C'est sur les bords de la Creuse, aux confins de la pauvre Brenne et du Poitou, que prit naissance la famille des du Plessis. Leur séjour était une motte entourée de palissades, — un Plessis, comme on disait alors[2] — qui donna le nom à la famille. Il était situé aux environs de la paroisse de Néon, à quelques lieues du Blanc, sur le haut des falaises qui dominent la rivière[3]. Arrière-vassaux des évêques de Poitiers, coureurs de brande quand ils restent au logis, coureurs d'aventures quand ils le quittent, les premiers du Plessis sont de très petites gens : archers, écuyers, au service tantôt des grands seigneurs voisins, tantôt des rois de France, tantôt des rois d'Angleterre : paysans, chasseurs, soldats, quelquefois pis[4]. Sous le règne de Philippe-Auguste, en l'an 1201, on trouve le nom d'un Guillaume du Plessis qu'on donne comme le plus ancien aïeul du grand cardinal[5]. Ce Guillaume est intitulé varlet, titre qui marque un des bas degrés de la hiérarchie féodale. Il possédait déjà les terres du Plessis, des Breux[6], de la Vervolière[7], qui restèrent, pendant des siècles, entre les mains de la famille. Déjà probablement aussi les du Plessis avaient une maison de ville à Angles, petite place forte située sur le cours de à la limite de la Marche et du Poitou[8]. A cette époque, la famille des du Plessis subit, au point de vue politique, les attractions divergentes qui se partagent la province. Un fils ou un parent de ce Guillaume du Plessis, Jean du Plessis s'attache à la personne de Gui de Lusignan et passe en Angleterre[9]. Il y prend femme dans la noble famille des comtes de Warwick. Un autre du Plessis, Laurent, accompagne le même Lusignan en Chypre, et y donne naissance à la maison du Morf[10]. C'est seulement vers le milieu du siècle suivant que l'histoire de la famille se précise. Après cent-cinquante ans, nous la retrouvons dans une situation précaire, toujours ballotée entre les deux influences rivales : celle du Nord et celle du Midi, celle de la France et celle de l'Angleterre. La guerre de Cent Ans a passé sur ces contrées, et les a fortement éprouvées. Un Guillaume du Plessis que l'on considère comme le quatrième descendant du premier, eut quelque part à ces guerres, durant les règnes du roi Jean et de Charles V. Il resta fidèle à la cause française. Mais son fils aîné, Pierre, prit le parti des Anglais. Guillaume, sur le point de mourir, déclara dans son testament qu'il instituait son second fils, Sauvage, unique héritier si son fils ainé ne rentrait pas dans l'obéissance de Nostre Seigneur le Roy de France[11]. Le peu que nous savons de ce Pierre du Plessis ne nous dit rien de bon. Outre le témoignage que porte sur lui le testament de son père, les documents nous apprennent qu'en 1381, il se mit, avec un de ses frères et un certain Guillaume Guenault, seigneur des Bordes, à la tête d'une troupe de gens armés, et qu'ils envahirent, sans autre forme de procès, un bien appartenant au chapitre de l'église de Poitiers. Pour les faire déguerpir, on dut recourir à l'autorité du Parlement de Paris. Nous rencontrerons, aux divers degrés de la descendance des du Plessis, les traits trop nombreux d'un pareil esprit de rapacité et de violence. Pierre du Plessis parait, d'ailleurs, avoir obéi à la volonté paternelle : car il recueillit une partie de l'héritage et continua la souche de la branche aînée. Son frère, Sauvage, donna naissance à la branche cadette qui prit, par la suite, le nom de du Plessis de Richelieu[12]. Sauvage du Plessis paraît avoir été favorisé par son père : il hérita de la seigneurie de la Vervolière, qui devint le principal domaine de la branche cadette ; en outre des terres situées dans la paroisse de Coussay-lès-Bois[13], de Leigné-lès-Bois[14], de Pezayle-Vieil[15], le lieu et la terre de la Valinière[16], quelques propriétés sises en la châtellenie de la Haie-en-Touraine[17], enfin la maison d'Angles, avec ses dépendances. C'était la plus belle partie du patrimoine. Il épousa, en 1388, Isabeau le Groin, des seigneurs de la Mothe-au-Groin, famille du Berry, et, de ce chef, entra en possession d'autres biens situés dans le Bourbonnais et le Berry, notamment de la seigneurie de Belabre[18]. Les actes nous apprennent, en outre, que ce cadet qui avait failli recueillir l'héritage de son frère aîné, ne se fit pas scrupule de dépouiller un jeune frère de sa femme[19]. Il fut contraint à restituer. Mais son avoir s'était accru entre ses mains, et quand son fils, Geofroy du Plessis, vint en âge de prendre femme, il put obtenir la main de Perrine Clérembault, issue d'une des meilleures et des plus riches familles de la contrée[20]. Non seulement les Clérembault étaient riches, mais ils touchaient à la Cour. Le frère de Perrine, Louis Clérembault, seigneur de Richelieu et de Beçay, était maitre d'hôtel de la reine Marie d'Anjou, femme du roi Charles VII. Quand ce Louis Clérembault mourut, vers 1490, sans postérité, il laissa presque toute sa fortune à son neveu François du Plessis, et notamment la terre de Richelieu, avec sa résidence seigneuriale reconstruite et fortifiée vers 1435. Ce nouveau domaine était important. Les du Plessis, branche cadette, en prirent désormais le nom[21]. C'était un coup de fortune. Cette branche, dont Sauvage est à chef, laisse l'aînée végéter tristement dans l'obscurité de la province, tandis qu'elle-même, transplantée dans un sol plus fertile, s'élance vers de plus hautes destinées[22]. Un grand changement s'était ainsi opéré, en moins de deux générations, dans la destinée de cette famille. Elle avait quitté le voisinage de la Brenne et laissé l'horizon borné du champ paternel. Établie dans une contrée riante et prospère, elle se rapprochait de la Loire, au moment où les rois de France allaient faire, de ses bords, leur séjour de prédilection. C'est un voisinage dont les du Plessis ne tardent pas à tirer parti. Ils entrent dans l'orbite de la cour. Avant de mourir, Louis Clérembault avait transmis à son neveu, François du Plessis, la charge d'écuyer tranchant de la reine, Marie d'Anjou. Ce même François remplit, par la suite, la même charge d'écuyer tranchant près du duc de Guyenne, frère de Louis XI ; si bien que, devenu une manière de personnage dans sa province, il obtint pour son fils, François III, la main d'Anne Leroy, fille de Guyon le Roy, chevalier, seigneur du Chillon et de Mondon, noble et vaillant seigneur qui, après avoir rempli diverses charges de cour et d'armée sous les règnes de Louis XI, Charles VIII et Louis XII, exerçait, sous François Ier, les fonctions de vice-amiral de France[23]. Ces le Roy jouaient, depuis longtemps, un rôle important. Leurs alliances les unissaient à ce qu'il y avait de plus noble dans le royaume. Entrer dans une pareille famille, c'était se mettre en situation d'obtenir les grandes charges, de rendre des services connus, appréciés, récompensés. André Duchesne dit fort justement que les du Plessis durent beaucoup au bonheur de leurs alliances. Les le Roy étaient Tourangeaux. Leur domaine de Chavigny était situé dans la forêt de Fontevrault, à quelques lieues de Richelieu et de Loudun. Depuis trois générations, ils exerçaient les charges de chambellans ou d'écuyers auprès des rois Charles VII, Louis XI et Louis XII[24]. Le principal personnage de la famille parait avoir été Jacques le Roy, oncle d'Anne le Roy, femme de François du Plessis. avait été moine de l'ordre de Cluny, puis était devenu abbé de Villeloing-en-Touraine et de Saint-Florent de Saumur. Dans ces hautes situations ecclésiastiques, il s'adonnait à ce que l'historien de Saint-Florent appelle assez joliment le vice de propriété. Il l'avait, ajoute-t-on, profondément enraciné dans le cœur. Nous le voyons, en effet, entasser bénéfice sur bénéfice, prieuré sur abbaye. Il finit par se faire élire abbé de Cluny. Mais, sur la dé-mande de François Ier, il céda ses droits à Jean, plus tard cardinal de Lorraine. En échange, il reçut l'abbaye de Saint-Florent et l'archevêché de Bourges où il succéda au cardinal de Tournon. Jacques le Roy occupa ce siège jusqu'à sa mort, arrivée en 1572. C'était un vrai prélat de la Renaissance, ami des arts, des belles constructions, des statues, des tapisseries, des tableaux, oublieux, dit encore le chroniqueur, oublieux de l'air des cloîtres, et ne cherchant qu'à se divertir par les cours des princes de la terre[25]. Il avait pris en affection les fils de sa nièce et de François du Plessis, les avait fait élever au collège de Navarre et les avait destinés à l'Église. Ce fut lui qui dirigea vers les emplois ecclésiastiques les ambitions croissantes des du Plessis. Il les précède dans cette voie lucrative, ouverte désormais à tous les serviteurs de la cause royale. En effet, depuis le Concordat de 1516, la royauté avait conquis, par le droit de nomination, la disposition de l'immense fortune ecclésiastique. Elle recherchait des sujets fidèles (pli en échange des grasses prébendes, se déclarassent prêts A. faire pénétrer dans le clergé les maximes nouvelles de l'obéissance au pouvoir absolu. Accepter les bénéfices, c'était à cette époque mie façon comme une antre d'être royaliste. Les du Plessis firent bientôt, avec les le Roy, assaut de dévouement. François III du Plessis eut sept enfants : parmi les cinq garçons, deux furent d'Église : René du Plessis, religieux en l'abbaye de la Chaise-Dieu, puis abbé de Nieuil-sur-l'Autise, prieur de Coussay, aumônier et conseiller du roi. Jacques du Plessis, doyen de l'église de Poitiers, aumônier ordinaire du roi Henri II, abbé de la Chapelle-aux-Planches et de Nieuil-sur-l'Autize, après son frère, en 1580, et enfin évêque de Luçon[26]. Si un autre de leurs frères, Antoine du Plessis, échappa à cette vocation soudaine qui règne dans la famille, ce ne fut pas, comme nous allons le voir bientôt, faute de l'énergique intervention de son oncle. Les trois autres enfants mâles, Louis du Plessis l'aîné, qui continua la famille, et ses deux cadets François et Antoine, entrèrent au service. C'est le temps des guerres d'Italie, et bientôt celui des guerres de religion. Les Richelieu ne sont pas encore des personnages assez considérables pour servir au premier rang dans les armées royales ; ils suivent la bannière des hauts seigneurs de la province, les la Trémouille, les Montpensier, les Rochechouart. Leur nom commence cependant à se faire connaître. Les deux cadets se signalèrent particulièrement : c'est François du Plessis, dit Pilon, surnommé encore, d'après De Thou, le sage Richelieu, et Antoine du Plessis, dit le Moine. On les confond souvent sous la même dénomination de capitaine Richelieu. Du Plessis-Pilon était le plus âgé[27]. Il se signala dans les guerres d'Italie. Avec les la Trémouille, les la Rocheposay, les Chavigny et d'autres seigneurs, ses parents et ses voisins, il fit partie de cette armée qui, sous les ordres du maréchal de Brissac, donna, en 1553, l'exemple de la discipline et du bon ordre et qui était, d'après Montluc, l'école des gens de guerre. Richelieu se distingua aux sièges de Lans et de Courtemille, petites places de la Lombardie. Montluc raconte en détail ce que fit ce capitaine, jeune encore, et il le loue comme un de ses meilleurs compagnons d'armes. Après la prise du château, le gouvernement de Courte-mille lui fut confié. Mais bientôt du Plessis-Pilon fut rappelé en France et dans sa province même, par les guerres de religion. A l'époque où nous sommes arrivés, le Poitou était une des régions de la France où le protestantisme avait eu les succès les plus prompts. Il fallait prendre un parti : être avec les catholiques ou avec les réformés, avec le roi ou avec les rebelles. Les Richelieu s'attachent de bonne heure au parti des Guise et, en particulier, à la fortune du duc de Montpensier[28]. Le voisinage de Champigny-sur-Yeude les engage naturellement dans la clientèle de cette grande famille. Avec d'autres seigneurs de la province, les la Rocheposay d'Abein, les la Roche-Chèmerault, les Montpezat, ils mènent les bandes catholiques qui bientôt vont mettre le pays à feu et à sang, François du Plessis, relativement plus modéré, trouve, pour cette œuvre, un secours redoutable dans son frère Antoine, dit le Moine. La confusion qui se fait entre les cieux frères accable malheureusement rainé sous le poids de la triste renommée du plus jeune. Celui-ci est un véritable bandit. Dans son enfance, son oncle, Jacques le Roy, avait décidé qu'il en ferait un moine pour avoir des bénéfices. Antoine fut donc placé comme profès l'abbaye de Saint-Florent de Saumur ; il avait dix ans. Mais sa nature turbulente résistait déjà aux volontés de ses parents. Il disait qu'il voulait aller à la guerre comme ses frères. Le grand-oncle le recommanda, et comme la vocation ne venait pas, il le fit fesser. Privations, coups, prison, rien n'y fit. L'enfant en revenait toujours à son refrain qu'il n'étudierait point, qu'il ne serait point religieux, qu'il voulait aller à la guerre. Il s'enfuit plusieurs fois ; on le ramena à diverses reprises ; enfin, il jeta le froc, gagna les camps et servit près de son frère, en Italie[29]. Mais ce fut surtout dans les guerres civiles qu'il donna
carrière à ses fougueuses vertus. Il était l'âme damnée des Guise. En 1560,
ils le mirent à la tète d'une compagnie d'arquebusiers à cheval, créée
spécialement pour la garde ou, si l'on veut, pour la surveillance du roi,
François II. Bientôt nous le trouvons à Tours : Ceux
de Guise ayant opinion que ceux de Tours leur avoient été adversaires, et
avoient favorisé l'entreprise d'Amboise, mirent grosse garnison à l'entour de
la ville et persuadèrent au roi qu'entre toutes les villes du royaume, elle
lui portoit mauvaise affection... Cependant
pour la rafraichir, on y envoya un moine renié, nommé Richelieu, avec sa
compagnie d'arquebusiers à cheval, levés pour la nouvelle garde du roi, et
les mit-on en garnison dans la ville ; ce que le Cardinal (de Lorraine)
faisoit expressément pour les harasser, sachant bien que cette canaille,
levée de gens vicieux autant que leur capitaine, ne demeureroit sans remue
ménage, et que, se rebellant tant soit peu les habitants, on auroit argument
de leur courir sus. Ce moine, accompli en toute vilenie et débordement, pour
montrer sa pétulance, de première abordée, se vante à ses plus privés amis de
la ville, qu'elle seroit la première mise à sac pour servir d'exemple aux
autres, et leur dit avoir été expressément là envoyé par ceux de Guise pour
les irriter et trouver la moindre occasion du monde de les attaquer, ce qu'il
espéroit faire aisément, les connaissant gens peu endurants et aisés à
s'émouvoir... S'il ne réussit pas à provoquer le conflit et le pillage
qu'il rêvait, ce fut grâce à la patience et à la prudence des habitants de la
ville. Mais on ne s'étonne pas, après cela, de voir que ceux-ci eussent gardé
contre lui un long ressentiment[30]. Cependant, son frère avait été nommé mestre de camp d'un régiment de nouvelle création[31]. Nous le trouvons, en 1561, au siège de Bourges, où, dans un combat singulier, il reçoit d'un sieur de Saint-Martin, capitaine huguenot, un grand coup d'épée dans la cuisse. Il se distingue encore à Sully, et à Saint-Jean-d'Angély. Les deux frères viennent bientôt combattre sous les murs de Poitiers même. C'est au Moine qu'il faut attribuer un autre fait d'armes, ou plutôt un massacre que les historiens locaux racontent en ces termes : Traqués comme des bêtes fauves, les huguenots prenaient partout la fuite. Ceux de Tours quittèrent la ville à l'approche de Montpensier et se dirigèrent vers le Poitou... Ils rencontrèrent ceux des villes du Poitou qui s'enfuyaient de leurs maisons, emportant ce qu'ils avaient de plus précieux... Tous ces fugitifs, au nombre de plus d'un millier, se dirigeaient vers Poitiers, lorsqu'arrivés près de Vendœuvre, ils furent découverts par les cornettes de la Rocheposay et de Villars, qui se mirent à leur poursuite. Le combat ne fut pas long... Ceux qui se sauvèrent furent massacrés par la populace soulevée. Une centaine, enfermés dans une église, furent tués de sang-froid, le lendemain, par un ancien moine, nommé Richelieu, qui s'amusait à tirer sur ces pauvres gens sans défense. Au mois de septembre de la même année, il se dispose à mettre le feu et détruire entièrement, sans pardonner et avoir égard à aucune personne le village de Villiers, paroisse de Vouillé. On ne l'apaise qu'à force d'argent[32]. Poitiers pris, fut livré au pillage pendant huit jours. Il en fut de même de la Trémouille, Saint-Savin, Chauvigny, Fontenay. Tout ce qui entourait le château de Richelieu, à dix lieues à la ronde, apprit à connaître un nom qui se révélait sous ces sinistres auspices. Cependant, le meilleur des deux Richelieu, le sage Richelieu allait bientôt mourir. Envoyé, avec les bandes de Charry et de Sarraboux, au siège de la ville du Havre qu'occupaient les Anglais, il reçut un coup d'arquebuse, dont il mourut regretté de tous, étant fort brave gentilhomme, dit Castelnau[33]. Le Moine poursuivit le cours de ses exploits. En 1567, il est à Blois qu'il défend contre les huguenots ; en 1569 et 1570, il bataille dans le Poitou. On le retrouve, en juin 1574, toujours sous les ordres du due de Montpensier, dans les environs de Poitiers. En juillet, il est à Saumur sous le noème chef, avec les sieurs de Chavigny, de Puigaillard et Bussy d'Amboise. En avril 1576, la municipalité d'Angers lui adresse de très humbles remontrances, à lui et à M. du Bellay, son collègue, pour protester contre le projet de faire entrer des soldats dans la ville d'Angers et dans le pays d'Anjou[34]. Entre temps, il avait pu se faire relever de ses vœux par le cardinal Caraffa, légat du Saint-Siège en France[35] ; avait été nommé gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, et malgré ses mœurs et débauches[36], chevalier de l'ordre de Saint-Michel[37]. Enfin, il mourut en janvier 1576, dans des circonstances dignes de sa vie entière : Le 19 janvier, dit l'Estoile, le capitaine Richelieu, qui avait charge de vingt enseignes de gens à pied, homme mal famé et renommé pour ses larcins, voleries et blasphèmes, étant au reste grand ruffian et cornier de tous les bordeaux, fut tué à Paris, en la rue des Lavandières, par des ruffians comme lui étant avec des garses, en une maison prochaine dudit Richelieu, lesquels sur les dix ou onze heures du soir, il allait incréper et chasser dudit lieu, comme lui déplaisant de ce qu'ils entreprenaient ruffianer et bordeler, si près de son logis, à sa vue et à sa barbe... mort symbolisante à sa vie, ajoute l'Estoile qui rédige ainsi, dans un style convenable au sujet, l'oraison funèbre d'un homme dont la triste carrière commença pourtant à répandre le nom de Richelieu, et dont les vices manifestent par leur excès même ce qu'il y avait tic naturellement violent et acre dans le sang de cette famille[38]. Des cinq enfants mâles de François du Plessis[39], il nous reste à parler d'un seul, l'aîné, Louis du Plessis ; il hérita des principales terres de la maison, devint lieutenant de la compagnie de cinquante hommes d'armes d'ordonnance d'Antoine de Rochechouart, épousa la fille de celui-ci, en 1542, occupa à la cour les emplois de gentilhomme de la chambre et d'échanson ordinaire du roi, combattit dans le Languedoc sous M. de Montpezat[40]. Il mourut jeune, après 1551, laissant cinq enfants en bas-âge, trois fils et deux filles. Sa veuve était Françoise de Rochechouart, descendante de l'illustre famille de ce nom, et grand-mère de Richelieu. Nous avons le texte du contrat de mariage qui unit Louis du Plessis il Françoise de Rochechouart. Tandis que le père de la future s'intitule haut et puissant seigneur, messire Antoine de Rochechouart, chevalier, baron de Fauldouars, Montagut, seigneur de Saint-Amand, et sénéchal de Toulouze, Louis du Plessis n'est qu'un modeste écuyer, seigneur de Richelieu et autres[41]. Les ennemis du cardinal, pour expliquer une alliance si disproportionnée, ont dit que Françoise de Rochechouart était, lors de son mariage, une vieille fille, aigrie, sans fortune, réduite à vivre comme demoiselle de compagnie, près de sa parente, Anne de Polignac. Il est certain que le mariage se fit à Verteuil, chez cette dame. La dot de Françoise de Rochechouart n'est que de douze mille livres, dont le tiers seulement fut payé[42]. Le caractère de la noble épouse de Louis du Plessis parait avoir laissé à désirer. Elle garda toujours le sentiment très vif de la grandeur de son origine, et de l'espèce de déchéance à laquelle les événements l'avaient contrainte. Un trait de son énergie, marqué au coin d'une grandeur presque barbare, est arrivé jusqu'à nous. Son mari, nous l'avons dit, était mort jeune, lui laissant peu d,. biens et la charge de cinq enfants. Quand l'aisé de ses fils, Louis du Plessis, fut arrivé à l'âge d'homme, il devint lieutenant de la compagnie d'ordonnances de Louis de Bourbon, duc de Montpensier, le grand protecteur de sa famille. Mais il périt bientôt, victime de la violence de ces temps cruels. A une demi-lieue du château de Richelieu, sur le territoire de la paroisse de Brave, se trouvait un autre château-fort habité par la famille seigneuriale des Mausson. De toute date, les Mausson et les Richelieu avaient été rivaux. Richelieu, dans la vallée, plus riche et plus moderne, Mausson, sur la colline, dominant et rude, luttaient d'influence et de prétention. Les alliances qui rapprochaient parfois les deux familles voisines, n'aplanissaient les difficultés que pour un temps. Bientôt, les querelles recommençaient. Elles en vinrent au point le plus aigu après la mort de Louis du Plessis, alors que le fier veuvage de Françoise de Rochechouart soutenait et excitait l'imprudence de ses garçons. Une querelle éclata entre Louis du Plessis et le sieur de Mausson, au sujet d'une préséance dans l'église de Braye Mausson surprit du Plessis dans une embuscade et le tua. Le second fils de Françoise de Rochechouart était alors page à la cour du roi Charles IX. Sa mère le rappela, et le nourrit, à Richelieu, dans la pensée unique de venger Louis. Le sieur de Mausson se méfiait, dit la tradition du pays. Pour sortir de son château, il suivait un souterrain qui le conduisait directement au gué de la rivière, dans la direction de Champigny. Mais il fallait passer le gué et c'est ici que l'attendait le jeune Richelieu. Un jour, celui-ci s'avisa de jeter dans l'eau sine roue de charrette. Le cheval de Mausson, effrayé de cet obstacle, se cabra, renversa son cavalier. Richelieu était caché dans les saules de la rive avec quelques compagnons. Il se jeta sur Mausson, et le mit à mort. Ce rude fils d'une rude mère était François IV du Plessis, le père du cardinal de Richelieu[43]. Une vie commencée sous des auspices si tragiques, devait garder, jusqu'au bout, la marque du grand courage qui caractérisait cette famille et des grandes passions qui agitaient ce siècle. Au moment où il vengeait par la mort du seigneur de Mausson, celle de son frère aillé, François du Plessis était déjà page du roi Charles IX et lieutenant de la compagnie du prince de Dombes, héritier. des Montpensier[44]. Pour échapper aux conséquences du procès qui lui fut intenté, il dut quitter la France[45]. Il alla, dit-on, en Angleterre[46], en Allemagne, en Pologne, où les ambitions du duc d'Anjou appelaient nombre de Français. Il fut de la suite des seigneurs et gentilshommes qui se trouvèrent près de ce prince quand il fut élu roi. Il rencontrait là, plusieurs de ses compatriotes du Poitou : c'étaient la Rocheposay d'Abain, la Roche-Chèmerault, Jean Choisnin, le médecin Pidoux. François de Richelieu sut se rendre utile. On l'employa dans diverses négociations, notamment dans celle du traité fait avec le prince Casimir et les reîtres, en 1575. Il fut assez habile on assez heureux pour se glisser dans la faveur du futur roide France. On dit qu'il lui annonça le premier la mort de Charles IX, et qu'il lui fut d'un grand secours dans les préparatifs de son étrange fuite. Quoi qu'il en soit, il revint en France avec Henri III et suivit désormais les diverses phases de la fortune de ce prince[47]. Henri III le nomma d'abord prévôt de son hôtel, puis sur la recommandation particulière du duc de Joyeuse, grand prévôt de France, en 1378. Il n'avait que trente ans. Nous avons de nombreuses traces de l'activité avec laquelle il remplit ses fonctions. Henri III lui confia plus d'une mission importante et secrète[48]. Il lui donna la pins haute marque de sa faveur en le faisant chevalier de l'ordre du Saint-Esprit, dans le chapitre tenu le ter janvier 1585. L'information sur la vie et les mœurs du nouveau chevalier est parvenue jusqu'à nous. Ceux qui furent appelés à déposer dépeignent François de Richelieu comme un bon catholique, un seigneur révéré et aimé de ses subjets et de tous autres pour le bon traitement et soulagement qu'il leur donne[49]. D'après le dire d'un autre de ses contemporains, il était peu instruit peu enrichi de lettres. Mais on louait son clair et prompt esprit, son beau et fertile naturel[50]. Il se plaisait dans la conversation des hommes lettrés et tâchait de réparer ainsi les lacunes d'une éducation trop écourtée. Un sobriquet de cour nous donne sur son caractère une indication que semble confirmer un portrait qui nous reste de lui : sa figure était grave et pâle, son corps grand et grêle, son humeur était sombre : on l'appelait Tristan l'Hermitte[51]. Assuré de l'amitié d'un prince qui péchait plutôt par excès de bienveillance pour ses favoris, François du Plessis mérita sa fortune pur une activité et un dévouement sans bornes. Il était près du roi à la journée des Barricades et on dit qu'il protégea la retraite de Henri III hors de Paris[52]. Il ne paraît pas avoir pris une part directe à l'assassinat des Guise ; mais ce jour même, il arrêta, dans la salle des États, le président de Neuilly et les antres membres du Tiers, dont le roi crut devoir s'assurer[53]. En avril 1589, on le voit à Poitiers s'efforçant, avec le sieur de la Roche-Chèmerault, de maintenir cette ville dans le devoir. Les esprits échauffés contre les Henrions échappaient à toute discipline. Richelieu, après d'inutiles efforts, fut obligé de quitter Poitiers, dans des conditions assez piteuses. Il rejoignit Henri III et ne le quitta plus jusqu'au jour où ce prince mourut sous le poignard de Jacques Clément[54]. Le capitaine des gardes du roi, grand prévôt de l'hôtel et du royaume, joua, comme on le pense, un rôle important dans cette journée du 1er août 1589. Il arrêta Jacques Clément et fit, une heure après l'assassinat, une information qui, contenant les dépositions des témoins oculaires, nous est restée comme le témoignage le plus précis et le plus complet sur les diverses phases de cet événement[55]. A la mort du roi Henri III, la situation des seigneurs catholiques qui l'accompagnaient était difficile. Le sort de la nouvelle dynastie dépendait de la résolution qu'ils allaient prendre : leur adhésion à l'héritier légitime, quoique protestant, devait entraîner le concours de la majeure partie de la nation ; leur abstention eût assuré le succès de la Ligue et probablement préparé le chemin à la famille de Guise. Malgré le passé guisard et catholique des siens, Richelieu fut de ceux qui se déclarèrent pour le Béarnais. Son attitude est mentionnée expressément par les écrivains contemporains[56]. Elle n'allait pas d'ailleurs sans profit pour lui. Henri IV maintint le grand prévôt dans les fonctions qu'il occupait. Il lui confia également des missions importantes et en fit le compagnon de ses luttes journalières, pour la conquête du royaume[57]. François de Richelieu combattit à Arques et à Ivry[58], assista aux sièges de Vendôme[59], du Mans et de Falaise. Il suivit encore le roi au grand siège de Paris. Il était à Gonesse, dans le camp royal, lorsqu'une fièvre violente, suite des fatigues d'une vie si remplie, le saisit et l'enleva, le 10 juillet 1590, à l'âge de quarante-deux ans. Tous ceux qui l'avaient connu plaignirent sa mort. Henri IV garda de lui un souvenir ému. Si le grand prévôt dit vécu, il eût occupé, auprès du roi définitivement reconnu et obéi, un emploi digne de ses mérites et des services qu'il avait rendus. En somme, la vie du père de Richelieu fut active, dévouée, vigoureuse[60]. Cette noble race, à peine arrachée à l'engourdissement de sa province, s'essayait, par une série d'efforts successifs et toujours plus heureux, au grand service que, dans sa prochaine génération, elle allait rendre à la royauté et à la France[61]. François de Richelieu s'était marié jeune. On n'a pas la date exacte de l'union. Mais un écrivain érudit, M. Martineau, a retrouvé, sur les registres de l'église Saint-Séverin, à Paris, l'acte de fiançailles ainsi libellé : Le 21 août 1566 furent fiancés noble homme François du Plessis, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi et seigneur de Richelieu et de la Vervolière, et damoiselle Suzanne de la Porte, dame de Farivilliers et de Valescourt. Le fiancé avait dix-huit arts et la future quinze ans, étant née le 13 février 1551. Elle était fille du sieur François de la Porte, avocat au Parlement de Paris. Les généalogistes se sont efforcés de constituer des titres de noblesse à cette famille des la Porte. La vérité est qu'elle appartenait à la bourgeoisie, à cette bonne bourgeoisie de province et de Paris que la fortune, le mérite, les prétentions rapprochaient de la petite noblesse jusqu'à l'y rattacher par de fréquentes unions[62]. Les la Porte étaient originaires de Parthenay ; ils étaient donc de la même province que les du Plessis-Richelieu. C'est ce qui explique le mariage. Il n'en dut pas moins être considéré comme une mésalliance dans une famille qui, au degré précédent, s'était unie avec les Rochechouart. On peut supposer, qu'à l'époque des fiançailles, l'allié des fils de Françoise de Rochechouart n'était pas mort, et que François de Richelieu n'était encore qu'un cadet. Il faut ajouter que, vers le milieu du XVIe siècle, les Richelieu, malgré les services qu'ils avaient rendus aux rois, étaient tombés dans une sorte de misère. Peut-être espérait-on rétablir les affaires par l'héritage de l'avocat. Sur ce point encore, on fut déçu ; car Suzanne de la Porte ne reçut d'autres biens que ceux qui lui appartenaient du chef de sa mère, Claude Bochart, morte en 1556[63]. François de la Porte, père de Suzanne, et grand-père maternel du cardinal de Richelieu, n'était pas un homme ordinaire. Il était des plus distingués parmi ses collègues. Il fut le bâtonnier de leur ordre. Loysel, dans son Dialogue des Avocats, le cite, au premier rang, près des Christophe de Thon, des Guillaume Boucherat, des Charles du Moulin ; il parle de sa confidence et hardiesse, de son érudition technique ; il rappelle avec éloge la réponse vigoureuse que Fr. de la Porte fit au président de Thou, alors que celui-ci interrompait un avocat qui plaidait : Vous avez tort, reprit La Porte, de vous en prendre à un homme qui en sait plus que vous-même n'en saurez jamais[64]. François de la Porte fut un des avocats qui parlèrent dans le fameux procès de Cabrière et Mérindol. Il s'acquit une grande réputation, et Dreux du Radier n'est que l'écho des témoignages contemporains, quand il s'exprime ainsi à son sujet : Il brilla à Paris dans la profession d'avocat, par tous les talens qui font le grand homme. Le public auquel il s'était consacré n'admirait pas moins son désintéressement et son affabilité que ses lumières. Si la vanité peut paraître excusable, personne n'eut plus d'excuses que François de la Porte[65]. La vanité paraît avoir été, en effet, le défaut du brillant avocat. Nous verrons, par la suite, que ses descendants n'en laissèrent pas tomber l'héritage. Cette vanité fut peut-être satisfaite par le mariage de sa fille avec un descendant de la famille des du Plessis-Richelieu, et par la carrière inespérée du grand prévôt de France. Mais ces succès même devaient faire sentir plus cruellement à l'orgueilleuse mère de François le regret de la mésalliance, et Suzanne de la Porte, jeune, pauvre, effacée, obligée de vivre sous la rude tutelle de sa belle-mère, ne fut pas heureuse. De cette union assez mal assortie, naquirent cinq enfants : trois fils et deux filles. A la mort de François du Plessis-Richelieu, le 10 juin 1590, l'aîné de ces enfants, Henri du Plessis, avait environ dix ans ; le second, Alphonse du Plessis, avait six ou sept ans ; le troisième, Armand-Jean, avait cinq ails ; la plus âgée des deux filles, Françoise, avait douze ans, et la cadette, Nicole, en avait trois ou quatre. Ainsi, la jeune veuve de quarante ans dut s'arracher aux espérances d'une destinée si brillante pour s'en aller, au fond d'une province éloignée, sous l'œil d'une belle-mère âgée et fière, dans le silence de la vieille maison de pierres, couverte d'ardoises, dont parle Tallemant des Réaux, se consacrer à la lourde tâche de la restauration de sa fortune et de l'éducation de ses enfants. Le savant Le Laboureur raconte qu'au moment où François du Plessis, grand prévôt de France, mourut, il était si pauvre qu'il fallut engager son collier de l'ordre pour subvenir aux frais de ses funérailles. Tons les contemporains qui ont su quelque chose de la famille des Richelieu, constatent cette détresse. Mais presque tous aussi s'accordent à dire que, par sa prudence et son habileté, la tille de l'avocat la Porte parvint à rassembler et à restaurer les débris d'une fortune que le malheur des temps et la mort prématurée de son mari avaient si gravement compromise[66]. La mère de Richelieu parait avoir été une femme discrète, sage, modeste, toute préoccupée de la santé, de l'éducation, de l'avenir de ses enfants. Nous avons quelques lettres d'elle. Ou n'y trouve guère qu'une grande sollicitude pour tout ce qui touche aux siens. Elles sont teintes de mélancolie, écrites avec simplicité[67]. Un poète contemporain compare Mme de Richelieu à la colombe. Il ne loue ni sa beauté, ni son esprit, ni son charme ; mais seulement sa fidélité conjugale : D'un vœu plein d'humanité Je donne la tourterelle, Je donne la colombelle, Portraits de fidélité, A une dame loyale Qui, de la foi conjugale Tout l'honneur a mérité. Simple et douce comme une colombe, telle aurait été la mère de ce terrible cardinal. La petite bourgeoise qu'elle était, devait se trouver bien gênée dans cette maison de Richelieu que les prétentions emplissaient, plus encore que les litres et les services. Pourtant ces qualités modestes ne restèrent pas sans emploi. Elle avait pris, dans l'air de l'étude, une teinture des affaires que la nécessité accrut et développa. Si les poètes parlent fort peu d'elle, les notaires la connaissent et ont souvent écrit son nom. Elle avait ce que nous appelons aujourd'hui le sens pratique. Richelieu pensait probablement à sa mère lorsqu'il écrivait, quelque temps après l'avoir perdue : La science d'une femme doit consister en modestie et retenue. Celles doivent être dites les plus habiles qui ont le plus de jugement. Je n'en ai jamais vu de fort lettrée qui n'ait tiré beau- coup d'imperfection de sa grande connoissance[68]. Cette qualité du jugement, — rare chez toutes les femmes, un peu moins rare peut-être chez nos Françaises, — appartenait à la fille des la Porte et des Bochart. Sa fortune et celle de ses enfants furent remises peu à peu, par elle, en meilleur état. A ce point de vue, la situation de la veuve du grand prévôt était vraiment pénible. On peut faire, d'après les titres originaux, l'énumération des domaines que F. de Richelieu avait laissés en mourant. Ils sont assez nombreux. C'est d'abord Richelieu avec ses dépendances, Neuville et les fiefs de Nueil[69] ; c'est la terre patrimoniale de la Vervolière, avec son château, moins considérable, mais dont l'aspect est encore très satisfaisant[70] ; c'est Mausson, sur la côte, au sud de Richelieu, dans une contrée riche et bien plantée[71] ; c'est la maison de Coussay-lès-Bois[72] ; le petit-Puy, dans la même paroisse ; la terre de Beçay[73] ; les domaines de Chillon[74] et de Châteauneuf, avec le château de ce nom[75] ; le domaine et le prieuré de Coussav, près Mirebeau ; on peut citer encore des revenus et rentes foncières sur certains domaines des environs ; quelques dîmes et rentes féodales ; une rente de cinq cents écus sur la ville de Paris, cédée au grand prévôt, en 1587, par sa belle-mère, Françoise de Rochechouart[76] ; enfin les bénéfices qui résultaient de la gestion de l'évêché de Luçon par une sorte de locum-tenens de la famille de Richelieu, et notamment des droits sur l'abbaye de l'Absie-en-Poitou[77]. Il ne faut pas croire cependant que tous les titres et seigneuries énumérés dans les actes qui nous sont parvenus représentassent des valeurs effectives, des revenus correspondant à l'importance territoriale de ces domaines. Dans le système féodal, la superposition du droit de seigneurie et du droit de propriété se faisait en vertu de combinaisons très complexes qui, le plus souvent, ne conservaient au seigneur que la vanité du titre, laissant à d'autres, moyennant bénéfice réel. Je citerai le préambule d'un des aveux adressés à Mme de Richelieu. On y verra comment la pompe et l'ostentation des formules recouvrent la pauvreté du fond. De vous, ma très chère et très
honorée dame, Suzanne de la Porte, veuve de défunt haut et puissant seigneur
François du Plessis, vivant chevalier des ordres du Roi, capitaine des gardes
du corps de S. M., conseiller en ses Conseils privé et d'État, grand prévôt
de France et prévôt de son hôtel, seigneur de Richelieu et Mausson, le
Chillon, Neuville et la Vervolière, je, Philippe Messeau, écuyer, seigneur de
la Girardière et des fiefs de Couraye et de Nueil, tiens et avoue à tenir de
vous à foi et hommage-lige... à cause de
votre seigneurie de Richelieu, c'est à savoir.... (suit une longue énumération de propriétés faisant
partie de la seigneurie de Richelieu).... Puis l'aveu : Je tiens en procès
pour faire reconnoître mes devoirs en toutes et chacunes les choses dessus
dites, leurs circonstances et dépendances, je les avoue de haute justice et
basse, voire avec tous et chacun droits qui en dépendent ou peuvent dépendre,
à la forme et manière que mes prédécesseurs et moi en avons joui et usé ou
accoutumé jouir et user, par raison d'icelles, de vous, madite très honorée
et puis sante dame, comme dit. est ci-dessus, en foi et hommage-lige, quinze
sols aux loyaux... avec aussi honneur,
service, redevance, toute vraie soumission et obéissance, telle comme homme
de foi-lige doit à son seigneur. Eu témoignage de quoi, je vous rends le
présent aveu[78]. En somme, Philippe Messeau tenait une bonne partie du domaine de Richelieu et en échange, outre la foi, hommage, soumission, et autres déclarations de pure forme, il payait quinze sous aux loyaux, — une obole. Il en était de même de la plupart des autres domaines. L'apparence de la richesse, et non la richesse elle-même, telle était la situation, à tous les points de vue ruineuse, de la noblesse de province aux temps dont nous parlons. Il faut soustraire encore des revenus effectifs, les lourdes charges de la garde et de l'entretien. Une famille peu riche, en somme, se trouve posséder, en même temps, trois ou quatre châteaux avec tours, remparts, fossés, communs, fontaines, moulins, chevaux, hommes d'armes. Tout cela coûte. Surtout dans ces temps troublés, la garde est particulièrement onéreuse. On ne peut vivre qu'entouré d'un personnel nombreux ; il faut dans chaque maison une petite garnison propre à résister du moins à un coup de main. A supposer même que ces troupes ne restent pas inactives et qu'elles fassent, de temps à autre, sur le territoire des voisins hostiles, une excursion profitable, les bénéfices n'égalent pas les pertes. Pour comble de malheur, les champs restent en friche. Si une maigre moisson murit, c'est l'ennemi qui fait la récolte. Les métairies, les granges incendiées, les paysans réfugiés dans les bois, les villages. déserts mettent une cause de dépenses nouvelles à la place de la source ordinaire des revenus. La fortune des Richelieu était, d'ailleurs, grevée de charges spéciales. La famille s'était laissée entraîner à des dépenses de faste hors de proportion avec ses ressources. Le service des rais avait commencé une ruine que le paroistre de la cour et des spéculations imprudentes avaient précipitée. On devait un peu à tout le monde, à la famille, aux amis. Une première dette très lourde avait été contractée, en février 1551, à l'égard de la grand-mère, Françoise de Rochechouart. A cette date, transigeant avec ses propres enfants, elle avait reçu comme remploi de son douaire, montant à 10.000 livres, les terres et seigneurie de Richelieu, Neuville, les dîmes de Faye et autres droits qui en dépendaient, et, en outre, la maison et le domaine de la Vervolière avec leurs dépendances. C'était le plus clair de la fortune patrimoniale et assurément, Françoise de Rochechouart garda. cette garantie jusqu'à sa mort[79]. Nous savons également qu'on devait une somme de deux mille livres à dame Françoise du Plessis, sœur du grand prévôt. En 1610, Suzanne de la Porte, pour payer cette dette, abandonne à son fils aîné, devenu héritier de sa tante, la seigneurie, maison et hôtel de Châteauneuf consistant en maison seigneuriale, cour et forteresse à part, fermés de haute muraille... et en outre, les métairie, grange, étables, toits à bêtes, etc. Cet acte nous permet d'évaluer l'importance réelle d'un des principaux domaines de la famille[80]. Quand le fils aîné de Suzanne de la Porte, Henri du Plessis, vint à l'âge d'homme, il réclama sa part de l'héritage paternel. En vertu de la coutume particulière de la baronnie de Faye-la-Vineuse, dont Richelieu n'était qu'une seigneurie, le préciput de l'aîné se bornait au vol du chapon[81]. Chacun des enfants entrait donc pour sa part dans la propriété ; c'était encore une cause de démembrement qui, jointe à tant d'autres, explique la pénurie relative dans laquelle se trouvait, à la fin du XVIe siècle, malgré une série de si beaux mariages, la branche des du Plessis de Richelieu. Pour en finir avec ces questions d'argent, il suffira d'ajouter que Henri IV n'était pas resté dans l'ignorance de cette situation pénible : Quand ses serviteurs mouraient devant que d'avoir récompense, dit Fontenay-Mareuil, il la donnoit à leurs héritiers, comme il se vit eu ceux du grand prévôt de Richelieu qui laissa sa maison fort endettée et ses affaires en un mauvais état, donnant plusieurs bénéfices à son second fils, lequel les ayant quittés pour se faire chartreux, il les redonna au troisième qui a été depuis le Cardinal de Richelieu ; et quant au fils ainé, il eut douze cents écus de pension dès qu'il fut en âge de venir à la cour[82]. Les documents nous apprennent, en effet, que le 26 janvier 1593, le conseil d'État rendit un arrêt réglant l'acquit d'une somme de 20.000 livres due à Suzanne de la Porte, veuve du sieur de Richelieu, grand prévôt de France[83]. En 1594, dans un état des certifications qui ont été signées par M. de Beaulieu-Ruzé, on lit : à Madame de Richelieu, pour récompense de l'abbaye de Saint-Urbain, 15.000 livres[84]. Sur l'état des pensions du roi, pour l'année 1608, M. de Richelieu, c'est-à-dire Henri du Plessis, l'aîné des fils du grand prévôt est inscrit pour 3.000 livres[85]. On peut considérer enfin comme une preuve de la sollicitude du roi, le soin qu'on prit de laisser l'évêché de Luçon sans titulaire effectif, jusqu'à ce que les jeunes fils de Mme de Richelieu fussent arrivés à l'âge d'homme. La famille conserva ainsi la jouissance des revenus dont l'administration fut confiée au chapelain de Richelieu. Grâce à ces divers secours, la veuve du grand prévôt put mener à bonne fin la double tâche qu'elle avait si vaillamment assumée. Il faut essayer maintenant de se représenter la vie que menait, à la fin du XVIe siècle, au fond d'une province désolée, la famille que dominait l'altière Françoise de Rochechouart, et sur laquelle s'inclinait la gracieuse et touchante Suzanne de la Porte. On habitait généralement le château de Richelieu. Au milieu d'une plaine grasse, fertile, laissant la vue s'étendre au loin sur un horizon plat, les eaux du Mable, affluent de la Vende, déterminent un îlot carré d'environ cent mètres de côté. Sur cet îlot, s'élevait le manoir. La terre et seigneurie avaient appartenu originairement aux Mausson, ancienne famille du voisinage. En 1201, un Mausson, avait obtenu, de l'abbé de Saint-Cyprien de Poitiers, la permission de construire une chapelle dans la paroisse de Braye, à l'endroit appelé Dives Locus. On trouve cette chapelle mentionnée plusieurs fois sous le nom de Richeloc, Rikeloc, puis Richelieu[86]. Les Mausson, de très bonne heure, avaient trouvé ce séjour agréable et y avaient fait construire un château. Or, une fille des Mausson, Gilette, avait épousé, dans les premières années du XVe siècle, Jean Clérembault, et lui avait transféré la propriété de ce domaine[87]. Jean et Gilette, sa femme, eurent pour fils Louis et pour fille Perrine, qui épousa Geoffroy du Plessis[88]. Louis Clérembault, héritier de son père et de sa mère, reçut Richelieu dans le partage ; mais comme il n'eut pas d'enfant, il le laissa par testament à son neveu, François du Plessis, sieur de la Vervolière. Ainsi des Mausson aux Clérembault, et des Clérembault aux du Plessis, le domaine de Richelieu était venu aux ancêtres du cardinal. Mais les Clérembault l'avaient singulièrement transformé. Jean Clérembault, avait obtenu, en 1429, l'autorisation de bâtir un château auprès de l'antique chapelle, et de le fortifier. On était en pleine guerre de Cent ans. Tout le pays se hérissait de forteresses. Les architectes munirent Richelieu aussi solidement que le permettait la disposition des lieux. Ce furent eux qui dérivèrent les eaux du Mable et qui aménagèrent les belles douves qui marquent. encore aujourd'hui l'emplacement de l'ancien manoir. Celui-ci était bâti en pierres de taille, couvert en ardoises, entouré de beaux jardins et d'un grand parc aux avenues bien plantées. Sur la façade du nord se trouvaient la chapelle et la grande salle où se tenait habituellement la famille[89]. Non loin, on montrait la chambre où, selon la tradition, avait été conçu le futur cardinal[90]. Les souvenirs de l'enfance passée dans ce vieux castel étaient restés bien vifs pour lui. Quand, parvenu au comble de la puissance et de la richesse, il résolut de faire construire, dans son pays même, un château cligne de sa gloire, il ne voulut rien changer ni à l'emplacement ni A la disposition générale de l'édifice. Il imposa à son architecte, Jacques le Mercier, un plan qui respectait, le plus possible, la forme intérieure de l'ancienne demeure. On dut, sur sa volonté expresse, conserver notamment la chapelle, la grande salle et la chambre qu'avait habitée sa mère. Ses contemporains lui reprochèrent même d'avoir gâté la belle ordonnance du plan de le Mercier. Ce sentiment qu'ils considéraient comme un trait de vanité n'était, peut-être, qu'un souvenir touchant[91]. C'est donc dans cette rude demeure qui, construite on pleine guerre de Cent ans, retrouvait tout son usage à la fin du XVIe siècle, c'est dans ce vieux château que s'écoulèrent les années d'enfance d'Armand du Plessis. Dès cette époque, le domaine de Richelieu présentait un luxe réel : celui des jardins et des plantations. Le pays est fertile et naturellement fleuri. Des bois assez bien plantés montaient vers les collines et s'étendaient jusqu'à Mausson, jusqu'à Braye[92]. Braye était la paroisse de Richelieu. Le vieux clocher de pierre du modeste village émergeait du bois à quelque cent mètres. Il est resté aujourd'hui tel que le vit l'enfance du futur cardinal. Le curé de Braye était le chapelain de Suzanne de la Porte ; il venait à pied, au château, célébrer l'office. Dans la crypte de son église reposaient les corps des Clérembault et des Richelieu, depuis qu'ils étaient venus s'établir en Touraine[93]. A mi-côte de la colline, dans la direction de Faye-la-Vineuse, se trouvait Mousson, château plus ancien que Richelieu, mieux situé sur une motte assez forte. Les du Plessis, après une longue lutte, l'avaient emporté sur les Mausson. Ils avaient acquis le domaine de leurs anciens rivaux ; leur rancune persistante allait bientôt le démolir et n'en laisser que quelques ruines insignifiantes. Au pied de Richelieu même, passait la route de Chinon à Châtellerault, seule voie de communication le rattachant au reste du inonde. Suivant le cours de la Veude, puis du Mable, elle venait de Champigny, ce fameux et fastueux Champigny qui appartenait aux Montpensier et dont la proximité écrasante fut pour les Richelieu un objet de déférence, puis d'envie, jusqu'au jour où le fils de la petite famille vassale acheta le grand palais princier, le rasa, comme on avait fait de Mausson, et employa les pierres à la construction d'un autre château plus riche encore[94]. Au sud, la route de Châtellerault se dirigeait vers le village ou plutôt la villette de Faye-la-Vineuse. Richelieu dépendait de cette châtellenie. Faye était le véritable centre d'approvisionnement de la région. Grimpée fort joliment sur le haut des collines crayeuses qui dominent de loin Richelieu, elle offrait aux regards son enceinte fortifiée, l'ensemble pittoresque de ses toits serrés les uns contre les autres, et ses trois clochers pointus. Du château de Richelieu, en face vers le couchant, ou apercevait la fumée des chaumières de l'humble village de Poilant. Mais il fallait grimper sur les collines qui entourent la. vallée, pour distinguer, dans cette même direction, le donjon de Loudun, profilant sa masse robuste et carrée, à une distance d'environ quatre lieues. Chinon, l'Île-Bouchard, la Hoche-du-Maine, Champigny-sur-Vende, Fontevrault, au nord ; Loudun, Thouars, Montcontour, à l'ouest ; Mont-sur-Guesne, Mirebeau, Lencloître, Châtellerault, au sud ; la Guerche, la Haye-Descartes, Sainte-Maure, sur la route de Paris, à l'est ; telles étaient les principales villes et les plus importants châteaux du voisinage, ceux dont les noms durent frapper pour la première fois les oreilles des enfants de Suzanne de la Porte. Tours au nord, Poitiers an midi, étaient les cieux capitales qui se disputaient la souveraineté de cette région intermédiaire. L'évêque résidait à Poitiers ; mais les impôts se payaient à Tours. On disait à Draye, en manière de proverbe : Nous sommes du bon Dieu de Poitiers et du diable d'Angers. La clame de Richelieu vivait confinée dans son château. C'est à peine si elle sortait de chez elle pour aller dans sa propre famille, à Parthenay, à la Meilleraye où, au dire d'un contemporain, elle eût trouvé bonne compagnie. Les chemins n'étaient pas sûrs et, pour bien des raisons, on n'avait pas le cœur au divertissement. Durant toute cette fin du XVIe siècle, les malheurs publics s'ajoutaient aux malheurs privés et les aggravaient. Il y avait treille ans, pour le moins, que cette région n'avait pas respiré. Restée catholique, mais prise dans le triangle protestant de la Rochelle, Châtellerault, Saumur, elle était le continuel lieu de passage et de rencontre des troupes des deux partis. Tous les genres d'horreurs, suites d'une guerre civile dans laquelle chaque village, chaque famille avait dû prendre parti, pesaient sur elle. Les personnes âgées pouvaient raconter aux nouveaux venus les premiers progrès des hérétiques, les prédications secrètes de Calvin dans les grottes de Croutelles, les premiers psaumes, les premiers massacres. Puis, c'étaient les grands sièges de Poitiers, en 1562 et en 1569, où les deux capitaines du nom de Richelieu s'étaient distingués par leurs exploits et par leur cruauté ; puis les diverses fortunes du château de Lusignan, sur les ruines récentes duquel planait le souvenir de la fée Mélusine ; puis les grandes batailles de Jarnac et de Montcontour, dont la canonnade, entendue de loin, retentissait encore dans les cœurs[95]. Au lendemain de Montcontour, l'amiral de Coligny était venu camper à Faye-la-Vineuse. Ses troupes y avaient commis les plus effroyables excès. tin champ voisin de Faye s'appelle la Plaine des morts et l'on dit que c'est en souvenir d'un combat d'arrière-garde qui fut livré à cet endroit même. Les troupes de Coligny y auraient été vaincues par les troupes royales, et les fuyards massacrés par les paysans exaspérés. Jusqu'a la fin du siècle, la contrée souffre tout ce que
ce genre de guerre réserve de misères aux gens du
plat pays. C'est un perpétuel mouvement de troupes, de pionniers, de
voituriers, du marchands d'armée ; ce sont les levées promptes des hommes
d'armes, les courts séjours des maris et des pères, les continuelles alertes,
la guerre et l'embuscade de bourg à bourg, de château à château, de maison à
maison. En ce temps-là, écrit un contemporain,
sous l'année 1574, n'étoit question que de
briganderie, de manière que personne n'osoit se mettre en chemin. Deux
ans après : En ce temps-là, écrit-il encore, l'on disoit que les communes de Gascogne, d'Agenois, de
Quercy et à u pays de Périgord s'étaient levées, avoient pris les armes et
avoient pour devise : Nous sommes las !
Nous sommes las, c'est le cri qui sort
de toutes les poitrines. En 1575, les gens de Poitiers jetaient leurs
plaintes vers le roi : Les huguenots n'ont cessé de
piller et ravager notre province du Poitou trop voisine, hélas ! de leur
retraite. Pour les soldats qui viennent à notre défense, entre l'ami et
l'ennemi, aux déportements de l'un et de l'autre, nous ne connoissons point
de différence. En effet, les soldats réguliers, mal payés, se débandaient et, par troupes de quarante ou cinquante, allaient par le pays, escaladant les châteaux mal gardés, forçant les villages et les fermes, pillant, violant, tuant. En 1585, l'année de la naissance de Richelieu, le peuple des environs de Poitiers quitte les campagnes et se réfugie dans les villes, emportant tout ce qu'il peut, pour échapper aux passages des gens de guerre, et les gentilshommes mêmes quittaient leurs maisons. En 1586, les horreurs de la peste se joignent à celles de la guerre et les habitants de ces contrées, de deux maux, forcés de choisir le moindre, sortent des villes pour habiter les campagnes, malgré le grand nombre des brigands de ce temps. L'avènement de Henri IV ne change rien aux choses. Après avoir hésité quelque temps, Poitiers s'était jeté dans la Ligue. Les protestants devenus royalistes rôdent sans cesse autour de cette ville, essayant de la surprendre. On se bat à Saint-Savin, à Chauvigny, à la Rocheposay, à la Guerche, Mirebeau. En 1591, Poitiers est, assiégé une fois encore. En 1593, Faye-la-Vineuse est pris par un corps de troupes que commandaient les capitaines de Coulanges, Landrian et Le Courbe. La ville fut livrée au pillage et à l'incendie, les hommes tués, les femmes violées, l'église mise à sac. Les chefs de la bande ne consentirent à se retirer qu'après avoir reçu une rançon de 950 écus qui furent versés grâce à la générosité d'une dame dont le nom est resté populaire dans le pays : Bricette Champeigne. Enfin, en 1594, Poitiers rentre dans le devoir et se rend au roi[96]. Mais ce n'est pas fini encore. Les ligueurs du Poitou appellent à leur secours les gens de l'Anjou et de la Bretagne, qui obéissent au duc de Mercœur ; Italiens, Espagnols, Albanais, aventuriers de toutes races et de tous pays, forment le gros de ces renforts. On peut penser ce qu'ils font endurer à des contrées qui, quel que soit le parti, sont toujours pour eux pays conquis : Le duc de Mercœur, faisant sa demeure à Nantes, étoit enfin demeuré chef du parti ligueur, et particulièrement en Bretagne, Anjou et Poitou... Son parti prenoit, comme il pouvoit, maisons, châteaux, et si il y avoit des fossés seulement autour, ledit sieur de Mercœur y mettoit garnison ; par le moyen desquels il levoit des tailles au plus loin qu'il se ponvoit étendre, faisoit contribuer de tous côtés, et lesdites garnisons voloient et pilloient partout... En 1597, l'hôtel de ville de Loudun délibère encore sur les moyens de résister aux ravages, pilleries et exactions de la garnison qui est dans la ville de Mirebeau. Il ne fallut pas moins que la constitution d'une sorte de gendarmerie volontaire, enrôlée, sur l'ordre du roi, parmi les nobles de la province, pour venir à bout des coureurs, des bandeurs, selon le mot du temps, que la Ligue, même désorganisée, avait laissés derrière elle[97]. Ces traits suffisent pour faire connaître l'état de la province où était situé le château de Richelieu, entre 1585 et 1595. On peut imaginer l'isolement, les terreurs muettes des femmes et des enfants, l'appréhension des voisinages ennemis, les familiers mêmes et les serviteurs suspects, les ponts levés à la moindre alerte, les longues nuits sans sommeil ou les réveils en sursaut avec des bruits d'attaque au pied des murs et des lueurs d'incendie sur l'horizon. Il faut joindre à tant de causes de tristesse, les difficultés domestiques, le souvenir des grandeurs passées, les espérances déçues, l'inquiétude de l'avenir et jusqu'au mirage d'on ne savait quel retour de fortune qui viendrait, un jour, de lit-bas, de Paris, de ces rois qu'on avait servis si fidèlement et qui, peut-être, n'avaient pas pour toujours oublié. Nous savons que Françoise de Rochechouart ne mourut qu'après 1595. On peut supposer- que le contact continuel avec une femme d'un âge, d'un rang et d'un caractère tout différents du sien, fut pénible pour Suzanne de la Porte. Richelieu lui-même, dans une lettre écrite au moment de la mort de sa mère, dit qu'elle avait éprouvé en ce inonde nombre de traverses, d'afflictions et d'amertumes. Ce dernier mot parait bien s'appliquer à des chagrins domestiques. Une autre femme vivait à Richelieu, c'était Françoise du Plessis, dame de Marconnay, veuve de messire Pierre Frétart, chevalier de Saulve et Primery, belle-sœur de Madame de Richelieu. Elle était la compagne habituelle des enfants et se rendait populaire parmi les gens du pays. Elle laissa toute sa fortune au fils aîné de Madame de Richelieu, Henri du Plessis. On recevait au château la visite de quelques parents. Tout d'abord, le grand-oncle des enfants, Jacques du Plessis, évêque de Luçon à partir de 1584, mort seulement en 1592, et qui avait été le tuteur du père de Richelieu. Il aidait Suzanne de la Porte dans la gestion de sa fortune. Elle parait s'ètrc confiée surtout à son propre frère, Amador de La Porte, homme de haut mérite, vif d'esprit et de caractère, appelé à jouer plus tard un rôle important près de son neveu qu'il avait su deviner[98]. C'est encore dans sa famille propre, que Madame de Richelieu rencontre un autre conseiller et confident, M. Dupont de Saint-Bonnet. C'est à lui qu'elle raconte ses inquiétudes sur la santé de ses enfants. qu'elle parle tendrement de son aîné qui s'est démis une épaule en tombant du cheval ; de son pauvre chartreux qu'elle espéroit voir, mais Dieu en a disposé autrement ; de son malade enfin (c'est le futur cardinal) toujours tourmenté de ses fièvres dont elle souhaite si vivement pour lui une heureuse délivrance[99]. Enfin un ami intime de François de La Porte, l'avocat Denys Bouthillier, restait, à Paris, le fidèle correspondant et le défenseur utile de la fille de son collègue. Aussi loin que l'on remonte dans la vie du cardinal, on rencontre le nom des Bouthillier[100]. Les actes de la paroisse de Brave nous ont conservé quelque trace de la présence des seigneurs de Richelieu dans le pays. Ils tenaient fréquemment sur les fonts baptimaux les enfans de leurs paysans. On garde aujourd'hui, dans l'humidité d'une mairie délabrée, ces papiers rongés parle temps, où les fils de Madame de Richelieu ont, il y a trois cents ans, écrit, d'une plume incertaine, leurs premières signatures. Les premiers de ces actes de baptême sont de 1592. Les noms des divers membres de la famille se rencontrent assez fréquemment, en 1592 et 1593. Ils disparaissent de 1593 à 1595, comme si, dans cette période, Mme de Richelieu et les siens s'étaient éloignés ; puis le nom de Henri du Plessis, celui de la tante Françoise, de la petite sœur Nicole, se retrouvent. On voit même mentionnée une Rose du Plessis dont c'est la seule trace relevée jusqu'ici. De 1596 à 1600, pas une seule mention des garçons. Ils sont à Paris où ils font leurs études. Le 21 juin 1600, Henri du Plessis est parrain du fils d'un des domestiques, Jacques du Carroy ; sa mère et sa sœur Nicole sont les marraines. Nous retrouvons les signatures de Nicole et de la tante Marconnay jusqu'en février 1611 où le registre mentionne la mort de cette dernière, qui fut inhumée à Saulve. Le nom d'Armand-Jean du Plessis, le futur cardinal, ne figure pas une seule fois sur ces actes. Madame de Richelieu y est nommée une fois encore ; c'est
pour la mention de sa mort : Le 14e de novembre
1616, environ sur les dix heures du matin, est allée de vie à trépas noble
dame Suzanne de La Porte, dame de Richelieu. — Le 8e dudit mois et an de décembre de 1616 a été faite l'obsèque de
défunte noble dame Suzanne de La Porte, dame de Richelieu. Cependant, les enfants ont grandi. Henri du Plessis, l'aîné, s'est marié avec Marguerite Guiot des Charmeaux. Ils ont un enfant. Les registres de Braye parlent encore : Le 14e octobre 1618 est né François-Louis du Plessis, fils de Henri du Plessis, seigneur de Richelieu et de Dame Marguerite Guiot, lequel a été baptisé par moi, curé de Braye, le 21e dudit mois audit an, et fut nommé en la chapelle de Richelieu, par pauvres orphelins, qui sont Louis Fouré et Jehanne Thomas, assistés de dix autres pauvres et lui donnèrent le nom de François-Louis[101]. Mais la mère meurt, en donnant le jour à cet enfant. Le 15e jour d'octobre trépassa dame Marguerite Guiot, dame de Richelieu, laquelle a été administrée des saints-sacrements et assistée par moi, curé, et le 19e dudit mois et an fut porté le corps en l'église de Braye en laquelle fut fait service et assisté tant à la conduite dudit corps que service, M. le Prieur, messire Vincent, M. le curé de Sablon, M. le vicaire de Chantraut et Jean Angeleaume, sacristain. L'enfant suit bientôt la mère : Le 8e décembre 1618, le corps de défunt Louis du Plessis, ci-dessus nommé, a été porté du châtel de Richelieu en l'église de Braye... Enfin le père ne tarde pas à rejoindre, dans le caveau de la famille, sa mère, sa femme et son fils. Il fut tué en duel, comme nous le verrons par la suite : Le 22e juillet 1619, a été faite l'obsèque du corps de défunt messire Henri du Plessis, en son vivant seigneur de Richelieu, Mausson, Primery, le Chillon, la Vervolière. C'est la dernière mention concernant les enfants de Mme de Richelieu. Les autres ont quitté le pays pour suivre la fortune de leur frère le plus illustre. Les ossements de la famille ont reposé dans l'église de Braye jusqu'à la Révolution française. A cette époque, les caveaux furent ouverts, violés, les cendres jetées au vent. Il ne reste, aujourd'hui, aucune trace du tombeau, pas une pierre, pas une inscription. Récemment, le caveau a été visité par le curé de la paroisse, assisté de deux médecins. On n'a rien trouvé qu'un ossement d'enfant. |
[1] Je dois citer ici un certain nombre d'ouvrages dont j'ai fait un usage constant et auxquels la présente note me dispensera de renvoyer continuellement au cours des pages qui vont suivre : ce sont d'abord les ouvrages émanant directement du cardinal de Richelieu, c'est-à-dire : Les Mémoires du CARDINAL DE RICHELIEU, publiés en entier, pour la première fois, dans la Collection Petitot et que je cite d'après les trois volumes in-4° de la Collection Michaud et Poujoulat ; — Le Testament politique du CARDINAL DE RICHELIEU (édit. de FONCEMAGNE, 2 vol. in-8°, 1761) ; — l'admirable Recueil des lettres, instructions diplomatiques et papiers d'État du CARDINAL DE RICHELIEU, publié par M. AVENEL dans la Collection des Documents Inédits de l'Histoire de France, 1853-1877, 8 vol. in-4°. Cette publication a singulièrement facilité la tâche de tout historien du cardinal. La mémoire du savant éditeur est désormais liée à la gloire de l'homme d'État. — Enfin les Maximes d'État et Fragments politiques du CARDINAL DE RICHELIEU, publiés par G. HANOTAUX dans cette même Collection (Mélanges, t. III, p. 707-S22). — Viennent ensuite les publications des érudits du dix-septième et du dix-huitième siècle : L'Histoire du cardinal de Richelieu, par le sieur AUBERY, advocat au Parlement et aux Conseils du Roy. Paris, 1660, (Cet écrivain a travaillé sur des mémoires fournis par Mme d'Aiguillon, nièce du Cardinal) ; du même auteur, les Mémoires pour l'Histoire du cardinal-duc de Richelieu, Paris, Antoine Berthier, 1660, 2 vol. in-f°. — La Vie du cardinal-duc de Richelieu, par M. LE CLERC, Amsterdam, 1753, 5 vol. in-12°. — L'Histoire du règne de Louis XIII, par Michel Le Vassor, Amsterdam, 1757, 7 vol. in-4°. — L'Histoire du règne de Louis XIII, par le P. GRIFFET, de la Compagnie de Jésus, Paris, 1758, 3 vol. in-8° ; enfin l'Histoire de France sous Louis XIII et sous le ministère de Mazarin, par A. BAZIN, 1816, 4 vol. in-8°.
En ce qui concerne plus particulièrement la jeunesse de Richelieu, je citerai encore : le précieux petit ouvrage de l'abbé de Pure que personne n'avait consulté jusqu'ici : Vita eminentissimi cardinalis d. J. Richelii, par A. M. D. P. ; — une intéressante notice sur la Jeunesse de Richelieu, par M. AVENEL dans la Revue des Questions historiques, année 1869 ; — les travaux de M. de la FONTENELLE-VAUDORÉ et notamment son Histoire du monastère et des évêques de Luçon, Fontenay-le-Comte, 1847. 2 vol. in-8° ; — les études de M. MARTINEAU qui seront citées ci-dessous plus en détail, etc. — Les chapitres du présent ouvrage consacrés à la jeunesse de Richelieu ont paru dans la Revue des Deux-Mondes (n° de juillet et août 1889). Depuis lors, M. l'abbé LACROIX a publié un volume intitulé Richelieu à Luçon, sa jeunesse, son épiscopat, Paris, Le Touzey et Ané, 1890, in-8°.
Voilà pour les principaux travaux imprimés. Je dois ajouter que j'ai fait des recherches dans les grandes collections de manuscrits de Paris et de la province, notamment aux Archives nationales ; aux Archives du ministère des Affaires Étrangères qui réserveront longtemps encore des surprises aux curieux ; aux Archives du Ministère de la Guerre ; à la Bibliothèque Nationale ; à la Bibliothèque de l'Arsenal ; au fonds Godefroy. (Bibliothèque de l'Institut). — J'ai également visité les archives de l'Indre et de la Vienne et j'y ai trouvé plus d'un renseignement inédit. J'ai consulté, à Poitiers, le fonds de DOM FONTENEAU, éclairé par l'obligeante érudition de M. A. LIÈVRE, les archives de Richelieu et celles du village de Braye. Enfin j'ai trouvé quelques renseignements inédits chez M. Poirier à Faye-la-Vineuse et auprès de M. Oreillard, maire de Richelieu.
[2] Il faut écarter l'étymologie proposée par DURANCE : domus suburbana, maison de plaisir, a placendo dicta, et accepter celle de SCALIGER : Josephus Scaliger Plessii sepem esse ait seu plicationem lignei ita ut Pleissicium sit locus palis seu virgulis implexis conclusus. Le plessis est ce qu'on appelle dans d'autres parties de la France, clos, palis ; et aussi, parait-il, tousche ; Bois en plessis, que les anciens appellent Tousche ; Bois de Tousche, arboreta, quæ circa domum principalem consila sunt ad ejus ornatum, vet quibus cingitur ac clauditur. DUCANGE, v° Plesseicium.
[3] Le nom de Plessis est très répandu dans toute la France et particulièrement en Poitou. Il est assez difficile de ne pas confondre les différentes familles qui l'ont porté. Les écrivains qui ont travaillé pour le cardinal de Richelieu ont pu profiter de ces confusions trop faciles pour ajouter quelques rameaux illustres à l'arbre généalogique du cardinal-ministre. — Le Plessis près Néon (aujourd'hui Néons-sur-Creuse, canton de Tournon-Saint-Martin, arrondissement du Blanc) formait une seigneurie qui était tenue à foi et hommage de l'évêché de Poitiers. à cause de la baronnie et châtellenie d'Angles dont elle relevait. On voit, dans un acte de 1505, que la métairie du Plessis distincte, il est vrai, de la maison d'habitation, mais qui en formait probablement tout le revenu, contenait seulement le labourage de deux à trois jougs de bœuf ; c'est bien peu de chose. (Bulletin de la Société des antiquaires de l'Ouest, 2e trimestre de 1865, page 100). Le Plessis resta la propriété de la branche aînée des du Plessis, jusqu'au dix-septième siècle, où il passa par alliance entre les mains des de Graillé.
[4] MARTINEAU, Bulletin de la Société des antiquaires de l'Ouest (2e semestre de 1865, p. 82).
[5] Voir Histoire généalogique de la maison du Plessis de Richelieu justifiée par titres, histoires et autres bonnes preuves, par ANDRÉ DUCHESNE, Tourangeau, géographe du Roy, 1631, in-f°. Ce livre a été écrit sous les yeux du Cardinal. Il a donc l'autorité d'un témoignage direct nous faisant connaître les traditions et les preuves, mais peut-être aussi les prétentions de la famille. Malgré l'autorité d'ANDRÉ DUCHESNE, les adversaires de Richelieu ont suspecté sa bonne foi. L'auteur de la Cordonnière de Loudun, MATHIEU DE MOURGUES, GUY PATIN, l'auteur de la Milliade, ont refusé toute ancienneté à la famille de Richelieu. Au dix-huitième sicle, il existait dans les papiers de l'érudit SECOUSSE, un prétendu Extrait d'un mémoire manuscrit d'ANDRÉ DUCHESNE sur l'origine des maisons de la Porte-la-Meilleraye, Duplessis de Richelieu et de Vignerot du Pont-de-Courlay duquel il résultait que la famille de Richelieu descendait d'un apothicaire d'Angles, nommé Pierre de Genouillac. ANDRÉ DUCHESNE aurait établi cette véritable généalogie pour séparer l'acte de servilisme qu'il avait commis en publiant son Histoire généalogique, et l'aurait communiquée à un certain M. Auzanet, célèbre avocat du parlement de Paris. Le manuscrit provenant de Secousse est actuellement entre les mains de M. Champion, libraire, qui a bien voulu me le communiquer. Il contient également une étude d'AMELOT DE LA HOUSSAYE intitulée Mémoires secrets pour servir de supplément à l'histoire de la vie et du ministère du cardinal de Richelieu. V. aussi la note que cet auteur a insérée dans sa traduction de Tacite (édit. 1716, t. III, p. 317). — De cet ensemble de documents on a tiré les trois généalogies qui ont été imprimées par M. TASCHEREAU dans la Revue rétrospective et reproduites par M. MARTINEAU (éd. 1870, p. 80). Je ne puis entrer ici dans la discussion de ces documents ; il me suffira de dire que les renseignements qu'ils contiennent ne concordent en rien avec les faits et les dates résultant de titres authentiques et que leur attribution à ANDRÉ DUCHESNE me paraît aussi injurieuse pour la science que pour l'honnêteté de cet illustre érudit. — ABEL DE SAINTE-MARTHE a publié dans le Recueil de ses œuvres et de celles de son père (Paris, 1633, in-4°) un Elogium illustrissimæ gentis Plessiæ Richeliæ, qui ne contient aucun détail nouveau.
[6] Les Breux étaient un domaine situé dans la baronnie d'Angles (actuellement département de la Vienne, arrondissement de Montmorillon, canton de Saint-Savin). Au début du seizième siècle, la métairie était considérée comme valant quatre à cinq jougs de bœuf. Ce domaine resta, jusqu'au dix-septième, la propriété de la branche aînée de la famille du Plessis, qui est généralement qualifiée du Plessis-des-Breux.
[7] La Vervolière, châtellenie du Châtelleraudais, relevait de Preuilly. Elle resta dans la famille des du Plessis-Richelieu (branche cadette) jusqu'au temps du Cardinal, qui la céda, par voie d'échange, à la duchesse d'Orléans. Cette propriété appartenait, en 1860, à M. de la Rochejacquelein, du chef de sa femme, née de Coussay. (V. Histoire de Châtellerauld et du Châtelleraudais, par M. l'abbé LALANNE, curé d'Oiré, Châtellerauld, 1859, 2 vol. in-8°, t. Ier, p. 530). Les Richelieu se plaisaient à la Vervolière et y habitaient souvent. Châtillon nous a laissé une jolie figure du château tel qu'il existait de son temps, vers la fin du seizième siècle.
[8] Il est fréquemment question de la maison d'Angles dans les actes passés par la famille, et cela jusqu'au dix-huitième siècle. — Angles-sur-Anglin (aujourd'hui 1374 habitants, canton de Saint-Savin, arrondissement de Montmorillon, département de la Vienne). Le pays environnant est fertile et abondant : on est en Poitou et non plus dans la Marche. Il y avait, au bourg d'Angles, une abbaye de l'ordre de Saint-Augustin qui valait, au dix-huitième siècle, 2.000 livres de rente. Elle avait été fondée, disait-on, au huitième siècle et construite au douzième. On voit encore à Angles une belle église romane, les ruines du château qui appartenait aux évêques de Poitiers et les ruines de l'abbaye. Cette petite ville a donné naissance au cardinal la Balue et on peut la considérer comme le point de départ de la famille de Richelieu.
[9] La démonstration qu'ANDRÉ DUCHESNE prétend faire de la parenté de ce Jean du Plessis avec Guillaume est des plus faibles. Tout ce qu'on peut dire c'est que, vers le milieu du treizième siècle, un gentilhomme poitevin, nommé Jean du Plessis, passa en Angleterre à la suite de Gui de Lusignan.
[10] On n'a aucune raison sérieuse de penser que ce Laurent du Plessis, gentilhomme poitevin, faisait partie de la famille du Plessis des Breux. Encore une fois, il y avait plusieurs familles de ce nom dans le bas-Poitou. Cependant on ne peut non plus rejeter sans preuve la tradition dont A. DUCHESNE se fait l'écho. Les du Plessis avaient pu s'attacher à la fortune d'un des seigneurs les plus importants de la contrée.
[11] ANDRÉ DUCHESNE (op. cit., p. 21).
[12] Voir le procès-verbal publié par M. MARTINEAU dans Bulletin de la Société des antiquaires de l'Ouest (loc. cit., p. 82).
[13] Coussay-les-Bois, paroisse du Châtelleraudais, un peu au nord de la Rocheposay, actuellement canton de Pleumartin.
[14] Leigné-lès-Bois, paroisse de la même région, un peu plus à l'est, vers Châtelleraud.
[15] Peut-être Paizé-le-Sec, près de Chauvigny (Vienne).
[16] La Valinière est une dépendance de Neuilly-le-Noble ou Neuilly-le-Brignon, actuellement canton de la Haye-Descartes, en Touraine.
[17] La Haye-Descartes, sur la Creuse, bourg important de l'arrondissement de Loches, patrie du célèbre philosophe. Le séjour des ancêtres de Richelieu dans le pays même de mn illustre contemporain offre un intéressant rapprochement.
[18] Belabre-sur-l'Anglin (actuellement arrondissement du Blanc, département de l'Indre).
[19] Voir les différents actes cités par ANDRÉ DUCHESNE et, notamment la transaction qui intervint entre Sauvage du Plessis, agissant au nom de sa femme, et Jean le Groin, écuyer, frère de celle-ci (p. 25).
[20] Dans une intéressante généalogie des Richelieu, qui fait partie des Mémoires inédits de CHISAY, ces Clérembault sont donnés comme de simples paysans ; mais c'est par erreur. Les preuves de la noblesse des Clérembault du Plessis, résultent des pièces les plus authentiques.
[21] Voir, sur tous ces points, les intéressants travaux de M. MARTINEAU. Il a complété de la manière la plus heureuse, à l'aide des archives locales, les renseignements fournis par ANDRÉ DUCHESNE. Ses recherches relatives à la châtellenie de Richelieu notamment sont des plus complètes. Nous avons de cet auteur : 1° Notice généalogique sur la famille du Plessis-Richelieu dans le Bulletin de la Société des antiquaires de l'Ouest, deuxième trimestre de 1865 (p. 53-148) ; 2° Le Cardinal de Richelieu, par Aimé Martineau, avocat, Poitiers, Létang, 1866, in-8°. Premier volume (seul paru) ; 3° Le même ouvrage, même volume (considérablement remanié), Paris, Librairie internationale, 1870, in-8°.
[22] Les du Plessis des Dreux semblent avoir en bien de la peine à se relever du coup que leur portait la transmission à une branche cadette, des fiefs de la Vervolière, de la Valinière, de la maison d'Angles, etc. Nous voyons, en effet, qu'en 1501, le chef de cette branche ainée, Sauvage du Plessis, fut saisi et tous ses biens mis sous séquestre, pour une somme de cinquante écus d'or qu'il ne pouvait payer. Il mourut sur ces entrefaites, laissant à ses enfants une situation des plus embarrassées. (Archives de Poitiers, dossier du Plessis, liasse 239). Si l'on remarque que les deux branches de la famille du Plessis n'eurent aucun rapport entre elles depuis le quatorzième siècle, on peut être amené à penser que la rivalité entre les deux frères, Pierre et Sauvage, fils de Guillaume, s'était perpétuée traditionnellement, probablement à cause du testament qu'avait fait Guillaume, le père commun des deux branches.
[23] Ce Guyon le Roy, arrière-grand-père de Richelieu, était un homme considérable et qui serait illustre, si l'histoire n'était pas si oublieuse. Il fonda le port du Havre qui, d'autre part, doit tant au Cardinal. Les statues de ces deux hommes, l'arrière-grand-père et le petit-fils, devraient se trouver à l'entrée du port. V. BORÉLY, Origine et fondation de la ville du Havre, dans la Revue Historique (nov.-déc. 1880, p. 296).
[24] V. le Dictionnaire de MORÉRI, verbo le Roy-Chavigny.
[25] Voir, dans Gallia Christiana, Ecclesia Bituricensis (t. II, p. 98), le récit de l'élection et du gouvernement de Jacques le Roy, rumine abbé de Saint-Florent de Saumur. Son élection est d'octobre 1818, deux ans après à Concordat. C'est le moment où se lit la transition entre l'ancien système et le nouveau. Jacques le Roy se comporta très habilement et sut se faire à la fois élire par les moines et accepter par le roi. (Cf. Bibl. Nat., Cab. des Mss., f. fr., n° 19.862 : f° 414-420.)
[26] Renatus du Plessis, filius Francisci II, domini de Richelieu et Annæ le Roy, dominæ du Chillou, Casæ Dei monachus et prior de Coussay, erat abbas Niolii, die 15 sept. anni 1564, ex charta authentica regiæ biblioth. (Gallia chrisitana, p. 12). Jacobus du Plessis de Richelieu, abbas Niolii circa 1580. Gallia Christiana (t. II, col. 1395). — V. aussi Histoire de l'abbaye de Nieuil-sur-l'Autize, par CH. ARNAULD, Niort, Clouzot, in-8° (p. 24). — Cf. Histoire du monastère et des évêques de Luçon, par A.-D. DE LA FONTENELLE DE VAUDORÉ, Fontenay-le-Comte, 1847 (t. I, p. 333).
[27] Sur du Plessis-Pilon, sieur de la Jabinière, voir ANDRÉ DUCHESNE, loc. cit., p. 53. — DE THOU, lib. XVII, édit. Francfort, in-8° (t. I, p. 564). — Histoire des princes de Condé, par le duc D'AUMALE (t. I, p. 245). — MONTLUC, Commentaires, liv. II, édit. 1617 (f° 139 et 163). — BOYVIN DE VILLARS, Mémoires, Collection Michaud et Poujoulat ; — Mémoires de CASTELNAU, édit. le Laboureur, in-f° (t. I, p. 157-161 ; addit., t. I, p. 862). — Le PÈRE ANSELME, Histoire généalogique de la maison de France, etc. (t. IV, p. 366). — MARTINEAU, loc. cit. (p. 34).
[28] Louis de Bourbon, duc de Montpensier, fils de Louis de Bourbon, prince de la Roche-sur-Yon, et de Louise de Bourbon, sueur et héritière du connétable ; vaillant et rude soldat, mais d'esprit borné et ennemi fanatique de l'hérésie, il joua, dans toutes les guerres de religion, le rôle le plus cruel. Il était digne de commander les Enfants Perdus qu'il dirigeait généralement à l'avant-garde. Brantôme raconte de lui des traits qui font frémir. Il disait qu'il faut toujours tuer les protestants. Voir la lettre qu'il écrivit à Guillaume Harouys, sieur de la Seilleraye, à Nantes, au lendemain de la Saint-Barthélemy, dans MELLINET, La Commune et la Milice de Nantes (t. III. p. 255). Même s'il leur avait promis une capitulation, il les faisait égorger, disant qu'on n'est pas tenu de garder la foi aux hérétiques. Si on lui amenait un protestant prisonnier, il lui disait : Vous êtes huguenot, mon ami, je vous recommande à M. Babelot. M. Babelot était un cordelier, fort savant homme, qui ne quittait jamais le duc de Montpensier. Après avoir interrogé le prisonnier, il l'envoyait pendre. Si c'était une femme ou une fille, le duc de Montpensier disait : Je vous recommande à mon guidon ; qu'on la lui mène. Ce guidon était un fort gaillard, dont on devine le rôle. Montpensier fut successivement gouverneur d'Anjou, Touraine et autres, puis lieutenant du roi en Guyenne, Poitou, Aunis, etc. — V. Additions aux Mémoires de CASTELNAU, (p. 800) et BRANTÔME, édit. LALANNE (t. V, p. 1, 25 ).
[29] Voir le procès-verbal de l'enquête faite par le cardinal Caraffa, en 1556-1557, pour relever Antoine du Plessis de ses vœux monastiques, publié par MARTINEAU, op. cit. (p. 38), d'après le Mss. DUPUY (vol. 625, f° 1).
[30] RÉGNIER DE LA PLANCHE, De l'état de la France sous François II. Collect. Buchon ( p. 296). — Le récit de THÉODORE DE BÈZE, dans l'Histoire des Églises réformées de France (édit. de 1882, t. Ier, p. 166), est très complet et prouve que Richelieu le Moine était véritablement l'âme damnée du cardinal de Lorraine. — En juin 1562, Catherine de Médicis écrit au duc de Montpensier : Quant à Tours, je vous prie en vous venant et passant par là regarder d'y laisser quelque honnête gentilhomme pour y commander, auquel vous enchargerez expressément qu'il donne bon ordre, qu'il ne soit fait aucune violence... ni qu'on les recherche pour les choses passées..., vous priant pour la lin que ce ne soit l'oint le capitaine Richelieu pour ce qu'il y a entre eux quelque pique et j'aurais peur que cela fût cause de quelque tiraillerie, dont nous n'avons besoin pour cette heure. Lettres, Collect. Doc. Inédits ( L. I, p. 312). M. HECTOR DE LA FERRIÈRE se trompe en identifiant ce capitaine Richelieu avec celui qui fut tué au Havre. Le passage de RÉGNIER DE LA PLANCHE prouve que c'est du moine qu'il s'agit.
[31] BRANTÔME dit, qu'a l'occasion des guerres civiles, on dut créer trois mestres de camp, tandis qu'il n'y en avait eu qu'un auparavant. Pour l'infanterie furent élus et constitués... le capitaine Sarrabour l'aîné, le capitaine Richelieu l'aîné, qui avait été autrefois lieutenant d'une des couronnelles de M. de Bonnivet en Piémont et gouverneur d'Albe. M. LALANNE, l'éditeur de Brantôme, identifie à tort le capitaine Richelieu avec Louis du Plessis, son neveu, qui fut tué par le sieur de Mausson des Brichetières (t. V, p. 337). BRANTÔME cite encore, parmi les lieutenants de M. de Montpensier, Chavigny, Puigaillard deux très bons capitaines et le capitaine Richelieu qu'on appeloit le moine Richelieu, qui avoient tous fait de très belles preuves de leur valeur autrefois en Piémont. (T. III, p. 13 ; voir encore : p. 405 et 419, et t. IV, p. 73.)
[32] AUGUSTE LIÈVRE, Histoire des protestants du Poitou, Poitiers, 1856, in-8° (t. Ier, p. 123). Cf. Extraits des actes capitulaires de Sainte Radegonde de Poitiers, dans les Mss. de DE FONTENELLE), à la bibliothèque de cette ville. (Vol. 79, f° 143.)
[33] Sa mort est postérieure au mois de juin 1563. Nous avons des détails précis sur une sortie des Anglais, où il joua un rôle important et où il fut blessé, car il avait besoin d'un médecin. Catherine de Médicis lui écrit, à cette date, pour le féliciter et en même temps pour le prier de ménager le sang de ses soldats : Monsieur de Richelieu, j'ai entendu le bon et vaillant devoir que vos bandes ont fait ès deux saillies que les Anglais ont faites... de quoi je me réjouis infiniment espérant que continuerez et, comme j'espère que ferez de mieux en mieux... Quant au médecin et chirurgien que vous m'avez mandé, il y a été donné ordre, comme je vous écrivis par ma dernière lettre. Lettres de CATHERINE DE MÉDICIS. (Coll. doc. inéd., t. I, p. 55). M. DE LA FERRIÈRE identifie ce Richelieu avec Antoine du Plessis, tandis que c'est certainement François, dit Pilon — Voici encore le nom d'un Richelieu mêlé à l'histoire du Havre.
[34] Voir : Lettres de CATHERINE DE MÉDICIS (t. III, p. 80, 91). — Journal de DENIS GÉNÉROUX, publié par M. LUDAIN (p. 116-122). —Cf. Journal de MICHEL LE RICHE, publié par DE LA FONTENELLE DE VAUDORÉ, Saint-Maixent, 1846, in-8° (p. 178). — Mémoires de l'état de la France sous Charles IX, 1578, in-8° (t. III, p. 412). — Archives municipales d'Angers. Registres des conclusions (B. B. 35, f° 39). Les registres d'Angers donnent bien la date d'avril-mai 1576. Or le Journal de l'ESTOILE fait mourir Richelieu le Moine, le 19 janvier 1576. Il y a une erreur d'un côté ou de l'autre ; mais probablement dans le Journal de l'ESTOILE. — Voir aussi MOURIN, La Réforme et la Ligue en Anjou, 1856, in-8° (p. 41 et 137). — BRANTÔME raconte que, lors de son arrivée à la cour, il fut présenté à M. de la Roche du Maine par M. de Richelieu (éd. LALANNE, t. III, p. 405).
[35] Voir MARTINEAU (p. 38).
[36] DE THOU le traite d'homme abandonné à tous les genres de vices et de débauches (lib. XXIV, p. 1108 et lib. XXX, t. II, p. 101). La compilation connue sous le nom de Journal du cardinal de Richelieu (édition 1665, t. II, p. 357), cite une épitaphe de de Thou, dans laquelle il est dit que le cardinal de Richelieu se vengea, sur l'ami de Cinq-Mars, du jugement que le président DE THOU, dans son Histoire, avait porté sur l'un de ses ancêtres. En 1578, le Moine-Richelieu est raillé par D'AUBIGNÉ dans la Confession de Sancy (V. l'ESTOILE, Journal de Henri III (t. IV, page 151 et note, p. 168).
[37] 2 mai 1570. — Reçu donné par Anthoine du Plessis, sieur de Richelieu et chevalier de l'ordre du Roy, d'une somme de 600 livres tournois à lui donnée par maitre Raoul Moreau conseiller du Roy et trésorier de son espargne pour sa pension et entièrement au service du Roy durant la dernière année passée. Signé : A. du Plessis. — 22 janvier 1571. Reçu du même, gentilhomme ordinaire de la chambre du Roy, la somme de 600 livres à lui données par maitre Guillaume Le Jars, conseiller du Roy et trésorier de sa maison, suivant ordonnance royale du 28 octobre 1570, pour ses gages de gentilhomme ordinaire de la chambre durant la dernière année passée. Signé : A. du Plessis. (Bibl. Nat., Cabinet des titres, dossier Du Plessis-Richelieu, 2.302-52.053, pièces 4 et 5).
[38] L'ESTOILE, Mémoires-Journaux. Édition Champollion, etc. 1575 (t. Ier, p. 111).
[39] Il y a quelque doute sur le nombre des enfants de François III du Plessis. Outre Louis, François dit Pilon, Antoine dit le Moine et les deux ecclésiastiques Jacques et René, ANDRÉ DUCHESNE cite un autre François, seigneur de Beaulieu, qui épousa Françoise de Trion et qui mourut à Thérouane, lors du siège de cette ville par Charles-Quint. — Par contre, la Lettre à Théopompe écrite en 1627, sous les yeux du cardinal de Richelieu, signale un autre fils de François III qui attrait été chevalier de Malte et qui serait mort au siège d'une certaine ville du Levant, où il aurait été tué avec Brichanteau, Haraucourt et Beauvais. Recueil de diverses pièces pour servir à l'histoire, 1639, in-4° (p. 20).
[40] Nous Loys Duplessis, sieur de Richelieu, eschanson ordinaire du Roy, confessons avoir recel comptant de maitre Nicolas Berthereau notaire et secrétaire dudit seigneur et trésorier de ses officiers domestiques, la somme de cent livres tournois à nous ordonnées pour nostre estat d'eschanson durant le quartier d'avril, may et juing dernier passé, de laquelle somme de cent livres nous tenons pour comptant et en avons quitté et quictons ledit Berthereau et tous autres. En tesmoing de ce nous avons singné la présente de nostre main et fait( sceller du scel de nos seines, le deuxiesme jour de septembre, l'an mil cinq cent cinquante et ung. Loys du Plessis. (Bibl. Nationale, cabinet des titres, dossier du Plessis-Richelieu, 2302, 52.053, pièce 2).
[41] Sur les Rochechouart, outre la généalogie qu'a dressée et publiée ANDRÉ DUCHESNE, outre ce qu'il dit dans sa généalogie des du Plessis-Richelieu, voir THIBAUDEAU, Histoire du Poitou (t. II, p. 167). C'est là qu'on voit bien la différence qu'il avait entre de si grands seigneurs et la famille des du Plessis. Celle-ci n'avait à l'époque du mariage aucune illustration effective, tandis que les Rochechouart marchaient de pair avec les plus grandes familles de France. Antoine de Rochechouart, beau-père de Louis du Plessis, s'était élevé, par sa valeur, aux plus grands honneurs sous les règnes de Louis XII et de François Ier. Il était sénéchal de Toulouse et d'Albigeois, gouverneur de Loumagne et de Rivière-Verdun, capitaine de cinquante hommes d'armes, chevalier de l'ordre du Roi. On lui donna le commandement de mille hommes de pied pour la défense de Marseille contre Charles-Quint. Il mourut des suites d'une blessure reçue à Cerisoles, en 1544. Il parait cependant qu'il laissa ses enfants et ses petits-enfants dans de grands embarras d'argent. Voir Mémoires de GUILLAUME DE ROCHECHOUART, édit. Buchon (p. 89).
[42] Voir ANDRÉ DUCHESNE, op. cit. (p. 135). Anne de Polignac menait, à Verteuil, un train presque royal. Elle reçut, dans ce château, l'Empereur Charles-Quint, en 1539. L'Empereur passa à Verteuil, qui est une baronnie dans la terre de la Rochefoucault, où il fut accueilli et traité si magnifiquement avec les enfants de France, par Anne de Polignac, damé du lieu, qu'ils en reçurent tous un singulier contentement ; et l'Empereur dit tout haut qu'il n'étoit jamais entré en maison qui sentit sa grande vertu, honnêteté et seigneurie que celle-là. Cette dame étoit veuve de François II, comte de la Rochefoucauld. DUPLEIX, cité dans THIBAUDEAU (t. II, p. 213).
[43] Cette histoire tragique, à laquelle DUCHESNE et AUBERY font allusion, qui a été racontée avec des détails peu exacts dans les généalogies du manuscrit de Secousse est restée dans le souvenir des paysans de Brave et de Mausson. Mon étonnement a été grand de la rencontrer Imite vivante encore dans la mémoire des gens du pays, alors que je la croyais oubliée sons la poussière des parchemins. Naturellement tous les récits ne concordent pas exactement. Beaucoup attribuent au Cardinal le meurtre commis par son père. D'antres disent que c'est un Mausson qui fit assassiner un Richelieu au gué de la rivière. Mais le fait du double meurtre est certain. J'ai combiné pour le mieux l'ensemble des renseignements parvenus jusqu'à nous et l'état des lieux. On voit encore à Mausson l'amorce du souterrain que suivait, parait-il, le seigneur dudit-lieu. On trouverait le détail de l'affaire, si les documents subsistent encore, dans les archives de la maréchaussée de Châtellerault qui, d'après un document du dix-septième siècle, fit le procès. Mais elles sont au palais de justice de Poitiers, dans un grenier où personne ne pénètre, selon ce qui m'a été affirmé. — Cf. ANDRÉ DUCHESNE (p. 65) ; le P. ANSELME, MARTINEAU (p. 48), et les tableaux généalogiques publiés par cet auteur (p. 80).
[44] Messire Authoine de Thiboutot, seigneur de Legny-Godart, lieutenant de cent hommes d'armes des ordonnances du Roy sons la charge de Monseigneur le prince de Dombes, âgé de quarante ans, dit qu'il a été nourri avec ledit seigneur de Richelieu, page en la maison du feu roi Charles et que depuis il l'a vu et fréquente souvent, mêmement en la compagnie de monseigneur le prince de Dombes, de laquelle il était lieutenant et ledit sieur Thiboutot enseigne... Information sur la vie et mœurs de François IV de Richelieu requérant être trio dans l'ordre du St-Esprit... dans A. DUCHESNE, Généalogie des du Plessis (p. 136).
[45] AUBERY dit que François de Richelieu assista à la bataille de Montcontour et qu'il secourut le duc d'Anjou, en lui prêtant son cheval. Mais il suffit de comparer les dates pour voir que la présence du père de Richelieu à Montcontour est plus que problématique. L'anecdote du cheval prête est racontée par CASTELNAU ; il s'agit non d'un Richelieu, mais du marquis de Villars. V. AUBERY (p. 4) ; CASTELNAU (t. Ier, p. 257). — Fin septembre 1572, François du Plessis n'était probablement pas en France. Il appert en effet d'un reçu conservé au cabinet des titres de la Bibl. Nat., qu'il fit payer par les notaires une somme que sa mère devait à une demoiselle de Ferrières. François du Plessis prend, dans ce document, les titres de chevalier, sieur de Richelieu, du Chillon et de la Vervolière, gentilhomme ordinaire de la chambre de Sa Majesté, guidon de la compagnie de Monseigneur le prince-Dauphin (le fils du duc de Montpensier). Dossier du Plessis-Richelieu (loc. cit., pièce 6).
[46] On dit qu'il accompagna en Angleterre, Barnabé Brisson, son compatriote. Cela n'est pas impossible, mais ce voyage aurait eu lieu beaucoup plus tard. En effet, Barnabé Brisson fut envoyé en Angleterre en 1580, comme l'un des commissaires chargés de la négociation du mariage de Monseigneur, fils de France, duc d'Anjou et d'Alençon, frère unique de Henri III, avec Élisabeth, reine d'Angleterre. Les principaux de ces commissaires étaient : Louis de Bourbon, comte de Soissons, Louis de Bourbon, duc de Montpensier, Artus de Cossé, Loys de Lusignan, Bertrand de Salignac de la Motte-Fénelon, Michel de Castelnau, Barnabé Brisson, etc. (Voir Bibl. Nat., Cab. des Mss., fonds français, n° 3.308.)
[47] Il faut reconnaitre que le nom du père de Richelieu n'est cité par aucun des auteurs qui nous ont laissé des détails précis sur le séjour de Henri III en Pologne. DE THOU énumère les principaux personnages français qui accompagnèrent le roi sans parler de Richelieu (lib. 57, t. II, p. 1267). Il ne le cite pas non plus parmi les courriers envoyés à Henri III pour annoncer la mort de Charles IX. — BEAUVAIS-NANGIS dit que ce fut la Roche-Chèmerault, ami et voisin de Richelieu qui, le premier, apporta la nouvelle. (V. Mémoires publiés pour la Société de l'Histoire de France, 1552 in-8° (p. 9). — Un autre compatriote de Richelieu, JEAN CHOISNIN, secrétaire de Jean de Montluc, qui s'étend volontiers sur ]es Poitevins, ne parle pas du nôtre. (Discours au vrai de ce qui s'est fait et passé pour l'entière négociation de l'élection du roi de Pologne, Paris, 1574, in-8°, 124 feuilles.) J'ai également cherché en vain ce nom dans les Mémoires de l'état de la France sous Charles IX, très complets pourtant, en ce qui concerne les affaires de Pologne. Ce silence prouve au moins que le père de Richelieu, encore jeune, était considéré comme un petit personnage.
[48] M. AVENEL cite deux lettres du père de Richelieu. Elles sont relatives à ses fondions de grand prévôt et portent les dates du 27 juin 1587 et du 16 septembre 1588. (V. Revue des Questions historiques, t. VI, p. 151, note.) Le Cabinet des titres nous fournit, en outre, un assez grand nombre de documents sur cette période de la vie du père de Richelieu. Ce sont, pour la plupart, des reçus des sommes confiées au grand prévôt pour certaines affaires dont le Roi ne veut qu'il soit fait mention. Le premier de ces reçus est daté du 22 février 1575 et le dernier du 7 février 1589.
[49] Voir le procès-verbal de la promotion dans ANDRÉ DUCHESNE, loc. cit., et Bibl. Nat., fonds DUPUY, (t. 752, f° 39 et 40). — Voir en outre : Le Prévost de l'Hôtel et grand prévost de France... par PIERRE DE MIRAUMONT, Paris, 1615, in-8° (page 144).
[50] Le grand prévôt savait être utile à ses amis. Voir sa conduite à l'égard d'Ant. de Beauvais-Nangis, dans les Mémoires de BEAUVAIS-NANGIS, édition de la Société de l'Histoire de France (p. 34).
[51] Un Poitevin, appartenant à une famille qui fut, de tous temps, dévouée aux Richelieu, écrivit en 1583, un livre d'érudition médiocre, intitulé : Discours des Hiéroglyphes ægyptiens, emblèmes, devises et armoiries, ensemble LIIII tableaux hiéroglyphiques pour exprimer toutes conceptions à la façon des Ægyptiens,... le tout par PIERRE L'ANGLOIS escuyer, sieur de BEL-ESBAT, à Paris, pour Abel l'Angelier... 1583, 8°. — La seconde partie de cet ouvrage composée de cinquante-trois tableaux hiéroglyphiques, est dédiée à Noble seigneur, Messire François du Plessis, sieur de Richelieu, conseiller au Conseil d'estat du Roy, Prévost de son hostel et grand Prévost de France. La préface est précédée d'un sonnet à M. de Richelieu, sur l'anagramme de son nom : François du Plessis : Foi aus princes des Lys. Voici le passage le plus important de l'épitre dédicatoire... ayant, à l'exemple de vos aïeux et de vos oncles et poussé de votre naturel instinct enclin à bien et fidellement servir, dès votre première jeunesse tant de fois et en tant d'endroicts, pour le service du Roy, porté les armes, et avec elles joint les négociations ausquelles votre fidélité et dextérité furent employées, ayant en l'un et l'autre exercice rapporté l'honneur plus grand que votre âge ne permettoit... Il donne ensuite à M. de Richelieu les louanges rapportées au texte. — Le portrait auquel il est fait allusion est un dessin à la sépia conservé à la Bibi. Nat. Fonds Clairambault, Saint-Esprit (t. 1118, f° 120 et n° 1231, f° 178).
[52] Au mot PORTE DE LA CONFÉRENCE, le Dictionnaire de la ville de Paris d'HURTAUT ET MACNY dit : On trouve dans quelques auteurs que ce nom fut donné à cette porte, à l'occasion de la retraite de Henri III, le jour des barricades, et que ce fut là que François de Richelieu, grand Prévôt de France, père du cardinal du même nom, arrêta les peuples excités par les ennemis du royaume qui voulaient suivre le Roi pour tacher de le surprendre. Ce sage officier, en conférant avec eux, donna le temps au Roi d'avancer chemin et de s'éloigner de ces factieux, ce qu'il lit heureusement et alla coucher à Trappe, proche Versailles et le lendemain à Chartres où ses fidèles serviteurs l'allèrent trouver aussitôt qu'ils surent qu'il y étoit heureusement arrivé. (t. IV, p. 125.)
[53] Voir L'ÉPINOIS, La Ligue et les Papes, Paris, in-8°, (p. 261). — Après avoir raconté l'assassinat du duc de Guise, l'ÉPINOIS dit : Le roi envoya son grand prévôt de l'Hôtel, Richelieu (qu'on appeloit Tristan l'Hermite) en l'hôtel de la Ville où étoient assemblés les députés du Tiers-État, se saisir des personnes du président de Nully, de Marteau, dit la Chapelle, son gendre, prévôt des marchands, de Compans et de Cotteblanche, échevins de Paris, et du lieutenant d'Amiens qui furent amenés au roi.... Entrant dans la salle, il leur dit : Messires, je viens de la part du Roi, pour vous dire qu'il veut que vous continuiez vos charges. Mais parce qu'on a voulu lui donner un coup de dague dans sa chambre, il vous commande à vous, prévôt des marchands, président de Nully, Compatis et vous, lieutenant d'Amiens, de le venir trouver. Et partant, suivez-moi ; car on lui a fait entendre que vous étiez de cette conspiration. Mémoires-Journaux de L'ESTOILE (t. III, p. 200).
[54] Voir OUVRÉ, Poitiers pendant la Ligue (p. 91 et suiv.). Richelieu prononça devant le corps de ville un petit discours qui nous a été conserve et qui fait honneur à son tact et à son élocution. Voir, outre le récit de M. OUVRÉ, l'opuscule intitulé : La grande trahison découverte en la ville de Poitiers sur les entrepryses de Richelieu et Malycorne, à Paris, chez Denys Binet, 1589.
[55] Voir le P. GRIFFET, Traité des différentes sortes de preuves gui servent à établir la vérité de l'Histoire (p. 196). — Cf. Bibl. Nat. Cab. des Mss., vol. 3.996, (f° 111). — LE PÈRE LELONG (n° 19.077 supplément) indique l'existence d'un manuscrit ayant pour titre : Procès fait à la mémoire de Jacques Clément, par François du Plessis-Richelieu, grand prévôt de l'Hôtel. Ce ms. appartenait, au dix-huitième siècle, à M. de Nicole, premier président à la chambre des comptes. C'est le PÈRE GRIFFET qui l'a mentionné le premier et le PÈRE DANIEL, en a eu connaissance pour son Histoire de France. — Je ne pourrais dire si c'est ce texte qui a été imprimé en 1759, dans le recueil intitulé Curiosités historiques, Amst. 1759 (t. II, p. 1-12) sous à titre : Procès criminel fait au cadavre de Fr. Jacques Clément Jacobin. — Le livre de PIERRE DE MIRAUMONT intitulé: Le Prévost de Milet et grand Prévost de France (Paris, Chevalier, 1615, in-12°), nous fait connaître exactement les attributions de ces deux charges qui furent réunies pour la première fois, en 1578, en la personne de François du Plessis de Richelieu (p. 144).
[56] Voir le Récit véritable de ce qui s'est passé au voyage du Roy fleuri quatrième de Dieppe jusqu'à son retour, depuis le décès du roy Henry troisième par CHARLES DUCHESNE, médecin du Roy... dans Journal de l'ESTOILE (édit. de 1741, t. IV, p. 287).
[57] Voir, outre les reçus du Cabinet des titres cités ci-dessus, Lettres missives de HENRY IV. (Collection des Documents inédits, t. III, p. 74.)
[58] Voir le Récit véritable, du médecin CH. DUCHESNE (loc. cit., p. 302). J'avoue que j'ai peine à comprendre sa phrase : Il ne faut pas oublier le sieur de Richelieu, à qui l'âge ancien n'empêcha pas qu'il ne retournât l'épée toute sanglante de cette rude mêlée. François de Richelieu n'avait que quarante ans et, d'autre part, ses deux oncles étaient morts.
[59] Sur son rôle au siège de Vendôme, voir Continuation de ce qui est advenu en l'armée du Roy... etc., dans Journal de l'ESTOILE (t. IV, p. 458).
[60] Richelieu savait rappeler, au besoin, les services de son père. Par exemple, dans ce passage du Caput apologeticum écrit en 1618 : Fils de père qui a toujours servi les rois, et en si peu qu'il l'a pu, l'a toujours faist luy-même, en son diocèse, dès le commencement. Le feu roy y a eu confiance ; depuis la reyne l'a continuée. (Corresp., t. VII, p. 421.)
[61] Nous ne serions pas complet au sujet du père de Richelieu, si nous ne mentionnions, au moins, les bruits moins favorables que répandirent, à son sujet, les ennemis du cardinal. Dans les généalogies publiées par M. TASCHEREAU, il est dit que le duc de Joyeuse lui avait procuré une place d'intéressé dans les affaires du roy, ayant eu l'engagement du domaine du Poitou, ce qui le ruina. Il est dit encore que François du Plessis avait été destiné à l'Église du vivant de son frère, qu'à la suite du meurt ce du seigneur de Mausson, il fut condamné à être rompu et qui le fut en effigie. Il se serait enfin attaché au président Brisson qui aimait Marguerite Duval, femme de Pidoux-Malaguet, bourgeois de Fontenay, et par ce il aurait obtenu son abolition et fait sa fortune. On ajoute que le président Brisson avait acquis la maison du sieur Mausson et l'avait donnée à Richelieu qui lin vendit en échange une terre en Picardie venant de sa femme ; (il est certain que les Richelieu prennent, à partir de François, le titre de seigneur de Mausson, et que, d'autre part, sa femme possédait des terres en Picardie ; elle s'intitule, dans son contrat de fiançailles, dame de Farainvilliers et de Valescourt (actuellement département de l'Oise). On ajoute que Richelieu ayant gagné 4.000 écus en Angleterre, le président et son beau-père lui en préfèrent chacun autant, moyennant quoi, il acheta, 38.000 livres, la charge de prévôt de l'hôtel, alors séparée de celle de grand prévôt ; qu'il obtint cette place par le moyeu du duc de Joyeuse, qui l'avait ci-devant intéresse dans les fermes du roi, et qui !ni avait fait avoir l'engagement du domaine du Poitou ; tenais que cela ruina ses enfants à sa mort parce qu'il se trouva reliquataire. Henri IV, ajoute-t-on, le fit capitaine de ses gardes, quoiqu'il n'eût jamais porté les armes ; mais il mourut avant d'entrer en exercice. (Voir MARTINEAU, p. 80.) — Dans la Cordonnière de Loudun, on lit : Son aïeul (du cardinal) ayant butiné quelque bien en l'état de notaire, dont il faisait profession, voulut s'élever au-dessus de son extraction par une lettre de noblesse qu'il acheta. Son père, gentilhomme, vint à Paris servir d'équinote au président Brisson, son compatriote, qui employa son crédit à lui faire épouser la fille d'un avocat ; depuis il prit une petite entrée au Louvre, qu'il augmenta par un maquerellage signalé qu'il fit, en faveur du duc de Joyeuse, lors. mignon du roi. De suite il s'acquit quelque bien par toutes les voies que l'impiété et l'athéisme lui purent fournir. Je voudrois... que vous voulussiez venir en notre Lodunois, vous en apprendriez bien d'autres. (Pièces curieuses, en suite de celles du Sr de Saint-Germain, 1883, in-4°, 25° pièce, p. 98.) — Dans le Jugement sur la préface et diverses pièces curieuses, on lit : J'ai écrit que DUCHESNE ni FAVIN ne disent pas pour quelles raisons l'an 1585 qui fut l'année de la naissance du cardinal, le sieur de Richelieu l'ut t'ait chevalier, par la volonté absolue du roy Henri III, sans assembler le chapitre général, encore que quelques-uns qui étoient de ce temps-là nous assurent que c'étoit pour un service que j'ai voulu taire. J'ai dit que sa chevalerie paroissoit fort simple en ce que dans ses armes, qui sont représentées et blasonnées par ses écrivains, il n'y a point de supports, de cimiers, de couronne, de tourtis, de bourrelet, que le timbre en profil est le plus simple qui se donne à la moindre noblesse... Je dis que les recherches sur la noblesse ne sont pas avantageuses à M. le cardinal ; nous ne voyons dans sa famille qu'un petit fief, sa mère, fille d'un avocat, et rien ne parois ni dans ses armes, ni dans les actions de ses ancêtres, ni dans leurs qualités, ni dans leurs charges, qui ne se trouve dans la plus commune noblesse ; c'est ce que nous avons voulu dire. (Jugement sur la préface, etc.) Recueil de pièces, in-8° (p. 682). — En faisant une balance équitable entre les apologistes et les détracteurs de parti pris, on peut dire, avec TALLEMANT DES RÉAUX, que le père de Richelieu étoit fort bon gentilhomme, mais pauvre et que, par-dessus le marché, il embrouilla furieusement sa maison (Historiette du cardinal de Richelieu, éd. Techener, 1865, t. I, p. 371). — Une femme qui n'est pas suspecte de tendresse pour le fils, Mme de Montpensier, dit également : J'ai ouï dire à de vieux domestiques de mon grand-père (Henri IV), qu'il foisoit cas de M. de Richelieu comme d'ou homme de qualité et, pour lors, les princes du sang ne vivaient pas si familièrement qu'ils font aujourd'hui et l'on pouvoit juger de la qualité des gens par le traitement qu'ils recevoient. (Mémoires, édit. Michaud et Poujoulat, p. 7.) — Enfin SAINT-SIMON, compétent plus que personne en matière généalogique et qui a consacré aux du Plessis de Richelieu un long chapitre de ses Duchés-Pairies, dit en parlant du père du cardinal : Voilà le premier de la maison qui se soit élevé, quoique noble et ancienne. Les épreuves du tome VIII des Mélanges de SAINT-SIMON (p. 381), auquel ce passage est emprunté, nous ont été communiquées par M. le comte MENJOT D'ELBENNE.
[62] ANDRÉ DUCHESSE dit que les la Porte étaient la Porte de Vezins. Mais M. de la FONTENELLE DE VAUDORÉ affirme qu'ils étaient d'une famille toute différente. (Évêques de Luçon, I, 358.) Cependant M. MARTINEAU croit que les la Porte de la Meilleraye étaient une branche cadette des la Porte de Vezins. Son argumentation lue parait peu concluante. Ce qui est certain, c'est que le père de Suzanne de la Porte était avocat et son grand-père, Raoul de la Porte, receveur pour le compte du duc de Longueville. (MARTINEAU, p. 92.) La terre de la Meilleraye ne vint dans cette maison qu'après 1563. Elle fut acquise par François de La Porte, probablement avec les bénéfices de sa charge d'avocat. (Ibid. p. 93.) Sur ce point comme sur beaucoup d'autres, TALLEMANT DES RÉAUX parait bien renseigné ; mais avec une pointe de médisance. Il dit que le père de François de la Porte était un notaire et qu'il n'y avait nulle parenté sérieuse avec les la Porte de Vezins. Historiette du Maréchal de la Meilleraye (II, p. 60). Voir encore sur les la Porte : LA FONTENELLE DE VAUDORÉ, Le Maréchal de La Meilleraye, Poitiers, 1539, br. in-8° ; et BÉLISAIRE LEDAIN, Histoire de la ville de Parthenay et de la Gâtine du Poitou, Paris et Poitiers, 1858, in-8° (p. 309).
L'avocat la Porte, grand-père de Richelieu, habitait à Paris, rue Hautefeuille, dans la paroisse St-André-des-Arcs. Sa maison tenait à l'hôtel du Cheval rouge et de l'Éon d'Albanie, au coin de la rue des Deux-Portes. M. de la Porte en est dit propriétaire, dès 1552. La maison des la Porte était probablement celle désignée sous le noie de maison de St-Christophe, plus tard hôtel de Miraumont. Elle venait aux La Porte des Rochant. Il reste encore de cette habitation trois tourelles engagées dans la construction. — Voir Topographie historique du Vieux Paris, région occidentale de l'Université (p. 446-448).
[63] SAINT-SIMON, toujours à l'affût des détails généalogiques, consacre un passage curieux à cette union des la Porte et des Richelieu : Son nom (il parle du maréchal de la Meilleraye) était la Porte. On prétend qu'il leur est venu de ce que leur auteur était portier d'un conseiller au Parlement, dont le fils (François de la Porte) devint un très-célèbre avocat de Paris, lequel très-certainement était le grand père du maréchal de la Meilleraye. Cet avocat, la Porte, étoit avocat de l'ordre de Malte, et le servit si utilement que l'ordre, en reconnaissance, reçut de grâce son second fils (Amador de la Porte), qui devint un homme d'un mérite distingué, et commandeur fie la Magdelaine, près de Parthenay. Ce la Porte (l'avocat), qui s'étoit fort enrichi, toit aussi avocat de M. de Richelieu (père du grand prévôt). Il acquit quelque bien dans son voisinage, et s'affectionna tellement à sa famille, que, voyant que (il manque ici quelques mots, comme : voyant qu'il était mort) après avoir mangé tout son bien et laissé sa maison ruinée, il prit un fils (c'est le grand prévôt) qu'il avoit laissé, pour son gendre, qui, avec ce secours, se releva, et mourut en 1590 à quarante-deux ans, chevalier du Saint-Esprit, capitaine des gardes du corps et prévôt de l'hôtel, qui est ce que mal-à-propos on nomme grand prévôt de France. Sa femme étoit morte dès 1580 (Saint-Simon se trompe : Suzanne la Porte ne mourut qu'en 1616). Ce furent le père et la mère du cardinal de Richelieu, et d'autres enfants dont il ne s'agit pas ici. L'avocat la Porte survécut son gendre et sa tille. Il avait chez lui un clerc qui avoit sa confiance, qu'il avoit fait recevoir avocat, et qui s'appeloit Bouthillier (Denys Bouthillier). En mourant il lui laissa sa pratique ; et lui recommanda ses petits-enfants de Richelieu qui n'avoient plus de parents (ils avaient encore leur mère). Bouthillier en prit soin comme de ses propres enfants, et c'est d'où est venue la fortune des Bouthillier..... Ce morceau est emprunté, en grande partie, aux Mémoires de MONGLAT. Il contient cependant quelques détails nouveaux que Saint-Simon pouvait tenir de son père.
[64] Voir ANTOINE LOYSEL, Pasquier ou Dialogue des advocats du Parlement de Paris, édit. Dupin, Paris, 1811, in-12° (p. 75, 84, 93).
[65] DREUX DU RADIER, Histoire littéraire du Poitou, édit. 1819, in-8° (t. II, p. 336).
[66] V. additions aux Mémoires de CASTELNAU, liv. V (t. II, p. 297) ; — Mémoires de MONTGLAT, coll. Michaud et Poujoulat (p. 10) ; — Mémoires de FONTENAY-MAREUIL, même collection (p. 23).
[67] M. AVENEL a publié une lettre de la mère de Richelieu, et M. MARTINEAU l'a reproduite en y joignant deux autres lettres. L'une d'elles est adressée à M. Dupont, and de la famille (probablement le Dupont, avocat à Parthenay, dont il est question dans le Journal des LE RICHE, p. 153). Les deux autres sont adressées à Marguerite Guiot des Charmeaux, fiancée, puis femme d'Henri du Plessis, fils aîné de Mme de Richelieu. Elles proviennent du Ms. fonds Sorbonne, 1135. (aujourd'hui n. N., fonds fr. 23.200) ; c'est un recueil de copies. V. MARTINEAU (p. 107-110). — M. l'abbé LACROIX a publié trois autres lettres de la mère de Richelieu d'affres les archives de la famille qui lui ont été communiquées. On y relève les traces de l'affection tendre qui unissait, la mère et le fils et notamment ce mot exquis d'abnégation maternelle : L'inquiétude que j'ai me tue et je vois bien que je n'aurai jamais de joie que lorsque, vous sachant tous heureux, je serai en paradis. (Richelieu à Luçon, p. 138.)
[68] V. Maximes d'État et Fragments politiques du cardinal de Richelieu publiés dans la collection des documents inédits de l'Histoire de France (p. 771, fragment 93). La plupart de ces notes ont été rédigées par Richelieu de 1617 à 1624. Sa mère était morte en 1616.
[69] Ces renseignements sont empruntés, pour la plupart, à l'intéressant ouvrage de M. MARTINEAU. Il a eu entre les mains un manuscrit qui faisait partie de l'étude de Me Baranger, notaire à Richelieu, et qui contenait les actes relatifs aux biens patrimoniaux de la famille. Ce Ms. n'est plus conservé dans l'étude du successeur de Me Baranger. Voir MARTINEAU (p. 110, 113, 115). — Richelieu donne, sur sa fortune patrimoniale, les renseignements suivants qui sont certainement exagérés : Lorsqu'il étoit venu au service de la reine mère, il n'avoit que 25.000 livres de rentes en bénéfices et par le malheur de sa maison (par suite de la mort de son frère), il lui en était resté autant en fonds de terre. Tout ce qu'il avoit de Offset qui n'étoit pas peu, il le tenait des libéralités et grâces de leurs Majestés.... Un inventaire des revenus de Richelieu fait par devant notaires, en 1631, fait monter le revenu de Richelieu à la somme de 502.707 livres, toutes charges déduites et sans compter la valeur des objets de luxe, châteaux de plaisance, etc. On ne s'appauvrissait pas, à cette époque, dans les affaires. (Bibi. nat., cabinet des Mss., fonds français, vol. 3919.) — Cf. D'AVENEL, Richelieu et la monarchie absolue, Plon, 1884, in-8°, (t. I, p. 11). Neuville et Neuil-sous-Faye sont situés dans le voisinage de Richelieu. Nous avons plusieurs documents donnant le détail des fiefs appartenant aux Richelieu dans cette région. Voir notamment, aux Archives municipales de Richelieu : Aveu et dénombrement à Louis Clérembault, seigneur de Richelieu, par Guillaume Messeau, à cause de sa femme, fille de Charles Gane (quinzième siècle). — Aveu fait à Messire Henry Duplessis, chevalier, gentilhomme ordinaire de la chambre du Roi, seigneur de Neufville et Mosson, par divers. (9 septembre 1610.) — Aveu fait à Suzanne de la Porte pour les fiefs de Couraye et de Nueil par Philippe Messeau. (Sans date.)
[70] Châtillon nous a laissé une image du château de la Vervolière. Le corps principal du logis formait un quadrilatère régulier ayant aux coins, quatre tours coiffées en poivrière ; au milieu de la cour intérieure, s'élevait un donjon carré. Le château était ceint d'une muraille sur laquelle s'appuyaient des communs assez importants. — Aujourd'hui la Vervolière appartient à la famille de la Rochejacquelin.
[71] Il ne reste plus de Mausson que des ruines insignifiantes, sauf l'entrée d'un souterrain qui parait être une construction du treizième siècle.
[72] Coussais-lès-Bois, dans la Vienne, canton de Pleumartin.
[73] Beçay, terre située dans la commune de Saint-Léger, actuellement canton des Trois-Moutiers dans la Vienne.
[74] Le Chillon, dont Armand du Plessis prit le nom pendant quelque temps, était venu dans la famille des du Plessis par leur alliance avec les le Boy, seigneur du Chillon. Il était situé, ainsi que Châteauneuf, fini dépendait du Chillon, dans la paroisse de Launay, actuellement canton de Saint-Georges.
[75] Châteauneuf contenait maison seigneuriale, cour et forteresse à part, fermée de hautes murailles, hôtel de la métairie à part, granges, étables, toits à bêtes, cour, halls, aisances, espaces et commodités d'icelle, la raye et deux clos de vigne fermés de hautes murailles, fiefs, droits et profits d'iceux, garenne, grand bois, bois faillis, la métairie et les terres qui eu dépendent, le tout évalué (en 1610) à la somme d'environ 4.000 livres. Voir MARTINEAU (p. 113).
[76] Voir : Transport fait par dame Françoise de Rochechouart, l'une des daines de la Reyne, veuve de feu messire Louis du Plessis, vivant chevalier, sieur de Richelieu à haut et puissant seigneur François du Plessis son fils, sieur de Richelieu, chevalier de l'ordre du Roy, conseiller des conseils d'État et privé, prévôt de son hôtel et grand-prévôt de France, à ce présent, de 50 écus 40 sols tournois de rente annuelle lui appartenant et à elle vendus et constitués par messieurs les prévôts des marchands et échevins de la ville de Paris. 1er juin 1587. Bibl. Nat. Cabinet des Titres. Dossier du Plessis-Richelieu (n° 14, 15, 16 et 17).
[77] Ces droits, ainsi que les revenus de l'évêché de Luçon, étaient mis sur la tête d'Alphonse de Richelieu, le second des enfants milles de madame de Richelieu. Voir MARTINEAU, (p. 110).
[78] Le document original est conservé aux archives municipales de Richelieu. Il n'y a pas de date dans le corps de l'acte. La mention de 1617 écrite au dos est fautive, puisque Suzanne de la l'orle mourut en 1616.
[79] Voir le texte de la transaction dans ANDRÉ DUCHESNE (loc. cit., p. 135).
[80] Voir le parchemin original au dossier de la famille de Richelieu dans les Archives départementales de la Vienne. Au dos : Transaction passée entre Mme de Richelieu et moi par laquelle elle me rend la terre et seigneurie de Châteauneuf. Le texte de l'acte a été publié par M. MARTINEAU (p. 111).
[81] Voir Histoire manuscrite de Faye-la-Vineuse au moyen de documents recueillis dans les Archives du département de la Vienne, à l'abbaye de Ligugé et chez M. Poirier propriétaire à Faye. (Communiqué par M. Poirier de Faye-la-Vineuse). — On appelait Vol du Chapon, le droit reconnu à l'aîné de prendre le manoir principal avec ses dépendances et, en plus, un arpent tout autour.
[82] Mémoires de FONTENAY-MAREUIL (p. 23).
[83] Archives Nationales. Inventaire des arrêts du conseil d'État. Règne de Henri IV publié par M. N. VALOIS, in-4°, n° 127 (p. 10).
[84] Archives du Ministère des Affaires Étrangères. Mémoires et Documents, France, vol. 762 (f° 150).
[85] État des pensions du roi pour l'année 1608. Affaires étrangères. France, vol. 767 (f° 76).
[86] Voir MARTINEAU (p. 22 et suiv.). Cf. L'ABBÉ BOSSEBŒUF, Richelieu. Monuments et Souvenirs, Tours, 1858, in-8° (p. 9).
[87] En 1407, le seigneur Jean de Clérembault rendit hommage à la châtelaine de Faye-la-Vineuse très noble et puissante dame, Mme la Dauphine d'Auvergne, comtesse de Clermont et de Sancerre pour l'hostel de Richelieu avec la cloison, douves, pourpris d'icelui, ensemble le moulin, les vergers, le cours de l'eau, pêcherie et étang. L'ABBÉ BOSSEBŒUF (op. cit., p. 11).
[88] Voir Partage fait entre Louis Clérembault, écuyer, seigneur de Richelieu et Perinne Clérembault sa sœur, femme de Geofroy du Plessis, seigneur de la Vervolière, de la succession de Gilette de Mausson, mère commune desdits Clérembault. (27 juin 1457) Copie ancienne aux Archives d'Indre-et-Loire ; Dossier des familles, liasse 146.
[89] Nous ne savons rien de plus sur l'ancien manoir des Richelieu. Dans la première édition du présent ouvrage, trompé par le titre erroné d'une estampe appartenant aux collections de la Bibliothèque Nationale (Indre-et-Loire V. A. 72), j'ai décrit et reproduit, comme étant l'ancien manoir de Richelieu, une gravure qui représente en réalité une vue de Chantilly. Je ne puis que reconnaître une erreur qui a été suivie par l'ABBÉ LACROIX dans son ouvrage intitulé : Richelieu à Luçon.
[90] Il naquit le 5 de septembre 1585. On dit à Richelieu qu'il y avait été conçu et que l'on y voit encore, dans le château, la même chambre où François et Suzanne, ses père et mère, couchaient alors. — Mémoire D'AMELOT DE LA HOUSSAYE, faisant partie du mss. Secousse, cité ci-dessus. — Voir aussi Bibliothèque Nationale, f. fr., n° 6631.
[91] Voir les plans du nouveau château, tels qu'ils ont été publiés par l'architecte MAROT. — TALLEMANT DES RÉAUX parlant de cette reconstruction dit : Le cardinal y a fait des fautes considérables : le principal corps de logis est trop petit et trop étroit, par la vision qu'il a eue de conserver une partie de la maison de son père, où l'on montre la chambre où le cardinal est né, et cela pour faire voir que son père avoit une maison de pierre de taille, couverte d'ardoises, en un pays où les maisons des paysans sont de même. Historiette du cardinal de Richelieu (Ed. Techener, in-12°, t. I, p. 408). — Et LA FONTAINE : Il devait choisir un autre endroit et il en eut la pensée ; mais l'envie de consacrer les marques de sa naissance l'obligea de faire bâtir autour de la chambre où il étoit né. Il avoit de ces vanités que beaucoup de gens blâmeront et qui sont pourtant communes à tous les héros. Lettres à sa femme, de Châtellerault, le 3 sept. 1663. Ed. Lefèvre (t. II, p. 646).
[92] Peut-être aussi que l'ancien parc de Richelieu et les bois de ses avenues qui étoient beaux, semblèrent à leur maitre dignes d'un château plus somptueux que relui de son patrimoine. LA FONTAINE. — Les canaux sont de belle eau, dit TALLEMANT DES RÉAUX... Le parc et les jardins sont beaux. Il observe pourtant, avec raison, que le bois n'est pas très élevé. Les chênes poussent mal dans ces terrains de marécages et de tourbières. Les jardins et le parc ont été aménages, avec le plus grand luxe, par le propriétaire actuel de Richelieu, M. Heine, et donnent une idée de ce qu'ils étaient du temps de Richelieu. Malheureusement, il ne reste plus du château construit parle cardinal, qu'un dôme isolé, ayant fait partie de la cour d'honneur, et quelques communs. — Sur le château de Richelieu, voir : Le magnifique château de Richelieu arec élévation, profils et plans par l'architecte JEAN MAROT, album in-4°. — VIGNIER, Le Château de Richelieu, Saumur, chez Desbordes, 1676. — Les Promenades de Richelieu ou les Vertus chrétiennes, par JEAN DESMAREST, Paris, Henri le Gros, in-8°. — Description du Poitou par le sieur DE CARRON, serviteur des Richelieu, manuscrit appartenant à M. Poirier, à Faye-la-Vineuse. — Voir en outre les estampes de PERELLE et d'ISRAËL SYLVESTRE. — DELAURE, Le Poitou, Paris, in-8°. — L'ABBÉ BOSSEBŒUF, Richelieu. Monuments et souvenirs, Tours, 1883, in-8°.
[93] TALLEMANT, qui sait tout, dit : Il a encore affecté de laisser au coin de son parterre (c'est-à-dire du parc), une église assez grande, à cause que ses ancêtres y sont, enterrés.
[94] TALLEMANT dit encore : Pour n'avoir pas une belle maison dans son voisinage, et qui ne pouvoit manquer d'être à un prince, puisqu'elle appartenoit à Mademoiselle, il obligea M. d'Orléans, connue tuteur, à faire l'échange de Champigny contre Bois-le-Vicomte et de raser le château. Il voulut faire aussi raser la sainte chapelle qui y est, et où sont les tombeaux de MM. de Montpensier. La chapelle, avec les magnifiques vitraux de Pinaigrier, a été conservée. Elle permet d'apprécier quelle était la beauté du château de Champigny et de mesurer l'erreur de Richelieu : Regardez quelle faiblesse a cet homme, dit TALLEMANT, qui eût pu rendre illustre le lieu le plus obscur de France, de croire qu'un grand bâtiment ajouté à la maison de son père feroit beaucoup pour sa gloire. — Il faut voir aussi les Mémoires de Mme DE MONTPENSIER. Collection Michaud et Poujoulat, année 1637. J'allai me promener à Richelieu... je passai dans un bourg appelé Champigny, qui n'avoit appartenu et qui venoit de Messieurs de Montpensier ; c'étoit de leur vivant, leur demeure de plaisir ; et ce qui me fit perdre cette terre fut qu'elle étoit jointe à une autre dont Richelieu relevoit en partie ; le cardinal voulut l'avoir : Monsieur n'osa le refuser ; de sorte que, connue mon tuteur, il en lit l'échange avec Bois-le-Vicomte, et consentit même à la démolition de ma maison avant que d'exécuter l'échange... (Voir le reste, p. 7.)
[95] Sur tous ces faits, voir THIBAUDEAU, Histoire du Poitou (t. III). — LIÈVRE, Histoire des protestants du Poitou. — En particulier sur la légende de la Mélusine, voir DREUX DU RADIER, Bibliothèque historique du Poitou (t. II, p. 230).
[96] Voir le Journal de MICHEL LE RICHE (pages 185, 210, 250, 311, 412, 462). — THIBAUDEAU, Histoire du Poitou (t. III, p. 12 et p. 40). — L'ABBÉ LALANNE, Histoire de Châtellerauld et du Châtelleraudais (t. II, p. 63). — CARRÉ DE BESSEROLLES, Dictionnaire d'Indre-et-Loire, au mot Faye-la-Vineuse (t. III, p. 46).
[97] Mémoires pour servir à l'histoire tirés du cabinet de Messire LÉON DU CHASTELIER BARLOT depuis l'an 1596 jusqu'en 1636, à Fontenay, 1613, in-8° (p. 1-4). — Comparer dans les Mss. de DOM FONTENEAU, à la bibliothèque de Poitiers, 1597, 12 juillet. Délibération de l'Hôtel de ville de Loudun sur les moyens de résister aux ravages, pilleries et exactions de la garnison qui était dans la ville de Mirebeau (Reg. du greffe de Loudun, t. 18, p. 227.)
[98] V. LE LABOUREUR, Additions aux Mémoires de CASTELNAU (t. II, p. 297). L'un des actes de baptême conservés dans les archives de la commune de Braye-sous-Faye, signale la présence à Richelieu d'Amador de la Porte, en janvier 1592. Il est parrain avec Mme de Marconnay.
[99] M. Dupont de Saint-Bonnet était un parent de M. Dupont de Courlay qui avait épousé une fille de Mme de Richelieu. Une lettre que lui adressa Mme de Richelieu, aux environs de 1603, a été retrouvée et publiée par MARTINEAU (p. 107).
[100] L'avocat la Porte avait pour principal clerc Denys Bouthillier auquel il laissa sa clientèle, dit M. AVENEL, Rev. des Quest. histor. (loc. cit., p. 174). Denys eut quatre enfants : Claude, qui fut surintendant des finances ; Sébastien, doyen de Luçon et abbé de la Corbère, dont il sera question plus loin ; Victor, plus tard évêque de Boulogne et archevêque de Tours ; Denis, baron du Rancé, secrétaire des commandements de Marie de Médicis. Celui-ci fut le père de l'abbé de la Trappe.
[101] C'était un usage très répandu, sous l'ancien régime, de faire baptiser les enfants des seigneurs par de très pauvres gens. De même, on remarque que, d'habitude, quand il s'agissait d'un garçon, il y avait plusieurs parrains, et plusieurs marraines quand il s'agissait d'une fille.