I Au retour de l'île d'Elbe, l'empereur n'avait plus trouvé sous les drapeaux que 200.000 hommes environ[1]. S'il se fût senti la toute-puissance de naguère, il eût recouru, pour doubler l'armée, à une levée extraordinaire sur les classes de 1806 à 1814, au rappel de la classe de 1815 et à l'appel anticipé de la classe de 1816. Mais il hésitait, à peine ayant repris la couronne, devant une mesure aussi impopulaire que le rétablissement de la conscription abolie par Louis XVIII. Il avait donc pour seules ressources la rentrée dans les corps des soldats en congé limité et illimité et le rappel des nombreux déserteurs portés sur les états de situation comme absents sans permission. Les hommes en congé de semestre s'élevaient à 32.800[2], les déserteurs à 85.000[3]. On pouvait compter sur la presque totalité des semestriers ; déjà même trois ou quatre mille avaient rejoint les dépôts, conformément à l'ordonnance royale du 9 mars[4]. Mais parmi les 85.000 absents sans permission il fallait admettre qu'il y aurait beaucoup d'insoumis et aussi beaucoup d'hommes susceptibles de recevoir aux revues d'appel des congés définitifs, soit pour infirmités, soit comme soutiens de famille. Le maréchal Davout, ministre de la Guerre, estimait que le rappel des militaires de toute catégorie donnerait à peine 59.000 soldats[5]. Le décret d'appel, préparé dès le 28 mars[6], ne fut rendu public que le 9 avril. Il y avait à ce retardement des raisons d'ordre politique. L'empereur, qui s'efforçait alors par tous les moyens d'entrer en négociations avec les puissances pour le maintien de la paix, craignait que la mise de l'armée sur le pied de guerre ne démentit ses protestations pacifiques. Vis-à-vis de la population française qui désirait si ardemment la paix, il se sentait contraint aux mêmes ménagements. L'Ouest s'agitait, le Midi prenait les armes ; dans le reste de la France, les royalistes travaillaient à détruire la popularité de l'empereur en prédisant la guerre. Ce n'était pas le moment d'alarmer, de mécontenter tout le pays par l'appel des réserves. Au reste, Napoléon conservait encore une lueur d'espoir qu'il n'y aurait pas rupture avec l'Europe[7]. Cette espérance illusoire diminuant d'heure en heure, il se décida à faire paraître le décret dans le Moniteur du 9 avril. Comme il le prévoyait, ce décret porta un coup à l'opinion. En quelques jours, la rente baissa de huit francs. La tristesse et l'abattement dominaient dans les campagnes. Les paysans, fort heureux en général de n'avoir plus à subir les vexations des hobereaux ni à redouter le rétablissement des privilèges et la reprise des biens d'émigrés, sentaient s'affaiblir leurs sentiments pour l'empereur à la pensée que son retour allait amener, sinon peut-être une seconde invasion, du moins une guerre sans fin. En raison du temps nécessaire à la transmission des ordres, à l'affichage, aux délais légaux, les revues d'appel commencèrent seulement le 25 avril[8]. L'opinion était si réfractaire à l'idée de guerre que parmi les rappelés eux-mêmes, tous cependant anciens soldats de Napoléon, beaucoup ne se présentèrent qu'afin de faire valoir des motifs d'exemption ou de réforme. Il est vrai que, si un grand nombre de ces hommes avaient déserté en 1814 pour ne pas porter la cocarde blanche, un plus grand nombre avaient quitté les corps par lassitude des armes. Depuis une année, ils avaient repris les travaux des champs et des ateliers, beaucoup d'entre eux s'étaient mariés ; ils se trouvaient moins disposés encore à servir. Dans les départements à esprit royaliste, où les rappelés se sentaient soutenus par la population, les séances d'examen furent tumultueuses. On criait : Nous ne partirons pas. Vive le Roi ![9] Craignant une insurrection dans l'Ouest, l'empereur autorisa plusieurs préfets de cette région à appliquer le décret avec de grands ménagements et même à en suspendre l'exécution[10]. Malgré tout, la levée donna 17.000 hommes de plus que ne l'avait présumé Davout, peu enclin aux illusions[11]. Dans les premiers jours de juin, 52.446 rappelés avaient été incorporés, et 23.448 étaient en route pour rejoindre[12]. Les engagements volontaires, qui avaient été si rares pendant la campagne de France, s'élevèrent à environ 15.000. Une ordonnance royale du 31 décembre 1814 accordait à chaque enrôlé volontaire une prime de 50 francs ; l'empereur supprima cette allocation. Ce moyen, dit-il, ne peut s'allier avec les sentiments qui portent les Français à la défense de leur indépendance[13]. Pour provoquer les enrôlements, il pensa à faire lire par des officiers de la garde, avec accompagnement de tambours, des appels aux armes sur les places publiques, autour des ateliers et dans les villages. Mais Davout lui ayant représenté que ce serait du désordre inutile, il laissa là cet expédient renouvelé des sergents recruteurs du XVIIIe siècle[14]. Réduite à quelques bâtiments en état de prendre la mer, sans équipages — les deux tiers des matelots avaient été envoyés en congé — et sans approvisionnements[15], la flotte ne pouvait être employée que pour des croisières dans la Méditerranée[16]. Avec les hommes disponibles dans les ports et les inscrits maritimes à lever, l'empereur espérait constituer 50 à 60 bataillons de matelots[17]. On en forma à grand'peine une vingtaine[18], et, au milieu de juin, un seul avait été mis en route[19] ; il formait la garnison de Calais. Les trois régiments d'artillerie de la marine, d'un effectif réel de 5.284 hommes sous la Restauration, furent portés à environ 6.000 hommes par l'organisation d'un nouveau bataillon[20]. Six bataillons restèrent dans les ports dont ils devaient assurer la défense ; deux furent détachés à Paris, un vint à Lyon, un autre combattit en Bretagne dans la colonne mobile du général Bigarré[21]. Des trois régiments étrangers qui existaient sous Louis XVIII, l'empereur conserva le 2e (Isenberg) et le 3e (Irlandais), présentant ensemble 875 baïonnettes ; le 1er (La Tour d'Auvergne), resté fidèle au duc d'Angoulême pendant la courte campagne du Midi, fut dissous[22]. L'empereur eût désiré garder les quatre régiments suisses, mais l'opposition des officiers à prendre la cocarde tricolore imposa le licenciement de ces troupes[23]. On s'occupa d'organiser cinq nouveaux régiments étrangers : un de Polonais, vite constitué à 800 hommes, grâce aux soldats de l'ex-légion de la Vistule qui, bien que licenciés en 1814, n'étaient pas encore rapatriés ; un de Suisses où entrèrent 502 hommes des quatre régiments supprimés le 2 avril ; un d'Italiens, un d'Allemands et un de Hollando-Belges. Ces trois derniers devaient être formés avec les déserteurs des armées de Frimont, de Blücher et du prince d'Orange. Au commencement de juin, le régiment hollando-belge comptait 378 baïonnettes. On leva enfin dans la Gironde un bataillon d'hommes de couleur et quelques compagnies de réfugiés espagnols[24]. Le territoire étant menacé, les lois et décrets de 1791, de 1792, de '1805 et de 1813, qui n'avaient pas été abrogés, donnaient à l'empereur le droit d'augmenter l'armée par des gardes nationales mobilisées. Quelques jours après sa rentrée aux Tuileries, il s'occupa avec Davout et Carnot de la réorganisation de la garde nationale[25]. Il y avait alors dans toute la France 200.000 gardes nationaux, ou environ, âgés de vingt à soixante ans, et Carnot estimait que l'on en pourrait porter le nombre jusqu'à deux millions et demi[26]. Un décret, rendu le 10 avril, prescrivit que tous les citoyens susceptibles du service de la garde nationale seraient inscrits sur les contrôles pour être formés en bataillons[27]. L'empereur ne pensait pas à organiser une pareille multitude, mais il comptait y prendre un grand nombre de bataillons de mobilisés, composés uniquement d'hommes de vingt à quarante ans. Il se rappelait qu'à Fère-Champenoise, en 1814, les gardes nationales s'étaient battues comme de vieilles troupes. Par de nouveaux décrets, il ordonna la mobilisation de 326 bataillons, à 720 hommes chacun, qui devaient être incontinent dirigés sur les places frontières et les camps retranchés[28]. C'était remettre en vigueur le décret de la Législative du 11 juillet 1792, avec cette atténuation que, dans les bataillons de guerre, le remplacement était autorisé. On fixa la taxe de remplacement à la modique somme de 120 francs[29]. Dans une vingtaine de départements, nommément dans l'Ain, l'Aisne, l'Ardèche, les Ardennes, l'Aube, la, Côte-d'Or, l'Isère, le Jura, la Marne, la Meurthe, la Meuse, le Mont-Blanc, le Haut-Rhin, le Bas-Rhin, le Rhône, la Haute-Saône, Saône-et-Loire, Seine-et-Marne, Seine-et-Oise, les Vosges, l'Yonne, la levée s'opéra très facilement, les bataillons furent vite au complet, les mobilisés quittèrent famille et foyer aux cris de : Vive l'empereur ! avec l'enthousiasme de 1791[30]. Ceux des gardes qui purent le faire achetèrent leurs armes et leur uniforme. Mais le même patriotisme et la même bonne volonté n'animaient pas la France entière. Dans la moitié du pays, on put lever à peine, malgré l'emploi des garnisaires et des colonnes mobiles, le quart des contingents fixés. A la fin de mai, l'Orne avait fourni 107 gardes sur 2.160 demandés, le Pas-de-Calais 437 sur 7.440, le Gers 98 sur 1.440[31]. A Amiens, circulait cette proclamation : Qui a rappelé Buonaparte ? L'armée. Eh bien ! Qu'elle le défende. Ses ennemis sont nos amis. Ne nous armons pas pour défendre un homme que l'enfer a vomi[32]. En Vendée et en Bretagne, où l'on redoutait une insurrection, les gardes nationales ne furent point appelées ; mais quand la guerre civile commença, quelques milliers de citoyens prirent spontanément les armes et secondèrent la troupe contre les bandes royalistes, sans toutefois sortir de leur département[33]. Sur les 234.720 gardes nationaux appelés à l'activité par les décrets du 10 avril au 15 mai, 150.000 environ étaient le 15 juin réunis dans les places ou en marche pour les rejoindre[34]. Les cadres des bataillons étaient formés pour un tiers par des officiers à la demi-solde et pour le reste par l'élément civil. L'empereur n'avait point voulu mettre les grades à l'élection. Il nommait les officiers sur des listes établies dans chaque département par un comité composé du préfet, d'un conseiller général, de deux généraux et d'un officier supérieur[35]. Presque tous les gardes nationaux paraissaient non point seulement résignés à faire leur devoir mais bien déterminés à le faire de bon cœur. Ils manœuvraient de leur mieux, se pliaient docilement à la discipline, entraient dans les villes avec des branches de lilas aux canons des fusils, en chantant la Marseillaise et en terminant chaque couplet par les cris : Vive la Nation ! Vive l'empereur ! S'il s'élevait parfois des réclamations, c'était chez ceux qui n'étaient encore ni armés ni habillés et qui demandaient des fusils, des capotes et des souliers. Mortier, Jourdan, Leclerc des Essarts, Rouyer, Lanusse, Berckheim, tous les officiers généraux qui commandaient des gardes nationales mobilisées, ou les passaient en revue, louaient le bon esprit et la belle attitude de ces soldats improvisés. Gérard écrivait à Vandamme, le 5 juin : Les dix bataillons de gardes nationales de la réserve de Nancy sont superbes. Dans trois semaines, il n'y aura pas de différence avec la troupe de ligne[36]. Si la guerre durait, on pouvait compter que les hommes de vingt à quarante ans, formant le premier ban de la garde nationale, donneraient encore 150.000 mobilisés au moins, car un grand nombre de réfractaires des départements du Centre et du Midi finiraient par se soumettre[37] ; grâce à la pacification de la Vendée, qui était proche et certaine, on pourrait appliquer les décrets de mobilisation aux départements de l'Ouest ; il serait enfin loisible de décréter de nouvelles levées dans les si patriotes départements de l'Est[38]. Pour le second ban de la milice, on n'en pressa point l'organisation, sauf à Paris et à Lyon. Quand le temps et les armes manquaient pour former les bataillons mobilisés[39], ce n'était pas l'heure de multiplier les bataillons sédentaires qui, en raison des services très pacifiques qu'ils pouvaient rendre, étaient déjà assez nombreux[40]. Dans la masse des citoyens de quarante à soixante ans, il y avait cependant beaucoup d'hommes très bons à employer contre l'ennemi, au moins pour la défense des places fortes. C'étaient les anciens officiers, sous-officiers et soldats retraités après un minimum de vingt-quatre ans de service. Dès le mois d'avril, plusieurs officiers en retraite avaient demandé à rentrer dans l'armée ; mais il y avait trop d'officiers à la demi-solde que l'on ne pouvait utiliser. Avec les officiers et soldats retraités, Davout pensa à former des bataillons de vétérans pour les places de guerre. Ils donneront l'exemple aux gardes nationaux, écrivit-il à l'empereur, et leur inspireront l'esprit militaire. Napoléon ne manqua point d'adopter cette proposition. Le 18 mai, il rendit un décret invitant tous les militaires en retraite à reprendre temporairement du service pour être organisés en bataillons et en batteries de forteresse. Les retraités, qui s'élevaient à 94.000, mais dont à peine la moitié paraissaient susceptibles de servir, s'empressèrent de se rendre aux revues d'appel. On constitua avec les plus valides 56 bataillons et 25 compagnies d'artillerie, d'une force totale d'environ 25.000 hommes[41]. A Paris, la garde nationale sédentaire fut portée à 36.518 hommes[42]. Les ouvriers des faubourgs avaient demandé spontanément de concourir à la défense ; on en forma 24 bataillons de tirailleurs fédérés. Ces 18.000 tirailleurs, commandés par des officiers à la demi-solde, étaient destinés à occuper les postes avancés et les ouvrages de première ligne[43]. A Lyon, il y avait au 12 juin 4.000 gardes nationaux sédentaires, et Mouton-Duvernet s'occupait de former 15 bataillons de tirailleurs fédérés[44]. Dans l'Aisne et les Ardennes et dans tous les départements de l'est, on pouvait compter en cas d'invasion sur les levées en masse. Composées des gardes forestiers, des gendarmes, des douaniers, des gardes nationaux sédentaires et en général de tous les citoyens valides, les levées en masse devaient s'assembler au son du tocsin sur l'ordre des autorités militaires pour venir occuper les montagnes et les défilés[45]. Avec les 150.000 mobilisés, les 25.000 retraités, les 26.000 fédérés parisiens, lyonnais, toulousains, nancéens, les gardes nationales urbaines et rurales, les corps francs et les levées en masse, il semblait que les places fortes, les grandes villes, les défilés[46], les têtes de pont pussent être suffisamment pourvus de défenseurs. Mais malgré les engagements volontaires et la rentrée des deux, tiers des hommes en congé, l'armée active était encore trop peu nombreuse. Après bien des hésitations, l'empereur se décida à lever la classe de 1815[47]. La conscription avait été abolie par l'article XII de la Charte royale ; et cet article ayant été interprété comme devant avoir un effet rétroactif pour les conscrits de 1815[48], bien qu'un sénatus-consulte les eût appelés sous les drapeaux dès le 9 octobre 1813, il était à craindre que le rappel de ces conscrits ne fût regardé comme un abus de pouvoir. Davout lui-même, si résolu d'ordinaire, représenta à l'empereur qu'il serait prudent de ne point prononcer le fâcheux mot de conscription : Il n'y aurait, dit-il, qu'à changer la chose de nom et à déclarer que tous les jeunes gens, entrés dans leur vingtième année depuis le 1er janvier dernier, feront partie de la garde nationale et seront dirigés sur les dépôts de l'armée, avec promesse d'être libérés, la guerre finie[49]. Le Conseil d'Etat, auquel le projet de décret sur la conscription de 1815 fut soumis dans la séance du 23 mai, refusa d'y donner son adhésion, les levées d'hommes étant du domaine du pouvoir législatif[50]. Attendre la réunion des Chambres ! Mais l'ennemi, lui, l'attendrait-il pour entrer en France ? Or la conscription de 1815 devait fournir 120.000 soldats, dont 20.000 avaient combattu pendant la dernière campagne[51]. L'empereur leva les scrupules du Conseil d'Etat en proposant d'assimiler les conscrits de 1815 à des militaires en congé. Pour les rappeler, un décret ne serait plus nécessaire ; il suffirait d'une simple mesure administrative. Le Conseil d'Etat émit un avis favorable. Dès les premiers jours de juin, Davout put envoyer des instructions pour la levée de la classe de 1815[52]. Le pays avait pris alors son parti de la guerre. Le départ des conscrits s'opéra sans les résistances et les rébellions qu'avaient soulevées dans tant de provinces le rappel des militaires en congé et, à un moindre degré, la mobilisation des gardes nationales. Dès le 11 juin, c'est-à-dire une semaine après que le décret eut été rendu public, 46.419 conscrits étaient réunis, prêts à partir, dans les chefs-lieux des départements[53]. En Alsace, en Lorraine, en Champagne, en Franche-Comté, en Bourgogne, et même dans plusieurs provinces du Centre, on signalait une extrême bonne volonté. Les conscrits de 1815, écrit le préfet de Seine-et-Oise, ont rejoint en trois jours avec une facilité étonnante. Le préfet du Mont-Blanc remarque que son département a fourni plus de combattants qu'à aucune époque de la Révolution[54]. L'Aisne, qui du 1er avril au 12 juin a donné 18.200 volontaires, rappelés, conscrits, gardes nationaux mobilisés, francs-tireurs et militaires retraités, parmi lesquels des vieillards de soixante-treize ans, mérite cette parole de Napoléon : Dans ce département-là on trouvera autant d'hommes qu'il y aura de fusils pour les armer[55]. II Des fusils, des munitions, des vivres, des chevaux, des uniformes et des souliers, il en fallait beaucoup, et il y en avait peu. Presque tout le matériel était à improviser. Si l'artillerie possédait 13.947 bouches à feu, il lui manquait des chevaux, des harnachements et 600.000 projectiles[56]. Dans les régiments d'infanterie et de cavalerie, les uns et les autres à effectifs très réduits, les armes étaient au complet ; mais, pour armer les rappelés, les engagés volontaires, les inscrits maritimes, les gardes nationales mobilisées, les tirailleurs fédérés et les conscrits de 1815, qui selon les prévisions devaient s'élever ensemble, vers le milieu de septembre, à plus de 500.000 hommes, il n'y avait dans les arsenaux et les magasins des corps que 195.000 fusils, dont 74.000 à réparer[57]. Le salut du pays, écrivait l'empereur, est dans la quantité de fusils dont nous pourrons nous armer[58]. Les manufactures impériales, où tous les ouvriers armuriers, exemptés des diverses conscriptions depuis l'an VIII, furent rappelés par décret[59], reçurent la commande de 235.000 fusils et mousquetons et de 15.000 paires de pistolets. On fit faire les baïonnettes dans les coutelleries de Langres et de Moulins. 10.000 fusils de chasse et 4.000 fusils rognés furent distribués aux paysans alsaciens, lorrains, champenois et bourguignons de la levée en masse[60]. Pour la réparation des fusils hors de service, on recourut à l'industrie privée. Des ateliers formés d'armuriers, de serruriers, d'ébénistes, de dinandiers furent établis dans les principales villes ; à Paris, il y en eut six, qui employèrent 2.000 ouvriers. On s'efforça aussi d'acheter des fusils en Angleterre, et il en vint, cachés dans des bateaux à charbon, quelques milliers de la Belgique et des Provinces Rhénanes. D'autres furent apportés par des paysans, une prime de 12 francs étant allouée pour chaque fusil restitué ; d'autres furent réquisitionnés chez des négociants et des armateurs auxquels il avait été enjoint, par voie d'affiches, de déclarer les armes de guerre qu'ils pourraient avoir[61]. Malgré l'activité déployée et tous les moyens mis en œuvre, les hommes arrivaient dans les dépôts plus vite que les armes n'entraient dans les magasins. Les manufactures et les ateliers pouvaient fournir par mois seulement 20.000 fusils neufs et à peu près le même nombre de fusils réparés[62]. Dans les premiers jours de juin, c'est à peine si l'on avait donné des fusils à la moitié des gardes nationales mobilisées[63]. Quant aux sabres-briquets dont la fabrication avait été ajournée, car il fallait d'abord faire des baïonnettes, on décida que, même dans la ligne, seules les compagnies de grenadiers en seraient pourvues. Les cuirasses manquaient. Faites rejoindre les hommes quand même, écrivit Napoléon ; les cuirasses ne sont pas indispensables pour faire la guerre[64]. Partout, on pressa la confection des cartouches de façon à porter l'approvisionnement à 100 par homme : 50 dans le sac et 50 dans les caissons des parcs. A Vincennes, il en fut fabriqué 12 millions en deux mois. Le 1er juin, l'approvisionnement de réserve de l'armée du Nord montait à 5 millions et demi de cartouches, et les soldats de tous les régiments placés en première ligne avaient, à quelques-unes près, leurs cinquante cartouches au complet[65]. Non seulement le gouvernement de la Restauration ne s'était pas occupé de reconstituer les magasins d'habillement vidés par les gigantesques armements de 1812 et de 1813, mais il n'avait même point pourvu à l'entretien des troupes sous les drapeaux. De mai 1814 à février 1815, la Guerre n'avait affecté à l'habillement que 4 millions, dont un seul avait été payé[66]. Les uniformes étaient des haillons. Dans plus de vingt régiments, les hommes manquaient de souliers ; dans les corps d'élite comme les chasseurs royaux, des cavaliers n'avaient ni bottes ni chemises. Au 14e léger, les hommes portaient depuis deux ans, hiver comme été, des pantalons de toile. Au 27e de ligne, il était dû 30.000 francs pour la première mise des prisonniers rapatriés antérieurement au 1er janvier 1815 ; ces hommes firent la campagne en bonnet de police[67]. L'empereur dut porter à 30 millions les crédits pour l'habillement, et l'Administration de la Guerre estimait qu'il les faudrait élever jusqu'à 51 millions dans le courant de l'année[68]. Des ateliers créés à Paris fournirent 1.250 habits par jour. On travailla activement dans les dépôts auxquels les fabricants furent invités à faire des avances de fournitures sous la garantie des villes. Comme le drap bleu manquait, on confectionna des capotes avec des draps de nuances diverses[69]. A l'époque du 20 mars, la cavalerie possédait seulement 27.864 chevaux[70], l'artillerie et les services auxiliaires 7.765. De ces 35.629 chevaux, 5.000 avaient été, par mesure d'économie, prêtés à des cultivateurs ; on s'empressa de les faire rentrer dans les corps[71]. Les départements furent frappés d'une réquisition de 8.000 chevaux contre remboursement, tandis que, au dépôt central de remonte établi à Versailles, on achetait les chevaux présentés volontairement par les éleveurs et les fermiers. On versa dans la garde les chevaux de la maison militaire du roi et des volontaires royaux. Les dépôts de chaque corps furent autorisés à faire des achats directs. Enfin, l'empereur eut l'excellente idée de prendre la moitié des chevaux de la gendarmerie. Chaque gendarme reçut une indemnité de 600 francs ; il devait se remonter sous quinze jours, ce qui lui était facile en raison de sa situation dans le pays. Grâce à cet expédient, 4.250 chevaux vigoureux et tout dressés furent incontinent répartis entre les cuirassiers et les dragons[72]. La réquisition dans les départements donna plus qu'on n'en espérait[73], mais au grand dépôt de Versailles la remonte marcha fort mal. Le général Préval semblait désigné pour reprendre le commandement de ce dépôt où il avait fait des prodiges en 1814. A tort ou à raison, il était suspect de royalisme. L'empereur l'envoya ou plutôt l'exila au dépôt de Beauvais et nomma à Versailles le général Bourcier. Celui-ci était un formaliste, esclave des règlements, s'arrêtant à des vétilles. Il refusait les chevaux qui avaient plus de huit ans et ceux à qui il manquait un demi-pouce de taille. En pleine guerre, pendant le seul mois de mars, Préval avait réuni plus de 7.000 chevaux[74] ; en deux mois de paix, Bourcier n'en put trouver que 2.579[75] ! Malgré ce mécompte, il y avait au jour de l'entrée en campagne une belle masse de chevaux. La cavalerie en comptait 40.000 aux armées et dans les dépôts[76] ; l'artillerie, y compris le train el les équipages, 16.500[77]. Menacé par l'Europe entière, Napoléon pensait bien qu'il ne pourrait empêcher l'invasion sur tous les points du territoire. Peut-être serait-il réduit, comme l'année précédente, à ne commencer ses opérations qu'en-deçà de l'Oise, de l'Aisne et de la Marne. Même dans l'hypothèse la plus favorable, sa prochaine campagne devait être à la fois offensive et défensive. La mise en état de défense des places n'était donc ni moins nécessaire ni moins urgente que la réorganisation de l'armée. Dès le 27 mars, l'empereur donna des ordres pour ces travaux, qui furent entrepris seulement du 15 au 25 avril. On avait dû attendre les rapports sur l'état des places, les instructions du comité du génie, l'ouverture des crédits, la formation des ateliers[78]. A Metz, on employa 700 ouvriers par jour, à Rocroi 500, à Toul 700, à Landrecies 400, à Dunkerque 1.000, à Huningue 500, à Grenoble 400, à Cherbourg 500, à Bayonne 400, à Bordeaux 200, à Perpignan 150, au camp retranché de Maubeuge 1.000. Le 15 juin, les défilés des Vosges et les passages de l'Argonne étaient pourvus de redoutes, d'abatis, de palanques ; on se tenait prêt à tendre, au premier ordre, les inondations du Nord ; et, dans plus de quatre-vingts villes, les travaux étaient ou complètement terminés ou en voie de prompt achèvement. Au reste, dans presque toutes les places, il n'existait pas de brèches aux remparts. Il avait fallu seulement relever les talus de contrescarpe, disposer les plates-formes pour les barbettes, réparer les embrasures, les banquettes, les glacis et établir les défenses accessoires et quelques ouvrages extérieurs[79]. Lyon et Paris exigeaient des travaux tout autrement considérables. A Lyon, 4.000 ouvriers furent embauchés. On répara la vieille enceinte de Fourvières, ainsi que celle qui joignait le Rhône à la Saône ; on éleva des têtes de pont à la Guillotière et aux Brotteaux, des redoutes à Pierre-Scise, à Saint-Jean et à la Croix-Rousse[80]. Dans la crainte sans doute de s'aliéner les Parisiens en leur montrant le péril en face, Napoléon, si urgente que lui parût la nécessité de fortifier Paris, ne donna ses premiers ordres à cet égard que le 1er mai[81]. C'était bien du temps perdu, d'autant plus que l'empereur voulait un vaste système de fortifications avec lignes continues, ouvrages à cornes et à couronnes, redoutes et forts croisant leurs feux[82]. Les généraux Haxo et Rogniat firent le tracé. Ce fut seulement vers le milieu de mai que les travaux entrèrent en pleine activité. 1.500, puis 2.000, puis 4.000 ouvriers y furent employés, sans compter de nombreux détachements- de volontaires de la garde, de la ligne, de la garde nationale et des tirailleurs fédérés[83]. Quand Napoléon partit pour l'armée, les retranchements et les ouvrages de la rive droite, entrepris les premiers comme devant couvrir les points d'attaque les plus probables, se trouvaient en partie achevés, mais on commençait à peine ceux de la rive gauche[84]. On mena de front les travaux de fortifications, l'armement et l'approvisionnement des places. Les arsenaux de Metz, de Douai, de Lille, de Grenoble, de Toulouse fournirent des bouches à feu et de la poudre dans les villes fortes où le matériel d'artillerie était insuffisant. Des fourneaux y furent établis pour la fonte des projectiles. La Marine envoya de Toulon à Lyon, par Arles et le Rhône, 100 pièces de 24, de 12 et de 6, et de Brest et de Cherbourg à Paris, 300 pièces par le Havre et la Seine. L'armement de Paris comprenait en outre 300 pièces de campagne, dont 100 réparties en batteries mobiles : Il faut mettre du canon tant qu'on peut, écrivait l'empereur, car on se bat à coups de canon comme on se bat à coups de poing[85]. Afin de gagner du temps, Davout chargea d'abord les commandants de corps d'armée de s'occuper eux-mêmes, avec les préfets et les ordonnateurs, de l'approvisionnement des places de guerre[86]. Il était à craindre que par ce système, qui donna d'ailleurs de bons résultats partiels, on n'en vînt à employer les réquisitions. Il existait un marché conclu entre le gouvernement de Louis XVIII et le munitionnaire Doumerc. On maintint ce marché. Mais Doumerc, frère du général de cavalerie, n'était que le prête-nom d'Ouvrard, lequel se faisait un jeu de ses obligations. Il y eut des plaintes partout ; on fut obligé d'entamer les vivres de réserve pour nourrir hommes et chevaux. On accusait Ouvrard d'employer à des opérations de Bourse l'argent avancé par le Trésor. Pour assurer les services, Davout autorisa les préfets à conclure les marchés d'urgence, à n'importe quel prix, au compte du munitionnaire. L'application générale de cette mesure eût pu coûter cher à Ouvrard. Il fit proposer par Doumerc un nouveau contrat qui fut passé le 24 mai avec Davout et Daru ; aux termes de ce contrat, l'approvisionnement devait être complété dans le délai de trente jours, moyennant un paiement anticipé de 4 millions de francs[87]. A la mi-juin, les places de première et de seconde lignes étaient, à quelques quantités près, approvisionnées pour quatre mois en moyenne, et les convois à la suite de l'armée du Nord portaient huit jours de vivres de réserve[88]. Pour mener à bien cet immense armement, il eût fallu plus de temps et plus d'argent. Le budget royal de la Guerre pour 1815, qui devait être présenté aux Chambres dans la session d'avril, s'élevait à 298 millions, dont 25 pour la maison militaire, les régiments suisses et les pensions des émigrés et des vendéens[89]. L'empereur vit tout de suite que, malgré l'économie à réaliser sur ces chapitres, le budget militaire devait être augmenté de 100 millions[90]. Encore l'évaluation était-elle modeste. Si la guerre avait duré, les dépenses auraient de beaucoup excédé ces prévisions. Napoléon n'aimait pas les emprunts, parce que, selon son mot, il ne voulait pas manger l'avenir, et aussi parce qu'il ne croyait guère au crédit[91]. En 1815, il ne voulait pas non plus augmenter les impôts de peur de se dépopulariser. Loin de chercher des ressources dans de nouvelles taxes, il supprima le droit de circulation sur les boissons, l'exercice à domicile et, dans les communes de moins de 4.000 habitants, les droits d'entrée sur les liquides[92]. Cette réforme, que l'histoire n'a pas enregistrée, au milieu de si grands événements, eut cependant de l'action sur l'opinion. Les Bourbons qui avaient solennellement promis la suppression des droits réunis s'étaient bien gardés d'y rien changer, et Napoléon, qui n'avait rien promis, abolissait ceux de ces impôts que l'on regardait comme les plus vexatoires et les plus insupportables. Chez les paysans, les petits rentiers, et dans le monde déjà influent des cabaretiers et des courtiers en vins, ce dégrèvement rallia plus de monde à la cause impériale que n'en éloigna l'Acte additionnel, attaqué surtout par les beaux esprits des salons et les professeurs de politique[93]. L'empereur trouva une ressource inespérée dans une encaisse de 50 millions qui existait le 20 mars au Trésor[94]. Le ministre des Finances, le baron Louis, employait une partie de ces fonds à l'agiotage des bons royaux ; il avait eu scrupule de les emporter à Gand[95]. Le gouvernement impérial bénéficia aussi de l'époque où s'était accomplie la révolution. Au 20 mars, les contribuables n'avaient encore que fort peu versé sur les trois premiers douzièmes des impôts qui allaient devenir exigibles. Il y eut, de ce fait, un afflux d'argent dans les caisses des receveurs pendant les mois d'avril et de mai, car en général les contributions rentrèrent bien[96]. Néanmoins les recettes ordinaires et l'argent disponible étant insuffisants pour faire face aux dépenses, Gaudin, sur l'ordre de l'empereur, négocia 3.600.000 francs de rentes de la Caisse d'amortissement, qui furent remplacés par la même valeur en crédit de bons nationaux. Cette opération menée avec le concours d'Ouvrard produisit, net de tout escompte, 40 millions argent comptant[97]. Les dépenses d'armement, d'équipement et d'habillement des gardes nationales mobilisées, dépenses évaluées à 24 millions[98], n'entraient pas dans le budget de la guerre. On les mit à la charge des départements qui durent y pourvoir par la taxe de remplacement, fixée à 120 francs, le prélèvement d'un dixième sur les revenus communaux et le produit du quart de la réserve des bois[99]. Il fut affecté en outre aux dépenses des gardes nationales la totalité des dons patriotiques, et un fonds de réserve de 6 millions à prendre dans la Caisse d'amortissement[100]. Grâce à ces ressources et à ces expédients, on parvint à mettre la France sur le pied de guerre. Mais dans combien de places fortes les travaux étaient interrompus faute d'argent ! combien de soldats portaient des effets hors de service ! combien de gardes nationaux déjà embrigadés attendaient, inutiles et mécontents, qu'on leur donnât des fusils[101] ! En mai, la solde avait été payée avec de grands retards et beaucoup de difficultés[102]. Le 12 juin, il n'y avait pour toute l'armée du Nord que 1.000 paires de souliers de rechange[103] ; la gratification d'entrée en campagne n'était point payée[104], et, alors que la solde devait s'élever à 5 millions par mois, les fourgons du Trésor contenaient seulement 670.000 francs[105]. Les ressources extraordinaires — encaisse laissée par le baron Louis et produit de l'aliénation des 3.600.000 francs de rente — étaient épuisées, et les recettes régulières commençaient à diminuer[106]. Si opposés que fussent l'empereur et ses conseils aux mesures d'exception[107], il fallait s'y résigner, car les dépenses prévues par Davout pour le seul mois de juillet montaient à 72 millions[108]. Dans le budget présenté aux Chambres le 19 juin, figurait donc un emprunt national de 150 millions, garanti par les bois de l'Etat. Tous les contribuables devaient souscrire pour une somme égale au principal de leurs taxes foncière et mobilière[109]. C'était l'emprunt forcé. III L'empereur n'attendit même pas le commencement de la mobilisation pour organiser les corps d'armée. Grâce à la concentration des troupes sous Paris ordonnée par Louis XVIII, aux nombreux régiments qui s'étaient réunis depuis Grenoble au Bataillon de l'île d'Elbe, enfin aux fortes garnisons des villes frontières du Nord et de l'Est, Napoléon, aussitôt après sa rentrée aux Tuileries, se trouva avoir en quelque sorte dans la main une grande partie des disponibles de l'armée. Pour être prêt à tout événement, il s'empressa, dès le 26 mars, d'ordonner la formation de huit corps d'observation. Le 1er dut se rassembler à Lille ; le 2e à Valenciennes ; le 3e à Mézières ; le 4e à Thionville ; le 5e à Strasbourg ; le 6e à Chambéry ; le 7e au pied des Pyrénées ; le 8e, ou corps de réserve, à Paris[110]. Provisoirement, les régiments entrant dans la composition de ces corps d'armée seraient à deux bataillons. Les cadres des 3e bataillons et les dépôts seraient concentrés dans le gouvernement militaire de Paris et dans les villes de l'intérieur, en attendant que l'appel des réserves permît de former des 3e, 4e et 5e bataillons, qui iraient aussitôt rejoindre l'armée. Les gardes nationales mobilisées remplaceraient la troupe de ligne dans les places fortes[111]. La cavalerie légère fut répartie à raison d'une division par corps d'armée. Avec le surplus de cette cavalerie et les dragons, les cuirassiers et les carabiniers, on forma huit divisions de réserve, à chacune desquelles fut attachée une batterie d'artillerie à cheval[112]. La garde impériale ne comprenait plus, le 20 mars, que les deux régiments de grenadiers et les deux régiments de chasseurs de la vieille garde, et quatre régiments de cavalerie[113]. L'empereur augmenta les effectifs des régiments de cavalerie, créa un 3e et un 4e régiments de grenadiers, un 3e et un 4e régiments de chasseurs (moyenne garde), huit régiments de voltigeurs et huit de tirailleurs (jeune garde) et un 2e régiment de chasseurs à cheval. Il rétablit le régiment d'artillerie à cheval et le régiment d'artillerie à pied de la vieille garde, ainsi que le régiment du train, l'escadron des gendarmes d'élite, l'équipage des marins et la compagnie des sapeurs du génie[114]. La jeune garde fut formée avec les engagés volontaires et les rappelés ayant appartenu à ce corps, où l'on avait un sou de haute paye. On incorpora dans la vieille garde les hommes du bataillon de l'île d'Elbe. Pour la moyenne garde, l'artillerie et la cavalerie, il fallut les recruter dans la gendarmerie et dans la ligne. La gendarmerie donna 500 hommes. Chaque régiment de ligne dut fournir 30 hommes bien notés, grands et fortement constitués ; un minimum de quatre ans de service dans l'infanterie et de huit dans la cavalerie ou l'artillerie était exigé[115]. Quand, à la fin de mai, les rappelés, les gardes nationales mobilisées, les volontaires eurent accru l'armée, l'empereur fit une nouvelle répartition de ses forces. Le tee corps (sous Drouet d'Erlon), le 2e corps (sous Reille), le 3e corps (sous Vandamme), l'armée de la Moselle, appelée désormais le 4e corps (sous Gérard), et le 8e corps devenu le 6e corps (sous Lobau), la réserve de cavalerie (sous Grouchy) et la garde impériale, formèrent l'armée du Nord, forte de 124.139 hommes et commandée par l'empereur en personne[116]. Le 5e corps devint l'armée du Rhin (23.097 hommes, dont 3.000 mobilisés, sous Rapp[117]), et le 6e corps devint l'armée des Alpes (23.617 hommes, dont 13.000 mobilisés, sous Suchet[118]). Le 7e corps fut divisé en deux fractions : l'une prit le nom de corps des Pyrénées Occidentales (6.820 hommes, dont 3.300 mobilisés, sous Clausel[119]) ; l'autre, celui de corps des Pyrénées Orientales (7.633 hommes, dont 3.300 mobilisés, sous Decaen[120]). L'empereur créa enfin trois nouveaux corps d'armée : l'armée de l'Ouest (10.000 hommes environ sous Lamarque[121]), pour réprimer l'insurrection vendéenne ; le corps du Var (5.544 hommes sous Brune[122]), et le corps du Jura (8.420 hommes, dont 5.500 mobilisés, sous Lecourbe[123]), tous deux destinés à seconder l'armée de Suchet dans la défense des Alpes. Quatre divisions de gardes nationales d'élite, fortes ensemble de 17,466 hommes, campaient sous Avesnes, Sainte-Menehould, Colmar et Nancy[124] ; 90.000 mobilisés et 25.000 militaires retraités étaient réunis dans les villes fortes et dans les dépôts[125] ; 11.233 canonniers de la ligne[126] et 6.000 canonniers de la marine[127] assuraient dans les places, concurremment avec 2.071 canonniers vétérans[128] et 6.000 canonniers sédentaires[129], le service des bouches à feu ; 13.931 soldats de toute arme étaient en route par détachements pour rejoindre les armées d'opérations[130] ; 59.559, disponibles et indisponibles, se trouvaient dans les dépôts de la ligne[131], 5.559 dans les dépôts de la garde[132]. Il y avait en outre 4.700 hommes des bataillons de guerre détachés à l'île d'Elbe[133] et dans les colonies[134] ; 8.162 hommes aux hôpitaux[135] ; 10.000 fusiliers marins ; 5.129 fusiliers vétérans[136] ; 14.521 gendarmes à pied et à cheval[137] ; enfin 12.000 douaniers organisés militairement[138] et 6.000 partisans. Ainsi l'empereur avait porté l'armée active de 200.000 hommes à 284.000, et il avait formé une armée auxiliaire de 222.000 hommes[139]. Un mois plus tard, ces deux armées auraient été augmentées : 1° de 19.000 rappelés, qui avaient reçu des feuilles de route antérieurement au 10 juin, mais n'avaient pas encore rejoint les dépôts[140] ; 2° de quelques milliers de rappelés qui, au 15 juin, n'étaient pas arrivés dans les chefs-lieux des départements ; 3° de 46.500 conscrits de 1815 qui, à cette même date, étaient réunis aux chefs-lieux des départements[141] ; 4° de 15.000 mobilisés mis en route à la mi-juin pour les points de concentration[142]. Enfin, du 15 juillet au 25 septembre, on aurait eu les 74.000 hommes formant le complément du contingent de 1815[143] et les 84.000 hommes formant le complément de la levée des gardes nationales mobiles[144]. Il aurait même été possible de mobiliser encore 60.000 ou 70.000 gardes nationaux, en appliquant aux départements de l'Ouest, pour lesquels ils avaient été différés, les décrets de mise en activité, et en ordonnant un nouvel appel dans toute l'étendue de la France. Quand Napoléon disait que le 1er octobre l'armée se serait élevée à 800.000 hommes[145], il ne se faisait pas tant d'illusions ! IV En exécution des décrets de Lyon, les officiers qui, ayant émigré ou quitté le service à l'époque de la Révolution, avaient été introduits dans l'armée depuis le 1er avril 1814, furent rayés des contrôles[146]. Mais, comme beaucoup de ces officiers étaient pourvus d'emplois surtout dans la maison militaire et les états-majors, cette destitution en masse ne produisit que peu de vacances dans les corps. Les officiers à la suite suffirent à en compléter les cadres. Les officiers à la demi-solde furent placés dans les bataillons, escadrons et batteries de nouvelle formation, dans la jeune garde et dans les tirailleurs fédérés. Au milieu de mai, 2.500 officiers de cette catégorie, auxquels l'empereur avait d'ailleurs rendu leur solde entière en attendant un emploi, se trouvaient encore disponibles ; ils furent dirigés sur les places frontières pour commander les gardes nationales mobilisées[147]. Certain du dévouement des officiers qui vivaient en contact immédiat avec la troupe, Napoléon avait des défiances légitimes contre plusieurs colonels et contre beaucoup de généraux. Parmi les porteurs de grosses épaulettes, il y avait eu en 1814 des faiblesses et des trahisons, en 1815 des hésitations et des résistances. De nombreux changements s'imposaient dans le haut personnel militaire. Mais ce furent bien plutôt les intérêts de l'armée que des rancunes ou des sympathies personnelles qui dictèrent à l'empereur ses exclusions et ses choix. Sans pitié pour les officiers qui s'étaient montrés pendant la campagne de France incapables comme Augereau et Oudinot, ou criminels comme Marmont et Souham, il sut oublier la conduite de ceux qui du 1er au 20 mars avaient tenté de changer son retour triomphal en une misérable aventure. Le colonel Cunéo d'Ornano, qui avait emprisonné vingt-cinq grenadiers dans la citadelle d'Antibes, fut promu général[148]. Le général Miollis, qui avait mené la garnison de Marseille à la poursuite de la petite colonne impériale, eut le commandement de la place de Metz. Le colonel Roussille, le tenace défenseur de la porte de Grenoble, resta à la tête du 5e de ligne. Le colonel Dubalen, du 64e, qui avait publiquement donné sa démission à Ney sur la place d'armes de Lons-le-Saunier, fut rappelé à son régiment[149]. Le général Marchand aurait pu aussi rentrer en grâce, mais il refusa, dit-il, de figurer sur la liste des traîtres[150]. Resté républicain sous l'empire et converti sous Louis XVIII à la royauté constitutionnelle, Foy ne s'était mis, le 24 mars, à la tête du mouvement bonapartiste de Nantes qu'après avoir tout fait pour l'arrêter. Il n'en fut pas moins pourvu d'une belle division à l'armée du Nord. Plusieurs officiers du 10e de ligne, promus par le duc d'Angoulême pendant la campagne du Midi, furent confirmés dans leur nouveau grade[151]. Harispe et Heudelet, très compromis par leurs manifestations bourbonistes, eurent néanmoins un commandement. L'empereur employa Rapp, Belliard, Ruty, Haxo, Kellermann fils, Gourgaud, tout comme s'ils n'avaient point servi dans l'armée rassemblée à Villejuif sous les ordres du duc de Berry. — Auriez-vous osé tirer sur moi ? dit Napoléon à Rapp. — Sans doute, Sire : c'était mon devoir. Et Napoléon lui donna l'armée du Rhin[152]. L'empereur, cependant, destitua ou mit en retrait d'emploi une centaine d'officiers de tout grade[153] : Dupont dont la faveur sous Louis XVIII n'avait pas effacé la tache de Baylen ; Dessolles qui avait si bien secondé Talleyrand en avril 1814 ; Beurnonville, Donnadieu et Bordessoulle, émigrés en Belgique ; Maison, également émigré, et qui, sollicité par le Gouvernement impérial de rentrer en France, répondit qu'il n'y reviendrait qu'avec 500.000 baïonnettes[154] ; Curto dont les furieuses paroles contre Napoléon avaient provoqué la sédition dans la garnison de Thionville ; les généraux d'Aultanne, Monnier, Ernouf, Loverdo, Briche et les colonels du 10e de ligne et du 14e chasseurs qui avaient mené la guerre dans le Midi sous le duc d'Angoulême huit jours après que le gouvernement impérial était reconnu par les deux tiers de la France. Sans remords de sa complicité avec Marmont dans la défection d'Essonnes, Souham espérait bien conserver son commandement de Périgueux. Destitué, il se présenta aux Tuileries à une audience publique pour tenter de fléchir Napoléon. — Que voulez-vous encore de moi ? dit l'empereur en se détournant. Vous voyez bien que je ne vous connais plus ![155] Sur la demande de Davout et des commandants de corps d'armée, plusieurs colonels, majors, capitaines et lieutenants furent radiés, à cause de leur hostilité persistante. La disgrâce des colonels Moncey, Oudinot et Zoppfell paraît moins explicable. Moncey n'avait fait que chercher à maintenir le 3e hussards dans l'obéissance au roi, et cela jusqu'au 13 mars seulement ; or Napoléon s'était montré indulgent à bien des actes analogues[156]. On ne pouvait reprocher à Oudinot que de porter le nom de son père, à Zoppfell que d'être un protégé du duc de Feltre. Dénoncé comme royaliste, Bugeaud fut mis en retrait d'emploi par Davout dans le courant d'avril, mais Suchet, Grouchy, Gérard et Bertrand s'empressèrent de réclamer en faveur du meilleur colonel de l'armée. Replacé à la tête du 14e de ligne, Bugeaud reçut comme compensation de sa disgrâce momentanée le grade de commandant dans la Légion d'honneur[157]. Le général de Bourmont resta aussi privé d'emploi pendant quelque temps. De Lons-le-Saunier il était accouru à Paris auprès de Louis XVIII. L'empereur ordonna son arrestation à la requête de Ney ; mais celui-ci s'étant ravisé fut le premier à solliciter Napoléon de rendre un commandement à ce général. Gérard, qui avait eu Bourmont sous ses ordres pendant les campagnes de 1812 et de 1814-, le demanda comme divisionnaire dans son corps d'armée. Après avoir hésité très longtemps, l'empereur se laissa convaincre. Il lui fallut imposer sa volonté à Davout, qui ne céda que sur un ordre formel. — Gérard répond de Bourmont sur sa tête, dit l'empereur. — Gérard a tort, répliqua le prince d'Eckmühl ; moi, je ne réponds de personne, je ne réponds que de moi'[158]. Peu sévère, comme on voit, aux hommes qui avaient voulu le combattre, l'empereur ne prodigua point les récompenses à ceux qui s'étaient les premiers compromis pour lui. S'il nomma brigadiers les colonels La Bédoyère, déjà proposé d'ailleurs pendant la campagne de France, et Mallet, commandant le bataillon de l'île d'Elbe, s'il promut divisionnaire Simmer, qui lui avait amené deux régiments à Lyon, et s'il nomma Brayer pair de France, Dessaix, Girard, Allix, Ameil, Mouton-Duvernet, Gilly, Piré, Proteau, Chartran n'eurent d'avantages d'aucune sorte ; ils ne furent employés aux armées que selon les droits stricts de leur grade. Or Dessaix avait accepté le gouvernement de Lyon sept jours avant la rentrée de l'empereur aux Tuileries Girard avait commandé depuis Avallon l'avant-garde impériale, Allix avait proclamé l'empire à Nevers, Ameil avait été arrêté à Auxerre comme émissaire de Napoléon, Chartran devait payer de la vie son dévouement à la cause impériale, Mouton-Duvernet, Gilly, Piré, Proteau avaient ardemment et efficacement secondé Grouchy dans la campagne du Midi contre le duc d'Angoulême. Le général Porret de Morvan qui, pour avoir conduit à Sens les chasseurs à pied de la vieille garde, se flattait de remplacer Curial comme colonel en premier de ce corps, vit bien Curial disgracié, mais le commandement des chasseurs passa à Morand[159]. Le prince Jérôme, tout Altesse Impériale qu'il était, n'eut qu'une division d'infanterie. Merlin, qui avait contraint le gouverneur de Vincennes à capituler, reçut les trois étoiles, mais Sébastiani, qui avait précipité la défection de l'armée du duc de Berry, fut chargé d'une mission qu'il regarda, à juste titre, comme indigne de son mérite et de ses services[160] : l'organisation des gardes nationales dans la 16e division militaire. Exelmans, entré le premier aux Tuileries le 20 mars, eut un corps de cavalerie, mais Kellermann, employé à l'armée de Villejuif, en eut un aussi. Lallemand aîné, l'un des principaux chefs de la conspiration du Nord, devint lieutenant-général ; mais Lefebvre-Desnoëttes et Lallemand jeune furent simplement replacés à la tête des chasseurs à cheval et de l'artillerie à pied de la vieille garde. Après l'échauffourée de Compiègne, le colonel Marin était venu à franc étrier rejoindre Napoléon à Auxerre[161] ; il espérait sans doute le commandement de l'artillerie à cheval de la garde, dont il avait été major ; c'est le colonel Duchand, de l'artillerie de la ligne, qui y fut nommé. V Des vingt maréchaux de France, trois : Berthier, Marmont, Victor, avaient accompagné ou rejoint Louis XVIII en Belgique ; l'empereur ordonna leur radiation[162]. Pérignon, qui s'était sottement compromis avec Vitrolles à Toulouse, et Augereau, dont la récente palinodie ne pouvait racheter la conduite pitoyable à la tête de l'armée de Lyon en 1814, furent l'objet de la même mesure[163]. Napoléon voulut aussi destituer Gouvion Saint-Cyr pour avoir méconnu ses ordres après le 20 mars et fait reprendre la cocarde blanche aux troupes de la 22e division militaire, et le vieux Kellermann, duc de Valmy, comme ayant voté l'acte de déchéance le 1er avril 1814[164]. Mme de Gouvion Saint-Cyr écrivit à Davout une lettre qui apaisa l'empereur ; le maréchal en fut quitte pour une villégiature obligatoire dans son château de Reverseaux[165]. Napoléon ne donna pas suite non plus à sa première décision à l'égard du duc de Valmy[166]. Sérurier qui avait, lui aussi, voté comme sénateur l'acte de déchéance, fut maintenu dans ses fonctions de gouverneur des Invalides. L'empereur se contenta de ne point le nommer à la Chambre des pairs, et la leçon était tout de même bien méritée[167]. Oudinot, comme Gouvion Saint-Cyr, avait refusé, après le 20 mars, d'obtempérer aux ordres de Napoléon. Il n'avait laissé proclamer l'empire à Metz qu'au moment où allaient l'y forcer la garnison et le peuple en révolte. Relevé de son commandement, il fit tous ses efforts pour rentrer en grâce. Il adressa une lettre à l'empereur, supplia Davout, Suchet, Jacqueminot d'intercéder pour lui. Rends-toi à l'instant chez l'empereur, écrivit-il à Suchet, dis-lui ce que tu penses de moi ; accuse-toi de ne m'avoir fait parvenir ta lettre et celle de Ney que le 27 au soir. Dis que jamais Oudinot n'a oublié ce qu'il doit à Napoléon, que si Oudinot a des torts, il ne les connaîtra pas plus tôt qu'il voudra les expier et les réparer. J'ai besoin de ta démarche pour ma femme, nies enfants, qui tous partagent le malheur qui m'anéantit[168]. L'empereur révoqua l'ordre d'exil en Lorraine qu'il avait fait tenir à Oudinot et consentit à le voir aux Tuileries, mais il le laissa sans emploi[169]. Napoléon, qui n'aurait pas sans doute tenu rigueur au maréchal pour sa conduite à Metz, ne pouvait oublier que, l'année précédente, le duc de Reggio s'était fait battre à Bar-sur-Aube, à cause de ses mauvaises dispositions la veille de la bataille et de sa funeste indécision pendant le combat. Quoique Macdonald se fût montré très zélé royaliste, qu'il eût fait l'impossible à Lyon et à Villejuif pour organiser la résistance, l'empereur aurait voulu lui donner un commandement. Mais le maréchal, rentré à Paris après avoir accompagné Louis XVIII jusqu'à la frontière, était inébranlablement résolu à ne point servir sous le nouveau gouvernement. En vain le général Maurice Mathieu, son ancien chef d'état-major à l'armée des Grisons, le supplia de venir aux Tuileries où l'attendait l'empereur, en vain Davout lui-même força sa porte pour l'y déterminer, il resta inflexible. De guerre lasse, l'empereur lui accorda la seule grâce qu'il eût daigné demander : l'autorisation d'aller vivre en bon bourgeois dans sa propriété de Courcelle, près de Gien[170]. Après avoir publié un violent ordre du jour contre Napoléon, Moncey avait quitté Paris le 20 mars. Il écrivit le surlendemain à l'empereur qu'il comptait se retirer à la campagne. Déjà Napoléon l'avait remplacé par Rovigo dans les fonctions de premier inspecteur général de la gendarmerie[171]. Mais n'aurait-il pas dû se rappeler ce que Moncey avait fait en 1814 à la tête de la garde nationale parisienne et lui rendre ce commandement ? Il se contenta de le nommer membre de la Chambre des pairs, de même que Lefebvre qui, lui, n'avait pas eu de commandement pendant la campagne de France et était resté sans fonctions sous Louis XVIII[172]. Il est juste de faire remarquer que Lefebvre avait soixante-sept ans, et que l'empereur voulait avec raison de jeunes commandants de corps d'armée. Masséna n'avait secondé que très mollement le duc d'Angoulême pendant la courte campagne des bords du Rhône, et aussitôt après la capitulation de La Pallud il s'était empressé de proclamer l'empire. Le 14 avril, il adressa à Napoléon un rapport justificatif qui se terminait ainsi : Je ne puis dissimuler à Votre Majesté combien j'ambitionne l'honneur de la revoir pour l'assurer de mon dévouement sans bornes[173]. L'Empereur écrivit au prince d'Essling une lettre de félicitations, l'appela à Paris, l'y reçut avec de grands témoignages d'amitié ; mais, malgré sa quasi-promesse, il préféra ne pas lui rendre le gouvernement de la 9e division militaire. Pour contenir lès royalistes de Marseille, il fallait un homme qui n'eût pas commandé là au nom de Louis XVIII. L'empereur offrit à Masséna, que ses infirmités rendaient impropre à servir dans les armées d'opérations, le gouvernement des 4e et 5e divisions militaires comprenant la Moselle, la Meurthe et les Vosges. Le maréchal refusa ce poste et resta à Paris où il se montra fort assidu aux séances de la Chambre des pairs[174]. Bien que Mortier, gouverneur de Lille, Suchet, gouverneur de Strasbourg, et Jourdan, gouverneur de Rouen, fussent restés fidèles au roi pendant deux ou trois jours après le 20 mars, ils ne s'étaient pas compromis comme Oudinot et Gouvion Saint-Cyr. L'empereur ne pouvait leur garder rancune. Il ne voulut point toutefois les maintenir dans les postes qu'ils tenaient de Louis XVIII. C'était pour lui un principe[175]. Chargé d'abord de l'inspection des places du nord-est, Mortier fut désigné pour le commandement de la cavalerie de la garde et enfin mis à la tête de la jeune garde[176]. Suchet eut l'armée des Alpes[177] ; Jourdan reçut le gouvernement de Besançon, ville forte de première ligne où Davout jugeait nécessaire qu'il y eût un maréchal de France[178]. En disgrâce depuis 1807 pour avoir, a-t-on dit, fermé trop complaisamment les yeux sur les concussions de Bourrienne dans les villes hanséatiques, Brune avait demandé vainement, au début de la campagne de France, à reprendre du service[179]. Pendant la Restauration, il était aussi resté sans emploi. Après le retour de l'empereur, Brune offrit de nouveau son épée. Les qualités d'administrateur dont il avait fait preuve en Belgique, dans la Gironde, dans la Vendée, en Toscane, le désignaient pour le gouvernement d'une des provinces où persistaient les troubles. Envoyé à Marseille comme gouverneur de la 9e division militaire, il fut chargé en même temps de l'organisation et du commandement du corps d'armée du Var[180]. Le maréchal Ney, arrivé à Paris avec ses troupes, le 23 mars, reçut le même jour une mission dans les départements du nord et de l'est. Le but patent était d'inspecter les places ; le but secret, de juger de l'état des esprits, de donner des renseignements sur les officiers et les fonctionnaires, de proposer, s'il y avait lieu, des destitutions ou des remplacements[181]. Ney remplit cette mission avec zèle, mais il eut le mauvais goût de manifester contre les Bourbons des sentiments d'une violence inouïe. Dans les réunions d'officiers, il exhalait des injures contre le roi et les princes. C'est une famille pourrie[182], disait-il. Ces propos n'étaient point de nature à lui ramener l'opinion, qui lui était généralement hostile. Même chez les bonapartistes, jusque dans l'entourage de l'empereur, on blâmait sa conduite à Lons-le-Saunier. Ce méchant jeu de mots courait Paris : Il fallait être né (Ney) pour ça ! Et sa revirade n'empêchait point qu'on ne le soupçonnât. Si l'on emploie Ney en campagne, écrivit un anonyme à l'empereur, il faut lui donner un état-major dont on soit sûr. Il ne manquait pas de gens pour rappeler à Napoléon l'inoubliable scène de Fontainebleau, et peut-être lui avait-on rapporté les paroles de Ney lors de son récent passage à Dijon : Je me félicitais d'avoir forcé l'empereur à abdiquer, et maintenant il me faut le servir ![183] Pour comble, le maréchal, au retour de son inspection, vers le 15 avril[184], commit la prodigieuse maladresse de s'excuser à l'empereur du mot sur la cage de fer. — Ce propos est vrai, dit-il, mais c'est que déjà j'avais pris mon parti, et je crus ne pouvoir mieux dire pour cacher mes projets. Napoléon resta muet, mais dans ses yeux le maréchal vit briller un éclair[185]. Désespéré, plein de confusion et de remords, accusant tout le monde et soi-même, Ney se retira dans sa terre des Coudreaux. Pendant six semaines, on n'entendit plus parler de lui. On le disait en disgrâce ; le bruit se répandit même qu'il avait été arrêté[186]. Il revint à Paris pour la cérémonie du Champ de Mai. Nommé pair de France le 2 juin, il alla à l'Elysée, quatre jours après, pour obtenir l'ordonnancement d'une somme de 37.000 francs due sur son traitement arriéré et sur ses frais de tournée[187]. Vous voilà, lui dit Napoléon. Je vous croyais émigré. — J'aurais dû le faire plus tôt ! riposta amèrement le maréchal[188]. Le 11 juin, il revint encore aux Tuileries, mais il ne fut pas question dans ces deux entretiens d'un commandement pour lui à l'armée du Nord[189]. Ney, sans doute, qui savait que Napoléon l'appelait la bête noire[190], n'osait en solliciter. Mais le 11 juin, au moment de quitter Paris, l'empereur eut un scrupule. Pouvait-il condamner à un repos dégradant le héros de tant de batailles ? Pouvait-il, à l'heure du péril, priver d'un pareil soldat et la France et soi-même ? Il écrivit au ministre de la Guerre : Faites appeler le maréchal Ney ; dites-lui que, s'il veut se trouver aux premières batailles, il soit rendu le 14 à Avesnes, où sera mon quartier-général[191]. Napoléon, sans doute, crut agir dans l'intérêt de l'armée ou, ce qui était identique, dans son propre intérêt. Il agit aussi par commisération. Le ton de son billet l'indique. Ce n'est point un ordre, ce n'est qu'un avis qui laisse le maréchal libre de sa conduite. Que Ney vienne s'il veut... Mais Ney ne pouvait ne pas vouloir se trouver aux premières batailles[192], n'eût-ce été que dans l'espoir de s'y faire tuer[193]. Il partit le 12 juin de Paris et arriva le 13 à Avesnes, où il dîna avec l'empereur, mais il ne reçut que dans l'après-midi du 15, c'est-à-dire quand les opérations étaient commencées, le commandement des 1er et 2e corps d'armée[194]. Depuis qu'il était passé roi, selon l'expression en usage dans l'armée, Murat ne figurait plus sur la liste des maréchaux. Trois semaines avant l'entrée en campagne, Joachim, tombé du trône, s'était réfugié dans les environs de Toulon. Il ne lui restait pas même son sabre de soldat. Il conjura l'empereur de le lui rendre. Je veux, écrivit-il, verser pour vous la dernière goutte de mon sang. Napoléon refusa. El ne croyait pas pouvoir donner un commandement dans l'armée française à un Français qui avait combattu contre elle un an auparavant. Puis il en voulait à son beau-frère d'avoir commencé trop tôt, au mépris de ses instructions, la guerre contre les Autrichiens ; il lui en voulait surtout de s'être fait battre[195]. Plus tard, dans les rêveries de Sainte-Hélène, Napoléon regretta sa décision envers ce grand meneur de chevauchées. A Waterloo, disait-il, Murat nous eût valu peut-être la victoire. Que fallait-il ? Enfoncer trois ou quatre carrés anglais. Murat était précisément l'homme de la chose[196]. Peut-être, en effet, Murat, qui avait le double don d'imprimer à ses cavaliers un élan furieux et de méduser l'ennemi, eût-il passé sur le ventre aux Anglais ? La mémoire de Grouchy est liée désormais au souvenir maudit de Waterloo, si bien qu'on a oublié les beaux services et les actions d'éclat de ce valeureux capitaine. S'il n'avait pas l'élan entraînant de Murat, il savait comme lui faire manœuvrer les masses de cavalerie. Commandant en second de l'expédition d'Irlande en l'an V, gouverneur de Madrid en 1808, colonel-général des chasseurs et chevau-légers en 1809, chef de l'Escadron sacré pendant la retraite de Russie, il avait contribué aux victoires de Hohenlinden, d'Eylau, de Friedland, de Wagram et de la Moskowa. Après Vauchamps, dit-on, l'empereur avait pensé à le nommer maréchal d'Empire. En disgrâce sous Louis XVIII, Grouchy fut envoyé à Lyon, le 31 mars, pour combattre le duc d'Angoulême. Promu maréchal à la suite de cette courte et facile campagne, il fut mis à la tête de l'armée des Alpes, puis rappelé à Paris le 8 mai. L'empereur comptait lui donner les quatre corps de cavalerie de l'armée du Nord. C'est comme commandant en chef de la cavalerie que Grouchy entra en Belgique le 15 juin ; pour son malheur, il allait, dès le lendemain, être chargé d'un commandement plus important encore. VI Le choix d'un major-général préoccupait gravement Napoléon. Par qui pourrait-il remplacer Berthier ? Le prince de Wagram n'était ni un capitaine, ni un organisateur, ni un esprit élevé ; mais il possédait des connaissances techniques étendues, et il avait porté à la centième puissance les qualités d'un bon expéditionnaire. Infatigable, consciencieux, diligent, prompt à saisir les ordres les plus compliqués, habile à les traduire dans tous leurs détails avec une exactitude, une précision et une clarté admirables, ponctuel enfin à les transmettre au moment déterminé, il avait été pour Napoléon un instrument parfait[197]. Avec lui, l'empereur était tranquille ; les ordres étaient rédigés de telle sorte que ceux qui les recevaient n'avaient aucun doute ni aucune hésitation sur la façon de les exécuter. Et ces ordres arrivaient toujours, Berthier dût-il faire porter chacun, s'il le croyait prudent, par huit officiers prenant huit routes différentes[198]. On disait Berthier affaibli de corps et d'esprit. En 1814, cependant, sa correspondance témoigne que sa plume avait gardé son activité et sa lumineuse précision. L'empereur, qui se souvenait des services du prince de Wagram pendant la dernière campagne, le regrettait et ne désespérait pas de le voir rentrer en France. — Cette brute de Berthier ! disait-il à Rapp, il reviendra. Je lui pardonne tout, mais à la condition qu'il mettra son habit de garde du corps pour paraître devant moi2[199]. Berthier, en effet, chercha à rentrer en France où il avait laissé la princesse de Wagram avec son fils et ses deux filles. Resté fort peu de temps à Gand, il était venu au château de Bamberg, propriété de son oncle par alliance, le roi de Bavière. Au commencement de mai, il se mit en route pour gagner par Bâle la frontière française ; mais il ne put dépasser Stockach, où se trouvait le quartier-général du prince de Hohenzollern[200]. Les Alliés aimaient mieux sans doute tenir Berthier à demi-prisonnier en Bavière que de le savoir dans l'état-major de Napoléon. Il revint fort tristement à Bamberg. Dans l'après-midi du 1er juin, comme un régiment de dragons russes en marche vers la France défilait devant le château, on vit Berthier quitter brusquement la fenêtre du premier étage où il se trouvait, apparaître peu après à une fenêtre du troisième et tomber sur le pavé. On le releva mort, le crâne brisé[201]. Depuis trois semaines déjà l'empereur s'était décidé à prendre comme major-général le maréchal Soult, qui, à ce qu'il semble, s'était lui-même proposé pour ces fonctions[202]. Suspect aux amis du roi, haï par les bonapartistes comme par les libéraux et exécré par le corps entier des officiers, Soult s'était retiré à Villeneuve-l'Etang[203]. Cette retraite se trouvant fort à propos peu éloignée de Paris, il vint aux Tuileries dès le 26 mars[204]. Il est vraisemblable que ce ne fut pas pour rappeler à l'empereur qu'il l'avait traité de fou et d'aventurier dans son dernier ordre du jour[205]. A la suite de cet entretien, dont rien n'a transpiré, Soult échangea plusieurs lettres avec Davout qui lui montrait de l'amitié. Mais, malgré les démarches promises par le prince d'Eckmühl, la décision de l'empereur se lit attendre. Je désire, écrivait Soult le 11 avril au ministre de la Guerre, que Votre Excellence ait la bonté de répondre à la lettre que j'ai eu l'honneur de lui adresser avant-hier, afin que je sois à même de me conformer à la décision que Sa Majesté aura rendue à mon égard[206]. Quelques jours plus tard, Soult, qui avait envoyé son serment par écrit, fut invité à venir le renouveler solennellement devant l'empereur[207]. Le duc de Dalmatie pouvait se regarder désormais comme rentré en grâce. Le 9 mai, il fut nommé major-général. Soult était aussi supérieur à Berthier qu'un homme de pensée et d'action l'est à un bon commis. Mais il n'avait jamais rempli les fonctions de chef d'état-major dans un corps d'armée[208] ; l'habitude de ce service ne lui manquait pas moins que les qualités d'application et d'exactitude qu'il y faut apporter. Bailly de Monthyon, qui, regardé comme le bras droit. de Berthier, avait été chef de l'état-major général de 1812 à 1814 et qui, en 1813, en l'absence du major-général, avait fait deux fois l'intérim ; Drouot, aide-major-général de la garde impériale ; Belliard, chef d'état-major de Murat de 1805 à 1808 et aide-major-général pendant la campagne de Saxe et la campagne de France ; Reille et Drouet d'Erlon, tous deux anciens chefs d'état-major de Lannes ; Bertrand, si longtemps aide de camp de l'empereur et si habitué, comme grand-maréchal, à recevoir et à transmettre ses ordres ; Gérard, ex-chef d'état-major de Bernadotte ; Ruty, chef d'état-major, en 1813, de l'artillerie de la Grande Armée, et tant d'autres généraux de division auraient été peut-être plus en état de remplacer le prince de Wagram. Mais pour des raisons de hiérarchie, — ou d'étiquette, — l'empereur voulait comme major-général un maréchal de France. Or, pas plus que Soult, aucun des maréchaux, sauf Davout et Suchet, ne paraissait apte à ces fonctions. Au moment où la France était en pleine organisation militaire, à la veille d'une guerre qui menaçai t d'avoir pour théâtre, avec la Vendée et la frontière du nord, les Alpes et les Pyrénées, et alors qu'une crise politique pouvait se produire, il était de toute nécessité de laisser Davout au ministère de la Guerre et au gouvernement de Paris[209]. Mais il y avait le maréchal Suchet, ancien chef d'état-major de Joubert et de Masséna. Il semble que, au moins au point de vue de l'effet moral, l'empereur eût été bien inspiré de le préférer à Soult, car Suchet, lui, ne pouvait éveiller aucune suspicion, provoquer aucune défiance. Soult eût remplacé sans désavantage le duc d'Albuféra dans le commandement de l'armée des Alpes, et ce poste moins en vue eût moins attiré l'attention sur lui. Ainsi aurait été évité ce grand scandale, que le premier de l'armée, après l'empereur et le ministre de la Guerre, fût de tous les officiers généraux celui qui s'était rendu le plus haïssable à l'armée sous le gouvernement royal[210]. Soult ayant adressé un ordre à Vandamme avant que sa nomination eût été rendue officielle, le fougueux général écrivit à Davout cette lettre qui est vraiment d'une belle ironie : J'ai reçu une lettre par laquelle le duc de Dalmatie s'annonce comme major-général. Je crois devoir l'envoyer à Votre Excellence avant d'y répondre. Comme le duc de Raguse pourrait me donner le même avis, je dois regarder celui-ci comme non avenu jusqu'à ce que je sois prévenu de cette nomination par Votre Excellence ou par un décret impérial[211]. VII Avant de s'occuper des maréchaux, l'empereur avait nommé aux principaux commandements les généraux qui pouvaient ambitionner le maréchalat et qu'il y avait déjà promus dans son esprit. Il comptait trouver parmi ces hommes ayant leur chemin à faire, comme il disait, plus d'ardeur et de dévouement que chez ses anciens camarades tout chargés de gloire et d'honneurs. Il donna le 1er corps d'armée à Drouet d'Erlon, divisionnaire de 1805, combattant d'Iéna et de Friedland et l'un des meilleurs lieutenants de Masséna et de Soult dans les guerres d'Espagne. Reille, vétéran des campagnes d'Italie, divisionnaire de 1807, commandant une division de la garde à Wagram et chargé à la fin de 1812 du commandement en chef de l'armée de Portugal, eut le 2e corps. Gérard, colonel à Austerlitz, brigadier à Iéna, divisionnaire à la Moskowa, un des héros, avec Ney, des combats soutenus à l'arrière-garde pendant la retraite de Russie, et le seul officier de son grade qui eût commandé un corps d'armée durant la campagne de France, reçut le 4e corps. Le 5e corps (plus tard armée du Rhin) fut confié à Rapp, l'homme aux vingt-deux blessures, l'admirable défenseur de Dantzig, divisionnaire de 1805, aide de camp de Napoléon pendant douze ans. Mouton, comte de Lobau, un des plus habiles manœuvriers de l'armée, divisionnaire de 1807, eut le commandement du 6e corps en formation à Paris. Charles Lebrun, fils du duc de Plaisance et vaillant général de cavalerie, fut mis provisoirement à la tête du 3e corps. L'empereur comptait l'y remplacer, quand il en serait temps, par un général plus habile[212]. Au milieu d'avril, il donna ce corps d'armée à Vandamme. Il n'aimait point ce rude soldat, mauvais coucheur s'il en fût ; mais les grandes qualités militaires de Vandamme et son ancienneté de grade (il avait été nommé divisionnaire à vingt-sept ans, en 1799) le désignaient entre tous pour un commandement. Il l'exerça, du moins tant qu'il ne releva que de soi-même, avec une conscience, une fermeté, un zèle incomparables, soigneux de tous les détails d'organisation, d'habillement, d'instruction militaire, prompt à sévir contre les embaucheurs et les alarmistes, ardent à enflammer l'esprit des soldats, des mobilisés et des habitants des Ardennes et de la Meuse. Vandamme mérita cet éloge de Davout : Vous avez communiqué tout votre feu dans le pays où vous êtes[213]. Envoyé à Bordeaux pour y faire reconnaître le gouvernement impérial, Clausel, qui s'était particulièrement distingué en Italie et en Espagne, resta dans cette ville comme gouverneur de la lie division militaire ; il reçut en outre le commandement du corps des Pyrénées Occidentales. Le général Decaen, vétéran des campagnes du Rhin et de la Vendée, et six ans gouverneur de l'île de France et de l'île Bourbon, avait sincèrement voulu conserver Bordeaux au roi ; mais, comme la duchesse d'Angoulême elle-même, il avait dû céder aux événements. Il revint à Paris, d'où il repartit pour Toulouse à la fin de mai. L'empereur lui avait confié le commandement des 8e et 10e divisions militaires et du corps des Pyrénées Orientales. Decaen aurait mieux fait de demander un corps ou une division à l'armée du Nord que d'accepter ce poste à la fois politique et militaire. En raison de sa conduite à Bordeaux, il allait se trouver à Toulouse dans l'alternative de devenir suspect à l'empereur, s'il montrait peu de zèle, ou de se rendre doublement odieux aux royalistes, s'il agissait avec la fermeté rigoureuse qu'exigeaient les circonstances. Decaen prit ce dernier parti, comme il le devait, et se fit exécrer dans tout le Languedoc[214]. Rayé des cadres en 1804, pour avoir manifesté en pleine audience l'indignation que lui causait le procès de son camarade Moreau, Lecourbe avait été réintégré dans son grade par Louis XVIII. A Lons-le-Saunier, il avait tenté d'empêcher la défection du maréchal Ney, et, sur le rapport de celui-ci, Napoléon avait prescrit de l'arrêter. Mais il vint aux Tuileries protester de son dévouement. Heureux de s'attacher cet officier éprouvé qui passait pour républicain et dont le nom était resté cher aux anciens des armées de Sambre-et-Meuse, du Rhin et d'Helvétie, l'empereur lui donna le commandement du corps du Jura[215]. Lamarque s'était improvisé, le 20 mars, commandant de la place de Paris. Remplacé deux jours plus tard par le général Hullin, qui avait occupé ce poste de 1807 à 1814, il reçut une division du corps de Reille ; puis il fut envoyé en Vendée comme général en chef de l'armée de l'Ouest. Il avait combattu jadis les bandes des Abruzzes et les guérillas des sierras d'Aragon. Son expérience de la guerre de partisans le désignait pour commander contre les Vendéens[216]. Le général Durosnel, ancien aide de camp de l'empereur, eut le commandement en second de la garde nationale de Paris, Napoléon étant nominalement commandant en chef. Durosnel comptait de beaux services dans la cavalerie ; mais, tandis que Moncey, Ornano, Hullin, d'Hériot, Lespinasse s'étaient trouvés à Paris pendant la campagne de 1814, lui, fait prisonnier à Dresde, n'était rentré en France qu'après la paix. Ignorant ainsi ce qu'avait fait la garde nationale, et surtout ce qu'elle aurait pu faire, il se trouvait mal préparé à la commander. Avec du zèle et de l'énergie il aurait pu suppléer à cette inexpérience ; mais il se laissa circonvenir par son état-major, tout rempli de royalistes secrets et de libéraux aveuglés[217]. Loin d'insuffler l'esprit de patriotisme et d'abnégation dans toute la garde nationale, il ne tarda pas à prendre les sentiments de prudence égoïste qui guidaient l'élite de cette milice censitaire. Chargé de la révision du personnel[218], il fit ce travail à tort et à travers, comme s'il voulait seulement paraître donner satisfaction à l'empereur. Il lui fallut bien rayer des contrôles des officiers à la fois trop compromis et trop connus, comme Decazes et Rémusat, mais il y maintint des hommes tels que le major Billing, ami intime de Comte, rédacteur du Censeur, et le chef de légion Acloque, qui défendait à la musique de jouer Veillons au salut de l'Empire, sous prétexte que c'était un air incendiaire. De très chauds partisans de l'empereur furent destitués, nommément le commandant Beck, le seul des officiers supérieurs de la 6e légion qui eût combattu aux Buttes-Chaumont en 1814, le capitaine Albert, qui avait fait le voyage de l'île d'Elbe, le capitaine Ollivier, qui avait équipé à ses frais la moitié de sa compagnie[219]. En outre, Durosnel mit tout en œuvre pour empêcher la création des tirailleurs fédérés, puis pour en retarder l'organisation. Armer pareilles gens, disait-il, ce serait provoquer l'inquiétude et le mécontentement dans la garde nationale. Or, commandés exclusivement par des officiers à la demi-solde, et ayant pour chef le-général Darricau, qui avait gagné ses grades au siège de Toulon, en Egypte, à la Grande Armée et en Espagne, et qui, au contraire de Durosnel, avait la foi et l'ardeur, les tirailleurs fédérés eussent contribué efficacement à la défense de Paris. Comme le disaient Carnot et Davout, la création de ces bataillons d'ouvriers ne pouvait mal impressionner que les esprits hostiles ou pusillanimes[220]. Les nominations dans l'armée étaient faites par l'empereur motu proprio ou sur la proposition de Davout ; quelquefois même le ministre de la Guerre nommait directement aux emplois[221]. Pas plus que Napoléon, Davout n'était infaillible. Il y eut des choix maladroits, il y en eut de pitoyables. Berckheim et Millet, qui n'avaient jamais servi que dans la cavalerie, et Molitor, divisionnaire de 1802 (à trente-deux ans), qui, en raison de ses grandes qualités militaires, aurait dû être employé aux armées d'opérations, furent appelés à commander des gardes nationales, tandis que Marcognet, médiocre officier, et Donzelot, qui avait perdu l'habitude de la guerre dans ses sept années de gouvernement à Corfou, eurent l'un et l'autre une division au 1er corps de l'armée du Nord. Peu de jours après avoir été relevé de son commandement, le colonel du 14e chasseurs, un des plus fidèles officiers du duc d'Angoulême pendant la campagne du Midi, fut proposé pour un régiment de mobilisés. Un autre colonel, que sa lâcheté au feu avait jadis fait mettre en non-activité, fut aussi l'objet d'une proposition pour un régiment de ligne[222]. Enfin le général Moreau, le pusillanime commandant de Soissons en 1814, qui n'avait évité une condamnation capitale que grâce à la chute de Napoléon, fut désigné pour commander une brigade active[223]. L'empereur pouvait dire avec raison : Il me semble que, parmi les officiers généraux, il y a un grand nombre de jeunes gens plus habiles que ceux qu'on me propose[224]. Surchargé de travail et absorbé par les plus graves
soucis, l'empereur ratifiait souvent les propositions de Davout sans les
examiner. Il s'en prenait ensuite à ce ministre, qui, parait-il, était peu
aimé aux Tuileries à cause de sa raideur et de sa sévérité dans le service.
Aussi ne manquait-on point dans l'entourage impérial d'incriminer tous ses
actes susceptibles de quelque critique[225]. Afin d'avoir
une garantie de plus pour le personnel militaire, l'empereur chargea son aide
de camp Flahaut de réviser les propositions du ministre de la Guerre. Recueillez, lui écrivit-il, tous les renseignements qu'il vous sera possible sur les généraux et
officiers, car, si je fais de mauvais choix, c'est à vous que je m'en
prendrai[226]. D'une extrême
bravoure et excellent officier d'état-major, Flahaut s'était montré aussi
brillant cavalier à Friedland et à la Moskowa que diplomate habile à Neumark
et à Lusigny. Il n'en passait pas moins pour devoir à la faveur son
avancement vraiment extraordinaire. De fait, après n'avoir jamais commandé
qu'un escadron, il avait été nommé, à vingt-huit ans (en 1813), général de division. Si jeune lieutenant-général,
peut-être eût-il dû décliner cette mission, bien délicate vis-à-vis d'un
homme comme Davout. En tout cas, sans pour cela y mettre moins de zèle, il
aurait pu la remplir d'une façon plus discrète. Il s'installa chaque jour
plusieurs heures dans les bureaux de la Guerre, bouleversant les dossiers, se
faisant rendre des comptes, rayant de sa propre autorité des noms portés sur
les états de proposition et donnant même directement des ordres opposés à
ceux de Davout[227]. Les choix n'en
furent pas meilleurs[228], car, malgré
son dévouement et son intelligence, l'aide de camp de l'empereur ne pouvait
mieux juger que Davout ; mais le prince d'Eckmühl se sentit profondément
blessé de cette inquisition, dont au reste il fut assez vite délivré[229]. Il s'en était
expliqué avec l'empereur, lui disant que, si ce n'était une lâcheté
d'abandonner son poste en de pareilles circonstances, il ne resterait pas une
heure au ministère[230]. Parmi les officiers pourvus de commandements, il se trouvait donc quelques hommes incapables, usés avant l'âge ou d'un dévouement douteux ; mais le haut personnel de la dernière armée impériale formait cependant un admirable ensemble. On peut même dire que, à moins de révolutions et de guerres analogues à celles qui se succédèrent de 1789 à 1814, jamais l'armée française n'aura de pareils chefs. Indépendamment de leurs qualités militaires innées, ils possédaient cette force : l'expérience, et cette vertu : la jeunesse. Tous avaient fait plus de vingt ans la guerre, et aucun n'avait cinquante ans. Napoléon avait quarante-six ans, Davout quarante-cinq ans, Soult quarante-six ans, Ney quarante-six ans, Grouchy quarante-neuf ans, Drouet d'Erlon quarante-neuf ans, Lobau quarante-cinq ans, Lamarque quarante-cinq ans, Kellermann quarante-cinq ans, Reille quarante-quatre ans, Vandamme quarante-quatre ans, Rapp quarante-trois ans, Clausel quarante-trois ans, Suchet quarante-trois ans, Pajol quarante-trois ans, Gérard quarante-deux ans, Drouot quarante et un ans, Exelmans quarante ans. Voilà pour les commandants des corps d'armée et des corps de cavalerie. Parmi les généraux de division, plusieurs, Allix, Piré, Flahaut, Berckheim, Teste, avaient moins de quarante ans. Le plus jeune des généraux de brigade était La Bédoyère. Il avait vingt-neuf ans. VIII Chez ces hommes qui avaient mené si souvent les Français à la victoire, la foi dans le succès n'égalait malheureusement plus la vigueur physique et les talents militaires. Ils étaient trop bien renseignés sur les formidables armements de l'Europe et sur les faibles ressources de la France, en soldats et en matériel, pour ne pas voir que, à moins d'une suite de coups de fortune d'ailleurs toujours possibles à la guerre, l'empereur ne pourrait lutter longtemps avec sa petite armée contre les masses de la coalition. Le 10 juin, en passant à La Fère, le général Ruty, commandant en chef l'artillerie, dit au colonel Pion des Loches : — Bonaparte est perdu sans ressources. Le roi rentrera sous peu. Qu'allons-nous devenir ? Misérable armée qui n'a pas voulu tirer un coup de fusil il y a trois mois ! Dans une réunion d'officiers, la veille du passage de la Sambre, un autre général tint des propos si décourageants qu'au mépris de toute discipline le commandant de Négrier les releva vivement : — Ce n'est pas à vous, s'écria-t-il, de faire de pareilles réflexions. Le vin est tiré, il faut le boire et ne pas jeter la démoralisation parmi nous. La confiance manquait même aux officiers généraux que leurs sentiments ou la force des circonstances avaient entraînés à se déclarer les premiers pour Napoléon et qui, compromis comme ils l'étaient, auraient eu si grand intérêt à relever le moral de leurs camarades. Mais ils étaient d'autant plus inquiets qu'ils sentaient que leur tête serait un des enjeux de cette suprême partie[231]. La division régnait dans les états-majors. Les généraux qui, sans être de bien fervents royalistes, n'auraient pas cependant demandé mieux que d'achever tranquillement leur carrière sous les Bourbons, en voulaient aux complices du 20 mars d'avoir jeté le pays dans une aventure et provoqué une guerre effroyable. Ces derniers suspectaient les autres et les dénonçaient comme officiers sans énergie, patriotes tièdes et royalistes honteux. Il y avait enfin, plus ardentes que jamais, les compétitions, les rivalités, les jalousies pour les commandements. Si ménager de récompenses qu'ait été l'empereur à l'égard de ses vrais partisans, les autres généraux n'en craignaient pas moins que, après la première bataille, il n'y dit d'avancement que pour ceux-là Et, de leur côté, les ralliés de la première heure s'étonnaient de voir encore dans l'armée impériale des hommes comme Soult, Durutte, Bruny, Bourmont, Dumonceau. Le général Piré réclama contre l'insuffisance de l'indemnité d'entrée en campagne. C'est l'oubli des intérêts privés, dit-il, qui perd souvent la cause générale. Le général Maurice Mathieu exigea sa mise à la retraite pour ne pas devenir le subordonné de son cadet Clausel. Duhesme, d'abord placé au 38 corps, fut envoyé dans la jeune garde. Il ne peut, écrivait Davout, être mis sous les ordres de Vandamme. Le général Bonnet accusa le général Ornano de l'avoir desservi auprès de l'empereur, le provoqua et lui logea une balle dans la poitrine. Vandamme, qui avait un corps de 18.000 hommes, se plaignit au ministre de la Guerre que des généraux plus jeunes que lui eussent des commandements plus importants. Gressot écrivit à Soult que les généraux de l'armée du Rhin étaient unanimes à regretter d'être sous les ordres de Rapp, homme d'une nullité complète. Si l'on n'eût été au jour même de l'entrée en campagne, plus d'un général eût refusé de servir sous le prince de la Moskowa, et Vandamme, et même Gérard, passèrent avec humeur sous le commandement de Grouchy. Un officier de l'état-major de l'empereur écrivait à Davout : On se regarde comme des Croisés qui suivent la même aventure, mais sans aucun devoir les uns à l'égard des autres[232]. La camaraderie et la solidarité des généraux de 1815, il y a pour en témoigner ces belles paroles de Cambronne devant le conseil de guerre : J'ai refusé le grade de lieutenant-général, parce qu'il y a tant de jaloux ! Vous l'avez vu à Waterloo : nous avions un capitaine très renommé. Eh bien ! il n'a pas pu parvenir à mettre tout en ordre. On aurait dit que ma nomination était un passe-droit, que j'étais trop jeune. On m'aurait laissé dans l'embarras, et je ne voulais pas risquer de compromettre le salut de l'armée[233]. Au contraire des états-majors, les soldats et presque tous les officiers de troupe ont l'ardeur et la confiance. Tandis que les généraux voient la réalité, les soldats recommencent le rêve de gloire que l'invasion a interrompu, mais qu'ils ne peuvent croire achevé. L'empereur, dont les refrains des casernes et les chansons de marche ont, depuis un an, prédit le retour, n'est-il pas revenu ? Aux yeux des soldats, Napoléon est invincible. S'il a été vaincu en 1812, c'est par la neige ; en 1814, c'est par la trahison. Cette croyance, si propre à fortifier le moral de l'armée et que l'empereur, au reste, s'est toujours efforcé d'inspirer, a malheureusement pour contre-partie la suspicion de tout ce qui n'est pas Napoléon. On ne peut être vaincu que par la trahison, mais le soldat soupçonne la trahison partout. N'employez pas les maréchaux pendant la campagne, écrit-on à l'empereur. Les plaintes et les dénonciations contre les officiers qui, sous l'autre règne, ont montré quelque sentiment bourbonien ou orléaniste, ou qui seulement portent la particule, affluent chez les commandants de corps d'armée, aux Tuileries, dans les bureaux de la Guerre[234]. Aux avant-postes de l'armée du Rhin, une sentinelle tire sur un individu qui cherche à gagner la rive allemande à la nage. Le bruit se répand parmi les troupes que l'on a trouvé sur le cadavre un billet annonçant qu'il y a un complot pour faire sauter la poudrière de Strasbourg[235]. Le commandant de Condé, le colonel Taubin, s'excuse de certains retards dans l'approvisionnement de la place en disant qu'on ne veut pas lui obéir, et, rendu fou par la dure réponse du sous-chef d'état-major du 1er corps qu'un officier qui ne sait pas se faire obéir est indigne de commander, il se brûle la cervelle. La garnison croit que le colonel s'est tué pour éviter d'être déféré au conseil de guerre comme complice d'une conspiration[236]. Les esprits ainsi troublés par la crainte des trahisons, on conçoit quelle émotion cause dans le 1er corps d'armée la distribution de fausses cartouches. Le fait était, d'ailleurs, des plus graves, car la direction d'artillerie de Lille avait délivré non des cartouches de bois, dites d'exercice, ce qui eût pu être le résultat d'une erreur, mais des cartouches à balle contenant du son au lieu de poudre. Drouet d'Erlon fit garder à vue le colonel directeur de l'artillerie. Depuis longtemps, dit-il dans un rapport à Davout, j'avais des soupçons sur ses opinions. Davout prescrivit une enquête qui, comme toutes les enquêtes, n'aboutit à aucun résultat. On ne put découvrir ni comment, ni pourquoi, ni depuis quand ces étranges cartouches se trouvaient en magasin[237]. La discipline, qui, même dans les armées d'Austerlitz et
de Wagram, était beaucoup moins forte qu'on ne se l'imagine, se relâche
encore par l'effet de cette suspicion presque universelle, comme aussi des
événements accomplis depuis une année. Les soldats sont peu portés à obéir à
des chefs qu'ils croient capables de ragusades (c'est
le mot en usage) et à respecter des généraux et des colonels qui,
après les avoir fait marcher trois mois auparavant contre leur empereur,
manifestent désormais le plus ardent bonapartisme. Seuls les officiers qui,
pendant la période du 5 au 20 mars, ont par leurs propos ou leurs actes
encouragé ou provoqué les hommes à la défection, conservent leur autorité. Et
encore pas toujours ! Six officiers du 1er cuirassiers ayant été avancés d'un
grade par l'empereur pour avoir entraîné le régiment sont reconnus, selon le
règlement, devant le front des troupes. Les cuirassiers les accueillent par
des murmures et des huées. Nous en avons fait autant
que vous, crient-ils, et nous n'avons ni
avancement, ni autre récompense. Dans plus d'un corps de troupe, on
espère que tous les officiers seront remplacés par les sous-officiers. Dans
plus d'une Adresse des régiments à l'empereur, on réclame la révocation du
colonel. Nous demandons, écrivent les dragons
du 12e régiment, la destitution de notre colonel,
dont l'ardeur pour Votre Majesté n'est pas à la hauteur de nos sentiments.
— Nous sommes persuadés, écrivent les
officiers, sous-officiers et soldats du 75e de ligne, que l'intention de Votre Majesté n'est pas de conserver un traître à la
tête d'un régiment français[238]. Il y a une autre raison encore à l'esprit d'indiscipline. Dupes des apparences, comme à peu près tout le monde à cette époque, les soldats s'imaginent qu'ils ont fait seuls la révolution qui a ramené l'empereur aux Tuileries[239]. Napoléon leur doit le trône ; en conséquence ils se croient tout permis au cri de : Vive l'Empereur ! Davout n'a-t-il pas déclaré que l'abandon de leurs corps par les soldats pendant les derniers événements ne doit être considéré que comme une preuve de dévouement à l'empereur ? le sage Drouot, lui-même, ne conclut-il pas à la réintégration dans les cadres de la vieille garde de sous-officiers cassés en 1814 pour avoir déserté par chagrin du départ de Sa Majesté[240] ? Quels exemples pour une armée ! Le 26 mars, les dragons de la garde arrivent de Tours ; ils apprennent sur les quais que l'empereur passe une revue. Il y a un an qu'ils n'ont vu leur idole ! Ils entraînent leurs officiers, enfilent le guichet du Louvre et débouchent au grand trot, tout couverts de boue, les chevaux en sueur, sur la place du Carrousel, en vociférant : Vive l'empereur ! Quelques jours plus tard, à une inspection à rangs ouverts, des dragons de la ligne se donnent le mot. Soudain, le premier rang fait demi-tour, et les deux rangs lèvent leurs sabres et les croisent au-dessus de l'empereur. Il courbe la tête en riant et achève son inspection sous cette voûte d'acier[241]. Le fanatisme pour Napoléon peut excuser ces manquements à la discipline, ces caprices antiréglementaires. Il y a des fautes plus graves. Les troupes de Grouchy, en marche de Pont-Saint-Esprit sur
Marseille après la capitulation de La Pallud, commettent les pires excès à
Orgon, sous prétexte que, l'année précédente, quand Napoléon exilé a traversé
ce bourg, les habitants l'ont voulu pendre[242]. A Aire (Pas-de-Calais), le 105e de ligne en route
pour la frontière commence à démolir une maison toute neuve dont la façade
est décorée de fleurs de lys ; pour calmer les soldats, le commandant de
place ne trouve d'autre moyen que de faire incontinent mener en prison le
malheureux propriétaire. A Aix, des canonniers, offusqués de voir de jeunes
royalistes se promener avec d'énormes roses blanches à la boutonnière, les
dispersent à coups de sabre[243]. A
Saint-Germain, les tirailleurs de la jeune garde se mutinent et refusent
d'entrer dans leur caserne parce qu'il n'y a point de drapeau tricolore à la
porte. Dans les théâtres, les soldats maltraitent les spectateurs qui
n'applaudissent pas la Marseillaise. Dans les cafés ils battent les
gens qui refusent de crier : Vive l'empereur ![244] Entrés en
Belgique, ils pillent à qui mieux mieux. La maraude
et le pillage sont dans l'armée, écrit le 17 juin à Soult le général
de gendarmerie Radet. La garde elle-même en donne
l'exemple. On a pillé des magasins à fourrages, volé des chevaux au piquet.
On a pillé toute la nuit chez les Belges qui avaient tout donné de bon cœur
et pansé nos blessés. Les hommes méconnaissent l'autorité de la gendarmerie.
J'offre ma démission de Grand-Prévôt de l'armée
[245]. Des régiments refusent le pain biscuité. Friant se plaint
que les grenadiers de la garde traînent des femmes avec eux. Un voltigeur du
96e déserte en armes pour aller voir ses parents ; il rentre au bout de huit
jours, et le colonel ne lui inflige qu'une légère punition disciplinaire[246]. 292 soldats
des 39e et 59e de ligne déclarent qu'ils déserteront s'ils ne passent point
dans la garde. Des hommes du train qui ont suivi l'empereur depuis Grenoble
se font incorporer au 1er hussards, et des hussards de ce régiment se font
incorporer dans la garde[247]. Le général
Barrois, commandant une division de jeune garde en formation, reçoit cette
singulière supplique : Monsieur le comte, nous
sommes 1.374 hommes des 1er et 2e de ligne et du 1er léger qui avons toujours
servi avec honneur. Nous croyons donc qu'il est de notre devoir de vous
prévenir que nous ne voulons pas rester davantage dans nos régiments, bien
que nous n'ayons pas à nous plaindre. Mais ayant servi dans la garde, nous
voulons y retourner. Il serait imprudent de nous arrêter, le parti que nous
avons pris étant irrévocable. Vous pouvez empêcher la faute que nous allons
faire en obtenant notre rentrée à la garde. Mais nous ne voulons pas attendre
plus de quatre jours. Nos colonels sont prévenus[248]. Il y avait des rivalités de corps qui provoquèrent des rixes et des duels. L'empereur se vit forcé d'ordonner la suppression, dans les cinq régiments de cavalerie portant le n° 1, des aiguillettes blanches que jalousaient les autres régiments[249]. Les soldats de Vile d'Elbe ayant été logés dans l'hôtel des Cent-Suisses, place du Carrousel, quelques enthousiastes avaient substitué à l'inscription de la grande porte celle de : Quartier des Braves. Les autres braves de l'armée, tout bonapartistes qu'ils étaient, virent là une offense. Les grognards furent plaisantés par leurs camarades de la ligne et même de la vieille garde. On échangea des coups de sabre. Il fallut effacer l'inscription[250]. Mais si l'armée est énervée par l'indiscipline, elle est animée par l'impatience de combattre, la résolution de vaincre, l'idolâtrie pour l'empereur, la haine de l'étranger. Un espion écrit de Paris à Wellington au milieu du mois de mai : Pour donner une juste idée de l'enthousiasme de l'armée, je n'ai besoin que de tirer un parallèle entre les époques de 92 et la présente année. Encore la balance sera en faveur de Buonaparte, car aujourd'hui ce n'est plus de l'enthousiasme, c'est de la frénésie. La cause des soldats, qui n'ont rien à espérer après la chute de leur chef, est inséparable de la sienne. Aussi je ne dois pas dissimuler à Votre Excellence que, quoi qu'en disent les bourbonistes, la lutte sera sanglante et contestée à outrance. — Les troupes, rapporte le général Hulot, étaient exaltées au plus haut point, leur ardeur était une espèce de fanatisme. — Le moment d'entrer en campagne, écrit le 15 juin, dans ses notes journalières, le général Foy, est parfaitement choisi. Les troupes éprouvent non du patriotisme, non de l'enthousiasme, mais une véritable rage pour l'empereur et contre ses ennemis. C'est en toute sincérité qu'un déserteur et un traître, l'adjudant-commandant Gordon, envoie ce renseignement à Clarke : Le roi, à son retour, devra licencier l'armée et en créer une nouvelle. Les soldats sont forcenés ; leur esprit est affreux[251]. L'esprit des soldats est affreux, c'est-à-dire tous les soldats demandent à être passés en revue par l'empereur. Ils reçoivent les nouvelles aigles avec des acclamations enthousiastes et des serments menaçants. Ils répondent aux cris de : Vive l'armée ! par les cris de : Vive l'empereur ! Ils mettent pour les prises d'armes de petits drapeaux tricolores dans les canons de leurs fusils. Ils jurent, les sabres croisés au-dessus des flammes de punch, de vaincre ou de mourir. Ils disent en montrant le buste de l'empereur : Il sera avec nous ! Ils élèvent à leurs frais un monument au golfe Jouan. Ils font frapper des médailles commémoratives du retour de Napoléon. Ils abandonnent un jour, deux jours, cinq jours de solde pour les frais de la guerre. Ils quittent leurs garnisons et traversent villes et villages en criant : Vive l'empereur ! et en chantant le Père la Violette ! Ils déchirent les drapeaux blancs en lambeaux, qu'ils emploient aux plus vils usages. Ils arrêtent eux-mêmes les embaucheurs et les bourrent de coups de crosse. Ils arrachent les déserteurs des mains des gendarmes et les dégradent sans autre forme de procès. Ils veulent doubler les étapes pour être aux premières batailles. Ils déclarent qu'ils n'ont point besoin de cartouches puisqu'ils aborderont. l'ennemi à la baïonnette. Ils disent qu'ils se f... de leur peau, pourvu que l'empereur rosse les Alliés[252]. Impressionnable, raisonneuse, sans discipline, suspectant ses chefs, troublée par la crainte des trahisons et ainsi accessible peut-être à la panique, mais aguerrie et aimant la guerre, enfiévrée de vengeance, capable d'efforts héroïques et de furieux élans, et plus fougueuse, plus exaltée, plus ardente à combattre qu'aucune autre armée républicaine ou impériale, telle était l'armée de 1815. Jamais Napoléon n'avait eu dans la main un instrument de guerre si redoutable ni si fragile. |
[1] La situation générale au 15 janvier 1815 (Arch. Guerre) porte 195.883 officiers et soldats, dont il faut défalquer 3.208 hommes des régiments suisses et du 1er régiment étranger (La Tour d'Auvergne), que Napoléon fut dans la nécessité de licencier. Restait donc 192.675 hommes. Mais l'armée avait été augmentée de 7.000 ou 8.000 soldats rentrés dans les corps postérieurement au 15 janvier, en vertu du rappel ordonné en novembre 1814. (Les opérations de cette levée, qui devait être de 60.000 hommes et qui en donna à peine 35.000, continuèrent jusque vers le 15 février.) Quant à ceux des rappelés qui avaient rejoint du 15 au 20 mars les chefs-lieux de départements, conformément à l'ordonnance royale du 9 mars, il n'y a pas à les compter ici, car au 20 mars ils n'étaient point encore incorporés.
La maison militaire, la gendarmerie, les vétérans, etc., ne sont point compris dans ces 200.000 hommes.
Je cite la situation du 15 janvier par la bonne raison que c'est, avec celle du 1er janvier, la seule authentique qui existe pour l'armée royale en 1815. La situation des Archives nationales (AF *, IV, 1153), qui porte faussement la date du 15 mars, est manifestement postérieure au 5 avril, puisqu'il y est fait mention de décrets impériaux du 2 avril et du départ pour Lyon de la division Girard (4 avril).
Napoléon (Mém. pour servir à l'histoire de France en 1815, 19) porte l'effectif de l'armée royale, au 20 mars, à 149.000 hommes, et Charras (Campagne de 1815, I, 40) à 224.000 hommes. Je dis ici, une fois pour toutes, que je ne m'arrêterai pas à discuter les effectifs cités par l'empereur à Sainte-Hélène, ni ceux donnés par le colonel Charras, Napoléon et Charras augmentant ou diminuant alternativement le nombre des soldats, le premier dans l'intérêt de sa mémoire, le second dans l'intérêt de sa thèse. Les tableaux donnés dans la Relation écrite par Gourgaud, sous la dictée de l'empereur, et dans les Mémoires pour servir à l'histoire de France en 1815 sont en général de purs trompe-l'œil. Quant aux états de situation donnés par Charras d'après des copies à lui envoyées de Paris, ils présentent presque tous, je l'ai vérifié, de notables différences avec les originaux des Archives. Est-ce le copiste qui a mal copié ou Charras qui a mal lu ?
[2] Davout (Rapport à l'empereur. — s. d., 25 ou 26 mars ? — Arch. nat., AF. IV, 1936) dit : 26.000 ; les situations portent 31.469, 32.884 et même 38.233.
[3] Rapport précité de Davout à l'empereur. — La situation du 1er janvier porte à 101.503 le nombre des déserteurs ; mais en janvier et février la levée des 60.000 hommes, commencée en novembre 1814 et qui portait sur les hommes de cette catégorie, avait continué de produire son effet. Nombre d'hommes avaient rejoint les corps, d'autres avaient obtenu aux revues d'appel des congés définitifs.
[4] L'ordonnance du 9 mars, publiée le 12 mars, prescrivait aux militaires en congé de toute catégorie de se rendre les uns à leur corps, les autres dans les chefs-lieux des départements pour y être organisés en bataillons de réserve. L'empereur, qui ne voulait pas de ces bataillons de réserve (à Davout, 26 mars, Arch. Guerre, carton des lettres de Napoléon), rendit, le 28 mars, un décret abrogeant l'ordonnance royale du 9 mars et ordonnant à tous les militaires ayant quitté l'armée par quelque raison que ce soit de rejoindre leur corps. Le décret ne fut publié que le 9 avril. Or, du 15 mars au 9 avril, 4.000 semestriers environ avaient rejoint les dépôts.
[5]
Rapport précité de Davout à l'empereur. (Arch. nat., AF. IV, 1936.)
[6] Napoléon, Correspondance,
21737.
[7] Caulaincourt à Napoléon, 25 mars ; au cardinal Fesch, 8 avril. (Arch. Aff. étr., 672 et 1801.) F. de Chaboulon, Mém., I, 330.
[8] Circulaire de Carnot, 9 avril. (Arch. nat., F1a, 31.) Davout à Napoléon, 1er mai. (Arch. nat., AF. IV, 1036.)
[9] Correspondance des préfets, avril-juin. Rapports à l'empereur et à Fouché, mai-juin. Rapport de Davout, 11 mai. (Arch. nat., F. 7, 3774 et AF. IV, 1934 et 1936. AF. IV, 1917, AF. IV, 1939.) Corresp. générale, avril-juin. (Arch. Guerre.)
[10] Davout aux préfets de la Mayenne et de Maine-et-Loire, 28 avril ; à Bigarré, 14 mai. (Arch. Guerre. Rapp. de Davout à Napoléon, s. d. — 10 ou 12 avril ? — et 11 mai ; Arch. nat., AF. IV, 1936.) — Aucune poursuite ne fut exercée contre les réfractaires ; les rappelés qui voulurent bien se présenter furent autorisés par certains préfets à entrer dans des corps départementaux destinés à ne pas quitter le pays. Passé le 15 mai, il n'y eut même plus de revue d'appel.
[11] Il ne restera comme ressources réelles que 59.000 hommes, avait dit Davout. (Rapp. à l'empereur, avril. Arch. nat., AF. IV, 1936.) — L'évaluation de Davout fut même dépassée de plus de 25.000 hommes, si l'on ajoute aux 76.000 hommes incorporés ou mis en route du 25 avril au to juin les 4.000 semestriers qui avaient rejoint les corps du 15 mars au 9 avril, et enfin les quelques milliers de rappelés arrivés aux chefs-lieux des départements du 10 au 25 juin. (Les opérations du recrutement durèrent jusqu'après l'abdication.)
[12] Rapport de Davout à Napoléon, 11 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1936.)
82.560 rappelés avaient reçu des feuilles de route, mais 6.662 avaient déserté. De ces 82.560 rappelés, les uns provenaient des 85.000 déserteurs de 1814, les autres de ceux des 32.000 hommes en congé limité et illimité qui n'avaient pas rejoint les corps antérieurement au 9 avril.
[13] Circulaire de Davout, 8 mai. (Arch. Guerre.)
[14] Napoléon à Drouot, 24 mai. (Arch. Guerre, carton de la Correspondance de Napoléon.) Davout à Napoléon, 26 mai. (Arch. nationales, AF. IV, 1936.)
[15] Decrès à Napoléon, 22 mars, et état de la flotte au 23 mars. (Arch. nat., AF. IV, 1941.) — Il n'y avait en tout que 88 bâtiments armés dont un seul vaisseau, onze frégates et cinq corvettes. Je n'ai pu trouver aux Archives de la Marine de situation générale pour le personnel ; mais une lettre de l'amiral Duperré commandant l'arrondissement de Toulon (à Decrès, 8 juin. Arch. Marine, BB3, 427) nous apprend que les 29 bâtiments dépendant de ce port d'attache, — c'est-à-dire plus des deux tiers de la flotte, — avaient en tout 2.660 hommes d'équipage.
[16] Napoléon, Correspondance, 21698, 21783, 21813. Decrès à Napoléon, 22 mars. (Arch. nat., AF. IV, 1941.)
[17] Napoléon, Correspondance, 21836, 21875. Decrès à Napoléon, 2 mai. (Arch. nat., AF. IV, 1941.)
[18] J'ai cherché vainement dans les Archives de la Marine un état de situation de ces matelots mobilisés. Mais une lettre de l'amiral Duperré, du 8 juin, peut du moins renseigner approximativement sur les résultats de la levée. Duperré écrit que le 1er régiment à former à Toulon n'a encore que 512 officiers et soldats, qu'il compte le compléter à 1.000 hommes, mais qu'il n'espère point pouvoir former en entier le 2° régiment. (Duperré à Decrès, Toulon, 8 juin. Arch. de la Marine, BB3, 427.) Ainsi, au 8 juin, il n'y avait encore à Toulon qu'un seul bataillon formé. Mais si l'arrondissement de Dunkerque, très hostile, ne dut pas fournir davantage, ceux de Cherbourg, de Brest, de Lorient et de Rochefort, où la population était plus patriote et moins réfractaire au service, donnèrent un plus grand nombre d'hommes. (Cf. les rapports sur les levées de marins, 8, 12, 14 et 15 mai, Arch. nat., AF. IV, 1941.) Becker dans sa Relation (p. 98) fait mention du 14e régiment de marine. On peut donc admettre qu'il y avait en formation, en juin, 14 régiments de marine, presque tous vraisemblablement à un seul bataillon, ce qui donnait un total de 10.000 hommes environ.
[19] Composition des garnisons des places. (Arch. nat., AF. IV, 1936.) — Le 14 juin, Decrès annonça au conseil des ministres que le premier régiment formé à Brest arriverait à Paris le 18 juillet. (Arch. nat., AF. IV, 990B.) Cf. pour le régiment de Toulon la lettre précitée de l'amiral Duperré.
[20] Historique de l'Artillerie de la Marine, 135.
[21] Davout à Lobau, 1er mai. (Arch. Guerre.) Procès-verbaux du Conseil des Ministres, 8 juin. (Arch. nat., AF. IV, 990B.) Napoléon, Corresp., 21846. Historique de l'Artillerie de la Marine, 134-135.
[22] Davout à Napoléon, 24 avril. (Arch. Guerre.)
[23] Fririon à Davout, 21 mars. (Arch. Guerre.) Décret impérial, 2 avril. (Arch. Guerre, carton de la Corresp. de Napoléon.)
[24] Napoléon, Correspondance, 21765. Davout à Durutte, 23 mars ; à Napoléon, 5 et 23 avril. Dérivaux à Davout, Verdun, 25 mars. Lebarbier de Tinan à Davout, 12 avril. Proteau à Davout, 8 avril. Fririon à Davout, 16 avril et 1er mai. Ordre de Bigarré, 5 juin. Situation du général d'Armagnac, 17 juin. (Arch. Guerre.) Etat des garnisons des places en juin. (Arch. nat., AF. IV, 1936.)
[25] Napoléon, Correspondance, 21728, 21767, 21775. Davout, Corresp., 1560, 1561. Circulaires de Carnot, 28 mars et 12 avril. (Arch. nat. F1a, 31.) Souvenirs manuscrits de Davout (communiqués par M. le général Davout, duc d'Auerstædt.)
[26] Rapport de Carnot à la Chambre des pairs, 13 juin. (Moniteur, 15 juin.)
[27] Bulletin des Lois, 13 avril.
[28] Décrets des 10, 15, 19, 27 avril, 10 et 15 mai, non insérés au Bulletin des Lois, mais cités dans l'état des gardes nationales d'élite, 3 mai. (Arch. nat. AF. IV, 1936.) Circulaire de Carnot, 18 avril. (Arch. nat., F1a, 31.)
Dans son rapport du 13 juin à la Chambre des pairs, Carnot dit qu'il a été ordonné la formation de 417 bataillons. C'est qu'au mois de juin il y eut de nouveaux bataillons levés dans des départements qui ne sont point portés sur l'état de mai précité, nommément dans les Basses-Alpes, l'Ardèche, la Charente-Inférieure, le Cher, la Creuse, la Dordogne, le Gard, l'Indre, la Lozère, la Nièvre, le Vaucluse, la Haute-Vienne, etc. (Rapp. de Limoges, 15 juin ; de Guéret, 16 juin ; de Poitiers, 18 juin ; de Périgueux, 20 juin. (Arch. Guerre.) Rapp. de Davout à la Commission exécutive, 23 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1936.)
[29] Circulaire de Carnot, 18 avril. (Arch. nat. F1a 31.) Rapport de Carnot à la Chambre des pairs, 13 juin. (Moniteur, 15 juin.)
[30] Rapport de Carnot à Napoléon, 10 avril (pour 10 mai). États des gardes nationales d'élite, 31 mai et 8 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1935, et AF. IV, 1936.) Corresp. des préfets, 1er, 4, 15, 16, 17, 22, 27 mai ; 3, 4, 6, 8, 9, 11, 14 juin. (Arch. nat. F. 7, 30442 et F. 7, 3774.) Corresp. générale du 8 avril au 20 juin. (Arch. Guerre.) Rapport d'un espion à Clarke, Gand, 24 avril. Dispatches of Wellington, Suppl., X, 154.) Cf. Mémoires manuscrits de Barras (comm. par M. George Duruy) : ... Les bataillons de gardes nationaux mobilisés sont dans l'enthousiasme.
[31] Etats des gardes nationales d'élite précités. Corresp. des préfets. (Arch. nat. F. 7, 30442 et F. 7, 3774.) Rapp. de Carnot à Napoléon, 27 mai. (Arch. nat., AF. IV. 1936.) Corresp. générale, mai. (Arch. Guerre.)
[32] Proclamation. Amiens, imprimerie de Cherche ? (Arch. Guerre.)
[33] Delaborde à Davout, Angers, 8 mai. Davout à Bigarré, 14 mai. Préfet d'Ille-et-Vilaine à Davout, 26 mai. Charpentier à Bigarré, Nantes, 1er juin. Lamarque à Davout, 3 juin. Bigarré à Davout, Rennes, 2 et 18 juin. (Arch. terre.)
[34] Etat des gardes nationales d'élite au 8 juin. (Arch. nat., AF. IV, 36.) Cf. Rapport de Carnot à la Chambre des pairs, du 13 juin.
[35] Davout à Napoléon, 13 mai. (Arch. nat., AF. IV, 1939). Décret sur les gardes nationales, 10 avril.
[36] Lettres et rapports à Davout du général Rouyer, 22 avril ; des commissaires extraordinaires Bédoch et de Gérando, Bar-le-Duc et Nancy, 8 et 10 mai ; de Leclerc des Essarts, Sainte-Menehould, 18 mai ; de Lanusse, Metz, 21 mai ; du commandant de Landrecies, 6 juin ; du major Hervo, Poitiers, 18 juin ; de Jourdan, Besançon, 25 juin. Gérard à Vandamme, Metz, 5 juin. Colonel de gendarmerie à Rovigo, Nancy, 16 juin. (Arch. Guerre. Corresp. générale et Armées du Nord et du Jura.) Corresp. des préfets, avril-juin. (Arch. nat., F. 7, 3771 et F. 7, 3044a.) Davout à Napoléon, 28 mai. (Arch. nat., AF. IV, 1036.) Labretonnière, Souvenirs du Quartier lutin, 228. Mémoires manuscrits de Barras.
[37] La correspondance des préfets (Arch. nat.) et la correspondance générale (Arch. Guerre) indiquent que, de jour en jour, les réfractaires et insoumis rallièrent en plus grand nombre. Un exemple entre beaucoup d'autres : les 18 bataillons à fournir par les départements de la Charente, de la Corrèze et de la Dordogne ne sont pas portés pour un seul homme dans l'état du S juin, et le 20 juin le général Lucotte écrit de Périgueux à Davout : Grâce aux colonnes mobiles, j'ai pu réunir 13 bataillons, les autres suivront. (Arch. Guerre, Armée des Pyrénées Occidentales.)
[38] Dans son l'apport du 13 juin à la Chambre des pairs, Carnot évaluait à 751.440 les gardes nationaux, de vingt à quarante ans, susceptibles d'être mobilisés.
[39] Vous avez eu grand tort de distribuer des fusils aux gardes nationaux sédentaires de Rethel, quel que soit leur patriotisme, car les mobilisés eux-mêmes ne peuvent être armés complètement. Davout à Vandamme, 25 mai. (Arch. Guerre. Armée du Nord.) — Le préfet des Vosges fit donner des piques aux gardes nationaux sédentaires. Il vaut encore mieux des piques que rien, dit-il dans une lettre du 12 juin.
[40] En 1815, la réorganisation des gardes nationales urbaines et sédentaires, opérée en vertu de l'ordonnance du roi du 18 juillet 1814, n'était pas encore, il s'en faut, complètement achevée ; mais il y avait dans toutes les villes et même dans beaucoup de petites communes un certain nombre de gardes nationaux, pourvus d'armes et d'uniformes.
[41] Rapports de Davout à Napoléon, 11, 20, 22 et 28 mai. (Arch. nat., AF. IV, 1936.) Napoléon à Davout, 17 mai. (Arch. nat., AF. IV, 907.)
[42] Situation de la garde nationale de Paris au 1er juin. (Arch. nat., F. 9, 760.) — Parmi ces gardes, 11.000 fusiliers n'étaient pas habillés.
[43] Davout à Napoléon, 17 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1936.) Général Darricau à Davout, 29 juin. (Arch. Guerre.) — Sur les tirailleurs fédérés, voir le premier volume de 1815.
[44] Mouton à Davout, Lyon, 12 juin. (Dossier de Mouton. Arch. Guerre.) Suchet à Davout, 13 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1937.)
[45] Napoléon, Correspondance, 21861.
[46] Le 17 juin, les gardes nationales sédentaires des Vosges, à raison d'une compagnie par bataillon, partirent pour occuper les défilés. (Arrêté du préfet, Épinal, 17 juin. Arch. Guerre.)
[47] Dès les derniers jours de mars, l'empereur avait pensé qu'il lui en faudrait venir là. ... C'est une idée vide de sens, écrivit-il à Davout, que de se persuader que l'armée peut se recruter autrement que par la conscription. Je crois d'ailleurs avoir assez d'autorité sur la nation pour le lui faire comprendre. (Lettre du 26 mars. Arch. Guerre. Carton de la Corresp. de Napoléon.)
[48] Les jeunes soldats de la classe de 1815, déserteurs ou présents au corps, avaient donc été licenciés. (Ordonnance du roi, 15 mai 1814, Journal militaire.)
[49] Davout à Napoléon, 3 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1936.)
[50] Miot de Mélito, Mémoires, III, 430-431.
[51] Davout à Napoléon, 15 mai. (Arch. nat., AF. IV, 1534.) — Le contingent annuel, écrivait Davout, est de 280.000 hommes, mais il faut défalquer plus de la moitié pour défaut de taille, infirmités, et comme inscrits maritimes, soutiens de famille, etc. La levée doit fournir 120.000 hommes net.
[52] Napoléon à Drouot, 30 mai. (Arch. Guerre, carton de la Corresp. de Napoléon.) Manuscrit de Davout (comm. par le général duc d'Auerstædt).
Ces ordres ne furent expédiés que passé le 3 juin, puisque la lettre précitée où Davout conseille à l'empereur de ne point employer le mot de conscription, est datée du 3 juin.
[53] 1er et 2e rapports de Davout à Napoléon. 11 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1936.) Cf. Davout à Caffarelli, 18 juin. (Arch. Guerre.)
[54] Correspondance des préfets, du 5 au 22 juin. (Arch. nat., F. 7, 3774.) Préfet de Seine-et-Oise à Carnot, 16 juin. (Arch. Guerre.)
[55] Davout à Durieux, 8 mai. Préfet de l'Aisne à Davout, 25 mai. Langeron à Lobau, Laon, 2 juin. (Arch. Guerre, Armée du Nord.) Napoléon, Corresp., 22047. — Il faut citer aussi ces mots de Carnot dans son rapport à l'empereur du 16 mai (Moniteur) : Toutes les classes de citoyens du département de l'Aisne ne cessent de donner à la patrie les preuves du plus noble patriotisme et du plus généreux dévouement.
[56] Rapport du général Evain, 21 mars. (Arch. nat., AF. IV, 3940.)
[57] Dépôts des corps : 27.000 fusils. Magasins d'artillerie : 157.000 dont 70.000 à réparer. Arsenaux de la marine : 10.990 dont 3.600 à réparer. Total général : 194.990.
(Drouot à Napoléon, 27 mars. Davout à Napoléon, 4 avril. Decrès à Napoléon, 29 mars et 10 mai. Arch. nat., AF. IV, 1940, et AF. IV, 1941.)
[58] Napoléon, Correspondance, 21755. Cf. 21811, et Napoléon à Davout, 8 avril. (Carton de la Corresp. de Napoléon. Arch. Guerre.)
[59] Bulletin des Lois, 29 mars.
[60] Napoléon à Davout, 23 mars. (Arch. Guerre, carton de la Corresp. de Napoléon.) Davout à Napoléon, 4 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1940.) Napoléon, Corresp., 21755, 21947, 21972.
[61] Davout à Napoléon, 4, 14 et 29 avril ; à Lemarois, 3 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1940 et Arch. Guerre.) Napoléon, Corresp., 21755, 21811, 21887. Bulletin des Lois, 29 mars.
[62] Davout à Napoléon, 4, 14 et 29 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1940.) — Les fusils hors de service étaient en si pitoyable état que l'empereur avait pensé d'abord à les faire tout simplement dépecer pour les pièces de rechange. (Napoléon à Davout, 8 avril. Arch. Guerre, carton de la Corresp. de Napoléon.)
[63] Davout à Napoléon, 3, 5, 6, 7 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1940.) Davout, Corresp., 1747. Lettres de Langeron, Laon, 1er juin ; de Lorecez, Metz, 5 juin ; du commandant de Landrecies, 6 juin ; de Suchet, Chambéry, 9 et 10 juin ; de Bonnaire, Condé, 12 juin ; de Hervo, Poitiers, 18 juin, etc. etc. (Arch. Guerre, Armées du Nord, des Alpes, et Corresp. générale.)
[64] Ruty à Davout et Davout à Ruty, 19 mai. (Arch. Guerre. Armée du Nord.) Napoléon, Corresp., 219.
[65] Davout à Napoléon, 29 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1940.) Circulaire de Davout, 22 avril. Ordres de Neigre, 18 mai. Rapp. des colonels des 1er et 2e de ligne, Beaumont, 22 mai. Etat de l'artillerie au 1er juin. (Arch. Guerre, Armée du Nord). — Un grand nombre de cartouches avaient été en outre employées au tir à la cible. Dans plusieurs régiments les hommes en avaient brûlé jusqu'à 40 chacun.
[66] Rapport de Davout à Napoléon, 5 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1040.)
En 1815, l'habillement d'un fantassin (1re mise), y compris linge et chaussures, coûtait 122 francs, et celui d'un cavalier 197 francs. Il y avait en outre la masse d'entretien, fixée à 17 francs pour chaque soldat.
[67] Procès-verbaux des Conseils des ministres, 14 juin 1814. (Arch. nat. AF. * V2.) Sous-préfet de Saint-Quentin à Clarke, 14 mars 1815. Lettres à Davout : de Briche, 26 mars ; de Vandamme, 22 avril ; de Brune, 16 mai ; de Lobau, 12 juin ; de Grouchy, 14 juin. (Arch. Guerre.) Colonel du 27e à Davout, 4 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1930.) Davout, Corresp., 1061, 1064. Napoléon, Corresp., 21884.
[68] Rapport de Davout, 5 et 6 avril. Rapp. de Lebarbier de Tinan, 23 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1941.) Cf. Napoléon, Corresp., 21885, 21886, 21891. Davout, Corresp., 1603. Procès-verbal du Conseil des ministres du 26 avril. (Arch. nat., AF. IV, 990b.)
[69] Davout, Correspondance, 1590, 1603, 1667, 1678. Cf. dans la Corresp. de Napoléon les lettres précitées où l'empereur se plaint des retards que subissent l'habillement et l'équipement.
[70] Situation d'après les états du 15 mars. (Arch. Guerre.) — Davout (Rapp. à Napoléon, 28 mars. Arch. nat., AF. IV, 1941) dit : 21.320, mais il ne compte que les chevaux en état d'entrer en campagne.
[71] Situation précitée. Cf. Napoléon, Mémoire pour servir à l'histoire, 26.
[72] Napoléon, Correspondance, 21741, 21756, 21810, 21910. Procès-verbal du Conseil des ministres du 17 mai. Rapp. de Davout à Napoléon, 7 et 21 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1940 et 1941.) Circulaires de Davout, 17 et 26 avril. Rovigo à Davout, 27 avril et 6 mai. (Arch. Guerre.)
[73] Davout craignait des difficultés qui ne se produisirent pas. (Lettre à Napoléon, 6 mai. Arch. nat., AF. IV, 990b et 1941.) Certains départements, nommément l'Aisne et les Ardennes, fournirent jusqu'à 500 chevaux. (Lettre de Langeron, 3 juin. Arch. Guerre, Armée du Nord.)
[74] Sur la conduite de Préval pendant la campagne de France, voir 1814.
[75] Napoléon, Correspondance, 21982. Rapp. de Bourcier, 21 juin. (Arch. Guerre. Situations.)
Le général Préval rentra en grâce le 23 mai. L'empereur le nomma directeur de la cavalerie au ministère de la Guerre. (Napoléon, Corresp., 21961.) Mais la mesure était trop tardive.
[76] Cavalerie de la ligne : 35.201. (Situation générale au 1er juin. Arch. nat., AF. IV, 1936.) Cavalerie de la garde : 4.058. (Situation de d'Hériot, au 16 juin. Arch. Guerre.) Total : 40.159.
[77] Artillerie de la ligne : 13.823. (Situation générale au 1er juin. Arch. nat., AF. IV, 1936.) Artillerie de la vieille garde, train et artillerie auxiliaires de la garde : 2.851. (Situation de d'Hériot, 6 juin. Arch. Guerre.) Total : 16.674.
[78] Napoléon, Correspondance, 21729, 21733, 21787, 21828, 21865. Davout à Napoléon, 11, 13, 19, 25 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1940.) Ordres de Davout, 8 avril, et lettres diverses à Napoléon, 12, 13, 14, 15 avril. (Arch. Guerre.)
[79] Rapports sur les travaux des places, 1er, 5, 9, 11, 20, 24, 28 mai. (Arch. nat., AF. IV, 1940.) Lettres à Davout : de Ruty, 7 mai ; de Dumonceau, 7 mai ; de Suchet, 21 mai ; de Perrin, 26 mai. Ledru des Essarts à Lobau, 27 mai. Etat des travaux dans les différentes places, 15 juin. (Arch. Guerre.)
[80] Napoléon, Correspondance, 21733, 21865, 21892. Dejean à Napoléon, 2 mai. (Arch. nat., AF. IV, 1940.) Rapport du général de Léry, Lyon, 1er juin. (Arch. Guerre.)
[81] Napoléon, Correspondance, 21862.
Dans les écrits de Sainte-Hélène, Napoléon insiste à plusieurs reprises sur la nécessité qu'il y avait de fortifier Paris en 1815. Mais ni dans la Correspondance, ni dans aucune pièce des Archives, il n'y a apparence qu'il se soit occupé de ces fortifications avant le 1er mai. En mars et en avril, il ordonne de mettre en état de défense un très grand nombre de villes ; il ne prescrit rien pour Paris. Je ne puis voir d'autre motif à ce retardement que la crainte d'inquiéter les Parisiens. A la vérité, dans sa lettre du 1er mai (21862), l'empereur dit bien : J'ai pour but de faire voir que nous ne nous dissimulons pas le danger. Mais si Napoléon pouvait avoir ce but le 1er mai, alors que toutes les espérances de paix s'étaient évanouies, il ne l'avait pas un mois ni même quinze jours auparavant.
[82] Napoléon, Correspondance, 21862, 21273. Cf. Mém. pour servir à l'histoire en 1815, 45-47. Gourgaud, Campagne de 1815, 14-16, et la Carte des travaux de défense exécutés ou projetés en 1815 (publiée vers 1840).
[83] Rapports de Davout, de Lannoy et de Dejean à Napoléon, 2, 3, 8, 20, 24, 29 mai. Rapports de police, 1er, 2, 4 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1938, 1940, et F. 7, 3774.) Journal de l'Empire, 1er juin. Duponthon à Davout, 18 mai. (Arch. Guerre.)
[84] Davout à Napoléon, 29 et 31 mai, 9 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1940.) Davout à Duponthon. Rapport du commandant Martin, juin, s. d. Valence à Caffarelli, 19 juin. Grenier à Davout, 20 juin. (Arch. Guerre.) Cf. Rapport de Davout à la Commission de Gouvernement, 2 juillet. (Arch. nat., AF. IV, 1936.)
[85] Napoléon, Correspondance, 21856, 21867, 21883, 21888, 21934, 21973, 21983, 21995, 22041, 22048. Davout à la direction d'artillerie de Metz, 21 avril, à Soult, 31 mai. Rapp. de l'artillerie, s. d. (juin). Rapport de Lannoy. Lyon, 1er juin. Rapport de Vallée, Paris, 15 et 17 juin. (Arch. Guerre.) Davout à Napoléon, 16 mai. Rapport de Decrès, 8 et 10 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1940 et AF. IV, 1941.)
[86] Lettres de Davout, 23 mars et 1er avril. Feuilles de travail du Conseil des ministres, 5 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1941, et AF. IV, 990b.) Cf. Napoléon, Corresp., 21971. Suchet à Davout, Chambéry, 21 mai. La Salcette à Davout, Grenoble, 25 mai. (Arch. Guerre.)
[87] Rapport de l'ordonnateur Daure, 10 mai. (Arch. Guerre.) Davout, Corresp., 1587, 1595, 1650, 1670, 1685, 1693. Napoléon, Corresp., 21872, 21915. Souvenirs manuscrits de Davout (communiqués par le général Davout, duc d'Auerstædt.) Minute du contrat Doumerc. (Arch. nat., AF. IV, 1941.)
[88] Etat des places au 15 juin. (Arch. Guerre.) Napoléon, Mém. pour servir à l'histoire en 1815, 36-38. Rapports de l'intendant général Daure, 4 et 12 juin. (Arch. Guerre et Arch. nat., AF. IV, 1938.)
[89] Davout à Napoléon, 28 mars. (Arch. nat., AF. IV, 1941.) Cf. Carnot, Exposé de la situation de l'Empire. (Moniteur, 15 juin.) — Ce budget, d'abord fixé à 200 millions (Loi du 23 sept. 1814), avait été jugé insuffisant par Soult, et une augmentation de 98.052.000 francs devait être demandée aux Chambres de Louis XVIII.
[90] Napoléon à Gaudin, 2 avril. (Correspondance, 21761.)
[91] Las Cases, Mémorial, VI, 418-419. Pasquier, Mém., III, 26.
[92] Décret du 8 avril. (Bulletin des Lois, 11 avril.)
L'empereur créa aussi une Caisse de l'Extraordinaire pour recueillir tous les fonds casuels qui n'entraient pas au budget et les employer à indemniser les propriétaires des habitations détruites pendant l'invasion de 1814. (Décret du 6 avril.)
[93] Correspondance des préfets. Avril-juin. (Arch. nat., F. 7, 3774 et AF. IV, 1935.)
[94] 50 millions. (Pasquier, Mém., III, 151.) — 50 millions. (Napoléon, Mém. pour servir à l'histoire, 27-28.) — 42 millions en bons et 30 millions en numéraire. (Allgemeine Zeitung, 16 mai.)
[95] Vitrolles, Mém., II, 339. — Les scrupules du baron Louis, mal fondés s'il eût cru que le gouvernement royal irait s'établir à Lille, étaient tout à fait légitimes, si, comme on peut le penser, il présumait que le roi passerait la frontière. Ces fonds appartenaient non à Louis XVIII, mais au pays.
[96] Correspondance des préfets, avril-mai. (Arch. nat., F. 7, 3774.) Rapp. de Lannoy, Lyon, 1er juin. (Arch. Guerre.) — Les contributions rentrent bien, écrit, le 10 mai, le préfet de la Moselle. Il ne reste à recouvrer pour les quatre premiers douzièmes que 109.000 francs sur 1.256.000 francs.
Il va sans dire qu'il n'y avait pas le même empressement dans tous les départements. Cf. Mollien, Mém., IV, 100, et Mollien à Davout, 15 juin. (Arch. Guerre.)
[97] Napoléon, Mémoire pour servir à l'histoire, 27. (Cf. Corresp., 21761.)
[98] 23.920.120 francs. Carnot, Exposé de la situation de l'Empire (Moniteur, 15 juin.) — Il y avait à défalquer environ un dixième de cette somme, car les citoyens qui payaient un minimum de 50 francs d'impôts directs devaient s'armer et s'habiller à leurs frais.
[99] Circulaire de Carnot, 29 avril. (Arch. nat., F1a 31.)
[100] Procès-verbaux des Conseils des ministres, 1er et 24 mai (Arch. nat., AF. IV, 990b.) Décret impérial, 27 mai. Carnot, Exposé de la situation de l'Empire. (Moniteur, 15 juin.) — Sur les dons patriotiques qui paraissent s'être élevés à plusieurs millions, voir au premier volume de 1815.
Ces différentes ressources ne suffirent pas aux dépenses. Dans l'Yonne, le préfet Gamot ouvrit une liste de souscriptions ; de même dans l'Aisne où la souscription donna 200.000 francs, dès le 8 mai. Dans l'Ain, on eut recours à une répartition entre tous les contribuables, à raison de 13 centimes par franc des contributions directes ; dans les Ardennes, le général Vandamme requit du drap chez les manufacturiers de Sedan sous garantie du département. Au milieu de juin, presque tous les préfets se trouvaient dans l'impossibilité d'acquitter les engagements pris avec les fournisseurs. Circulaire de Carnot, 31 mai. Lettre du préfet de l'Ain, 14 mai. (Arch. nat., F1a 31 et F. 7, 3740.) Vandamme à Davout, 1er mai. (Arch. Guerre.) Moniteur, 16 mai.
[101] Correspondance générale du 15 mai au 23 juin. (Arch. Guerre.) Rapport sur les travaux des places, 28 mai. (Arch. nat., AF. IV, 1940.)
[102] Payeur général à Soult, 20 mai. Davout à Soult, 21 mai. Mollien à Davout, 28 mai. (Arch. Guerre, Armée du Nord.) Cf. Napoléon, Corresp., 21900.
[103] Rapport de l'ordonnateur général Daure, 12 juin. (Arch. nat. AF. IV, 1935.) — Daure ajoute : Il y en aura 25.000 fin juillet.
[104] Piré à Davout, Laon, 13 juin. (Arch. Guerre.) Guilleminot à Davout, La Villette, 1er juillet. (Arch. nat., AF. IV, 1941.) — L'entrée en campagne ne fut payée qu'au moment où l'armée allait se retirer derrière la Loire.
[105] Rapport de Daure, 12 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1938.) — Daure parle ici de la solde de la seule armée du Nord et du Trésor de cette armée.
[106] Cf. Napoléon, Correspondance, 21886, 21901, 21900. Mollien, Mém., IV, 190. Allgemeine Zeitung, 16 mai. Mollien à Davout, 28 mai. (Arch. Guerre.)
[107] Mollien, Mémoires, IV, 192.
[108] Rapport de Davout à la Commission du Gouvernement, 23 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1941.)
[109] Rapport de Gaudin à l'empereur, Projet de loi de finances. (Moniteur, 20 et 21 juin.) — Peu après la seconde rentrée des Bourbons, un emprunt absolument identique, sauf qu'il était de 50 millions de moins, fut ouvert ou plutôt imposé d'après le conseil du baron Louis.
Le budget impérial pour 1815 était prévu en recettes et en dépenses à la même somme de 770 millions. Si l'on songe que les dépenses du budget royal étaient évaluées à 646 millions — 547.700.000 francs (Moniteur du 23 juillet 1814), plus 98,052.000 francs d'augmentation pour le budget de la Guerre (Davout à Napoléon, 28 mars 1815. Arch. nat., AF. IV, 1941), — il semble certain que le budget de Gaudin se fût soldé par un déficit considérable, bien qu'il parût à l'empereur que, sauf pour la Guerre, on pourrait faire de grosses économies sur les budgets de tous les ministères. (Napoléon, Corresp., 21761.)
[110] Napoléon, Correspondance, 21723, 21734, 21747, 21765. Davout, Corresp., 1514, 1515. Lobau à Davout, 24 mars. Davout à Napoléon, 31 mars, 11 avril. (Arch. Guerre.)
Le 1er corps fut formé avec les garnisons de la 16° division militaire (Lille.). — Le 2e, partie avec les troupes de l'ex-armée du duc de Berry, partie avec celles qui avaient suivi l'empereur depuis Grenoble. — Le 3e, avec les garnisons de la 2e division militaire (Mézières). — Le 4e, avec les garnisons des 3e et 4e divisions militaires (Metz et Nancy). — Le 5e, avec les garnisons de la 5e division militaire (Strasbourg). — Le 6e, avec les garnisons des 7e et 8e divisions militaires (Grenoble et Toulon.) — Le 7e, avec les garnisons des 9e, 10e et 11e divisions militaires (Montpellier, Toulouse et Bordeaux). — Le 8e, partie avec les troupes ci-devant sous les ordres du duc de Berry, partie avec celles que l'empereur avait amenées à sa suite.
[111] Napoléon à Davout, 26 mars. (Arch. Guerre, carton de la Corresp. de Napoléon.) Napoléon, Corresp., 21749, 21789, 21794, 21821, 21822. Davout à Carnot, 11 avril. Ordres de Davout, 10, 11, 12, 20, 21 et 27 avril. (Arch. Guerre.)
[112] Napoléon, Correspondance, 21731. Cf. 21147, 21810. Ordres de Davout, 1er avril. Davout à Napoléon, 24 avril. (Arch. Guerre.)
[113] La garde comprenait au 20 mars 7,390 officiers et soldats. (Rapp. de Davout, 21 mars. Arch. nat., AF. IV, 1940.) L'empereur la porta à 28.328 officiers et soldats. (Situation signée d'Hériot, 16 juin. Arch. Guerre, carton des Situations.)
[114] Napoléon à Davout, 26 mars. (Arch. Guerre, carton de la Corresp. de Napoléon.) Napoléon, Corresp., 21737, 21896, 2199l. Davout à Napoléon, 22 avril, 9 et 13 mai. (Arch. nat., AF. IV, 1940.) Situation de d'Hériot, 16 juin. (Arch. Guerre, carton des Situations.)
Il fut organisé en outre une compagnie d'artillerie à pied de la jeune garde et un corps d'artillerie auxiliaire de la garde comprenant de l'artillerie à cheval, de l'artillerie à pied et du train.
[115] Circulaire de Davout, 14 avril. (Arch. Guerre.) Napoléon, Corresp., 21737. Rapport de Davout, 22, 23, 26 avril, 9 et 13 mai. (Arch. nat., AF. IV, 1940.)
[116] Je donne au chapitre II le tableau complet de l'armée du Nord à l'entrée en campagne.
[117] 15e division d'infanterie : Heudelet, puis Rottenbourg. 16e division : Albert. 8e division de cavalerie : Merlin. Division de garde nationale d'élite : Berkheim. Artillerie et génie. (Situation de l'armée du Rhin au 20 juin. Arch. nat., AF. IV, 1936.)
[118] 22e division d'infanterie : Pacthod. 23e division : Dessaix. 15e division de cavalerie : Quesnel. 4 divisions de gardes nationales d'élite sous Chabert, Pannetier, Dufresse et Morantin. Artillerie et génie. (Situation de l'armée des Alpes au 15 juin. Arch. Guerre.)
[119] 26e division d'infanterie : Harispe. 5e chasseurs à cheval, 6 bataillons de gardes nationales d'élite de la Charente. Artillerie et génie. (Situation du corps au 10 juin. Arch. Guerre.)
[120] 27e division d'infanterie : Fressinet. 15e chasseurs à cheval. 7 bataillons de mobilisés sous le nom de chasseurs des Pyrénées. Artillerie et génie. (Situation du corps, au 1er juin. Arch. Guerre.)
[121] Divisions Travot et Brayer. — La situation générale au 1er juin (Arch. nat., AF. IV, 1936) porte l'armée de l'Ouest à 7.553 hommes, seulement pour l'infanterie de ligne, c'est-à-dire sans compter les 2e tirailleurs et 2e voltigeurs de la jeune garde, présentant ensemble 2.014 baïonnettes.
[122] 17e division d'infanterie : Verdier. 14, chasseurs à cheval. Artillerie et génie. (Situation du corps au 20 juin. Cf. Brune à Davout, Antibes ; 16 juin. (Arch. Guerre, Corps du Var.)
[123] 18e division d'infanterie : Abbé. 9° division de cavalerie : Castex. 2 divisions de gardes nationales mobilisées. Artillerie et génie. (Situation du corps au 15 juin. Arch. Guerre.)
[124] Réserve d'Avesnes : 5.000 hommes. Corps de l'Argonne (à Sainte-Menehould) : 3,063. Réserve de Colmar : 3,603. Réserve de la Moselle (à Nancy) : 5.800. (Etat des divisions des gardes nationales d'élite au 1er et au 10 juin. Arch. Guerre, et Arch. nat., AF. IV, 1936. Rapport de Davout à la Commission de gouvernement, 23 juin. Arch. nat., AF. IV, 1936.)
Neuf autres divisions de gardes nationales mobilisées, fortes ensemble de 28.437 hommes, faisaient partie, comme on l'a vu, des corps de Rapp, de Suchet, de Clausel, de Decaen et de Lecourbe.
[125] Etats des garnisons aux 10, 15 et 21 juin. Rapport du général Frère sur les places du Nord, 1er juin. Rapport du général d'Ambrugeac, Bordeaux, 17 juin. Situation de l'armée des Alpes au 15 juin. (Arch. Guerre.) Davout à Napoléon, 10 juin. Rapport de Davout à la Commission de gouvernement, 23 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1936.)
[126] Situation générale au 1er juin. (Arch. nat. AF. IV, 1936.) — Dans ce nombre sont compris les sapeurs du génie, les pontonniers et les ouvriers d'artillerie.
[127] De ces 6.000 hommes, 500 étaient détachés avec les colonnes mobiles de l'Ouest.
[128] Situation générale du 5 au 10 avril, faussement datée du 15 mars. (Arch. nat., AF. * IV, 1153.)
[129] Les trente places d'Abbeville à Metz avaient ensemble 3.236 canonniers sédentaires (garnisons des places des 2e, 5e, 1re et 16e divisions militaires en juin. (Arch. nat., AF. IV, 1936.) Ce n'est donc point exagérer que d'évaluer à 3.000 encore les canonniers sédentaires dans les soixante-cinq autres places de guerre de la France.
[130] La situation générale au 1er juin (Arch. nat., AF. IV, 1936) porte 16.916 hommes, mais, d'après les situations particulières des corps d'armée au 10 juin qui nous ont servi à établir les effectifs de ces corps d'armée, au 10 juin, 2,982 hommes avaient rejoint les bataillons de guerre. Restaient donc, le 10 juin, 13.934 hommes en route pour les rejoindre.
[131] Dans la récapitulation de la situation générale précitée, on trouve, pour la ligne seule, 70.792 officiers et soldats disponibles et indisponibles aux dépôts et dans les villes de l'intérieur. Mais il faut défalquer de ce total de 70.792 hommes 11.233 canonniers, soldats du génie, ouvriers d'artillerie, etc., portés dans cette situation générale comme étant dans les places, et conséquemment déjà comptés plus haut par nous.
[132] Situation de la garde au 16 juin, signée : d'Hériot. (Arch. Guerre.)
[133] Napoléon rappela de la Corse, qui lui paraissait pouvoir se défendre avec ses seules milices, toute la troupe de ligne, mais il fit envoyer de Toulon à File d'Elbe un bataillon du 15e de ligne, fort de 700 hommes. (Napoléon, Corresp., 21698, 21780, 21896, 21951.)
[134] 8 bataillons supplémentaires des 5e léger, 26e, 62° et 71e de ligne. (Relevé des mouvements des troupes d'avril 1814 à mai 1815, Arch. Guerre.) Procès de l'Amiral de Linois, 41, 44, 47.
[135] Situation générale au 1er juin. (Arch. nat., AF. IV, 1096.)
[136] Situation générale du 5 au 10 avril, faussement datée du 15 mars. (Arch. nat., AF. IV, * 1153.)
[137] Rovigo à Napoléon, 12 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1936.)
[138] Dans les seules places fortes de quatre départements : Pas-de-Calais, Nord, Ardennes et Meuse, il y avait 3.541 douaniers. (Etat des garnisons des places en juin. Arch. nat., AF. IV, 1936.) En évaluant donc au triple le nombre des douaniers pour l'ensemble de tous les autres départements frontières, on est certainement en-deçà de la vérité.
[139] Compte des officiers et soldats :
GARDE IMPÉRIALE
A l'Armée du Nord : 20.755,
A l'Armée de la Loire : 2.014,
Dans les dépôts : disponibles et indisponibles : 5.559.
TROUPES DE LIGNE
Aux Armées : 158.174,
Dans les Places : Artillerie, génie, ouvriers d'artillerie, etc. : 11.233,
En route pour rejoindre les armées : 13.934,
Dans les dépôts : disponibles et indisponibles : 59.559.
Aux hôpitaux : 8.162,
Bataillons de guerre détachés à l'île d'Elbe et dans les Colonies : 4.700,
TOTAL de l'armée active : 284.090.
ARMÉE AUXILIAIRE
Divisions de réserve des gardes nationales mobilisées : 45.903.
Gardes nationales mobilisées (dans les places frontières et les villes de l'intérieur), environ : 90.000,
Militaires retraités (dans les places frontières et les villes de l'intérieur), environ : 25.000,
Canonniers de la Marine : 6.000,
Fusiliers marins, environ : 10.000,
Fusiliers-vétérans : 5.129,
Canonniers-vétérans : 2.071,
Canonniers sédentaires, environ : 6.000,
Gendarmes : 14.521,
Douaniers (dans les places frontières), environ : 12.000,
Partisans et corps francs, environ : 6.000,
TOTAL de l'armée auxiliaire : 222.624.
(Les canonniers gardes-côtes, les gardes forestiers, les bataillons francs de Corse et les milices corses et elboises, les chasseurs de la Vendée, ne sont point compris dans ce dénombrement, non plus que les tirailleurs fédérés de Paris, de Lyon, de Toulouse, etc. (environ 25.000 hommes), les levées en masse et les gardes nationales sédentaires).
En regard de ce tableau je donnerai, en quelque sorte comme preuve arithmétique, le tableau des ressources en hommes qu'avait trouvées l'empereur pour porter l'armée active au nombre de 284.090 hommes.
Armée royale au 15 mars (troupes de la ligne et de l'ex-garde impériale), environ : 200.000,
Soldats en congé limité ou illimité ayant rejoint les corps du 15 mars au 25 avril, environ : 4.000,
Déserteurs de 1814 et soldats en congé limité et illimité ayant rejoint les corps du 1er mai au 15 juin : 52.446,
Hommes des mêmes catégories ayant reçu des feuilles de route postérieurement au 10 juin et ayant rejoint les dépôts le 15 juin, environ : 4.500,
Soldats étrangers, suisses, polonais, belges, allemands, espagnols, etc., environ : 3.500,
Troupes ramenées de l'île d'Elbe, environ : 1.100,
Engagés volontaires, environ : 15.000,
Officiers à la demi-solde rentrés dans les régiments de la garde de nouvelle formation et dans les nouveaux bataillons, escadrons et batteries de la ligne : 4.506,
(L'excédent de ces officiers fut employé dans les bataillons de tirailleurs fédérés et les bataillons des gardes mobilisées.) : 285.052.
Ces deux tableaux étant récapitulatifs, je crois superflu de donner de nouveau les références, déjà citées aux pages précédentes ; mais je dirai que ces divers totaux, établis, sauf peu d'exceptions, d'après des situations antérieures au 15 juin, sont certainement inférieurs au total réel. Voici pourquoi : Au mois de juin 1815, la France est tout entière en recrutement. Sans cesse, il part des dépôts des hommes pour l'armée ; sans cesse, il part des chefs-lieux des départements des hommes pour les dépôts ; sans cesse, il part des localités des hommes pour les chefs-lieux des départements. Il en résulte que l'armée s'augmente chaque jour sans que, pour cela, les dépôts s'affaiblissent. Ainsi, dans un rapport daté du 11 juin (Arch. nat., AF. IV, 1936) et rédigé nécessairement d'après des situations antérieures, Davout écrit qu'il y a 52.464 semestriers et rappelés incorporés et 23.448 mis en roule. Or, le 15 juin, non seulement plusieurs milliers de ces 23.448 rappelés avaient rejoint les dépôts ; mais, comme les opérations de recrutement avaient continué, il était parti des départements plus d'hommes que n'en comptait Davout. La correspondance des préfets (Arch. nat., F. 7. 3044a et F. 7, 3774) mentionne des départs de rappelés jusqu'au 25 juin.
De même pour les gardes nationales mobilisées : Dans un rapport du 8 juin (Arch. nat., AF. IV, 1036), Davout porte à 108,094 les mobilisés arrivés à destination et à 24,178 les mobilisés mis en route. Or, dans un autre rapport du 23 juin (Arch. nat. AF. IV, 193G), il énumère par divisions de réserve et places fortes tous les mobilisés, et le total qu'il en donne dépasse 10.000 hommes embataillonnés.
[140] Rapport de Davout à Napoléon, 11 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1936.) Davout dit : 23.448 d'après des états du 1er au 10 juin ; mais comme on l'a vu dans nos tableaux récapitulatifs de la page précédente, un cinquième au moins de ces rappelés mis en route, soit environ 4.500, avait dû rejoindre les dépôts à la date du 15 juin.
[141] Rapport de Davout à Napoléon, 11 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1936.)
[142] Cf. l'état des gardes nationales au 8 juin (Arch. nat., AF. IV, 1936), l'Exposé de la situation de l'Empire, fait par Carnot, le 13 juin, à la Chambre des pairs, et le rapport de Davout du 23 juin à la Commission de gouvernement. (Arch. nat., AF. IV, 1936.)
[143] Le contingent devait fournir au moins 120.000 hommes, dont il y avait à défalquer 46.419 réunis dès le 11 juin dans les chefs-lieux des départements. (Davout à Napoléon, 23 mai et 11 juin. Arch. nat., AF. IV, 1534 et 1936.)
[144] La levée devait être de 234.720, et 150.000 seulement, ou environ, avaient été incorporés ou mis en route au commencement de juin.
[145] Napoléon, Mém. pour servir à l'histoire en 1815, 28. — Si, d'ailleurs, Napoléon ne se trompait que de peu en évaluant à 800.000 hommes l'armée française au 1er octobre, il s'est trompé radicalement dans le détail qu'il en a donné. Son tableau (Annexe B) est de tous points inexact. Il y compte l'armée extraordinaire (gardes nationales, etc.) pour 224.000 hommes seulement et l'armée de ligne pour 584.000 hommes, alors que la ligne et la garde auraient pu s'élever tout au plus à 420.000 hommes.
[146] Circulaire de Davout, 28 mars. (Arch. Guerre.)
En outre, une commission composée des généraux Arrighi, Girard, Berthezène, Sébastiani, Lallemand, du colonel Bernard, etc., fut instituée le 2 avril pour réviser les promotions aux grades d'officiers supérieurs et d'officiers généraux, dont les officiers de l'ex-armée impériale avaient été l'objet sous Louis XVIII. (Moniteur, 2 avril. Davout, Corresp., 1617.) Les procès-verbaux de cette commission n'existent pas aux Archives de la Guerre (du moins nous n'avons pu les y découvrir), et les rétrogradations prononcées par elle ne figurent naturellement pas sur les états de service des intéressés, pas plus d'ailleurs que ne sont portées sur d'autres les promotions faites pendant les Cent Jours. Dans une lettre annexée au dossier de Berthezène, ce général dit que le travail de la commission ne fut pas terminé et n'eut aucune suite. Cette assertion concorde avec un rapport adressé de Paris à Wellington, le 22 avril (Dispatches, Supplementary, X, 163), où il est dit : L'empereur a confirmé presque toutes les nominations dans l'armée et la Légion d'honneur. — Nous savons cependant, par des rapports de Davout, que la commission, sur 66 officiers supérieurs promus par le roi dans la cavalerie de la ligne, proposa la confirmation de 36 et l'annulation de 30 ; elle conclut aussi à la rétrogradation comme brigadiers de plusieurs divisionnaires, entre autres de Préval. (Davout à Napoléon, 6 et 28 avril, 28 mai, 7 et 14 juin. Arch. nat., AF. IV, 1940 et 1939.)
[147] Circulaires de Lobau et de Davout, 17 et 22 avril (Arch. Guerre). Rapport de Davout, 13 mai. (Arch. nat., AF. IV, 1939.) Cf. Napoléon, Corresp., 21737, et Napoléon à Davout, 26 mars. (Arch. Guerre, carton des lettres de Napoléon.)
[148] Notice sur Cunéo d'Ornano, Journal de l'Institut historique, 1er juin 1863. — Cette nomination, non reconnue au retour du roi, comme d'ailleurs toutes celles faites pendant les Cent Jours, ne figure pas sur les états de service de Cunéo d'Ornano.
[149] Sur la conduite, au retour de l'empereur, des cinquante ou soixante officiers que je cite ici, voir le premier volume de 1815.
[150] Relation de Marchand. (Dossier de Marchand, Arch. Guerre.)
[151]
Procès-verbaux des Conseils des ministres, 7 juin. (Arch. nat., AF, IV, 990b.)
[152] Général Rapp, Mémoires, 342, 347.
[153] Napoléon à Davout, 26 mars, 10 avril, 6, 15, 22 mai. (Arch. Guerre, lettres de Napoléon.) Napoléon à Davout, 26, 29 mars, 10, 18 avril, 2, 28 mai. (Arch. nat., AF. IV, 907.) Napoléon, Corresp., 21706, 21788, 21820 21964. Davout, Corresp., 1619, 1620, 1654, 1657, 1724. Davout à Napoléon, 26 mars, 16 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1939.)
Je dis une centaine d'officiers, mais cette évaluation est certainement au-dessus de la vérité, car les documents ne mentionnaient en tout que 43 restitutions ou mises en retrait d'emploi, dont celle d'un sous-lieutenant. Il va sans dire, d'ailleurs, qu'il ne faut comprendre dans ce total ni les officiers introduits dans l'armée sous Louis XVIII, et qui la quittèrent en vertu des décrets de Lyon, ni les officiers déserteurs condamnés par les conseils de guerre, ni les officiers proposés par la commission pour une rétrogradation, ni enfin les officiers qui passèrent avec leur grade d'un régiment dans un autre.
[154] Napoléon à Davout, 18 avril. (Arch. nat., AF. IV, 907.) — Maison fut destitué par décret spécial. Beurnonville, Donnadieu, Bordessoulle et aussi Clarke perdirent leur grade par le fait même de leur émigration, en vertu du décret du 9 mai 1815 qui remettait en vigueur les lois de l'Assemblée législative contre les émigrés.
[155] Davout à Napoléon, 16 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1939.) Napoléon, l'île d'Elbe et les Cent Jours. (Corresp., XXXI, 103.) — Ces mots : Que voulez-vous encore de moi ? semblent confirmer l'assertion de Fain (Manuscrit de 1814, 242) que Souham, la veille de sa défection, était venu à Fontainebleau demander à l'empereur 6.000 francs que celui-ci lui avait donnés.
Par un hasard, où il entrait de la justice, Souham fut remplacé à Périgueux par Lucotte, le seul des généraux du 6e corps resté fidèle au devoir dans l'inexpiable nuit du 4 avril 1814.
[156] Davout pria inutilement l'empereur de conserver son commandement à Moncey (à Napoléon, 26 mars, Arch. nat., AF. IV, 1939).
[157] Dossier de Bugeaud (Arch. Guerre) et lettre de Napoléon à Bugeaud, mai (citée par d'Ideville, le Maréchal Bugeaud, I, 172).
[158] Interrogatoire de Ney. (Dossier de Ney, Arch. Guerre.) Gourgaud, Camp. de 1815, 44, note. Montholon, Récits, II, 90. Souvenirs manuscrits de Davout (comm. par le général duc d'Auerstædt.)
Soult, devenu major-général, demanda que Bourmont quittât l'armée du Nord. (Soult à Davout, 22 mai, Arch. nat., AF. IV, 1949.)
[159] Davout à Curial et Curial à Davout, 14, 16, 17 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1940.) Général Girod de l'Ain, Souvenirs, 375, 377, 381. — L'empereur retira le commandement à Curial parce que ce général avait tenté de s'opposer au départ des chasseurs. Il lui donna peu après une division d'infanterie à l'armée de Suchet.
[160] ... Je demande un corps d'armée actif ou je réclame ma mise à la retraite. Sébastiani à Davout, Amiens, 3 mai. (Arch. Guerre.)
[161] Colonel La Borde, Napoléon et la Garde à l'île d'Elbe, 116.
[162] Napoléon à Davout, 26 mars. (Arch. nat., AF. IV, 907.) Napoléon, Corresp., 21790.
Ces radiations, qui ne furent insérées ni au Moniteur ni au Bulletin des Lois, ne furent point, par conséquent, rendues publiques. Elles consistèrent en une simple lettre d'avis du ministre de la Guerre aux intéressés, les informant qu'ils étaient rayés de la liste des maréchaux et qu'il leur serait accordé une pension en forme de retraite. Voir à ce sujet Davout, Corresp., 1632, 1633, et Davout à Napoléon, 27 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1939.)
Annulées par le fait même du retour de Louis XVIII, ces radiations, non plus que les destitutions prononcées pendant les Cent Jours, ne figurent pas sur les états de services des officiers.
[163] Napoléon, Correspondance, 21790.
[164] Napoléon à Davout, 26 mars (Arch. nat. AF. IV, 907) et Correspondance, 21790.
[165] Davout, Correspondance, 1506, 1535, 1539. — Auparavant, Gouvion dut venir à Paris se justifier devant l'empereur.
[166] Davout, Correspondance, 1633.
[167] Des soixante-six sénateurs présents à la séance du 1er avril 1814, trois cependant furent nommés pairs pendant les Cent Jours : le général Valence, Pontécoulant et Roger-Ducos.
[168] Oudinot à Suchet et à Jacqueminot, Bar-sur-Ornain, 28 mars. (Arch. nat., AF. IV, 1939.) Davout, Corresp., 1504, 1509, 1510. — Dans sa lettre à Jacqueminot, Oudinot dit : Annoncez-moi vite que je suis rentré en grâce. C'est la meilleure nouvelle que vous puissiez me donner.
[169] Napoléon, l'Ile d'Elbe et les Cent Jours. (Corresp., XXXI, 104.) — Au premier moment, Napoléon avait même donné l'ordre de radier Oudinot de la liste des maréchaux (à Davout, 26 mars. Arch. nat., AF. IV, 907), mais il ne maintint pas celte décision. (Corresp., 21790.)
La maréchale Oudinot (Souvenirs, 371) assure que c'est à la demande formelle du maréchal que Napoléon le laissa sans emploi. Mais les lettres précitées d'Oudinot (dont naturellement la duchesse de Reggio s'abstient de parler) et sa présence dans le cortège impérial à la cérémonie du Champ de Mai témoignent qu'il n'avait point tant de scrupules royalistes et sont une forte présomption qu'il eût accepté un commandement si l'empereur le lui eût offert.
[170] Macdonald à Davout, Paris, 27 et 30 mars ; à Maurice Mathieu, 30 mars ; à ses aides de camp, 6 avril. (Registre de Macdonald, Arch. Guerre.) Cf. Macdonald, Souvenirs, 385, 387-389.
[171] Napoléon, Correspondance, 21694. — C'est dans la nuit du 20 au 21 mars que Rovigo avait été nommé inspecteur général de la gendarmerie. (Rovigo, Mém., VII, 387.)
[172] Lefebvre avait fait toute la campagne de France, mais dans l'état-major de l'empereur. Louis XVIII l'avait nommé pair de France.
[173] Rapport de Masséna à l'empereur. Toulon, 14 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1938.)
[174] Napoléon, Correspondance, 21825, 22043. Davout, Corresp., 1627.
[175] C'est ainsi que Durutte, qui commandait à Metz, fut mis à la tête d'une division du 1er corps : Quoique je n'aie pas lieu d'être mécontent de Durutte, il faut le rappeler de Metz et lui donner un autre commandement. Napoléon à Davout, 27 mars. (Arch. nat., AF. IV. 907.)
[176] Davout à Mortier, 22 mars. La Poype à Davout, Lille, 13 mai. Lanusse à Davout, Metz, 21 mai. (Arch. Guerre.) Napoléon, Corresp., 21852, 22025. Davout, Corresp., 1657. Bulletin de l'armée, 15 juin. (Moniteur, 18 juin.)
[177] Napoléon, Correspondance, 21844. Davout, Corresp., 1518, 1538, 1691, 1721. — L'empereur avait pensé un instant à laisser Suchet à Strasbourg comme commandant de l'armée du Rhin ; mais, dès le 30 mars, il l'avait rappelé à Paris, lui réservant le commandement éventuel de plusieurs corps. (Napoléon, Corresp., 21723, 21747), puis il l'avait envoyé à Lyon, comme commandant supérieur des 6e, 7e, 8e, 9e et 19e divisions militaires, avec Grouchy sous ses ordres. Plus tard, il lui donna l'armée des Alpes.
[178] Davout à Napoléon, 1er et 3 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1939.)
[179] Brune à Clarke, 5 janv. 1814. (Dossier de Brune, Arch. Guerre.)
[180] Napoléon, Correspondance, 21815, 21896, 21952. Davout à Brune, 16 avril. Arch. Guerre.)
[181] Ney à Davout, Paris, 23 mars, et Lille, 28 mars. (Arch. Guerre.) Ney à Napoléon, 25, 26, 28, 30 mars, 1er, 7 et 9 avril. (Arch. nat. AF. IV, 1936.) Napoléon, Corresp., 21734.
[182] Dépositions du capitaine Grison, du 37e, et du capitaine Casse, du 42e. (Procès de Ney, II, 163-165.) Cf. la déposition écrite du juge de paix d'Auxonne, du 3 nov. (Dossier de Ney) qui rapporte ces paroles du maréchal : Il faut que ces canailles de Bourbons et cette lâche noblesse aillent encore passer une vingtaine d'années en Angleterre.
[183] Notes de Rousselin. (Collection Bégis.) Gazette d'Aaran, 13 mai. Déposition de Mme Maury. (Procès de Ney, II, 177-178.) Napoléon, L'île d'Elbe et les Cent Jours. (Corresp., XXXI, 104.) Lettre à l'empereur, s. d. (juin). (Arch. nat., AF. IV, 1934.)
[184] Cf. Davout, Correspondance, 1605.
[185] Napoléon, l'Ile d'Elbe et les Cent Jours. (Corresp., XXXI, 104.)
[186] Gazette d'Aaran, 13 mai. Journal universel (de Gand), n° 8. Rapport à Clarke du lieutenant Jallot, déserteur du 11e chasseurs, Gand, 12 juin. (Arch. Guerre.)
[187] Davout à Napoléon, 6 juin. Napoléon à Davout, 7 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1949, et AF. IV, 907.)
[188] Premier interrogatoire de Ney. Procès, I, 19.
[189] Peyrusse, Mémorial, 311. Lettre de Ney au duc d'Otrante. (Journal de l'Empire, 26 juin.)
[190] Premier interrogatoire de Ney, devant le Préfet de police. (Arch. Guerre. Dossier de Ney.)
[191] Napoléon, Correspondance, 22042.
[192] Les vœux du maréchal étaient remplis : il avait un corps d'armée. Relation de la campagne de 1815, par le colonel Heymès, premier aide de camp de Ney, 7.
[193] Je ne désirais que la mort. J'ai eu bien des fois envie de me brûler la cervelle. Interrogatoire de Ney. (Dossier de Ney, Arch. Guerre.)
[194] Heymès, Relation, 5, 6.
Le 11 juin, quand l'empereur fit avertir Ney, tous les officiers généraux étaient depuis plusieurs semaines pourvus de leur commandement. Il y a donc bien des présomptions que Napoléon n'avait point voulu d'abord en donner un au prince de la Moskowa.
[195] Cf. Las Cases, Mémorial, IV, 424-425 : ... Murat, disait l'empereur, est une des grandes causes des malheurs de 1814... Il est difficile de concevoir plus de turpitude, de courir avec plus d'impudeur et de bassesse au-devant d'une fortune nouvelle.
[196] Las Cases, Mémorial, II, 276. Cf. Montholon, Récits, II, 90.
[197] Il va sans dire qu'un major-général, en certains cas véritable chef des armées, doit avoir les qualités de conception et de commandement direct qui manquaient complètement à Berthier, mais dont, lui, n'avait pas besoin. Autre chose est d'être chef d'état-major de Guillaume, comme Moltke, et chef d'état-major de Napoléon.
[198] La veille de la bataille d'Eylau, un seul de ces huit officiers arriva au quartier-général de Bernadotte. — Ce fait est rapporté par l'intendant-général Denniée. (Cité par Pierron, Méthodes de Guerre, II, 1551.)
[199] Rapp, Mém., 345. Cf. Mollien, Mém., IV, 199 : L'empereur regrettait de ne plus avoir Berthier. C'était, disait-il, le meilleur des majors-généraux. Il saisissait mieux que tout autre toutes les pensées, tous les plans, et les faisait mieux comprendre aux chefs de corps. Il en parlait sans amertume et disait seulement : Je voudrais le voir en capitaine de garde du corps.
L'empereur ordonna le 10 avril seulement (Corresp., 21790), c'est-à-dire quand il n'était plus probable que Berthier revint en France, de le rayer de la liste des maréchaux. Son premier ordre, du 26 mars, sur les radiations ne concerne que Marmont, Augereau, Victor, Gouvion Saint-Cyr et Oudinot. (Lettre à Davout, 27 mars. Arch. nat., AF. IV, 907.)
[200] Méneval, Napoléon et Marie-Louise, II, 330.
[201] Journal de Francfort, 4 juin ; Gazette universelle, 5 juin ; Gazette de Nuremberg, 4 juin ; Journal de Cologne, 10 juin. — Le correspondant de Bamberg du Journal de Cologne donne ces détails : Depuis plusieurs jours, on observait un changement en Berthier. Le 31 mai, il avait dîné chez le prince de Bavière avec le général russe Sacken, et celui-ci l'ayant complimenté sur sa fidélité au roi Louis XVIII, il avait paru extrêmement troublé et n'avait rien répondu... C'est de l'appartement de ses enfants qu'il se jeta par la fenêtre. Son petit garçon, qui le prit par la jambe pour le retenir, faillit être entraîné avec lui. Ces derniers mots sont de pure invention, car nous savons, par M. le prince de Wagram, que la princesse et ses enfants passèrent à Grosbois tout le temps de l'interrègne. Quand le maréchal tomba, ou se jeta — ou encore, selon une légende, fut précipité, — il avait à ses côtés deux domestiques.
[202] La nomination de Soult est du 9 mai (Décret impérial, Lettres de Napoléon, Arch. Guerre), et, dès le 25 avril, on disait à Gand (Journal universel, n° 4) que ce maréchal, qui avait depuis longtemps l'ambition de succéder à Berthier, serait major-général.
Soult avait assez de faconde gasconne pour persuader à l'empereur qu'il serait un excellent major-général. Il faut lire dans ses Mémoires (II, 206) le portrait qu'il trace d'après soi-même du chef d'état-major modèle. S'il est vrai qu'il fut dans ces fonctions, à la division Lefebvre, si actif, si appliqué, si prévoyant, c'est qu'il avait un peu changé en 1815. Au reste, durant la campagne, Soult ne fut pas aussi inférieur à sa tache qu'on l'a prétendu. Son plus grand tort fut de rédiger parfois ses ordres sans précision ni clarté et de ne point savoir en assurer la rapide transmission. Quant aux quelques négligences ou imprévoyances qui lui sont reprochées, Bailly de Monthyon qu'on lui avait adjoint comme chef de l'état-major général en est responsable aussi dans une certaine mesure.
[203] Soult, Mém. justif., 24, et Soult à Davout, Villeneuve-l'Etang, 11 avril. (Dossier de Soult, Arch. Guerre.)
[204] Soult, Mém. justif., 24.— Soult prétend qu'il ne vint aux Tuileries que parce que l'empereur l'y avait fait appeler à deux reprises, par Rovigo et par Clausel. C'est douteux. Déconsidéré comme l'était Soult à cette époque, et après l'ordre du jour qu'il avait publié contre Napoléon, celui-ci ne pouvait être si impatient, de le voir et de l'employer. Si Rovigo et Clausel intervinrent, ce fut très vraisemblablement à la sollicitation du maréchal. Le ton de ses lettres à Davout témoigne de son désir de rentrer en grâce. D'ailleurs, en admettant même que l'empereur eût fait faire des démarches auprès de Soult, il était très aisé au maréchal de s'y dérober comme le fit Macdonald.
[205] Moniteur, 9 mars.
[206] Davout, Corresp., 1530, 1567, 1597, 1598. Soult à Davout, 11 avril. (Dossier de Soult, Arch. Guerre.)
[207] Soult à Davout, 11 avril. (Dossier de Soult.) Davout, Corresp., 1598.
[208] Soult avait été seulement chef d'état-major de la division Taponnier pendant deux ou trois mois, puis chef d'état-major de la division Lefebvre pendant la campagne de 1794 dans les Pays-Bas. — Par parenthèse, il serait très hasardeux de penser que la coopération de Soult à cette campagne fut une des causes qui déterminèrent l'empereur à le choisir comme major-général pour une nouvelle campagne en Belgique. D'une part, le 9 mai, date de la nomination de Soult, Napoléon, comme on le verra plus loin, n'était point encore tout à fait décidé à porter la guerre dans les Pays-Bas. D'autre part, son expérience personnelle lui démontrait qu'après vingt ans et tant de batailles dans toute l'Europe, Soult n'avait dû conserver que de très vagues souvenirs topographiques du terrain entre la Sambre et Bruxelles. D'ailleurs on ne prend pas un major-général comme on prend un guide, parce qu'il connaît le pays !
[209] Napoléon à Davout, 30 avril (Corresp., 21856) : ... Si nous avons la guerre, mon intention est de vous laisser à Paris, ministre de la Guerre, gouverneur de Paris et commandant en chef des gardes nationales, des levées en masse et des troupes de ligne qui se trouveraient dans la ville... — Ordre de service du 11 juin (cité dans les souvenirs manuscrits de Davout) : Notre cousin le prince d'Eckmühl est nommé gouverneur de Paris. — D'après les souvenirs manuscrits de Davout et J. de Chénier (Hist. de Davout, 540-541), Davout demanda à plusieurs reprises un commandement à l'armée ; mais l'empereur lui répondit invariablement : Je ne puis confier Paris qu'à vous.
[210] Soult, qui ne se dissimulait pas les sentiments de l'armée, tenta de ramener à lui l'opinion par un ordre du jour. Il le soumit à l'empereur qui lui écrivit : Je pense, pour que l'armée ne fasse pas d'observations, que vous pouvez, sans être inconséquent, dire que la fuite des Bourbons du territoire français, l'appel qu'ils font aux étrangers pour remonter sur leur trône, ainsi que le vœu de toute la nation détruisent les engagements qu'on aurait pu contracter avec eux. Sans cette phrase, je pense que cet ordre du jour vous ferait du mal aux yeux des hommes ombrageux. Napoléon à Soult, 3 juin. (Arch. nat., AF. IV, 907.) — Soult ajouta le paragraphe indiqué, en l'enjolivant d'injures contre les Bourbons et leurs partisans, que Napoléon ne lui demandait pas. L'ordre du jour parut le 4 juin dans le Moniteur.
[211] Vandamme à Davout, Mézières, 12 mai. (Arch. Guerre, Armée du Nord.) — La nomination de Soult, signée le 9 mai (décret impérial, 9 mai ; Arch. Guerre, lettres de Napoléon), ne fut mise à l'ordre du jour que le 14 mai. (Circulaire de Davout, 13 mai. Arch. Guerre, Armée du Nord.)
[212] Napoléon, Correspondance, 21723. Cf. Davout à Lebrun, 31 mars. (Arch. Guerre, Armée du Nord.) Davout à Napoléon, 19 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1939.) — Lebrun reprit ses fonctions d'aide de camp de l'empereur.
[213] Vandamme à Davout, Mézières, 20 et 30 avril, 9 et 14 mai. Ordres de Vandamme, Mézières, 2 mai, 7 mai. Rapport à Clarke du lieutenant Jallot, du 11e chasseurs, déserteur, Gand, 12 juin. Davout à Vandamme, 7 et 29 mai. (Arch. Guerre, Armée du Nord.)
Avant de recevoir le commandement du 3e corps (le 20 avril), Vandamme avait été chargé de l'inspection militaire et politique des places situées au nord de Lille ; il avait rempli cette mission avec le plus grand zèle. (Vandamme à Davout, 28 mars et 30 avril. Arch. Guerre.)
[214] Correspondance de Decaen, juin. (Arch. Guerre, Armée des Pyrénées Orientales.) Cf. Villèle, Mém., I, 296-297.
[215] Napoléon, Correspondance, 21732. Davout à Rapp, 10 avril. (Arch. Guerre.) Cf. sur l'arrestation : Procès de Ney.
[216] Lamarque à Gouvion Saint-Cyr, Tours, 27 juillet. (Arch. Guerre, Armée de la Loire.) Cf. Napoléon, Corresp., 21948.
[217] Napoléon à Durosnel, 30 avril. (Arch. nat., AF. IV, 907.) Voir aussi sur Durosnel le satisfecit que lui décerna Dessolles en reprenant, au nom du roi, le commandement de la garde nationale. Ordre du jour supplémentaire du 8 juillet. (Moniteur, 10 juillet.)
[218] D'après une lettre de l'empereur. (Napoléon, Corresp., 21808.) Carnot, Réal, Dubois, Regnaud, devaient seconder Durosnel dans ce travail, mais la correspondance de Durosnel en avril et mai (Arch. nat., F. 9, 766) prouve que lui seul ou à peu près seul s'en occupa.
[219] Rapports de Durosnel à Napoléon, 30 mai et 6 juin. Perregaux à Napoléon, 3 juin. Lettres diverses et notes de police, 28 et 31 mai, 1er juin, 2 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1935 et F. 7, 3774.)
[220] Mathieu Dumas à Napoléon, s. d. (mai). Davout à Napoléon, 7 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1935 et AF. IV, 1936.)
[221] Napoléon, Corresp., 21203, 21960, 21926. — Davout (Corresp., 1740) assure, il est vrai, n'avoir nommé Chambarlhac à Dijon que sur la désignation verbale de Napoléon. Mais d'autres officiers furent pourvus d'emplois par lui sans la ratification de l'empereur. Il n'y a point de doute sur ce point.
[222] Napoléon à Davout, 2 mai et 16 mai. (Arch. nat. AF. IV, 907, et Marquise de Blocqueville, le Maréchal Davout, IV, 137.) Lettre de Flahaut à Thiers, 1er octobre 1861 (citée par F. Masson, le Général Flahaut, 20-21.)
[223] Moreau à Clarke, Châteauroux, 19 nov. 1815, et états des services de Moreau. (Dossier de Moreau. Arch. Guerre.)
[224] Napoléon à Flahaut, 13 avril. (Arch. nat., AF. IV, 907.)
[225] Souvenirs manuscrits de Davout (comm. par M. le général Davout, duc d'Auerstædt). Cf. Davout, Corresp., 1607 ; Fleury de Chaboulon, Mém., I, 262.
[226] Napoléon à Flahaut, 18 avril. (Arch. nat., AF. IV, 907.) Cf. Napoléon à Flahaut, 12 mai. (Arch. Guerre, carton de la Corresp. de Napoléon.)
D'après une autre lettre de Napoléon à Flahaut du 13 avril (Arch. nat., AF. IV, 907), Lobau et La Bédoyère devaient partager cette mission avec Flahaut. Pour une raison ou pour une autre, ce dernier en resta seul chargé.
[227] Souvenirs manuscrits de Davout, précités. Cf. F. Masson, le Général Flahaut, 21-22, et Chénier, Hist. de Davout, II, 503-504.
[228] Plusieurs des mauvais choix cités à la page précédente sont en effet postérieurs au 18 avril, jour où Flahaut fut chargé de contrôler les propositions.
[229] A dater du 15 mai, il n'y a plus apparence dans la Correspondance de Napoléon que Flahaut s'occupe encore du personnel, et, d'après plusieurs lettres, il semble que l'empereur chargea Davout de faire directement certains choix de généraux.
[230] Souvenirs manuscrits de Davout (comm. par le général duc d'Auerstædt).
[231] Pion des Loches, Mes Campagnes, 465. Notes du colonel Baudus (comm. par M. de Montenon). Ameil à Grundler, 24 avril. Suchet à Davout, 21, 22, 25 mai. Lecourbe à Davout, 12, 16, 20 juin. Rapport de l'adjudant-commandant Gordon, 20 juin. (Arch. Guerre.) Gourgaud, Camp. de 1815, 67-68, Napoléon, Mém., 180. Rapport à Wellington. (Suppl. Dispatsches, X, 55.) Cf. Soult à Napoléon, 22 juin. (Arch. Guerre.)
[232] Cf. Ney à Napoléon, Avesnes, 1er avril. Davout à Napoléon, 13 avril, 15, 22 et 26 mai, 1er, 3 et 8 juin. (Arch. nat. AF. IV, 1936, 1939, 1940 et 1049.) Ameil à Grundler, Mézières, 20 avril. Grundler à Davout, Amiens, 24 avril. Rapp à Davout, Strasbourg, 15 mai. (Arch. Guerre.) D'Erlon à Davout, Lille, 11 et 25 avril. Vandamme à Davout, Mézières, 24 avril, 6 et 12 mai. Piré à Davout, 3 juin. Gressot à Soult, 8 juin. Note confidentielle pour Davout d'un officier de l'état-major de l'empereur, 20 juin. (Arch. Guerre, Armée du Nord.) Relations de Kellermann. (Arch. Guerre.) Relation du général Delort. Notes manuscrites de Rousselin. Du Casse, les Trois Maréchaux d'Ornano, 105-106. Grouchy, Fragm. hist., 10 (Cf. 9), et Relation succincte, 23. Gérard, Dernières Observations, 55. Rapport de d'Artez (Suppl. Dispatches of Wellington, X, 250.)
Il va sans dire que, comme à toute généralisation, on pourrait opposer à celle-ci un certain nombre de témoignages contradictoires. Gérard, Pajol, Exelmans, Vandamme, Allix, Gilly, Brayer, Michel, restèrent jusqu'au dernier jour pleins d'ardeur. Foy écrivait le 15 juin dans ses notes journalières : Nul ne pense à mettre en doute le triomphe de la France. Dessaix, désigné d'abord pour le commandement de l'armée des Alpes, passa, sans réclamer, simple divisionnaire dans cette armée. Travot, qui avait fait presque toute sa carrière en Vendée, ne réclama pas davantage, quand il lui fallut servir, en Vendée même, sous les ordres de Lamarque, plus jeune que lui, moins ancien de grade et sans expérience des guerres de l'Ouest.
[233] Procès de Cambronne, 41-42.
[234] Correspondance générale et Armées du Nord, du Rhin et du Jura, 25 et 28 mars, 6, 11, 12, 25, 26 avril, 2, 11, 14, 23, 24, 25 mai, 3 et 16 juin. (Arch. Guerre.) Lettres à Napoléon, 5 et 9 mai, 12 juin, etc. Lettre privée d'un militaire, Laon, 22 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1934.) Davout, Corresp., 1588. Relation du général Delort. Souvenirs manuscrits du chef d'escadrons Bourgeois, aide de camp de Hullin pendant les Cent Jours et grand-père maternel de l'auteur.
[235] Davout à Napoléon, 17 mai. (Arch. nat. AF. IV, 1940.)
[236] D'Erlon à Davout, Lille, 4 juin. (Arch. Guerre, Armée du Nord.) Lettre du colonel Vialla de Sommières, ancien sous-chef d'état-major du 1er corps, insérée dans la Revue de l'Empire, III, 373. — Le colonel Taubin commandait la place de Condé par intérim, pendant l'absence du général Bonnaire, venu à Paris pour la cérémonie du Champ de Mai.
[237] D'Erlon à Davout, Lille, 25 avril. (Arch. Guerre, Armée du Nord.) Davout, Corresp., 1636. — On verra plus loin que pendant la campagne, du 15 au 18 juin, on distribua encore à certains corps des cartouches et des gargousses chargées avec du son. (Soult à Davout, Laon, 21 juin. Arch. Guerre, Armée du Nord.)
[238] Général Saunier à Davout, Orléans, 25 mars. D'Erlon à Davout, jet avril. (Arch. Guerre.) Napoléon à Davout, 25 mars. (Arch. nat. AF. IV, 907.) Rapport du chevalier d'Artez, avril. (Suppl. Dispatches of Wellington, X, 250.) Adresses à l'empereur des 25e, 39e, 75e de ligne, 12e de dragons, etc. (Arch. nat., AF. IV, 1950.)
[239] C'est là une illusion des contemporains qui en a imposé à tous les historiens. La révolution du 20 mars fut non point un mouvement militaire subi par le peuple, mais un mouvement populaire secondé par l'armée. J'ai cherché à le prouver, et, si j'en juge par l'opinion de la plupart des critiques, je crois y avoir réussi.
[240] Ordres de Davout, 29 mars. (Arch. Guerre.) Rapport de Drouot, 15 mai. (Arch. nat. AF. IV, 1940.)
[241] Labretonnière, Souvenirs du Quartier Latin, 211, 225. — Cf. pour la venue des dragons de la garde à Paris, l'ordre de Davout à Pajol, 21 mars. (Arch. Guerre.)
[242] Grouchy à Le Sénécal, Aix, 15 avril. (Arch. Guerre, Armée des Alpes.) — Déjà en juillet 1814, les habitants d'Orgon avaient été maltraités pour le même motif par un détachement d'infanterie.
[243] Commandant de la place d'Aire à Drouot, 8 mai. (Arch. Guerre.) Préfet des Bouches-du-Rhône à Carnot, 25 mai. (Arch. nat., F. 7, 3774.)
[244] Maire de Saint-Germain à Davout, 6 mai. Ordre du jour de Piré, 14 mai. (Arch. Guerre.) Corresp. des préfets et rapports de police, avril-juin. (Arch. nat., F. 7, 3740 et F. 7, 3774.)
[245] Ordre du jour de Foy, Gosselies, 11 juin. (Registre de correspondance de Foy.) Ordre du jour de Vandamme, Gembloux, 18 juin. Radet à Soult, Charleroi, 16 juin, et Fleurus, 17 juin. (Arch. Guerre, Armée du Nord.)
[246] Daure à Davout, Laon, 5 juin. Piré à Davout, Laon, 6 juin. Ordre du jour de Friant, Charleroi, 16 juin. Rapport de la 2e division militaire, 27 mai. (Arch. Guerre, Armée du Nord.)
[247] Lobau à Davout, 3 et 7 avril. Davout à Lobau, 5 avril. (Arch. Guerre.)
[248] Lettre citée in extenso dans un rapport de Drouot à Napoléon, 26 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1940.) Cf. Reille à Drouot, 29 avril. (Ibid.)
[249] Soult à Grouchy, 5 juin. (Arch. Guerre, Armée du Nord.)
[250] Rapport du chevalier d'Artez, avril (Suppl. Dispatches of Wellington, X, 250.) La Bretonnière, Souv. du Quartier Latin, 202. Cf. le Journal de l'Empire, du 23 mars, et la lettre d'Alexandre Roger insérée dans le même journal, le 15 avril.
[251] Rapport du général Hulot sur les opérations de la 3e division du 4e corps (comm. par le baron Hulot). Rapport à Wellington, mai. (Suppl. Dispatches, X, 365. Notes journalières du général Foy (comm. par le comte Foy). Rapport de l'adjudant-commandant Gordon. Gand, 20 juin. (Arch. Guerre, Armée du Nord.) — Cf. Rapport à Wellington, 22 avril (Suppl. X, 163) : L'enthousiasme dans l'armée est au-dessus de toute expression. Bassano à Caulaincourt, 18 juin. (Arch. Aff. étrangères. 1802) : Notre armée est aussi bonne que dans les temps les plus prospères.
[252] Ney à Davout, 23 et 24 mars. Colonel du 67e à Davout, 11 mai. Lettre des officiers et soldats du 56e à Vandamme, 11 juin. Brune à Davout, 11 juin. Major du 57e à Davout, Strasbourg, 1er juin. Rapp à Davout, 4 juin. Procès-verbaux de remise des aigles aux 66, 526 et 1016, 24 juin. Général Théry à Davout, Sarrelouis, 27 mars. Colonel du 106e à Napoléon, 4 juin. Général de Civray à Brune, Antibes, 7 mai. Maire de Rouen à Davout, 24 avril. Gérard à Vandamme, Metz, 2 juin. Général Hugo à Davout, Thionville, 8 avril. Rapport de Rovigo, 17 juin. (Arch. Guerre, Corresp. générale et Armées du Nord, du Rhin et du Var.) Déposition du major vendéen E. de Marans. (Dossier de Travot, Arch. Guerre.) La Bretonnière, Souv. du Quartier latin, 228, 251, 252. Corresp. des Préfets et rapport de police, avril-juin. (Arch. nat. F. 7, 3774. F. 7, 3740 et F. 7, 3044a). Bulletin de Réal, 8 avril. Extrait d'une lettre du colonel Barailon, Lille, 4 mai. Napoléon à Fouché, 13 mai. Mouton-Duvernet à Davout, Lyon, 12 juin. (Arch. nat., F. 7, 3774. AF. IV*, 60, et AF. IV, 1934, 1937.)
Il y aurait aussi à citer tes Adresses des régiments à l'empereur (Arch. nat., AF. IV, 1950), si ces obligatoires assurances de dévouement pouvaient jamais être bien probantes. Celles-ci, cependant, ont un accent de passion qui paraît sincère quand on connaît les sentiments des soldats pour Napoléon. Mais toutes les protestations valent-elles ce simple fait ? De vieux soldats — vétérans des armées du Rhin, de Sambre-et-Meuse, d'Italie et, d'Egypte — désignés sur leur demande pour la retraite ou un congé définitif, refusèrent de quitter le régiment lorsqu'ils surent le retour de l'empereur. Il y eut soixante hommes qui agirent ainsi au 42e et trente au 64e (Rapports de Daumesnil, Condé, 31 mars, et de Ney, Haguenau, 9 avril. Arch. nat., AF. IV, 1950 et AF. IV, 1936.)