HISTOIRE DE MARIE-ANTOINETTE

LIVRE PREMIER. — 1755-1774

 

— IV —

 

 

Liaisons de la Dauphine. — Madame de Picquigny. — Madame de Saint-Mégrin. — Madame de Cossé. — Madame de Lamballe. — Entrée du Dauphin et de la Dauphine dans leur bonne ville de Paris. — Popularité de la Dauphine. — Intrigues du parti français contre la Dauphine et l'alliance qu'elle représente. — M. d'Aiguillon. — La Dauphine appelée l'Autrichienne.

 

Poursuivie de ces ennuis, ainsi entourée de malveillances et d'espionnages, sans appui, sans amis, sans épanchement, seule dans cette cour de scandale, étrangère dans sa famille, mariée et sans mari, cette jeune femme se laissa aller à des liaisons qu'elle devait croire sans danger : forcée d'amuser son cœur, c'est ainsi que madame de Motteville parle d'une autre reine de France, elle le donna, comme l'avait donné Anne d'Autriche, à des amies. Marie-Antoinette chercha des compagnes pour s'étourdir, pour échapper aux larmes, à l'avenir, à elle-même. Elle se lia comme une jeune fille, ou mieux comme une pensionnaire punie, dont les grandes vengeances — de petites malices — veulent une confidente et une complice. La première amitié de la Dauphine fut une camaraderie, et la camarade, la plus jeune tête de la cour : la duchesse de Picquigny.

Madame de Picquigny était la digne belle-fille de madame la duchesse de Chaulnes. Elle avait de sa belle-mère l'abondance d'idées, le flux de saillies, les fusées, les éclairs et les feux de paille. Elle était tout esprit comme elle, et son esprit était cet esprit à la diable, le char du Soleil abandonné à Phaéton. Elle prenait, en se jouant, son parti de toutes choses, et de son mariage, et de son mari, ce fou d'histoire naturelle qui, disait-elle, avait voulu la disséquer pour l'anatomiser. Quelles distractions pour la Dauphine dans cette compagnie, dans cette causerie, qui ne respectait rien, pas même l'insolence de la fortune, pas même la couronne de la du Barry ! Et le dangereux maître, cette madame de Picquigny, qui, derrière son éventail, enhardit, émancipe la langue de la Dauphine[1] ! C'est d'elle que Marie-Antoinette apprend à rendre les railleries pour les injures, et la moquerie pour la calomnie, Madame de Picquigny la sollicite et la lance aux espiègleries contre. les figures bizarres, les ajustements gothiques, les prétentions, les gaucheries, les ridicules et les hypocrisies ; et c'est dans sa familiarité que s'ébauchent ces traits, ces mots, ce partage des femmes de la cour en trois classes, à femmes sur l'âge, les prudes faisant métier de dévotion, et les colporteuses de nouvelles empoisonnées : les siècles, les collets montés et les paquets[2], sobriquets innocents dont s'amusait la jeune Dauphine, et qui préparaient tant de haines à la Reine de France !

Mais M. de la Vauguyon tenait encore alors le Dauphin sous la tutelle de ses avertissements et de ses représentations. Quelles suites, murmurait-il à son oreille, si jamais le Roi était instruit de cette ligue de la Dauphine avec madame de Picquigny contre la grande sauteuse ! Il faisait d'un autre côté insinuer à la Dauphine que les personnes faites et tournées comme madame de Picquigny, spirituelles de nature, font esprit de tout ; qu'elles sont entraînées à n'épargner personne, pas même une bienfaitrice, et qu'il leur arrive de s'acquitter de la reconnaissance par des brocards. De la confiance et de l'abandon, la Dauphine passait à la réserve avec madame de Picquigny, et de la réserve à l'indifférence. C'était le moment attendu par M. de la Vauguyon. Il poussait aussitôt dans l'es bonnes grâces de la Dauphine une favori le nouvelle et à sa dévotion, sa bru, madame de Saint-Mégrin. Celle-ci était plaisante, à peu près autant que madame de Picquigny, mais sans étourderie, avec choix, avec discernement, avec prudence. Elle plaisantait aussi, 'nais bas, et de certaines personnes. Formée par M. de la Vauguyon, elle s'avançait sans éclats et par glissades dans la faveur de la Dauphine, essayant de lui plaire sans déplaire, gardant pied à la cour de Louis XV, habile à se ménager, à se prêter et à se reprendre, à se compromettre à demi, et à faire la révérence sans tourner le dos à personne. La Dauphine perça vite ce jeu[3], et quand madame de Saint-Mégrin vint à solliciter la place de dame d'atours auprès d'elle, s'appuyant de droite et de gauche, faisant jouer par-dessous main, avec le crédit de son mari auprès du Dauphin, la bienveillance de madame du Barry, la Dauphine alla prier le Roi de la refuser. Le Dauphin appuyait madame de Saint-Mégrin, le Roi l'avait déjà désignée, mais la répugnance de la Dauphine l'emporta. Madame de Cossé fut nommée, et elle entra en faveur en entrant en place. Madame de Cossé était une compagne plus sérieuse, plus sage, plus mûrie par la vie. Elle avait, non l'agrément des bons mots, mais l'agrément de la raison aimable et de l'expérience qui pardonne ; elle y joignait la patience de ce qui est maussade et la tolérance de ce qui est ridicule. Un esprit anglais logé avec une imagination française dans une tète de femme, telle un jugement du temps nous peint madame de Cossé[4].

Pour détacher la Dauphine de madame de Cossé, d'un pareil guide, d'une conseillère si sure, il ne fallut rien moins qu'un sentiment jusqu'alors inconnu de la Dauphine, une liaison d'une espèce nouvelle, d'une confiance plus tendre, d'une sympathie plus émue. La Dauphine avait vu madame de Lamballe aux petits bals de madame de Noailles : elle connaissait l'amitié[5].

Madame de Lamballe avait l'intérêt de ses vingt ans et de ses malheurs. Marie-Thérèse-Louise de Carignan était restée veuve, à dix-huit ans, d'un mari mort de débauches, Louis-Alexandre-Joseph Stanislas de Bourbon, prince de Lamballe, grand veneur de France. Le malheureux père de ce misérable jeune homme, M. le duc de Penthièvre, avait fait de sa belle-fille sa fille adoptive. Madame de Lamballe fut bientôt de tous les plaisirs de la Dauphine, de tous les bals qu'elle donnait dans son appartement ; elle y brilla singulièrement, et jusqu'à toucher Louis XV. Un moment, madame du Barry, les valets de sa faveur, la cour, l'imagination des nouvellistes, tout s'émut dans l'attente de grands changements et de grandes menaces : un mariage de Louis XV avec madame de Lamballe[6], et ce fut encore un lien entre la Dauphine et son amie que ces alarmes données par madame de Lamballe à madame du Barry : tout l'esprit de madame de Picquigny ne l'avait point si bien vengée.

 

Trois ans s'étaient écoulés depuis l'entrée en France de la Dauphine, quand le jour fut fixé pour la première entrée du Dauphin et de la Dauphine dans leur bonne ville de Paris. C'était un vieil usage de la monarchie et une vieille fête de la nation que ces entrées solennelles, marches jadis armées changées par la paix des temps en processions pacifiques. Grands et beaux jours, où les héritiers de la France venaient en triomphe sourire et se faire connaître à ce peuple, leur peuple ! où un jeune couple, l'avenir du trône, rendait visite à l'opinion publique dans son royaume même, et entrait pour la première fois dans les applaudissements de la multitude, comme dans la flatterie de l'histoire !

Le 8 juin 1773, le Dauphin et la Dauphine arrivaient de Versailles à onze heures du matin, et descendaient de voiture à la porte de la Conférence. La compagnie du guet à cheval les attendait. Le corps de ville, le prévôt des marchands en tête, le duc de Brissac, gouverneur de Paris, et M. de Sartines, lieutenant de police, les recevaient. La Halle, qui était toujours un peu de la famille des rois en ces jours de liesse, présentait à la Dauphine les belles clefs d'une ville qui se donne : des fruits et des fleurs, des roses et des oranges. De là, dans les carrosses de cérémonie, par le quai des Tuileries, le Pont-Royal, le quai des Théatins, le quai de Conti, où s'étaient rangés en escadron les gardes de la Monnaie ; le Pont-Neuf, où se trouvait sous les armes, en face le cheval de bronze, la compagnie des gardes de robe courte ; le quai des Orfèvres, la rue Saint-Louis, le marché et la rue Notre-Dame, le Dauphin et la Dauphine allaient à Notre-Dame. Reçus aux portes par l'archevêque et le chapitre en chapes, leur prière faite au chœur, ils entendaient dans la chapelle de la Vierge une messe basse dite par un chapelain du Roi et un motet payé trois cents livres au maître de musique de Notre-Dame. Ils montaient au Trésor, le visitaient, gagnaient Sainte-Geneviève, tournaient, suivant l'usage, autour de la châsse de la sainte, et revenaient aux Tuileries. Les femmes des halles dînaient dans la salle du concert ; il n'y avait d'hommes à la table que le Dauphin. Le palais était au peuple : la foule entrait, regardait, passait ; sa joie courait autour du festin. Au dehors le jardin n'était que peuple. La jeune Dauphine voulut y descendre au bras de son mari, et, s'aventurant dans l'amour de cette multitude, elle commandait aux gardes de ne pousser, de ne presser qui que ce fût. Elle avançait, charmant la foule, charmée elle-même, entourée de vivats et comme portée par les bénédictions de tous, les mains battaient, les chapeaux volaient en l'air... Toutes les adulations du jour, la harangue du prévôt des marchands, la harangue de. l'archevêque, la harangue de l'abbé Coger, et jusqu'aux trente-huit vers des écoliers du collège de Montaigu, quelles pauvres adulations elles semblaient à la Dauphine auprès de ce grand peuple et de cette grande voix. Elle allait, saluant et remerciant, étourdie de bruit, de joie et de gloire. Remontée au château, elle voulut encore se faire voir, encore ravir ce peuple ; et, malgré le grand soleil, Marie-Antoinette restait un quart d'heure sur la galerie à se montrer, à s'entendre applaudir, retenant à peine les larmes d'attendrissement qui lui montaient aux yeux[7].

Cette grande émotion, cette joie de l'âme d'une princesse française, Marie-Antoinette les laisse éclater dans cette lettre à sa mère : J'ai eu mardi dernier une (fête) que je n'oublierai de ma vie ; nous avons fait notre entrée à Paris. Pour les honneurs, nous avons reçu tous ceux qu'on peut invaginer ; tout cela, quoique fort bien, n'est pas ce qui m'a touché le plus, mais la tendresse et l'empressement de ce pauvre peuple, qui, malgré les impôts dont il est accablé, était transporté de joie de nous voir. Lorsque nous avons été nous promener aux Tuileries, il y avait une st grande foule que nous avons été trois quarts d'heure sans pouvoir ni avancer m reculer. M. le Dauphin et moi avons recommandé plusieurs fois aux gardes de ne frapper personne, ce qui a fait un très bon effet. Il y a eu un si bon ordre dans cette journée que, malgré le monde énorme qui nous a suivis partout, il n'y a eu personne de blessé. Au retour de la promenade, nous sommes montés sur une terrasse découverte et y sommes restés une demi-heure. Je ne puis vous dire, ma chère maman, les transports de joie, d'affection qu'on nous a témoignés dans ce moment. Avant de nous retirer, nous avons salué avec la main le peuple, ce qui a fait grand plaisir. Qu'on est heureux dans notre état de gagner l'amitié d'un peuple à si bon marché ! Il n'y e pourtant rien de si précieux ; je l'ai bien senti et ne l'oublierai jamais.

Il est des jours où les peuples ont vingt ans. La France aimait ; et le vieux duc de Brissac, montrant de la main à Marie-Antoinette cette foule, cette mer, Paris, le maréchal de Brissac disait bien : Madame, vous avez là, sous vos yeux, deux cent mille amoureux de vous ![8]

Les délices de ce jour enivrèrent la Dauphine. Dès le lendemain, elle travailla à les ressaisir. Et quelle femme ne se fût donnée comme celte jeune femme à cette adoration de la France ? Aller au-devant de tous ces cœurs qui venaient à elle, faire son bonheur de l'amour de ce peuple, en emplir le vide de sa pensée. en occuper sa vie sans œuvre, l'illusion était trop belle pour qu'une princesse de dix-huit ans y résistât. Et voilà la Dauphine à rechercher ces cris, ces vivats, cette joie, d'autres journées du 8 juin. Elle va à l'Opéra, elle va au Théâtre-Français[9]. Mais il ne lui suffit pas du théâtre, où le respect enchaîné les transports du public ; elle aspire à descendre de son rang, à s'approcher plus près de ce peuple, à entrer dans le partage de ses plaisirs, à se compromettre jusqu'au coudoiement, pour surprendre et goûter la popularité dans le plus vif et le plus vrai de sa familiarité. Ce sont alors, avec la famille royale qu'elle entraîne, des promenades à pied dans le pare de Saint-Cloud. La Dauphine se môle à la foule ; elle parcourt les bas jardins, elle regarde les eaux, elle s'arrête à la cascade, perdue et se cachant parmi tous, dénoncée à tous par son enjouement et son plaisir. Avec son mari et les enfants de la famille, elle va tout le long de la fête, et (le la foire des boutiques, riant où l'on rit, jouant où l'on joue, achetant où l'on vend ; bientôt reconnue, montrée, saluée de, la foule, accablée de suppliques. L'écuyer qui la suit se fatigue de les recevoir, et refuse le placet d'une vieille femme. La Dauphine le gronde tout haut, et la foule d'applaudir ! La Dauphine, suivant les Parisiens et la foule, entre dans la salle de bal du portier Griel, elle se régale de-regarder danser, et elle veut que les danseurs oublient qu'elle est là, et que la joie continue[10]. Quelle nouveauté, quelle révolution, c'est le mot d'un spectateur du temps, ces princes mêlés au peuple, et s'amusant de ses jeux, côte à côte avec lui ! Et quelles louanges dans toutes les bouches, quels amours par tout le royaume de cette Dauphine chérie qui faisait le miracle de rattacher ainsi Versailles à la France !

La France et l'avenir souriaient à la reine future ; et, cependant, contre sa popularité, dans l'cmbre, sans bruit, mais sans repos, se poursuivait l'œuvre de haine et de destruction commencée le jour même où la Dauphine avait quitté Vienne. Au-dessus de ses ennemis, Marie-Antoinette avait contre elle cette chose abstraite, aveugle, impitoyable, un principe : la politique de l'ancienne France. Cette politique, dont le père du duc de Berry avait été l'apôtre, était la vieille religion de la diplomatie française ; elle était le prétexte et l'arme de la haine de M. D'Aiguillon contre M. de Choiseul, disgracié par M. d'Aiguillon et madame du Barry presque aussitôt l'installation de la jeune princesse à la cour de France.

Les hommes du parti français, c'est ainsi que ce parti s'appelait, ne voulaient point reconnaître que les lois d'équilibre de l'Europe obéissent au temps et se renouvellent. Ils n'étaient pas satisfaits de ce long effort de la France qui avait successivement rogné de l'empire de Charles-Quint le Roussillon, la Bourgogne, l'Alsace, la Franche-Comté, l'Artois, le Hainaut, le Cambrésis, et l'Espagne, et Naples, et la Sicile, et la Lorraine, et le Barrois. Ils oubliaient le présent de l'Angleterre pour ne se rappeler que le passé de l'Autriche. Qu'était, aux yeux de ce parti, le mariage de Marie-Antoinette, sinon une défaite ? qu'était Marie-Antoinette, sinon le gage et la garde des traités de la nouvelle politique inaugurée sous le règne de madame de Pompadour ? Le chef de ce parti, le petit-neveu du cardinal de Richelieu, l'ennemi personnel du duc de Choiseul, M. d'Aiguillon, disposait du clergé et du parti des Jésuites, hostiles à Marie-Thérèse, dont les possessions avaient abrité le jansénisme, hostiles d'avance à la protégée de M. de Choiseul, et groupés, en haine du ministre philosophe, cet autre Aman, autour de la du Barry, cette nouvelle Esther[11]. Les ennemis de la Dauphine n'oubliaient pas d'exploiter contre elle le partage de la Pologne, ce partage que Choiseul n'eût pas permis, avouait Louis XV lui-même[12]. M. d'Aiguillon venait dire au Roi et répétait à la cour. Voyez quelle foi la France peut ajouter à l'amitié de la maison d'Autriche, et ce que nous devons attendre d'une maison, l'alliée du Roi par le double lien d'un traité et d'un mariage, qui. lorsqu'elle veut augmenter ses possessions aux dépens du roi de Prusse, soulève la France contre lui ; lorsqu'elle veut augmenter ses domaines aux dépens de la Pologne, se rapproche de la Prusse, l'ennemie du Roi ! C'était à la mère que le coup semblait adressé, mais c'était la fille de Marie-Thérèse qu'il atteignait. Et quand M. d'Aiguillon parlait encore du prince qui sera Joseph II, qu'il lui prêtait des vues lointaines sur la Bavière, la convoitise du Frioul vénitien et de la Bosnie, le projet de l'ouverture de l'Escaut, le regret de la Lorraine et de l'Alsace[13], il savait bien éveiller ainsi les alarmes et les doutes sur le cœur français de la sœur de Joseph, sur la bonne foi du dévouement de Marie-Antoinette à sa nouvelle patrie.

Les manœuvres étaient habiles, hardies, continues. Le parti ne répugnait à rien pour donner raison à sa politique. N'allait-il pas jusqu'à mettre 4ux mains de madame du Barry, à la fin d'un souper, la dépêche funeste du cardinal de Rohan, livrée à la favorite par M. d'Aiguillon, et à la lui faire lire en pleine table ?... J'ai effectivement vu pleurer Marie-Thérèse sur les malheurs de la Pologne opprimée ; mais cette princesse, exercée dans l'art de ne point se laisser pénétrer, me paraît avoir les larmes à commandement : d'une main elle a le mouchoir pour essuyer ses pleurs, et de l'autre elle saisit le glaive de la négociation pour être la troisième puissance copartageante[14]. Un peu de l'odieux de cette fausseté prêtée à Marie-Thérèse ne pouvait manquer, le parti le savait bien, de rejaillir sur sa fille. Il fallait donner cette croyance au public que le mensonge et la comédie sont de race ; il fallait commencer à familiariser le génie de la nation avec l'idée d'une haine nationale contre sa souveraine.

A ce malheur, le partage de la Pologne, s'était jo.int contre Marie-Antoinette, dès les premiers jours de son mariage, une faute dont Marie-Thérèse devait porter le reproche, une faute d'apparence légère, mais de terrible conséquence chez un. Peuple susceptible, dans une cour réglée et jalouse de ses rangs. Une parente de Marie-Thérèse, la sœur du prince de Lambesc, Mademoiselle de Lorraine, prétendit à prendre rang dans le menuet des fêtes du mariage immédiatement après les princes du sang ; là-dessus, mille réclamations, mille colères, les ducs et pairs soulevés, toute la noblesse menaçant très-sérieusement de quitter la cadenette, de laisser là les violons, toutes les dames jurant d'être indisposées pour la fête[15].

M. de Choiseul en disgrâce, en exil, Marie-Antoinette était livrée sans défense à toutes les petites rancunes, à toutes ces grandes haines contre l'Autriche que devaient raviver encore les malheureuses prétentions de l'archiduc Maximilien en 1775 ; et le jour où cette princesse si française montait sur le trône, son crédit, sa popularité étaient minés ; déjà était trouvée, déjà courait dans le murmure de la cour cette épithète l'Autrichienne qui devait l'accompagner à l'échafaud.

 

 

 



[1] La Dauphine était née moqueuse. Mercy-Argenteau dit dans une lettre : S. A. R. par un pur effet de gaieté et sans mauvaise intention se livre quelquefois à plaisanter sur le chapitre de ceux auxquels elle aperçoit des ridicules ; cela a déjà été remarqué ici, et y deviendrait d'une conséquence d'autant plus dangereuse que cette princesse sait donner à ses observations tout l'esprit et le sel propres à les rendre piquantes.

[2] Portefeuille d'un talon rouge.

[3] M. de Saint-Mégrin, fils de M. de la Vauguyon, qui est encore plus dans l'Intrigue et plus méchant que son père, dit la Dauphine dans une lettre adressée à Marie-Thérèse, en date du 16 avril 1771.

[4] Portefeuille d'un talon rouge.

[5] Correspondance entre le comte de Mirabeau et le comte de La Marck, par A. de Bacourt, 1851. Introduction.

[6] Notice d'événements, par Hardy, 25 décembre 1771.

[7] Notice d'événements, par Hardy, 8 juin 1773.

[8] Mémoires secrets de la République des lettres, vol. V.

[9] Mémoires secrets de la République des lettres, vol. II.

[10] Notice d'événements, par Hardy, 8 et 6 septembre 1773.

[11] Notice d'événements, par Hardy, vol. I.

[12] Les Fastes de Louis XV. A. Villefranche, 1782.

[13] Mémoires historiques, par Soulavie.

[14] Mémoires pour servir à l'histoire des événements de la fin du dix-huitième siècle, par l'abbé Georgel. Paris, 1817, vol. I.

[15] Mémoires historiques et politiques.