WALA ET LOUIS LE DÉBONNAIRE

 

CHAPITRE SIXIÈME.

 

 

RÉVOLTE GÉNÉRALE DE L'ARISTOCRATIE FRANQUE. -DÉPOSITION DE LOUIS LE DÉBONNAIRE.

 

La guerre malheureuse faite au roi d’Aquitaine, sans compter qu’elle déconsidérait complètement l’autorité impériale dans le midi de la Gaule, montrait à tous, d’une manière évidente, le peu de consistance du gouvernement restauré de Louis. La position de Judith devenait de plus en plus critique ; tous ses anciens alliés étaient ouvertement en armes contre elle, et elle essayait en vain de les remplacer par de nouvelles amitiés. A mesure que ses anciens soutiens, Bernard, Louis le Germanique, Pépin, s’étaient détachés d’elle, le premier en insurgeant la Septimanie, le second en envahissant l’apanage de Charles, le troisième en chassant son père de l’Aquitaine, elle s’était rapprochée davantage de ses anciens ennemis, espérant faire ainsi contrepoids au mauvais vouloir des autres. Dès le placite d’Ingelheim (mai 831), elle avait fait quelques avances à Lothaire en le recevant honorablement, et en rappelant à la cour quelques-uns de ses amis, entre autres l’abbé de Saint-Denis, Hilduin[1]. Mais l’aristocratie ne s’était pas laissé prendre à ces beaux semblants, et Matfried, qui n’était pas sans instructions de Lothaire, avait ouvertement soutenu le Germanique dans sa révolte contre son père[2], tandis que Wala intriguait avec tant d’habileté, que l’impératrice au désespoir le faisait transporter d’exil en exil ; sur les bords du lac Léman, elle craignait son influence sur Lothaire ; à l’île de Noirmoutiers, ses conseils donnés à l’imprudent Pépin ; à Fulde, l’appui moral prêté à Louis ; de guerre lasse, elle l’avait fait reconduire à Corbie, où elle le faisait garder à vue[3]. Malgré le peu de succès de ses premières avances, Judith sentait tellement la nécessité d’avoir un allié parmi ses beaux-fils, pour mener à bien l’établissement de Charles, qu’elle revint à la charge auprès de Lothaire, au placite de Limoges (octobre 832), et lui offrit le reste de l’empire, pourvu qu’il voulût protéger Charles dans la possession de l’Alémanie et de l’Aquitaine[4]. La proposition pouvait paraître séduisante au premier abord, bien qu’en réalité elle ne donnât pas beaucoup plus à Lothaire que ne lui avait assuré le partage de 817 ; mais lorsque la révolte heureuse de Pépin eut rendu flagrante la faiblesse de l’autorité centrale, Lothaire comprit que l’avenir de son ambition n’était pas dans une alliance avec sa belle-mère, et, se retirant en Italie, il reprit son rôle de chef de l’aristocratie et de défenseur de l’unité de l’empire. Il ne dissimulait pas l’espoir qu’il avait, qu’une seconde révolution dirigée contre Judith et Louis lui serait plus profitable que la première.

Tout, en effet, marchait vers une seconde explosion. Pépin et Louis, indignés de l’ingratitude de leur marâtre, ne cessaient d’exciter leur aîné à reprendre les armes, et appelaient ouvertement le peuple à la révolte, en lui promettant un meilleur gouvernement. Les leudes exilés, revenus dans leurs possessions, soit que l’empereur les eût graciés, soit que ceux qui devaient les garder les eussent relâchés, se préparaient à une seconde démonstration. Le haut clergé enfin, ou pour mieux dire ceux des évêques qui tenaient à l’unité de l’Eglise et de l’Etat, pressaient le pape Grégoire de passer les Alpes avec Lothaire, pour venir appuyer de son autorité le principe ecclésiastique qu’ils défendaient[5].

Déjà on en était venu aux menaces ouvertes ; l’un des chefs les plus puissants du clergé franc, Agobard, archevêque de Lyon, avait écrit à Louis une lettre qu’il appelait suppliante, mais qui, en réalité, était un hautain ultimatum adressé à l’empereur par l’aristocratie franque[6]. On y lisait, en effet, après un historique des prières, des jeûnes, des aumônes, des serments qui avaient accompagné l’association de Lothaire, ces lignes menaçantes : Maintenant vous avez tout renversé ; vous avez omis le nom de votre fds aîné dans les actes de l’empire, et vous faites murmurer le peuple de tous ces serments divers que vous exigez de lui. Prenez garde ; ne recevez pas avec dédain ces avertissements : je me rappelle votre ardente religiosité ; je vous ai vu toujours jusqu’ici chanter et louer Dieu par des prières assidues, des psaumes, des hymnes et des cantiques, d’une cime pure, d'un esprit miséricordieux et d’un cœur contrit : mais, hélas ! je crains bien que votre zèle religieux ne se soit refroidi.

En présence de pareilles paroles, l’exaspération des esprits ne pouvait rester un secret pour Judith et ses conseillers ; mais si l’on n’ignorait pas qu’on avait tout à craindre, on ne savait pas comment réprimer dans leur germe les nouveaux mouvements qui se préparaient. On se contenta donc de faire barricader les cluses des Alpes, pour empêcher Lothaire de passer en Gaule[7] et on attendit l’événement. Il ne se fit pas longtemps attendre ; le jeune empereur se mit en marche avec le printemps de 833 pour essayer une seconde fois sa fortune en France, et franchit paisiblement les Alpes malgré les mesures de défense prises par ordre de Judith. Les barricades tombèrent d’elles-mêmes devant lui, non par suite d’un miracle comme prétendirent ses pieux partisans[8], mais par le fait du puissant allié qu’il amenait avec lui. Aucun soldat ne songea à résister au pape Grégoire.

Le souverain pontife s’était en effet, bien qu’avec peine, décidé à céder aux vœux des fds de l’empereur, et à intervenir dans la querelle entre eux et leur père. J’admets que le désir de rétablir une paix durable dans l’empire et une réconciliation entière dans la famille impériale ait été pour beaucoup dans la résolution de Grégoire[9] ; mais le but principal qu’il se proposait, en hasardant une démarche si grave, c’était certainement de soutenir en Gaule le principe de l’unité de l’empire, si important pour l’Eglise romaine, parce qu’elle voulait baser sur ce principe l’unité de l’Eglise occidentale. Or, le principe de l’unité de l’empire était représenté dans toute sa pureté par l’alliance des trois fils de Louis, qui, à eux trois, constituaient l’état ecclésiastique fondé par la charte de 817 ; ce principe, au contraire, était combattu par Louis et par Judith, qui voulaient donner à Charles une part dans l’empire ; voilà pourquoi le pape se trouvait dans le camp de Lothaire et non à la cour d’Aix-la-Chapelle.

On fut plus effrayé à Aix de la venue du pontife que de celle du jeune empereur ; on était sûr des Germains contre Lothaire, on n’était pas sûr des évêques contre Grégoire. La position du clergé gallican à l’égard du pape était fort mal définie. Même en affaires de dogme, les synodes nationaux avaient souvent décidé directement contre lui[10] ; à plus forte raison le souverain pontife ne pouvait-il exiger du clergé des Gaules une obéissance passive en matière politique. Mais d’un autre coté, le pape avait pour lui la voix populaire, la foi de tous : c’était le temps où les fausses Décrétales, inventées sur les bords du Rhin, se propageaient, malgré leur fausseté palpable, à travers toute la chrétienté occidentale, parce qu’elles exprimaient, sous forme de canons, ce qui était déjà dans les idées de l’époque[11].

Ce nonobstant, on essaya d’organiser parmi les évêques une résistance ecclésiastique à Grégoire ; on leur fit savoir de se préparer au combat spirituel, pendant que les leudes se prépareraient au combat corporel[12], et on les convoqua en synode à Worms. Une partie du clergé, la plus grande même, celle qui dépendait de Judith, se rendit au rescrit impérial[13], et une lettre menaçante de sa part vint bientôt apprendre au pontife qu’il allait rencontrer une vive opposition dans les rangs mêmes de l’Eglise. Nous serions venus à votre rencontre, disaient les évêques, si vous n étiez pas venu vous-même en France d’une manière illégale. Gardez-vous de faire insulte au pouvoir impérial et de vous parjurer en excommuniant l’oint du Seigneur ; car sachez que si vous venez pour rétablir le traité de 817, nous nous opposerons à vous d’accord avec nos églises ; nous répondrons à l’excommunication par l’excommunication et au besoin nous vous déposerons bien nous-mêmes[14].

Mais tandis que les évêques de cour, réunis à Worms, lançaient ainsi leurs anathèmes contre Grégoire, le haut clergé gallican, moins nombreux, mais bien plus puissant, se ralliait franchement au pape. Un de ses chefs, Agobard de Lyon, avait répondu à la convocation impériale pour le synode de Worms par le rappel suivant au respect dû au Saint-Siège[15] : Certes, disait-il, si le pape venait contre raison et pour combattre, il s’en irait combattu et repoussé ; mais s’il vient pour la paix, il faut lui obéir. Et je dis que, s'il ne vient que pour rétablir ce que vous, de votre volonté et de votre libre arbitre, vous avez fait avec le consentement de tout l'empire, et sous l'approbation du Saint-Siège, son arrivée est juste et raisonnable, parce que ce qui a été constitué solennellement, ne doit pas être changé par caprice[16]. Fort de l’appui de la haute aristocratie religieuse, le pape n’hésita pas à répondre à la lettre arrogante du synode de Worms par une lettre plus arrogante encore, où, après avoir défendu avec véhémence la suprématie du pouvoir spirituel sur le pouvoir temporel, il déclarait que Dieu lui-même s’était prononcé contre les changements introduits à la charte de 817[17].

Pendant que les deux partis échangeaient ces récriminations et ces menaces, Lothaire et Grégoire, accompagnés l’un de tous ses fidèles, l’autre de toute la curie romaine, s’avançaient toujours vers le centre de l’empire[18]. En Alsace, les deux frères cadets opérèrent leur jonction avec eux, et leur armée, fort considérable alors, prit position dans la vaste plaine entre Bâle et Colmar, pour attendre l’empereur, dont on annonçait la venue prochaine à la tête d’une puissante armée. En effet, pendant que le synode de Worms lançait contre le pape les protestations que nous avons citées plus haut, Louis et Judith avaient réuni tous les Germains et tous les Francs restés fidèles à la cause impériale, en une armée innombrable, bien plus formidable encore que celle qui obéissait aux trois rois, et à sa tête ils remontaient le Rhin[19].

Les deux armées se trouvèrent en présence le jour de la Saint-Jean (833) dans un champ qu’on appelait alors le Champ Rouge[20], et que depuis on a appelé le Champ du Mensonge. Personne ne songeait encore à combattre ; car des deux côtés on craignait d’engager la bataille. Judith savait apprécier les ressources matérielles dont disposaient ses trois beaux-fils par leur réunion, et l’ascendant moral que leur donnait la présence du pape dans leur camp ; de leur côté, les rebelles étaient fort effrayés de la persistance des évêques impériaux à vouloir déposer le pape[21]. En vain Wala, qu’on avait été chercher à son couvent pour soutenir la rébellion de ses conseils et de son autorité, rappelait-il à Grégoire qu’en vertu des décrétales le pouvoir de saint Pierre était tellement excellent et supérieur, qu’il lui donnait le droit de juger tous les hommes, sans que personne n’eût celui de le juger[22] ; le temps où ce principe fut incontesté n’était pas encore venu, et le pape craignait vivement que les évêques réunis dans le camp impérial ne persistassent jusqu’au bout, entraînant dans leur rébellion contre le Saint-Siège l’armée germanique tout entière.

On se mit donc à négocier, et les articles d’accommodement passèrent d’un camp à d’autre. Ils ont été conservés intégralement par le biographe de Wala[23] ; je vais tâcher d’en donner une analyse fidèle, d’autant plus indispensable, qu’ils mettent à nu les prétentions des deux partis et les prétextes dont ils coloraient leur conduite. Louis y rappelle d’abord à ses fils le respect qu’ils lui doivent comme à leur père : leur réponse porte qu’ils n’ont rien de plus sacré que lui, qu’ils sont venus non en rebelles mais en suppliants, et qu’ils ne demandent à sa miséricorde que de ne pas les condamner ou déshériter sans jugement. Le second capitulaire de Louis les exhorte à se souvenir qu’ils sont ses vassaux et lui ont prêté serment de fidélité : à cela ils prétendent qu’ils n’ont jamais rompu leur foi, vu que leurs armées ne viennent pas pour le détrôner, mais au contraire pour raffermir sa couronne en éloignant de lui ceux qui lui tendent des embûches. A la plainte de Louis de ce qu’on a usurpé sur lui la défense du Saint-Siège, Lothaire répond en rappelant son association à l’empire, qui lui donne le droit de protéger le saint père dans la mission de charité et de conciliation qu’il a entreprise. Pour excuser le pape de ce qu’il n’est pas venu vers l’empereur, les rois révoltés allèguent que Louis lui-même s’est déclaré son ennemi en essayant d’intercepter le passage des Alpes. Enfin à la dernière doléance de l’empereur, de ce que Lothaire a insurgé contre luises fils et ses fidèles, le jeune empereur répond qu’il ne les a reçus dans son camp que parce qu’ils étaient exclus de la cour impériale par les scélérats, maîtres de la volonté de Louis.

Cet échange de récriminations ne pouvait conduire à aucun résultat[24] ; car, pour faire la paix, il aurait fallu que Louis le Débonnaire sacrifiât Judith, et Judith était plus que jamais maîtresse de sa volonté ; il ne restait par conséquent qu’à en appeler à la décision des armes. Aussi l’empereur avait-il déjà rangé ses troupes en bataille, lorsque tout à coup on lui annonça la venue du pape[25]. Que venait-il faire à ce moment décisif dans le camp impérial ? Les négociations inutiles des jours précédents devaient lui avoir suffisamment démontré que Louis ne sacrifierait pas sa femme et son dernier-né aux intérêts de l’Église ; il ne pouvait donc espérer produire un accord qui n’était possible qu’à cette condition. Aussi le désir de conclure la paix n’était-il que le motif apparent de sa venue ; ce qu’il voulait réellement, c’était séduire les Germains qu’on désespérait de vaincre.

Louis eut la faiblesse de recevoir ce dangereux négociateur ; seulement, pour lui marquer son mécontentement, ii le reçut, sans honneur aucun, devant son front de bataille, lui déclarant que cette réception inusitée était la suite de sa venue inusitée[26] : puis il le mena à sa tente. Grégoire commença immédiatement à engager l’empereur à la paix et à la concorde, autrement dit au renvoi de Judith ; il continua plusieurs jours durant ses exhortations dans ce sens, et ne retourna au camp ennemi, qu’après s’être persuadé de l’inutilité de ses efforts. Sa présence dans le camp impérial, malgré cet apparent échec, était loin cependant d’avoir été infructueuse ; quand, le lendemain de son départ, Louis ordonna définitivement la bataille, il se trouva que son camp était vide. A l’exception de sa femme, de quelques évêques, abbés et leudes, toute l’immense armée qu’il avait amenée à sa suite s’était évanouie[27].

Pascase Radbert n’a pas craint d’affirmer que cette défection, sans exemple dans l’histoire, fut le résultat d’un miracle : Dans le jour, dit-il, qui suivit le départ du pontife, la main du Seigneur s'étendit par un juste jugement sur tout le peuple, et toutes les volontés furent changées, et toutes les âmes frappées et terrifiées par la terreur de Dieu. Et par suite, ils abandonnèrent, tous dans cette même nuit l'empereur, sans qu’à mon su, aucune persuasion ou exhortation n'eût été employée à leur égard, et tous, depuis le plus petit jusqu’au plus grand, ils vinrent asseoir leur campement à côté de celui de Lothaire, si bien qu'au matin, on vit avec étonnement toutes leurs tentes plantées autour de la sienne, et qu'on se demanda l'un à l’autre : Que signifie cela. ? Il paraissait en effet bien miraculeux à nous qui ignorions comment la chose s'était faite, que ceux qui la veille encore étaient si fiers et si confiants, appuyés sur leur multitude, sur les serments de la foule, sur la sagesse des évêques et des grands, sur l’autorité paternelle, sur des promesses de tout genre, se fussent montrés assez changeants et assez faibles, pour laisser d'un seul coup, sans y être poussés ni encouragés, l'empereur seul avec l'impératrice, et pour se décider dans une seule nuit à venir se réfugier, comme les poussins sous l’aile de leur mère, dans le camp même de celui qu’ils avaient juré de combattre[28]. Mais il n’est pas difficile de découvrir la main humaine qui tint les fils de ce miracle ; le souverain pontife avait employé son séjour dans le camp de Louis à autre chose encore qu’à prêcher la concorde ; persuasions et promesses, dons et menaces, rien n’avait été épargné pour entraîner l’armée impériale. Ceux qui déjà une fois avaient trahi l’empereur, donnèrent le signal de la défection ; les autres suivirent leur exemple, et bientôt ils se précipitèrent tous ensemble comme un torrent dans le camp des fils[29] : ainsi l’astuce romaine triompha de la fidélité germanique, et le déshonneur du hériban franc fut consommé[30].

Après cet abandon général, il ne pouvait plus être question de bataille. Louis convoqua les quelques fidèles qui n’avaient pas voulu le trahir, et leur dit : Allez vers mes fils, je ne veux pas qu’aucun de vous perde à cause de moi la vie ou les membres. Ceux qui pouvaient le faire sans danger, obéirent en pleurant à cet ordre ; les autres se retirèrent en lieu sûr[31]. Quant à lui-même, il attendit quelque temps sous sa tente que ses fils vinssent le chercher ; mais eux, qui voulaient éviter l’apparence d’exercer quelque violence sur son corps, restèrent immobiles dans leur camp ; seulement ils permirent à leurs soldats d’insulter à son abandon, afin de le forcer à se jeter dans leurs bras. Bientôt en effet, Louis se vit réduit à implorer leur protection et à se mettre à leur disposition avec sa femme et le jeune Charles[32]. Dans ces tristes moments, Judith occupait encore toute sa pensée ; son premier mot en descendant de cheval fut de rappeler à ses fils qu’ils lui avaient fait promettre sûreté pour elle et pour son enfant. Les rois ses fils renouvelèrent en personne le serment qu’ils lui en avaient fait faire ; là-dessus il les embrassa et les suivit dans la tente de Lothaire. Mais là, son cœur ne tarda pas à être mis à une cruelle épreuve ; on le sépara de sa femme, qui fut transportée, d’abord sous la tente du Germanique, et puis, à Tortone en Italie ; ses fils croyaient suffisamment racheter leur parole, en ne la faisant ni tuer ni mutiler[33].

Ce n’était pas là cependant la question principale : d s’agissait avant tout de savoir ce qu’on ferait de la couronne impériale. La victoire des trois fils du premier mariage de Louis, impliquait, il est vrai, nécessairement la remise en vigueur de la charte de 817 ; mais elle n’exigeait nullement la déposition de leur père. Bien au contraire, un acte de rébellion si nettement caractérisé ne pouvait avoir que des suites funestes pour ceux qui s’en rendraient coupables, puisqu’il devait naturellement perpétuer les haines de parti et les troubles de l’empire. Mais Lothaire ne raisonnait pas ainsi ; maître, pour le moment, du souverain pouvoir, si longtemps ambitionné, il n’avait nulle envie de s’en dessaisir : il déclara par conséquent que, puisque l’empire était tombé des mains de son père par la volonté de Dieu, il était juste que lui, son héritier et son associé, le relevât et le reçût ; puis, sans autre forme ni délibération, il prit le titre d’empereur unique[34]. Ses frères, dont il paraît avoir augmenté les royaumes[35], ne réclamèrent pas pour le moment et retournèrent chacun chez lui ; mais parmi ses alliés les plus fidèles, il y en eut plus d’un qui vit avec crainte et chagrin une façon d’agir dont l’illégalité devait nécessairement enfanter de nouvelles révolutions. Le pape s’en retourna à Rome, dégoûté des intrigues mesquines qu’il avait vues, repentant peut-être de ce qu’il avait fait lui-même[36] ; quant à Wala, il répondit à Pascase Radbert, qui lui exprimait son étonnement de ce qu’on eût traité avec tant de légèreté un point si important : Nous avons fait notre devoir à nous, en apaisant la guerre civile ; aujourd'hui personne ne nous écoute plus, tant ils sont tous à leurs craintes ou à leurs désirs, à leurs joies ou à leurs douleurs[37].

Le désordre, en effet, avait été intronisé avec Lothaire. Chacun des leudes puissants qui l’avaient soutenu dans sa tentative, Hugues, Matfried, Lambert, prétendait à la première place après lui, et en attendant qu’ils se missent d’accord, ils partageaient l’empire entre eux et leurs partisans[38]. Un jour, raconte-t-on, qu’ils étaient tous réunis, Wala entra dans la salle où ils délibéraient ; étonnés, honteux d’être surpris, ils demandèrent au sage abbé de vouloir leur donner quelques conseils. Tout ce que vous avez fait jusqu’ici, répondit l’inflexible censeur, est fort bien fait, sauf que vous n’avez rien laissé à Dieu de ce qui revenait à Dieu, et que vous avez arrangé toutes choses contrairement au désir des gens de bien[39]. Le vieux ministre ne sentait que trop bien combien ses alliés gâtaient leur cause par leurs excès et leur mauvaise administration : en effet, beaucoup d’yeux[40] déjà se tournaient de nouveau vers le monastère de Saint-Médard de Soissons, où Lothaire retenait prisonnier sous bonne garde son père, auquel il n’avait pas rougi d’enlever sa dernière consolation, en le séparant de son enfant chéri, Charles, envoyé à Pruym[41].

Les dispositions en faveur de l’empereur déchu allèrent croissant à mesure que le souvenir de ses fautes s’effaçait devant la réalité présente de celles de Lothaire. Elles se manifestèrent si ouvertement au placite de Compiègne (octobre 833)[42], que les chefs de l’aristocratie jugèrent nécessaire, pour ne pas perdre tout crédit, de publier une apologie formelle de la révolte qu’ils avaient dirigée de concert avec les fils de Louis le Débonnaire. Ce fut le publiciste du parti, l’archevêque de Lyon, Agobard, qui se chargea de la rédaction du manifeste ; je vais traduire les principaux passages de cet écrit, remarquable par sa vigueur[43] : Ecoutez, toutes nations, et reconnaissez que les fils de Louis n’ont agi que pour purger le palais impérial de crimes honteux et de factions iniques. La jeune femme de l’empereur, sentant son époux s'attiédir à son égard, chercha d’autres hommes pour assouvir sa lasciveté, en secret d’abord, et puis en public. Le peuple en liait, les grands s’en affligeaient, tous ceux qui avaient quelque honneur jugeaient la honte intolérable. Les fils de V empereur, sous b inspiration d’un zèle naturel, une première, fois se levèrent tous ensemble, d’un commun accord, pour réprimer ces crimes. Elle devint nonne, de reine quelle avait été, et quelque honneur fut rendu à leur père. Mais, par la trop grande faiblesse des fils, ce qui de la sorte avait été bien fait, fut défait : cette femme fut rappelée au palais comme épouse légitime, et préférée à tous les conseillers. Alors le désordre devint extrême : on avait prêté des serments à l’empereur-père, on en avait prêté à l’empereur-fils, on en avait prêté aux rois-fils, on dut en prêter encore à un enfant : le nom du Seigneur n est-il donc fait que pour être souillé ? Et à quoi, je le demande, est-on arrivé ainsi ? Au lieu de combattre les nations étrangères, tout l’empire semble se réunir en son milieu pour se combattre et s’entre-égorger ! Ah ! si Dieu ne nous vient en aide, nous serons tous la proie des barbares ou celle d’une foule de tyrans ! Mon Dieu, pourquoi as-tu permis que ton serviteur l’empereur tombât en un tel aveuglement, qu’il aimât ceux qui le haïssaient et hait ceux qui l’aimaient ? Il y en a qui disent que ses conseillers n’attendaient que l’extermination de ses fils, pour porter la main sur lui-même ; il y en a qui disent que sa femme, sans compter ce quelle a fait en secret et ce quelle a fait en public, ne songeait qu’à déshonorer ses fils en les perdant dans l’esprit de leur père : son époux, qui ne l’aimait que pour sa beauté et sa grâce, ignorait-il donc que la grâce est trompeuse et la beauté vaine ? En présence de pareils crimes, les fils ne pouvaient dissimuler, se taire, rester en repos ; Dieu ne l’a pas voulu, Dieu les a excités, Dieu les a réunis de nouveau, et, avec l’aide de tous ceux qui aimaient religion, roi et empire, ils sont parvenus à guérir, sans effusion de sang, cette plaie d’iniquité. Samson, trompé par une femme, eut la vie éternelle ; mais il perdit les yeux et le pouvoir ; que l’empereur gagne le ciel, lui qui a perdu la terre. Non que je veuille comparer à un roi inique celui qui fut mon maître ; mais il aurait dû se souvenir que celui qui trouble la maison ne possédera que les vents. Il a été la cause de tous les parjures, pillages, homicides, adultères, incestes, commis en cet empire ; qu’il en fasse pénitence, et rende grâce à Dieu que ce soit non un ennemi, mais son fils, qui lui succède.

Les dernières paroles qu’on vient de lire annonçaient la résolution que Lothaire et la partie du clergé dévouée à ses intérêts avaient prise à l’égard de Louis ; pour empêcher d’avance tout nouveau mouvement en sa faveur, ils avaient décidé de le rendre à jamais impropre à porter la couronne, en lui faisant déposer les armes dans une seconde pénitence publique[44]. La faiblesse que Louis avait montrée jadis à Attigny avait sans doute donné la première idée de cette mesure ; mais il fallait l’audace des chefs du clergé gallo-franc pour en tenter l’exécution. La plupart des évêques réunis à Compiègne étaient contraires à une mesure aussi extrême[45] ; Wala lui-même la blâmait comme allant au delà du but proposé[46]. Mais Lothaire, qui, arrivé à peine au quatrième mois de son règne, sentait déjà la couronne chanceler sur sa tête, exigeait impérieusement qu’un jugement ecclésiastique déshonorât à jamais son père. Plus tard, il prétendit que le diable en personne l’avait entraîné à une action si noire[47] ; alors, moins scrupuleux, il en hâtait l’exécution de toutes ses forces.

L’homme qui lui servit d’instrument principal pour arriver à ses fins, fut Ebbon, archevêque de Reims[48]. Probablement Ebbon, que Louis, malgré son humble naissance, avait élevé aux plus hautes dignités et chargé des missions les plus importantes[49], était peu charmé d’être oblige de se mettre en avant dans une occasion si périlleuse ; mais il n’avait pas le choix ; Compiègne était de sa province : il ne pouvait refuser au jeune empereur de présider le synode qu’il y avait réuni. De concert avec les autres évêques, aussi embarrassés que lui de leur conduite, il essaya d’abord d’obtenir de Louis une abdication volontaire et une profession monastique librement consentie[50] ; mais l’empereur refusa net. Il fallut bien alors, bon gré, mal gré, en appeler au pouvoir suprême des évêques de lier et de délier, et le synode déclara officiellement[51] qu’après mûr examen des scandales arrivés dans l’Eglise et dans l’Etal par la négligence de Louis, il s’était persuadé que sa déposition n’avait été qu’un juste jugement de Dieu ; qu’il croyait cependant de son devoir d’envoyer auprès de cet ancien maître et bienfaiteur, pour lors dépouillé de. la puissance terrestre par la volonté divine et l’autorité ecclésiastique, une ambassade solennelle chargée de l’exhorter à revenir an chemin du salut. Des négociateurs ecclésiastiques se rendirent, par conséquent, auprès de Louis, lui signifièrent la décision du synode, et, à force de menaces[52], lui arrachèrent son consentement à la cérémonie de sa propre dégradation. Il devait, dans une entrevue solennelle avec Lothaire, se réconcilier avec lui, puis faire un aveu public de ses péchés, et écouter en pénitent le jugement ecclésiastique porté contre lui par les prélats.

L’église de Saint-Médard de Soissons, choisie pour servir de théâtre à cette répétition de la scène d’Attigny, se remplit, au jour fixé, d’un coté d’évêques, de prêtres, de diacres et de clercs ; de l’autre, de leudes et de grands, parmi lesquels se trouvait Lothaire lui-même[53]. Devant toute cette auguste assemblée, le vieil empereur, prosterné à terre, sur un cilice, avoua avoir indignement négligé son ministère, avoir offensé Dieu, l’Eglise et le peuple, et sentir le besoin invincible d’une pénitence publique qui lui valût la rémission de tant de crimes. Les évêques lui répondirent que son absolution était au prix de la confession détaillée de ses péchés, à condition qu’elle fût pleine et entière, et qu’il ne cachât aucun de ses méfaits, comme il l’avait déjà une fois fait devant un autre synode. Alors Louis prit de leurs mains un parchemin où étaient inscrites huit séries dépêchés qu’il était censé avoir principalement à se reprocher, et il lut à haute voix la confession que voici :

J’avoue m’être rendu coupable de sacrilège et d’homicide, en violentant, contre la foi jurée à mon père en face de l’autel, mes frères et parents, et en livrant mon neveu à une mort cruelle.

J’avoue avoir troublé la paix et violé mes serments, en rompant par caprice le partage fait entre mes fils, du conseil et sous le serment de tous mes fidèles, et en les mettant ainsi en suspens entre deux serments, ce que Dieu a justement puni dans ma personne.

J’avoue avoir ordonné, sans utilité ni nécessité quelconques, des expéditions et des placites dans le saint temps de Carême ou de Pâques.

J’avoue avoir commis homicide, en exilant et en condamnant à mort les fidèles qui m avertissaient humblement des embûches qu’on me tendait.

J’avoue avoir exigé des serments contradictoires de mes fils et de mon peuple ; avoir autorisé une foule de jugements iniques et de faux témoignages.

J’avoue avoir accumulé sur mon âme une foule de péchés : homicides, parjures, sacrilèges, adultères, rapines, incendies, par l’entreprise d’expéditions inutiles.

J’avoue avoir fait, contre la foi jurée, des divisions de l’empire qui ont obligé mes fidèles à traiter mes fils en ennemis.

J’avoue avoir non-seulement laissé arriver par ma négligence tous les maux qui désolent l’empire, mais encore avoir traîné tout récemment le peuple entier a une perte commune, alors que je devais lui être un guide de salut et de paix.

Après ce long et humiliant aveu de crimes, dont la plupart au moins étaient imaginaires, Louis demanda à haute voix que les évêques officiants daignassent lui accorder la pénitence publique, seule capable d’effacer les scandales dont il s’était rendu coupable ; puis, joignant le geste à la parole, il quitta le baudrier militaire et l’habit séculier. Les évêques, après avoir déposé sur l’autel la liste de ses péchés, firent comme il avait demandé, et lui imposèrent l’habit de pénitent. Procès-verbal de la cérémonie fut dressé séance tenante, et remis à Lothaire[54]. Chaque évêque certifia en outre par une charte particulière qu’il avait approuvé le jugement porté sur Louis[55]. Ainsi fut sanctionnée cette seconde dégradation de la puissance impériale, dégradation sans égale dans l’histoire, si elle n’était surpassée encore par la dégradation de la puissance épiscopale, qui, sans la vouloir, l’exécutait lâchement.

Lothaire, le principal, sinon unique instigateur de la honteuse cérémonie de Saint-Médard, avait cru empêcher à toujours le rétablissement de son père, en le dépouillant du baudrier militaire et en le plaçant comme pénitent à la porte d’une église. Mais ses calculs se trouvèrent complètement faux : loin d’avoir le résultat qu’il s’en était promis, sa cruauté barbare, déployée à l’égard d’un homme qui, à la majesté du malheur, de la vieillesse et du rang, joignait celle de la paternité, rappela à leur devoir tous ceux que n’aveuglaient pas leur haine ou leur intérêt personnel : à travers tout l’empire, il y eut un long concert d’imprécations contre le fils dénaturé qui avait dévoilé la honte de son père. C’était du reste une injure faite à la nation tout entière, que de prosterner le fds de Charlemagne devant le fils d’un chevrier ; le sang barbare se réveilla dans les veines des Francs à la nouvelle de cette cérémonie sacrilège, qui du déshonneur du monarque avait fait le déshonneur de l’empire entier[56]. L’indignation et la colère produites par la scène de Saint-Médard furent tellement violentes, que Lothaire ne crut plus son prisonnier en sûreté à Soissons[57], et le transporta avec lui, à Compiègne d’abord, à Aix-la-Chapelle ensuite[58]. Mais il aurait fallu des mesures tout autrement vigoureuses pour étouffer le mouvement général ; Lothaire n’était pas homme à dominer une position aussi désespérée que la sienne commençait à le devenir.

 

 

 



[1] Ann. Bertin., ad 831. Vita Ludovici, c. 46.

[2] Ann. Bertin., ad 832. Thégan, c. 40.

[3] Vita Walæ, p. 502-508.

[4] Vita Ludovici, c. 47.

[5] Nithard, I, c. 4.

[6] Agobardi Lugdun. Archiep. flebil. Epist. de divisione imperii inter filius (Bouquet, VI, p. 367).

[7] Vita Walæ, p. 508, 513.

[8] Vita Walæ, p. 508.

[9] Vita Walæ, p. 508. — Vita Ludovici, c. 48.

[10] Epist. Episcop. in Conv. Paris, congregat. (825) ad Ludovicum et Lotharium de cultu imaginum (Bouquet, VI, p. 338).

[11] Déjà le synode de Paris de 829 avait inséré dans ses canons un faux décret d’Urbain Ier.

[12] Agobardi Epist. ad Ludow. de comparatione utriusque regiminis, politici et eeclesiastici (Bouquet VI, p. 366).

[13] Vita Walæ, p. 511. — Vita Ludovici, c. 48.

[14] Vita Ludovici, c. 48. — Cllg. Epist. Gregorii IV Papœ ad episcop. regni Francorum {Bouquet., VI, p. 352).

[15] Agobardi Epist. ad Ludow. de comparatione utriusque regiminis, politici et ecclesiastici {Bouquet., VI, p. 366).

[16] Agobardi Epist. de Compar.

[17] V. Epist. Gregor. IV Papœ ad Episc. regni Franc.

[18] Nithard, I, c. 4. — Cllg. Ann. Bertin, ad 833. Vita Ludovici, c. 48. Thégan, c. 42.

[19] Nithard, I, c. 4. — Vita Walæ, p. 510.

[20] Vita Ludovici, c. 48. Ann. Bertin., ad 833. Thégan, c. 42.

[21] Vita Walæ, p. 511.

[22] Vita Walæ, p. 511.

[23] Vita Walæ, p. 512-514.

[24] Thégan, c. 42.

[25] Vita Ludovici, c. 48. — Cllg. Thégan, c. 42. Vita Walæ, p. 514.

[26] Vita Ludovici, c. 48. — Vita Walæ, p. 514.

[27] Ann. Bertin., ad 833.

[28] Vita Walæ, p. 515.

[29] Nithard, I, c. 4. — Ann. Bertin., ad 833. — Vita Ludovici, c. 48.

[30] Ann. Weingartnenses, ad ann. 833 (Pertz, I, p. 65).

[31] Thégan, c. 42. — Cllg. Ann, Bertin., ad 833.

[32] Vita Ludovici, c. 48.

[33] Vita Ludovici, c. 48. Ann. Bertin, ad 833. Nithard, Hist., I, c. 4. Thégan, c. 42.

[34] Ann. Bertin., ad 833. — Vita Walæ, p. 515.

[35] Vita Ludovici, c. 48.

[36] Vita Ludovici, c. 48. — Nithard, I, c. 4.

[37] Vita Walæ, p. 515.

[38] Nithard, I, c. 4.

[39] Vita Walæ, p. 516.

[40] Nithard, I, c. 4.

[41] Vita Ludovici, c. 48. Ann. Bertin., ad 833.

[42] Vita Ludovici, c. 49.

[43] Agobnrdi Lib. Apolog. pro filiis Ludovici Pii adv. patrem (Bouquet., VI, p.248 sq.).

[44] Vita Ludovici, c. 49.

[45] Vita Ludovici, c. 49.

[46] Vita Walæ, p. 516.

[47] Epist. Loth. imp. ad Leon. IV Pap. (Bouquet, V II, p. 565 sq.).

[48] Ann. Bertin., ad 833. Thégan, c. 44. Narrat. Cleric. Remens, de Ebbonis deposit. (Bouquet., VII, p, 277).

[49] Ann. Fuld., ad 822. Ann. Éginhard ad 828. Ermold Nigelles, IV, V. 25.

[50] Thégan, c. 44.

[51] Acta exauctorationis Ludovici Pii Imp. (Bouquet., VI, p. 243).

[52] Ann. Bertin., ad 833.

[53] Acta exauctorationis. Cllg. Thégan, c. 44. Vita Ludovici, 49.

[54] Ce procès-verbal nous a été conservé sous le nom d'Acta exauctorationis Ludovici Pii. Imp.

[55] Nous avons celle d’Agobard, Agobardi Lugd. Archiep., chartul. (Bouquet, VI, p. 246).

[56] L’évêque franc Thégan a consacré trois chapitres de sa Biographie de Louis (c. 20, 44, 56) à développer cette idée.

[57] Ann. Bertin. ad 833.

[58] Vita Ludovici, 49. Ann. Bertin, ad 833.