Lâchetés et apostasies. — Rares exemples de fidélité. — Moyens d'action de la calomnie. — Les continuateurs de Courtois. — Rouget de Lisle et Robespierre. — Les vaincus au théâtre. — L'historien Montjoie. — Le véritable sentiment populaire. — L'opinion de Boissy d'Anglas. — Hésitation du comité de Salut public. — Cri d'indignation. — De Carnot et de Robespierre. — L'accusation de dictature. — Protestations de Saint-Just. — Manœuvres thermidoriennes. — Amar et Voulland aux Madelonnettes. — Les conjurés et les députés de la droite. — Lettres anonymes. — Inertie de Robespierre. —Ses alliés. — Le général Hanriot — Séances des comités les 4 et 5 thermidor. — Avertissement de Saint-Just.I Après Thermidor, une effroyable terreur s'abattit sur les patriotes ; ce fut le commencement de la Terreur blanche. De toutes les communes de France, une seule, je crois, eut le courage de protester contre cette funeste journée, ce fut la commune de Dijon. Mais ce fut une protestation isolée, perdue dans le concert des serviles adresses de félicitations envoyées de toutes parts aux vainqueurs. Malheur en effet à qui eût osé ouvrir la bouche pour défendre la mémoire de Robespierre ! On vit alors se produire les plus honteuses apostasies. Tels qui avaient porté aux nues Maximilien vivant et s'étaient extasiés sur son humanité, sur son amour de la justice, firent chorus avec ses calomniateurs et s'es assassins, et l'accablèrent, mort, des plus indignes outrages. Les Girondins sauvés par lui, les Mercier, les Daunou, les Saladin, les Olivier de Gérente et tant d'autres injurièrent bassement l'homme qui, de leur propre aveu, les avait par trois fois sauvés de la mort, et vers lequel ils avaient poussé un long cri de reconnaissance. Mais, passé Thermidor, leur reconnaissance était avec les neiges d'antan. Celui qu'en messidor de l'an II, Boissy-d'Anglas présentait au monde comme l'Orphée de la France, enseignant aux peuples les principes de la morale et de la justice, n'était plus, en ventôse de l'an III (mars 1795), de par le même Boissy, qu'un hypocrite à la tyrannie duquel le 9 Thermidor avait heureusement mis fin[1]. Toutes les lâchetés, toutes les turpitudes, toutes les apostasies débordèrent des cœurs comme d'un terrain fangeux. Barère, malgré l'appui prêté par lui aux assassins de Robespierre, n'en fut pas moins obligé de venir un jour faire amende honorable pour avoir, à diverses reprises, parlé de lui avec éloge[2]. On entendit, sans que personne osât protester, les diffamations les plus ineptes, les plus saugrenues, se produire en pleine Convention. Ici, Maximilien est désigné par le montagnard Bentabole comme le chef de la faction d'Hébert[3]. Là deux républicains, Laignelot et Lequinio, qui toute leur vie durent regretter, j'en suis sûr, d'avoir un moment subi l'influence des passions thermidoriennes, en parlent comme ayant été d'intelligence avec la Vendée[4]. Tandis que Thuriot de Larozière, le futur magistrat impérial, demande que le tribunal révolutionnaire continue d'informer contre les nombreux partisans de Robespierre, Merlin (de Douai), le législateur par excellence de la Terreur, annonce que les rois coalisés, et spécialement le pape, sont désespérés de la catastrophe qui a fait tomber la tête de Maximilien[5]. Catastrophe, le mot y est. Merlin l'a-t-il prononcé intentionnellement ? Je n'en serais pas étonné. Quel ami des rois et du pape, en effet, que ce Maximilien Robespierre ! et comme les partisans de la monarchie et du catholicisme ont pris soin de défendre sa mémoire ! On frémit d'indignation en lisant dans le Moniteur, où tant de fois le nom de Robespierre avait été cité avec éloge, les injures crachées sur ce même nom par un tas de misérables sans conscience et sans aveu. Un jour, ce sont des vers d'un bailli suisse, où nous voyons qu'il fallait sans tarder faire son épitaphe ou bien celle du genre humain[6]. Une autre fois, ce sont des articles d'un des rédacteurs ordinaires du journal, où sont délayées en un style emphatique et diffus toutes les calomnies ayant cours alors contre Robespierre[7]. Ce rédacteur, déjà nommé, s'appelait Trouvé. Auteur d'un hymne à l'Être suprême, qui apparemment n'était pas fait pour déplaire à Robespierre, et qui, par une singulière ironie du sort, parut au Moniteur, le jour même où tombait la tête de Maximilien, Trouvé composa une ode sur le 9 Thermidor, et chanta ensuite tous les pouvoirs qui s'élevèrent successivement sur les ruines de la République.. Après avoir été baron et préfet, de l'Empire, cet individu était devenu l'un des plus serviles fonctionnaires de la Restauration. Les injures d'un tel homme ne pouvaient qu'honorer la mémoire de Robespierre[8]. Aucun genre de diffamation ou de calomnie n'a été épargné au martyr dans sa tombe. Tantôt c'est un député du nom de Lecongne qui, rompant le silence auquel il s'était à peu près condamné jusque-là a l'effronterie de présenter comme l'œuvre personnelle de Robespierre les lois votées de son temps par la Convention nationale, effronterie devenue commune à tant de prétendus historiens ; tantôt c'est l'épicurien Dupin, l'auteur du rapport à la suite duquel les fermiers généraux furent traduits devant le tribunal révolutionnaire, et leurs biens, de source assez impure du reste, mis sous le séquestre, qui accuse Maximilien d'avoir voulu spolier ces mêmes fermiers généraux[9]. À peine si, de temps à autre, une voix faible et isolée s'élevait pour protester contre tant d'infamies et de mensonges. Tardivement, Babœuf, dans le Tribun du peuple, présenta Robespierre comme le martyr de la liberté, et qualifia d'exécrable la journée du 9 thermidor ; mais, à l'origine, il avait, lui aussi, calomnié, à l'instar des Thermidoriens, ce véritable martyr de la liberté. Plus tard encore, dans le procès de Babœuf, un des accusés, nommé Fossar, s'entendit reprocher comme un crime d'avoir dit devant témoins que le peuple était plus heureux du temps de Robespierre. Cet accusé maintint fièrement son assertion devant la haute cour de Vendôme. Si ce propos est un crime, ajouta-t-il, j'en suis coupable, et le tribunal peut me condamner. Mais ces exemples étaient rares. La justice thermidorienne avait d'ailleurs l'œil toujours ouvert sur toutes les personnes suspectes d'attachement la mémoire de Maximilien. Malheur à qui osait prendre ouvertement sa défense. Un ancien commensal de Duplay, le citoyen Taschereau, dont nous avons déjà eu l'occasion de parler, craignant qu'on ne lui demandât compte de sou amitié et de ses admirations pour Robespierre, avait, peu. après Thermidor, lancé contre le vaincu un long pamphlet en vers. Plus tard, en l'an VII, pris de remords, croyant peut-être les passions apaisées, et que l'heure était venue où il était permis d'ouvrir la bouche pour dire la vérité, il publia un écrit dans lequel il préconisait celui qu'un jour, le couteau sur la gorge, il avait renié publiquement[10] ; il fut impitoyablement jeté en prison[11]. Tel était le sort réservé aux citoyens auxquels l'amour de la justice, ou quelquefois un reste de pudeur, arrachait un cri de protestation. Les honnêtes gens, ceux en qui le sentiment de l'intérêt personnel n'avait pas étouffé toute conscience, les innombrables admirateurs de Maximilien Robespierre, durent courber la tête ; ils gémirent indignés, et gardèrent le silence. Qu'eussent-ils fait d'ailleurs ? Ce n'étaient pour la plupart ni des. écrivains ni des orateurs ; c'était le peuple tout entier, et, au 9 thermidor, la parole fut pour bien longtemps ôtée au peuple. Puis l'â.ge arriva, l'oubli se fit ; et la génération qui succéda aux rudes jouteurs des grandes années de la Révolution fut bercée uniquement au bruit des déclamations thermido-girondines. Dans son œuvre de calomnie et de diffamation, la réaction se trouva merveilleusement aidée par les apostasies d'une multitude de fonctionnaires, désireux de faire oublier leurs anciennes sympathies pour Robespierre[12], et surtout par l'empressement avec lequel nombre de membres de la Convention s'associèrent à l'idée machiavélique d'attribuer à Maximilien tous les torts, toutes les erreurs, toutes les sévérités de la Révolution, croyant dans un moment d'impardonnable faiblesse se dégager, par ce lâche et honteux moyen, de toute responsabilité dans les actes du gouvernement révolutionnaire[13]. Dans les premiers jours de ventôse an III (février 1795), quelques patriotes de Nancy, harcelés, mourant de faim, ayant osé dire que le temps où vivait Robespierre était l'âge d'or de la République, furent aussitôt dénoncés à la Convention par le représentant Mazade, alors en mission dans le département de la Meurthe. Hâtons-nous, écrivit ce digne émule de Courtois, de consigner dans les fastes de l'histoire que les violences de ce monstre exécrable, que le sang des Français qu'il fit couler par torrents, que le pillage auquel il dévoua toutes les propriétés, ont seuls amené ce moment de gêne...[14] Tel fut en effet l'infernal système suivi par les Thermidoriens. La France et l'Europe se trouvèrent littéralement inondées de libelles, de pamphlets, de prétendues histoires où l'odieux le dispute au bouffon. Le rapport de Courtois fut naturellement le grand arsenal où les écrivains mercenaires et les pamphlétaires de la réaction puisèrent à l'envi ; néanmoins, dès imaginations perverties trouvèrent moyen de renchérir sur ce chef-d'œuvre d'impudence et de mensonge. D'anciens collègues dé Maximilien s'abaissèrent jusqu'à ramasser dans la fange la plume du libelliste. Passe encore pour Fréron qui, dans une note adressée à Courtois, présente la figure de Robespierre comme ressemblant beaucoup à celle du chat[15] ! il n'y avait chez Fréron ni conscience ni moralité ; mais Merlin (de Thionville) ! On s'attriste en songeant qu'un patriote de cette trempe a prêté les mains à l'œuvre basse et ténébreuse entreprise par les héros de Thermidor. Son Portrait de Robespierre et sa brochure intitulée Louis Capet et Robespierre ne sont pas d'un honnête homme. Mais tout cela n'est rien auprès des calomnies enfantées par l'imagination des Harmand (de la Meuse)[16] et des Guffroy. Des presses de l'ancien propriétaire-rédacteur du Rouge sortirent des libelles dont les innombrables exemplaires étaient répandus à profusion dans les villes et dans les campagnes. Parmi les impostures de cette impure officine citons, outre les élucubrations de Laurent Lecointre, la Queue de Robespierre, ou les dangers de la liberté de la presse par Méhée fils ; les Anneaux de la queue ; Défends ta queue ; Jugement du peuple souverain qui condamne à mort la queue infernale de Robespierre ; Lettre de Robespierre à la Convention nationale ; la Tête à la Queue, ou Première Lettre de Robespierre à ses continuateurs ; j'en passe et des meilleurs[17]. Ajoutez à cela des nuées de libelles dont la seule nomenclature couvrirait plusieurs pages. Prose et vers, tout servit à noircir cette grande figure qui rayonnait d'un si merveilleux éclat aux yeux des républicains de l'an IL Les poètes, en effet, se mirent aussi de la partie, si l'on peut prostituer ce nom de poètes à d'indignes versificateurs qui mirent leur muse boiteuse et mercenaire au service des héros thermidoriens. Hélas ! pourquoi faut-il que parmi ces insulteurs du géant tombé, on ait le regret de compter l'auteur de la Marseillaise ! Mais autant Rouget de Lisle, inspiré par le génie de la patrie, avait été sublime dans le chant qui a immortalisé son nom, autant il fut plat et lourd dans l'hymne calomnieux composé par lui sur la conjuration de Robespierre, suivant l'expression de l'époque[18]. Le théâtre n'épargna pas les vaincus, et l'on nous montra sur la scène Maximilien Robespierre envoyant à la mort une jeune fille coupable de n'avoir point voulu sacrifier sa virginité à la rançon d'un père[19]. Mais les œuvres d'imagination pure ne suffisaient pas pour fixer l'opinion des esprits un peu sérieux, on eut des historiens à discrétion. Dès le lendemain de Thermidor parut une Vie secrète, politique et curieuse de Robespierre, déjà mentionnée par nous, et dont l'auteur voulut bien reconnaître que ce monstre feignit de vouloir épargner le sang[20]. Pareil aveu ne sortira pas de la plume du citoyen
Montjoie, que dis-je ! du sieur Félix-Christophe-Louis Ventre de Latouloubre
de Galart de Montjoie, auteur d'une Histoire de la conjuration de
Robespierre qui est le modèle du genre, parce qu'elle offre les allures
d'une œuvre sérieuse, et semble écrite avec une certaine modération. On y lit
cependant des phrases dans le genre de celle-ci : Chaque
citoyen arrêté était destiné à la mort. Robespierre n'avait d'autre soin que
de grossir les listes de proscription, que de multiplier le nombre des
assassinats. Le fer de la guillotine n'allait point assez vite à son gré. On
lui parla d'un glaive qui frapperait neuf têtes à la fois. Cette invention
lui plut. On en fit des expériences à Bicêtre, elles ne réussirent pas ; mais
l'humanité n'y gagna rien. Au lieu de trois, quatre victimes par jour,
Robespierre voulut en avoir journellement cinquante, soixante, et il fut obéi[21]. Il faut, pour
citer de semblables lignes, surmonter le dégoût qu'on éprouve. C'est ce
Montjoie qui prête à Maximilien le mot suivant : Tout
individu qui avait plus de 15 ans en 1789 doit être égorgé[22]. C'est encore
lui qui porte à cinquante-quatre mille le chiffre des victimes mortes sur
l'échafaud durant les six derniers mois du règne de Robespierre[23].Y a-t-il assez
de mépris pour les gens capables de mentir avec une telle impudence ? Eh
bien ! toutes ces turpitudes s'écrivaient et s'imprimaient à Paris en
l'an II de la République, quand quelques mois à peine s'étaient écoulés
depuis le jour où, dans une heure d'enthousiaste épanchement, Boissy-d'Anglas
appelait. Robespierre l'Orphée de la France
et le félicitait d'enseigner aux peuples les plus purs préceptes de la morale
et de la justice. Il n'y a pas à se demander si un pareil livre fit fortune[24]. Réaction thermidorienne, réaction girondine, réaction royaliste battirent des mains à l'envi. Les éditions de cet ouvrage se trouvèrent coup sur coup multipliées ; il y en eut de tous les formats, et il fut presque instantanément traduit en espagnol, en allemand et en anglais. C'était là sans doute que l'illustre Walter Scott avait puisé ses renseignements quand il écrivit sur Robespierre les lignes qui déshonorent son beau talent. Est-il maintenant nécessaire de mentionner les histoires plus ou moins odieuses el absurdes de Desessarts, la Vie et les crimes de Robespierre par Leblond de Neuvéglise, autrement dit l'abbé Proyard, ouvrage traduit en allemand, en italien, et si tristement imité de nos jours par un autre abbé Proyard ? Faut-il signaler toutes les rapsodies, tous les contes en l'air, toutes les fables acceptés bénévolement ou imaginés par les écrivains de la réaction ? Et n'avions-nous pas raison de dire, au commencement de notre histoire de Robespierre, que, depuis dix-huit cents ans, jamais homme n'avait été plus calomnié sur la terre ? Ah ! devant tant d'infamies, devant tant d'outrages sanglants à la vérité, la conscience, interdite, se trouble ; on croit rêver. Heureux encore, Robespierre, quand ce ne sont pas des libéraux et des démocrates qui viennent jeter sur sa tombe l'injure et la boue. II On voit à quelle école a été élevée la génération antérieure à la nôtre. Nous avons dit comment l'oubli s'était fait dans la masse des admirateurs de Robespierre. Gens simples pour la plupart, ils moururent sans rien comprendre au changement qui s'était produit dans l'opinion sur ce nom si respecté jadis. Une foule de ceux qui auraient pu le défendre étaient morts ou proscrits ; beaucoup se laissaient comprimer par la peur ou s'excusaient de leurs sympathies anciennes, en alléguant qu'ils avaient été trompés. Bien restreint fut le nombre des gens consciencieux dont la bouche ne craignit pas de s'ouvrir pour protester. D'ailleurs, dans les quinze années du Consulat et de l'Empire, il ne fut plus guère question de la Révolution et de ses hommes, sinon de temps à autre pour décimer ses derniers défenseurs. Quelle voix assez puissante aurait couvert le bruit du canon et des clairons ? Puis vint la Restauration. Oh i alors, on ne songea qu'à une chose, à savoir, de reprendre contre l'homme dont le nom était comme le symbole et le drapeau de la République la grande croisade thermidorienne, tant il paraissait nécessaire à la réaction royaliste d'avilir la démocratie dans l'un de ses plus purs, de ses plus ardents, de ses plus dévoués représentants. Et la plupart des libéraux de l'époque, anciens serviteurs de l'Empire, ou héritiers plus ou moins directs de la Gironde, de laisser faire. Eh bien ! qui le croirait ? toutes ces calomnies si patiemment, si habilement propagées, ces mensonges inouïs, ces diffamations éhontées, toutes ces infamies enfin, ont paru à certains écrivains aveuglés, je devrais dire fourvoyés, l'opinion des contemporains et l'expression du sentiment populaire[25]. Ah ! l'opinion des contemporains, il faut la chercher dans ces milliers de lettres qui chaque jour tombaient sur la maison Duplay comme une pluie de bénédictions. Nous avons déjà mentionné, en passant, un certain nombre de celles qui, au point de vue historique, nous ont paru avoir une réelle importance. Et, ceci est à noter, presque toutes ces lettres sont inspirées par les sentiments les plus désintéressés. Si dans quelques-unes, à travers l'encens et l'éloge, on sent percer l'intérêt personnel, c'est l'exception[26]. En général, ces lettres sont l'expression naïve de l'enthousiasme le plus sincère et d'une admiration sans bornes. Tu remplis le monde de ta renommée ; tes principes sont ceux de la nature, ton langage celui de l'humanité ; tu rends les hommes à leur dignité... ton génie et ta sage politique sauvent la liberté ; tu apprends aux Français, par les vertus de ton cœur et l'empire de ta raison, à vaincre ou mourir pour la liberté et la vertu..., lui écrivait l'un[27]. — Vous respirez encore, pour le bonheur de votre pays, en dépit des scélérats et des traîtres qui avoient juré votre perte. Grâces immortelles en soient rendues à l'Être suprême... Puissent ces sentiments, qui ne sont que l'expression d'un cœur pénétré de reconnaissance pour vos bienfaits, me mériter quelque part à votre estime. Sans vous je périssais victime de la plus affreuse persécution[28]..., écrivait un autre. Un citoyen de Tours lui déclare que, pénétré d'admiration pour ses talents, il est prêt à verser tout son sang plutôt que de voir porter atteinte à sa réputation[29]. Un soldat du nom de Brincourt, en réclamant l'honneur de verser son sang pour la patrie, s'adresse à lui en ces termes : Fondateur de la République, ô vous, incorruptible Robespierre, qui couvrez son berceau de l'égide de votre éloquence ![30]... Vers lui, avons-nous dit déjà s'élevaient les plaintes d'une foule de malheureux et d'opprimés, plaintes qui retentissaient d'autant plus douloureusement dans son cœur que la plupart du temps il était dans l'impuissance d'y faire droit. Républicain vertueux et intègre, lui mandait de Saint-Orner, à la date du 2 messidor, un ancien commissaire des guerres destitué par le représentant Florent Guyot, permets qu'un citoyen pénétré de tes sublimes principes et rempli de la lecture de tes illustres écrits, où respirent le patriotisme le plus pur, la morale la plus touchante et la plus profonde, vienne à ton tribunal réclamer la justice, qui fut toujours la vertu innée de ton âme... Je fais reposer le succès de ma demande sur ton équité, qui fut toujours la base de toutes tes actions...[31] Et le citoyen Carpot : Je regrette de n'avoir pu vous entretenir quelques instants. Il me semble que je laisse échapper par là un moyen d'abréger la captivité des personnes qui m'intéressent[32]. Un littérateur du nom de Félix, qui depuis quarante ans vivait en philosophe dans un ermitage au pied des Alpes, d'où il s'associait par le cœur aux destinées de la Révolution, étant venu à Paris au mois d'août f193, écrit à Robespierre afin de lui demander la faveur d'un entretien, tant sa conduite et ses discours lui avaient inspiré d'estime et d'affection pour sa personne ; et il lui garantit d'avance la plus douce récompense au cœur de l'homme de bien, sa propre estime, et celle de tous les gens vertueux et éclairés[33]. Aux yeux des uns, c'est l'apôtre de l'humanité, l'homme sensible, humain et bienfaisant par excellence, réputation, lui dit-on, sur laquelle vos ennemis mêmes n'élèvent, pas le plus petit doute[34] ; aux yeux des autres, c'est le messie promis par l'Éternel pour réformer toutes choses[35]. Un citoyen de Toulouse ne peut s'empêcher de témoigner à Robespierre toute la joie qu'il a ressentie en apprenant qu'il y avait entre eux une ressemblance frappante. Il rougit, seulement de ne ressembler que par le physique au régénérateur et bienfaiteur de sa patrie[36]. Maximilien est regardé comme la pierre angulaire de l'édifice constitutionnel, comme le flambeau, la colonne de la République[37]. Tous les braves Français sentent avec moi de quel prix sont vos infatigables efforts pour assurer la liberté, en vous criant par mon organe : Béni soit Robespierre ! lui écrit le cito en Jamgon[38]. L'estime que j'avais pour toi dès l'Assemblée constituante, lui mande Borel me fit te placer au ciel à côté d'Andromède dans un projet de monument sidéral)[39]... Et Courtois ne peut s'empêcher de S'écrier dans son rapport : C'était à qui enivrerait l'idole... Partout même prostitution d'encens, de vœux et d'hommages ; partout on verserait son sang pour sauver ses jours[40]. Le misérable rapporteur se console, il est vrai, en ajoutant que si la peste avait des emplois et des trésors à distribuer, elle aurait aussi ses courtisans[41]. Mais les courtisans et les rois, c'est l'exception, et les hommages des courtisans ne sont jamais désintéressés. Robespierre, lui, d'ailleurs, n'avait ni emplois ni trésors à distribuer. On connaît sa belle réponse à ceux qui, pour le déconsidérer, allaient le présentant comme revêtu d'une dictature personnelle Ils m'appellent tyran ! Si je l'étais, ils ramperaient à mes pieds, je les gorgerais d'or, je leur assurerais le droit de commettre tous les crimes, et ils seraient reconnaissants...[42] Nous pourrions multiplier les citations de ces lettres, dont le nombre était presque infini, du propre aveu de Courtois[43], avons-nous dit, et Courtois s'est bien gardé, comme on pense, de publier les plus concluantes en faveur de Robespierre[44]. Or, comme contre-poids à ces témoignages éclatants, comme contre-partie de ce concert d'enthousiasme, qu'a trouvé Courtois à offrir à la postérité ? quelques misérables lettres anonymes, les unes ineptes, les autres ordurières, œuvres de bassesse et de lâcheté dont nous aurons à dire un mot, et que tout homme de cœur ne saurait s'empêcher de fouler aux pieds avec dédain. III On sait maintenant, à ne s'y pas méprendre, quelle était l'opinion publique à l'égard de Robespierre. Le véritable sentiment populaire pour sa personne, c'était de l'idolâtrie, comme l'impur Geffroy se trouva obligé de l'avouer lui-même[45]. Ce sentiment, il ressort des lettres dont nous avons donné des extraits assez significatifs ; il ressort de ces lettres des Girondins sauvés par Robespierre, lettres que nous avons révélées et qui reviennent au jour pour déposer comme d'irrécusables témoins ; ce sentiment, il ressort enfin des aveux involontaires des Thermidoriens. D'après Billaud-Varenne, dont l'autorité a ici tant de
poids, Maximilien était considéré dans l'opinion comme l'être le plus
essentiel de la République[46]. De leur côté,
les membres des deux anciens comités ont avoué que, quelque prévention qu'on
eût, on ne pouvait se dissimuler quel était l'état des esprits à cette
époque, et que la popularité de Robespierre dépassait toutes les bornes[47]. Écoutons maintenant
Billaud-Varenne, atteint à son tour par la réaction et se débattant sous
l'accusation de n'avoir pas dénoncé plus tôt la tyrannie de Robespierre : Sous quels rapports eût-il pu paraître coupable ? S'il
n'eût pas manifesté l'intention de frapper, de dissoudre, d'exterminer la
représentation nationale, si l'on n'eût pas eu à lui reprocher jusqu'à sa POPULARITÉ
même... popularité si énorme qu'elle eût
suffi pour le rendre suspect et trop dangereux dans un État libre, en un mot
s'il ne se fût point créé une puissance monstrueuse eut aussi indépendante du
comité Salut public que de la Convention nationale elle-même, Robespierre ne
se serait pas montré sous les traits odieux de la tyrannie, et tout ami de la
liberté lui eût conservé son estime[48]. Et plus loin : Nous demandera-t-on, comme on l'a déjà fait, pourquoi nous
avons laissé prendre tant d'empire à Robespierre ? Oublie-t-on que dès
l'Assemblée constituante, il jouissait déjà d'une immense popularité et qu'il
obtint le titre d'Incorruptible ? Oublie-t-on, que pendant l'Assemblée
législative sa popularité ne fit que s'accroître... ? Oublie-t-on que, dans la Convention nationale,
Robespierre se trouva bientôt le seul qui, fixant sur sa personne tous les
regards, acquit tant de confiance qu'elle le rendit prépondérant, de sorte
que lorsqu'il est arrivé au comité de Salut public, il était déjà l'être le
plus important de la France ? Si l'on me demandait comment il avait réussi à
prendre tant d'ascendant sur l'opinion publique, je répondrais que c'est
en affichant LES VERTUS
LES PLUS AUSTÈRES, LE DÉVOUEMENT LE PLUS ABSOLU, LES PRINCIPES LES PLUS PURS[49]. Otez de ce morceau ce double mensonge thermidorien, à savoir l'accusation d'avoir eu l'intention de dissoudre la Convention, et d'avoir exercé une puissance monstrueuse en dehors de l'Assemblée et des comités, il reste en faveur de Robespierre une admirable plaidoirie, d'autant plus saisissante qu'elle est comme involontairement tombée de la plume d'un de ses proscripteurs. Nous allons voir bientôt jusqu'où Robespierre poussa le respect pour hi Représentation nationale ; et quant à cette puissance monstrueuse, laquelle était purement et simplement un immense ascendant moral, elle était si peu réelle, si peu effective, qu'il suffisait à ses collègues, comme on l'a vu plus haut, d'un simple coup d'œil pour qu'instantanément la majorité fût acquise contre lui. Son grand crime, aux yeux de Billaud-Varenne et de quelques républicains sincères, fut précisément le crime d'Aristide : sa popularité ; il leur répugnait de l'entendre toujours appeler le Juste. Mais si le sentiment populaire était si favorable à Maximilien, en était-il de même de l'opinion des gens dont l'attachement à la Révolution était médiocre ? Je réponds oui, sans hésiter, et je le prouve. Pour cela, je rappellerai d'abord les lettres de reconnaissance adressées à Robespierre par les soixante-treize Girondins dont il avait été le sauveur ; ensuite je m'en référerai à l'avis de Boissy-d'Anglas, Boissy le type le plus parfait de ces révolutionnaires incolores et incertains, de ces royalistes déguisés qui se fussent peut-être accommodés de la République sous des conducteurs comme Robespierre, mais qui, une fois la possibilité d'en sortir entrevue, n'ont pas mieux demandé que de s'associer aux premiers coquins venus pour abattre l'homme à l'existence duquel ils la savaient attachée. Nous insistons donc sur l'opinion de Boissy-d'Anglas, parce qu'il est l'homme dont la réaction royaliste et girondine a le plus exalté le courage, les vertus et le patriotisme. Or, quelle nécessité le forçait de venir en messidor, à moins d'être le plus lâche et le dernier des hommes, présenter Robespierre en exemple au monde, dans un ouvrage dédié à la Convention nationale, s'il ne croyait ni aux vertus, ni au courage, ni à la pureté de Maximilien ? Rien ne nous autorise à révoquer en doute sa sincérité, et quand il comparait Robespierre à Orphée enseignant aux hommes les principes de la civilisation et de la morale, il laissait échapper de sa conscience un cri qui n'était autre chose qu'un splendide hommage rendu à la vérité[50]. L'opinion postérieure de Boissy ne compte pas. Ainsi, à l'exception de quelques ultra-révolutionnaires de bonne foi, de royalistes se refusant à toute espèce de composition avec la République, de plusieurs anciens amis de Danton ne pouvant pardonner à Maximilien de l'avoir laissé sacrifier, et enfin d'un certain nombre de Conventionnels sans conscience et perdus de crimes, la France tout entière était de cœur avec Robespierre et ne prononçait son nom qu'avec respect et amour. Il était arrivé, pour nous servir encore d'une expression de Billaud-Varenne, à une hauteur de puissance morale inouïe jusqu'alors ; tous les hommages et tous les vœux étaient pour lui seul, on le regardait comme l'être unique ; la prospérité publique semblait inhérente à sa personne, on s'imaginait, en un mot, que sa perte était la plus grande calamité qu'on eût à craindre[51]. Eh bien je le demande à tout homme sérieux et de bonne foi, est il un seul instant permis de supposer la forte génération de 1789. capable de s'être éprise d'idolâtrie pour un génie médiocre, pour un vaniteux, pour un rhéteur pusillanime, pour un esprit étroit et mesquin, pour un être bilieux et sanguinaire, suivant les épithètes prodiguées à Maximilien par tant d'écrivains ignorants, à courte vue ou de mauvaise foi, je ne parle pas seulement des libellistes ? Au spectacle du déchaînement qui, après Thermidor, se produisit contre Robespierre, Billaud-Varenne, quoique ayant joué un des principaux rôles dans le lugubre drame, ne put s'empêcher d'écrire : J'aime bien voir ceux qui se sont montrés jusqu'au dernier moment les plus bas valets de cet homme le rabaisser au-dessous d'un esprit médiocre, maintenant qu'il n'est plus[52]. On remarqua en effet, parmi les plus lâches détracteurs de Maximilien, quelques-uns de ceux qui, la veille de sa chute, lui proposaient de lui faire un rempart de leurs corps[53]. Ah I je le répète, c'est avoir une étrange idée de nos pères que de les peindre aux pieds d'un ambitieux sans valeur et sans talent ; on ne saurait les insulter davantage dans leur gloire et dans leur œuvre. Il faut en convenir franchement, si ces fils de Voltaire et de Rousseau, si ces rudes champions de la justice et du droit, eurent pour Robespierre un enthousiasme et une admiration sans bornes, c'est que Robespierre fut le plus énergique défenseur de la liberté, c'est qu'il représenta la démocratie dans ce qu'elle a de plus pur, de plus noble, de plus élevé, c'est qu'il n'y eut jamais un plus grand ami de la justice et de l'humanité. L'événement du reste leur donna tristement raison, car, une fois l'objet de leur culte brisé, la Révolution déchut des hauteurs où elle planait et se noya dans une boue sanglante. IV Il est aisé de comprendre à présent pourquoi les collègues de Maximilien au comité de Salut public hésitèrent jusqu'au dernier moment à conclure une alliance monstrueuse avec les conjurés de Thermidor, avec les Fouché, les Tallien, les Fréron, les Rayère, les Courtois et autres. Un secret pressentiment semblait les avertir qu'en sacrifiant l'austère auteur de la Déclaration des droits de l'homme, ils sacrifiaient la République elle-même et préparaient leur propre perte. C'est un fait avéré que tout d'abord on songea à attaquer le comité dé Salut public en masse. Certains complices de la conjuration ne comprenaient pas très-bien pourquoi l'on s'en prenait à Robespierre seul, et ils l'eussent moins compris encore s'ils lavaient su que, depuis plus d'un mois, le comité exerçait un pouvoir dictatorial en dehors de la participation active de Maximilien. Un de ces mannequins de la réaction, le député Laurent Lecointre, ayant conçu le projet de rédiger un acte d'accusation contre tous les membres du comité, reçut le conseil d'attaquer Robespierre seul, afin que le succès fût plus certain[54]. On sait comment il se rendit à cet avis, et tout le monde connaît le fameux acte d'accusation qu'il révéla courageusement... après Thermidor, et dont le titre se trouve pompeusement orné du projet d'immoler Maximilien Robespierre en plein Sénat[55]. Le conseil était bon, car si les Thermidoriens s'en fussent pris au comité en masse, s'ils ne fussent point parvenus à entraîner Billaud-Varenne, qui devint leur allié le plus actif et le plus utile, ils eussent été infailliblement écrasés. Billaud, c'était l'image incarnée de la Terreur. Quiconque, écrivait-il en répondant à ses accusateurs, est chargé de veiller au salut public, et, dans les grandes crises, ne lance pas la foudre que le peuple a remise entre ses mains pour exterminer ses ennemis, est le premier traître à la patrie[56]. Étonnez-vous donc si, en dépit de Robespierre, les exécutions sanglantes se multipliaient, si les sévérités étaient indistinctement prodiguées, si la Terreur s'abattait sur toutes les conditions. Il semblait, suivant la propre expression de Maximilien, qu'on eût cherché à rendre les institutions révolutionnaires odieuses par les excès[57]. Le 2 thermidor, Robespierre, qui depuis un mois avait refusé d'approuver toutes les listes de détenus renvoyés devant le tribunal révolutionnaire, en signa une de 138 noms appartenant à des personnes dont la culpabilité sans doute ne lui avait pas paru douteuse ; mais le lendemain il repoussait, indigné, une autre liste de trois cent dix-huit détenus offerte à sa signature[58], et, trois jours plus tard, comme nous l'avons dit déjà il refusait encore de participer à un arrêté rendu par les comités de Salut public et de Sûreté générale réunis, arrêté instituant, en vertu d'un décret rendu le 4 ventôse, quatre commissions populaires chargées de juger promptement les ennemis du peuple détenus dans toute l'étendue de la République, et auquel s'associèrent cependant ses amis Saint-Just et Couthon[59]. En revanche, comme nous l'avons dit aussi, il avait écrit de sa main et signé l'ordre d'arrestation d'un nommé Lépine, administrateur des travaux publics, lequel avait abusé de sa position pour se faire adjuger à vil prix des biens nationaux[60]. A son sens, on allait beaucoup trop vite, et surtout
beau-trop légèrement en besogne, comme le prouvent d'une façon irréfragable
ces paroles tombées de sa bouche dans la séance du 8 thermidor, déjà citées
en partie : Partout les actes d'oppression avaient
été multipliés pour étendre le système de terreur... Est-ce nous qui avons plongé dans les cachots les
patriotes et porté la terreur dans toutes les conditions ? Ce sont les
monstres que nous avons accusés. Est-ce nous qui, oubliant les crimes de
l'aristocratie et protégeant les traîtres, avons déclaré la guerre aux
citoyens paisibles, érigé en crime ou des préjugés incurables ou des choses indifférentes,
pour trouver partout des coupables et rendre la Révolution redoutable au
peuple même ? Ce sont les monstres que nous avons accusés. Est-ce nous qui,
recherchant des opinions anciennes, fruit de l'obsession des traîtres, avons
promené le glaive sur la plus grande partie de la Convention nationale,
demandions dans les sociétés populaires les tètes de six cents représentants
du peuple ? Ce sont les monstres que nous avons accusés...[61] Billaud-Varenne
ne put pardonner à Robespierre de vouloir supprimer la Terreur en tant que
Terreur, et la réduire à ne s'exercer, sous forme de justice sévère, que
contre les seuls ennemis actifs de la Révolution. Aussi fut-ce sur Billaud
que, dans une séance du conseil des Anciens, Garat rejeta toute la responsabilité
des exécutions sanglantes faites pendant la durée du comité de Salut public[62]. Cependant, comme averti par sa conscience, Billaud hésita longtemps avant de se rendre aux invitations pressantes de ses collègues du comité de Sûreté générale, acquis presque tous à la conjuration. Saint-Just, dans son dernier discours, a très bien dépeint les anxiétés et les doutes de ce patriote aveuglé. Il devenait hardi dans les moments où, ayant excité les passions, on paraissait écouter ses conseils, mais son dernier mot expirait toujours sur ses lèvres, il appelait tel homme absent Pisistrate ; aujourd'hui présent, il était son ami ; il était silencieux, pâle, l'œil fixe, arrangeant ses traits altérés. La vérité n'a point ce caractère ni cette politique[63]. Un montagnard austère et dévoué, Ingrand, député de la Vienne à la Convention, alors en mission, étant venu à Paris vers cette époque, alla voir Billaud-Varenne. Il se passe ici des choses fort importantes, lui dit ce dernier, va trouver Ruamps, il t'informera de tout. Billaud eut comme une sorte de honte de faire lui-même la confidence du noir complot. Ingrand courut chez Ruamps, qui le mit au courant des machinations ourdies contre Robespierre en l'engageant vivement à se joindre aux conjurés. Saisi d'un sombre pressentiment, Ingrand refusa non seulement d'entrer dans la conjuration, mais il s'efforça de persuader à Ruamps d'en sortir, lui en décrivant d'avance les conséquences funestes, et l'assurant qu'une attaque contre Robespierre, si elle était suivie de succès, entraînerait infailliblement la perte de la République[64]. Puis il repartit, le cœur serré et plein d'inquiétudes. Égaré par d'injustifiables préventions, Ruamps demeura sourd à ces sages conseils ; mais que de fois, plus tard, pris de remords, il dut se rappeler la sinistre prédiction d'Ingrand ! La vérité est que Billaud-Varenne agit de dépit et sous l'irritation profonde de voir Robespierre ne rien comprendre à son système d'improviser la foudre à chaque instant. Ce fut du reste le remords cuisant des dernières années de sa vie. Il appelait le 9 thermidor sa véritable faute. Je le répète, disait-il, la Révolution puritaine a été perdue le 9 thermidor. Depuis, combien de fois j'ai déploré d'y avoir agi de colère[65]. Ah ! ces remords de Billaud-Varenne, ils ont été partagés par tous les vrais républicains coupables d'avoir, dans une heure d'égarement et de folie, coopéré par leurs actes ou par leur silence à la chute de Robespierre. V Un des hommes qui contribuèrent le plus à amener les membres du comité de Salut public à l'abandon de Maximilien fut certainement Carnot. Esprit laborieux, honnête, mais caractère sans consistance et sans fermeté, ainsi qu'il le prouva de reste quand, après Thermidor, il lui fallut rendre compte de sa conduite comme membre du comité de Salut public, Carnot avait beaucoup plus de penchant pour Collot-d'Herbois et Billaud-Varenne, qui jusqu'au dernier moment soutinrent le système de la Terreur quand même, que pour Robespierre et Saint-Just qui voulurent en arrêter les excès et s'efforcèrent d'y substituer la justice[66]. Les premiers, il est vrai, s'inclinaient respectueusement et sans mot dire devant les aptitudes militaires de Carnot, dont les seconds s'étaient permis quelquefois de critiquer les actes. Ainsi, Maximilien lui reprochait de persécuter les généraux patriotes, et Saint-Just de ne pas assez tenir compte des observations que lui adressaient les représentants en mission aux armées, lesquels, placés au centre des opérations militaires, étaient mieux à même de juger des besoins de nos troupes et de l'opportunité de certaines mesures : Il n'y a que ceux qui sont dans les batailles qui les gagnent, et il n'y a que ceux qui sont puissants qui en profitent...[67], disait Saint-Just. Paroles trop vraies, que Carnot ne sut point pardonner à la mémoire de son jeune collègue. Nous avons déjà parlé d'une altercation qui avait eu lieu au mois de floréal entre ces deux membres du comité de Salut public, altercation à laquelle on n'a pas manqué, après coup, de mêler Robespierre, qui y avait été complètement étranger. A son retour de l'armée, vers le milieu de messidor, Saint-Just avait eu avec Carnot de nouvelles discussions au sujet d'un ordre malheureux donné par son collègue. Carnot, ayant dans son bureau des Tuileries imaginé une expédition militaire, avait prescrit à Jourdan de détacher dix-huit mille hommes de son armée pour cette expédition. Si cet ordre avait été exécuté, l'armée de Sambre et-Meuse aurait été forcée de quitter Charleroi, de se replier même sous Philippeville et Givet, en abandonnant Avesnes et Maubeuge[68]. Heureusement les représentants du peuple présents à l'armée de Sambre-et-Meuse avaient pris sur eux de suspendre le malencontreux ordre. Cette grave imprudence de Carnot avait été signalée dès l'époque, et n'avait pas peu contribué à lui nuire dans l'opinion publique[69]. Froissé dans son amour-propre, Carnot ne pardonna pas à Saint-Just, et dans ses rancunes contre lui il enveloppa Robespierre, dont la popularité n'était peut-être pas sans l'offusquer. Tout en reprochant à son collègue de persécuter les généraux fidèles[70], Maximilien, parait-il, faisait grand cas de ses talents[71]. Carnot, nous dit-on, ne lui rendait pas la pareille[72]. Cela dénote tout simplement chez lui une intelligence médiocre, quoi qu'en aient dit ses apologistes. Il fut, je crois, extrêmement jaloux de la supériorité d'influence et de talent d'un collègue plus jeune que lui ; et, sous l'empire de ce sentiment, il se laissa facilement entraîner dans la conjuration thermidorienne. Le 9 thermidor, comme en 1815, Carnot fut le jouet et la dupe de Fouché. Dans les divers Mémoires publiés sur lui, on trouve contre
Robespierre beaucoup de lieux communs, d'appréciations erronées et injustes,
de redites, de déclamations renouvelées des Thermidoriens, mais pas un fait
précis, rien surtout de nature à justifier la part active prise par Carnot au
guet-apens de Thermidor. Rien de curieux, du reste, comme l'embarras des
anciens collègues de Maximilien quand il s'est agi de répondre à cette
question : Pourquoi avez-vous attendu si longtemps pour le démasquer ? — Nous
ne possédions pas son discours du 8 thermidor, ont-ils dit, comme on a vu
plus haut, et c'était l'unique preuve, la preuve matérielle des crimes du
tyran[73]. A cet égard
Billaud-Varenne, Collot - d'Herbois et Barère sont d'une unanimité touchante.
Dans l'intérieur du comité Robespierre était inattaquable, parait-il, car il colorait ses opinions de fortes nuances de bien public
et il les ralliait adroitement à l'intérêt des plus graves circonstances[74]. Aux Jacobins, ses
discours étaient remplis de patriotisme, et ce n'est pas là sans doute qu'il
aurait divulgué ses plans de dictature ou son ambition triumvirale[75]. Ainsi il a
fallu arriver jusqu'au 8 thermidor pour avoir seulement l'idée que
Robespierre eût médité des plans de dictature ou fût doué d'une ambition
triumvirale. Savez-vous quel a été, au dire de Collot-d'Herbois, l'instrument
terrible de Maximilien pour dissoudre la Représentation nationale, amener la
guerre civile, et rompre le gouvernement ? son discours[76]. Et de son côté
Billaud-Varenne a écrit : Je demande à mon tour qui
serait sorti vainqueur de cette lutte quand pour confondre le tyran, quand
pour dissiper l'illusion générale nous n'avions ni son discours du 8
thermidor... ni le discours de Saint-Just ?[77] C'est puéril,
n'est-ce pas ? Voilà pourtant sur quelles accusations s'est perpétuée jusqu'à
nos jours la tradition du fameux triumvirat dont le fantôme est encore évoqué
de temps à autre par certains niais solennels, chez qui la naïveté est au
moins égale à l'ignorance. Que les misérables, coalisés contre Robespierre, se soient
attachés à répandre contre lui cette accusation de dictature, cela se
comprend de la part de gens sans conscience : c'était leur unique moyen
d'ameuter contre lui certains patriotes ombrageux. Ce
mot de dictature a des effets magiques, répondit Robespierre dans un
admirable élan, en prenant la Convention pour juge entre ses calomniateurs et
lui ; il flétrit la liberté, il avilit le
gouvernement, il détruit la République, il dégrade toutes les institutions révolutionnaires,
qu'on présente comme l'ouvrage d'un seul homme ; il rend odieuse la justice
nationale, qu'il présente comme instituée pour l'ambition d'un seul homme ;
il dirige sur un point toutes les haines et tous les poignards du fanatisme
et de l'aristocratie. Quel terrible usage les ennemis de la République ont
fait du seul nom d'une magistrature romaine Et si leur érudition nous est si
fatale, que sera-ce de leurs trésors et de leurs intrigues ? Je ne parle
point de leurs armées. N'est-ce pas là le dédain poussé jusqu'au sublime[78] ? Qu'il me soit permis, ajoutait Robespierre, de renvoyer au duc d'York et à tous les écrivains royaux
les patentes de cette dignité ridicule qu'ils m'ont expédiées les premiers.
Il y a trop d'insolence à des rois qui ne sont pas sûrs de conserver leurs
couronnes, de s'arroger le droit d'en distribuer à d'autres... J'ai vu d'indignes mandataires du peuple qui auraient
échangé ce titre glorieux (celui du
citoyen) pour celui de valet de chambre de Georges
ou de d'Orléans. Mais qu'un représentant du peuple qui sent la dignité de ce
caractère sacré, qu'un citoyen français digne de ce nom puisse abaisser ses
vœux jusqu'aux grandeurs coupables et ridicules qu'il a contribué à
foudroyer, et qu'il se soumette à la dégradation civique pour descendre à
l'infamie du trône, c'est ce qui ne parait vraisemblable qu'à ces êtres
pervers qui n'ont pas même le droit de croire à la vertu. Que dis-je, vertu ?
C'est une passion naturelle, sans doute ; mais comment la connaîtraient-elles,
ces âmes vénales qui ne s'ouvrirent jamais qu'à des passions lâches et
féroces, ces misérables intrigants qui ne lièrent jamais le patriotisme à
aucune idée morale ?... Mais elle existe, je
vous en atteste, âmes sensibles et pures, elle existe cette passion tendre,
impérieuse, irrésistible, tourment et délices des cœurs magnanimes, cette
horreur profonde de la tyrannie, ce zèle compatissant pour les opprimés, cet
amour sacré de la patrie, cet amour plus sublime et plus saint de l'humanité,
sans lequel une grande révolution n'est qu'un crime éclatant qui détruit un
autre crime ; elle existe cette ambition généreuse de fonder sur la terre la
première république du monde, cet égoïsme des hommes non dégradés qui trouve
une volupté céleste dans le calme d'une conscience pure et dans le spectacle
ravissant du bonheur public ? Vous la sentez en ce moment qui brûle dans vos
âmes ; je la sens dans la mienne. Mais comment nos vils calomniateurs la
devineraient-ils ? comment l'aveugle-né aurait-il l'idée de la lumière ?[79]... Rarement
d'une poitrine oppressée sortirent des accents empreints d'une vérité plus
poignante. A cette noble protestation répondirent seuls l'injure brutale, la
calomnie éhontée et l'échafaud. Ce fut, j'imagine, pour s'excuser aux yeux de la postérité d'avoir lâchement abandonné Robespierre, et aussi pour se parer d'un vernis de stoïcisme républicain, que ses collègues du comité prétendirent, après coup, l'avoir sacrifié parce qu'il aspirait à la dictature. Ce qui les fâchait, au contraire, c'était d'avoir en lui un censeur incommode, se plaignant toujours des excès de pouvoir. Les conclusions de son discours du 8 thermidor ne tendaient-elles pas surtout à faire cesser l'arbitraire dans les comités ? Constituez, disait-il à l'Assemblée, constituez l'unité du gouvernement sous l'autorité suprême de la Convention nationale, qui est le centre et le juge, et écrasez ainsi toutes les factions du poids de l'autorité nationale, pour élever sur leurs ruines la puissance de la justice et de la liberté[80]... Et de quoi se plaignait Saint-Just dans son discours du 9
? Précisément de ce qu'au comité de Salut public les délibérations avaient été
livrées à quelques hommes ayant le même pouvoir et
la même influence que le comité même, et de ce que le gouvernement
s'était trouvé abandonné à un petit nombre qui,
jouissant d'un absolu pouvoir, accusa les autres d'y prétendre pour le
conserver[81]. Les véritables
dictateurs étaient donc Billaud-Varenne, Collot-d'Herbois, Barère, Carnot,
C.-A. Prieur et Robert Lindet, nullement Robespierre, qui avait, en quelque
sorte, résigné sa part d'autorité, ni Couthon, presque toujours retenu chez
lui par la maladie, ni Saint-Just, presque toujours aux armées, qu'on
laissait à l'écart et paisible, € comme un citoyen sans prétention[82]. C'est donc le comble de l'absurdité et de l'impudence d'avoir présenté ce dernier comme ayant un jour réclamé pour Robespierre la... dictature. N'importe ! comme Saint-Just était mort et ne pouvait répondre, les membres Odes anciens comités commencèrent, par insinuer qu'il avait proposé aux comités réunis de faire gouverner la France par des réputations patriotiques, en attendant qu'il y eut des institutions républicaines[83] ! L'accusation était bien vague ; tout d'abord on n'osa pas aller plus loin ; mais plus lard on prit des airs de Brutus indigné. Dans des Mémoires où les erreurs les plus grossières se heurtent de page en page aux mensonges les plus effrontés, Barère prétend que, dans les premiers jours de messidor, Saint-Just proposa formellement aux deux comités réunis de décerner la dictature à Robespierre. — Dans les premiers jours de messidor, notons-le en passant, Saint-Just n'était même pas à Paris ; il n'y revint que dans la nuit du 10. Telle est, du reste, l'inadvertance de Barère dans ses mensonges, qu'un peu plus loin il transporte la scène en thermidor, pour la replacer ensuite en messidor[84]. Pendant l'allocution de Saint-Just, Robespierre se serait promené autour de la salle, gonflant ses joues, soufflant avec saccades. Et il y a de braves[85] gens, sérieux, honnêtes, qui acceptent bénévolement de pareilles inepties ! Pour renfoncer son assertion, Barère s'appuie d'une lettre
adressée à Robespierre par un Anglais nommé Benjamin Vaughan, résidant à
Genève, lettre dans laquelle on soumet à Maximilien l'idée d'un protectorat
de la France sur les provinces hollandaises et rhénanes confédérées, ce qui,
suivant l'auteur du projet, aurait donné à la République huit ou neuf
millions d'alliés[86] ; d'où Barère
conclut que Robespierre était en relations avec le gouvernement anglais, et qu'il
aspirait à la dictature, demandée en sa présence par Saint-Just[87]. En vérité, on
n'a pas plus de logique ! La dictature était aussi loin de la pensée de
Saint-Just que de celle de Robespierre. Dans son discours du 9 thermidor, le
premier disait en propres termes : Je déclare
qu'on a tenté de mécontenter et d'aigrir les esprits pour les conduire à des
démarches funestes, et l'on n'a point espéré de moi, sans doute, que je
prêterais mes mains pures à l'iniquité. Ne croyez pas au moins qu'il ait pu
sortir de mon cœur l'idée de flatter un homme ! Je le défends parce
qu'il m'a paru irréprochable, et je l'accuserais lui-même s'il devenait
criminel[88].
— Criminel, c'est-à-dire s'il eut aspiré à la dictature. Enfin — raison décisive et qui coupe court au débat — comment ! Saint-Just aurait proposé en pleine séance du comité de Salut public d'armer Robespierre du pouvoir dictatorial, et aucun de ceux qu'il accusait précisément d'avoir exercé l'autorité à l'exclusion de Maximilien ne se serait levé pour retourner contre lui l'accusation I Personne n'eût songé à s'emparer de cet argument si favorable aux projets des conjurés et bien de nature à exaspérer contre celui qu'on voulait abattre les républicains les plus désintéressés dans la lutte ! Cela est inadmissible, n'est-ce pas ? Eh bien ! pas une voix accusatrice ne se fit entendre à cet égard. Et quand on voit aujourd'hui des gens se prévaloir d'une assertion maladroite de Barère, assertion dont on ne trouve aucune trace dans les discours prononcés ou les écrits publiés à l'époque même par ce membre du comité de Salut public, on se prend involontairement à douter de leur bonne foi. Robespierre garda jusqu'à sa dernière heure trop de respect à la Convention nationale pour avoir jamais pensé à détourner à son profit une part de l'autorité souveraine de la grande Assemblée, et nous avons dit tout à l'heure avec quelle instance singulière il demanda que le comité de Salut public fût, en tout état de cause, subordonné à la Convention nationale. Comme Billaud-Varenne, dont il était si loin d'avoir les convictions sincères et farouches, Barère eut son heure de remords. Un jour, sur le soir de sa vie, peu de temps après sa rentrée en France, retenu au lit par un asthme violent, il reçut la visite de l'illustre sculpteur David (d'Angers). Il s'entretint longtemps de Robespierre avec l'artiste démocrate. Après avoir parlé du désintéressement de son ancien collègue et de ses aspirations à la dictature — deux termes essentiellement contradictoires — il ajouta : Depuis, j'ai réfléchi sur cet homme ; j'ai vu que son idée dominante était l'établissement du gouvernement républicain, qu'il poursuivait, en effet, des hommes dont l'opposition entravait les rouages de ce gouvernement... Nous n'avons pas compris cet homme... il avait le tempérament des grands hommes, et la postérité lui accordera ce titre. Et comme David confiait au vieux Conventionnel son projet de sculpter les traits des personnages les plus éminents de la Révolution et prononçait le nom de Danton : — N'oubliez pas Robespierre ! s'écria Barère en se levant avec vivacité sur son séant, et, en appuyant sa parole d'un geste impératif : c'était un homme pur, intègre, un vrai républicain. Ce qui l'a perdu, c'est sa vanité, son irascible susceptibilité et son injuste défiance envers ses collègues... Ce fut un grand malheur !... Puis, ajoutent ses biographes, sa tête retomba sur sa poitrine, et il demeura longtemps enseveli dans ses réflexions[89]. Ainsi, dans cet épanchement suprême, Barère reprochait à Maximilien... quoi ?... sa vanité, sa susceptibilité, sa défiance. Il fallait bien qu'il colorât de l'ombre d'un prétexte sa participation trop active au guet-apens de Thermidor. Etonnez-vous donc qu'en ce moment des visions sanglantes aient traversé l'esprit du moribond, et qu'il soit resté comme anéanti sous le poids du remords ! VI Cependant les Thermidoriens continuaient dans l'ombre leurs manœuvres odieuses. Présenter Robespierre, aux uns comme l'auteur des persécutions indistinctement prodiguées, aux autres comme un modéré, décidé à arrêter le cours terrible de la Révolution, telle fut leur tactique. On ne saura jamais ce qu'ils ont répandu d'assignats pour corrompre l'esprit public et se faire des créatures. Leurs émissaires salariaient grassement des perturbateurs, puis s'en allaient de tous côtés, disant : Toute cette canaille-là est payée par ce coquin de Robespierre. Et, ajoute l'auteur de la note où nous puisons ces renseignements, voilà Robespierre qui a des ennemis bien gratuitement, et le nombre des mécontents bien augmenté[90]. Mais c'était surtout comme contre-révolutionnaire qu'on essayait de le déconsidérer aux yeux des masses. Comment, en effet, aurait-on pu le transformer alors en agent de la Terreur, quand on entendait un de ses plus chers amis, Couthon, dénoncer aux Jacobins les persécutions exercées par l'espion Senar, ce misérable agent du comité de Sûreté générale, et se plaindre, en termes indignés, du système affreux mis en pratique par certains hommes pour tuer la liberté par le crime. Les fripons ainsi désignés — quatre à cinq scélérats, selon Couthon — prétendaient qu'en les attaquant on voulait entamer la représentation nationale. Personne plus que-nous ne respecte et n'honore la Convention, s'écriait Couthon. Nous sommes tous disposés à verser mille fois tout notre sang pour elle. Nous honorons par-dessus tout la justice et la vertu, et je déclare, pour mon compte, qu'il n'est aucune puissance humaine qui puisse m'imposer silence toutes les fois que je verrai la justice outragée[91]. Robespierre jeune, de son côté, avec non moins de véhémence et d'indignation, signalait un système universel d'oppression. Il fallait du courage pour dire la vérité, ajoutait-il. Tout est confondu par la calomnie ; on espère faire suspecter tous les amis de la liberté ; on a l'impudeur de dire dans le département du Pas-de-Calais, qui méritait d'être plus tranquille, que je suis en arrestation comme modéré. Eh bien ! oui, je suis modéré, si l'on entend par ce mot un citoyen qui ne se contente pas de la proclamation des principes de la morale et de la justice, mais qui veut leur application ; si l'on entend un homme qui sauve l'innocence opprimée aux dépens de sa réputation. Oui, je suis un modéré en ce sens ; je l'étais encore lorsque j'ai déclaré que le gouvernement révolutionnaire devait être comme la foudre, qu'il devait en un instant écraser tous les conspirateurs ; mais qu'il fallait prendre garde que cette institution terrible ne devint un instrument de contre-révolution par la malveillance qui voudrait en abuser, et qui en abuserait au point que tous les citoyens s'en croiraient menacés, extrémité cruelle qui ne manquerait pas de réduire au silence tous les amis de la liberté[92]... Voilà bien les sentiments si souvent exprimés déjà par Maximilien Robespierre, et que nous allons lui entendre développer tout à l'heure, avec une énergie nouvelle, à la tribune de la Convention. Robespierre pouvait donc compter, c'était à croire du
moins, sur la partie modérée de l'Assemblée, je veux dire sur cette partie incertaine
et flottante formant l'appoint de la majorité, tantôt girondine et tantôt
montagnarde, sur ce côté droit dont il avait arraché soixante-treize membres
à l'échafaud. Peu de temps avant la catastrophe on entendit le vieux Vadier
s'écrier, un jour où les ménagements de Robespierre pour la droite semblaient
lui inspirer quelques craintes : Si cela continue,
je lui ferai guillotiner cent crapauds de son marais[93]. Cependant les
conjurés sentirent la nécessité de se concilier les membres de la Convention
connus pour leur peu d'ardeur républicaine ; il n'est sorte de stratagèmes
dont ils n'usèrent pour les détacher de Maximilien. Dans la journée du 5 thermidor, Amar et Voulland se transportèrent, au nom du comité de Sûreté générale, dont la plupart des membres, avons nous dit, étaient de la conjuration, à la prison des Madelonnettes, où avaient été transférés une partie des soixante-treize Girondins ; et là avec une horrible hypocrisie, ils témoignèrent à leurs collègues détenus le plus affectueux intérêt. Ces hommes qui, de si bon cœur, eussent envoyé à la mort les auteurs de la protestation contre le 31 mai, que Robespierre leur avait arrachés des mains, parurent attendris. Arrête-t-on votre correspondance ?... Votre caractère est-il méconnu ici ? Le concierge s'est-il refusé à mettre sur le registre votre qualité de députés ? Parlez, parlez, nos chers collègues ; le comité de Sûreté nous envoie vers vous pour vous apporter la consolation et recevoir vos plaintes... Et sur les plaintes des prisonniers que leur caractère était méconnu, qu'on les traitait comme les autres prisonniers, Amar s'écria : C'est un crime affreux, et il pleura, lui, le rédacteur du rapport à la suite duquel les Girondins avaient été traduits devant le tribunal révolutionnaire ! Quelle dérision ! Les deux envoyés du comité de Sûreté générale ceignirent aux administrateurs de police d'avoir pour les détenus tous les égards dus aux représentants du peuple, de laisser passer toutes les lettres qu'ils écriraient, toutes celles qui leur seraient adressées, sans les ouvrir. Ils donnèrent encore aux administrateurs l'ordre de choisir pour les délimités une maison commode avec un jardin. Alors tous les représentants tendirent leurs mains qu'Amar et Voulland serrèrent alternativement, et ceux-ci se retirèrent comblés des bénédictions des détenus[94]. Le but des conjurés était atteint. Ainsi se trouvait préparée l'alliance thermido-girondine. Les Girondins détenus allaient pouvoir écrire librement à leurs amis de la droite, et sans doute ils ne manqueraient pas de leur Lire part de la sollicitude avec laquelle ils avaient été traités par le comité de Sûreté générale. Or, ce n'était un mystère pour personne qu'à l'exception de trois ou quatre de ses membres, ce comité, instrument sinistre de la Terreur, était entièrement hostile à Robespierre. D'où la conclusion toute naturelle que Robespierre était le persécuteur, puisque ses ennemis prenaient un si tendre intérêt aux persécutés. Quels maîtres fourbes que ces héros de Thermidor ! VII Toutefois les députés de la droite hésitèrent longtemps avant de se rendre, car ils craignaient d'être dupes des manœuvres de la conspiration. Ils savaient bien que du côté de Robespierre étaient le bon sens, la vertu, la justice ; que ses adversaires étaient les plus vils et les plus méprisables des hommes ; mais ils savaient aussi fort bien que son triomphe assurait celui de la démocratie, la victoire définitive de la République, et cette certitude fut la seule cause qui fit épouser aux futurs comtes Sieyès, Boissy-d'Anglas, Dubois-Dubais, Thibaudeau et autres la querelle des Rovère, des Fouché, des Tallien, des Bourdon et de leurs pareils. Par trois fois ceux-ci durent revenir à la charge, avoue Durand-Maillane[95], tant la conscience, chez ces députés de la droite, balançait encore l'esprit de parti. Comment, en effet, eussent-ils consenti à sacrifier légèrement, sans résistance, celui qui les avait constamment protégés[96], celui qu'ils regardaient comme le défenseur du faible et de l'homme trompé[97] ? Mais l'esprit de parti fut le plus fort. Il y eut, dit-on, chez Boissy-d'Anglas des conférences où, dans le désir d'en finir plus vite avec la République, la majorité se décida, non sans combat, à livrer la tête du Juste, de celui que le maitre du logis venait de surnommer hautement et publiquement l'Orphée de la France[98]. Et voilà comment des gens relativement honnêtes conclurent un pacte odieux avec des coquins qu'ils méprisaient. Outre l'élément royaliste, il y avait dans la Plaine, cette pépinière des serviteurs et des grands seigneurs de l'Empire, une masse variable, composée d'individus craintifs et sans convictions, toujours prêts, à se ranger du côté des vainqueurs. Un mot attribué à l'un d'eux les peint tout entiers. Pouvez-vous nous répondre du ventre ? demanda un jour Billaud-Varenne à ce personnage de la Plaine. Oui, répondit celui-ci, si vous êtes les plus forts. Abattre Robespierre ne paraissait pas chose aisée, tant la vertu exerce sur les hommes un légitime prestige. Lui, pourtant, en face de la coalition menaçante, restait volontairement désarmé. Dépouillé de toute influence gouvernementale, il ne songea même pas à tenter une démarche auprès des députés du centre, qui peut-être se fussent unis à lui s'il eût fait le moindre pas vers eux. Tandis que l'orage s'amoncelait, il vivait plus retiré que jamais, laissant à ses amis le soin de signaler aux Jacobins les trames ourdies dans l'ombre, car les avertissements ne lui manquaient pas. Je ne parle pas des lettres anonymes auxquelles certains écrivains ont accordé une importance ridicule. Il y avait alors, ai-je dit déjà une véritable fabrication de ces sortes de productions, monuments honteux de la bassesse et de la lâcheté humaines. J'en ai là sous les yeux, un certain nombre adressées à Hanriot, à Hérault-Séchelles, à Danton. Te voila donc, f... coquin, président d'une horde de scélérats, écrivait-on à ce dernier. ; j'ose me flatter que plus tôt que tu ne penses je te verrai écarteler avec Robespierre... Vous avez à vos trousses cent cinquante. Brutuse ou Charlotte Cordé[99]. Toutes ces lettres se valent pour, le fond comme pour la forme. A Maximilien, on écrivait, tantôt : Robespierre, Robespierre ! Ah ! Robespierre, je le vois, tu tends à la dictature, et tu veux tuer la liberté que tu as créée... Malheureux, tu as vendu ta patrie ! Tu déclames avec tant de force contre les tyrans coalisés contre nom, et tu veux nous livrer à eux... Ah ! scélérat, oui, tu périras, et tu périras des mains desquelles tu n'attends guère le coup qu'elles te préparent[100]... Tantôt : Tu es encore... Écoute, lis l'arrêt de ton châtiment. J'ai attendu, j'attends encore que le peuple affamé sonne l'heure de ton trépas... Si mon espoir était vain, s'il était différé, écoute, lis, te dis-je cette main qui trace ta sentence, cette main que tes yeux égarés cherchent à découvrir, cette main qui presse la tienne avec horreur, percera ton cœur inhumain. Tous les jours je suis avec toi, je te vois tous les jours, à toute heure mon bras levé cherche ta poitrine... Ô le plus scélérat des hommes, vis encore quelques jours pour penser à moi ; que mon souvenir et ta frayeur soient le premier appareil de ton supplice. Adieu ! ce jour même, en te regardant, je vais jouir de ta terreur[101]. A coup sûr, le misérable auteur de ces lignes grotesques connaissait bien mal Robespierre, un des hommes qui aient possédé au plus haut degré le courage civil, cette vertu si précieuse et si rare. Croirait-on qu'il s'est rencontré des écrivains d'assez de bêtise ou de mauvaise foi pour voir dans les lettres dont nous venons d'offrir un échantillon des caractères tracés par des mains courageuses, des traits aigus lancés par le courage et la vertu[102]. C'est à n'y pas croire De ces lettres anonymes, Robespierre faisait le cas qu'un honnête homme fait ordinairement de pareilles pièces, il les méprisait. Quelquefois, pour donner à ses concitoyens une idée de l'ineptie et de la méchanceté de certains ennemis de la Révolution, il en donnait lecture soit aux Jacobins, soit à ses collègues du comité de Salut public, mais il n'y prenait pas autrement garde. Seulement d'autres avertissements plus sérieux ne lui manquèrent pas. Nous avons mentionné plus haut une pièce dans laquelle un ami inconnu lui rendait compte des menées de la conjuration. Dans la journée du 5 thermidor, le rédacteur de l'Orateur du peuple, Labenette, un des plus anciens collaborateurs de Fréron, lui écrivant pour réclamer un service, ajoutait : Qui sait ? Peut-être que je t'apprendrai ce que tu ne sais pas. Et il terminait sa lettre en prévenant Maximilien qu'il irait le voir le lendemain pour savoir l'heure et le moment où il pourrait lui ouvrir son cœur[103]. Celui-là devait être bien informé. Vit-il Robespierre, et déroula-t-il devant lui tout le plan de la conjuration ? C'est probable. Ce qu'il y a de certain, c'est que Maximilien, comme on peut s'en convaincre par son discours du 8 thermidor, connaissait jusque dans leurs moindres détails les manœuvres de ses ennemis. S'il eût été doué du moindre esprit d'intrigue, comme il lui eût été facile de déjouer toutes les machinations thermidoriennes, comme aisément il se fût rendu d'avance maître de la situation ! Mais non, il sembla se complaire dans une complète inaction. Loin de prendre la précaution de sonder les intentions de ses collègues de la droite, il n'eut même pas l'idée de s'entendre avec ceux dont le concours lui était assuré ! La grande majorité des sections parisiennes, la société des Jacobins presque tout entière, la commune lui étaient dévouées ; il ne songea point à tirer parti de tant d'éléments de force et de succès. Les inventeurs de la conspiration de Robespierre ont eu beau s'ingénier, ils n'ont pu1orouyer un lambeau de papier indiquant qu'il y ait eu la moindre intelligence et le moindre concert entre Maximilien et le maire de Paris Fleuriot-Lescot, par exemple, ou l'agent national Payan[104]. Si ces deux hauts fonctionnaires, sur le compte desquels la réaction, malgré sa science dans l'art de la calomnie, n'est parvenue à mettre ni une action basse ni une lâcheté, ont, dans la journée du 9 thermidor, pris parti pour Robespierre, ç'a été tout spontanément et emportés par l'esprit de justice. En revanche on a été beaucoup plus fertile en inventions sur le compte d'Hanriot, le célèbre général de la garde nationale parisienne[105]. VIII Oh ! pour celui-là la réaction a été impitoyable ; elle a épuisé à son égard tous les raffinements de la calomnie. Hanriot a payé cher sa coopération active au mouvement démocratique du 31 mai. De cet ami sincère de la Révolution, de ce citoyen auquel un jour, à l'Hôtel de Ville, on promettait une renommée immortelle pour son désintéressement et son patriotisme, les uns ont fait un laquais ivre, les autres l'ont malicieusement confondu avec un certain Hanriot, compromis dans les massacres de Septembre. On a jusqu'à ce jour vomi beaucoup de calomnies contre lui, on n'a jamais rien articulé de sérieux. Dans son commandement il se montra toujours irréprochable. Sa conduite, durant le rude hiver de 1794, fut digne de tous éloges. Si la paix publique ne fut point troublée, si les attroupements aux portes des boulangers et des bouchers ne dégénérèrent pas en collisions sanglantes, ce fut grâce surtout à son énergie tempérée de douceur. S'il est vrai que le style soit l'homme, on n'a qu'à parcourir les ordres du jour du général Hanriot, et l'on se convaincra que ce révolutionnaire tant calomnié était un excellent patriote, un pur républicain, un véritable homme de bien. A ses frères d'armes, de service dans les maisons d'arrêt, il recommande de se comporter avec le plus d'égards possible envers les détenus et leurs femmes. La justice nationale seule, dit-ii, a le droit de sévir contre les coupables[106]... Le criminel dans les fers doit être respecté ; on plaint le malheur, mais on n'y insulte pas[107]. Pour réprimer l'indiscipline de certains gardes nationaux, il préfère l'emploi du raisonnement à celui de la force : Nous autres républicains, nous devons être frappés de l'évidence de notre égalité et pour la soutenir il faut des mœurs, des vertus et de l'austérité[108]. Ailleurs il disait : Je ne croirai jamais que des mains républicaines soient capables de s'emparer du bien d'autrui ; j'en appelle à toutes les vertueuses mères de famille dont les sentiments d'amour pour la patrie et de respect pour tout ce qui mérite d'être respecté, sont publiquement connus[109]. Est-il parfois obligé de recourir à la force armée, il ne peut s'empêcher d'en gémir : Si nous nous armons quelquefois de fusils, ce n'est pas pour nous en servir contre nos pères, nos frères et amis, mais contre les ennemis du dehors[110]... Ce n'est pas lui qui eût encouragé notre malheureuse
tendance à nous engouer des hommes de guerre : Souvenez-vous,
mes amis, que le temps de servir les hommes est passé. C'est à la chose
publique seule que tout bon citoyen se doit entièrement... Tant que je serai général, je ne souffrirai jamais que le
pouvoir militaire domine le civil, et si mes frères les canonniers veulent despotiser,
ce ne sera jamais sous mes ordres[111]. Dans nos fêtes publiques, il nous faut toujours des baïonnettes qui reluisent au soleil ; Hanriot ne comprend pas ce déploiement de l'appareil des armes dans des solennités pacifiques. Le lendemain d'un jour de cérémonie populaire, un citoyen s'étant plaint que la force armée n'eût pas été là avec ses fusils et ses piques pour mettre l'ordre dans la foule : Ce ne sont pas mes principes, s'écrie Hanriot dans un ordre du jour ; quand on fête, pas d'armes, pas de despote ; la raison établit l'ordre, la douce et saine philosophie règle nos pas... un ruban tricolore suffit pour indiquer à nos frères que telles places sont destinées à nos bons législateurs... Quand il s'agit de fête, ne parlons jamais de force armée, elle touche de trop près au despotisme...[112]. A coup sûr, le moindre chef de corps trouverait aujourd'hui cet Hanriot bien arriéré. Dans un pays libre, dit encore cet étrange général, la police ne doit pas se faire avec des piques et des baïonnettes, mais avec la raison et la philosophie. Elles doivent entretenir un œil de surveillance sur la société, l'épurer et en proscrire les méchants et les fripons... Quand viendra-t-il ce temps désiré où les fonctionnaires publics seront rares, où tous les mauvais sujets seront terrassés, où la société entière n'aura pour fonctionnaire public que la loi[113]... ! Un peuple libre se police lui même, il n'a pas besoin de force armée pour être juste[114]... La puissance militaire exercée despotiquement mène à l'esclavage, à la misère, tandis que la puissance civile mène au bonheur, à la paix, à la justice, à l'abondance[115]... Aux fonctionnaires qui se prévalent de leurs titres pour s'arroger certains privilèges, il rappelle que la loi est égale pour tous. Les dépositaires des lois en doivent être les premiers esclaves[116]. Un arrêté de la commune ayant ordonné que les citoyens trouvés mendiant dans les rues fussent arrêtés et, conduits à leurs sections respectives, le général prescrit à ses soldats d'opérer ces sortes d'arrestations avec beaucoup d'humanité et d'égards pour le malheur, qu'on doit respecter[117]. Aux gardes nationaux sous ses ordres, il recommande la plus grande modération dans le service : Souvenez-vous que le fer dont vos mains sont armées n'est pas destiné à déchirer le sein d'un père, d'un frère, d'une mère, d'une épouse chérie... Souvenez-vous de mes premières promesses où je vous fis part de l'horreur que j'avais pour toute effusion de sang... Je ne souffrirai jamais qu'aucun de vous en provoq4e un autre au meurtre et à l'assassinat. Les armes que vous portez ne doivent être tirées que pour la défense de la patrie, c'est le comble de la folie de voir un Français égorger un Français ; si vous avez des querelles particulières, étouffez-les pour l'amour de la patrie[118]. Le véritable Hanriot ressemble assez peu, comme on voit, à
l'Hanriot légendaire de la plupart des écrivains. Le bruit a-t-il couru, au
plus fort moment de l'hébertisme, que certains hommes songeraient à ériger
une dictature, il s'empresse d'écrire : Tant que
nous conserverons notre énergie, nous défierons ces êtres vils et corrompus
de se mesurer avec nous. Nous ne voulons pour maître que la loi, pour idole
que la liberté et l'égalité, pour autel que la justice et la raison[119]. A ses camarades il ne cesse de prêcher la probité, la décence, la sobriété, toutes les vertus. Ce sont nos seules richesses ; elles sont impérissables. Fuyons l'usure ; ne prenons pas les vices des tyrans que nous avons terrassés[120]... Soyons sobres, aimons la patrie, et que notre conduite simple, juste et vertueuse remplisse d'étonnement les peuples des autres climats[121]. Indigné de l'imprudence et de la brutalité avec lesquelles certains soldats de la cavalerie, des estafettes notamment, parcouraient les rues de Paris, au risque de renverser sur leur passage femmes, enfants, vieillards, il avait autorisé les gardes nationaux de service à arrêter les cavaliers de tout armes allant au grand galop dans les rues. L'honnête citoyen à pied doit être respecté par celui qui est à cheval[122]. Un matin, l'ordre du jour suivant fut affiché dans tous les postes : Hier, un gendarme de la 29e division a jeté à terre, il était midi trois quarts, rue de la Verrerie, au coin de celle Martin, un vieillard ayant à la main une béquille... Cette atrocité révolte l'homme qui pense et qui connaît ses devoirs. Malheur à celui qui ne sait pas respecter la vieillesse, les lois de son pays, et qui ignore ce qu'il doit à lui-même et à la société entière. Ce gendarme prévaricateur, pour avoir manqué à ce qui est respectable, gardera les arrêts jusqu'à nouvel ordre[123]. Quand je passe maintenant au coin de la rue Saint-Martin, à l'angle de la vieille église Saint-Méry qui, dans ce quartier transformé, est restée presque seule comme un témoin de l'acte de brutalité si sévèrement puni par le général de la garde nationale, je ne puis m'empêcher de songer à cet Hanriot dont la réaction nous a laissé un portrait si défiguré. Aux approches du 9 thermidor ses conseils deviennent en quelque sorte plus paternels. Il conjure les femmes qui par trop d'impatience à la porte des fournisseurs, causaient chi trouble dans la ville, de se montrer sages et dignes d'elle40êmes. Souvenez vous que vous êtes la moitié de la société et que vous nous devez un exemple que les hommes sensibles ont droit d'attendre de vous[124]. Le 3 thermidor, il invitait encore les canonniers à donner partout le bon exemple La patrie, qui aime et veille sur tous ses enfants, proscrit de notre sein la haine et la dis tarde... Faisons notre service d'une manière utile et agréable à la grande famille ; fraternisons, et aimons tous ceux.qui aiment et défendent la chose publique[125]. Voilà pourtant l'homme ; qu'avec leur effronterie ordinaire les Thermidoriens nous ont présenté comme ayant été jeté ivre-mort par Coffinhal dans un égout de l'Hôtel de Ville. Ces citations, que nous aurions. pu multiplier à l'infini, témoignent assez clairement de l'esprit d'ordre, de la sagesse et de la modération du général Hanriot ; car ces ordres du jour, superbes parfois d'honnêteté naïve, et révélés pour la première fois, c'est l'histoire prise sur le fait, écrite par un homme de cœur et sans souci de l'opinion du lendemain. En embrassant, dans la journée du 9 thermidor, la cause des proscrits, Hanriot, comme Dumas et Coffinhal„ comme Payan et Fleuriot-Lescot, ne fit que céder à l'ascendant de la vertu. Si, vingt-quatre heures d'avance seulement, Robespierre avait eu l'idée de s'entendre avec ces hauts fonctionnaires, si aux formidables intrigues nouées depuis si longtemps contre lui il avait opposé les plus simples mesures de prudence, s'il avait prévenu d'un mot quelques membres influents de la Commune et des sections, s'il avait enfin pris soin d'éclairer sur les sinistres projets de ses adversaires la foule immense de ses admirateurs et de ses amis inconnus, la victoire lui était assurée ; mais, en dehors de la Convention, il n'y avait pas de salut à ses yeux ; l'Assemblée, c'était l'arche sainte ; plutôt que d'y porter la main, il aurait offert sa poitrine aux poignards. Pour triompher de ses ennemis, il crut qu'il lui suffirait d'un discours, et il se présenta sans autre arme sur le champ de bataille, confiant dans son bon droit et dans les sentiments de justice et d'équité de la Convention. Fatale illusion, mais noble croyance, dont sa mémoire devrait rester éternellement honorée. IX D'ailleurs Robespierre ne put se persuader, j'imagine, que ses collègues du comité de Salut public l'abandonneraient si aisément à la rage de ses ennemis. Mais il comptait sans les jaloux et les envieux, à qui son immense popularité portait ombrage. La persistance de Maximilien à ne point s'associer à une foule d'actes qu'il considérait comme tyranniques, à ne pas prendre part, quoique présent, aux délibérations du comité, exaspéra certainement quelques-uns de ses collègues, surtout Billaud. Ce dernier lui reprochait d'être le tyran de l'opinion, à cause de ses succès de tribune. Singulier reproche qui fit dire à Saint-Just : Est-il un triomphe plis désintéressé ? Caton aurait chassé de Rome le mauvais citoyen qui eût appelé l'éloquence dans la tribune aux harangues le tyran de l'opinion[126]. Son empire, ajoute-t-il excellemment, se donne à la raison et ne ressemble guère au pouvoir des gouvernements. Mais Billaud-Varenne et Collot d'Herbois, forts de l'appui de Carnot, avaient pour ainsi dire accaparé à tette époque l'exercice du pouvoir[127] : ils ne se souciaient nullement de voir la puissance du gouvernement contre balancée par celle de l'opinion. Cependant diverses tentatives de rapprochement eurent lieu dans les premiers jours de thermidor, non seulement entre les membres du comité de Salut public, mais encore entre les membres des deux comités réunis. On s'assembla une première fois le 4. Ce jour-là l'entente parut probable, puisqu'on chargea Saint-Just de présenter à la Convention un rapport sur la situation générale de la République, Saint-Just dont l'amitié et le dévouement pour Robespierre n'étaient ignorés de personne. L'âpre et fier jeune homme ne déguisa ni sa pensée ni ses intentions. Il promit de dire tout ce que sa probité lui suggérerait pour le bien de la patrie, rien de plus, rien de moins, et il ajouta : Tout ce qui ne ressemblera pas au pur amour du peuple et de la liberté aura ma haine[128]. Ces paroles donnèrent sans doute à réfléchir à ceux qui ne le voyaient pas sans regret chargé de prendre la parole au nom des comités devant la Convention nationale. Billaud-Varenne ne dissimula même pas son dessein de rédiger l'acte d'accusation de Maximilien[129]. Le lendemain, on se rassembla de nouveau. Les membres des anciens comités ont prétendu que ce jour-là Robespierre avait été cité devant eux pour s'expliquer sur les conspirations dont il parlait sans cesse vaguement aux Jacobins et sur son absence du comité depuis quatre décades. Il ne faut pas beaucoup de perspicacité pour découvrir la fourberie cachée sous cette déclaration intéressée. D'abord il n'y avait pas lieu de citer Robespierre devant les comités, puisque, du propre aveu de ses accusateurs, il n'avait encore accompli aucun de ces actes ostensibles et nécessaires pour démontrer une conjuration à l'opinion publique abusée[130]. Cet acte ostensible et nécessaire ce fut, comme l'ont dit eux-mêmes ses assassins, son discours du 8 thermidor. — Secondement, l'absence de Robespierre a été, comme nous l'avons prouvé, une absence toute morale ; de sa personne il était là ; donc il était parfaitement inutile de le mander, puisque chaque jour on se trouvait face à face avec lui. La vérité est que le 5 thermidor il consentit à une explication. Cette explication, que fait-elle ? Il est impossible d'admettre tous les contes en l'air débités là-dessus par les uns et par les autres. Les anciens membres des comités ont gardé à cet égard un silence prudent[131]. Seul, Billaud-Varenne en a dit quelques mots. A l'en croire, Robespierre serait devenu lui-même accusateur, aurait désigné nominativement les victimes qu'il voulait immoler, et surtout aurait reproché aux deux comités l'inexécution du décret ordonnant l'organisation de six commissions populaires pour juger les détenus[132]. Sur ce dernier point nous prenons Billaud en flagrant délit de mensonge, car, dès le 3 thermidor, quatre de ces commissions étaient organisées par un arrêté auquel Robespierre, ainsi qu'on l'a vu plus haut, avait, quoique présent au 'comité, refusé sa signature. Quant aux membres dénoncés par Robespierre à ses collègues des comités pour leurs crimes et leurs 'prévarications, quels étaient-ils ? Billaud-Varenne s'est abstenu de révéler leurs noms, et c'est infiniment fâcheux ; on eût coupé court ainsi aux exagérations de quelques écrivains, qui, feignant d'ajouter foi aux récits mensongers de certains conjurés thermidoriens, se sont complu à porter jusqu'à dix-huit et jusqu'à trente le chiffre des Conventionnels menacés. Le membre des coupables n'était pas si grand ; rappelons que, d'après les déclarations assez précises de Couthon et de Saint-Just, il ne s'élevait pas à plus de quatre ou cinq, parmi lesquels, sans crainte de se tromper, on peut ranger Fouché, Tallien et Rovère. Robespierre s'est déclaré le ferme appui de la Convention, a écrit Saint-Just, il n'a jamais parlé dans le comité qu'avec ménagement de porter atteinte à aucun de ses membres[133]. C'est encore au discours de Saint-Just qu'il faut recourir pour savoir à peu près au juste ce qui s'est passé le 5 thermidor dans la séance des deux comités. Au commencement de la séance tout le monde restait muet, comme si l'on eût craint de s'expliquer. Saint-Just rompit le premier le silence. Il raconta qu'un officier suisse, fait prisonnier devant Maubeuge et interrogé par Guyton-Morveau et par lui, leur avait confié que les puissances alliées n'avaient aucun espoir d'accommodement avec la France actuelle, mais qu'elles attendaient tout d'un parti qui renverserait la forme terrible du gouvernement et adopterait des principes moins rigides. En effet, les manœuvres des conjurés n'avaient pas été sans, transpirer au dehors. Les émigrés, ajouta Saint-Just, sont instruits du projet des conjurés de faire, s'ils réussissent, contraster l'indulgence avec la rigueur actuellement déployée contre les traîtres. Ne verra-t-on 'pas les plus violents terroristes, les Tallien, les Fréron, les Bourdon (de l'Oise), s'éprendre de tendresses singulières pour les victimes de la Révolution et même pour les familles des émigrés ? Arrivant ensuite aux persécutions sourdes dont Robespierre était l'objet, il demanda, sans nommer son ami, s'il était un dominateur qui ne se fût pas d'abord environné d'un grand crédit militaire, emparé des finances et du gouvernement, et si ces choses se trouvaient dans les mains de ceux contre lesquels on insinuait des soupçons. David appuya chaleureusement les paroles de son jeune collègue. Il n'y avait pas à se méprendre sur l'allusion. Billaud-Varenne dit alors à Robespierre : Nous sommes tes Amis, nous avons toujours marché ensemble. Et la veille, il l'avait traité de Pisistrate. Ce déguisement, dit Saint-Just, fit tressaillir mon cœur[134]. Il n'y eut rien d'arrêté positivement dans cette séance ; cependant la paix parut, sinon cimentée, au moins en voie de se conclure, et l'on confirma le choix que, la veille, on avait fait de Saint-Just, comme rédacteur d'un grand rapport sur la situation de la République. Les conjurés, en apprenant l'issue de cette conférence, furent saisis de terreur. Si cette paix eût réussi, a écrit l'un d'eux, elle perdait à jamais la France[135] ; c'est-à-dire : nous étions démasqués et punis, nous misérables qui avons tué la République dans la personne de son plus dévoué défenseur. De nouveau l'on se mit à l'œuvre : des listes de proscription plus nombreuses furent lancées parmi les députés. Epouvanter les membres par des listes de proscription et en accuser l'innocence, voilà ce que Saint-Just appelait un blasphème[136]. Tel avait été le succès de ce stratagème, qu'ainsi que nous l'avons dit, un certain nombre de représentants n'osaient plus coucher dans leurs lits. Cependant on ne vint pas sans peine à bout d'entraîner le comité de Salut public ; il fallut des pas et des démarches dont l'histoire serait certainement instructive et curieuse. Les membres de ce comité semblaient comme retenus par une sorte de crainte instinctive, au moment de livrer la grande victime. Tout à l'heure même nous allons entendre Barère, en leur nom, prodiguer à Robespierre la louange et l'éloge. Mais ce sera le baiser de Judas. |
[1] Séance de la Convention du 30 ventôse an III (20 mars 1795), Moniteur du 3 germinal (23 mars).
[2] Séance de la Convention du 7 germinal an III (27 mars), Moniteur du 11 germinal (31 mars 1795).
[3] Séance des Jacobins du 26 thermidor an II (8 août 1794), Moniteur du 30 thermidor.
[4] Séance de la Convention du 8 vendémiaire an III (29 septembre 1794), Moniteur des 11 et 12 vendémiaire.
[5] Séance de la Convention du 12 vendémiaire an III (3 octobre 1794), Moniteur du 13 vendémiaire.
[6] Voyez ces vers dans le Moniteur du 3 frimaire an III (29 novembre 1794).
[7] Voyez notamment le Moniteur des 3 et 27 germinal an III (23 mars et 16 avril 1795), des 12 et 28 floréal an III (1er et 17 mai 1795), des 2 et 11 thermidor an III (20 et 29 juillet 1795), etc.
[8] Il faut lire dans l'Histoire de la Restauration, par M. de Vaulabelle, les infamies dont, sous la Restauration, le baron Trouvé s'est rendu complice comme préfet.
[9] Séance de la Convention du 16 floréal an III (5 mai 1795). Voyez le Moniteur du 20 floréal.
[10] Taschereau avait été mis hors la loi dans la nuit du 9 au 10 thermidor. Voyez le Moniteur du 11 thermidor (29 juillet 1795).
[11] Voyez le Moniteur du 13 germinal an VII (2 avril 1799).
[12] Beaucoup de personnes avaient donné à leurs enfants le nom de Robespierre, tant ce grand citoyen était en effet un monstre horrible et sanguinaire. En l'an VI il se trouva, au conseil des Anciens, un compatriote de Maximilien, nommé Dauchet, qui poussa le dédain de la vérité jusqu'à prétendre que c'étaient les officiers de l'état civil qui avaient contraint les parents de donner à leurs enfants ce nom odieux. Ingénieuse manière d'excuser les admirateurs du vaincu. (Séance des Anciens du 15 prairial an VI [3 juin 1797].)
[13] Le père de Georges Sand, M. Maurice Dupin, écrivait, à la date du 10 thermidor de l'an II : C'est à la Convention que nous devons notre salut. Sans elle, dit-on, tous les patriotes eussent été victimes de la tyrannie de Robespierre.
Mme Georges Sand, qui a cité cette lettre dans sa Correspondance, l'a fait suivre d'une note où il est dit :
Voici l'effet des calomnies de la réaction. De tous les terroristes, Robespierre fut le plus humain, le plus ennemi par nature et par conviction des apparentes nécessités de la Terreur et du fatal système de la peine de mort. Cela est assez prouvé, et l'on ne peut pas récuser à cet égard le témoignage de M. de Lamartine. La réaction thermidorienne est une des plus lâches que l'histoire ait produites. Cela est encore suffisamment prouvé. A quelques exceptions près, les Thermidoriens n'obéirent à aucune conviction, à aucun cri de la conscience, en immolant Robespierre. La plupart d'entre eux le trouvaient trop faible et trop miséricordieux la veille de sa mort, et le lendemain ils lui attribuèrent leurs propres forfaits pour se rendre populaires. Soyons justes enfin, et, ne craignons plus de le dire : Robespierre est le plus grand homme de la Révolution, et l'un des plus grands hommes de l'histoire...
[14] Voyez cette lettre de Mazade dans le Moniteur du 12 ventôse de l'an III (3 mars 1795).
[15] Voyez cette note dans les Papiers inédits, t. I, p. 154.
[16] Préfet sous le gouvernement consulaire, Harmand (de la Meuse) publia en 1814, sous ce titre Anecdotes relatives à quelques personnes et à plusieurs événements remarquables de la Révolution, un libelle effrontément cynique qu'une main complaisante réédita en 1819, en y ajoutant douze anecdotes qui, prétendit-on, avait été supprimées lors de la première édition. C'est là qu'on lit que Saint-Just s'était fait faire une culotte de la peau d'une jeune fille qu'il avait fait guillotiner. De pareilles œuvres ne s'analysent ni ne se discutent ; il suffit de les signaler, elles et leurs auteurs, au mépris de tous les honnêtes gens.
[17] Nombre de ces pamphlets sont l'œuvre de Méhée fils, lequel signa : Felhemesi, anagramme de son nom. Nous avons déjà dit autre part quel horrible coquin était ce Méhée, qui ne put jamais pardonner à Robespierre d'avoir en 1792 combattu sa candidature à la Convention nationale. Rappelons ici que, sous le nom de Méhée de la Touche, il fut un des mouchards de la police impériale, et qu'après la chute de Napoléon, il tenta de se mettre au service de la Restauration.
[18] Hymne dithyrambique sur la conjuration de Robespierre et la révolution du 9 Thermidor, par Joseph Rouget de Lisle, capitaine au corps du génie, auteur du chant marseillais, à Paris, l'an deuxième de la République une et indivisible. Le couplet suivant, qui a trait directement à Robespierre, peut donner une idée de cet hymne, que par une sorte de profanation, l'auteur mit sur l’air de la Marseillaise :
Voyez-vous ce spectre livide
Qui déchire son propre flanc ;
Encore tout souillé de sang,
De sang il est encore avide.
Voyez avec un rire affreux
Comme il désigne ses victimes,
Voyez comme il excite aux crimes
Ses satellites furieux.
Chantons, la liberté, couronnons sa statue, etc.
Rouget de Lisle avait été arrêté avant Thermidor, sur un ordre signé de Carnot. On ne manqua pas sans doute de lui persuader que son arrestation avait été l'œuvre de Robespierre.
[19] Le nom de l'auteur de cette belle œuvre nous a échappé, et c'est dommage. n est bon que le nom d'Anitus vive à côté de celui de Socrate. Le roman moderne offre quelques équivalents d'inepties pareilles.
Nous ne connaissons guère qu'une œuvre dramatique, représentée au théâtre, où la grande figure de Robespierre ait été sérieusement étudiée, Elle est de M. le docteur Louis Combe, ancien adjoint au maire de Lyon, mort il y a trois ans, et auquel la population lyonnaise a fait de magnifiques funérailles.
Cette pièce intitulée Robespierre ou les Drames de la Révolution, a été représentée en 1888 sur les théâtres Voltaire, de Batignolles et de Montmartre. Elle y a obtenu le plus légitime succès, ainsi que le constate une lettre de M. Pascal Delagarde, directeur de ces théâtres, en date du 17 juillet 1888. Cette œuvre, dit-il, méritait d'être représentée sur une scène du boulevard, où elle aurait obtenu, je le garantis, cent représentations.
Elle a été imprimée, après la mort de son auteur, par les soins pieux de sa fille, Mlle Marie Combe, avec cette épigraphe de M. Louis Combet : Ce livre n'est point une œuvre de parti, c'est un essai de réparation et de justice. C'est un appel à l'impartiale histoire pour la révision d'un jugement hâtivement rendu contre l'homme le plus pur de la Révolution française, et que la calomnie et la haine n'ont cessé de poursuivre jusqu'au delà de la tombe.
[20] Vie secrète, politique et curieuse de Maximilien Robespierre, suivie de plusieurs anecdotes sur la conspiration sans pareille, par L. Duperron, avec une gravure qui représente une main tenant par les cheveux la tête de Maximilien, in-12 de 36 pages.
[21] Histoire de la conjuration de Robespierre, par Montjoie, p. 149 de l'édit. in-8° de 1795 (Lausanne).
[22] Histoire de la conjuration de Robespierre, par Montjoie, p. 154.
[23] Histoire de la conjuration de Robespierre, par Montjoie, p. 158.
[24] Collaborateur au Journal général de France et au Journal des Débats, Montjoie reçut du roi Louis XVIII une pension de trois mille francs et une place de conservateur à la Bibliothèque Mazarine. Son panégyriste n'a pu s'empêcher d'écrire : Le respect qu'on doit à la vérité oblige de convenir que Montjoie n'était qu'un écrivain médiocre ; son style est incorrect et déclamatoire, et ses ouvrages historiques ne doivent être lus qu'avec une extrême défiance.(Art. MONTJOIE, par Weiss, dans la Biographie universelle).
[25] MM. Michelet et Quinet.
[26] Voyez notamment une lettre de Cousin dans les Papiers inédits, t. III, p. 317, et à la suite du rapport de Courtois, sous le n° LXXIV. Volontaire à l'armée de la Vendée, Cousin avait avec lui deux fils au service de là République. Robespierre, paraît-il, avait déjà eu des bontés pour lui ; Cousin le prie de les continuer à un père de famille qui ne veut rentrer, ainsi que ses deux fils, dans ses foyers que lorsque les tyrans de l'Europe seront tous extirpés. Quelle belle occasion pour les Thermidoriens de flétrir un solliciteur ! Voyez p. 61 du rapport.
[27] Lettre de J.-P. Besson, de Manosque, en date du 23 prairial ; citée sous le n° I, à la suite du rapport de Courtois. Vide supra.
[28] Lettre de Hugon jeune, de Vesoul, le 11 prairial, citée à la suite du rapport sous le n° IV. L'honnête Courtois a eu soin de supprimer le dernier membre de phrase. Nous l'avons rétabli d'après l'original conservé aux Archives, et en marge duquel on lit de la main de Courtois : Flagorneries. Voyez Archives, F. 7, 4436, liasse X.
[29] Lettre en date du 128 germinal, citée à la suite du rapport de Courtois sous le numéro VII. L'original est aux Archives, F 7, 4436, liasse R.
[30] Lettre de Sedan en date du 19 août 1793, citée par Courtois sous le numéro VIII.
[31] Lettre citée à la suite du rapport de Courtois sous le numéro IX. Le dernier membre de phrase a été supprimé par Courtois.
[32] Lettre omise par Courtois, provenant de la précieuse collection Beuchot, que le savant conservateur de la bibliothèque du Louvre, M. Barbier, a bien voulu mettre à notre disposition.
[33] Lettre citée par Courtois sous le numéro X.
[34] Lettres de Vaquier, ancien inspecteur des droits réservés, insérée par Courtois sous le numéro XI et déjà citée par nous. Vide supra.
[35] Lettre du citoyen Chauvet, ancien capitaine-commandant de la compagnie des vétérans de Château-Thierry, en date du 30 prairial, déjà citée. Dans cette lettre très-longue d'un jeune homme de quatre-vingt-sept ans, lettre dont l'original est aux Archives, Courtois n'a cité qu'une vingtaine de lignes, numéro XII.
[36] Lettre en date du 22 messidor, tronquée et altérée par Courtois, sous le numéro XIII.
[37] Lettre de Dathé, ancien maire de Vermanton, en Bourgogne, et de Picard, citées sous le numéro XV à la suite du rapport de courtois.
[38] Lettre citée par Courtois sous le numéro XXIV. Vide supra.
[39] Lettre en date du 15 floréal an II, citée par Courtois sous le numéro XXIV.
[40] Rapport de Courtois, p. 9 et 10.
[41] Rapport de Courtois, p. 12.
[42] Discours du 8 thermidor, p. 16.
[43] Rapport de Courtois, p. 103.
[44] Nous avons déjà dit l'indigne trafic qu'a fait Courtois des innombrables lettres trouvées chez Robespierre.
[45] Lettre de Guffroy a ses concitoyens d'Arras, écrite de Paris le 29 thermidor an II (16 août 1793).
[46] Réponse de J.-N. Billaud à Lecointre, p. 25.
[47] Réponse des anciens membres des deux comités aux imputations de L. Lecointre, p. 19.
[48] Mémoire de Billaud-Varenne conservé aux Archives, F 7, 4579², p. 5 du manuscrit.
[49] Mémoire de Billaud-Varenne conservé aux Archives, F 7, 4579², p. 12 et 13.
[50] Essai sur les fêtes nationales, adressé à la Convention, in-8° de 192 p., déjà cité. Membre du Sénat et comte de l'Empire, grand officier de la Légion d'honneur, pair de France de la première Restauration, pair de France de l'Empire des Cent jours, pair de France, de la seconde Restauration, Boissy-d'Anglas mourut considéré et comblé d'honneurs en 1826. C'était un sage !
Homme qui suit son temps à saison opportune, dirai-je avec notre vieux poète Régnier.
[51] Mémoire manuscrit de Billaud-Varenne, Archives, F. 7, 4579², p. 38 et 39.
[52] Mémoire manuscrit de Billaud-Varenne, Archives, F. 7, 4579², p. 40.
[53] Mémoire manuscrit de Billaud-Varenne Archives, F. 7, 4570², p. 40.
[54] Conjuration formée dès le 5prairial par neuf représentants du peuple, etc. Rapport et projet d'accusation par Laurent Lecointre, in 8° de 38 p., de l'Imprimerie du Rougyff, p. 4.
[55] Rapport et projet d'accusation par Laurent Lecointre, p. 4. Voyez le titre.
[56] Mémoire de Billaud-Varenne, ubi supra, p. 69 du manuscrit.
[57] Discours du 8 thermidor, p. 19.
[58] Les signataires de cette liste sont : Vadier, Voulland, Elie Lacoste, Collot-d'Herbois, Barère, Rühl, Amar, C.-A Prieur, Billaud-Varenne. Archives, F 7. 4436, Rapport de Saladin, p. 142 et 254.
[59] Arrêté signé : Barère, Dubarran, C.-A. Prieur, Louis (du Bas-Rhin), Lavicomterie, Collot-d'Herbois, Carnot, Couthon, Robert Lindet, Saint-Just, Billaud-Varenne, Voulland, Vadier, Amar, Moyse Bayle (cité dans l'Histoire parlementaire, t, XXXIII, p. 393),
[60] Arrêté en date du 26 messidor, signé : Robespierre, Carnot, Collot-d'Herbois, Barère, Couthon, Billaud-Varenne, C. A. Prieur, Robert Lindet (Archives, F 7, 4437). Vide supra.
[61] Discours du 8 thermidor, p. 10, 7 et 8.
[62] Séance du 14 thermidor an VIII (1er août 1799). Moniteur du 20 Thermidor.
[63] Discours du 9 thermidor.
[64] Ces détails ont été fournis aux auteurs de l'Histoire parlementaire par Buonaroti, qui les tenait d'Ingrand lui-même. Membre du conseil des Anciens jusqu'en 1797, Ingrand entra vers cette époque dans l'administration forestière et cessa de s'occuper de politique. Proscrit en 1816, comme régicide, il se retira à Bruxelles, y vécut pauvre, souffrant stoïquement comme un vieux républicain, et revint mourir en France, après la Révolution de 1830, fidèle aux convictions 41e sa jeunesse.
[65] Dernières années de Billaud-Varenne, dans la Nouvelle Minerve, t. Ier, p. 351 à 358. La regrettable part prise par Billaud au 9 Thermidor ne doit pas nous empêcher de rendre justice à la fermeté et au patriotisme de ce républicain sincère, Au général Bernard, qui, jeune officier alors, s'était rendu auprès de lui à Cayenne pour lui porter sa grâce de la part de Bonaparte et de ses collègues, il répondit : Je sais par l'histoire que des consuls romains tenaient du peuple certains droits ; mais le droit de faire grâce que s'arrogent les consuls français n'ayant pas été puisé à la même source, je ne puis accepter l'amnistie qu'ils prétendent m'accorder. Un jour, ajoute le général Bernard, il m'échappa de lui dire sans aucune précaution : Quel malheur pour la Convention nationale que la loi du 22 prairial ait taché de sang les belles pages qui éternisent son énergie contre les ennemis de Pa République française, c'est-à-dire contre toute l'Europe armée ! — Jeune homme, me répondit-il avec un air sévère, quand les os des deux générations qui succéderont à la vôtre seront blanchis, alors et seulement alors l'histoire s'emparera de cette grande question.Puis, se radoucissant, il me prit la main en me disant : Venez donc voir les quatre palmiers de la Guadeloupe, que Martin, le directeur des épiceries, est venu lui-même planter dans mon jardin.
(Billaud-Varenne à Cayenne, par le général Bernard, dans la Nouvelle Minerve, t. II, p. 288.)
[66] Voyez, au sujet de la préférence de Carnot pour Billaud-Varenne et Collot-d'Herbois, les Mémoires sur Carnot par son fils, t. Ier, p. 511.
[67] Discours de Saint-Just dans la séance du 9 Thermidor.
[68] Discours de Saint-Just dans la séance du 9 Thermidor.
[69] Nous lisons dans un rapport de l'agent national de Boulogne au comité de Salut public, en date du 25 messidor (13 juillet 1794), que ce fonctionnaire avait appris par des connaissances que Carnot avait failli faire manquer l'affaire de Charleroi (Pièce de la collection Beuchot). Les membres des anciens comités, dans la note 6 où il est question des discussions entre Saint-Just et Carnot, n'ont donné aucune explication à ce sujet. (Voyez leur Réponse aux imputations de Laurent Lecointre, p. 105.)
[70] Discours du 8 Thermidor.
[71] C'est ce que M. Philippe Le Bas a assuré à M. Hippolyte Carnot.
[72] Mémoires sur Carnot, par son fils, t. Ier, p. 510.
[73] Réponse des membres des deux anciens comités aux imputations de Laurent Lecointre, p. 14.
[74] Réponse des membres des deux anciens comités aux imputations de Laurent Lecointre, p. 13.
[75] Réponse des membres des deux anciens comités aux imputations de Laurent Lecointre, p. 15.
[76] Séance du 9 Thermidor. Voyez le Moniteur du 12 (30 juillet 1794).
[77] Mémoire de Billaud-Varenne. Ubi supra, p. 43 du manuscrit.
[78] Ce trait sublime : Je ne parle pas de leurs armées, est de la hauteur de Nicomède et de Corneille, a écrit Charles Nodier. Souvenirs de la Révolution, t. Ier, p. 294 de l'édit. Charpentier.
[79] Discours du 8 thermidor, p. 15 et 16.
[80] Discours du 8 thermidor, p. 43.
[81] Discours de Saint-Just dans la séance du 9 thermidor.
[82] Discours de Saint-Just dans la séance du 9 thermidor. — Nous avons dit qu'il n'existait presque point d'arrêtés portant les seules signatures de Robespierre, de Couthon et de Saint-Just. En voici un pourtant du 30 messidor : Le comité de Salut public arrête que les citoyens Fijon et Bassanger, patriotes liégeois, seront mis sur le champ en liberté... Couthon, Robespierre, Saint-Just. Archives, F 7, 4137. Eh bien ! après Thermidor, il se trouvera des gens pour accuser Robespierre d'être l'auteur des persécutions dirigées contre certains patriotes liégeois.
[83] Réponse des membres des deux anciens comités aux imputations de L. Lecointre, p. 46.
[84] Mémoires de Barère, t. II, p. 213, 216 et 232. Voyez au surplus, à ce sujet, notre Histoire de Saint-Just.
[85] C'est M. H. Carnot qui, dans ses Mémoires sur son père, raconte ce fait comme l'ayant trouvé dans une note évidemment émanée d'un témoin oculaire qu'il ne nomme pas (t. Ier, p. 530).
[86] Voyez cette lettre de l'Anglais Vaughan, dans les Mémoires de Barère (t. II, p. 227). Robespierre n'en eut même pas connaissance, car, d'après Barère, elle arriva et fut décachetée au comité de Salut public dans la journée du 9 thermidor.
[87] Mémoires de Barère, t. II, p. 232. Il faudrait tout un volume pour relever les inconséquences de Barère.
[88] Discours de Saint-Just dans hi séance du 9 thermidor. Saint-Just, comme on sait, ne put prononcer que les premières paroles de son discours.
[89] Mémoires de Barère. Notice historique par MM. Carnot et David (d'Angers), t. Ier, p. 118, 119. — David (d'Angers) a accompli le vœu de Barère. Qui ne connaît ses beaux médaillons de Robespierre ?
[90] Pièce anonyme trouvée dans les papiers de Robespierre, et non insérée par Courtois. Elle faisait partie de la collection Beuchot (4 p. in-4°), et elle a été publiée dans l'Histoire parlementaire, t. XXXIII, p. 360.
[91] Séance des Jacobins du 3 thermidor, Moniteur du 9 Thermidor (27 juillet 1794).
[92] Séance des Jacobins du 3 thermidor, ubi supra.
[93] Ce mot est rapporté par Courtois à la suite de la préface de son rapport sur les événements du 9 thermidor, note XXXVIII, p. 39. Courtois peut être cru ici, car c'est un complice révélant une parole échappée à un complice.
[94] Rapport fait à la police par Faro, administrateur de police, sur l'entrevue qui a eu lieu entre les représentants du peuple Antar et Voulland, envoyés par le comité de Sûreté générale, et les députés détenus aux Madelonnettes. Ce rapport est de la main même de ragent national Payan, dans les papiers duquel il a été trouvé. Payan ne fut pas dupe du faux attendrissement d'Amar et de Voulland ; il sut très bien démêler le stratagème des membres du comité de Sûreté générale. (Voyez ce rapport à la suite du rapport de Courtois, sous le n° XXXII, p. 150.) Il a été reproduit dans les Papiers inédits, t. II, p. 367.
[95] Mémoires de Durand-Maillane, p. 199.
[96] Mémoires de Durand-Maillane, p. 199.
[97] Lettre de Durand-Maillane, citée in-extenso dans son second volume. Il n'était pas possible de voir plus longtemps tomber soixante, quatre-vingts têtes par jour sans horreur... dit Durand-Maillane dans-ses mémoires, qui sont, comme nous l'avons dit déjà un mélange étonnant de lâcheté et de fourberie. Singulier moyen de mettre fin à cette boucherie que de s'allier avec ceux qui en étaient les auteurs-contre celui qu'on savait décidé à les poursuivre pour arrêter l'effusion du sang versé par le crime.
[98] A l'égard de ces conférences chez Boissy-d'Anglas, je n'ai rien trouvé de certain. Je ne les mentionne que d'après un bruit fort accrédité. Ce fut, du reste, à Boissy-d'Anglas particulièrement, à Champeaux-Duplasne et à Durand-Maillane que s'adressèrent les conjurés. (Mémoires de Durand-Maillane, p. 199.)
[99] Les originaux de ces lettres sont aux Archives, F 7, 4434.
[100] Cette lettre, dont l'original est aux Archives, F 7, 4436, liasse R, figure à la suite du rapport de Courtois, sous le numéro LVIII ; elle a été reproduite dans les Papiers inédits, t. II, p. 151.
[101] Cette autre lettre, dont l'original est également aux Archives (ubi supra), est d'une orthographe qu'il nous a été impossible de conserver. On la trouve arrangée à la suite du rapport de Courtois, sous le numéro LX, et dans les Papiers inédits, t. II, p. 155.
[102] Ce sont les propres expressions dont s'est servi le rédacteur du rapport de Courtois, p. 51 et 52.
[103] Cette lettre figure à la suite du rapport de Courtois, sous le numéro XVI, p. 113. Courtois n'a donné que l'initiale du nom de Labenette. Nous l'avons rétabli d'après l'original de la lettre, qu'on peut voir aux Archives.
[104] Il n'existe qu'une seule lettre de Payan à Robespierre ; elle est datée du 9 messidor (2 juin 1794). Cette lettre, dont nous avons déjà parlé plus haut, est surtout relative à un rapport de Vadier sur Catherine Théot, rapport dans lequel l'agent national croit voir le fruit d'une intrigue contre-révolutionnaire. Elle est très loin de respirer un ton d'intimité, et, contrairement aux habitudes du jour, Paysan n'y tutoie pas Robespierre. (Voyez-la à la suite du rapport de Courtois, sous le numéro LVI, p. 212, et dans les Papiers inédits, t. II, p. 359.)
[105] M. Thiers, dont nous avons renoncé à signaler les erreurs étranges, les inconséquences, les contradictions se renouvelant de page en page, fait offrir par Hanriot à Robespierre le déploiement de ses colonnes et une énergie plus grande qu'au juin. (Histoire de la Révolution, ch. XXI.) M. Thiers, suivant son habitude, du reste, n'oublie qu'une chose, c'est de nous dire d'où lui est venu ce renseignement ; nous aurions pu alors en discuter la valeur.
[106] Ordre du jour en date du 26 pluviôse (14 février 1794).
[107] Ordre du jour en date du 1er germinal (21 mars 1794).
[108] Ordre du jour en date du 14 nivôse (3 janvier 1794).
[109] Ordre du jour en date du 19 pluviôse (7 février 1794).
[110] Ordre du jour en date du 17 pluviôse an II (5 février 1794).
[111] Ordre du jour en date du 29 brumaire (19 novembre 1793).
[112] Ordre du jour en date du 21 brumaire (11 novembre 1793).
[113] Ordre du jour en date du 6 brumaire (27 octobre 1793).
[114] Ordre du jour en date du 19 brumaire (9 novembre 1793).
[115] Ordre du jour en date du 25 prairial (13 juin 1794).
[116] Ordre du jour en date du 4 septembre 1793.
[117] Ordre du jour en date du 21 prairial an II (9 juin 1794).
[118] Ordre du jour en date du 27 ventôse (17 mars 1794).
[119] Ordre du jour en date du 16 ventôse an II (6 mars 1794).
[120] Ordre du jour en date du 16 floréal (5 mai 1794).
[121] Ordre du jour en date du 26 prairial (14 juin 1794).
[122] Ordre du jour en date du 15 pluviôse (3 février 1794).
[123] Ordre du jour en date du 27 floréal (16 mai 1794).
[124] Ordre du jour en date du 22 messidor (10 juillet 1794).
[125] Ordre du jour du 3 thermidor (21 juillet 1794). Les ordres du jour du général Hanriot se trouvent en minutes aux Archives ; où nous les avons relevés. Un certain nombre ont été publiés, à l'époque, dans le Moniteur et les journaux du temps.
[126] Discours du 9 thermidor.
[127] Vous avez confié le gouvernement à douze personnes, il s'est trouvé, en effet, le dernier mois, entre deux ou trois. (Saint-Just, discours du 9 thermidor.)
[128] Discours du 9 thermidor.
[129] Discours du 9 thermidor.
[130] Réponse de J.-N. Billaud à Lecointre, p. 89. M. Michelet trouve moyen de surenchérir sur les allégations inadmissibles des membres des deux anciens comités. Il raconte que le soir du 5 thermidor, le comité, non sans étonnement, vit arriver Robespierre. Et que voulait-il ? se demande l'éminent écrivain ; les tromper ? gagner du temps jusqu'au retour de Saint-Just ? Il ne le croit pas, et c'est bien heureux ; mais s'il avait étudié avant d'écrire, il se serait aperçu que Robespierre n'avait pas à gagner du temps jusqu'au retour de Saint-Just, puisque ce représentant était de retour depuis le 10 messidor, c'est-à-dire depuis plus de trois semaines, et que, dans son dernier discours, il a raconté lui-même avec des détails qu'on ne trouve nulle part ailleurs cette séance du 5 thermidor, où il joua un rôle si important. (Voyez l'Histoire de la Révolution par M. Michelet, t. VII, p. 428.)
[131] Réponse des membres des deux anciens comités, p. 7 et 61. Barère n'a pas été plus explicite dans ses Observations sur le rapport de Saladin.
[132] Réponse de J.-N. Billaud à Laurent Lecointre, p. 89.
[133] Discours du 9 thermidor.
[134] Discours du 9 thermidor.
[135] Les Crimes de sept membres des anciens comités, etc., ou Dénonciation formelle à la Convention nationale, par Laurent Lecointre, p. 191
[136] Discours du 9 Thermidor.