CHAPITRE X. — LE TROUPEAU DE DAVID.
Les Juifs sont dispersés et ceux qui restent au pays sont
sujets de Rome. Le berger qui les conduit depuis les Ménahem et les Éléazar
est-il entré dans la bergerie par la porte ou par la brèche ? Qu'ils se
servent de leurs yeux et leurs veux répondront ! Par les deux similitudes qui
se sont passées à la fontaine probatique nous sommes déjà préparés à la parabole
qui suit ;
1. En vérité, en vérité je vous
le dis : Celui qui n'entre point par la porte dans
le bercail des brebis, mais y monte par ailleurs, est un voleur et un larron.
2. Mais
celui qui entre par la porte est le pasteur des brebis.
3. C'est à celui-ci que le portier ouvre, et les brebis
entendent sa voix, et il appelle ses propres brebis par leur nom, et les fait
sortir.
4. Et
lorsqu'il a fait sortir ses propres brebis, il marche devant elles, et les
brebis le suivent, parce qu'elles connaissent sa voix.
5. Elles
ne suivent point un étranger, mais elles le fuient, parce qu'elles ne
connaissent point la voix des étrangers.
6. Jésus leur dit cette
parabole. Mais ils ne comprirent pas ce qu'il leur disait.
C'est pourtant bien clair ! Celui qui commande aux Juifs
doit être un homme de leur nation, et non un étranger, c'est dans la Loi, c'est dans l'Apocalypse,
c'est dans les Généalogies de Bar-Jehoudda. Il n'est pas de principe plus
juste, à la condition toutefois que ce conducteur s'impose par ses qualités
personnelles ; et si Bar-Jehoudda n'avait point voulu étendre sa domination à
toute la terre, peut-être aurait-il, avec un peu moins d'impostures et un peu
plus de valeur militaire, renversé Antipas, tétrarque de Galilée.
7. Jésus leur dit donc encore : En vérité je vous le dis, c'est moi qui suis la porte des
brebis.
8. Tous
ceux qui sont venus sont des voleurs et des larrons, et les brebis ne les ont
point écoutés.
9. C'est moi qui suis la porte. Si c'est par moi que quelqu'un
entre, il sera sauvé ; et il entrera, et il sortira, et il trouvera des
pâturages.
10. Le
voleur ne vient que pour voler, égorger et détruire. Moi je suis venu pour
qu'elles aient la vie, et qu'elles l'aient plus abondamment.
11. Moi
je suis le bon pasteur. Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis.
12. Mais
le mercenaire, et celui qui n'est point pasteur, dont les brebis ne sont pas
le bien propre, voyant le loup venir, laisse là les brebis et s'enfuit ; et
le loup ravit et disperse les brebis.
13. Or
le mercenaire s'enfuit, parce qu'il est mercenaire, et qu'il n'a point de
souci des brebis.
14. Moi,
je suis le bon pasteur ; et je connais mes brebis, et mes brebis me
connaissent,
15. Comme
mon Père me connaît, et que moi-même je connais mon Père ; et je donne ma vie
pour mes brebis.
Dans ces homélies d'ailleurs dolosives en ce qu'elles
tendent à faire croire qu'il va mourir sur la croix, ce qu'il dément lui-même
plus loin, il est particulièrement dur pour les rois-christs tels que
Bar-Jehoudda et Ménahem ; mais le Sermon sur la Montagne l'est encore
plus.
Naturellement Jésus vise par-dessus tout les fils de la
louve romaine. Comme nous sommes censés en 788, Jésus peut dire qu'il compte
toujours sur les brebis de Cyrène et sur toutes celles qui devaient rallier
Jérusalem à l'appel de Bar-Jehoudda. Même après Hadrien l'Apocalypse conserve toute sa vertu sur
les brebis dispersées parmi les goym ; elles reviendront au bercail un jour,
Jésus leur en donne l'assurance.
16. Mais
j'ai d'autres brebis qui ne sont point de cette bergerie ; et il faut que je
les amène ; el elles entendront ma voix, et il n'y aura qu'un bercail et
qu'un pasteur.
17. Et
si mon Père m'aime, c'est parce que je quitte ma vie pour la reprendre.
18. Personne
ne me la ravit ; mais je la donne de moi-même ; j'ai le pouvoir de la donner,
et j'ai le pouvoir de la reprendre ; c'est le commandement que j'ai reçu de
mon Père.
19. Une dissension s'éleva de
nouveau parmi les Juifs à cause de ces paroles.
20. Beaucoup d'entre eux
disaient : Il a en lui un démon, et il a perdu
le sens, pourquoi l'écoutez-vous ?
21. D'autres disaient : Ces paroles ne sont pas d'un homme qui a un démon en lui ;
est-ce qu'un démon peut ouvrir les yeux des aveugles ?
Il n'en a guéri qu'un, que pourtant on compte au
pluriel ! C'est qu'il vient également d'ouvrir les yeux même aux Juifs
qui font semblant de ne pas voir ; ils font les aveugles parce qu'il y a des
romains entre Jésus et eux.
DILEMME DE LA
DIVINITÉ DES JUIFS.
22. Or on faisait à Jérusalem la Dédicace ; et
c'était l'hiver.
23. Et Jésus se promenait dans
le Temple, sous le portique de salomon.
24. Les Juifs donc l'entourèrent
et lui dirent : Jusqu'à quand tiendras-tu notre
esprit en suspens ? Si tu es Je christ, dis-le nous ouvertement.
Notons qu'à l'inverse de Bar-Jehoudda qui a quitté Jérusalem
en 787 après s'être évadé du Hanoth[1], Jésus reste dans
la Ville
jusqu'à la fête de la Dédicace. Cette fête répond au solstice
d'hiver, date à laquelle était né le prétendant, comme vous pouvez le voir
dans l'Apocalypse et dans les deux Nativités évangéliques où il
dispute à l'Empire romain le signe du Capricorne
en l'honneur duquel Auguste avait fait frapper sa médaille d'horoscope[2]. Les Juifs qui
s'adressent à Jésus font semblant de ne rien savoir de celte particularité.
Pour sa part, toutes les fois qu'on prononce le mot christ, Jésus fait la grimace. Il ne lui convient
pas du tout d'être confondu avec cet imposteur, à moins toutefois que ce ne
soit pour amener les goym au baptême. On lui a déjà sauvé la mise tout à
l'heure en faisant dire parles pharisiens qu'il n'est pas de la maison de
David, ce qui est vrai, et par Nicodème qu'il est un Galiléen sans attaches
avec Betléhem, ce qui est faux ; mais il aimerait autant qu'on laissât ces
questions de côté, quand elles ne sont pas absolument indispensables à la
mystification des goym. Il a une façon de répondre qui consiste à n'avoir pas
entendu. Car si Bar-Jehoudda disait être christ, l'événement a bien prouvé
qu'il ne l'était point. Jésus qui a donné sa démission de Juge ne se soucie
pas de rentrer en fonctions à ce propos.
Le mot christ ne convenant qu'au Joannès, fils de David
dans la .Nativité selon Luc, Jésus y répugne ; il est le Verbe, reprenant le
rôle du christ de 788 avec les moyens supérieurs que lui confère sa divinité.
Aussi ne répond-il jamais que par des sèmeia,
des homélies ou des paraboles. Et pour n'être point accusé par les goym de
partager la xénophobie kanaïte, il affecte de se promener sous la galerie de
Salomon qui leur était ouverte dans le Temple détruit.
25. Jésus leur répondit : Je vous parle et vous ne croyez point. Les œuvres que je
fais au nom du Père rendent témoignage de moi ;
20. Mais
vous ne croyez point, parce que vous n'êtes point de mes brebis.
27. Mes
brebis écoutent ma voix ; moi je les connais, et elles me suivent ;
28. Et
je leur donne la vie éternelle ; et elles ne périront jamais, et nul ne les
ravira de ma main.
20. Quant
à mon Père, ce qu'il m'a donné est plus grand que toutes choses, et personne
ne le peut ravir de la main de mon Père.
30. Moi
et mon Père nous sommes une seule chose.
Il n'aurait pas été bon d'avancer une pareille proposition
devant Bar-Jehoudda. Il aurait fait ce que font les Juifs, il aurait pris des
pierres pour lapider cet hérétique.
31. Alors les Juifs prirent des
pierres pour le lapider.
32. Jésus leur dit : J'ai fait devant vous beaucoup d'œuvres excellentes par la
vertu de mon Père ; pour laquelle de ces œuvres me lapidez-vous ?
33. Les Juifs lui
répondirent : Ce n'est pas pour une bonne œuvre
que nous te lapidons, mais c'est pour un blasphème ; et parce que toi, étant
homme, tu te fais Dieu.
La thèse des Juifs est irréfutable. C'est nier le Père que
d'annoncer qu'on vivra mille ans sans lui. Aussi est-ce justement que Dieu a
arrêté ce blasphémateur, par la main d'Is-Kérioth. Cependant si les Juifs
nient eux-mêmes être de sang divin, comment le salut par le baptême
pourra-t-il venir de l'un d'entre eux ? S'il n'y a pas de différence entre un
Juif et les autres hommes, le baptême ne vaudra pas plus que s'il venait d'un
goy.
34. Jésus leur repartit : N'est-il pas écrit dans votre Loi : Je l'ai dit ; Vous
êtes des dieux ?
33. Quand
elle appelle dieux ceux à qui la parole de Dieu a été adressée, et que
l'Écriture ne peut être détruite.
36. Vous
me dites, à moi que le Père a sanctifié, et envoyé dans le monde : Tu blasphèmes ; parce
que j'ai dit : Je suis le Fils de Dieu ?
37. Si
je ne fais pas les œuvres de mon Père, ne me croyez point.
38. Mais
si je les fais, quand bien même vous ne voudriez pas me croire, croyez aux
œuvres, afin que vous connaissiez et croyiez que mon Père est en moi, et moi
dans mon Père.
39. Ils cherchaient donc à le
prendre, mais il s'échappa de leurs mains.
Non seulement il échappe de leurs mains, mais encore la
faillite du christ devient leur propre faillite s'ils ne l'en relèvent pas.
Ils s'y condamnent eux-mêmes, ils avouent être de la semence de bétail, ils
détruisent toutes leurs Écritures ; Moïse s'est trompé, le salut n'est pas en
eux, ne vient pas d'eux, et en ce cas, adieu la recette ! Ils sont donc
intéressés à ce que Bar-Jehoudda soit fait petit à petit consubstantiel au
Père, en dépit de l'infamie dont ils l'ont noté dans un mouvement d'humeur un
peu trop hâtif.
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