L'année d'après, l'hiver étant passé, il fallut pourvoir aux affaires de la guerre. On en revint au maréchal de La Force. Sa Majesté lui fit entendre qu'il l'avoit toujours bien servie, et en avait tant de satisfaction qu'elle vouloit qu'il continuât, sachant qu'il étoit aimé parmi les gens de guerre et l'estime qu'ils faisaient de lui, que les affaires se préparoient de tous côtés à faire de grands efforts cette année, qu'il se tint prêt[1]. C'est ainsi que le Maréchal de La Force, en ses Mémoires, ouvre l'année 1638. De sa maison de Rueil, le cardinal suivait les progrès des sept armées que le Roi avait en campagne. En Artois, l'armée du maréchal de Châtillon ; sur les frontières de Picardie et de Champagne, celle du maréchal de La Force ; dans le Luxembourg, celle du cardinal de La Valette ; sur le Rhin, celle du duc de Weimar ; en Franche-Comté, celle du duc de Longueville ; eu Italie, celle du duc de Créqui ; sur la frontière d'Espagne, celle du prince de Coudé. Sans parler de l'armée navale et des galères. Traité de Hambourg. Avant la fin de l'hiver, le cardinal conclut avec Salvius, plénipotentiaire de Suède, un traité qui fut signé à Hambourg, le 6 mars. Ce traité se référait à celui qui avait été signé à Weimar en 1636 : la guerre, commencée contre l'empereur Ferdinand II, serait continuée contre le fils de celui-ci, sa maison et ses alliés. Les Français agiraient dans la haute Allemagne, les Suédois en Saxe et en Brandebourg ; les alliés s'efforceraient d'atteindre les États héréditaires de la maison d'Autriche ; catholiques et protestants seraient assurés de pouvoir pratiquer leur religion et de conserver leurs biens. L'alliance durerait trois années. Le Roi verserait à la Suède quatre cent mille thalers (un million de livres tournois) par an, sans compter quatre cent mille thalers versés immédiatement à titre d'arriéré. Le cas échéant, les plénipotentiaires français négocieraient à Cologne, les Suédois à Lubeck ou à Hambourg. La possession de la Poméranie n'était pas garantie à la Suède par la France ni celle de la Lorraine à la Franco par la Suède[2]. Wrangel s'apprêtait à pénétrer dans le Mecklembourg. Richelieu ne désespérait pas de propager la défection dans l'armée de Callas[3]. Saint-Omer et Le Catelet. Quelque six semaines plus tard, le cardinal écrivit au maréchal de La Force : J'envoie ce gentilhomme, qui est à moi, expressément pour savoir quel est l'état de votre armée... Ce gentilhomme ne va pas pour vous donner du feu, sachant bien que vous en avez assez, mais seulement pour savoir comme vous le voulez employer[4]. Le rôle assigné au maréchal était de se jeter dans le pays ennemi entre Cambrai et le Catelet, pour donner jalousie aux ennemis et faire diversion de ce côté-là, afin de favoriser les sièges qu'entreprendrait le maréchal de Châtillon. La Force était à peine arrivé à une portée de canon du Catelet qu'une lettre du Roi lui commanda de s'acheminer vers Saint-Omer, assiégé par le maréchal de Châtillon, qui voyait avec inquiétude l'ennemi marcher au secours de la place. Loris XIII, à Saint-Germain, venait de lire, dans deux lettres d'Espagne interceptées, que le prince Thomas allait hasarder un grand effort pour délivrer Saint-Osier. Pourvu que M. de La Force arrive à temps, avait-il écrit aussitôt à Richelieu, je ne crains rien[5]. Malgré toute sa diligence, le maréchal de La Force ne put atteindre les environs de la ville qu'en six jours. Six jours passés à prendre, chemin faisant, plusieurs églises fortifiées et château qui incommodoient fort les frontières de France[6]. Le 17 juin il n'était plus qu'à une lieue de Saint-Omer. Mais le prince Thomas, qui s'avançait à la tête de quatre mille hommes de pied, deux mille chevaux et quatre pièces de canon, avait déjà réussi à pénétrer dans la place. Le bruit de ce coup de main se répandit sur les frontières du Luxembourg, d'où le maréchal de Brézé, qui était à la tête d'une troisième armée, écrivit à M. de Noyers le 19 juin : Nous eûmes hier deux avis différents, l'un que le siège de Saint-Omer étoit levé, l'autre qu'il y étoit seulement entré un secours de bon nombre d'hommes. Les Espagnols disoient... que Piccolomini de beaux feux à Cuise, quoiqu'on ne soit pas en saison d'en avoir beaucoup de besoin, et de là marcheroit en France avec tant de progrès qu'il feroit bientôt sortir nos armées de leurs postes[7]. Richelieu, fort mécontent, mandait au maréchal de
Châtillon le 12 juin : Je n'eusse jamais cru qu'ayant
eu plusieurs jours à reconnoître la place que vous avez assiégée, sans que
les ennemis vous aient empêché, vous ayez laissé un canal ouvert, par où le secours
est rentré sans combat. J'avoue qu'en sachant cette affaire j'ai eu peine à
la croire, ne pouvant m'imaginer que vous n'ayez pas prévu tous les lieux par
où les ennemis pouvoient plus facilement effectuer tout ce qu'ils pouvoient désirer[8]. Les deux maréchaux conférèrent dans la vallée de Houle. Châtillon pressa. La Force d'assiéger Saint-Orner, mais La Force refusa. Les lettrés du Roi, qu'il venait de recevoir étaient formelles : J'ai toujours désiré, comme je fais à présent, disait celle du 21 juin, que vous demeuriez libre de vous porter partout où il sera besoin pour empêcher les ennemis de secourir Saint-Omer une seconde fois[9]. La Force se tint en observation à Éperlecques, petit village situé à une lieue de Saint-Omer, sur le chemin d'Ardres, d'où venoient totem les vivres nécessaires pour la subsistance des armées. Le prince Thomas occupe solidement le château de Ruminghen. La Force se contente de se retrancher lui aussi, le long d'un ruisseau, près de l'église de Zouafques[10]. Grâce à sa vigilance, aucun des convois qu'il fait diriger, deux ou trois fois par semaine, n'est arrêté par l'ennemi. Cependant le comte Piccolomini a joint son armée à celle
du prince Thomas. Ce grand renfort de cavalerie donne
au prince hardiesse de se venir présenter aux retranchements du maréchal de
La Force, pensant le braver. Six mille chevaux très bien armés,
commandés par le comte de Nassau et le comte de Colloredo, accourent également.
Mais le maréchal ramasse, avec sa cavalerie, son infanterie et son canon et marche droit à eux. L'ennemi fut mis en déroute et ce fut un furieux carnage, il y eut plus de deux mille
hommes et chevaux de tués ou prisonniers. Colloredo fut tué. Le comte de
Nassau se sauva à pied, mais peu de jours après, il en mourut de déplaisir.
Ce qui ne figure point dans les Mémoires, c'est ce petit détail que rapporte
le Mercure françois : La principale gloire de
ce combat et de la victoire est due à l'ordre et à la bonne conduite du maréchal
de La Force, lequel nonobstant son âge de quatre-vingts ans, fut tout le jour
armé de toutes pièces, assisté du marquis de Castelnau, son fils, maréchal de
camp. Le cardinal lui-même avait, dès le 19 juillet 1638, écrit, de
l'abbaye de Royaumont, au vainqueur de Zouafques : Espérant
avoir le bien de vous voir dans peu de jours et de vous témoigner de vive
voix la joie que j'ai de l'avantage que vous remportâtes dernièrement sur les
ennemis, au combat que vous eûtes avec eux, et de l'honneur que vous avez
acquis en cette occasion, je ne vous dirai maintenant autre chose, sinon que,
comme il n'y a personne qui vous estime et affectionne plus que moi, il n'y
en a point aussi qui vous souhaite plus de gloire que je fais, vous conjurant
de croire que je contribuerai avec un soin extraordinaire tout ce qui
dépendra de moi pour vous donner lieu d'en acquérir une nouvelle[11]. Le Roi s'était avancé jusqu'à Amiens, et Richelieu vint à
Abbeville. C'est là qu'ils apprirent la levée du siège de Saint-Omer. Le
combat de Zouafques était à peine achevé, que Châtillon avait mandé à La
Force de très mauvaises nouvelles du siège : La nuit
auparavant, le prince Thomas avoit forcé un des corps de garde au delà du
marais de Saint-Omer, et avoit jeté, par le moyen d'un canal, avec des
bateaux, du secours dans la ville. Rentré à son quartier à six heures
du soir, Châtillon en était reparti, avec ses troupes, dès huit heures et,
marchant toute la nuit, était arrivé le matin sous les murs de Saint-Omer. Il
y avait trouvé les ennemis maîtres du travail que
l'on avoit fait à l'embouchure du canal, d'où il étoit fort difficile de les
déloger, à cause que la rivière étoit entre deux et un grand marais. La plus
grande part de leur armée y étoit retranchée ; il restoit, au delà du marais,
sur un haut, un grand fort que le maréchal de Châtillon y avoit fait faire,
gardé par mille ou douze cents mousquetaires, qui est tout ce qu'il tenoit au
delà dudit marais, où l'on ne pouvoit passer pour la défense d'icelui, à
cause que les ennemis s'étoient saisis de la digue et des ponts que l'on
avoit faits sur le marais pour aller et venir audit fort, de sorte que les
ennemis, se voyant libres, attaquèrent ledit fort avec dix ou douze canons.
Les deux généraux, le prince Thomas et le comte Piccolomini, s'y étoient
rendus tous deux avec leurs deux armées, et ayant passage libre pour aller à
la ville de Saint-Omer, ils s'y en venoient tous les jours pour faire trophée
de leurs avantages. Les maréchaux de La Force et de Châtillon avaient vite compris, qu'il était impossible de secourir le fort. Il eût fallu pour cela contourner le marais avec les deux armées. L'entreprise était périlleuse, car il y avait cinq lieues de tour à faire et le pays était couvert de bois, traversé de grandes ravines. Le tour eût nécessité cinq ou six jours et l'on n'avoit pas de pain pour deux. Et, pendant l'absence des troupes du Roi, les ennemis, qui avoient le champ libre par dedans la ville, où ils pouvoient faire passer leurs armées, n'eussent pas manqué d'attaquer le camp : dégarnir ce camp, c'était laisser en proie toute l'artillerie, les munitions et tout le bagage des armées ; c'était les faire périr comme si on avoit perdu une bataille. Louis XIII et Richelieu témoignèrent un grand mécontentement du mauvais succès de ce siège et du désavantage qu'il apportoit aux affaires. La Force et Châtillon proposèrent alors d'attaquer Hesdin. Louis XIII leur commanda de prendre la ville de Renty. Les maréchaux s'en emparèrent et, le 6 août, M. de Noyers écrivit à La Force : Je ne vous dirai point la joie que Son Éminence a eu d'apprendre cette bonne nouvelle de la prise de Renty[12]. Mais ni le Roi ni le ministre ne pouvaient se consoler de
l'échec essuyé devant Saint-Omer. Le 5 août 1638, Louis XIII mandait La Force
et Châtillon pour conférer de ce que ses armées
pourvoient entreprendre pendant cette campagne. Dès le 11, il leur
adressait ce contre-ordre : Mes Cousins, jugeant
votre présence entièrement nécessaire en mon armée que vous commandez, pour
la maintenir, je vous dépêche ce courrier exprès pour vous dire, qu'encore
que je vous aie fait mander et fait écrire, par le sieur de Noyers, de nia
part, que vous eussiez ù. me venir trouver, maintenant mon intention est que
vous ne bougiez de mon armée, si vous y êtes encore, et que, si vous en êtes
partis, vous y retourniez incontinent pour soutenir chacun en sa charge et en
son devoir, me trouvant obligé à vous donner cet ordre, tant à cause de la
licence extrême à laquelle j'apprends tous les jours que les gens de guerre,
officiers et soldats, s'abandonnent de plus en plus en quittant leurs
troupes, que pour la subsistance et conservation de l'armée[13]. Cette
dispersion des gens de guerre, soit par indiscipline, soit par facilité des
congés accordés, devenait la grande préoccupation. Une semaine auparavant le
Roi s'en était plaint aux deux maréchaux : Je ne
saurois vous exprimer le déplaisir que j'ai d'apprendre tous les jours que
ceux qui veulent revenir de mes armées en obtiennent la permission, et encore
de ce que vous souffrez que les maréchaux de camp, au préjudice de mes
ordonnances, se mêlent de donner des congés, ce qui fait que l'on voit des
troupes de huit à. dix hommes, tantôt de pied, tantôt de cheval, qui s'en
retournent en toute liberté, en sorte que ce sera la ruine entière de mes
armées, s'il n'y est remédié[14]. Le 24 août, de
retour à Saint-Germain, il mandait à Richelieu : Je
suis bien marri des longueurs de MM. de Châtillon et de La Force. Si vous ne
fussiez demeuré, je crois qu'ils auroient dissipé leur armée sans rien faire[15]. Le cardinal était plus marri encore de la conduite du maréchal de Brézé qui, à la tête d'une troisième armée, devait agir conjointement avec les maréchaux de Châtillon et de La Force. Brézé ne songeait qu'à regagner sa maison de Milly, près de Saumur. Il obtint un congé sous couleur d'aller aux eaux pour sa santé. Le cardinal, constatent les Mémoires de Montglat, fut fort fâché... il cacha au Roi cette mauvaise humeur. Il enrageoit néanmoins de voir l'extravagance de son beau-frère. Mais ce maréchal était pressé du désir de retourner en sa maison de Milly en Anjou, pour y manger des melons, dont la saison se passoit[16], ou était peut-être irrité d'avoir à commander avec d'autres maréchaux, car il n'étoit pas bête de compagnie. Le 11 août 1638, M. de Chavigny, chargé de remettre à Brézé la permission du Roi, emportait aussi une semonce du cardinal hautaine et sévère : Mon Frère, disait Richelieu, une lettre m'apprend votre peu de santé, votre peu de bien et la résolution que vous avez prise. Le premier défaut dépend de votre constitution naturelle et des excès que la passion de la chasse vous a fait faire en votre jeunesse ; le second doit être attribué au mauvais ménage de votre maison ou aux dépenses que vos prédécesseurs ont faites servant les Rois. Pour ce qui est de votre résolution, votre seule humeur en est cause. Connue je ne puis être responsable du premier de vos maux, puisque j'en ai ma part moi-même et qu'il n'y a que Dieu qui donne la santé, vous ne devriez pas, ce me semble, me reprocher le second, vu les grands biens que je vous ai faits on que vous avez reçus, par mon moyen, de la grâce du Roi, et le mauvais état auquel étoient vos affaires, lorsque vous êtes entré en mon alliance avec les beaux titres dont vous me parlez, mais si peu de bien qu'entre ce dont vous jouissez et ce que vous aviez lors, il y a différence de beaucoup à rien... En quittant ces quartiers, vous aurez voulu quitter mon amitié. Je consens, quoique mal volontiers, à la rupture que vous faites avec moi, et sans me repentir des biens que vous ne reconnoissez pas, — et dont vous jouissez. Bien que je ne veuille plus avoir de commerce avec vos inégalités et vos boutades, je vous assure que je serai toujours, mon Frère, votre très affectionné frère et serviteur[17]. L'époque n'était nullement à la bonne humeur, pas plus parmi les gens de cour que dans la famille royale. Richelieu dut quitter à son tour son quartier d'Abbeville.
Le 18 août, il arrivait à Picquigny et il mandait à Louis XIII : Je suis parti en intention de dîner au Pontdormy[18], mais sans effet, parce que le feu s'est mis au château,
qui en a brûlé une partie, et nous en a chassés et contraints de venir manger
un morceau à la poste de Flixecourt[19]. L'armée de MM. de La Force et de Châtillon ne partira
que jeudi, nous ayant mandé que le rasement de Rente requéroit qu'ils
demeurassent jusqu'à ce jour-là[20]. Louis XIII
avait déjà regagné Saint-Germain. Dès le 19, ilécrivait au cardinal : J'arrivai ici sur les deux heures après-midi, où je
trouvai la. Reine en bonne santé et non si prête d'accoucher qu'on nous le mandoit.
Je voudrois bien n'être arrivé ici si tôt et être encore en Picardie. Je m'en
vas demain à Versailles pour deux ou trois jours. J'ai trouvé le sexe féminin
avec aussi peu de sens et aussi impertinent en leurs questions qu'ils ont accoutumé[21]. Et Richelieu de
répondre d'une plume sereine le 21 : Je suis
extrêmement fâché du mécontentement que le Roi a reçu en arrivant à
Saint-Germain. Ce qui me console est que je suis assuré qu'il n'aura point
continué, ne doutant point que le sexe féminin ne soit capable d'avoir fait
des réflexions qui l'aient porté au point auquel Sa Majesté le doit désirer
par raison[22]. Ce jour-là Richelieu se trouvait à Amiens. Il écrivait à
Bullion et à Bouthillier, les deux surintendants des finances, pour défendre
les habitants des villes du nord mis à rançon par le lise en dépit de leurs
souffrances : Ceux d'Abbeville ont consenti pour
leurs fortifications un redoublement de droit sur leurs vins, à la charge
qu'ils en seroient fermiers. Cependant devant que leur ferme ait été échue,
on les en a privés et a-t-on établi à perpétuité le droit qu'ils n'avoient
consenti que pour un temps. Ceux de Saint-Quentin se plaignent avec raison
d'un autre doublement de droit sur leurs vins qu'on y a mis, nonobstant les
grandes charges qu'ils ont et la somme de cinquante mille livres qu'ils ont
fournie pour leurs fortifications, à la charge d'être déchargés du droit
qu'on leur impose... Ceux d'Amiens sont en
mêmes termes, et j'ai bien peur que toutes les villes de la rivière de Somme
se trouveront de même. Et le ministre en arrivait à cette conclusion :
Il n'y a rien si nécessaire, pour que le Roi puisse
avoir les cœurs de ses sujets, que l'observation de sa parole, à laquelle
n'oubliant rien de ce qui dépendra de moi, j'userai de plus grande civilité
qu'ils ne font pas, en ce que je les avertirai des changements qu'il est
nécessaire de faire à leurs résolutions, au lieu que jamais ils ne nous
disent mot des traités et partis qu'ils font tous les jours au préjudice des
promesses de Sa Majesté[23]. Cependant M. du Hallier, qui remplaçait le maréchal de Brézé, avait investi Le Catelet, et Richelieu avait prescrit à Châtillon et à La Force de s'avancer diligemment pour prendre un poste entre cette ville et Cambrai. Depuis le 11 août 1638, les deux armées s'étaient fondues en une seule. Louis XIII avait écrit aux deux maréchaux : Ayant reconnu que la plupart des fâcheuses rencontres qui sont arrivés pendant cette campagne, en mes armées, ont été causées parce qu'elles n'ont pas agi avec l'union nécessaire, chacun ayant désiré donner avantage au corps qu'il a commandé, j'ai résolu, pour éviter à l'avenir ces inconvénients, de joindre ensemble les deux armées que vous commandiez séparément pour en former un seul corps que chacun de vous commandera à son tour selon le rang de son ancienneté [24]. Le cardinal constatait dès le 22 août : Plus on va en avant, plus reconnaît-on qu'il ne faut qu'un chef en une année et point de conseils publics[25]. Le 25 août, Richelieu est à Chaulnes et il apprend que M. du Hallier a ouvert la tranchée. Il annonce au Roi le 31 : Le siège du Catelet continue et M. du Hallier estime qu'il aura la place le 8 septembre. L'armée de MM. de La Force et de Châtillon est logée à Crévecœur et à Vaucelles, de façon que M. du Hallier est entièrement couvert et n'a rien à craindre[26]. Mais le 11 septembre, la place n'a pas encore capitulé et, de Saint-Germain, le Roi mande au cardinal : La prise du Catelet me semble bien longue, ou voit par là ce que c'est que mettre de bons hommes dans les places[27]. A quoi Richelieu répond le 12 : Le capitaine espagnol dit ouvertement qu'il juge bien qu'il faut se rendre, mais qu'il est tellement assuré d'être pendu, s'il le fait, que cela, le retient[28]. Le 14 septembre enfin, les mines ont joué, la place est emportée d'assaut. Il y avait alors dix jours que le maréchal de Châtillon, mandé au Louvre par le Roi, s'était arrêté à Saint-Quentin où Son Éminence lui avait donné ce conseil : Je suis d'avis que vous alliez droit chez vous sans voir Sa Majesté, car elle n'est pas contente de vous ; il faut prendre du loisir pour accommoder vos affaires[29]. Et bientôt une lettre de Louis XIII avait changé en un ordre formel le conseil de Richelieu. La Force, en dépit de son âge, que le cardinal jugeait un mal irrémédiable, garda le commandement de
l'armée. Il eut ordre de faire vivre ses troupes dans
le pays ennemi, tout le reste de la campagne[30]. De pouvoir entreprendre autre chose, expliquent ses
Mémoires, il n'y avoit pas moyen, d'autant
que la saison étoit fort avancée et qu'il y avoit de grandes maladies dans
l'armée ; d'ailleurs, il est certain que le prince Thomas et le comte
Piccolomini étaient toujours à trois ou quatre lieues de lui avec leurs
armées, le côtoyant toujours. Néanmoins, il s'avance vers la rivière de
Selle, qui va de Cateau-Cambrésis à Valenciennes. Mais bientôt la
pluie et le froid, le manque de fourrage et de pain, le contraignent à se
rapprocher de la frontière. Posté quinze, jours durant à Hanape, il quitte ce
village, dispose son armée aux environs de Guise, distante de deux lieues, et
reçoit dans la petite ville une lettre du Roi, qui le blâme : La nouvelle que m'a apportée le capitaine Desjourac de
votre délogement du camp de Hanape sans mon ordre m'a tellement surpris que
je ne puis témoigner le mécontentement que j'en ai, lequel est d'autant plus
grand que, par votre éloignement de la frontière, vous laissez les places de
Cateau en Cambrésis et Landrecies en péril, et qu'en entrant dans le Royaume
vous portez dans le sein de mes sujets tous les maux et la ruine que traîne
après soi mie armée mal disciplinée[31]. La Force répond
au Roi qu'on ne lui a jamais commandé de rester à Hanape : il a été hors de sa puissance d'y retenir les troupes,
qui abandonnaient leurs quartiers pour venir
chercher du couvert en France
[32]. Un mois plus
tard, les troupes des deux partis rentraient dans leurs quartiers d'hiver.
Les généraux français pouvaient se
féliciter de deux beaux succès, ils avaient repris Renty et ce Catelet, dont
les Espagnols s'étaient emparés en 1636 et entendaient se servir, disent les
Mémoires du cardinal, comme d'une porte en leurs
invasions contre la France. Plus au nord, il est vrai, le prince
d'Orange, notre allié, avait été moins heureux ; dès le 27 août 1638, le
cardinal infant, accourant avec seize mille Volumes, l'avait forcé à lever le
siège de la ville de Gueldre, et depuis, la faiblesse du Hollandais avait
rendu toute nouvelle entreprise impossible avant l'hiver. La campagne d'Alsace. Quelques jours avant la levée de ce siège, Richelieu, alors dans Amiens, écrivait sur le dessus d'une lettre adressée à Chavigny : Depuis ce paquet fermé, la bonne nouvelle apportée par M. Truchsess est arrivée[33]. Certes, depuis le début de l'année, le duc Bernard, dont. Truchsess était le chambellan, avait obtenu de beaux succès. Il avait, à la fin de janvier, quitté ses quartiers d'hiver pour attaquer les quatre villes forestières, Sekinghen, Valshut, Lauffenbourg et Rheinfelden. Il s'était emparé aisément des trois premières. Battu, le 28 février, par Jean de Werth, tandis qu'il assiégeait la quatrième, il avait pris sa revanche le 3 mars, faisant Jean de Werth prisonnier et obtenant la capitulation de la ville le 23. Trois semaines plus tôt, le duc de Rohan, qui, au lieu de se retirer à Venise, conformément à l'ordre du Roi, était venu combattre dans l'armée du duc Bernard, son ami, avait reçu une blessure mortelle et succombé. Maître de Neubourg, le prince avait marché sur Brisach, et repoussé Gœtz et le duc Savelli, qui, à la tête des Impériaux, l'avaient attaqué six fois dans ses retranchements. Voilà les nouvelles que Truchsess venait apporter au cardinal le 21 août 1638. Lorsque M. de Lützow, gentilhomme de la chambre du prince allemand, arriva à la Cour et présenta quatre-vingts drapeaux ou étendards pris à l'ennemi, Louis XIII dit à Truchsess : Le duc Bernard seul me fait de pareils cadeaux. Puis le Roi écrivit au duc : Je trouve d'autant plus de gloire pour vous et de sujet de satisfaction en cette victoire, qu'elle est entièrement due à votre prudence et courage ; avec cela, je reconnois, par la résolution que ledit sieur Truchsess m'a fait savoir que vous avez prise de poursuivre ce qui restoit des ennemis et de vous assurer des places dont ces avantages vous ouvrent la conquête, que, comme vous savez vaincre, vous ne perdez aussi aucune occasion de profiter de la victoire[34]. Il s'agissait de s'emparer de Brisach le plus tôt possible. La lettre faisait espérer l'envoi immédiat de deux cent mille écus sur les sommes qui avaient été promises et un bon renfort de gens de pied, que dépêcherait le due de Longueville. Ce dernier savait depuis deux mois qu'il devait tout abandonner, même le siège de Salins, si le duc Bernard avait besoin de son assistance. Louis XIII lui avait écrit le 12 juin : Travaillez conjointement avec lui au siège de Brisach et à. sa prise, qui est le plus considérable effet que mes armes puissent remporter sur celles des ennemis de toute cette campagne[35]. Mais la place de Brisach tenait toujours. La mort du duc de Savoie. Au moment où le duc Bernard faisait à Louis XIII des cadeaux si appréciés, il y avait cinq mois que l'armée d'Italie avait changé de chef. Le maréchal de Créqui, visitant les travaux de la défense de Bremo que les Espagnols assiégeaient, avait été tué. Le cardinal, qui reconnaissoit la valeur et le prix de ce grand capitaine, ressentit vivement cette perte ; il conseilla au Roi d'envoyer promptement en Italie quelque personne de grande considération pour y soutenir le poil ; des affaires, n'y jugeant personne plus propre que le cardinal de La Valette, à cause de son adresse qui sauroit entretenir l'esprit de Madame, et de sa qualité qui seroit respectée des Italiens[36]. Il importait, en effet, d'entretenir l'esprit de Christine de France, duchesse de Savoie, veuve de Victor-Amédée et Régente, soumise plus que jamais à l'influence du Père Monod. Ce religieux éloignoit cette princesse de vouloir continuer ou renouveler le traité de la ligue avec le Roi, afin qu'elle pût prendre le parti de la neutralité, si l'occasion s'en offroit ; il la faisoit procéder avec grande froideur envers les Français, fortifier les places qu'elle avoit près de la France, y mettre des gouverneurs de faction espagnole, essayoit de se défaire de tous los Français qui étaient auprès d'elle ; lui faisoit de grandes instances de convier la Reine mère de venir en Piémont et commençoit à nouer une intelligence entre elle et le marquis de Leganès[37]. Aussi Richelieu avait-il mandé à Particelli d'Hémery le 17 octobre 1637 : Le Père Monod est un esprit si dangereux que le nourrir dans une cour est y nourrir un serpent[38]. Quelques mois plus tard, vers la mi-février 1638, le cardinal écrivait au même Particelli d'Hémery qu'il allait dépêcher à Turin le baron de Pallnau, chargé de signifier à Madame que l'éloignement du Père Monod était la condition du renouvellement de l'alliance. Et le 1er mars 1638, Madame, qui venait d'exiler le Père à Coni, mandait au cardinal : Pour vous plaire, j'ai consenti à me priver du plus ancien serviteur que j'ai entre tous nies sujets et qui a témoigné autant de passion pour la France et pour votre service particulier que s'il eût été naturel Français[39]. Le 26 mars 1638, Bremo capitula. Madame, effrayée, écrivit au Père Monod de reprendre la conversation avec Leganès ; mais, voyant arriver à Turin, au début d'avril, le comte de Guiche, l'un des lieutenants du cardinal de La Valette, elle se hâta de donner contre-ordre au religieux. La Valette ne parut en Piémont que le 6 mai. Il apprit à Pignerol une grave nouvelle. Un complot s'était tramé pour livrer Casal aux Espagnols. L'auteur du complot était Monteil, gouverneur du château de Casal. L'instigatrice était Marie de Mantoue, veuve du duc de Rethélois. Cette princesse, dévouée à, l'Espagne, venait de perdre son beau-père, Charles de Gonzague, duc de Nevers et de Mantoue et, comme son fils était en bas âge, elle se trouvait régente du Duché. La Valette, après avoir fait arrêter Monteil, fut brillamment reçu à Turin et Particelli d'Hémery ne cacha point à la princesse de Mantoue qu'il n'ignorait rien de sa conduite à l'égard de la France. Cependant Christine, consentant à renouveler la ligue offensive avec la France, demandait qu'il fût spécifié dans le traité que la ligue était formée contre les ennemis du Roi et non contre l'Espagne. C'était sans doute l'effet des bons documents[40] du Père Monod qui étaient restés entre ses mains. Mais elle apprit, le 20 mai, que le Montferrat était envahi parles Espagnols, qui réclamaient, au nom de la princesse de Mantoue, la restitution des places tenues par les Français[41]. Après beaucoup d'agitation et de protestations, la duchesse de Savoie, devant les ravages que les troupes espagnoles accomplissaient dans le Montferrat, fit publier un manifeste où elle déclarait la guerre à l'Espagne ; elle accepta même qu'il fit t spécifié dans le traité que la ligue était formée contre le Roi Catholique. Le traité fut signé le 3 juin à Turin. Il prorogeait jusqu'en 1640 celui de Rivoli. La France recueillait, en somme, de la mort de Victor-Amédée un avantage précieux : l'armée savoyarde continuait d'être à la charge de la Savoie, mais son commandement revenait au chef des troupes du Roi. Le 5 juillet, Verceil, que le cardinal de La Valette ne put délivrer à temps, capitula faute de poudre. Échec dont Voiture essayait de consoler ce prince de l'Église par une lettre de complaisance digne de l'ami des précieuses[42] ; mais Louis XIII ne se payait pas de cette monnaie ; il écrivait à Richelieu, le 13 juillet : Je fus hier si surpris de la nouvelle de la capitulation de Verceil, — après les bonnes espérances qu'on nous avait données qu'elle était hors de péril, — que je ne sus vous écrire ; je vous assure que cette nouvelle m'a extrêmement touché, parce que je vois que c'est un éloignement de la paix, que vous et moi désirons avec tant de passion[43]. Non moins déçu que le Roi, le ministre mandait à La Valette le 19 juillet : On vous envoie trois régiments, Roussillon, Caylus et Mirepoix, outre le reste des troupes de votre armée qui vous sont maintenant arrivées, afin de vous fortifier et de vous donner lieu de réparer le mauvais événement de Verceil par quelque autre action[44]. Mais au début de septembre, La Valette ne put empêcher don Francisco de Mello d'entrer dans le Montferrat et d'enlever le château de Pomare, la plus méchante bicoque de toute l'Italie. Le nouveau duc de Savoie, le jeune François-Hyacinthe, mourut le 4 octobre. Son frère cadet, Charles-Emmanuel, qui lui succédait, n'avait pas encore cinq ans : Victor-Amédée, selon les partisans du cardinal de Savoie et du prince Thomas, ses frères, n'avait pu prendre de dispositions pour la régence qu'en ce qui concernait son fils aîné. Pour confier la régence à la sœur du roi de France, il fallait consulter les États et même, — puisque la Savoie était fief impérial, — solliciter l'avis du suzerain, qui était l'Empereur. Richelieu songea tout de suite à ramener le cardinal de Savoie à l'affection de la France. Il prescrit, le 29 octobre, au maréchal d'Estrées, ambassadeur du Roi près le Saint-Siège, de lui faire parler par le cardinal Bagni et par Mazarin ; à présent que le cardinal de Savoie n'est plus séparé de la Couronne que par un enfant en bas âge, qui peut disparaître, il a grand intérêt à se remettre bien avec le Roi, pour être assuré de son assistance et protection et, le cas échéant, posséder ses États en pleine paix... Il faudroit, à cette fin... qu'il se mariât en France, ce qu'on pourroit faire avec Mlle de Bourbon, Monsieur le Prince lui donnant quelque belle et grande terre proche de Paris, qui lui pourroit servir de divertissement. Le Roi, pour le bien traiter, lui donneroit une pension égale à celle de ses princes du sang, auxquels il donne cinquante initie écus à l'un et quarante mille à l'autre. On pourrait encore lui donner quelque gouvernement de province comme le Maine et la Touraine, qui sont les plus beaux lieux du Royaume[45]. Ces rêves furent vite dissipés. Le 5 novembre, le cardinal de La Valette écrit à Richelieu : Le cardinal de Savoie est auprès de Gênes ; il est parti de Renie, vêtu en chevalier de Malte. Et le 10 : Madame a eu avis cette nuit que le cardinal de Savoie était allé à Alexandrie se joindre aux Espagnols. Il annonce enfin, le 17, que le même cardinal de Savoie médite l'enlèvement de Madame et de ses enfants. Madame, à son tour, avise Richelieu de cette conjuration, dans laquelle est entrée le gouverneur de Turin. C'est alors qu'elle consentit que le cardinal factieux fût arrêté, s'il mettoit le pied dans ses États : Madame, lui écrivit le ministre de Louis XIII, c'est à ce coup que vous devez vous réveiller de la léthargie eu laquelle Votre Altesse trouvera bon que je lui dise qu'elle a été jusqu'à présent, puisque, si vous ne le faites promptement, votre mal sera enfin irrémédiable. C'est une extraordinaire providence de Dieu d'avoir permis que vos propres ennemis vous forcent à ce dont votre bonté vous a détournée jusques ici[46]. Et Richelieu la pressait de pourvoir à toutes les places importantes et de s'assurer de la personne du Père Monod. Mais qu'elle fût pressée par le cardinal de La Valette ou par le comte d'Estrades, qui était arrivé à Turin le 14 décembre, Christine s'en tenait toujours à la même réponse : Que penseroit-on de moi, si on me crovoit capable d'abandonner tous mes serviteurs à la vengeance du cardinal de Richelieu, quand il lui plairoit de l'exiger, et où trouverois-je des gens qui voulussent s'attacher à mon service ? Richelieu entendait mettre la main sur le Jésuite de gré ou de force. Pour lui échapper, le Père se réfugia dans la ville d'Ivrée ; mais comme il projetait d'en sortir un matin avant le jour, afin d'aller conférer à Villanova avec le cardinal de Savoie, le cardinal de La Valette eut vent de ce dessein. Des embuscades furent dressées sur les chemins. Le religieux tomba dans l'une d'elles. On l'eût enseveli dans la citadelle de Pignerol, si la Duchesse n'eût exigé qu'il lui fût rendu. Christine ne l'obtint qu'à la condition de l'enfermer dans sa citadelle de Montmélian[47]. Fontarabie. La douleur de Fontarabie me tue. Voilà ce que Richelieu écrivait à Louis XIII, trois mois plus tôt, le 17 septembre 1638, et voici ce qu'il mandait à Chavigny le 18 : Je vous envoie la relation de cc qui s'est passé au lèvement du siège de Fontarabie ; laquelle il est impossible de lire sans horreur. Sa Majesté en entendra, s'il lui plait, la lecture tout au long[48]. Ce même 18 septembre, à neuf heures du matin, le Roi répondait de Chantilly au cardinal : Je savoir les nouvelles de Fontarabie dès avant-hier ; cela m'a fait prendre la résolution de venir en ce lieu, pour n'être à Saint-Germain, quand ce méchant bruit se répandroit. Je crois que vous savez que nous avons perdu tout le canon et tout le bagage de l'armée ; bref on ne peut appeler ce malheur que la même chose qui arriva aux Espagnols l'année passée à Leucate. Le bon Dieu fait tout pour le mieux, il se faut remettre à sa volonté. Le déplaisir que j'ai de cette affaire m'a failli faire retomber malade, m'étant hier trouvé plus mal qu'à l'ordinaire[49]. Pour comprendre ce déplaisir, il suffit de considérer quels espoirs le cardinal fondait sur la prise de la ville qu'assiégeait le prince de Condé. Le 27 août, il avait écrit à Chavigny : Le retardement des nouvelles de Fontarabie me peine un peu, et cependant je n'en saurois attendre que de bonnes[50]. Et, le 31, il avait donné ces assurances au Roi : Si Fontarabie se prend, comme je n'en doute pas, pour peu qu'on finisse bien cette campagne, on seroit en état d'avoir la paix, et par après, de jouir d'un grand repos pour jamais[51]. Comment douter, en effet ? Fontarabie, sur son
promontoire, à quatre lieues au nord-est de Saint-Sébastien, à deux lieues au
nord-est du port du Passage, surveille la Bidassoa, dont les flots la
séparent de la France. A la pointe du promontoire, le Figuier ouvre sa rade
sur la mer. Le 2 juillet, Monsieur le Prince avait saisi le Figuier et le
Passage. Le cinquième jour de l'investissement de Fontarabie, ses troupes se
trouvaient à cinquante pas du fossé. Il est vrai qu'on ne pouvait empêcher
les chaloupes ennemies de ravitailler nuitamment la ville. Du quartier
général, le marquis de La Force avait écrit le 6 juillet au prince de Condé,
à ce moment au Figuier : Il est entré onze pinasses
dans Fontarabie et en sont sorties deux ou trois heures après. On ne peut
mettre du côté de deçà d'autres corps de garde que devant le logis de Votre
Altesse, où il y avoit cent mousquetaires qui leur ont tiré, et disent qu'ils
en ont fait retourner quatre en arrière[52]. Le 15 août, le
prince de Condé fit évacuer le Passage, afin de concentrer toutes ses troupes
dans les lignes, parce qu'on était averti que l'amirante
de Castille approchait, avec une armée de secours. Mais, dès le ter août, la
flotte française, sous les ordres de M. de Sourdis, archevêque de Bordeaux,
avait paru en vue du Figuier. Elle couplait cinquante-deux navires de guerre
et portait six mille soldats. Richelieu avait mandé à Chavigny le 31 : J'ai tant à vous écrire, que je ne sais par où commencer.
Je commencerai cependant par la victoire ou bataille navale, ensuite de
laquelle M. de Bordeaux demande de l'argent pour tacher de prendre et
fortifier, en Espagne, un poste aussi important que Saint-Sébastien. Je crois
qu'il lui faut envoyer au moins, en diligence, soixante mille francs...
La victoire qu'il a eue mérite bien qu'on le secoure
et qu'on lui donne moyen de tâcher d'en tirer un nouvel avantage[53]. Le lendemain du jour où Richelieu expédiait cette lettre, la brèche était suffisante pour que l'on donnait l'assaut. Mais, depuis quelque temps, le duc de La Valette, l'un des lieutenants de Condé, se souvenant peut-être que son père le duc d'Épernon avait naguère bâtonné Sourdis, refusait d'assister au Conseil. Cinq jours durant il ne bougea point. Ses troupes furent relevées par celles de l'archevêque de Bordeaux. Cependant l'armée espagnole de secours, logée sur une haute éminence, ne cessait d'escarmoucher contre les nôtres ; chaque fois, elle était repoussée. Le 7 septembre, à midi, une attaque générale se déclenche. Les Espagnols, dit une relation, font mine de donner à la main gauche du retranchement : le marquis de La Force les repousse facilement ; il voit un gros qui donne à l'autre coin de la main droite, il y accourt soudain... Les ennemis font encore un plus grand effort sur la gauche ; il y accourt aussi et y trouve une si grande épouvante que tout lâche pied, et ne fut jamais en sa puissance de les pouvoir faire résoudre ni arrêter les fuyards. Cela ébranla aussi le corps de cavalerie et d'infanterie qui 19 devoit soutenir, de sorte qu'il ne put jamais rallier qu'environ dix chevaux, et, cela, presque tous de gentilshommes qu'il avoit ordinairement près de lui. Le marquis de La Force fit plusieurs charges aux ennemis, il y eut deux chevaux tués sous lui... S'il eût eu encore cinquante chevaux avec lui, il auroit repoussé les ennemis[54]. C'est en vain que les régiments d'Enghien et de Condé avaient d'abord dégagé son quartier, le duc de La Valette avait refusé de se joindre à eux. Monsieur le Prince n'avait pas été plus heureux que le marquis de La Force, quand il avait tenté de rallier toute la cavalerie, qui faisait demi-tour. Il fut même renversé. Comble de disgrâce, cinq cents hommes de la garnison sortirent par cette brèche que le duc de La Valette déclaroit impraticable et prirent de flanc le marquis de Gesvres qui, avec quatorze compagnies, tenait tête aux assaillants. Le soir, toute l'armée était en fuite, Monsieur le Prince montait dans une barque et gagnait Bayonne. Il reçut bientôt les condoléances de Richelieu : Sa Majesté, disait Son Éminence, ne mesure pas les intentions par les événements[55]. Le cardinal écrivit, le 25 septembre, au marquis de La Force : Si chacun eût agi avec le même soin et affection que vous avez fait en cette occasion, assurément nous n'y serions pas tombés[56]. Dans le réquisitoire qu'il rédigea vers le même temps contre le duc de La Valette, se trouve cette phrase menaçante : Si le désir de nuire aux affaires publiques a été le motif de sa faute, il mérite de mourir en public pour l'expiation d'icelle. M. de La Valette doit être mandé pour venir rendre compte au Roi, et Sa Majesté pourvoit lui donner la première clôture du Bois de Vincennes pour lieu de demeure, pendant qu'on éclairciroit son cas en présence de Sa Majesté séant en un conseil de guerre[57]. Peu s'en fallut que la personne du duc de La Valette ne
fût saisie. Le 3 octobre, le duc mandait à son frère le cardinal : Je m'en vais faire un voyage par ordre que j'en ai reçu
pour rendre compte de mes actions, que je suis assuré d'être bonnes, et si
fort homme d'honneur, que de ce côté-là, je n'ai rien à craindre[58]. Le cardinal de
La Valette envoya cette lettre de son frère au cardinal ministre, qui
répondit le 16 : Vous ne pouvez à mon avis faire
autre chose qu'écrire au Roi que le mauvais succès de Fontarabie vous comble
d'une double douleur : que vous le suppliez très humblement de protéger M. de
La Valette, s'il se trouve innocent, les intérêts publics devant toujours
marcher les premiers[59]. Cette lettre
était fort inquiétante ; celle que Chavigny adressa le même jour au même
cardinal de La Valette, dont il était l'ami intime, ne l'était pas moins : Je ne puis imaginer que M. de La Valette vienne à la Cour,
étant assez défiant de son naturel, et ce ne sera pas à mon avis la plus
mauvaise résolution qu'il puisse prendre[60]. Il est probable que le cardinal de La Valette trouva moyen d'avertir son frère, car, le 23 octobre, celui-ci s'embarquait à Castillon sur un navire écossais et, par la Gironde, faisait voile vers l'océan : On dit qu'il est allé en Angleterre, mandait Richelieu au cardinal de La Valette le 4 novembre 1638, d'autres en Hollande, d'autres qu'il prétend gagner Venise[61]. La naissance d'un Dauphin. On a vu qu'au mois d'août 1638, Louis XIII était dans l'attente au château de Saint-Germain. Le 27, il écrivait à Chavigny : Je suis étonné que les couches de la Reine se diffèrent de jour à autre passé le ternie du 23e et demi, que M, Bouvard disoit être le premier. II m'a dit que le 28e étoit le dernier. Nous verrons si les médecins sont bons prophètes naturels[62]. En dépit des pronostics médicaux, le Dauphin si désiré ne s'était pas encore présenté le 31, et Richelieu mandait à Chavigny : Je commence à craindre que le délai de l'accouchement de la Reine ne nous donne une fille, toutefois j'espère mieux[63]. Le surlendemain 2 septembre, quatre lignes de Louis XIII ne firent que confirmer ses craintes : La Reine se porte si bien, que je ne crois pas qu'elle accouche de quatre jours, elle est deux jours dans le dixième mois[64]. L'événement eut lieu le 5 septembre 1638, à onze heures et
demie du matin, alors que Richelieu était à Saint-Quentin. Chavigny donnait
ces détails au cardinal : Le Roi avait si peur ce
matin que Monseigneur apprit la nouvelle de l'accouchement de la Reine et de
la naissance de Monseigneur le Dauphin avant que le frère de La Chesnaye (gentilhomme ordinaire du Roi) arrivât auprès de Son Éminence, que je n'ai eu que le
temps de lui écrire trois mots à la hâte, dans le cabinet de Sa Majesté...
Le travail de la Reine a été le plus heureux du
monde : elle n'a été malade que six heures ; après lesquelles, elle est
accouchée d'un des plus beaux princes que l'on sauroit voir. Le Roi a
toujours été présent et ses deux accès de fièvre ne lui ont en rien diminué
ses forces. Monseigneur verra, par la lettre que Sa Majesté lui écrit, la
joie qu'elle a d'être père ; elle est en effet extraordinaire. Sa Majesté a
été aujourd'hui quatre ou cinq fois dans la chambre de Monseigneur le
Dauphin, pour le voir téter et remuer... Monsieur
est demeuré tout étourdi, lorsque Mme Péronne lui a fait voir par raison
physique que la Reine étoit accouchée d'un fils. Il lui faut pardonner s'il
est un peu mélancolique. Les six mille écus que le Roi lui a accordés à la
prière de Monseigneur le consoleront un peu ; et, plus que toute chose au
monde, l'assurance que je lui ai donnée, de la part de Son Éminence, que rien
ne l'empêcheroit de le servir toujours[65]. Louis XIII
manda, le lendemain 6 septembre, à Richelieu : La
Reine n'a plus de fièvre et mon fils se porte comme on le peut désirer
[66]. Je suis ravi, répondait le cardinal, que Monsieur le Dauphin a les cheveux noirs et que d'aucuns remarquent, qu'il ressemble à Votre Majesté. Et il faisait une prédiction qui devait se trouver juste : En vérité, je crois que, Dieu vous l'ayant donné, il l'a donné au monde pour grandes choses[67]. Le cardinal était pénétré d'une joie si profonde, que la Reine, depuis tant d'années son ennemie, était célébrée dans l'officieuse Gazette, où l'on peut lire telle louange certainement inspirée par Son Éminence : Cette Reine à laquelle il ne manquoit plus rien que d'être mère, et le 2 octobre : Le Roi arriva le mercredi à Saint-Germain, où le cardinal duc se rendit, de nos armées, le même jour et quasi à la même heure que Sa Majesté, laquelle il trouva dans la chambre de Monseigneur le Dauphin, où la Reine étoit aussi. Il seroit malaisé d'exprimer de quels transports de joie Son Éminence fut touchée, voyant entre le père. et la mère cet admirable enfant, l'objet de ses souhaits et le dernier terme de son contentement[68]. Brisach est à nous ! Si M. de Longueville pouvoit défaire Savelli, ce seroit pour nous remettre un peu des malheurs qui nous sont arrivés cette aunée et mettre nos soldats, en la même, sur une bonne curée[69]. Le Roi chasseur, qui écrivit ces lignes à Richelieu le 10 novembre 1638, eut la satisfaction d'apprendre bientôt que le duc de Longueville venait de battre le comte Savelli à Blamont, et bientôt qu'il avait repris Lunéville au duc Charles de Lorraine[70]. Et, soudain, prenant la plume, il félicite Bernard de Saxe-Weimar : Je ne vous puis mieux exprimer ma joie de la prise de Brisach qu'en vous assurant qu'elle est aussi grande que ce succès est glorieux et important et qu'il me fait espérer d'heureuses suites pour le bien des affaires publiques et pour disposer toutes choses à une sure et honorable paix. Et Richelieu de son côté : La croyance que j'ai que Votre Altesse ne doute point de la joie extrême que je ressens de la prise de Brisach m'empêche de la lui représenter par ces lignes[71]. Comme le remarque fort justement M. Fagniez, cette conquête, s'ajoutant à celle des villes forestières et du Brisgau, nous assurait la possession de l'Alsace, fermait aux Espagnols la communication entre le Milanais et les Pays-Bas, protégeait la Bourgogne et la Lorraine, ouvrait à nos armées la vallée du Danube[72]. On comprend que Théophraste Renaudot ait terminé ainsi l'article de sa Gazette : Et dites si Dieu aime la France et si ce n'est pas là bien finir une campagne avec l'année ! Charles de Lorraine se lamentait : Enfin Brisach est pris, honte immortelle pour l'Empire !... Si à Vienne ils ne réparent cet affront, par quelque grand dessein et bien exécuté, il ne faut plus être soldat, mais moine, et laisser l'Empire à qui le prendra[73]. Mais Corneille avait raison : Jamais nous ne goûtons de parfaite allégresse, Nos plus heureux succès sont mêlés de tristesse. La mort du Père Joseph. Le 15 décembre 1638, à Rueil, le cardinal s'était montré particulièrement satisfait. Revenu de Saint-Germain, il avait constaté que le Père Joseph, qui, plusieurs mois auparavant, avait été frappé d'apoplexie à Compiègne et que, pour ce motif, il logeait dans sa maison de Rueil, se trouvait bien disposé. Son Éminence s'apprêtait à se rendre à la comédie qui allait être donnée sur le' théâtre du château et elle disait en riant au Capucin, qui venait de reconduire le cardinal Bicci, nonce extraordinaire : Demeurez à la comédie, il ne s'y traite sinon choses sérieuses. — Je m'en vas, répondit le Père Joseph, faire la comédie avec mon bréviaire. Dans sa chambre il lit l'office fort dévotement ; un peu plus tard, il fait une collation des plus frugales tandis qu'on lui donne lecture de l'Histoire de la guerre des chrétiens contre les Turcs. Il écoute avec enthousiasme le récit des exploits de Godefroy de Bouillon pour la conquête de la Terre sainte, car, lui aussi, poète virgilien de la Turciade, il a célébré les croisés : Meque
tuum vatem, placuit libi, Christe, fatebor, Vilibus
horrentem pannis, inopemque, rugunique, Stare
polo et celebrem heroum Instrare catervam, Ut vox nostra canal, quac dextris fortibus edent[74]. Et moi, votre poète, ô Christ, vous plait-il pas Que, rougissant de mes haillons, misère errante, Je montre dans le ciel cette troupe éclatante Et chante les exploits accomplis par ses bras ? La collation achevée, le Père Joseph se lève pour écrire une lettre circulaire à toute la congrégation des Calvairiennes. Mais soudain une attaque d'apoplexie le terrasse et lui enlève l'usage de la parole. Tandis qu'on le transporte dans son lit, le cardinal, aussitôt averti, sort du théâtre. Le samedi 18 décembre, il vit mourir, dans les sentiments de la plus ardente piété, celui qui avait vécu pauvre auprès de l'abondance, humble dans les honneurs, chaste auprès des délices, obéissant en tout, sobre auprès des festins, religieux dans le inonde et Capucin à la Cour. Je perds aujourd'hui, dit Louis XIII avec émotion, le plus fidèle de tous nies serviteurs, et M. le Cardinal son confident et son appui[75]. On raconte qu'entre le 15 et le 18 décembre, Richelieu, pour tirer le Père Joseph de son assoupissement, lui criait dans les oreilles : Courage, mon Père, Brisach est à nous ! Il faut observer que si Brisach tomba le 17 décembre, la nouvelle de sa chute ne parvint à la cour de France que vers le 24. L'anecdote peut, toutefois, n'être point fausse, puisque, le 8 novembre, Louis XIII avait mandé au cardinal : Je suis très aise de la nouvelle que vous m'avez mandée ; je crois à cette heure la prise de Brisach comme infaillible[76]. L'Éminence grise mourait au moment où Richelieu s'efforçait de muer sa bure en pourpre : car le Père Joseph était, depuis deux ans, nommé au cardinalat. Richelieu lui destinait le siège de Reims, dont le titulaire, un archevêque laïc, le prince Henri de Lorraine, fils du duc de Guise, voulait se démettre pour épouser Anne de Gonzague. Mais le Pape n'avait pas accepté la nomination du Père Joseph, que la Couronne avait faite en passant par-dessus la règle qu'il s'était prescrite d'exclure les religieux des dignités de l'Église. Richelieu avait observé que le Saint-Père ne s'était pas inquiété de cette règle, quand il avait nommé son propre frère, Alphonse de Richelieu, le cardinal de Lyon, qui était Chartreux. La promotion fut ainsi retardée. Richelieu espérait avoir, pour la France, deux chapeaux, dont l'un serait donné à Mazarin. Dans les derniers mois de 1637, Chavigny avait expliqué au maréchal d'Estrées, ambassadeur du Roi, que la nomination du sieur Mazarin n'étoit que pour la second place et que l'intention de Sa Majesté étoit toujours que celle qu'elle avoit faite du Père Joseph la précédât. Le 15 décembre 1638, Richelieu parut avoir changé d'avis ; il dépêchait à Rome un courrier extraordinaire pour avertir le Pape qu'il retirait la nomination du Capucin. En fait, il redoutait que le cardinal Barberin, qui n'ignorait pas l'état de santé du Père Joseph, ne le fit malicieusement cardinal pour faire perdre cette place à la France. Ce fut Mazarin qui obtint, le 18 décembre, le chapeau rouge réservé à l'Éminence grise[77]. Le Père Griffet observe judicieusement : Le cardinal fit voir, dans toute la suite de son ministère, que, si les conseils de ce confident lui furent souvent utiles, ils ne lui étaient pas nécessaires et qu'après s'en être servi pendant sa vie, il pouvait s'en passer après sa mort[78]. |
[1] Mémoires du Duc de La
Force, Maréchal de France, t. III, p. 197-198.
[2] Père Griffet, Histoire du
Règne de Louis XIII, t. III, p. 139-140.
[3] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VIII, p. 326.
[4] Mémoires du Duc de La
Force, Maréchal de France, t. III, p. 444.
[5] Comte de Beauchamp, Louis
XIII d'après sa correspondance avec le Cardinal de Richelieu, p. 339. —
Voir une lettre de Louis XIII, contresignée de Phélipeaux, adressée à MM. de
Salenques, de Verdun et de Caumont, les félicitant du soin qu'ils ont pris
d'arrêter les courriers espagnols et leur ordonnant de continuer
à y apporter toute vigilance. La lettre est datée du 1er juin 1625.
(Archives de M. Gabriel Hanotaux, Règne de Louis XIII.)
[6] Mémoires du Duc de La
Force, Maréchal de France, t. III, p. 199-200. Pour le rôle des églises
fortifiées sur cette frontière, voir Gabriel Hanotaux, dans Annales de la
Société historique de Vervins, 1938.
[7] Abbés Ledru et Denis, La
Maison de Maillé, t. II, p. 497-498.
[8] Père Griffet, Histoire du
Règne de Louis XIII, t. III, p. 126.
[9] Mémoires du Duc de La
Force, Maréchal de France, t. III, p. 456.
[10] Aujourd'hui commune du
Pas-de-Calais, arrondissement de Saint-Omer (16 kilomètres), canton d'Ardres.
[11] Mémoires du Duc de La
Force, Maréchal de France, t. III, p. 202-206 et 451.
[12] Mémoires du Duc de La
Force, Maréchal de France, t. III, p. 206-214 et 452- 453.
[13] Archives de la Guerre,
vol. 48, p. 227.
[14] Archives de la Guerre,
vol. 48, p. 114.
[15] Affaires étrangères, Lettres
de Louis XIII à Richelieu.
[16] Mémoires du Marquis de
Montglat, t. I, p. 203.
[17] Avenel, Lettres du Cardinal
Richelieu, t. VI, p. 83-85.
[18] Pont-de-Rémy, petit village
entre Abbeville et Picquigny.
[19] Six lieues au nord-ouest
d'Amiens.
[20] Avenel, Lettres du Cardinal
Richelieu, t. VI, p. 90-91.
[21] Archives des Affaires
étrangères, Lettres de Louis XIII à Richelieu.
[22] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 95-96. Les mots sexe féminin étant écrits en abrégé
: sexe f., M. Avenel se demande s'il ne
s'agit pas de Mme de Hautefort ou même de la Reine. C'est à partir de 1638 que
la jeune fille, ayant reçu de la Reine la survivance de la charge de dame
d'atour qui appartenait à sa grand-mère Mme de La Flotte, fut appelée Mme de
Hautefort.
[23] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 90-100.
[24] Archives de la Guerre,
vol. 48, p. 232 bis.
[25] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 102.
[26] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 128.
[27] Affaires étrangères, Lettres
de Louis XIII à Richelieu.
[28] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 159.
[29] Mémoires du Duc de La
Force, Maréchal de France, t. III, p. 220.
[30] Mémoires du Duc de La
Force, Maréchal de France, t. III, p. 220-221.
[31] Archives de la Guerre,
vol. 48, p. 422.
[32] Mémoires du Duc de La
Force, Maréchal de France, t. III, p. 459-460.
[33] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 98.
[34] Vicomte de Noailles, Bernard
de Saxe-Weimar, p. 334.
[35] Vicomte de Noailles, Bernard
de Saxe-Weimar, p. 325.
[36] Mémoires du Cardinal de
Richelieu, éd. Petitot, t. X, p. 372.
[37] Mémoires du Cardinal de
Richelieu, éd. Petitot, t. X, p. 350-351.
[38] Gabriel de Mun, Richelieu
et la Maison de Savoie, p. 244.
[39] Gabriel de Mun, Richelieu
et la Maison de Savoie, p. 266-267.
[40] Gabriel de Mun, Richelieu
et la Maison de Savoie, p. 299.
[41] Rappelons tout de suite, pour
expliquer certaines incertitudes sur la politique de Christine de France,
duchesse de Savoie, qu'il existe un pamphlet très venimeux, qui paraît avoir
été écrit d'abord en italien, et qui reproche à cette princesse un grand
désordre de mœurs et certaines intrigues avec l'Espagne, de connivence avec
Marie de Médicis. Le tout aurait été connu dans l'entourage de Louis XIII par
les rapports d'un agent français qui était chargé de la poste en Savoie et
décachetait les lettres. Il y aurait aussi à revenir sur le rôle du Père Monod
en ce temps où la Savoie était toujours si hésitante entre les deux
adversaires, France et Espagne. L'original du manuscrit en langue française,
Les amours de Christine, duchesse de Savoie, fait partie des Archives de M.
Gabriel Hanotaux (Règne de Louis XIII).
[42] Vicomte de Noailles, Le
Cardinal de La Valette, p. 434.
[43] Comte de Beauchamp, Louis
XIII d'après sa correspondance avec le Cardinal de Richelieu, p. 345.
[44] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 66-67.
[45] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 224.
[46] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, p. 250 et 252-235.
[47] Père Griffet, Histoire du
Règne de Louis XIII, t. III, p. 138-139.
[48] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 182-184.
[49] Comte de Beauchamp, Louis
XIII, d'après sa correspondance avec le cardinal de Richelieu, p. 347.
[50] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. II, p. 117.
[51] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. II, p. 128.
[52] Archives de Chantilly.
[53] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 129.
[54] Mémoires du Duc de La
Force, Maréchal de France, t. III, p. 227-228.
[55] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 185.
[56] Mémoires du Duc de La
Force, Maréchal de France, t. III, p. 459.
[57] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 207-208.
[58] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 216, note.
[59] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 215, note.
[60] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 231.
[61] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 231. — Le duc de La Valette s'enfuit en Angleterre.
Nous avons un compte rendu d'une sorte de lit de justice où le Roi avait
convoqué le Parlement pour juger la conduite du duc et pair, accusé de deux
crimes : trahison et désobéissance à son chef. Le président de Bellièvre exposa
au Roi que les accusations n'étaient pas fondées et qu'il n'y avait pas lieu à
condamnation. On envisagea, pour la faute d'avoir quitté le Royaume, le
bannissement pendant neuf ans et la confiscation des biens. La Valette fut, au
mois de mai, condamné à mort par contumace. La copie de la relation du temps se
trouve dans les archives de M. Gabriel Hanotaux (Règne de Louis XIII).
Nous n'insistons pas sur les détails du procès. En sûreté de l'autre côté du
détroit, le condamné pouvait se rire de ses juges. Il devait rentrer en France
après la mort de Louis XIII, un jugement du 16 juillet 1643 ayant cassé le
jugement de 1639.
[62] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 117.
[63] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 133.
[64] Archives des Affaires
étrangères, Lettres de Louis XIII à Richelieu.
[65] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 149, note.
[66] Archives des Affaires
étrangères, Lettres de Louis XIII à Richelieu.
[67] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 157.
[68] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 149-150.
[69] Bibliothèque Victor Cousin.
[70] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 244.
[71] Vicomte de Noailles, Bernard
de Saxe-Weimar, p. 383-384.
[72] G. Fagniez, Le Père Joseph
et Richelieu, t. II, p. 408.
[73] Avenel, Lettres du Cardinal
de Richelieu, t. VI, p. 210.
[74] La Turciade, III, 179,
182.
[75] Vie manuscrite du Père
Joseph, ch. XVI et XVII.
[76] Bibliothèque Victor Cousin.
[77] Père Griffet, Histoire du
Règne de Louis XIII, t. III, p. 146-150.
[78] Père Griffet, Histoire du règne de Louis XIII, t. III, p. 154. — Au moment où le Père Joseph disparait de l'histoire de Richelieu, il n'est pas inutile de citer in extenso une lettre qu'il écrivit à Bouthillier, son collègue dans le travail des Affaires étrangères. Elle montre les rapports qu'avaient entre eux les serviteurs du cardinal et les services que le Capucin rendait au Roi et au ministre, en particulier dans la délicate affaire de Gaston de France : A M. B. Monsieur, je vous remercie très humblement de vos deux lettres, qui sont parfaitement bien, comme l'est toujours tout ce qui vient de vous Au moins j'accompagnerai en esprit et envierai les plaisirs de votre solitude, entre lesquels je n'aurois rien de si cher que votre présence. Je vous supplie de ne nous en p er longtemps. M. des Roches part ce matin pour Gand. M. d'Elbène, frère de M. de Villarceaux, lui a écrit, depuis peu de jours, que le sieur e Puylaurens lui a fait savoir de l'armée des Espagnols, on il est, qu'ils seront bientôt de retour à Bruxelles, avec dessein de s'entendre à ce que la réponse de ces Messieurs lui dira, duquel nous n'avons point encore de nouvelles. Je me recommande à vos bonnes grâces et suis plus que personne du monde, Monsieur, votre très humble et très affectionné serviteur. F. J. C. De Fontainebleau, ce 3 juin. (Pièce autographe. Archives de M. Gabriel Hanotaux, Règne de Louis XIII.)