HISTOIRE DE LA RÉVOLUTION DE 1848

TOME TROISIÈME

 

PIÈCES JUSTIFICATIVES DU TROISIÈME VOLUME

 

 

DÉTAILS PUBLIÉS PAR UN OFFICIER D'ÉTAT-MAJOR SUR LES PRINCIPALES BARRICADES ÉLEVÉES PAR LES INSURGÉS DANS LES JOURNÉES DES 23, 24, 25 ET 26 JUIN 1848.

 

Compter les barricades de Paris élevées pendant les journées de juin, autant vaudrait compter les grains de sable du rivage de la mer. Dans la moitié de la ville occupée par l'insurrection, il faudrait hardiment barrer toutes les rues, enfermer toutes les places, nouer tous les carrefours. Trente-quatre barricades montaient à l'escalade de la seule rue Mouffetard, depuis la place Maubert jusqu'à la barrière d'Italie. Les alentours de l'Hôtel-de-Ville, vus de la tour Saint-Jacques-la-Boucherie, ressemblaient à un océan de pavés bouleversés.

La guerre des barricades, bien connue du peuple de Paris par une pratique si fréquente, au point qu'on a parlé d'un homme surnommé le professeur de barricades, a été singulièrement perfectionnée cette fois ; il a fallu déployer les moyens les plus énergiques de la guerre des sièges pour en venir à bout, et encore, après quatre jours et quatre nuits de combats acharnés. Les barricades les plus éloignées, celles qu'on avait pu élever à loisir, comme dans le quartier Saint-Antoine, étaient de véritables constructions par assises régulières de pavés et de pierres de taille, et d'une épaisseur à l'épreuve du canon. Quelques barricades très-étendues présentaient de face un angle rentrant, soit pour neutraliser en partie l'effet du boulet, soit pour fournir à droite et à gauche une double fusillade convergeant sur les troupes assaillantes. Dans plusieurs rues, les insurgés, s'emparant des maisons, perçaient les murs à coups de pioche pour établir ainsi de longues communications qui leur permettaient d'avancer ou de faire retraite à l'abri.

Un art inouï éclatait dans quelques-unes de ces barricades menaçantes, improvisées avec les premiers matériaux venus, charrettes, planches et cuivre. La plupart d'entre elles avaient leurs assises à deux et trois pieds dans le sol, afin que le canon ne pût les entamer par la base. Celles de la rue Saint-Jacques étaient des serrures, celles du faubourg Saint-Antoine étaient des monuments. Au sommet du faubourg Saint-Denis, les insurgés avaient pénétré dans les ateliers de M. Cave, mécanicien ; ils s'étaient emparés d'une locomotive, de deux ou trois cuviers, et d'un assez grand nombre de feuilles de tôle, avec lesquels ils avaient construit, à hauteur de premier étage, un formidable retranchement que trois cents coups de canon ont été impuissants à ébranler.

Le mur d'enceinte de Paris, depuis la barrière Rochechouart jusqu'à celle de Ménilmontant et au delà, n'était qu'une longue suite de meurtrières ; quoique la plupart soient aujourd'hui bouchées, on en voit la trace pendant plusieurs lieues de tour, — cordon implacable où chaque barricade faisait nœud. Plusieurs arbres ont été abattus sur le boulevard extérieur ainsi que sur le chemin de ronde.

Une barricade placée sur le boulevard Saint-Ange, entre la barrière Saint-Denis et la barrière Poissonnière, a surtout été funeste à la troupe de ligne et à la garde mobile. Sa position, au bas d'un dos d'âne formé par le tunnel du chemin de fer du Nord, permettait aux insurgés de décimer nos soldats à mesure qu'ils les voyaient apparaître du sommet.

Les fortifications naturelles du clos Saint-Lazare, telles que mamelons, murailles, accumulation de pierres, expliquent suffisamment l'absence de barricades. Après celle de la place Lafayette, la seule qui ait été construite dans la rue du Delta, vis-à-vis la rue de Rocroy, est due au général Lebreton, qui fit abattre un pan de mur pour frayer un passage aux balles des légions. A deux cents pas de cette barricade, un insurgé, complètement ivre, est plusieurs fois venu offrir sa poitrine, en criant : Fainéants, lirez donc! Mais toujours la garde nationale a détourné ses fusils et dédaigné d'atteindre ce malheureux.

La Grande rue de La Chapelle-Saint-Denis était entièrement fortifiée : aussi n'est-ce que le dimanche soir que la force publique a pu y faire irruption à l'aide d'un détour, par les rues de Chartres et Jessaint, sur le boulevard extérieur. — La barrière de La Villette regorgeait de barricades; ç'a été, avec la Chopinette, un des points les plus difficiles à emporter.

Le faubourg du Temple gardera longtemps au front de ses boutiques les marques cruelles de sa rébellion. Profondément labouré par le canon dans toute sa longueur, il semble aujourd'hui prêt à s'affaiser sur lui-même. Ses barricades étaient peu nombreuses, mais mieux que par des barricades, il était surtout protégé par le canal Saint-Martin; de ce côté, les dégâts sont immenses, incalculables. Au coin de la rue Folie-Méricourt, une maison frappe les regards, demi-brûlée, demi-renversée et criblée d'un millier de balles.

La rue Saint-Sébastien, la rue Saint-Maur, les quartiers Popincourt et Ménilmontant ont eu leurs retranchements courageusement attaqués, désespérément défendus ; les insurgés ne les ont abandonnés qu'au dernier moment, pour aller-se rallier, par les barrières, aux combattants du faubourg Saint-Antoine.

Entre la Bastille et le Temple, le quartier du Marais, principalement dans les rues Chariot, Saint-Louis, du Pas-de-la-Mule, avait de nombreuses barricades, mais isolées et ne faisant point partie de la grande combinaison stratégique du plan principal.

Cependant les barricades se faisaient plus fréquentes à mesure qu'elles se rapprochaient de l'Hôtel-de-Ville : à l'extrémité de la rué Saint-Antoine, et dans les rues tortueuses qui l'avoisinent ; elles se pressaient, s'amoncelaient, s'élevaient d'une manière effrayante ; c'étaient des pyramides dé pavés à défier le canon, des murailles de planches à défier les balles. Quel furieux tintamarre dans cette rue Saint-Antoine ! Pendant les décharges de feux de peloton, sinistres et drues, une cloche pendue au balcon du premier étage d'un marchand de vin, dominant la barricade, au coin de la rue de l'Égout, ne cessait de faire entendre ses sons de ralliement. Pas une devanture de magasin qui ne soit défoncée par le boulet, pas une vitre debout ; les espagnolettes pendent aux fenêtres, décrochées et brisées ; il n'y a plus de place sur les' murs pour une seule balle. Un café, le plus abîmé de tous, le café Louis, étale avec une sorte d'ostentation ces stigmates d'épouvante ; et tous les soirs, au milieu des glaces fracassées, des panneaux rompus, des débris de toute sorte inondés d'un vif éclat, se réunissent les gardes nationaux pour parler barricades et combats des rues.

N'oublions pas les barricades de la rue des Nonaindières, de la rue de la Tixeranderie, de la rue de la Verrerie, remarquables par leur nombre et leur solidité. Au cœur de Paris, elles se multiplient et encombrent notre souvenir. La voûte Aumaire, la rue Prépillon et les aboutissants étaient fortifiés comme des places de guerre ; la rue Vieille-du-Temple est presque tonte dépavée ; au bas de la rue Rambuteau, il y a des barricades faites en parties avec les malles de quelques voyageurs retenus dans la matinée du samedi. C'est sur l'imposante barricade de la rue Culture-Sainte-Catherine que le citoyen Clément Thomas a été atteint d'un fragment de balle.

Les premières barricades élevées sur les quais ont été celles du coin de la rue Planche-Mibray et du pont Saint-Michel. Les barricades de la Cité, construites à la hâte et mal défendues, ont tenu peu de temps. On remarque à peine quelques commencements de dépavage sur quelques points de l'île Saint-Louis.

En revanche, les trois formidables faubourgs Saint-Jacques, Saint-Marcel et Saint-Victor, fortifiés jusque dans leurs impasses, et armés du fond de leurs souterrains jusqu'au faîte de leurs maisons, étincelaient de barricades sous le soleil. Aux alentours de la place Maubert, c'était un enchevêtrement indescriptible : on eût dit que le quartier tout entier s'était mis en état de démolition pour soutenir le siège. Les toiles d'araignée n'ont pas de ramifications plus fantasques et plus diverses que le réseau enveloppant les rues Galande, Saint-Julien-le-Pauvre, des Rats, du Fouarre, des Anglais, et tout ce carrefour oublié du moyen âge.

Une barricade monstrueuse, dressée dans le chantier du cardinal Lemoine, entre.le quai de la Tournelle et la rue Saint-Victor, n'a été enlevée que très-difficilement ;  on n'a pas eu moins dé peine pour la barricade du pont Saint-Michel, savante construction en planches de plus de douze pieds de haut, et qui figurait la porte principale de ce centre d'insurrection.

Le Cordon des barricades enveloppait la Sorbonne et se repliait autour du Panthéon ; mais à cette hauteur elles se faisaient beaucoup plus rares, et ne se poursuivaient plus que de loin en loin dans la rue du faubourg Saint-Jacques jusqu'à la barrière d'Arcueil.

Entre la barrière d'Italie et là barrière de Loureine, au bout du faubourg Saint-Marcel, se retrouvent les traces encore fraîches d'un combat terrible. Désertes aujourd'hui, les rues du Champ-de-1'Alouette et dés Anglais, étaient remplies, les 24 et 25 juin, d'une multitude d'insurgés., C'est là seulement, dans ce coin isolé de Paris, retranché comme le clos Saint-Lazare, que les révoltés en sont venus quelquefois au combat corps à corps. Refoulés jusqu'à la, barricade Mouffetard, leur fuite est écrite en rouge le long de la rue Pascal et de la rue de Loureine.

En outre des barricades, les insurgés avaient improvisé des forteresses sur divers points ; les principales étaient : les maisons situées au bas du pont Saint-Michel, l'église Saint-Séverin, le Panthéon et l'école de Droit ; l'église Saint-Gervais, derrière l'Hôtel-de-Ville, les maisons de la place Saint-Gervais et de la place Baudoyer ; une partie de la rue du Temple et du faubourg ; les constructions nouvelles du clos Saint-Lazare ; les angles des grandes rues qui débouchent sur la place de la Bastille ; et enfin, tout le faubourg Saint-Antoine, qui n'a été occupé que le dernier, et où il restait encore vingt mille combattants le lundi 26 juin.

 

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LISTE DES VILLES ET COMMUNES QUI ÉTAIENT REPRÉSENTÉES PAR LEURS GARDES NATIONAUX, À LA REVUE PASSÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS LES JOURNÉES DE JUIN.

 

Avallon, Autun, Andelon, Auxonne, Amiens, Arc, Arras, Avesnes, Avranches, Mençon, Andelys, Abbeville, Albert, Auberive, Attichy, Argentan, Beaugency, Blois, Bourges, Beauvais, Béthune, Berlaincourt, Bouchain, Boulogne, Breteuil, Bar-sur-Aube, Bar-sur-Seine, Bar-le-Duc, Besançon, Bourbonne, Bernay, Brest, Bordeaux, Bayonne, Braisne, Bayeux, Bourmont, Caen, Carentan, Chartres, Cherbourg, Chevreuse, Coutances, Chailly, Châlons-sur-Marne, Château-Thierry, Châtillon-sur-Seine, Chaumont, Coulommiers, Crécy, Clamecy, Château-Chinon, Calais, Cambray, Chauny, Clermont, Compiègne, Corbie, Creil, Crépy, Châteauvillain, Coucy-le-Château, La Chapelle-sur-Crécy, Choisy-sur-Marne, Dieppe, Dijon, Dourdan, Douai, Dunkerque, Ducoy, Dôle, Doulaincourt, Doullens, Elbeuf, Evreux, Epinal, Célaron, Forges, Frey-Billot, La Ferté-sous-Jouarre, La Ferté-Gaucher, La Fère, Fontainelles, Grillon, Granville, Gien, Gournay, Gavray, Gers, le Havre, Hazebrouck, Hervey, Joinville, Joigny, Jussennecourt, Jouy-sur-mer, Jouy-le-Grand, Louviers, Lagny, Langres, Laon, Landrecies, Le Cateau, Lille, Lens, Longins, Lorient, La Rochelle, Ligny, Magny, Mantes, Meulan, Montfort-Lamaury, Mortain, Meaux, Méry-sur-Seine, Mirecourt, Moulins, Maignelay, Marville, Maubeuge, Montdidier, Montmorency, Morey, Montierander, Morlaix, Montebourg, Napoléon-Vendée, Neufchâtel, Nancy, Nanteuil, Nevers, Noyon, Nantes, Nogent, Orgeval, Orléans, Pont-l’Évêque, Poissy, Pithiviers, Péronne, Pont-Sainte-Maxence, Pauchard, Pontorson, Pontivy, Pranthoy, Pontarlier, Quincy, Quesnoy, Rouen, Rozoy, Ribecourt, Roye, Roubaix, Remilly, Rennes, Rochefort, Saint-Lô, Strasbourg, Semur, Sens, Saint-Just, Saint-Omer, Senlis, Soissons, Saint-Pol-de-Léon, Saint-Jean-de-Losnes, Saint-James, Saint-Hilaire-du-Harcouët, Tourcoing, Tours, Troyes, Tréport, Torigny, Valenciennes, Vendôme, Versailles, Verberie, Verdun, Vierzon, Villeneuve, Vitry, Vassy, Valogne, Vernon, Villevieux, Yvetot.

 

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Voici les détails qu'un correspondant de Prague nous a fournis sur l installation du congrès slave dans cette ville. Il ne faut pas oublier que c'est un Allemand qui les écrivait dans une langue étrangère pour lui.

 

Prague, 5 juin 1848.

Je vous écris, cher ami, sous l'impression du spectacle inouï d'un congrès slave.

Certes, la race slave en a aussi bien le droit que la race allemande.

Il s'agit, vous le savez, avant tout de revivifier, ou mieux dit, d'introduire dans le mouvement civilisateur de l'Europe occidentale et centrale les vingt millions de Slaves non encore assujettis à l'empereur de Russie. Certes, lui-même, le père si grand et si vénérable de ses peuples — comme disent les Slaves russophiles —, fait travailler les Slaves non russes par de l'or, des sermons, des promesses ; les griffes de l'aigle à deux têtes, embrasseraient un jour, comme un immense domaine, la surface du globe, depuis le détroit entré l'Amérique et l'Asie jusqu'à Prague, jusqu'à Stettin, en quoi ! jusqu'à Leipzig, car les savants slavemanes, les pédants panslavistes à la manière des fameuses chambres de réunion sous Louis XV, prouvent déjà aux braves Saxons que Leipzig vient de lipsk, et que lipa signifie en slave le tilleul.

Le fait est qu'il y a neuf siècles ; les Slaves labouraient la terre à la rive droite de la rivière de l'Elbe, en Mecklembourg, Brandebourg, Poméranie, Silésie, Saxe royale et ducale ; ils avaient pris possession de tous ces pays, lorsque les tribus allemandes de ces parages s'étaient ébranlées pour émigrer vers l'empire romain. Plus tard tous les Allemands, refluant vers ces pays, les ont regermanisés tout à fait. Mais en Bohême, en Moravie, dans quelques districts de la Prusse orientale, l'élément slave prévaut encore à l'heure qu'il est.

Qu'y faire ? Je vous dirai ce que le congrès slave proposera : la conquête à main armée et des mesures un peu moyen âge envers les Allemands du pays.

Pardonnez, cher ami, à nos frères slaves cette surexcitation de leur patriotisme ; ils ont souffert si longtemps, si cruellement, surtout les nobles et braves Tschèques (ou Bohèmes), ces fiers Hussites, ces précurseurs de Luther et de Robespierre ; ce peuple que les jésuites de la maison de Habsbourg, par une guerre d'extermination de trente ans, réduisirent en effet du nombre de quatre millions à quatre cent mille, et des hauteurs du républicanisme fougueux et évangélique à la fange d'une superstition infâme et lâche ; ce peuple se souvient aujourd'hui qu'avant sa dernière lutte contre les Habsbourg il avait triomphé vingt ans sur la maison impériale de Luxembourg, en portant la gloire et l'Evangile par toute l'Allemagne très-abrutie alors.

La Moravie, entre la Gallicie et la Bohême, avait, toujours partagé le sort de celle-ci. Jadis ces pays avaient eu des princes communs, tant païens que baptisés.

Les voilà les délégués des Slaves, depuis les Carpathes aux bouches du Danube turc, depuis les Alpes à la Vistule prussienne ; ils se rendent à l'église de Feyn, en costumes bizarres, quelquefois magnifiques, de velours et d'hermine, en couleurs de tribus unies, à, la tricolore panslave, qui est la même que celle de France. La brigade des étudiants de Prague et des corps francs, même des amazones armées, et à cheval, se promènent, sous le son des cloches, dans les rues toujours mornes et sombres de l'ancienne cité de Prague.

Les Slaves de la Dalmatie, de la Hongrie, de la Croatie et de la Gallicie, se donnent le bras ; ils avancent à pas lents, sous silence, comme s'ils réfléchissaient sur leur triste passé. Parfois ils entonnent un hymne national assez mélancolique.

Dans la vaste salle de l'île Sophie, je compte parmi leurs notabilités le poète national des Serbes, le vieillard Wouk Karadjitz ; le prêtre Hourban, exilé de la Hongrie par les violences du parti exclusivement hongrois ; le professeur Cybulski, de Berlin ; le grand anatomiste Purkinji, de Breslau ; le prince Lubomirski, de la Gallicie ; en outre, le grand historien de la race slave, Schaftargik, et le docteur Libelt, un des insurgés de Posen. Les idiomes de toutes les tribus slaves sont assez différents, et il n'y a que très-peu de membres qui les comprennent tous à la fois.

Les propositions adoptées ont été jusqu'à présent entièrement hostiles à l'Allemagne, et malheureusement aussi et surtout à cette héroïque ville de Vienne qui, depuis trois mois, ne fait que combattre le monstre de la tyrannie à mille têtes, ville profondément et jusqu'à la moelle des os allemande. Le congrès slave a commis la triste imprudence de demander que Vienne, avec sa province allemande du Danube, se subordonne désormais à l'ensemble de la confédération slave de l'empire autrichien, qui changerait ce nom en celui d'empire slaviste. Les Viennois ont certainement peu d'intérêt à museler de nouveau les Galliciens, les Dalmates, les Milanais ; mais il serait plus que ridicule de vouloir incorporer Vienne à un empire slave !

Voilà, mon cher ami, le commencement grandiose et plein d'avenir du réveil de ces peuplades. Veillons cependant à notre tour afin qu'elles ne soient trompées par les aristocrates et par les prêtres, par leurs savants et leurs poètes. Vive la démocratie ! Les prolétaires, les démocrates allemands, slaves, français, ne peuvent jamais avoir de querelles : si leurs oppresseurs se livrent une guerre, que ce soit alors le signal, pour la démocratie, de sonner le tocsin sacré dans chacun de ces pays, pour paralyser efficacement toute haine internationale et pour enflammer de plus en plus celle contre les oppresseurs si éloquents et splendides qui habitent chacun de ces pays. La France, l'Allemagne, la Slavie, voilà la confédération du continent telle que le dix-neuvième siècle la verra avant sa fin. (Le correspondant oubliait l'Italie.)