Texte numérisé par Marc Szwajcer
Les plaintes des provinces contre les gouverneurs romains n’étaient pas rares à l’époque républicaine. La juridiction compétente était alors le sénat, qui avait, on le sait, la haute main sur l’administration provinciale. D’ordinaire cette assemblée déléguait à une commission prise dans son sein le soin d’examiner l’affaire. A dater de 149 avant J.-C., il y eut un tribunal permanent chargé de juger ces sortes de délits, c’était la quœstio repetundarum. La composition de cette cour de justice varia beaucoup avec te temps ; elle fut formée tantôt de sénateurs, tantôt de chevaliers, tantôt de citoyens empruntés aux trois premières classes de la société : ordre sénatorial, ordre équestre, ordre des tribuni ærarii ; mais de toute façon c’est elle qui conserva jusqu’à l’Empire le monopole de ces jugements. Bien que les quœstiones perpetuæ aient subsisté sous l’Empire pendant plus de deux cents ans[1], les légats et les proconsuls furent désormais traduits devant un autre tribunal. Auguste avait posé cette règle que tout individu appartenant à la classe sénatoriale serait justiciable, quel que fût son crime, du sénat seul, à moins que l’empereur ne retînt la cause[2]. Or tous les gouverneurs de province, sans exception, étaient sénateurs. Quant aux procurateurs, ils étaient tirés de l’ordre équestre, et pourtant nous voyons le sénat en condamner plusieurs[3]. Il est donc probable que le principe établi par Auguste avait été étendu à ces fonctionnaires. Un gouverneur pouvait être poursuivi par un particulier ou par une cité aussi bien que par une assemblée provinciale[4]. Nous n’avons à considérer ici que les procès suscités par l’initiative d’un concilium. Voici le relevé à peu près complet de tous ceux que mentionnent les documents jusqu’à la mort de Trajan : En 11 ou 12 apr. J.-C., L. Valerius Messala Voleras, proconsul d’Asie[5]. En 22 apr. J.-C., C. Silanus, proconsul d’Asie[6]. En 23 apr. J.-C., Lucilius Capilo, procurateur en Asie[7]. En 24 apr. J.-C., Ancharius Priscus, proconsul de Crète et Cyrénaïque[8]. En 49 apr. J.-C., Janius Cilo, procurateur du Pont et Bithynie[9]. En 49 apr. J.-C., Cadius Rufus, gouverneur de Bithynie[10]. En 56 apr. J.-C., Cestius Proculus, Crète[11]. En 57 apr. J.-C., P. Celer, Asie[12]. En 57 apr. J.-C., Eprius Marcellus, Lycie[13]. En 57 apr. J.-C., Cossutianus Capito, Cilicie[14]. En 59 apr. J.-C., Pedius Blæsus, Cyrénaïque (?)[15]. En 60 apr. J.-C., Vibius Secundus, Mauritanie[16]. En 61 apr. J.-C., Tarquitius Priscus, Bithynie[17]. Sous Néron, Sævinus (?)[18]. En 70 apr. J.-C., Antonius Flamma, Cyrénaïque (?)[19]. Sous Domitien-Nerva, Bœbius Massa, Bétique (procurateur)[20]. En 101 apr. J.-C., Cæcilius Classicus, Bétique (proconsul)[21]. En 103 ou 104 apr. J.-C., Julius Bassus, Bithynie. En 106 ou 107 apr. J.-C., Rufus Varenus, Bithynie. Les auteurs nous en signalent encore un certain nombre pour lesquels nous ignorons si la plainte émana d’une assemblée régionale[22] ; il est donc prudent de les négliger. D’autre part, on nous indique que plusieurs empereurs, tels qu’Auguste, Tibère, Claude, Domitien, réprimèrent avec énergie les élections de leurs agents[23]. Il est à présumer que, parmi les occasions qu’eurent les princes de sévir, soit par eux-mêmes, soit par l’intermédiaire du sénat, quelques-unes furent provoquées par les diètes provinciales ; mais nous n’en avons pas de preuve formelle, et dès lors il convient de ne rien affirmer. Nous possédons des renseignements assez précis sur la procédure qui était usitée et sur la pénalité qui était appliquée dans ces procès. Tacite y fait de fréquentes allusions, et Pline, qui a été plus d’une fois mêlé à de pareils débats, nous en présente des récits tellement détaillés qu’on croit presque assister aux audiences mêmes. Si l’on ajoute à cela les abondants commentaires dont les lois de concussion ont été l’objet dans l’antiquité et de nos jours, on a sous la main tous les éléments d’information nécessaires. Tout d’abord, c’est dans les cités que se discutait la question de savoir si le gouverneur serait mis en état d’accusation, et l’opinion que chacune d’elles se faisait là-dessus était consignée dans les instructions impératives qu’elle donnait à ses délégués[24]. Ceux-ci, réunis en assemblée, délibéraient à leur tour sur ce sujet. La règle voulait que l’on attendit toujours que le proconsul fût rentré dans la condition privée[25]. ce dernier était donc absent de sa province quand le concilium examinait sa gestion ; mais son successeur était pour lui un défenseur tout trouvé. A moins qu’il y eût entre eux des motifs personnels d’inimitié, le gouverneur en fonctions s’efforçait de le protéger contre la colère de ses administrés, et les moyens d’action ne lui manquaient pas. Un des plus efficaces était sans doute la promesse qu’il faisait aux députés ambitieux de les recommander au prince et de les appuyer plus tard, s’ils entraient dans la carrière des magistratures publiques. C’est peut-être à un argument de cette nature que céda Solemnis, lorsqu’il intervint si chaudement en faveur du légat Paulinus[26]. Beaucoup de provinciaux, par amitié ou par intérêt, se constituaient, dans le sein de l’assemblée, les avocats des gouverneurs menacés, et souvent leur opposition les sauvait. Ce n’est pas que l’unanimité fût requise ; mais il est clair qu’on devait chercher à l’atteindre, pour que l’accusation en eût plus de poids. Parfois aussi on se heurtait à un autre obstacle. Tout magistrat en exercice ayant le privilège d’échapper aux poursuites, il suffisait à un proconsul qui se sentait en danger de se faire transférer dès sa sortie de charge dans une charge nouvelle. Il est vrai qu’une loi prescrivait de laisser un petit intervalle s’écouler entre deux fonctions successives ; mais au temps de Claude elle était déjà tombée en désuétude, et il fallut que ce prince la remit en vigueur[27]. Elle fut scrupuleusement observée sous son règne, et peut-être après lui sous les bons empereurs[28] ; mais il n’est pas douteux qu’elle n’ait été fréquemment violée. Quand une assemblée avait résolu de prendre à partie un gouverneur, elle choisissait des délégués pour aller soutenir l’accusation à Rome. Ceux-ci ne se distinguaient en rien de ces actores universitatis dont parlent souvent les jurisconsultes[29]. On disait d’eux qu’ils étaient procutores in litem[30], et leurs obligations étaient déterminées par les règles du droit civil qui s’appliquaient aux mandats ordinaires[31]. Leur nomination avait pour effet d’opérer entre la province et eux un véritable transport d’action[32]. Ils étaient censés agir non dans l’intérêt d’autrui, mais dans leur intérêt propre. Le procès, suivant l’expression consacrée, était pour eux non une res aliena, mais une res sua[33]. Ils se substituaient d’une façon si complète au concilium qu’ils devenaient, à sa place, domini litis[34] et, bien que les documents ne nous éclairent pas sur ce point, il est fort probable que dans la sentence leur nom seul figurait[35]. Dans certains cas, des dommages intérêts étaient accordés aux provinciaux spoliés par un gouverneur[36] ; nul doute que le jugement ne fût prononcé en faveur du procurator, sauf recours de ses compatriotes contre lui[37]. Dès leur arrivée à Rome, ils déposaient la plainte dans les bureaux de la chancellerie impériale[38], probablement entre les mains de l’a libellis, et le prince décidait s’il y serait donné suite. C’était là, comme on voit, quelque chose d’analogue au célèbre article 75 de la Constitution de l’an VIII. On devine que dès ce moment les délégués rencontraient de sérieux embarras. L’inculpé mettait tout en œuvre pour étouffer aussitôt l’affaire, et il n’était pas sans exemple qu’il y réussît, pour peu qu’il eût des amis haut placés. Un jour que les Bithyniens adressaient à Claude leurs réclamations contre le procurateur Junius Cilon, l’empereur n’entendit pas leurs paroles, et, comme il s’informait de l’objet de leur requête, Narcisse lui dît qu’ils rendaient grâce a Junius. S’il en est ainsi, s’écria Claude, ils le garderont encore deux ans[39]. Combien de fois la complicité des bureaux avec un magistrat coupable ne dut-elle pas induire le prince en erreur, et combien de fois le prince ne dut-il pas répondre sciemment par un déni de justice à des griefs qui n’étaient que trop fondés ! Si la plainte était accueillie, il pouvait se faire que l’empereur évoquât la cause à son tribunal. Au premier siècle, en effet, il jugeait au criminel comme au civil[40]. Dans les procès civils, il siégeait en plein forum ; dans les procès criminels, il ne sortait pas de son palais, et la publicité des audiences était restreinte à un petit nombre de privilégiés, quand elle n’était pas entièrement supprimée. Divers auxiliaires l’aidaient à remplir cette tâche. C’étaient d’abord les employés du bureau a cognitionibus, tous affranchis jusqu’aux environs du règne de Septime Sévère[41]. Leur rôle consistait à former, pour ainsi dire, le dossier de l’affaire, et à mettre le prince en mesure de se prononcer avec connaissance de cause. En outre, l’empereur, comme tout magistrat[42], s’entourait d’un conseil, qu’il composait à sa guise, mais où il était d’usage d’appeler exclusivement des sénateurs et des dignitaires de l’ordre équestre[43]. Devant ce tribunal, la procédure était à peu près la même que devant toute autre cour de justice. On entendait les avocats, on interrogeait les parties, les témoins, puis le conseil délibérait à huis clos. Chacun exprimait son sentiment, soit de vive voix, soit au moyen de tablettes portant les lettres A (absolvo), C (condemno), ou N L (non liquet) ; mais le prince n’était pas obligé de se ranger à l’avis de la majorité[44]. C’était d’ailleurs par exception que les Césars antérieure à Hadrien se réservèrent le jugement de certains procès de concussion ; presque toujours ils préféraient les abandonner à la juridiction du sénat. Les députés des provinces avaient le droit de prendre la parole dans cette assemblée. Mais leur éloquence, surtout s’ils étaient Grecs, produisait parfois moins d’effet à Rome que chez eux[45]. De plus ils étaient étrangers, et on les écoutait avec défiance. Enfin, ils n’exerçaient aucun ascendant moral sur le sénat, et ils n’avaient à leur disposition d’autre ressource qu’un talent suspect. Aussi avait-on l’habitude de leur adjoindre un ou plusieurs patrons choisis parmi les sénateurs eux-mêmes. Le patronage est une institution très antique, qui dura pendant tout l’Empire[46]. Il avait pour but d’assurer à un individu ou à un groupe d’individus la protection d’un homme puissant, en le faisant entrer dans sa clientèle[47]. Nous savons comment se concluait un contrat de ce genre, lorsqu’il s’agissait d’une cité. Il fallait, d’après la loi de Genetiva Julia, que la majorité des décurions assistât à la séance, et que les trois quarts des suffrages fussent favorables[48]. A Malaga, on exigeait la présence des deux tiers des décurions, et la majorité des voix[49]. Dans la colonie de Genetiva, il était défendu de conférer cet honneur à un magistrat romain revêtu de l’imperium ; le futur patron devait être un simple particulier, résidant en Italie[50]. Cette restriction ne figure pas dans la lex Malacitana. En règle générale, ce pacte était perpétuel ; maie il cessait au gré des parties[51]. Pour les provinces, nous ignorons de quelle manière on procédait ; tout ce qu’il est permis de conjecturer, c’est que l’élection était faite par la diète. Les documente épi graphiques nous signalent des patrons de la Crète, des Alpes Maritimes, delà Bretagne, et de la Maurétanie Césarienne. Ces personnages ont occupé des situations très diverses. En Maurétanie, sur quatre, trois au moins sont indigènes, tandis qu’ailleurs ils sont presque tous étrangers au pays. L’un d’eux n’a géré que des charges municipales[52] ; un second est un chevalier employé dans les bureaux de la préfecture du prétoire[53] ; un troisième n’a pas dépassé le grade de préfet de cohorte[54] ; un quatrième s’associe avec un duumvir pour consacrer un monument à un certain Alexandre, affranchi de l’empereur, et, a ce qu’il semble, procurateur de quelque port[55]. Le patron des Alpes Maritimes fut flamme provincial ; on vante son éloquence et ses vertus ; mais il mourut jeune, et on ne voit pas qu’il soit entré dans l’administration impériale[56]. La Crète donna ce titre à un de ses anciens proconsuls[57]. Des deux patrons de la Bretagne, l’un avait été juridicus de la province[58] ; l’autre s’était élevé jusqu’au consulat[59]. Il en est encore quelques-uns qui nous sont connus par le témoignage des auteurs. Ainsi dans le procès de Bæbius Massa la Bétique eut pour patron Hérennius Sénécion, qui était né dans le pays et y avait été envoyé ultérieurement comme questeur[60]. Pline s’acquitta du même office, d’abord vers l’époque de sa préture[61], et en second lieu pendant sa préfecture du trésor[62]. Tacite était consulaire, quand il soutint la plainte des Africains contre Marius Priscus[63], et Varenus avait franchi la préture, quand il prêta son concours aux Bithyniens[64]. Parmi tous ces patrons, il convient d’écarter ceux des Alpes Maritimes et de la Mauritanie. Leur titre paraît avoir été purement honorifique. En tout cas, ils n’ont pu assister dans le sénat leurs compatriotes, puisqu’ils n’en faisaient pas partie. Les seuls dont nous ayons ici à tenir compte sont ceux qui siégeaient dans cette assemblée, parce qu’eux seuls, en dehors des députés du concilium, avaient qualité pour appuyer la plainte d’une province. A vrai dire, ces derniers n’étaient rien de plus que des avocats. Pline leur applique indifféremment les termes d’advocatus et ad patronus[65]. Une inscription dit de l’un d’eux qu’il est brillant orateur, et qu’il a montré le plus grand dévouement pour les intérêts de ses clients[66]. Il est visible qu’on allait les chercher toujours parmi les illustrations du barreau. Le lien qui unissait un patron de ce genre à une province était très faible, et se rompait aisément. Pline, à la suite d’un premier procès, avait formé avec la Bétique un contrat de patronage ; sollicité plus tard par eux de prendre en main une seconde affaire, il eut toutes les peines du monde à s’y décider[67]. Varenus avait été patron de la Bithynie ; peu d’années après, elle le traînait en justice[68]. Il y a pourtant une distinction à établir entre ces sortes de patrons et un avocat ordinaire. En principe, c’est au sénat seul qu’appartenait le droit de les désigner. Sans doute on avait égard aux préférences des députés et aux désirs des candidats mis en avant ; mais le sénat pouvait tout aussi bien repousser les vœux des premiers qu’imposer d’office ce devoir à l’un des siens[69]. Il va de soi que dans la pratique on n’en vint peut-être jamais là ; néanmoins la règle subsista. Elle attestait clairement qu’un provincial était, même aux yeux des Romains de l’Empire, un étranger et un inférieur. Les accusateurs envoyés par les concilia, bien qu’ils fussent de simples mandataires, avaient pourtant leur responsabilité propre, et ils couraient parfois de graves dangers, alors même qu’ils ne se rendaient coupables d’aucun de ces délite professionnels que la loi punissait. L’âpreté de leurs attaques irritait souvent le sénat[70] et leur inexpérience des choses de Rome les exposait à de fréquentes méprises. Dans le procès de Julius Bassus, après l’acquittement prononcé, on voulait poursuivre son principal adversaire, le Grec Théophane, et celui-ci ne fut sauvé que par le veto des consuls[71]. Dans le procès de Classicus, on se montra encore plus sévère : Norbanus Licinianus, député de la Bétique, fut, au cours de l’instance, frappé d’une sentence d’exil. Il est manifeste qu’il fut victime d’une rancune politique. Il avait eu quelque crédit sous Domitien ; il avait été parmi les accusateurs d’un personnage considérable, Salvius Liberalis ; c’en était assez pour le rendre odieux au sénat de Trajan, et la hâte que l’on mit à le condamner séance tenante prouve qu’on accomplit là surtout un acte de vengeance[72]. On eut soin d’ailleurs de se couvrir d’une apparence de légalité, en incriminant Norbanus de prævaricatio, c’est-à-dire de connivence avec l’un des inculpés. Mais, de l’aveu de Pline, ce ne fut qu’un prétexte[73]. Les lois qui réglaient la matière fournissaient toujours des armes pareilles contre ceux qu’on avait résolu de perdre[74]. Le procès s’ouvrait ordinairement par une demande d’enquête[75]. Comme il n’y avait pas à Rome de ministère public, c’était à l’accusateur qu’incombait le rôle dévolu, chez nous, au juge d’instruction. Aussi la demande était-elle généralement agréée par le sénat. Munie de cette autorisation, la diète élisait un commissaire appelé inquisitor, et elle ne se faisait aucun scrupule de choisir un ennemi avéré de l’accusé[76]. Nous connaissons six de ces enquêteurs, un pour la Bétique, cinq pour la Gaule[77]. La loi les investissait des pouvoirs les plus étendus. Ils n’avaient pas seulement la faculté de parcourir la province, et de recueillir partout les témoignages des cités comme des particuliers. On leur reconnaissait encore le droit de faire des perquisitions domiciliaires, et de prendre communication des documents officiels, notamment des livres de compte des villes et des publicains ; il leur était même permis d’emporter ces livres à Rome, sauf ceux des compagnies financières, qu’ils devaient se contenter de copier[78]. Il est à présumer que leurs investigations étaient souvent entravées par le mauvais vouloir du gouverneur en fonctions. En revanche, les cités de la contrée, liées par le mandat dont elles avaient investi leurs députés et par le vote de ces derniers dans l’assemblée, avaient tout intérêt à ce que l’entreprise réussît, et elles secondaient de leur mieux le commissaire du concilium. Un simple détail suffit à montrer que rien n’échappait à ces recherches. L’inquisitor Norbanus chargé d’informer contre Classicus parvint à se procurer des lettres fort compromettantes du proconsul à sa maîtresse, et une espèce de carnet où il avait inscrit de sa main les sommes qu’il avait indûment touchées[79]. Il est à remarquer que l’accusateur avait ici un grand avantage sur l’accusé. La loi qui l’armait d’un pouvoir de contrainte sur les témoins capables de l’éclairer[80] refusait cette ressource à son adversaire ; l’inculpé était libre d’amasser les preuves de son innocence ; mais il le faisait à ses risques et périls, comme un particulier qui agit pour son propre compte, en dehors de toute protection officielle[81]. Le privilège dont jouissait le demandeur ne fut communiqué au défendeur que vers l’année 106, et ce ne fut pas sans peine[82]. L’enquête se prolongeait parfois d’une façon démesurée. Pline en mentionne une qui dura au moins cinq ans[83] ; dans l’intervalle l’accusé mourut ; mais le procès n’en suivit pas moins son cours, quoique la chose parût assez insolite[84]. L’instruction terminée, l’affaire revenait devant le sénat. Les débats étaient conduits par les consuls, ou par l’empereur, quand celui-ci présidait[85]. Contrairement à nos usages, c’est par les plaidoiries que l’on commençait. On entendait d’abord l’accusation, puis la défense, et il n’était pas rare qu’il y eût des répliques. On accordait à la première six heures, à la seconde neuf, et la besogne pouvait être partagée, pour l’un comme pour l’autre, entre plusieurs avocats[86]. Les envoyés de la province avaient le droit de prendre une part active à la discussion ou de s’abstenir. Quand ils parlaient, c’étaient eux qui apportaient le plus de véhémence dans leurs attaques. Les sénateurs, au contraire, y mettaient quelques ménagements. A moins d’avoir devant eux un ennemi direct ou un adversaire politique, ils épargnaient volontiers l’inculpé. Ils oubliaient difficilement que cet homme était pour eux un collègue, et ils évitaient de trop le charger. Pline déplore sans cesse la triste condition de ces anciens préteurs, de ces anciens consuls, qui, après avoir atteint le faîte des honneurs, en étaient réduits à se débattre péniblement contre une province entière acharnée à leur perte[87]. De telles dispositions d’esprit étaient singulièrement propres à émousser dans ses mains l’accusation. Le second acte du procès était l’audition des témoins[88]. La loi en avait limité le nombre maximum à cent vingt[89] ; mais, en réalité, on se bornait au strict nécessaire, et on ne les citait guère que pour éclaircir un point précis du débat[90]. C’étaient les parties qui dirigeaient l’interrogatoire sous la surveillance du président, qui produisaient les témoins, les faisaient déposer, et les pressaient de questions et d’objections[91]. On entendait simultanément les témoins à charge et les témoins à décharge, et l’on joignait peut-être à ces derniers les décrets honorifiques dont le prévenu avait été l’objet dans le cours de sa carrière. Au reste, il ne paraît pas que cette partie de l’instance ait eu l’importance que nous lui attribuons aujourd’hui. Dans plusieurs de ses récits, Pline la passe sous silence. La seule fois où il en parle, nous constatons que les plaidoiries ont exigé deux jours, et qu’un jour a suffi pour les dépositions, et pour le vote, qui d’ordinaire était assez long[92]. On votait de la même manière que dans toute autre délibération. Quelques sénateurs, par ordre de préséance, en commençant par les consuls désignés et par les consulaires, émettaient des avis différents, qu’ils appuyaient d’un discours plus ou moins étendu, et rassemblée décidait par voie de discessio, à la simple majorité[93]. Quand il se trouvait plusieurs propositions en présence, et qu’aucune d’elles n’obtenait la majorité, on suivait des formes semblables à celles qui sont reçues dans nos assemblées législatives, et, les amendements éliminés, on ramenait le vote à une question unique[94]. La sentence était sans appel ; du moins nous ne voyons pas jusqu’à la mort de Trajan qu’aucun procès jugé par le sénat ait été jugé de nouveau par le prince, et Hadrien érigea en règle ce qui n’avait peut-être été avant lui qu’un usage[95]. L’arrêt pourtant n’était définitif que dix jours après le jugement ; dans l’intervalle, l’empereur et le sénat pouvaient le réviser[96]. La lex Julia de repetundis s’appliqua pendant tout l’Empire aux crimes et délits des gouverneurs de province. Mais deux innovations graves contribuèrent à en modifier toute l’économie. En sa qualité d’héritier de la souveraineté nationale, le sénat se prétendit maître absolu de l’instruction et de la peine[97]. Il ne reconnut plus le principe salutaire de la division des accusations. Tandis que, sous la République, il fallait quelquefois poursuivre un même crime par plusieurs procès jugés par des tribunaux divers, on en vint, sous l’Empire, à compliquer une accusation d’une accusation différente pour forcer la condamnation et effrayer la défense, et toutes les fois que, dans un procès de concussion, on ne fut pas sûr d’emporter la sentence, on suspendit sur la tête de l’accusé le crimen majestatus quod tum omnium accusationum complementum erat, dit Tacite[98]. L’autre abus fut l’incertitude de la peine. Le sénat s’arrogea le droit de déterminer dans chaque cas la pénalité encourue par le coupable, et un même crime de concussion put être puni indifféremment d’une simple note d’infamie, telle que la radiation du sénat, ou d’une peine capitale[99]. Si l’on ajoute que l’empereur intervenait sans cesse dans les procès déférés à cette assemblée[100], qu’à propos du moindre incident on s’empressait de le consulter[101], que dans bien des cas on se préoccupait beaucoup plus de lui plaire que de prononcer un jugement équitable, et qu’un signe de lui suffisait pour sauver un inculpé ou pour le perdre, on se convaincra que l’arbitraire régnait ici souverainement, et que les plaintes les mieux justifiées n’étaient pas toujours celles qui recevaient la plus complète satisfaction. Dans les procès de concussion — et ce mot s’entendait de tous les abus de pouvoir dont souffraient les provinciaux[102] —, la peine la plus sévère était le bannissement (aquæ et ignis interdictio), aggravé par la deportatio, c’est-à-dire par l’internement à vie dans quelque petite Île de la Méditerranée. Elle entraînait la privation de la plupart des droits du citoyen, spécialement du droit de tester, et la perte au moins partielle des biens[103]. Tel fut le châtiment qui frappa Si la nus, proconsul d’Asie[104], et Vibius Serenus, proconsul de Bétique[105]. La relegatio, tantôt se confondait presque avec la deportatio[106], tantôt se bornait à l’interdiction temporaire de séjour en certains lieux, avec ou sans confiscation[107]. Elle fut infligée sous la première forme à Bæbius Probus et à Fabius Hispanus, complices des exactions de Classicus[108], sous la seconde à Marius Priscus, gouverneur d’Afrique[109], et à Vibius Secundus, procurateur de Maurétanie[110]. Quelquefois on se contentait de chasser le coupable du sénat, et de lui fermer, comme conséquence de cette note d’infamie, l’accès de toutes les charges publiques[111]. Il est enfin des cas où, tout en gardant sa place dans cette assemblée, il était dépouillé du droit d’aspirer désormais au gouvernement d’une province sénatoriale[112] ; ce qui faisait dire à Pline : Peut-on imaginer rien de plus bizarre et de plus indécent que de voir siéger au sénat un homme que le sénat a flétri, de le voir au niveau de ses propres juges, de le voir, exclu du proconsulat pour cause de prévarication dans ses fonctions de légat, juger lui-même des proconsuls, de voir enfin un homme condamné pour un crime honteux, condamner ou absoudre les autres ?[113] On a des exemples de procès de concussion où l’action pénale fut accompagnée d’une action civile, engagée devant le tribunal des recuperatores. Il semble que ceux-ci aient été désignés, toujours en très petit nombre, par la voie du sort, avec faculté de récusation pour les deux parties[114] ; mais nous ignorons dans quelle catégorie de citoyens ils étaient choisis. Madvig suppose qu’on les tirait du sénat, au moins dans l’espèce[115]. Ils ne prononçaient jamais de peine ; ils n’avaient d’autre pouvoir que d’allouer au demandeur des dommages intérêts, pris sur les biens du défendeur[116]. Aussi arrivait-il parfois qu’un gouverneur désireux d’échapper à la juridiction répressive du sénat passât condamnation sur sa culpabilité, et sollicitât la faveur d’être renvoyé d’emblée devant eux[117]. Mais ce renvoi n’était pas de droit, et le sénat était toujours libre de le refuser. Il le faisait, en général, lorsque les délits reprochés à l’accusé réclamaient un châtiment sévère[118]. Il retenait alors l’affaire pour la juger intégralement. Il n’y avait lieu à une action civile que si le sénat, après avoir acquitté au criminel, saisissait lui-même du procès les récupérateurs[119]. Cette organisation mérite certainement des critiques. Il faut pourtant reconnaître qu’elle assurait aux provinciaux un ensemble de garanties sérieuses. Sur une vingtaine de procès dont nous avons dressé plus haut la liste, on ne compte que cinq ou six acquittements, et l’on remarquera que nous avons négligé les plaintes émanées des cités. Il n’est pas sûr que toutes ces sentences aient été parfaitement équitables, ni surtout que la peine ait toujours été proportionnée à ia gravité du délit. On fut peut-être, suivant les circonstances, tantôt trop indulgent, tantôt trop rigoureux ; on se laissa plus d’une fois guider par des raisons étrangères à la cause ; et, s’il est permis de croire qu’on ne frappa guère d’innocents, on peut supposer qu’on épargna quelques coupables. Mais, justes ou non, ces condamnations n’en produisaient pas moins leur effet, et les gouverneurs craignaient fort d’en courir la chance. C’était donc là une arme redoutable aux mains des concilia, et pourtant nul ne songea à la leur enlever ; Thrasea lui-même consentait à leur laisser ce moyen d’étaler leur puissance[120], et nous voyons qu’ils en faisaient un fréquent usage. On avait été conduit à ce système non par un principe abstrait, mais par la pratique journalière du gouvernement. On s’était aperçu que la meilleure manière de procurer à l’Empire une bonne administration était de rendre les magistrats responsables, et, pour qu’ils le fussent réellement, on avait mis les populations en état de les surveiller et de se plaindre d’eux[121]. Le malheur est que le soin de la répression avait été confié à une assemblée politique, trop considérable pour demeurer indépendante sons un régime despotique, et trop subordonnée pour être impartiale, si bien que sa justice était, en somme, ce que le souverain voulait qu’elle fût. L’inconvénient disparut en partie sous les Antonius. Si soucieux que fussent ces empereurs de vivre en bons termes avec le sénat, ils ne se faisaient pas d’illusions sur ses défauts, et, malgré tout le respect dont ils l’entouraient, ils travaillèrent à réduire ses prérogatives. Ce fut pis encore sous Septime Sévère. Ses prédécesseurs avaient ménagé en apparence un corps qu’au fond ils affaiblissaient ; lui, au contraire, agit brutalement[122], et dès lors, si l’on excepte deux ou trois règnes, où le sénat reprit quelque importance[123], sa décadence fut irrémédiable. Il avait acquis sous Auguste le droit de juger la plupart des procès politiques, notamment ceux où étaient impliqués les sénateurs. Il en fut peu à peu dépouillé à dater d’Hadrien, et c’est ainsi que la connaissance des crimes de concussion lui échappa. Il est difficile de croire qu’il n’y ait pas eu là, de la part des empereurs, un dessein prémédité, un plan mûrement conçu, et exécuté avec persévérance. Mais le changement ne s’opéra pas en un jour, et, sans parler même des courtes périodes où il se fit comme un retour en arrière, le sénat ne perdit sa juridiction que par l’effet des empiétements successifs de la juridiction impériale. Hadrien et ses successeurs furent des justiciers très actifs, et nous constatons que les gouverneurs de province étaient souvent cités devant leur tribunal[124]. La règle semble avoir été que l’empereur, en temps de paix, jugeât tous les jours non fériés jusqu’à midi[125], et c’était mauvais signe, lorsqu’un prince négligeait de remplir ce devoir[126]. Quelques-uns péchaient même à cet égard par excès de scrupules, témoin Marc Aurèle, qui, dit-on, consacrait parfois douze jours et une partie des nuits à l’examen d’une affaire[127]. Pour suffire à cette lourde tâche, il fallut donner une extension plus grande à deux institutions nées pendant le premier siècle de notre ère. Claude avait créé le bureau a cognitionibus, en le composant d’affranchis[128]. A mesure que la juridiction du prince se développa, on fut obligé de multiplier les agents dont le rôle était de l’aider à rendre la justice, et l’on finit par les placer sous les ordres d’un personnage de rang équestre. Le premier chevalier que les inscriptions nous montrent à la tête de ce bureau est contemporain de Septime Sévère ; mais il est possible que l’innovation remonte un peu plus haut[129]. D’autre part, le conseil impérial, qui était avant tout une cour judiciaire, acquiert sous les Antonins une énorme influence ; les dignitaires les plus considérables de l’Empire y sont appelés, et à coté d’eux siègent des jurisconsultes éminents ; son organisation se fixe en traits précis ; ses arrêts empruntent une autorité particulière aux lumières de ceux qui les prononcent, et, bien qu’il ait simplement voix consultative, en réalité c’est lui qui juge[130]. Plus d’un gouverneur a eu sans doute à répondre devant lui de son administration. En ce cas, certains empereurs, tels qu’Hadrien et Marc Aurèle, avaient l’habitude de n’admettre au conseil que des sénateurs[131] ; mais il est probable que cet usage cessa d’être observé vers la fin du second siècle[132]. Quand le prince allait en voyage, il emmenait avec lui quelques employés du bureau a cognitionibus et plusieurs membres du conseil[133]. Si en route il recevait les plaintes des populations, il les examinait sur place, et rendait aussitôt son jugement[134]. Cela faisait une grande impression sur les fonctionnaires et sur les provinciaux, d’autant plus que ces sortes d’assises étaient marquées, en général, par un redoublement de sévérité. Or les empereurs, tantôt par goût, tantôt par nécessité, se déplaçaient très fréquemment ; leur justice, par suite, se rapprochait souvent de ceux qui avaient besoin d’y recourir, et c’était une bonne fortune pour les provinces que de l’avoir de temps en temps à leur portée. Quels que fussent son zèle et sa puissance de travail, l’empereur ne pouvait juger par lui-même toutes les causes qu’il évoquait. Aussi se déchargeait-il volontiers de ce soin sur des commissaires qu’il déléguait à cet effet[135]. Il lui arrivait parfois de renvoyer un procès devant le sénat réuni en séance plénière[136], ou devant des sénateurs de rang soit consulaire, soit prétorien[137]. Il n’était pas rare non plus que le conseil fût autorisé à tenir en son absence des audiences judiciaires[138]. Enfin, les deux plus hauts dignitaires du monde romain, le préfet du prétoire et le préfet de la ville, tendirent de plus en plus à devenir des officiers de justice, et à suppléer en cette qualité le chef de l’État[139]. Il y a apparence que ces divers juges avaient un titre égal à connaître des délits commis par les administrateurs provinciaux. Le seul pour qui la chose soit peu probable est le préfet de la ville, en raison du caractère tout spécial de ses attributions ordinaires[140]. Quant au préfet du prétoire, on serait d’abord tenté de supposer qu’il ne dut jamais être appelé à juger un légat ni un proconsul, tant qu’il fut lui-même un simple chevalier, c’est-à-dire jusqu’au règne d’Alexandre Sévère[141]. Mais, dès le règne de Commode, nous trouvons des sénateurs justiciables de son tribunal[142], et, quoiqu’il ne s’agisse pas, dans l’espèce, d’une affaire de concussion, il n’est pas vraisemblable que ce crime ait été seul soustrait à sa compétence. Ce changement de juridiction ne modifia guère la procédure ni la pénalité qui étaient en vigueur au premier siècle. Il en résulta pourtant deux avantages notables. En premier lieu, la répression fut moins arbitraire, et la jurisprudence eut plus d’unité. Quand le sénat jugeait la plupart des gouverneurs de province, il obéissait souvent à des considérations de personnes ; de plus il était tellement dans la main du prince que son esprit variait très sensiblement d’un règne à l’autre. Il n’en fut plus de même lorsque les juristes du conseil eurent posé des règles et établi des précédente qui faisaient autorité, non seulement pour leurs successeurs, mais aussi pour tous les tribunaux de l’Empire. Les bons princes avaient pour eux les égards dus à leurs mérites, et les mauvais leur laissaient plus de liberté que jadis au sénat, parce qu’ils n’avaient pas à les craindre. Les progrès de leur influence furent donc peu contrariés, et ils s’efforcèrent, comme nos légistes, de faire prédominer les principes juridiques sur les questions personnelles, la règle sur l’arbitraire, i’unité enfin sur la diversité. Sans doute le caprice des empereurs et la partialité des juges vinrent plus d’une fois se jeter à la traverse de leurs excellentes intentions ; mais, somme toute, la justice, eu moins dans les cas qui nous occupent, fut rendue d’une façon plus régulière et peut-être plus équitable sous un Marc-Aurèle ou un Septime Sévère que sous un Vespasien ou même un Trajan. En second lieu, les hommes à qui le souverain déléguait ses pouvoirs judiciaires offraient plus de garanties que la foule anonyme et irresponsable des membres du sénat. Fonctionnaires, jurisconsultes, ou simples sénateurs, ils étaient presque toujours choisis avec soin parmi ceux que recommandaient leurs talents et leurs services. Quelques-uns se trouvaient au terme de leur carrière, et aucune ambition mauvaise n’offusquait chez eux l’esprit d’équité. D’autres souhaitaient un avancement, et ils savaient qu’une prompte disgrâce suivrait peut-être, s’ils la remplissaient mal, la mission de confiance dont ils étaient investis. Nul d’entre eux, d’ailleurs, ne pouvait se flatter de dissimuler ses fautes ; car, même quand ils étaient entourés d’assesseurs, il n’y avait qu’un juge en titre, et la responsabilité de l’arrêt retombait tout entière sur lui. Assurément le système inauguré par les Antonins était encore loin de la perfection. Il laissait à peu près intacte l’omnipotence de l’empereur, et il ne supprimait ni la faveur ni l’intrigue. Un fonctionnaire qui avait la chance d’être bien en cour était presque aussi sûr de l’impunité qu’auparavant, et les provinces avaient toujours quelque peine à obtenir justice. Néanmoins les institutions nouvelles paraissent leur avoir été plus favorables que celles du premier siècle, et l’état florissant du monde romain depuis Hadrien jusqu’aux troubles de l’anarchie militaire vint en partie de là. Dans un pays où manque la liberté politique, c’est un grand bienfait pour les populations que d’être régies par une administration fortement organisée. Les règles qu’elle proclame et qu’elle suit sont autant de barrières contre le despotisme ; le prince est peu à peu emprisonné dans un cadre de prescriptions rigoureuses et de principes immuables, que sa fantaisie brisé quelquefois, mais qui se reforme aussitôt, et la monarchie, sans cesser d’être absolue en théorie, se limite elle-même, dans la pratique, par des lois qui ne lui inspirent aucune défiance, parce qu’elles émanent de sa seule initiative. |
[1] Walter, Histoire du droit criminel chez les Romains, p. 77-78 (trad. franc.).
[2] Dion Cassius, LII, XXXI.
[3] Tacite, Ann., IV, XV ; XIV, XXVIII.
[4] Tacite, Ann., XIII, LII. Pline, Epist., III, IX, 4.
[5] Sénèque, De ira, II, V. La preuve qu’il fut condamné, sans doute sur la plainte de la province, se déduit de Tacite, Ann., III, LXVIII : Tibère, voulant perdre un autre proconsul d’Asie, Silanus, libellos divi Augusti de Voleso Messala... factumque in eum senatusconsultum recitari jubet.
[6] Tacite, Ann., III, LXVI-LXIX.
[7] Tacite, Ann., IV, XV.
[8] Tacite, Ann., III, XXXVIII et LXX.
[9] Dion, LX, XXXIII.
[10] Tacite, Ann., XII, XXII.
[11] Tacite, Ann., XIII, XXX.
[12] Tacite, Ann., XIII, XXXIII.
[13] Tacite, Ann., XIII, XXXIII.
[14] Tacite, Ann., XIII, XXXIII. Cf. XVI, XXI, et Juvénal, VIII, 93-94.
[15] Tacite, Ann., XIV, XVIII. On ne voit pas si ce fut la Cyrénaïque tout entière qui accusa, ou la ville de Cyrène.
[16] Tacite, Ann., XIV, XXVIII.
[17] Tacite, Ann., XIV, XLVI.
[18] Tacite, Hist., I, LXXVII.
[19] Tacite, Hist., IV, XLV ; même remarque que pour Tacite, Ann., XIV, XVIII, note 15.
[20] Tacite, Agricola, XLV ; Pline, Epist., VII, XXXIII ; Mommsen, Étude sur Pline le Jeune, p. 12 (trad. franc.).
[21] Pline, Epist., III, IX ; Mommsen, op. cit., p. 13.
[22] Tacite, Ann., IV, XIII ; VI, XXXV ; XIII, XLIII. Suétone, Tibère, VIII. Voir ce que Philon, In Flaccum, XII, dit des mauvais gouverneurs. Dion, LIV, XXI : plaintes des Gaulois contre le procurateur Licinius, sous Auguste.
[23] Dion, LVI, XXVII ; LVII, XXII ; LX, XXV ; Suétone, Domitien, VIII.
[24] Inscription de Thorigny.
[25] Digeste, XLVIII, II, 12. Ibid., XLVIII, V, 39 (38), 10. Tacite, Ann., XII, XLIV.
[26] Inscription de Thorigny. Lettre de Cl. Paulinus. Lettre d’Ædinius Julianus.
[27] Dion, LX, XXV.
[28] Mommsen, Étude sur Pline le Jeune, p. 53.
[29] Digeste, III, IV, 1, 1 ; IV, 2 ; IV, 6, 3.
[30] Gaius, IV, 86.
[31] Voir, sur les mandats en général, Accarias, Précis de droit romain, II, 519-524 (3e édit.).
[32] Keller, De la procédure civile et des actions chez les Romains (trad. Capmas), p. 238.
[33] Digeste, XLIV, IV, 11.
[34] Digeste, XLIX, I, 4, 5. Code Justin., II, III, 22 ; ibid., 23.
[35] Gaius, IV, 86.
[36] Pline, Epist., III, IX, 17. Capitolin, Antonin, X.
[37] Sur cette question des procuratores, consulter Keller, De la procédure civile, p. 233-234 ; Walter, Histoire de la procédure civile chez les Romains (trad. Laboulaye), p. 129-136 ; Accarias, Précis de droit romain, II, 1284-1290 (3e édit.).
[38] Pline, Epist., VII, VI, 1.
[39] Dion, LX, XXXIII.
[40] Cuq, Le conseil des empereurs, p. 402-403.
[41] Cuq, Le conseil des empereurs, p. 376 et suiv. ; Dict. des antiq. de Daremberg et Saglio, au mot a cognitionibus.
[42] Cicéron, In Verrem, II, I, 28, 72 ; Pro Balbo, XVII, 38 ; Pro Flacco, XXXII, 77 ; Valère Maxime, III, VII, 6 ; VIII, II, 2 ; Wilmanns, 872a, 876.
[43] Cuq, op. cit., p. 397.
[44] Laboulaye, Essai sur les lois criminelles des Romains, p. 374-576 ; Walter, Histoire du droit criminel, p. 96.
[45] Pline, Epist, V, XX, 4.
[46] Elle existait encore au IIe siècle. (Orelli, 3603 ; Wilmanns, 1859. 1860 ; C. I. L., II, 2211.)
[47] Voir les tabulæ patronatus dans Wilmanns, 2849 et suiv.
[48] Lex coloniæ Genetivæ Juliæ, CXXX-CXXXI.
[49] Lex Malacitana, LXI.
[50] Lex coloniæ Genetivæ, CXXX.
[51] Wilmanns, 1883, 2850, 2851, 2853.
[52] C. I. L., VIII, 9699.
[53] C. I. L., VIII, 9368.
[54] C. I. L., VIII, 9047.
[55] C. I. L., VIII, 9369.
[56] C. I. L., V, 7917.
[57] C. I. L., X, 1430.
[58] Henzen, 6488.
[59] Orelli, 3661.
[60] Pline, Epist., VII, XXXIII.
[61] Mommsen, Étude sur Pline le Jeune, p. 59-63.
[62] Pline, Epist., III, IV, et X, III.
[63] Pline, Epist., II, XI, 2. On sait que le consulat de Tacite se place en 97.
[64] Pline, Epist., V, XX, 1.
[65] Pline, Epist., II, XI, 19 ; III, IV, 2-4.
[66] Marini, Atti e monumenti de’ fratelli Arvali, II, p. 785.
[67] Voir toute la lettre IV du livre III.
[68] Pline, Epist., IV, XX, 1.
[69] Pline, Epist., II, XI, 1. III, IV, 2. X, III, 2.
[70] Pline, IV, IX, 3.
[71] Pline, Epist., IV, IX, 20-21.
[72] Pline, Epist., III, II, 29-39. Il n’en continua pas moins d’assister aux débats jusqu’à la fin.
[73] Pline, Epist., III, IX, 33, 36. Tacite, Ann., XIII, XXXIII.
[74] Digeste, XLVIII, 16 ; Laboulaye, Essai sur les lois criminelles des Romains, p. 351 ; Walter, Histoire du droit criminel chez les Romains, p. 100.
[75] Tacite, Ann., XIII, XLIII. Pline, III, IX, 6. V, XX, 2.
[76] Pline, Epist., III, IX, 31.
[77] Wilmanns, 2218 ; Spon-Renier, p. 138, 147, 367 ; Bulletin de la Société des antiquaires, 1881, p. 119-120 ; Pline, III, IX, 31.
[78] Laboulaye, Essai sur les lois criminelles des Romains, p. 371 ; Weiss, De inquisitione apud Romanos, p. 37-49.
[79] Pline, III, IX, 13.
[80] Pline, Epist., VII, IX, 3. Un des accusateurs de Varenus a consulibus postulabat ut Varenus exhibere rationes cogeretur.
[81] Quintilien, V, VII, 9. Laboulaye, Essai les lois criminelles des Romains, p. 364-365.
[82] Pline, V, XX. VI, V, XIII.
[83] L’enquête dirigée contre Classicus commença MDS Domitien (Pline, III, IX, 31), c’est-à-dire en 96 au plus tard, et le procès ne s’engagea définitivement qu’en 101 (Pline, III, IV, 2. Cf. Mommsen, Étude sur Pline le Jeune, p. 13). Tacite, Ann., XIII, XLIII.
[84] Pline, III, IX, 5-6.
[85] Pline, II, XI, 10.
[86] Pline, IV, IX, 9.
[87] Pline, II, XI, 12-13 (III, IV, 7). Voir encore dans Pline, VII, XXXIII, 4-5, une preuve du peu de zèle que montraient les avocats des provinces.
[88] Parfois on intercalait l’audition des témoins entre les différents discours ou dans les discours eux-mêmes. (Keller, Procéd. civ. chez les Romains, p. 292-293.)
[89] Valère Maxime, VIII, I, 10.
[90] Digeste, XXII, V, 1, 2. Ibid., V, 3, 6. Tacite, Ann., IV, XV ; Pline, II, XI, 5.
[91] Laboulaye, Essai sur les lois criminelles des Romains, p. 366-367 ; Quintilien, V, VII.
[92] Pline, II, XI, 18.
[93] Pline, II, XI, 19-23.
[94] Laboulaye, Essai sur les lois criminelles des Romains, p. 443.
[95] Ulpien, au Digeste, XLIX, II, 1.
[96] Tacite, Ann., III, LI. Suétone, Tibère, LXXV ; Dion, LVII, XX. D’ailleurs, ce délai expiré, le prince conservait toujours son droit de grâce (Tacite, Ann., I, LXXVII).
[97] Pline, II, XI, 3-4.
[98] Tacite, Annales, III, XXXVIII.
[99] Laboulaye, Essai sur les lois criminelles des Romains, p. 420-422.
[100] Tacite, Ann., III, LXVII, LXX ; IV, XV ; XIII, XXXIII ; Sénèque, De ira, II, V.
[101] Tacite, Ann., XIV, XVIII.
[102] Laboulaye, op. cit., p. 265 ; Mispoulet, Institutions politiques des Romains, II, 511.
[103] Dion, LVI, XXVII. Ibid., LVII, XXII. Paulus, au Digeste, XXII, V, 15. XLVIII, XXII, 6. XLIX, XIX, 17, 1.
[104] Tacite, Ann., III, LXVIII.
[105] Tacite, Ann., IV, XIII. Cf. Philon, In Flaccum, XVIII.
[106] Ulpien, au Digeste, XLVIII, XXII, 7. Ibid., XXII, VII, 3. Ibid., XXII, 4. Ibid., XXII, 14.
[107] Digeste, XLVIII, XXII, 5. Ibid., XXII, 18. L, XIII, 5, 2. Juvénal, I, v. 47.
[108] Pline, III, IX, 17. Ibid., IX, 22.
[109] Pline, II, XI, 9 ; III, IX, 18.
[110] Tacite, Ann., XIV, XXVIII.
[111] Tacite, Ann., XIV, XVIII. Hist., I, LXXVII. Walter, Histoire du droit criminel, p. 58-59.
[112] Pline, II, XII, 2.
[113] Pline, Epist., II, XII, 4, Quelquefois on acquittait le gouverneur accusé et l’on se contentait de casser ses actes. Tel fut le cas de Julius Bassus (Pline, IV, IX, 16-22 ; X, 56 et 57).
[114] Keller, De la procédure civile chez les Romains, p. 38 (trad. franc.) ; Walter, Histoire de la procédure civile chez les Romains (trad. Laboulaye), p. 7-8 ; Mispoulet, Institutions politiques des Romains, II, 476-477.
[115] Madvig, L’État romain (trad. franc.), III, 359.
[116] Pseudo-Asconius, p. 177 (Orelli). Lex Acilia repetundarum, 58. Papinien, au Digeste, XLVIII, XIII, 16 (14).
[117] Pline, II, XI, 2.
[118] En réponse à la demande de Priscus, ses adversaires firent observer excessisse Priscus immanitate et sævitia crimina quibus dari judices possent (ibid.).
[119] Tacite, Ann., I, LXIIV : Granius Marcellus est accusé à la fois de concussion et de lèse-majesté. Pline, IV, IX, 16.
[120] Tacite, Ann., XV, XVI.
[121] Cette responsabilité s’étendait aux agents du gouverneur. Plusieurs d’entre eux furent condamnés dans le procès de Marius Priscus et de Classicus. Pline, II, XI, 23. Sa condamnation est mentionnée dans la lettre suivante. Ibid., III, IX, 6.
[122] Spartien, Sévère, XI-XIII.
[123] Par exemple, ceux d’Alexandre Sévère et de Tacite.
[124] Spartien, Hadrien, XIII ; Sévère, VIII ; Capitolin, Antonin, X ; Vopiscus, Aurélien, XXXIX.
[125] Dion, LXXVI, XVII ; Philostrate, Vie d’Apollonius, VIII, 1.
[126] Dion, LXXVII, XVII.
[127] Dion, LXXI, VI.
[128] La première mention qui soit faite d’un employé a cognitionibus date du règne de Claude (C. I. L., VI, 8684).
[129] C. I. L., II, 1085 ; Wilmanns, 1280.
[130] Cuq, Le conseil des empereurs, p. 238 et suiv.
[131] Spartien, Hadrien, VIII. Capitolin, Marc-Aurèle, X.
[132] Après son gouvernement de Sicile, Septime Sévère, qui était naturellement sénateur, fut cité en justice devant le préfet du prétoire, qui n’était que chevalier. (Spartien, Sévère, IV.) Or ce gouvernement se place en 189. (Klein, Die Verwaltungsbeamten der Provinzen des rom. Reichs, p. 160 ; de Ceuleneer, Essai sur Septime Sévère, p. 24-25.) Devenu empereur, il décida amplement ne liceret imperatori inconsulto senatu occidere senatorem. (Spartien, VII.)
[133] Capitolin, Marc-Aurèle, VIII. C. I. L., VI, 8635. Cuq, Le conseil des empereurs, p. 406-407.
[134] Spartien, Hadrien, XIII.
[135] On leur appliquait l’expression vice sacra cognoscere. (Bouché-Leclercq, Manuel des Institutions romaines, p. 437.)
[136] Capitolin, Marc-Aurèle, X.
[137] Capitolin, Marc-Aurèle, X.
[138] Cuq, Le conseil des empereurs, p. 357, note 3.
[139] Bouché-Leclercq, Manuel des Institutions romaines, p. 154-159.
[140] Ulpien, se fondant sur un rescrit de Septime Sévère, dit : Quidquid intra urbem admittitur, ad præfectum urbi videtur pertinere ; sed et si quid intra centesinum miliarium admissum sit, ad præfectum urbi pertinet ; si ultra ipsum lapidem, egressum est præfecti urbi notionem (Digeste, I, XII, 1, 4).
[141] Lampride, Alexandre Sévère, XXI.
[142] Spartien, Sévère, IV. Le préfet du prétoire, comme le préfet de la ville, jugeaient assistés d’un conseil. Pline, Epist., VI, XI. Digeste, XII, I, 40.