Deux faits principaux se dégagent nettement du travail que nous terminons ici. En ce qui concerne la question de droit, il est certain que dans tout ce débat la stricte légalité fut du côté du sénat. La loi Vatinia avait conféré à César le gouvernement des Gaules pour une période de cinq ans, et la loi Pompeia-Licinia avait prorogé ses pouvoirs pour trois ans. Or, la Constitution voulait que la durée de son commandement fût comptée à partir du jour de l’entrée en charge ; il dut donc commencer à la fin de mars 58 et expirer à la fin de mars 50. Il est vrai qu’une loi spéciale avait dispensé César d’assister en personne aux comices consulaires où il poserait sa candidature, et il prétendait que par cela même le peuple l’avait autorisé à garder la province jusqu’à son élection, qui ne pouvait être antérieure au mois de juillet 49. Mais la loi qu’il invoquait, prise à la lettre, ne contenait rien de pareil ; elle n’avait pas abrogé la loi Pompeia-Licinia ; elle n’avait pas accordé à César une prolongation de pouvoirs, et le sénat était dans son droit en lui donnant un successeur neuf mois après l’échéance officielle de ses fonctions. Un autre fait ressort du récit de ces événements : c’est la preuve irrécusable que la république était condamnée à une ruine prochaine. Les lois étaient sans force et les magistrats sans prestige. Dans les luttes entre les partis, la corruption et la violence étaient les seules armes en usage. Le peuple, toujours le maître en théorie, n’était plus que le jouet et l’instrument des ambitieux. Le sénat, par un défaut commun à la plupart des assemblées politiques, s’agitait beaucoup et agissait peu ; il était réduit à l’impuissance autant par ses propres divisions que par les manœuvres de ses adversaires, et il n’avait ni assez de décision pour prendre des résolutions énergiques, ni assez d’autorité pour les faire prévaloir. Quelques citoyens honnêtes et modérés, tels que Cicéron, auraient voulu maintenir la république ; mais ils sentaient bien tout ce qu’il y avait de chimérique dans un pareil souhait, et au fond leurs vœux se bornaient à désirer que les formes des vieilles institutions et les apparences de la liberté fussent conservées-. Rome était désormais incapable de se gouverner elle-même, et puisqu’elle était destinée à ne plus s’appartenir, il faut avouer qu’elle ne pouvait tomber en de meilleures mains que celles de César. |