ESSAI SUR LE RÈGNE DE L’EMPEREUR AURÉLIEN (270-275)

 

PREMIÈRE PARTIE — CARRIÈRE PRIVÉE D’AURÉLIEN. L’EMPIRE À SON AVÈNEMENT.

CHAPITRE I. — CARRIÈRE PRIVÉE D’AURÉLIEN.

Texte numérisé par Marc Szwajcer

 

 

Aurélien (L. Domitius Aurelianus[1]) naquit en Pannonie Inférieure, aux environs de Sirmium[2], le 9 septembre[3], probablement — le chiffre de l’année n’est pas absolument sur — en 214[4]. Sa famille était de condition assez basse[5]. Son père, un homme de la campagne, était établi comme colon, selon une tradition rapportée par l’Épitomé[6], sur les domaines d’un certain sénateur Aurelius ; c’était vraisemblablement un ancien soldat, qui, comme tant d’autres au IIe siècle, avait reçu, à sa sortie du service, un lot de terre à cultiver.

Sa mère, selon la Vita Aureliani[7], aurait été prêtresse du Soleil. Le fait, souvent révoqué en doute, n’est pas aussi invraisemblable qu’on l’a prétendu. Déjà, à la fin du IIe siècle, les diverses formes de la religion solaire étaient fort en honneur dans les provinces danubiennes, particulièrement en Pannonie et en Dacie ; propagées par l’armée, elles avaient profondément pénétré dans les campagnes, où les soldats, après avoir achevé leur service militaire, s’installaient souvent comme cultivateurs. Les sanctuaires consacrés à la religion solaire étaient nombreux.

D’autre part, le culte du Soleil, sous sa forme italique, avait été de tout temps, à Rome, desservi par la gens Aurélia[8] et était pour cette gens une sorte de culte domestique. Il est très admissible que la mère d’Aurélien, femme d’un colon du sénateur Aurelius et probablement elle-même affranchie des Aurelii, ait eu un culte particulier pour la religion solaire, et qu’elle ait été choisie, de préférence à toute autre, comme prêtresse du Soleil, dans la localité qu’elle habitait. Aurélien montra toujours pour la religion solaire une ferveur[9] qu’on ne retrouve au même degré chez aucun des empereurs danubiens du IIIe et du début du IVe siècle ; cette ferveur particulière s’expliquerait très bien par un culte de famille.

Les textes ne disent pas qu’Aurélien ait eu des frères. Ils mentionnent seulement une sœur[10], dont il fit plus tard, durant son règne, mourir le fils ou la fille.

La Pannonie, entièrement romanisée, était, depuis le IIe siècle, un des centres de recrutement pour l’armée romaine. L’esprit militaire, naturellement fort vif au voisinage de la frontière, y était entretenu par les nombreuses troupes réparties le long du Danube, et par la masse d’anciens soldats établis comme cultivateurs dans le pays. Parmi cette population rude et inculte, les religions orientales avaient trouvé un terrain particulièrement favorable à leur développement ; dans aucune province de l’Occident, au IIe et au IIIe siècle, on ne les voit aussi florissantes qu’en Pannonie et en Dacie[11]. Les deux traits caractéristiques d’Aurélien seront ceux mêmes de la population pannonienne : l’esprit militaire et la ferveur religieuse.

La jeunesse d’Aurélien correspond à une période de calme et de prospérité pour les provinces danubiennes. De Caracalla à Sévère Alexandre, ces provinces, et, en particulier, la Pannonie, ne furent jamais sérieusement menacées par les invasions ; le danger ne devait commencer pour elles qu’au temps de Maximin et de Gordien III, lorsque les Goths attaquèrent les villes grecques du Pont-Euxin et la Dacie.

Sur la jeunesse d’Aurélien, nous ne savons rien. Le biographe dit simplement qu’il se fit remarquer de bonne heure par la vivacité de son esprit, par sa force musculaire et son ardeur pour les exercices militaires[12]. Le fait est fort vraisemblable ; dans cette population de soldats, la préparation à la guerre était constante. Aurélien, qui, par tempérament, ne faisait rien à demi, dut attirer l’attention très vite.

L’entrée d’Aurélien au service militaire, — il eut vingt ans vers 234, — précéda d’assez peu la mort de Sévère Alexandre. Sa carrière privée, qui comprend trente-cinq années environ, correspond à la période de l’anarchie militaire (235-268), si désastreuse pour l’Empire, mais si favorable à l’avènement des hommes nouveaux. Sévère Alexandre, en inaugurant dans l’administration des provinces la séparation des pouvoirs civil et militaire, avait ouvert aux officiers sortis du rang l’accès des grands commandements. D’autre part, dans la détresse croissante de l’Empire, les provinces danubiennes, dont l’importance était si considérable pour le recrutement de l’armée, devaient déplus en plus passer au premier plan ; en quinze années,deux empereurs, Maximin, un Thrace, Docius, un Pannonien comme Aurélien, allaient successivement en sortir.

Aurélien eut donc la double fortune d’entrer dans l’armée au moment où les hauts commandements devenaient accessibles à tous et où les provinces danubiennes, d’où il était originaire, commençaient à jouer un rôle prépondérant.

La carrière militaire d’Aurélien jusqu’à son avènement à l’Empire (v. 234-270), se divise en trois parties sur lesquelles les textes nous renseignent inégalement :

1° Jusqu’à l’avènement de Valérien (v. 234-253) ;

2° Sous Valérien et Gallien (253-208) ;

3° Sous Claude (268-270).

I

Pour cette première période, la Vita Aureliani ne mentionne que deux faits.

a) Une campagne en Illyricum (6, 3-6). — A la tête de 300 soldats præsidiarii, Aurélien battit les Sarmates qui envahissaient l’Illyricum. Il en tua, de sa main, 48 en un seul jour, et plus de 950 en plusieurs rencontres. — Le biographe ajoute qu’à la suite de ces exploits, les jeunes soldats composèrent, en son honneur, des chants et des danses militaires qu’ils exécutaient les jours de fête :

Mille, mille, mille decollavimus,

Unus homo ! mille decollavimus.

Mille vivat qui mille occidit.

Tantum vini nemo hahet, quantum fudit sanguinis.

b) Une campagne en Gaule, sur le Rhin (7, 1-2). — Aurélien, tribun de la VIe légion Gallicana, battit complètement, près de Mayence, les Francs qui ravageaient toute la Gaule. II en tua 700 et fit vendre à l’enchère 300 des leurs faits prisonniers[13]. Cet exploit fut célébré par une autre chanson militaire :

Mille Sarmatas, mille Francos semel et semel occidimus,

Mille Persas quærimus.

Les détails de ces deux récits n’ont évidemment aucune valeur historique. Aurélien, par sa bravoure et sa force physique, est devenu assez vite dans l’armée un héros de légende, et il est vraisemblable que les deux chansons rapportées par le biographe ont été composées plus tard. Mais l’existence même de ces deux premières campagnes d’Aurélien n’est pas douteuse.

Il résulte du récit, d’une part, que la campagne contre les Sarmates a précédé la victoire sur les Francs, et, d’autre part, qu’au moment du combat de Mayence, Aurélien était tribun de légion. L’âge légal pour l’obtention du tribunat légionnaire était trente ans. Aurélien, entré au service militaire vers 234, a débuté nécessairement par les grades inférieurs, puis il est devenu successivement centurion et tribun de cohorte. Il n’a pu être nommé tribun de légion avant les dernières années de Gordien III (vers 242-244), au plus tôt.

Il est question, en 242, lors du départ de Gordien III pour la campagne d’Orient, d’une guerre contre les Sarmates[14] sur le Bas Danube ; peut-être (on ne peut se prononcer avec certitude) la victoire d’Aurélien sur les Sarmates se place-t-elle à ce moment, ou est-elle légèrement antérieure. L’effectif, 300 hommes, placé sous ses ordres donnerait à penser qu’il n’était encore que tribun de cohorte ; il aurait été promu tribun de légion à la suite de ce succès.

Vers la fin du règne de Gordien III, Aurélien passa de l’armée du Danube à l’armée du Rhin ; c’est à ce moment[15] qu’il détruisit près de Mayence, en interceptant leur retraite, plusieurs bandes de Francs qui avaient envahi la Gaule par la vallée de la Moselle.

Le tribunat légionnaire et la préfecture d’une aile de cavalerie étaient les grades les plus élevés auxquels Aurélien pouvait atteindre. A cette époque le commandement de la légion appartenait encore au légat sénatorial. Mais il y avait un emploi dans lequel l’empereur pouvait déléguer les tribuns légionnaires : c’était celui de dux, chargé, pour un laps de temps variable, du commandement d’une ou de plusieurs légions. En qualité de dux, Aurélien devait exercer à plusieurs reprises, sous Valérien et sous Claude, d’importants commandements. — Son biographe écrit (10, 2) : Habuit multos ducatus, plurimos tribunatus, vicarias ducum et tribunorum diversis temporibus prope quadraginta ; le chiffre donné est sujet à caution, mais les indications générales relatives à la carrière sont exactes[16].

Il est question également, au paragraphe 5, 5 de la Vita Aureliani, d’une ambassade d’Aurélien en Perse[17]. A cette même ambassade se rapporte probablement l’entrée d’Aurélien à Antioche mentionnée au paragraphe 5, 3-4[18]. Ces deux indications étant données à propos des présages du règne, il n’y a guère à y attacher d’importance. Si elles sont authentiques (ce qui est plus que douteux), l’ambassade d’Aurélien en Perse doit se placer entre244 et 251, probablement sous Decius.

On ne sait rien de précis sur la carrière d’Aurélien au temps de Philippe, Decius, Gallus, Æmilianus ; il est vraisemblable que Decius, Pannonien lui aussi, dut contribuer fortement à l’avancement de son compatriote.

II

Le biographe consacre huit paragraphes (8-15) à la carrière d’Aurélien durant les sept années du règne de Valérien (253-260) ; mais, de ces huit paragraphes, six sont occupés par des documents dont aucun n’est authentique[19], et un (15, 3-6), par une digression étrangère au récit.

Les faits mentionnés sont les suivants. En 256, au moment où Gallien arriva en Gaule, Aurélien aurait été encore présent à l’armée du Rhin[20] (lettre de Valérien au consul Antoninus Gallus, 8, 2). Un peu plus tard, il aurait été chargé, comme dux, d’inspecter et d’organiser tous les camps des frontières et aurait, à cette occasion, fait un séjour à Rome (lettre de Valérien à Ceionius Albinus, préfet de la Ville, 9, 2-3.6.7). En 257-258, il aurait suppléé Ulpius Crinitus qui commandait sur le Bas Danube, battu les Goths, fait de nombreux prisonniers et remis la frontière en état de défense (10, 2-3 ; lettre de Valérien à Aurélien, 11, 1-7 ; procès-verbal du conseil de Byzance, 13, 2 ; 14,6). A la suite de cette victoire, il aurait reçu le consulat suffect (lettre de Valérien à Aurélien, 11, 8 ; lettre de Valérien au préfet de l’Ærarium Ælius Xifidius, 12,1 ; procès-verbal du conseil de Byzance, 13, 4 ; 14, 3.7 ; 15, 3) et aurait été adopté par Ulpius Crinitus (Id., 14, 5-7 ; 15, 1-2 ; cf. 10, 3).

Les indications relatives au consulat[21] et à l’adoption[22] sont certainement fausses ; la charge d’inspecteur des camps, mentionnée seulement dans la lettre de Valérien à Ceionius Albinus, est au moins fort douteuse. Le seul fait que l’on puisse, semble-t-il, admettre avec certitude, est la présence d’Aurélien sur le Bas Danube en 257-258, et la suppléance d’Ulpius Crinitus[23].

Pour les huit années du règne de Gallien (260-268), la Vita Aureliani ne donne aucune indication. Un seul fait est certain : l’empire gallo-romain s’étant constitué en 258 et l’Orient ayant été perdu en 260, Aurélien resta attaché à l’armée du Danube, à laquelle il appartenait déjà sous Valérien. Il est curieux qu’il ne soit pas question de lui à cette époque ; peut-être Gallien, qui le savait très populaire dans l’armée et craignait sa sévérité, le tint-il à l’écart, confiant de préférence les grands commandements à Heraclianus[24], à Marcianus[25], et surtout à Claude, qui était en 268, selon l’expression de Zosime[26], le second personnage de l’Empire.

Aurélien rentre en scène en 268 : les généraux de l’armée du Moyen et du Bas Danube, soit loyalisme, soit difficulté de s’entendre sur le choix d’un empereur, étaient, depuis la chute d’Ingenuus et de Regalianus, restés fidèles à Gallien. Mais, en 268, la situation se trouva plus grave que jamais ; deux grandes invasions menaçaient l’Empire, dirigées, l’une, celle des Alamans, contre les provinces du Haut Danube, où la révolte d’Auréolus avait désorganisé la défense, et l’Italie ; l’autre, la plus formidable, celle des Goths, contre l’Illyricum, la Macédoine et la Thrace. En présence de ce double danger, auquel, pensaient-ils, Gallien était incapable de faire face, les généraux se décidèrent à agir. L’armée, sous les ordres directs de Gallien, était réunie autour de Milan, où elle tenait Auréolus assiégé ; les principaux généraux de l’armée danubienne étaient présents[27]. C’étaient le préfet du prétoire Heraclianus[28], qui, battu, l’année précédente, par Zénobie[29], avait cependant conservé la faveur de l’empereur ; Marcianus[30], le vainqueur des Goths en 267, et Claude[31]. Aurélien, qui commandait alors un corps de cavalerie (il était probablement occupé sur le Bas Danube à poursuivre les débris des troupes gothiques écrasées par Marcianus[32]), était absent. On ne pouvait rien faire sans lui, car son opposition eût pu être dangereuse : on l’attendit donc. Lorsqu’il fut arrivé avec sa cavalerie[33], le complot se forma définitivement ; il y adhéra, — personnellement, il devait peu avoir à se louer de Gallien, — et même, si l’on en croit Aurelius Victor, il suggéra le plan à suivre[34].

Avant de l’exécuter et pour prévenir toute compétition, les conjurés résolurent de s’entendre sur le choix d’un empereur[35]. Depuis la sécession des Gaules et de l’Orient, deux des trois grandes armées de l’Empire, l’armée du Rhin et l’armée d’Orient, étaient hors de cause ; il ne restait que l’armée du Danube et son choix devait être décisif. Les généraux réunis autour de Milan étaient maîtres de l’élection. Les deux candidats les plus en vue étaient Aurélien et Claude. Aurélien avait alors cinquante-trois ans environ. Sa force physique, son habitude du commandement et ses exploits depuis trente années lui avaient valu une grande popularité dans l’armée[36]. On le savait homme d’action et capable, plus qu’aucun autre, défaire face aux dangers multiples qui menaçaient l’Empire. Claude avait le même âge qu’Aurélien[37] ; ses services étaient moins éclatants, mais sa situation, grâce à la faveur de Gallien, était plus haute. Son caractère était doux et conciliant, qualité que la dureté bien connue d’Aurélien faisait apprécier davantage encore par les officiers et parles troupes. Il fut préféré à Aurélien et les généraux se mirent d’accord sur son nom. Peu de temps après, on simula une attaque de nuit : au milieu du tumulte, Gallien fut mis à mort[38].

III

Aurélien, devenu le second personnage de l’Empire et le principal lieutenant de Claude[39], prit part à la campagne contre Auréolus, toujours assiégé clans Milan. Auréolus dut bientôt se rendre. Il fut tué, malgré la capitulation, sans qu’on puisse déterminer exactement dans quelles conditions. Il résulte toutefois des diverses traditions rapportées par le biographe qu’Aurélien fut l’auteur direct de ce meurtre, soit qu’il ait agi de sa propre autorité et contrairement à la volonté de Claude, soit qu’il ait obéi aux ordres formels de l’empereur[40].

La même année (268), Aurélien dut prendre part — les textes n’en disent rien — à la guerre contre les Alamans dans l’Italie du Nord et à la victoire du lac de Garde[41]. Ce fut probablement au cours de cette campagne qu’il reçut le commandement en chef de la cavalerie romaine[42].

En 269, à la tête de la cavalerie romaine, Aurélien joua un rôle actif dans la guerre contre les Goths. Les Goths, apprenant l’arrivée de Claude sur le Danube, avaient abandonné les sièges de Thessalonique et de Cassandrée pour marcher contre lui. Aurélien, placé sur leur flanc gauche avec la cavalerie dalmate, les battit dans la région de Doberos, en Pélagonie, et leur tua 3.000 hommes[43]. Après la victoire de Naïssus, il poursuivit les fuyards, en tua ou en prit un grand nombre et, fermant aux autres le chemin de la Macédoine, il les rejeta dans l’Hæmus, où, bloqués par les troupes romaines, ils n’allaient pas tarder à souffrir cruellement de la famine et de la peste[44] (fin 269).

Dans les premiers jours de 270, Claude quitta le théâtre de la guerre, où tout danger était dissipé, et se rendit à Sirmium[45], appelé par une invasion des Juthunges sur le Haut Danube, et peut-être aussi par une menace d’invasion des Vandales en Pannonie. Aurélien, resté sur le Bas Danube, reçut le commandement en chef de l’armée[46] avec la charge de poursuivre et d’anéantir les bandes de Goths qui tenaient encore la campagne. Celles-ci firent (fin janvier-février 270) une tentative désespérée contre Anchialos, sur le Pont-Euxin, et Nicopolis, pour se ravitailler et s’ouvrir la route du Nord[47]. Cette tentative échoua devant la résistance des milices provinciales et sans doute aussi des troupes régulières qui défendaient la frontière de Mésie Inférieure[48]. Ces dernières victoires furent remportées après la mort de Claude, mais, vraisemblablement, avant qu’Aurélien, éloigné de Sirmium, n’en reçût la nouvelle.

Claude mourut[49] de la peste vers le milieu de janvier 270. Aurélien, par ses exploits antérieurs et parles grands commandements qu’il venait d’exercer[50], était tout désigné pour lui succéder. Il ne semblait pas qu’il pût avoir de compétiteur. Mais il n’était pas présent à Sirmium ; les généraux, comme en 268, se défiaient de lui ; ils attendirent et leur inaction permit au Sénat d’intervenir.

Les rapports entre le Sénat et l’empereur, si hostiles au temps de Gallien, qui avait exclu les sénateurs de l’armée[51], étaient devenus presque amicaux sous Claude ; la douceur de Claude et la joie que le Sénat éprouvait d’être débarrassé de Gallien[52] avaient amené une détente. D’ailleurs, Claude avait presque toujours été absent, de Rome et les froissements entre les deux pouvoirs, inévitables dans les questions de politique intérieure, n’avaient pas eu l’occasion de se produire. En marchant contre les Goths, Claude avait laissé à Aquilée un corps de troupes chargé de garder les derrières de l’armée d’opérations et de protéger l’Italie contre toute invasion venue du Norique ou de la Rhétie. C’était un poste de confiance dont il avait donné le commandement à son frère Quintillus[53].

Quintillus, portrait affaibli de Claude[54], dont il avait la douceur[55], mais non les brillantes qualités militaires, n’était pas un homme de guerre[56] et il n’appartenait, à aucun titre, à cet état-major de généraux danubiens formés à l’école de Decius et de Valérien. Prévenu de la mort de Claude, le Sénat, qui redoutait, non sans raison, l’avènement d’Aurélien, se hâta d’agir. Il donna l’Empire à Quintillus[57].

Ce choix était habile : le Sénat espérait que l’armée du Danube, très attachée à la mémoire de Claude[58], reconnaîtrait son frère sans difficulté. C’est en effet ce qui arriva. Quintillus fut reconnu par l’armée de Sirmium et par toutes les provinces restées fidèles à l’Empire. Tous les ateliers monétaires qui avaient frappé sous Claude, frappèrent à son nom[59].

Aurélien avait été retenu quelque temps, en Mésie Inférieure, par la double attaque des Goths sur Anchialos et Nicopolis. Dès qu’il en eut fini avec eux, il se rendit à Sirmium. L’armée de Sirmium, mécontente de l’initiative prise par le Sénat, avait reconnu Quintillus, mais sans enthousiasme. Quintillus avait commis la faute de ne pas y venir. Malgré sa présence, les troupes d’Aquilée elles-mêmes remuaient[60]. Le bruit courait que Claude, en mourant, avait désigné Aurélien comme son successeur[61]. Aurélien fut proclamé empereur à Sirmium[62] ; toute l’armée le reconnut aussitôt. Il n’eut même pas à paraître pour avoir raison de son rival. Quintillus fut abandonné par ses propres troupes[63]. Ce n’était pas l’appui du Sénat qui pouvait le sauver. Ses amis, voyant son impuissance[64], lui conseillèrent de renoncer à toute résistance. Il se fit ouvrir les veines par son médecin[65] (fin mars 270), après un règne de deux mois et demi environ[66]. Aurélien était désormais seul maître, et son règne s’ouvrait par une victoire décisive sur le parti sénatorial.

 

 

 



[1] Le nom complet est donné par les inscriptions, les monnaies et par un papyrus de 271 (K. WESSBLY, Ein Papyrus aus der Zeit des Aurelianus und Vaballathus, loc. cit. Les textes, les constitutions du Code, les autres papyrus donnent simplement Aurelianus. — La suscription d’une lettre de Claude, insérée au paragraphe 17 de la Vita Aureliani, porte : Flavius Claudius Valerio Aureliano. La lettre n’est pas authentique, et l’attribution à Aurélien du gentilice Valerius n’a aucune valeur.

[2] Selon une autre tradition, Aurélien serait né dans la partie des deux Mésies qui forma, depuis 275, la nouvelle province de Dacie. La Vita Aureliani (3, 1-2) mentionne les deux traditions : Divus Aurelianus ortus, ut plures loquuntur, Sirmii familia obscuriore, ut nonnulli. Dacia Ripensi. Ego autem legisse me memini auctorem qui eum Mœsia genitum prædicaret. La seconde tradition se retrouve aussi dans EUTHOPE (IX, 13, 1) : Dacia Ripensi oriundus, et l’Épitomé (35, 1) : Inter Daciam et Macedonium.

[3] Le jour de naissance est donné par la liste des Natales Cæsarum, rédigée au temps de Constance II : C. I. L., I2, p. 255 : V. Idu. Sept. (= 9 septembre), et par les FASTES DE PHILOCALUS, de 354 (id., p. 272).

[4] L’année de la naissance n’est indiquée par aucune des sources principales. MALALAS (XII, p. 301, éd. Bonn) dit qu’Aurélien mourut à soixante et un ans ; la Chronique Pascale (l. p. 509, éd. Bonn) lui donne soixante-quinze ans nu moment de son avènement. Le second chiffre est manifestement erroné : il y a eu confusion avec l’âge de Tacite, successeur d’Aurélien. — Selon ZOSIME (I, 51), Aurélien, lors de la première campagne contre Zénobie (début de 272), était grisonnant : Άνδρα μεσαιπόλιον έμφέρειάν τινα πρός τήν τοΰ βασιλέως ί δέαν δοκόυντα πως έχειν. Cette indication de Zosime, l’effigie des monnaies et tout ce que l’on sait de l’activité et de la vigueur d’Aurélien, concordent bien avec l’âge mentionné par Malalas.

[5] Vita Aureliani, 3, 2 : familia obscuriore : 4, 1 : modicis ortus parentibus : id., 4, 3 ; 4, 7.

[6] 33, 1 : Genitus patre mediocri et, ut quidam ferunt, Aurelii clarissimi senatoris colono.

Il est probable qu’Aurélien tenait son cognomen Aurelianus de sa mère. Son père était un Domitius, sa mère vraisemblablement une Aurélia, sans doute une affranchie des Aurelii. — De même, le cognomen de Dioclétien, Diocletianus, lui venait de sa mère, Dioclea : Diocletianus Dalmala, Anulini senatoris libertinus, matre pariter atque oppido nomine Dioclea, quorum vocabulis, donec imperium sumeret, Dioclea appellatus, ubi orbis Romani potentiam, cepit, Graium nomen in Romanum morem convertit (Épitomé, 39, 1).

[7] Vita Aureliani, 4, 2 : Matrem ejus Callicrates Tyrius Graecorum longe doctissimus scriptor, sacerclotem templi Solis, qui in vico eo, in quo habitabant parentes,... fuisse dicit. Habuisse quin etiam non nihilum divinationis... ; — id. 4, 5-6 ; 5, 5 : Data est ei praeterea, cum legatus ad Persas isset, patera, qualis solet imperatoribus dari a rege Persarum, in qua insculptus erat Soleo habitu quo colebatur ab eo templo, in quo mater ejus fuerat sacerdos. — Deux statues mutilées (pour toutes deux la tête manque) ont été découvertes, en 1883, sur remplacement de l’ancien camp de Carnuntum, en Pannonie Supérieure (Fr. STUDNICZKA, Ausgrabungen in Carnuntum. II, Bildwerkc, Archäol. Epig. Mitth. aus Œsterreich Ungarn, VIII, 1884. pp. 59-74, Pl. I, II). L’une est une statue d’empereur portant la tunique et la cuirasse, l’autre est une statue de femme, vêtue d’une longue tunique et d’un manteau, portant sur le bras gauche un petit enfant nu. Peut-être ces deux statues représentent-elles, l’une Aurélien empereur, l’autre la mère d’Aurélien, en costume de prêtresse, portant son fils enfant Cf. P. HABEL, Numismatisch-Archäologischer Beitrag zur bildlichen Darstellung des Sonnengottes in der Römischen Kaiserzeit, Wochensehrift für klassische Philologie. 1889, pp. 275-278).

[8] FESTUS : De Verburum Signific., (édit. Thewrewk de Ponor, p. 18) : Aureliam familiant ex Sabinis oriundam a Sole dictam putant, quod ei publice a populo romano datus sit locus, in quo sacra faceret Soli, qui ex hoc Auselii dicebantur, ut Valesii, Papisii pro eo quod est Valerii, Papirii.

[9] Voir plus loin, IIIe Partie, Chap. V.

[10] Vita Aureliani, 36, 3 ; — Epitomé, 35, 9 ; — EUTROPE, IX. 14. — Voir plus loin, IIIe Partie, Chap. Ier.

[11] Fr. CUMONT, Textes et monuments figurés relatifs aux mystères de Mithra, Bruxelles, 1896-1899, t. I, pp. 248-251.

[12] Vita Aureliani, 4, 1 : A prima ætate ingenio vivacissimus, viribus clarus nullum unquam diem prætermisit, quamvis festum, quamvis vacantem, quo uon se pilo et sagittis ceterisque armurum exercent officiis.

[13] Les chiffres relatifs au nombre des Sarmates et des Francs, tués ou faits prisonniers par Aurélien, ont été arbitrairement choisis de manière à donner le nombre total de 1.000.

[14] Vita Gordianor., 26, 4 : — cf. 34, 3.

[15] WIKTEHSH.-DAHN, loc. cit., I, p. 214 ; — F. DAHN, loc. cit., p. 203. Il est absolument impossible d’admettre la chronologie de TH. BERNHARDT (p. 20) et de H. SCHILLER (I2, p. 815, not. 3), qui reculent la date de cette victoire jusque sous le règne de Valérien (vers 255-236). — A cette même invasion des Francs se rapportent vraisemblablement les trouvailles monétaires d’Uersfeld (Province Rhénane : Ad. BLANCHET, loc. cit., n° 752), d’Houffalize (Luxembourg belge : Id., n° 689), de Marialmé (Belgique : province de Namur : Id., n° 107), de Contrisson (Meuse : Id., n° 105), de Prézelles (Nord : Id., n° 85) et d’Annappes (Nord : Id., n° 3). — Tous ces trésors ont été enfouis sous le règne de Gardien III.

[16] La lettre d’Aurélien ad Vicarium Suum (Vita Aureliani, 7, 5-8), n’a aucune valeur historique. C’est un document vide et déclamatoire, que le biographe a composé uniquement pour appuyer ce qu’il dit de la sévérité d’Aurélien.

[17] Data est ei præterea, cum légatus ad Persas isset, patera, qualis solet imperatoribus dari a Rege Persarum, in qua insculptus erat Sol eo habitu quo colebatur ab eo templo in quo mater ejus fuerat sacerdos. Donatus eidem etiam elephantus præcipuus, quem ille imperatori obtulit, zolusque omnium privatus Aurelianus elephanti dominus fuit.

[18] Ingrediente eo Antiochiam in vehiculo, quod præ vulnere tune equo sedere non posset, iaa pallium purpureum, quod in honore ejus pansum fuerat, decidit ut humeros ejus tegeret. Et, cum in equum transire vellet, quia invidiosum tunc erat vehiculis in civitate uti, equus est ei Imperatoris adplicitus, oui per festinationem insedit. Sed ubi comperit, semet ad suum transtulit.

[19] Sur les sept documents, relatifs à cette partie de la vie d’Aurélien, il y en a six pour lesquels la falsification est certaine :

a) Lettre de Valérien au consul Antoninus Gallus, trouvée, selon le biographe, in Ulpia Bibliotheca inter linteos libros (8, 2-4). — Gallien y est qualifié de puer : Culpas... quod Postumo filium meum Gallienum magis quam Aureliano commiserim, cum utique severiori et puer credendus fuerit et exercitus... Or, en 233, Gallien était âgé de trente-cinq ans (cf. H. PETER, die Scriptores Historiæ Augustæ, pp. 160, 179) ;

b) Lettre de Valérien à Aurélien (11) ;

c) Lettre de Valérien à Ælius Xifidius, préfet de l’Ærarium (12,1-2) ;

d, e, f) Procès-verbal du conseil de Byzance en 238, extrait, selon le biographe, ex libris Acholi, qui magister admissionum Valeriani principis fuit, libro actorum ejus nono (13-14). — Dans tous ces documents, il est question d’un premier consulat d’Aurélien en 258, consulat suffect. Les Fastes et les Inscriptions attestent, qu’Aurélien a été consul pour la première fois, après son avènement, en 271 (cf. H. PETER, loc. cit., p. 181). — La lettre de Valérien à Aurélien (11) précise la date de ce consulat : Consulatum cum eodem Ulpio Crinito in annum sequentem a die undecimo Kalendarum luniarum in locum Gallieni et Valeriani sperare te convenit (11, 8). — Si le document était authentique, le Valerianus dont Valérien parle sous cette forme : tu locum Gallieni et Valeriani, ne pourrait être que P. Licinius Cornélius Valerianus, fils aîné de Gallien. Or, jamais Gallien et son fils Valerianus n’ont pris le consulat ensemble. Du vivant de son père, Gallien a été trois fois consul : en 254, 235, 257, toujours avec lui, jamais avec son fils (Cf. H. PETER, loc. cit., p. 181).

g) Quant au septième document, la lettre de Valérien au préfet de la Ville Ceionius Albinus ex scriniis Præfecturæ Urbanæ (9, 2-7), la preuve directe de la falsification manque. Mais le document est très vide : la forme, oratoire, n’est pas celle de la correspondance administrative : Quid in illo non clarum ? Quid non Corvinis et Scipionibus conferendum ? Ille liberator Illyrici, ille Galliarum restitutor, ille dux magni totus exempli... (9, 4). Cette lettre n’est pas plus authentique que les autres.

Pour l’étude de ces documents, cf. H. PETER, loc. cit., pp. 166-171.

[20] Le fait est admis par WIETERSHEIM-DAHN (loc. cit., I, p. 206). Aurélien, avec Postumus, aurait pris part aux premières campagnes de Gallien sur le Rhin, en 256-257.

[21] Il résulte des Fastes et des Inscriptions qu’Aurélien fut consul pour la première fois en 271, l’année qui suivit son avènement (Voir plus loin). De même les autres généraux qui devinrent empereurs à la fin du IIIe siècle. Claude, Prunus, Dioclétien, ne parvinrent au consulat qu’après leur avènement à l’Empire.

[22] L’adoption d’Aurélien par Ulpius Crinitus, en 258, est certainement à rejeter. Si elle avait eu lieu, il en serait resté quelque trace dans le nom d’Aurélien ; il est possible que la femme d’Aurélien, Ulpia Severina (voir plus loin), ait été fille, ou tout au moins parente, d’Ulpius Crinitus. Aurélien serait entré par son mariage dans la famille d’Ulpius Crinitus : la légende relative à l’adoption serait le résultat d’une confusion.

[23] La supposition de TILLEMONT (Mémoires pour servir à l’Histoire Ecclésiastique des six premiers siècles, t. IV, Paris, 1701, pp. 205, 646), qu’Aurélien, en qualité de fonctionnaire impérial en Gaule, aurait persécuté les chrétiens (particulièrement saint Patroclus, à Troyes : Acta Sanctor., 21 janvier), soit sous Gallus, au début de 253 (loc. cit., p. 646 : Note sur saint Patroclus), soit sous Valérien, en 259 (p. 205 ; cf. p. 646, n’est pas admissible. — Cf. Fr. GOERRES, Aurelianus schon als Slatthalter Christenverfolger (Zeitschrift für Wissensch. Théologie, XX, 1877, pp. 529-534).

[24] ZOSIME, 1, 40 ; — JEAN D’ANTIOCHE, Fragm. Hist. Græc., éd. C. Müller, IV, p. 599, n° 152, 3 ; — Vita Gallien., 13, 4-5.

[25] ZOZIME, I, 40 ; — Vita Gallien., 6, 1 ; 13, 10 ; — Vita Claud., 18, 1.

[26] ZOZIME, I, 40 : Κλαύδιον ός μετά ρασιλλέα τών όλων έπιτροπεύειν έδόκει.

[27] Sur cette conjuration de Milan, voir mon travail : De Claudio Gothico, Romanorum Imperatore, chap. II.

[28] ZOZIME, I, 40 : — ZONAR., XII, 25 (III, p. 149 Dind.) ; — JEAN D’ANTIOCH., loc. cit. ; — Vita Gallien., 14, 1.

[29] Vita Gallien., 13, 4.

[30] Vita Gallien., 14. 1. — Selon ZOSIME (I, 40), au contraire, Marcianus se trouvait alors sur le Bas Danube, où il commandait en chef.

[31] ZOZIME, I, 40 : — ZONAR., XII, 25 (III. p. 148 Dind.) ; — Vita Gallien., 14, 2 ; — Vita Claud., 1. 3 ; — AUREL. VICT., Cæsar., 33, 26 ; — Epitomé, 34, 2.

[32] Vita Gallien., 13, 9-10.

[33] ZONARAS, XII, 23 (III, p. 147 Dind.) : Αύρηλιανός σύν ίππεΰσι προσήλθεν.

[34] Cæsar., 33, 21 : Aureliani consilio.

[35] ZOZIME, I, 41 ; — Vita Gallien., 14, 2. — Voir De Claudio Gothico, Romanorum Imperatore, loc. cit.

[36] AUREL. VICT., Cæsar., 33, 21 : Aureliani consilio, eujus gratta in exercitu atque honos præstabant.

[37] MALAL., XII, p. 299 (éd. Bonn) ; — Chroniq. Pascal., p. 508 (id.).

[38] Quoique les textes ne le disent pas expressément, Aurélien, qui selon AURELIUS VICTOR (loc. cit.), avait suggéré le plan à suivre, fut probablement chargé de l’exécution. Le fait semble résulter du récit de ZONAIUS (XII, 2S, III, pp. 147-148 Dind.). — Dans ZOSIME (I, 40) et la Vita Gallieni (14, 4 : 7-9), il n’est également question que de cavaliers ; ces deux textes racontent que Gallien fut frappé par le chef d’un corps de cavalerie dalmate (ZOZIME : ός τής τών Δαλματών ήρχεν ΐλης ; Vita Gallien. : Cecropius (Zosime ne donne pas son nom) Dux Dalmatarum). Ce Cecropius était très probablement un subordonné d’Aurélien.

[39] Vita Aureliani, 16, 1 : His igitur tot ac talibus præjudiciis muneribusque fultus, Claudianis temporibus tuntum enituit ut...

[40] Vita Aureliani, 16, 2-3 : Hoc loco tanta est diversitas historicorum, et qui dem Græcorum, ut alii dicant invito Claudio ah Aureliano Aureolum interfectum, alii mandante ac volente, alii ab imperatore jam Aureliano eumdem occisum, alii vero adhuc a privato. — ZOSIME (I, 41) dit qu’Auréolus, après s’être rendu, fut tué par les soldats, qui ne lui pardonnaient pas sa défection. [Cf. JEAN D’ANTIOCH., Fragm. Hist. Græc., (éd. C. Müller). IV, 599, n° 15.] Aurélien n’est pas nommé, mais il est très possible qu’il ait été un des instigateurs du meurtre. — Selon ZONARAS (XII, 26, III. p 149 Dind.). Auréolus fut tué ύπό στρατιωτών, parce qu’il tentait d’usurper de nouveau. L’Epitomé (34, 2) et la Vita Claudii (5, 3) disent qu’Auréolus fut tué par ses propres soldats.

[41] Epitomé 34, 2. — D’après une lettre (non authentique) d’Aurélien, insérée dans la Vita Probi (6, 5-6), Aurélien aurait reçu de Claude le commandement des Décimani (= la Xe Gemina, de Pannonie Supérieure). Si le fait est exact, — ce qui est douteux, — il se place en 268, au début du règne de Claude, antérieurement à la campagne contre les Alamans.

[42] Lors du complot de Milan, en 268. Aurélien (ZONAR., XII, 25, III, p. 148 Dind.) commandait un corps de cavalerie. La Vita Aureliani (18, 1) dit qu’il eut, sous le règne de Claude, le commandement en chef de la cavalerie : Equites sane omnes ante Imperium sub Claudio Aurelianus gubernavit, cum offensant magistri eorum incurrissent, quod temere Claudio non jubente pugnassent. — Aurélien a obtenu ce grade avant la guerre gothique de 269 : le combat téméraire, à la suite duquel les chefs de la cavalerie furent disgraciés, ne peut se placer qu’en 268, pendant la campagne contre les Alamans.

[43] ZOZIME, I, 43 ; — Vita Aureliani, 17, 2.

[44] ZOZIME, 1, 45 ; — Vita Claud., 11, 3. — Sur le rôle actif de la cavalerie pendant cette campagne, Vita Claud., 11, 9 : In quo bello... equitum Dalmatarum ingens exstitit virtus.

ZOSIME (loc. cit.) parle d’une rencontre où l’infanterie romaine, témérairement engagée, aurait fait des pertes sensibles et n’aurait dû son salut qu’à l’arrivée de la cavalerie. Il est probable — Zosime ne le dit pas — qu’Aurélien prit personnellement part au combat. A ce commandement en chef de la cavalerie se rapporte la monnaie Virtus Equitum, frappée à Tarraco, dans la première période monétaire (270-271) du règne d’Aurélien (Th. ROHDE, loc. cit., Catal., n° 396).

[45] Vita Aureliani, 16, 4 ; 17, 4-5 ; — ZONAR., XII. 26 (III, p. 151 Dind.) : — CHRONOG. ANN. 354, p. 148 (éd. Th. Mommsen) ; — Chroniq. Saint Jérôme, ad ann. Abrah. 2287 (éd. A. Schöne, p. 183) ; — JORDAN., Rom., 288.

[46] Vita Aureliani, 16, 4 ; 17, 1 ; 17, 2-3. — La lettre de Claude à Aurélien insérée au paragraphe 11 est certainement fausse. La suscription porte : Flavius Claudius Valerio Aureliano suo salutem. Le document a été composé en même temps que la biographie sous le règne de Constance Chlore (305-306). — Les deux noms de Flavius et de Valerius appartiennent à Constance Chlore et à Constantin, nullement à Claude (M. Aurelius Claudius) et à Aurélien (L. Domitius Aurelianus). — De même la Vita Claudii (3, 6 ; 7, 8) désigne Claude sous le nom de Flavius et (18, 4) de Valerius, et la Vita Probi (11, 5) donne aussi par erreur le nom de Valerius à Probus. — Cf., sur ce document H. PETER, loc. cit., p. 176.

[47] Vita Claud., 12, 4-5.

[48] Vita Claud., loc. cit. ; — Vita Aureliani, 17, 5 : Secundis prœliis usus, auspiciis Claudianis rempublicam in integrum reddidit. Plusieurs monnaies de Quintillus (And. MARKL, die Reichsmünzstätten unter der Regierung des Quintillus und ihre Emissionen, Wien. Numism. Zeitschr., XXII, 1890, pp. 17-18 ; 22-23. — Cf. H. COHEN, VI, Quintille, n° 70-71), à légende Victoria Aug(usti), 1e et 2e émissions de Rome, émission de Siscia, et Victoriæ Gothic(æ) (Fr. GNECCHI, Appunti di Numismatica Romana, Rivist. Ital. di Numismat., IX, 1896, p. 190) se rapportent à ces victoires.

[49] ZOSIME, 1,46 ; — ZONAR., XII, 26 (III, p. 151 Dind.) ; — Vita Claud., 12, 2 ; — EUTROP., IX, 11, 2 ; — Chroniq. Saint Jérôme, ad ann. Abrah. 2281 (éd. A. Schöne. p. 183) ; — OROS., VII, 23,1. — Sur la date de mort, voir Appendice I, Chronologie générale du règne d’Aurélien.

[50] Vita Aureliani, 16, 1.

[51] AUREL. VICT., Cæsar., 33, 34.

[52] ZONARAS, XII. 26 (III, p. 150 Dind.) ; — AUREL. VICT., Cæsar., 33, 31.

[53] Vita Aureliani, 37, 3 : Quintillum... cum in præsidio Italico esset ; — CHRONOG. ANN. 354, p. 148 (éd. Th. Mommsen).

[54] Vita Claud., 12, 3 : Sui fratris, ut vere dixerim, frater.

[55] ZONARAS, XII, 26 (III, p. 151 Dind.) ; — EUTROP., IX, 12 : Unicæ moderationis vir ac civilitatis.

[56] ZONARAS, loc. cit.

[57] ZONARAS, loc. cit., donne seul le véritable récit des événements ; les autres textes manquent de précision ou sont inexacts. — ZOZIME, I, 47 ; — Vita Claud., 12, 3 ; — Vita Aureliani, 37, 5 ; — EUTROP., IX, 12 ; — Epitomé, 34, 5. — Voir De Claudio Gothico, Romanorum Imperatore, Chap. IX.

[58] ZONARAS, loc. cit. : Διά τόν πρός Κλαύδιον πόθον.

[59] And. MARKL, die Reichsmünzstätten unter der Regierung des Quintillus, loc. cit., pp. 10-24. . — Voir De Claudio Gothico, loc. cit.

[60] Vita Claud., 12, 5.

[61] ZONARAS, XII, 26 (III, p. 151 Dind.).

[62] ZONARAS, loc. cit.

[63] Vita Aureliani, 37, 6. — Voir De Claudio Gothico, loc. cit.

[64] ZOSIME, I, 47.

[65] ZOSIME, loc. cit. ; — ZONAR., XII, 26 (III, p. 151 Dind.) ; — JEAN D’ANTIOCH., Fragm. Hist. Græc. (éd. C. Müller), IV, p. 5 !)9, 153 ; — Vita Aureliani, 37, 6. — C’était probablement aussi la version de DEXIPPE (Vita Claud., 12, 6 : Dexippus Quintillum non dicit occisum, sed tantum mortuum : nec lamen addit morbo, ut dubium sentire videatur). — Le récit d’après lequel Quintillus aurait été tué par ses propres soldats (Vita Claud., 12, 5 ; — Vita Aureliani, 16,1 ; — Epitomé, 34,5 ; — EUTROP., IX, 12 ; — CHRONOG. ANN. 354, p. 148, (éd. Th. Mommsen) ; — Chroniq. Saint Jérôme, ad ann. Abrah. 2287 (éd. A. Schöne, p. 189) ; — JORDAN., Rom., 289) est erroné.

[66] Il existe deux traditions sur la durée du règne de Quintillus. Selon l’une, il aurait régné plus de deux mois (ZOZIME, I, 47 : όλίγους βιώσαντος μήνας ; CHRONOG. ANN. 354. p. 148, éd. Th. Mommsen, soixante-dix-sept jours) ; selon l’autre, quelques jours seulement [ZONAR., XII, 26 (III, p. 151 Dind.) ; — Vita Claud., 12, 5 ; - EUTROP., IX, 12 : — Chroniq. Saint Jérôme, loc. cit. ; — JORDAN., Rom., 289, dix-sept jours ; — Vita Aureliani, 37, 6, vingt jours ; — Epitomé, 34, 5, peu de jours (paucis diebus)].

L’étude des monnaies prouve que la première tradition est la véritable (And. MARKL, loc. cit., pp. 12-24). Quintillus a certainement régné plus de vingt jours : il y a eu, sous son règne, deux émissions d’Antoniniani à Rome (And. MARKL, loc. cit., pp. 17-18) et à Tarraco (id., pp. 19-20). — Quintillus se tua lorsqu’il apprit l’avènement d’Aurélien. Cette nouvelle ne peut avoir mis plus de huit jours à lui parvenir. Il a été seul empereur un peu plus de deux mois (Voir Appendice I, Chronologie générale du règne d’Aurélien). Peut-être pourrait-on admettre que les dix-sept jours de règne dont parlent certains textes, s’appliquent simplement à la période pendant laquelle Quintillus et Aurélien ont été simultanément empereurs.