LA VRAIE MATA-HARI, COURTISANE ET ESPIONNE

DEUXIÈME PARTIE

 

XXVI. — La succession de Mata Hari.

 

 

Mata Hari ne laissait pas de testament. Sa fille unique était donc sa seule héritière.

Environ deux semaines avant l'exécution, M. Lecouturier avait été nommé, par ordonnance du Tribunal Civil, administrateur-séquestre de la succession.

Le 30 janvier 1918 eut lieu à Paris la vente publique des bijoux retirés de la prison de Saint-Lazare, du greffe du Conseil de guerre et de l'Élysée-Palace.

Le produit net de la vente restait un peu au-dessous de 15.000 francs. Les créances de ceux qui avaient été les fournisseurs à Paris de l'espionne dépassaient de beaucoup cette somme modique.

La vente publique du mobilier que Mata Hari avait possédé à La Haye se fit les 9 et 10 janvier de cette même année. Tout le beau monde de la résidence royale voulait voir l'intérieur de Mata Hari qu'elle avait caché, avec un soin jaloux, à tous les yeux, excepté à ceux de ses amants.

Aussi les jours de l'exposition publique une foule de curieux et une longue file d'automobiles somptueuses stationnèrent devant la maison où devait avoir lieu la vente, et aux alentours.

Les belles dames de La Haye tenaient surtout à voir la chambre à coucher avec son magnifique lit à deux personnes sur plateforme, décoré d'or, avec taies et draps ornés de dentelles et d'entre-deux, avec matelas et édredon sur toute la largeur.

Ce lit avait pour les nombreuses dames élégantes un rapport vague, lointain et rétrospectif avec les aventures amoureuses de la courtisane disparue et satisfaisait une curiosité malsaine.

Elles s'intéressaient à peine au reste des objets qui devaient être dispersés aux feux des enchères et parmi lesquels seules une statuette de Bouddha en bronze et une copie de Psyché enlevée par les Zéphyrs, de Prudhon, pouvaient passer pour choses d'art.

Et peut-être considéraient-elles avec dédain les quatre cravaches de darnes, les amazones, les hottes à l'écuyère qui rappelaient celle qui avait été un jour écuyère de cirque.

En Hollande comme à Paris, Mata Hari était toujours endettée. Rien d'étonnant donc qu'une grande partie du mobilier de la maison à La Haye ne fût pas payée.

Le plus clair du produit de la vente passa, comme quelques jours après à Paris, aux mains des créanciers.

Et l'héritière naturelle de Mata Hari n'a jamais rien reçu de la succession de sa mère.

Elle ne tenait au reste aucunement à l'argent que sa mère avait ramassé dans la boue de la prostitution et de la trahison.