyer commun[107]. Les deux régimes entre lesquels il avait si longtemps hésité, l’Empire et la cité[108], se sont confondus en une forme unique. VIII. — NOUVELLES DÉNOMINATIONS MUNICIPALES EN GAULE[109]. L’édit de Caracalla eut, pour les cités de la Gaule Chevelue, des conséquences assez profondes, pareilles à celles qu’avait amenées, pour les cités de la Gaule Narbonnaise, l’installation de colonies dans leurs villes capitales. Transformées en territoires de colonies, les cités du Midi, Salyens, Volques ou Allobroges, avaient perdu leur nom national afin de prendre celui de leur métropole devenue romaine, Arles, Nîmes ou Vienne. Il faut maintenant que la même chose se produise dans les Trois Gaules du Confluent : car c’en est fini chez elles, en droit, des peuples ou des cités des Arvernes, des Éduens, des Bituriges ; il n’y a plus ici que des ressorts communaux de citoyens romains, dépendant chacun d’une ville maîtresse, Augustonemetum, Autun, Avaricum. Un seul et même nom doit désigner le chef-lieu et son territoire : ce qui fut l’habitude fondamentale dans la vie des cités antiques, et la règle dans le régime municipal de l’Empire romain. Or, il se passa ceci d’extraordinaire dans les cités gauloises, et qui n’apparaît nulle part ailleurs sur terre romaine[110] : c’est que, de ces deux noms, celui de la cité ou du territoire, celui du chef-lieu ou de la ville, ce fut le premier qui eut la vie la plus dure, qui, loin de s’effacer, chassa l’autre devant lui, qui du peuple passa à la capitale et s’imposa à elle pour toujours. Citons Paris à titre d’exemple. Son nom de ville était Lutèce, Lutetia, et sous ce nom il servait de métropole à la peuplade ou à la cité des Parisiens, Parisii[111]. Au troisième siècle, le nom de Lutèce disparut, du moins du lançage officiel et du parler populaire : car les lettrés ne l’oublieront jamais[112]. En échange, la ville prit le nom du peuple auquel elle avait toujours commandé, et elle s’appela, au pluriel, Parisii[113], d’où est venu notre mot de Paris. Elle resta, d’ailleurs, chef-lieu de district municipal, et ce vocable de Parisii servit à désigner ensemble le territoire communal et son centre administratif[114]. Pareille chose se produisit dans quarante cités[115]. C’est pour cela qu’Avaricum est devenu Bituriges et Bourges, qu’Augusta est devenue Treveri et Trèves[116], et c’est pour cela que nous retrouvons aujourd’hui, attachés à jamais à nos plus vieilles villes de France, les noms des plus glorieuses peuplades de la Gaule, des Bellovaques à Beauvais[117], des Rèmes à Reims[118], des Lémoviques à Limoges[119], des Carnutes à Chartres[120]. Ce qui fait que, de toutes les régions de l’Occident, y compris l’Italie même, la France est celle qui porte le plus solidement fixés sur son sol les titres de sa plus lointaine histoire : la ville n’y a pas détruit, comme Milan chez les Insubres ou Rome chez les Latins, le souvenir du peuple qui l’a créée. Et quand bien même cette ville s’appellerait du nom d’Auguste, c’est le nom de la nation gauloise qui deviendra le plus fort. On a vu les raisons qui expliquent cette persistance et ce triomphe du vocable de la nation : il était plus ancien et plus célèbre que le nom de la capitale ; il faisait corps avec une région naturelle, par exemple le Limousin pour les Lémoviques ou le Poitou pour les Pictons, et, dans la vie commune de la cité, cette région comptait plus, par ses richesses, par sa population, par son étendue, que la petite ville qui lui servait de métropole, Augustoritum ou Limonum. Voilà pourquoi ces deux noms ont disparu et qu’à leur place sont venus ceux des Lémoviques ou de Limoges, des Pictons ou de Poitiers. Et si la France a su mieux conserver que le reste de l’Europe les noms de ses peuples primitifs, c’est qu’elle est la contrée où les régions naturelles sont le mieux faites, le plus mesurées dans leurs proportions, le plus harmonieuses dans leurs formes. Il y eut cependant quelques cas où le nom de la capitale l’emporta sur celui de la peuplade. On ne parlera bientôt plus des Véliocasses ou des Bituriges Vivisques, et on ne trouvera à leur place que Rouen chez ceux-là[121] ou Bordeaux chez ceux–ci[122], et ces mots, Rouen et Bordeaux, s’appliqueront à la ville et au territoire. De même, Besançon chez les Séquanes[123], Argentorate ou Strasbourg, chez les Triboques[124], Toul chez les Leuques[125], d’autres chefs-lieux moins importants[126], finiront également par imposer leurs vocables. — L’histoire particulière de chacune de ces cités nous expliquerait sans doute ces exceptions. On en entrevoit le motif pour Rouen et Bordeaux : ils étaient devenus des ports considérables, lieux de marchés et entrepôts commerciaux de premier ordre[127], et les peuplades qui dépendaient d’eux étaient restées obscures et peu étendues : ce qui fit prévaloir sur les noms de ces peuplades ceux de leurs métropoles. Il est douteux qu’une mesure officielle ait réglé d’un seul coup les nouvelles appellations des villes et de leur territoire[128]. Le changement ne se fit point en même temps dans toutes les cités, pas plus qu’il ne s’y fit de la même manière. Il apparaît pour la première fois en 237[129] vingt-cinq ans après l’édit ; et, longtemps encore après cette date, il resta des vestiges, même dans le langage administratif, de l’antique dualisme[130]. Le conflit entre les deux noms dura plus d’un siècle, et il arriva qu’après avoir été d’abord tranché en faveur de la nation, il le fut à nouveau en faveur de la ville[131]. Je crois bien qu’on laissa partout prévaloir l’usage local : jusqu’au terme de son existence, l’État romain se garda des règles absolues[132]. IX. — PAIX SOCIALE ET TRAVAIL MATÉRIEL. Septime Sévère était mort à York en Bretagne (211). Son corps, comme jadis celui de Drusus, fut transporté à Rome à travers l’Occident : une dernière fois, l’empereur refit en héros divinisé le voyage de la Gaule, et, sur son passage, les peuples accoururent, pleins de douleur et de respect, pour saluer le chef qui avait rendu l’unité et la grandeur à l’Empire[133]. Après lui, pendant douze ans, les mauvais instincts reparurent plus d’une fois chez les princes et les sujets. Caracalla[134], qui revint en Gaule après avoir enseveli son père, tracassa les cités, fit tuer un gouverneur (213)[135]. Son successeur Macrin[136] s’inspira davantage du grand Sévère, mais il ne fit que passer (217-8). Et d’Héliogabale[137], qui parut ensuite (218-222), on peut dire qu’il se laissa aller à tous les vices d’un homme et qu’il prit à plaisir tous ceux d’une femme[138]. — Mais les leçons données à l’État par Septime Sévère avaient été si profondes, le conseil d’Empire qu’il transmit à ses successeurs demeura si puissant et si respecté, que, même sous l’immonde Héliogabale, on ne revit pas l’anarchie du temps de Commode. Ce fut au contraire, sur le Rhin, une paix extraordinaire, à peine interrompue par d’utiles expéditions de Caracalla[139], et, à l’intérieur, un vigoureux effort de travail. Les hommes de ce temps aimèrent beaucoup à construire. Antonin par économie, Marc-Aurèle par devoir, Commode par sottise, avaient longtemps écarté cette bonne passion de la bâtisse que le monde tenait de ses maîtres romains[140]. Le calme revenu, elle reprit enfin. Avides de faste et de gloire, les Sévères l’encourageaient[141]. Il est vrai que les édifices contemporains de la nouvelle dynastie ne sont point de très belles choses : ils ressemblent aux souverains qui les ont inspirés, à ces grands dieux orientaux auxquels ils sont parfois destinés ; on chercherait vainement en eux les leçons de l’art classique, l’élégance et l’harmonie de la Maison Carrée ou des œuvres auxquelles .Auguste put applaudir. Pour ses divinités et ses monuments, le monde veut alors des êtres complexes et des choses compliquées. Temples, thermes et palais sont des constructions puissantes, massives, de dimensions excessives, surchargées de statues et d’ornements, aux salles énormes, aux voûtes d’une hardiesse prodigieuse, à l’allure grandiose, incohérente et déclamatoire[142]. Mais, s’ils nous rappellent que le bon goût s’est perdu au temps des Sévères, ils nous montrent aussi que la fortune s’est retrouvée. Ce qui le prouve encore, c’est que peu d’empereurs se sont occupés davantage de ces deux principaux auxiliaires de la richesse publique qu’étaient le collège et la route. De plus grandes immunités furent accordées aux corporations qui travaillaient[143], et l’État tendit de plus en plus à leur confier le service de ses transports ou de ses manufactures[144]. Les chemins furent réparés avec un soin minutieux[145], les distances y furent comptées d’une manière plus avantageuse au commerce, et on publia une nouvelle carte et le routier général du réseau des voies impériales[146]. Bons ou mauvais, ces empereurs restaient populaires dans la Gaule. Le fondateur de la dynastie, tout comme Drusus, y avait été gouverneur. Son fils Caracalla, tout comme Claude, était né à Lyon[147], et il tirait ce sobriquet d’un vêtement celtique[148]. Sous ces règnes qui présageaient une longue dynastie, de plus nombreuses inscriptions furent gravées en l’honneur ou pour le salut de la Maison Divine[149]. Macrin reçut à son tour ses autels et ses statues[150], et de même Héliogabale[151]. Du reste, tous ces empereurs aimèrent à prendre le nom d’Antonin, qui avait été celui de Marc-Aurèle et de son père adoptif, et ce titre, sanctifié par ces deux empereurs, donnait à leurs successeurs, même indignes, le prestige d’une gloire surhumaine et bienfaisante[152]. Des Chrétiens, il n’est plus question dans les textes historiques depuis l’édit de Septime Sévère[153]. Il semble bien que cet édit eût toujours force de loi, et qu’il suffit alors à ruiner les espérances du Christ et de ses porte-parole. Tout en évitant les violences, le conseil d’Empire a su arrêter la propagande par des entraves juridiques habilement disposées sur le chemin des missionnaires[154]. X. — ALEXANDRE SÉVÈRE. Le dernier des Sévères et des nouveaux Antonins[155] fut une des plus admirables créatures qu’ait produites l’Empire romain. Alexandre Sévère reçut des dieux tous les dons, beauté, bonté, intelligence, douceur, jeunesse[156], et, pendant longtemps, le pouvoir de ne faire que des heureux. I1 n’avait que treize ans lorsqu’il succéda à Héliogabale (222). C’était la première fois qu’un enfant commandait à la terre. Mais telles étaient les habitudes pacifiques prises par les hommes de l’Empire, le respect qu’il inspirait à ses ennemis de la frontière, l’habileté du conseil qui gouvernait au nom du prince, que, pendant les années de son adolescence, Alexandre n’entendit jamais parler ni de guerre ni de sédition. Aux annales de ce temps béni les chroniqueurs n’ont attaché que le souvenir de nombreux textes juridiques. L’État paraissait n’être gouverné que par des législateurs, et ses chefs, ne vivre que pour améliorer les lois[157]. C’est alors que le monde romain arriva à la plénitude de l’ordre, de l’entente, de la paix et de la justice. Un siècle après Hadrien, le miracle impérial était reparu, et les sages pouvaient pardonner à l’Empire, devenu le nom d’une humanité nouvelle, le, sang que ses fondateurs avaient répandu sur la terre. C’est cet idéal d’accord et d’équité qui inspira aussi le gouvernement personnel d’Alexandre Sévère : il voulut concilier entre eux tous les hommes et tous les dieux. Les mesures que les empereurs avaient prises pour restreindre le droit d’association, furent supprimées ou adoucies. On donna aux collèges de nouvelles garanties, et fort sérieuses : ils eurent leurs tribunaux spéciaux, des défenseurs chargés de les représenter en justice[158]. Il est même probable qu’Alexandre souhaita que tout Romain, au moins tout artisan et homme de métier, fût incorporé dans un groupement professionnel[159]. Pour ce monde des petites gens, il rêva une forme propre de la société, où ils seraient unis, non pas suivant le hasard de leur naissance, mais suivant la nature de leur travail et les affinités de leurs besoins. Son règne vit l’apogée du système collégial[160]. De droit ou de fait, il s’imposait alors à tous les métiers, à toutes les industries, à toutes les croyances. — Sévère Alexandre est allé beaucoup trop loin, si, par désir d’une fraternité universelle, il a voulu faire de la confrérie une société, non plus seulement à demi indépendante, mais aussi à demi souveraine, nécessaire et inévitable, comme l’étaient déjà la famille, la cité, la province et l’État. Pourquoi donc, à ces quatre puissances sociales ou politiques, en ajouter une autre, avec ses chefs, ses règlements et ses obligations ? N’y avait-il pas assez de manières d’obéir ? assez de forces collectives limitant la liberté de l’individu et compliquant le jeu de ses facultés ? Devenu corps officiel et groupe obligatoire, le collège perdait son attrait principal, et les hommes trouveraient moins de plaisir à la tâche qu’il leur désignait. Ces réformes sociales profitaient du moins au Christianisme. N’était-il pas, dans l’esprit et dans la lettre, l’idéal de ce régime confraternel auquel l’empereur conviait le monde ? La bonté d’Alexandre Sévère, sa piété profonde et douce l’empêchaient d’en vouloir à des hommes qui s’assemblaient pour prier leur dieu. Lui-même ne jugeait pas que le Christ fût un héros indigne d’être adoré : il finit son image dans sa chapelle, à côté de celles d’Abraham, d’Orphée, d’Apollonius de Tyane et d’autres grands prophètes, et il les révérait toutes dévotement[161]. Qui sait s’il n’a pas compris le vrai charme de la religion chrétienne ? Car ce charme venait, non pas de son dieu souverain, personnalité lointaine et vague, mais du drame émouvant et poétique qu’avaient été les paroles et les souffrances du Christ son fondateur. Il laissa donc les fidèles, en Gaule et partout, libres de se réunir et de s’organiser. On fit le silence sur le vieil édit qui assimilait le titre de Chrétien à un crime capital[162]. Comme les autres collèges, les églises eurent toute liberté pour posséder en propre[163] : ce qui équivalait à leur reconnaître une existence légale. Cependant, et le fait est fort surprenant, le règne d’Alexandre ne marqua aucun progrès pour l’église de Gaule. Il n’est même point sûr qu’elle ait alors gardé toutes les positions conquises par Irénée. Nous ne trouvons, dans son histoire ou ses légendes, aucune trace de mission contemporaine de cet empereur. L’archéologie ne nous livre ni tombeau ni épitaphe de Chrétien qui soit de ce temps. Même les Vies de saints ne peuvent rien raconter qui s’y rapporte. Il n’y eut, chez les fidèles, ni grand évêque, ni belles conquêtes, ni glorieuses tribulations. — Je ne m’explique pas cette longue apathie des églises qui avaient donné au Christianisme Blandine et Irénée. Peut-être, si la paix leur a été aussi inutile, c’est qu’elles n’en ont profité que pour commencer des querelles. Avant que l’Église n’eût recouvré son énergie, les plus mauvais jours arrivèrent pour elle aussi bien que pour l’Empire. — En 234, Alexandre Sévère étant âgé de vingt-six ans, les Barbares assaillirent en grand nombre la frontière du Rhin. Désireux de faire son devoir, le jeune empereur partit aussitôt pour la Gaule. Mais, au moment de se mettre en campagne[164], il périt à Mayence dans un misérable complot de soldats, le 18 mars 235[165]. Les siècles dorés des Antonins étaient finis[166]. |
[1] L. Ælius Aurelius Commodus, ou imp. Cæsar M. ou L. Aurelius Commodus Antoninus Augustus, associé à Marc-Aurèle dès 176 (cf. Prosop., I, p. 201-3).
[2] Hist. Auguste, Commode, 18, 3 et s.
[3] Neglegentiam, Commode, 14, 1 ; neglegens, 13, 7.
[4] Commode, 9, 2 et s.
[5] Tauroboles contemporains : C. I. L., XII, 1222, 1782 (en 184) ; XIII, 1752 (en 190) ; Lafaye, Culte des divinités d’Alexandrie, p. 62 ; Graillot, Culte de Cybèle, p. 152 ; Cumont, Textes, I, p. 281 ; Les Mystères de Mithra, 3e éd., 1913, p. 87-8.
[6] Commode, 3, 8 ; 6, 9 (venditæ omnes provinciæ).
[7] Commode, 16, 2 ; desertores innumeri Gallias tunc vexabant, Pescennius, 3, 3-5. Cela, surtout en 185-7, où ils furent, sous la direction de Septime Sévère, légat de la Lyonnaise, pourchassés par Pescennius Niger (comme tribun de la cohorte de Lyon ?).
[8] Cf. Hist. Auguste, Pescennius, 3, 9-12.
[9] Hérodien, 1, 10, 1-2 : se rattache sans doute aux affaires des déserteurs (Commode, 16, 2).
[10] Commode, 13, 5-6 (il n’est question ici que des provinces militaires).
[11] Commode, 13, 5 ; Clodius Albinus, 6, 3.
[12] Vers 185-187 (186-189, de Ceuleneer, p. 22-4) : Lugdunensem provinciam legatus accepit... Gallis ob severitatem et honorificentiam et abstinentiam tantum quantum nemo dilectus est (Severus, 3, 8 et 9).
[13] Vers 181 ? Julianus, 1, 9. Puis en Bithynie et en Afrique.
[14] En 185-8 ? Albinus, 5, 4-5 ; 6, 3. Puis, en 193 au plus tard, en Bretagne. — Je ne vois pas pourquoi on est convenu de considérer comme ficta ces renseignements de l’Histoire Auguste sur la légation d’Albinus en Germanie (Prosop., I, p. 422 ; Hirschfeld, Decimus Clodius Albinus, Hist. Zeitschrift, n. s., XLIII, 1897, p. 458-9). Cf., plus justement, von Wotawa, R. Enc., IV, c. 70.
[15] Comme tribun à Lyon ? puis en Syrie.
[16] En Bretagne en 185, puis en Afrique.
[17] Voyez, par exemple, les travaux faits sur la frontière des Champs Décumates (C. I. L., XIII, 11, p. 263). — Il semble qu’il y ait eu une expédition de la VIIIe en Germanie (C. I. L., XI, 6053 ; XII, 2587).
[18] Entre autres : Halloix, Ill. Eccl. Or. Script.... Vitæ, II, 1636, p. 402 et s. encore très utile) ; Dodwell, Dissertations in Irenæum, 1689 ; [Lenain] d[e] T[illemont], Mémoires, III, 1695, p. 38 et s., p. 77 et s. (admirable) ; Beaven, An Account of the life and writings of S. Irenæus, 1841 ; Freppel, Saint Irénée et l’Éloquence chrétienne dans la Gaule pendant les deux premiers siècles, 1re éd., 1861 ; Éd. Montet, La Légende d’Irénée, Genève, 1880 ; Dufourcq, Saint Irénée, 1904 et 1905 (deux vol. sous ce titre). Comme répertoires bibliographiques : Harnack, Geschichte der altchristl. Litt., I, I, 1893, p. 263 et s. ; Bardenhewer, Gesch. der altkirchl. Litt., I, 1902, p. 496-522 ; Zahn, Realencyklopädie de Hauck, II, 1901, p. 401-411 ; Ul. Chevalier, Répertoire, Bio-bibliographie, I, 1903, c. 2264-6.
[19] Eusèbe, V, 21, 1. Marcia, la concubine de Commode, est dite πολλά ύπέρ τών χριστιανών σπουδάσαι (Dion, LXXII, 4, 7).
[20] Semen est sanguis Christianorum, Tertullien, Apol., 50.
[21] Eusèbe, V, 5, 8. On peut croire qu’il était prêtre à Lyon pendant la crise de 177, et qu’il fut chargé par les frères de porter la lettre sur la persécution (lettre qu’il a peut-être rédigée) à l’évêque de Rome Éleuthère (V, 4, 1-3). On a cependant supposé, tout au contraire, qu’il se trouvait à Rome pendant la crise (Zahn, p. 407). — Il est possible qu’il n’ait été fait évêque qu’après la mort de Marc-Aurèle en 180. — Il avait été disciple du grand Polycarpe de Smyrne, mort, croit-on, en 155 (Eusèbe, V, 5, 8 ; 20, 5 ; cf. les épilogues des Actes du martyre de Polycarpe, Patrum apostolicorum opera, ed. minor, p. 127-8). On peut donc supposer qu’il était né entre 130 et 140, et lui donner de 40 à 50 ans en 180. S’il fallait, ce dont je doute, prendre la date de 165 pour le martyre de Polycarpe, cela ne donnerait à Irénée, en 180, que 30 à 40 agis. Zahn (p. 409), au contraire, le fait naître même vers 115. Cf. Renan, L’Église chrétienne, p. 439-451. — Toutes ces questions sont fort discutées.
[22] Le gnosticisme avait pénétré à Lyon avant la persécution de 177 (Eusèbe, V, 3 ; Irénée, I, 13, 7).
[23] Irénée, IV, 38, 3 ; etc.
[24] Surtout le livre contre les hérésies (cf. Eusèbe, V, 26). Aucun de ces écrits n’est arrivé complet ; mais les découvertes, faites de temps à autre, de fragments de traductions syriaques ou arméniennes laissent espérer qu’on pourra retrouver un jour les œuvres complètes d’Irénée. Voyez les éditions de Stieren, Leipzig, 1848-1853, et de Harvey, Cambridge, 1857 ; et Harnack, Des Heiligen Irenæus Schrift... Έίς έπίδειξιν, etc., dans sa collection des Texte, XXXI, I, 1907. Il manque une édition générale critique.
[25] Cf. Eusèbe, V, 21, 1. Lorsque Irénée déclare qu’il parle la langue celtique (Adv. hær., I, pr., 3), je ne crois pas qu’il fasse allusion à ses fidèles de Lyon : ce doit être plutôt à sa propagande chez les Celtes de la province.
[26] Irénée, Adv. hæres., præf. ; I, 10, 2 ; III, 4, 2 ; Tertullien, Adv. Judæos, 7 [écrit avant 202] : Galliarum diversæ nationes [dans le sens de civitates] Christo subditæ.
[27] Saint Bénigne ; 1er nov., Acta, I, p. 160, Bollandistes, 1887. Saints Andoche, Thyrse et Félix ; 24 sept., VI, p. 675. C’est alors que la tradition place, sans invraisemblance, le baptême de saint Symphorien d’Autun, âgé de trois ans (24 sept., VI, p. 675, § 4) : vers 185 ? — Les mêmes à Saulieu (Sedelocus) ; id., p. 676.
[28] Les mêmes (note précédente).
[29] Saint Bénigne ; les Trois Jumeaux, convertis à Langres par Bénigne ; 17 janvier, Acta, II, p. 441 ; sept., VI, p. 675. —Ce premier groupe de saints est indiqué comme venu directement d’Asie et de Polycarpe : la tradition doit se tromper là-dessus. Du reste, pour le détail, il est difficile de rien dire d’eux, qu’on puisse tenir pour authentique et pour assuré (Tillemont, III, p. 38). — Mais la marche de la propagande, de Lyon vers Autun, Dijon et Langres, est des plus naturelles.
[30] Saints Félix, Fortunat et Achillée ; 23 avril, III, p. 99. — C’est peut-être à cette église ou à d’autres communautés de la vallée du Rhône, aussi bien qu’à celle de Lyon, que fait allusion l’expression d’Irénée, έν τοΐς καθ' ήμάς κλίμασι τής 'Ροδανουσίας (Adv. hær., I, 13, 7).
[31] Saints Ferréol et Ferjeux ; 16 juin, IV, p. 6. — Ce second groupe (ici et n. précédente) est indiqué dans la tradition comme formé par Irénée. Et il n’y a pas de motif pour douter de la chose, quoique les Actes ne paraissent pas capables de faire une grande autorité (Tillemont, III, p. 97).
[32] Irénée, Adv. hær., I, 10, 2 : quoiqu’il serait possible qu’Irénée fit ici allusion aux églises de Besançon, Langres et Dijon, villes comprises alors dans la Germanie Supérieure.
[33] Une opinion très répandue, mise en avant autrefois par Quesnel et développée par lui avec beaucoup de finesse (probabile esse unicum in Gallia episcopum ; Leonis Magni Opera, Paris, 1675, II, p. 477-484), et très habilement soutenue de nos jours (Duchesne, Fastes, I, 2e éd., p. 61-2), est que, de 150 à 250 environ, il n’y eut en Gaule qu’une seule église et un seul évêque, à Lyon. — J’hésite à croire cela possible. — 1° La lettre des Chrétiens de Vienne et de Lyon dit έκ τών δύο έκκλησιών (V, 1, 13). 2° Cf. V, 1, 17 [dans la province de Celtique, Lyon, Autun]. 4° Eusèbe, V, 23, 3. 5° Je doute fort que l’autorité publique eût permis qu’une église, c’est-à-dire, à tout prendre, une assemblée de collège municipal, se fût étendue à deux villes : ce qui était contraire au principe fondamental de l’association légale, et les Chrétiens n’avaient ni motif ni désir de ne point s’y conformer. — Il est d’ailleurs possible que, sous la législation d’Alexandre Sévère, plus libérale en matière d’association, l’organisation d’une église se soit étendue sur plusieurs cités ; et possible également qu’à cette époque ou à d’autres, dans certains pays, les chefs des assemblées locales les moins importantes n’aient eu que le titre de diacre ou de prêtre, celui d’évêque étant réservé aux églises suffisamment nombreuses (Théodore de Mopsueste, Comment. in Epist. S. Pauli, ad Tim., I, 3, 8, éd. Swete, Londres, II, 1882, p. 124 ; Concile d’Elvire, art. 77, Mansi, II, p.18). — Rien n’empêche, enfin, qu’Irénée n’ait, comme évêque de Lyon, exercé un contrôle de droit ou de fait sur les églises de la Gaule (cf. le texte d’Eusèbe, V, 23, 3). — Il ne faut, dans cette question, conclure d’un texte que pour l’époque et le pays auxquels il se rapporte, et ne pas oublier que l’organisation chrétienne a pu dépendre, non pas seulement de principes intérieurs acceptés pour le moment, mais aussi de la politique administrative de l’empereur régnant. — En dernier lieu, sur cette question, Harnack, Die Mission und Ausbreitung des Christentums, 1902, p. 319 et s.
[34] Cf. Duchesne, Fastes, I, 2e éd, p. 48-62.
[35] Citer tous les travaux auxquels ces Vies ont donné lieu, est impossible, et il y a trop de non-valeurs parmi eux. On trouvera la bibliographie ancienne chez Tillemont, aux discussions et aux résultats duquel on doit encore s’en tenir. La bibliographie récente peut être faite à l’aide des Acta, publiés par les Bollandistes, editio novissima, des Analecta Bollandiana, qui paraissent depuis 1882, et aussi de la Revue Bénédictine, L, 1884-5, et s.
[36] Adv. hær., I, 9, 4 ; I, 12, 2 ; II, 14, 2 et 5 ; II, 21, 2 ; II, 22, 6.
[37] Cela a été très bien noté par Tillemont, Mémoires, III, p. 80.
[38] Cf. Renan, L’Église chrétienne, p. 386-9 ; Marc-Aurèle, p. 106-8. En dernier lieu, Puech, Les Apologistes grecs, 1912, p. 287 et s.
[39] Tillemont, III, p. 80 : Génie vif, agréable et élevé, ce qui paroist particulièrement dans les belles comparaisons dont il se sert.
[40] Sarcophage de La Gayole.
[41] Il a dû prêcher en celtique.
[42] Eusèbe, V, 6 = Irénée, III, 3, 3 ; Eusèbe, V, 24, 14-7.
[43] Cf. Irénée, Adv. hær., I, 10, 2 ; Eusèbe, V, 23. — De là, sans doute, son intervention auprès du pape Victor pour empêcher l’excommunication des églises d’Asie (Eusèbe, V, 24, 11-18).
[44] Eusèbe, V, 6 = Irénée, III, 3, 3. Son esprit d’indépendance à l’endroit du pape Victor (n. précédente), n’exclut pas, je crois, qu’il n’ait reconnu sa suprématie.
[45] Cela résulte très fortement de l’importance que lui assigne Eusèbe (V, 4 ; V, 5, 8 ; V, 6-8 ; V, 20 ; V, 24, 11 et s. ; 26). Et cela résulte aussi, non moins fortement, des témoignages postérieurs (réunis entre autres par Tillemont, III, p. 77-8, et par Harnack, C. der altchr. Litt., I, p. 266 et s.).
[46] Είρηνοποιός, dit de lui Eusèbe, V, 24, 18.
[47] Ici, ch. II, § 1, ch. III, § 1.
[48] Pour ce § et les s. : Bordes de Parfondry, Recherches historiques, etc., dans la Revue du Lyonnais, VIII, 1838, p. 433-471 (très médiocre) ; Hœfner, Untersuchangen zur Geschichte des Kaisers L. Septimius Severus und seiner Dynastie, Giessen, 1872 ; de Ceuleneer, Essai sur la vie et le règne de Septime Sévère, 1880 ; Fuchs, Geschichte des Kaisers L. Septimius Severus, 1884 ; Wirth, Quæst. Severianæ, Leipzig, 1888 ; et aussi Revue historique, 1889, XLI, p. 283-296, et Albinus, 1, 2 ; Hérodien, III, 7, 1.
[49] C’est vers ce temps-là, en 196, qu’à propos de la question de la Pâque il y eut le premier essai de conciles provinciaux des évêques. Irénée présida, semble-t-il, au moins une assemblée des prêtres de la Gaule (Narbonnaise et Trois Gaules ?), τών κατά Γαλλίαν παροικιών (Eusèbe, V, 23, 3). Il est bien probable que les évêques ont profité, pour tenir ces réunions, des temps troublés qui suivirent la mort de Commode. Hefele, Hist. des Conciles, nouv. trad., I, 1907, p. 140-151.
[50] Imp. Cæsar P. Helvius Pertinax.
[51] M. Didius Severus Julianus.
[52] L. Septimius Severus, devenu imp. Cæsar L. Septimius Severus Pertinax Augustus.
[53] Hist. Auguste, Severus, 5, 1-3.
[54] Severus, 5, 3 : Gallicani exercitus.
[55] On n’en connaît aucun pour cette époque.
[56] Imp. Cæsar D. Clodius Septimius Albinus Augustus.
[57] Septime l’avait reconnu comme César en 193 (Hérodien, II, 15, 3 ; Dion, LXXIII, 15, 1-2 ; C. I. L., XIII, 1753), en lui attribuant la Bretagne, peut-être avec la Gaule et l’Espagne, sans doute sans la Germanie. Délivré de Niger, Sévère affecta, sans doute dans le courant de 195, de ne plus le traiter en César (Dion, LXXV, 4, 1), ou lui tendit des embûches (Albinus, 7-8 ; Hérodien, III, 5). A la fin de 195 ou au début de 196, Albinus se déclare Auguste et rompt avec Sévère. Cf. Hirschfeld, Decimus Clodius Albinus, dans Historische Zeitschrift, n. s., XLIII [LXXIX], 1897. von Wotawa, R.-Enc., IV, c. 67-76.
[58] Cf. ch. V, § 6.
[59] Albinus, 1, 2 ; Hérodien, III, 7, 1.
[60] Hérodien, III, 7, 1.
[61] Hérodien, III, 7, 1-2. — Je ne sais si on peut également tirer cette conclusion des monnaies d’Albinus frappées à Lyon au nom du Cenius Lugduni (Cohen, 2e éd., Albin., n° 40 ; Hirschfeld, p. 465-6 ; C. I. L., XIII, I, p. 232 ; Blanchet, Manuel de num. franç., I, p. 104). — Je doute fort qu’il faille rapporter à ce temps les fameux médaillons du Génie de Lyon. Ils rappellent, sans doute, le type des monnaies d’Albinus : mais ce devait être un motif courant, que copiaient monnayeurs et céramistes. — Il y a traces, d’ailleurs discutables, de la popularité de Septime à Lyon (XIII, 1754, 1755, 1766). Et on avait dû y conserver le souvenir de son gouvernement et de la naissance de Caracalla.
[62] C. I. L., XII, 4345-6.
[63] C. I. L., XIII, 1613 : le gouverneur de la Lyonnaise, favorable à Septime, dut sans doute s’enfuir de Lyon ; Dion, LXXV, 5, 1. Et il est possible que la XIIIe cohorte urbaine, alors en garnison à Lyon, se soit déclarée pour Albinus.
[64] Albinus, 1, 2.
[65] Legioni XXII civitas Treverorum, in obsidione ab ea defensa (C. I. L., XIII, 6300). Il est possible que Trèves ait été assiégée par des troupes de Germanie Inférieure (où Albinus avait gouverné), et délivrée par la XXIIe de Mayence.
[66] Dion, LXXV, 5.
[67] Severus, 10, 3 ; C. I. L., VIII, 7062 ; III, 4037 ; cf. Tillemont, Sévère, art. 20 ; Hirschfeld, p. 476-9. De Ceuleneer, p. 93, le fait passer par Rome et le Simplon.
[68] Il est probable que les deux rivaux cherchèrent tous deux à s’installer d’abord à Lyon. Albinus y arriva le premier. Son armée partit de là à la rencontre de celle de Sévère, arrivant, je crois, par Besançon, Chalon, Tournus. Il a dû y avoir sur cette ligne différentes rencontres (Hérodien, III, 7, 2, d’abord favorables à Albinus (Albinus, 9, 1 ; Severus, 10, 7 ; 11, 2 ; Dion, LXXV, 6, 2), puis une première bataille, malheureuse pour celui-ci, près de Tournus (opud Tinurtium, Severus, 11, 1). Battu, Albinus se replia sur Lyon, suivi par Septime.
[69] La bataille eut lieu le 19 février (Severus, 11, 7), περί Λούγδουνον (Hérodien, III, 7, 2-6), πρός Λουγδούνω (Dion, LXXV, 6, 1), aput Lugdunum (Jérôme, a. d’Abr. 2221), à portée du Rhône et de la Saône (Dion, 7, 2), les gens d’Albinus bordés par endroits par un ravin profond (Dion, 6, 5). Comme, d’autre part, Albinus resta dans Lyon (Hérodien, III, 7, 2), que Sévère n’eut aucune peine à entrer dans la ville (pas d’indication de rivière à franchir), et qu’il dut arriver de Tournus par la route de la rive droite de la Saône, il me parait impossible de mettre la bataille dans la presqu’île du Confluent, et de ne pas la placer aux portes mêmes de Lyon, des deux côtés du bas-fond formé par l’Izeron, Francheville et Vaise. C’est une bataille sous les murs (cf. exercitus aput Lugudunum, C. I. L., VI, 1150), l’armée d’Albinus couvrant la ville en occupant le plateau de Sainte-Foy, Saint-Irénée et Loyasse, celle de Sévère arrivant par le seuil de Tassin et de La Demi-Lune, et divisant ensuite son attaque, par la droite du côté de Saint-Irénée, par la gauche du côté de Loyasse, où elle faillit être précipitée dans le ravin (Dion : voyez les descentes vers l’Abattoir et vers Vaise). — La manière dont nous nous figurons la campagne et la bataille, est en complète opposition avec l’opinion courante, qui fait venir Sévère par la rive gauche, le fait se diriger sur les constructions des Trois Gaules au Confluent, et place le combat entre la Saône et le Rhône, de Rochetaillée à Neyron ; Ozanam, Arch. hist. et stat. du dép. du Rhône, IV, 1826, p. 107-111 ; Saint-Olive, Mém. de la Soc. litt. de Lyon (1861-2), 1863, p. 81-6 ; Révérend du Mesnil, Revue du Lyonnais, IIIe s., XII, 1871, p. 186-201 ; de Ceuleneer, p. 101 ; Allmer, Musée, II, p. 239 ; Steyert, I, p. 426 et s ; etc. — Notre opinion se rapproche de celle de Paradin, qui plaçait la bataille à Saint-Just, Mémoires de l’histoire de Lyon, 1573, p. 47 ; de même, Jolibois, Revue du Lyonnais, XXIII, 1846, p. 111-118 ; etc.
[70] Il s’était réfugié ές οίκίαν τινά πρός τώ 'Ροδανώ (Dion, LXXV, 7, 3 ; cf. Albinus, 9, 3), sans doute dans l’enceinte de la ville, du côté du pont d’Ainay.
[71] Hérodien, III, 7, 7.
[72] Severus, 12, 1 et 3 ; Hérodien, III, 8, 2.
[73] C. I. L., II, 4114 ; Severus, 12, 1 et 3 ; Hérodien, III, 7, 1.
[74] La cohorte urbaine de Lyon fut remplacée par un détachement des quatre lugions du Rhin (Revue des Ét. anc., 1913, p. 137), ce qui put paraître à Lyon et à la Gaule la fin d’un privilège.
[75] Imperator vere nominis sui, Hist. Auguste, Severus, 14, 13.
[76] Voyez la suite chronologique de ses voyages.
[77] Cela résulte du silence des auteurs.
[78] Dion, LXXVI, 13.
[79] Severus, 19, 1. Le mur qu’il construisit en Bretagne, maximum ejus imperii decus (18, 2), fut, dit-on, la transformation en mur de pierre du mur de terre dû à Hadrien ; mais j’incline à croire, contrairement à l’opinion des archéologues anglais (cf. Sagot, p. 171-3), qu’il maintint aussi celui d’Antonin et une zone fortifiée entre les deux, et peut-être même, au delà du mur d’Antonin, poussa-t-il la frontière jusqu’au pied des Grampians. Mais tout cela dut être abandonné immédiatement après lui.
[80] Severus, 10, 6 ; 19, 2 et 3.
[81] Severus, 17, 1 : (Christianos) fieri sub gravi pœna vetuit. On a avancé la date jusqu’en 201 (Wirth, p. 32-4 ; etc.). — Cf. Aubé, Les Chrétiens dans l’Empire romain de la fin des Antonins au milieu du troisième siècle, 1881, p. 70 et s. ; Neumann, Der rœmische Staat und die allgemeine Kirche, I, 1890, p. 96 et s. ; Allard, Histoire des persécutions pendant la première moitié du troisième siècle, 3e éd., 1905, p. 57 et s.
[82] On peut supposer qu’il est mort entre 200 et 210, âgé de 60 à 80 ans ; plus de précision m’a paru impossible. Une tradition le faisait mourir du martyre (Jérôme, In Isaiam, XVII, 64, Migne, P. L., XXIV, c. 623 ; Grégoire de Tours, In gl. mart., 49 ; Martyrol. Hieron., p. 83, de Rossi et Duchesne ; Martyrologe d’Adon, Migne, P. L., CXXIII, c. 288). Mais on rattachait ce martyre à celui des morts de 177 (Hist. Francorum, I, 29), ce qui est manifestement ridicule, et d’autre part Eusèbe, si bien informé sur Irénée et si préoccupé de lui, ne parle pas de son supplice. Il n’est évidemment pas une chose impossible : c’est tout ce qu’on peut dire. Cf. Allard, p. 167-170. — Au temps de Grégoire, on montrait sa tombe dans la crypte de Saint-Jean [aujourd’hui Saint-Irénée] à Lyon, sous l’autel, entre celles d’Alexandre et d’Épipode (In gl. mart., 49). — On attribue également à Septime le martyre de saint Andéol à Bergoiate (Bourg-Saint-Andéol) près de Viviers : les Actes sont sans autorité (1er mai, Acta, I, p. 39 ; Tillemont, Mém., III, p. 636). Il y avait là un sanctuaire fameux de Mithra (C. I. L., XII, 2706 ; Espérandieu, n° 422), et il est probable qu’un lien a existé entre ce sanctuaire et le martyre, soit qu’Andéol ait voulu combattre ce culte et provoqué par là son supplice, soit que les Chrétiens des générations suivantes aient placé là son histoire par souvenir du mithræum ; cf. Cumont, Textes, II, 1896, p. 402. — S’il faut accepter leur martyre, c’est vers ce temps que je placerais celui du groupe des saints de la mission d’Irénée, y compris et surtout saint Symphorien, qu’on peut supposer baptisé à trois ans en 185, mort à vingt ans en 202.
[83] Il faut ajouter, pour cette époque, le renouveau du culte d’Apollonius de Tyane, mort vers 97 (Dion, LXXVII, 18, 4 ; Alex., 29, 2 ; Vie d’Apollonius, par Philostrate, 1, 3). Mais je ne saurais évaluer son degré de popularité en Gaule.
[84] C. I. L., XII, 4323 (à Narbonne au nom de la province) ; 1745 (à Valence) ; XIII, 1753-5, 1766 (à Lyon) ; XII, 1827 ? (à Vienne) ; Revue épigr., n° 735 (à Die) ; Année épigr., 1889, n° 83 (à Aulnay). — Peut-être est-ce la multiplication de ces tauroboles et de ces sacrifices pro salute du prince et de sa maison, qui explique les manifestations propagandistes des Chrétiens et la persécution qui en fut le contrecoup. Quoique nous n’ayons là-dessus aucun texte contemporain pour la Gaule, il est impossible que le Christianisme et la Mère des Dieux, celle-ci devenue une divinité du loyalisme impérial, n’aient pas été alors en lutte déclarée.
[85] Cf. Réville, La Religion à Rome sous les Sévères, p. 190 et s.
[86] Ulpien, Digeste, XXII, 1, 14, pr. ; Ulpien, XXII, 6.
[87] Gallico sermone, Hist. Auguste, Alex., 60, 6.
[88] Tertullien, Apologétique, 24 ; Ad nat., 2, 8 ; Hérodien, VIII, 3, 8 ; Hist. Auguste, Max., 22, 1-2 ; Ausone, Professores, 5, 9 ; 11, 24.
[89] Mulier Dryas, Alex., 60, 6. — Toutain, Mélanges Boissier, p. 439-442.
[90] Ici, ch. I, § 2 ; ch. VI, § 7 et 8.
[91] Sauf l’extension possible du jus Latii sous Vespasien (douteuse en Gaule) et sous Hadrien, lequel a été plus libéral que ses prédécesseurs. Les gentilices Flavius et Ælius sont plus fréquents en Gaule que ceux de Cocceius, Ulpius. Mais ni les uns ni les autres ne peuvent être comparés, à cet égard, à ceux de Julius, Claudius, des empereurs précédents, ou d’Aurelius, donné par Marc-Aurèle et ses successeurs.
[92] Marcus, 21, 6-8 ; Dion, LV, 24, 4.
[93] Pensées, I, 14.
[94] Création de trois légions (Dion, LV, 24, 4), entrée de tous les provinciaux dans la garde prétorienne (LXXIV, 2, 4-5).
[95] Dion, LXXXVII, 9, 5 ; cf. LII, 19, 6 ; Ulpien, Digeste, I, 5, 17 ; Histoire Auguste, Severus, 1, 2 ; papyrus de Giessen (Mitteis et Wilcken, Grundzüge, II, p. 288-9 et n° 377).
[96] Dion, LXXVII, 9, 5. — Il y eut d’ailleurs un lien, j’en suis convaincu, entre cette loi et la réglementation du XXe sur les successions. Dion, qui est un contemporain, le dit trop nettement. Et il est possible que ceux qui furent exclus de la cité, rentrassent dans la catégorie de ceux qui étaient exempts de l’impôt, ce qui explique le λόγω μέν τιμών de l’historien grec.
[97] Cf. Tillemont, Caracalla, art. 1.
[98] Hist. Auguste, Caracalla, 1-2 ; Dion, LXXVII, 11, 4.
[99] Il ne faut pas oublier que Septime a été lui-même un élève des jurisconsultes (H. Auguste, Car., 8, 3).
[100] De Syrie ? Mort en 212. Élève de Scævola en même temps que Septime Sévère (Car., 8, 2-3).
[101] Assesseur de Papinien (H. Auguste, Pesc., 7, 4) ; a vécu jusque sous Alexandre (Alex., 68, 1).
[102] D’origine africaine. Macrinus, 13, 1.
[103] De Tyr. Assesseur de Papinien (Pesc., 7, 4) ; mort en 228.
[104] Cf. Krüger, Geschichte der Quellen, 1888, p. 197 et s.
[105] Hypothèses d’après les traces qui se rencontrent, après l’édit, de non citoyens ; cf. Mommsen, Ges. Schr., V, p. 418-9 : Mitteis et Wilcken, II. p. 288-9. — Voyez aussi sur l’édit : Haubold, Opuscula, II, p. 369-386 (écrit en 1819], qui a bien soupçonné qu’il excluait certaines catégories : Mitteis, Reichsrecht und Volksrecht, 1891, p. 159 et s. — J’ajoute qu’en ce qui concerne les cités, Sévère et Caracalla ont répandu le privilège du jus Italicum, et que c’est peut-être d’eux que le reçurent Lyon, Vienne et Cologne.
[106] Ch. IX, § 3 et 4.
[107] Ch. VI, § 12.
[108] Ch. I, § 1.
[109] Belley, Mémoires de l’Académie des Inscriptions, XIX, 1753, p. 495 et s. ; Bourquelot, De la Transformation des noms, etc. (Mém. de la Soc. des Antiquaires, XXIII, 1857) ; Kornemann, Zur Stadtentsteltung, 1898, p. 69 et s. ; Hirschfeld, Sitzungsberichte de l’Académie de Berlin, phil.-hist. Classe, 1907, IX, p. 193 et s.
[110] Sauf de rares exceptions : en Narbonnaise, pour les Tricastins.
[111] Strabon, IV, 3, 5 ; Ptolémée, II, 8, 10.
[112] Julien, Misopogon, p. 310, Sp. (qui prouve qu’au milieu du quatrième siècle le nom était encore courant chez les indigènes) ; Ammien, XV, 11, 3 ; etc.
[113] Avec cette remarque, qu’on ajoute d’ordinaire civitas dans les textes épigraphiques des bornes milliaires pour bien marquer la ville chef-lieu. — Le plus ancien texte est l’inscription d’une borne milliaire, C. I. L., XIII, 8974 (entre 305 et 307) ; Ammien, XV, 1, 3. XVII, 2, 4 ; 8, 1 ; XX, 1, 1 ; etc.
[114] Notice des Gaules, 4, 8 (je cite la numérotation de Seeck de préférence à celle de Mommsen) ; Notifia Dignitatum, Occ., 42, 23. Cf. Holder, II, c. 934 et s.
[115] En partant de la liste de la fin du chapitre II, en négligeant les noms qui ne furent pas ceux de civitates, et en tenant compte de l’état des noms au temps de la Notice, début du cinquième siècle. — Dans l’Aquitaine gauloise : Poitiers, Saintes, Bourges, Limoges, Arvarni [Clermont], Javols, Vellavi [l’ancien Ruessium, Saint-Paulien], Rodez, Cahors, Périgueux. — En Lyonnaise : Lisieux, Vannes, Avranches, Mantes, Chartres, Sens, Ædui, Évreux, Le Mans, Meaux, Paris, Troyes, Angers, Vieux [manque dans la Notice], Bayeux, Ossismi, Corseul, Jublains, Rennes, Tours, Séez [civitas Saiorum, C. I. L., XIII, 630 ; cf. Not., 2, 6, autrefois les Esuvii]. — En Belgique : Morini [Thérouanne], Amiens, Beauvais, Arras, Nervii [Bavai], Vetmand, Soissons, Senlis, Tongres, Trèves, Langres, Reims, Metz. — Je comprends dans ce chiffre Clermont, Augustonemetum, qui s’est appelé Arverni dès les premiers temps de la réforme (Ammien, XV, 11, 13) et ne prit son nom actuel qu’au Moyen Age. Peu de noms se sont du reste aussi complètement oubliés que celui d’Augustonemetum, et cela ne laisse pas que d’être étrange. — J’hésite à parler de l’aquitaine ibérique ou Novempopulanie (Notice, 14) : car Eauze (Elusa), Lectoure (Lactora), Oloron (Iluro), Béarn ou Lescar (Benearnum), lire (Aturus ?), peuvent avoir été, dès l’origine, à la fois noms de villes et noms de peuplades (ou, plutôt, de tribus). Les faits les plus caractéristiques de la prédominance des noms de nations dans cette Aquitaine sont : Auch, Ausci, au lieu d’Iliberris, Bazas, Basates, au lieu de Cossio, Cossium (Ptolémée, II, 7, 11) ; ajoutez les villes de Boii, Convenæ (Saint-Bertrand-de-Comminges, autrefois Lugdunum), Consoranni (Saint-Lizier en Conserans). — Dans les Alpes, peut-être parce qu’elles reçurent de bonne heure le jus Latii, le nom de la peuplade s’est souvent effacé devant celui de la ville (Cimiez, Vence, Embrun, Briançon, Senez, Castellane [civitas Soliniensium dans la Notice]), et, moins souvent, a chassé ce dernier (chez les Brigiani, Briançonnet, C. I. L., XII, p. 8 ; Seduni, Sion, C. I. L., XII, 136 ; Caturiges, Chorges).
[116] Remarquez que, pour Trèves, l’usage d’appeler la ville Treveri est très ancien : on peut le constater dès Tacite.
[117] Bellovaci succédant à Cæsaromagus.
[118] Remi succédant à Durocortorum.
[119] Lemovices succédant à Augustoritum.
[120] Carnutes succédant à Autricum, qui semble, au préjudice de Genabum, avoir été leur métropole sous l’Empire (Ptolémée, II, 8, 10 ; Notæ Tiron., t. 86, 98, Schmitz).
[121] Civitas Rotomagensium (Notice, 2, 2 ; Ammien, XV, 11, 12), qui succède à civitas Veliocassium (Ptolémée, II, 8, 7).
[122] Civitas Burdegalensium (Notice, 13, 2 ; Ammien, XV, 11, 13), qui succède à civitas Biturigum Viviscorum (Strabon, IV, 2, 1 ; C. I. L., XIII, 566).
[123] Civitas Vesontiensium (Notice, 9, 2), qui succède à civitas Sequanorum. La chute du nom de Sequani dans la vie de la civitas, s’explique parce qu’il s’est appliqué à la province de Sequania ou Maxima Sequanorum.
[124] L’expression de Tribocus, civitas Tribocorum, appliquée peut-être à Brumath, Brocomagus, la métropole, semble attestée en 249-251 (C. I. L., XIII, 9097-8). Le transfert de la métropole à Argentorate, Strasbourg, ne doit pas être postérieur de plus d’un siècle à cette date, et c’est ce transfert qui a fait changer le nom de la cité en civitas Argentoratensis (cf. Ammien, XV, 11, 8, où il semble bien qu’Argentoratus soit là comme nom de cité ; Notice, 7, 3). La prééminence de Strasbourg dans la cité et le peu d’importance des Triboques expliquent aisément ces substitutions.
[125] Encore, pour cette ville, la Notice maintient-elle, à côté de son nom de Tullum, qui subsistera, celui de Leuci (civitas Leucorum Tullo, 5, 3).
[126] Avenches chez les Helvètes (Ammien, XV, 11, 12), et encore la Notice maintient-elle, à côté de son nom de Aventicum, celui de Helvetii (civitas Elvitiorum Aventicus, 9, 4). — De même, Dax, Aquæ Augustæ, chez les anciens Tarbelli (civitas Aquensium, Notice, 14, 3) ; Tarbes, Turba, chez les Begerri (Not., 14, 11). — Feurs, Forum Segusiavorum, civitas sur laquelle nous sommes fort mal renseignés.
[127] Cf. tome V.
[128] Hirschfeld (p. 199) suppose un édit de ce genre sous Constantin. À l’admettre, je croirais plutôt sous Constance Chlore ; cf. Panegyrici, VIII [V, 2e éd.], 14.
[129] Premier exemple connu, le milliaire de Redones, Rennes, en 237 (C. I. L., XIII, 8953 ; cf. 8954). Ensuite, toujours sur des milliaires : en 243, Limoges, Lemovices (8911) ; sous Victorinus, Reims, Remi (9040) ; sous Tetricus, Poitiers, Pictones (8927-8) ; sous Maximin César, 305-7, Paris, Parisii (8974) ; etc.
[130] Sur des milliaires, et, par suite, en contradiction avec les documents précédents (n. précédente) : sous Tacite, Poitiers est appelé sur les bornes Limonum (8928) ; sous Tétricus, Langres, Andemantunnum (9041) ; sous Aurélien, Vannes, Darioritum (8997) ; sous Maximin César, Amiens, Samarobriva (9032) ; etc. — Dans un texte de droit, en 291, Reims, Dorocortorum (Fragm. Vaticana, 315). — Autres hésitations, dans la Notice.
[131] Par exemple à Autun, la ville et la cité paraissent s’être appelées officiellement Ædui depuis Constance Chlore jusque vers 400 (Panegyrici, V [VIII], 21 ; VIII [V], 4 et 14 ; Notice, 1, 4), sans que le nom de Augusiodunum disparaisse (Concile de 314, Mansi, II, c. 476 ; Concile de 346, II, c. 1771 ; Ammien, XV, 11, 11 ; etc.). Celui-ci prit ensuite le dessus, mais seulement à l’époque mérovingienne. — De même à Agen, le nom officiel est, sous Dioclétien, civitas Nitiobrogum (C. I. L., XIII, 8886) et redevient ensuite (Notice, 13, 3) civitas Agennensium. — Autres retours, mais postérieurs, du nom de la ville : à Worms, Borbitomagus, que le Concile de Cologne en 346 (Mansi, II, c. 1771) et la Notice appellent civitas Vangionum (7, 5) ; à Thérouanne, Tarvenna, civitas Morinorum dans la Notice (6, 12) ; à Toul et à Avenches. — Bavai, Bagacum, semble s’être appelé Nervii en 346 (Concile de Cologne, Mansi, II, c. 1771) et avoir repris son nom lors du transfert du chef-lieu des Nerviens (devenus civitas Camaracensium) à Cambrai (Notice des Gaules, 6, 7).
[132] A vrai dire, appeler le chef-lieu d’une civitas du nom de la civitas, est une chose que César lui-même avait faite en parlant de l’oppidum des Sotiates et de celui des Aduatiques sans les nommer. Il est du reste à remarquer qu’il fait cela, non pour les grandes, mais pour les petites peuplades, les tribus à proprement parler. — Nous aurions pu constater, dans les pagi des civitates, le même dualisme onomastique entre chef-lieu de pagus et pagus par exemple, Mandubii et Alesia. Mais ce dualisme a disparu de très bonne heure : souvent au profit du chef-lieu (Alesia, Alise) ; souvent, surtout dans le Midi aquitain, au profit de la tribu : Sotiates, qui devient Sos ; Boii, qui désigne le chef-lieu de ce peuple (Itin. Antonin, p. 456, 4, W.) ; etc. — Que même pour les grandes cités, et bien avant le IIIe siècle, l’usage se soit souvent répandu d’appeler la capitale du nom de la civitas, c’est ce que montre l’exemple de Trèves.
[133] H. Auguste, Sept. Severus, 24, 1.
[134] M. Aurelius Severus Antoninus, Cæsar en 196, sans doute à la fin de l’année, Augustus en 198. — Son frère Geta, L. ou P. Septimius Geta, Cæsar en 198, Augustus en 208 ou 209 (cf. Prosop., III, p. 207), est tué au début de 212.
[135] Carac., 5, 1-3 : Cunctis turbatis qui in Gallia res regebant... multa contra homines et contra jura civitatum fecisset ; une note plus favorable sur ce séjour, chez Philostrate, Vies des sophistes, II, 32. — J’avais pensé due cela se rapportait aux nouvelles dénominations, ou encore à des suppressions ou des dédoublements de cités, par exemple Génabum constitué en chef-lieu sous le nom de Aureliani : mais la première réforme se fit si lentement ! et la seconde m’a paru bien postérieure. Contra jura ne désignerait donc que des violences momentanées. Toutefois, on peut supposer qu’Orléans lui dut au moins son nom, Caracalla aimant à donner son nom aux villes (Dion, LXXVII, 13, 4). — Une mesure peut-être contre Marseille.
[136] Imp. Cæsar M. Opellius Severus Macrinus Augustus ; s’associa son fils M. Opellius Diadumenianus.
[137] Imp. Cæsar M. Aurelius Antoninus Augustus.
[138] Voyez, dans l’Histoire Auguste, Lampride, Heliogabalus.
[139] Au delà du haut Danube et jusqu’au Mein contre les Alamans, nom qui apparaît alors pour la première fois : en 213 (Dion, LXXVII, 13-14 ; Victor, Cæsares, 21, 2). Au delà du Rhin contre les Chattes : en 213 également (Dion, LXXVII, 14, 2). Il reçut des ambassades des Chauques ou Saxons de l’Elbe inférieur (Dion, LXXVII, 14, 3). — Cf. C. Schneider, Beiträge zur Geschichte Caracallas, Marbourg, 1893, p. 18-25 ; von Rohden, Real-Enc., II, c. 2446-7.
[140] Cf. tome V.
[141] Caracalla fut un grand fondateur de villes (Dion, LXXVII, 13, 4). Pour Septime : Severus, 23, 1 ; Dion, LXXVI, 16, 3.
[142] Voyez les thermes de Caracalla à Rome (H. Auguste, Severus, 21, 11) ; à Bordeaux, peut-être, le temple ou les Piliers de Tutelle (cf. C. I. L., XIII, 584 ; tome V) ; à Paris, peut-être l’édifice dit des Thermes de Cluny (de Pachtère, p. 85 et s.) ; etc.
[143] Callistrate, Digeste, L, 6, 6 [5], 12. Cf. Waltzing, II, p. 406 et 253-4.
[144] Cf. Waltzing, II, p. 253-254.
[145] Sous Septime : route de Nyon à Avenches (C. I. L., XIII, 9066-7) ; autour de Soissons (9025, 9031, 9033) ; autour de Bayeux (8979-81). Sous Caracalla : surtout en Belgique, en Suisse et dans les pays du Rhin (XIII, 9028, 9061, 9068, 9072, 9112, 9116, 9129) ; route de Vence à Riez (XII, p. 6334). Sous Héliogabale, en Germanie Supérieure (XIII, 9104, 9114-5, 9117, 9138 ; XII, 5537). Sous Alexandre, autour de Poitiers et en Germanie Supérieure (XIII, 8935 et 8937, 9113, 9118).
[146] La Table de Peutinger (fac-similé de la partie de la Gaule dans Rev. des Ét. anc., 1912, fasc. 1) et l’Itinéraire Antonin (éd. Parthey et Pinder, 1848, donnant aux villes leurs noms anciens (p. 526-530) et comptant par lieues, doivent se placer après Septime et avant 237. D’ailleurs, le nom d’Antonin annonce un prince de cette époque, et surtout Caracalla. En outre, c’est surtout alors qu’on a répare les routes. Et, enfin, je ne conçois pas un travail viographique d’ensemble dans la période qui suit la mort d’Alexandre. — Dans d’autres sens, cf. les résumés de Schanz, Gesch. der rœm. Litt., II, I, 2e éd., 1899, p. 287-8 ; IV, I, 1904, p. 103-5.
[147] Lorsque son père Septime était gouverneur de la Lyonnaise, le 4 avril 186 (on a aussi dit 188) ; Aurelius Victor, Epit., 21, 1 ; Dion, LXXVIII, 6, 3 : cf. Wirth, p. 19 ; Prosop., III, p. 203.
[148] Dion, LXXVIII, 3, 3 ; H. Auguste, Severus, 21, 11 ; Car., 9,7 ; etc.
[149] Cf. XII, 1745 ; XIII, 1752-4, 1766, 4132, 5621, 5681-2, 5970 ; Revue des Ét. anc., 1913, p. 187 ; etc.
[150] A Cavaillon, C. I. L., XII, 5828.
[151] A Vence, XII, 8 ; à Aime, XII, 108 ; à Narbonne, XII, 4348.
[152] Cf. Hist. Auguste, Macrin, 3.
[153] Je parle de la Gaule. J’hésite fort à placer sous Caracalla les martyres des soi disant disciples d’Irénée à Valence et Besançon (Martyr. Hieron., p. 47, 116, éd. de Rossi et Duchesne ; Grégoire, In gl. mart., 70). En tout cas, ce reste de feu s’éteignit bientôt et ne passa pas apparemment l’an 211 ; Tillemont, Hist., Perséc. sous Sévère, art. 7.
[154] Je tire cette hypothèse du fait qu’Ulpien, lequel fut préfet du prétoire de 222 à 228, avait réuni en code tous les édits contre les Chrétiens (Lactance, Inst. div., V, 11, 19).
[155] D’ailleurs, il ne prit point d’ordinaire ce titre d’Antonin, mais il semble bien qu’on ait voulu le lui donner (Alex., 5, 3 ; cf. Prosop., I, p. 215) ; Imp. Cæsar M. Aurelius Severus Alexander Augustus.
[156] H. Auguste, Alex., 3, 4-5 ; etc.
[157] Leges innumeras sanxit (Alex., 43, 1). Cf. Goyau, Chronologie de l’Empire romain, 1891, p. 272-280.
[158] Alex., 33, 2.
[159] Ibidem : Corpora constituit... omnino omnium artium.
[160] Cf. Waltzing, II, p. 254 ; Kornemann, Real-Enc., IV, c. 451-2. Ici, ch. X.
[161] Alex., 43, 6 ; 29, 2.
[162] Christianos esse passus est ; Alex., 22, 4.
[163] D’après Alex., 49, 6.
[164] Il est fort possible qu’il ait franchi le Rhin (Hérodien, VI, 7, 6 ; Cohen, 2e éd., p. 483, n° 16).
[165] Ou le 19 (on a proposé bien d’autres dates) ; au lieu de Mayence, in vico cui Sicilia [?] nomen est, qu’on ne peut guère placer que près de Mayence (Hérodien, VI, 8-9 ; Orose, VII, 18, 8 ; Alex., 59, 6 ; 60, 1 ; Jérôme et Eusèbe, a. d’Abr. 2252, p. 178-9, Schœne ; etc.). Thiele, De Severo Alexandro, 1909, p. 107-109.
[166] Suite des gouverneurs (dernière note du chapitre précédent).
I. Narbonnaise. — Sous Commode. L. Fabius Cilo Sepliminus Calinius Acilianus Lepidus Fulcinianus (C. I. L., VI, 1408-9). — Caracalla Narbonensem proconsulem occidit en 213 (Carac., 5, 1). — Au plus tard en 217 ...nus Acontianus Lucius Ranius Oplatus (C. I. L., XII, 3170). — Sous Caracalla ou peu après. C. Emilius Berenicianus Maximus (C. I. L., XII, 3163). — Vers le même temps. M. Clodius Pupienus Maximus, le futur empereur (Balb., 5, 8). — Alexandre. Julianus (Code Just., IX, 9, 4). — Alexandre ? Tiberius Claudius Paulinus (Eph. epigr., IX, 1012).
II. Lyonnaise. — Vers 185-7. Septime Sévère (Severus, 3, 8 et 9 ; 4, 1 ; Pesc., 3, 3-5 ; Dion, LXXIV, 3, 2). — 196-8. T. Flavius Secundus Philippianus (C. I. L., XIII, 1673). — 208 ? Q. Hedius Rufus Lollianus Centianus, censitor provinciæ Lugdunensis, consulaire (II, 4121). — Alexandre. Tiberius Claudius Paulinus (XIII, 3162). — Fin d’Alexandre. M. Ædinius Julianus (XIII, 3162).
III. Aquitaine. — Vers 193 ? 31. Valerius Bradua Mauricus, censitor provinciæ Aquitanicæ, consulaire (V, 7783). — Date très incertaine. M. Censorius Paullus (XIII, 1129). — Même remarque. M. Juvenlius Secundus Rixa Postumius Pansa Valerianus Severus (V, 4335). — Même remarque ....Fidus A.... Gallus Pace... (III, 1803). — Même remarque. ?? (II, 3788).
IV. Belgique. — Commode ? C. Sabucius Major Cæcilianus (VI, 1509). — Vers 197, sous Sévère. L. Marius Maximus Perpetuus Aurelianus (VI, 1450). — Alexandre ? T. Clodius Pupienus Pulcher Maximus, electus judicio sacro ad [census] acceptandos per provinciam Velgicam, non consulaire (XIV, 3593).
V. Germanie Supérieure. — Sous Commode. Inconnu (peut-être en Germanie Inférieure ; VI, 1546). — 187. M. Helvius Clemens Dextrianus (Rœm.-Germ. Korr., 1912, p. 2). — Septime Sévère. Ragonius Celsus, à placer peut-être en Germanie Inférieure ou même en Lyonnaise (Hist. Auguste, Pesc. Niger, 3, 9). — ?? (L. ?) Junius Victorinus (C. I. L., XIII, 6638). — Vers 200 ? P. Cornelius An[ullin]us (XIII, 6542-3). — 209-211. Q. Ajacius Modestus Crescenlianus (XIII, 7417). — 213. Q. Junius... Quintianus (XIII, 6754). — 213. ...r. Avitus (XIII, 6762). — Vers le même temps. T. Statilius Barbarus (VI, 1522). — Vers le même temps. C. Cæsonius Macer Rufinianus (XIV, 3900). — 217. Ci... Eignatianus ? (XIII, 67461. — Date très incertaine ... Julianus (XIII, 5974). — Sous Macrin ou même sous Philippe ? Q. Cæcilius Pudens (XIII. 6562). — ?? Claudius Ælius Pollio (XIII, 6807). — Après 230. Sex. Catius Clementinus Priscilianus (XIII, 6608). — Alexandre ? M. Clodius Pupienus Maximus, le futur empereur (peut-être en Germanie Inférieure ; H. Auguste, Balb., 5, 9).
VI. Germanie Inférieure. — 181 ? M. Didius Severus Julianus (Jul., 1, 9 ; VI, 1401). — En 185-8 ? Albinus. — Entre 196-8. C. Valerius Pudens (C. I. L., XIII, 8824). — Entre 198-209. L. Marius Maximus Perpetuus Aurelianus (C. I. L., VI, 1459-1). — En 205. Q. Venidius Rufus Marius Maximus Lucius Calvinianus (XIII, 8825, 8828). — Un inconnu (XIII, 8048-9). — Caracalla ou après. M. Valerius Senecio, præses provinciæ Germaniæ Inferioris (VIII, 2750-1). — 211. L. Lucceius Martinus (XIII, 8201). — 218. Inconnu (XIII, 7800). — Macrin. Claudius Marcius Agrippa ? (XIII, 7798). — Dale très incertaine. L. Domitius Gallicanus Papinianus (II, 4115). — 222-3. T. Flavius Aper Commodianus (XIII, 8035, 8607). — 231. Flavius Titianus (XIII, 8017). — Date et qualité incertaines. Q. Tarquitius Catulus (XIII, 8170). — En 234-5 ? C. Furius Sabinius Aquila Timesitheus, procurator ... vice præsidis (XIII, 1807).
VII. Alpes Maritimes. — Date incertaine. C. Junius Flavianus (C. I. L., VI, 1620). — Sévère ou Caracalla ? Tiberius Claudius Demetrius (V, 7870). — 213. Julius Monoratus, procurator et præses (C. I. L., XII, 7, 5430-2). — Vers 215 ?..., procurator et præses Alpium Cottiarum et Maritimarum (III, 6075). — Même époque. L. Titinius Clodianus, præses et proc. (VIII, 8328).
VIII. Alpes Cottiennes. — Sévère. C. Julius Pacatianus (XII, 1856). — Vers 215 (voir au § 7). — ?? ..., proc, et præses (VI, 1642). — ??? (VI, 1643), peut-être dans une autre province alpestre.
IX. Alpes Grées et Pennines. — Commode ou Marc-Aurèle ? T. Cornasidius Sabinus, procurator Alpium Atractianarum et Pœninarum jure gladii (IX, 5439) ; cf. legatus at prætenturam Italiæ et Alpium sous Marc-Aurèle (Année épigr., 1893, n° 88). Les nécessités de la défense des cols alpestres ont pu amener alors un nouveau groupement de ces provinces.
Pour la suite de la liste, voir la dernière note du chapitre XIV. — Voyez aussi les incertains de la précédente liste (dernière note du chapitre XII).