III. — Condé, de retour à Paris, perd successivement tous ses alliés. - Les frondeurs retournent au parti de la cour. - Traité du coadjuteur avec Mazarin. - Lutte ouverte entre le prince et le coadjuteur. - Condé se sépare de la cour. Mazarin une fois écarté, qu'allaient faire ses vainqueurs ? S'ils avaient eu l'intention sincère de travailler au bien de l'État, la matière n'aurait pas manqué à leur bonne volonté et à leur zèle. Quelle occasion plus favorable pour des réparateurs ? Noblesse, clergé, campagnes, tous, de près ou de loin, appelaient des réformes ou des soulagements bien faits pour honorer ceux qui auraient eu la force de les accomplir. La noblesse avait travaillé à la délivrance des princes. Bussy-Rabutin,
avec plus de cent gentilshommes, avait essayé de les enlever au moment de
leur translation de Vincennes à Marcoussi ; puis, l'entreprise ayant manqué,
on l'avait remise à un autre temps, par un traité formel dont Bussy avait
gardé l'original[1].
Dès le 2 février, un bon nombre de nobles réunis à Paris, avaient obtenu du
duc d'Orléans la liberté de s'assembler, et leur première instance, comme ils
s'en vantent[2],
avait été pour la liberté des captifs. Ils en attendaient donc la récompense.
L'assemblée, continuée après le départ de Mazarin, invitait tous les nobles
de province à se joindre à elle pour rentrer dans
les avantages et prérogatives de leur naissance blessée en toutes ses
parties, pour se rétablir dans leur ancien lustre. On voit, dans un
pamphlet publié pour eux, que ce qui leur déplaisait surtout dans leur état
actuel, c'était leur pauvreté et leur éloignement des emplois. Les nobles, y est-il dit, ces
arcs-boutants et vraies colonnes de l'État, sont empêchés par la disette
d'aspirer aux charges publiques, désormais remplies par des fils de
laboureurs et de marchands ; ils n'ont plus qu'à se faire tuer pour le
service des princes, ou, rentrés chez eux après toutes sortes de périls, à
fouler le bonhomme et piller le paysan pour vivre selon le rang qui convient
à leur qualité et à leur courage[3]. Comme moyen de
sortir .de cette détresse, ils demandaient les États généraux. Assurément ces
plaintes, ces aspirations toutes personnelles, aussi bien que celles des
importants, et toute confession d'égoïsme, nous paraissent aujourd'hui assez
peu dignes d'intérêt. Mais au XVIIe siècle,
il eût été habile d'examiner ces réclamations ; quand la noblesse perdait de
plus en plus la puissance politique, il n'était pas indifférent de rechercher
quelle part elle pourrait prétendre dans l'administration à côté du flot
populaire, que les privilèges mêmes du temps n'empêchaient pas de monter. Il n'eût pas été moins opportun de jeter les yeux sur la situation du clergé, et d'écouter la défense qu'il opposait aux plaintes portées contre lui. C'était toujours la jalousie de ses biens, renforcée d'une apparence de zèle pour le soulagement de l'État. Des écrits publics, en ce moment même, proposaient de lever sur l'Église le quart de son revenu, en dépit de ses réclamations[4]. Les magistrats se joignaient aux pamphlétaires. Deux arrêts du Parlement de Toulouse venaient de signifier que les ecclésiastiques de la province payeraient le sixième denier de leur revenu pour la subsistance des pauvres du Languedoc, et qu'ils y seraient contraints par les voies de droit. A ces attaques, l'assemblée du clergé, réunie à Paris, répondit par une remontrance, où elle exposa la situation qui lui était faite au temporel par les financiers, au spirituel par les prétentions de la magistrature[5]. Les arguments à décharge, en effet, ne lui manquaient pas. Outre que le clergé de France était bien moins riche qu'on ne prétendait, comme Voltaire lui-même l'a reconnu[6], outre qu'il payait, comme les autres sujets, les droits de consommation, et qu'il donnait beaucoup sous le nom de décime, de subvention et de don gratuit, il eût été juste de lui tenir compte de cette confiscation indirecte et permanente qu'exerçaient sur lui les commendes. Une bonne part de ses revenus n'allaient plus à leur destination primitive et bienfaisante, parce qu'ils étaient interceptés par des usufruitiers extérieurs, hommes du monde et de la cour. Sa richesse profitait moins au service public, depuis que des intrus, imposés par l'autorité séculière, s'en étaient arrogé la jouissance pour leur grandeur ou leurs plaisirs personnels. Il y aurait donc eu un grand mérite à supprimer de pareils abus ; et des réformateurs capables d'une telle entreprise, au risque de se dépouiller eux-mêmes et leurs amis avec eux, auraient donné par là une preuve incontestable de leur sincérité. La misère publique réclamait encore, avec plus d'instance, un soulagement efficace. Cette pénurie du peuple est déjà suffisamment indiquée par les deux arrêts de Toulouse, cités ci-dessus. Elle éclate dans les relations, publiques et semi-officielles, venues du théâtre de la guerre espagnole, des environs de Reims, du pays de Thiérache, entièrement ruiné par les troupes du général Rose[7]. On peut donc produire les témoignages des missionnaires de Vincent de Paul, sans craindre le reproche d'exagérer le mal pour augmenter le mérite du consolateur, et de ne tirer que de ses disciples la 'preuve de ses services. Leurs lettres, envoyées de divers lieux, s'accordent sur le fond des choses avec une conformité qui en consacre l'exactitude. Dans le doyenné de Guise, des malades couverts de gale et de pourpre et d'apostumes, à la suite d'une disette qui les a réduits à ne manger que des racines d'herbes, de méchants fruits et du pain de son. Dans la Thiérache, le grand nombre vivant de lézards, de grenouilles et d'herbes des champs. Dans le pays de Soissons, vingt-cinq églises hors d'état de servir, trente villages ruinés, les maisons à moitié démolies et découvertes, les fugitifs mourant dans les bois. A Saint-Quentin, de sept à huit mille pauvres, quatre cents malades, douze cents réfugiés que la cruauté des soldats a fait sortir des bois, que la faim a ramenés sur la ville, des hommes mangeant la terre, broutant l'herbe, arrachant l'écorce des arbres, déchirant leurs méchants haillons pour les avaler, se dévorant les bras et les mains, et mourant dans ce désespoir. Aux environs de Reims, de Rethel, toutes les maisons démolies, la moisson emportée, la terre sans labour et sans semence, du pain fait de grains de blé ou d'avoine germés, des malheureux retirés dans des trous ou des cabanes, couchés à plate-terre, sans linge ni habits[8]. Telles étaient les suites du siège de Guise, des incursions espagnoles jusqu'à Soissons, Fismes, Basoches, des évolutions et des besoins des deux armées ; car amis et ennemis pesaient également sur la population impuissante à se défendre elle-même. N'y avait-il pas là, pour ceux qui arrivaient aux affaires, le devoir de se consacrer, à tout prix, à la réparation de ce fléau, et d'abord de renoncer aux discordes civiles pour avoir la force de conclure une paix avantageuse avec l'étranger ? Il n'en fut rien. Les politiques, comme nous l'avons dit,
laissèrent à la bonne volonté privée le soin de tant de pauvres. Vincent de
Paul, aussitôt après la délivrance de Guise, avait fait un nouvel appel
d'aumônes. Des filles de la Charité étaient parties de Paris pour aller se
partager les malades. Les pères de la Mission, répartis entre différents
centres, Noyon, Soissons, Laon, Reims, recommencèrent leurs distributions de
potage, de pain, de viande, de vêtements, d'instruments de travail,
faucilles, fléaux, serpes, vans, rouets à filer. Un d'entre eux, surveillant
général, visitait les localités, l'une après l'autre, pour comparer les
.besoins et régler, en conséquence, la proportion des secours. Vincent de
Paul, tenu au courant par lui, assemblait, chaque semaine, ses pieuses
auxiliaires, et, dans ces états de la charité, on avisait, sans querelles, à
toutes les questions qui importaient au développement de l'œuvre. On en vint
assez vite à distribuer jusqu'à 16.000 livres par mois, somme que les
contemporains trouvent considérable. Au nombre de ces exploits réparateurs,
il faut compter la sépulture donnée aux morts. Quinze cents cadavres
d'Espagnols, en partie déchirés par les bêtes, achevaient de pourrir en plein
air et infectaient le pays. Vincent de Paul chargea un de ses frères de
prendre des hommes à la journée pour enterrer ces débris et mit à sa disposition
l'argent nécessaire. Nous avons, lui écrivait
quelque temps après son digne lieutenant, nous avons
accompli, à la lettre, ce que Jésus-Christ a dit dans l'Évangile, d'aimer et
de bien faire à ses ennemis, ayant fait enterrer ceux qui avaient ravi les
biens et causé la ruine de nos pauvres habitants, et qui les avaient battus
et outragés[9].
Voilà par qui la misère était combattue et soulagée en 1651. Le gouvernement,
les princes, les magistrats né le trouvèrent pas mauvais, mais ils n'y mirent
pas la main. Ils ne furent pas plus sensibles aux plaintes de l'Église. Tout ce qu'ils firent de ce côté se réduisit à une menace contre les cardinaux. Pour consacrer l'expulsion de Mazarin, on trouva ingénieux de proposer qu'à l'avenir tout cardinal fût de droit exclu du gouvernement. Omer Talon soutint cette thèse avec autant d'ardeur qu'il en avait mis cinq ans plus tôt à défendre la thèse contraire. En 1646, le pape voulant obliger tous les cardinaux à résider à Rome, l'avocat général avait repoussé la bulle, parce que son application aurait privé la France du ministre qui la gouvernait si heureusement. En 1651, il invoquait cette même bulle et cette obligation de résidence à l'étranger, pour justifier l'éloignement du ministre, et montrer que l'honneur de l'Église n'était pas blessé par une déclaration conforme aux sentiments du chef de l'Église[10]. Les passions les plus opposées venaient en aide à cette dialectique de chicane. Les vainqueurs se divisaient déjà, et ne songeaient plus qu'à se nuire mutuellement. Les nouveaux amis de Gondi, pour n'avoir pas à lui tenir parole, ou pour l'écarter du gouvernement, croyaient lui faire pièce en appuyant la proposition ; comme ils le savaient avide du chapeau, ils étaient heureux de se donner un motif de lui refuser cette dignité ou de la tourner contre lui en cause d'exclusion. La reine n'était pas fâchée de voir ses dominateurs se brouiller d'eux-mêmes, et quoique la déclaration demandée allât d'abord, à son grand regret, contre Mazarin, elle l'acceptait provisoirement contre le coadjuteur. De cette singulière unanimité, il sortit une déclaration brève, révocable à la majorité du roi, qui interdisait les fonctions publiques aux cardinaux (19 avril 1651). Mais nul ne s'occupa de justifier l'Église de France des plaintes élevées contre elle, ni de la rassurer contre les embarras qu'elle dénonçait. Quant à la question des états généraux réclamés par la
noblesse, elle fut éludée à la faveur de rivalités pareilles à celles qui
avaient agi dans l'affaire des cardinaux. Orléans et Condé, qui se croyaient
sûrs du Parlement, acceptaient assez facilement l'espoir, en gagnant le
clergé et la noblesse, d'avoir pour eux toutes les forces du royaume et
d'ôter la régence à la reine. Mais ils se méprenaient sur les intentions des
magistrats. Le Parlement ne pouvait condescendre à s'absorber dans les états
généraux ; le nom inférieur de membres du tiers,
dont il eût fallu se contenter, n'allait pas à ses prétentions. Aussi
appuya-t-il énergiquement la reine dès qu'elle laissa voir sa répugnance pour
cette convocation. Jamais peut-être l'arrogance de la magistrature ne s'éleva
plus haut. On proclama sans façon dans la compagnie que le Parlement ne
députerait pas aux états, qu'il n'y avait jamais député, que d'ailleurs sa
présence y était inutile, puisque tout ce qui s'y décidait revenait plus tard
à son contrôle, et qu'il dominait tout par le droit de vérification et
d'enregistrement[11]. C'était se
déclarer supérieur, non-seulement au roi, mais à la nation tout entière. Les
princes insistaient ; la reine, encouragée par le premier président,
résistait ; la bourgeoisie, représentée à l'Hôtel-de-Ville, répondait par une
grande froideur aux avances de la noblesse. Les états généraux n'étaient pas
populaires ; on se rappelait ceux de 161 ; ce souvenir se traduisait en
termes de défiance : On sait bien comment cela
commence, on ne sait pas comment cela finit. A l'exemple de Mazarin,
la reine se sauva par un accommodement. Elle
promit la convocation des états pour le 1er octobre, c'est-à-dire à l'époque
où la majorité du roi aurait fait cesser la Régence légale. Par cette
promesse, elle se donnait le droit de mettre fin à l'assemblée des nobles qui
reçut en effet l'ordre de se séparer immédiatement ; et par l'ajournement,
elle s'assurait le loisir de voir venir les événements, et d'atteindre
l'heure où le prétexte de la minorité manquerait aux ambitieux. Ainsi les
grands intérêts politiques sont encore écartés pour longtemps ; l'histoire
cherche en vain à relever son récit par d'autres faits que des débats de
personnes, des divisions, des coalitions de petits partis ; tout se réduit à
la question de savoir si Monsieur le Prince restera, ou si Mazarin sera assez
habile pour reprendre sa place. Mazarin, retiré à Brühl, dans l'électorat de Cologne, continuait à gouverner la Régente et la France. On le sait par ses lettres à madame de Navailles, que madame de Motteville cite souvent. On le voit encore mieux aux visites qu'il ne cessait de recevoir, aux propositions que lui faisaient porter les ambitieux des deux partis, enfin et surtout à la conclusion définitive d'une alliance de famille entre lui et les Vendôme. Ce fut à Cologne que le duc de Mercœur vint épouser la nièce du cardinal, l'aînée des Mancini. Dans l'exil, dans la détresse, avec toute l'apparence d'un homme perdu, il recevait cet hommage de gens qui prenaient au sérieux leur titre de princes du sang, quoiqu'il l'eût dédaigné au lendemain de sa première victoire sur leur cabale. Tant il était difficile à certains esprits de croire que sa disgrâce ne fût pas un jeu, et que l'attachement de la reine pour lui ne dût pas l'emporter sur tous les efforts de ses adversaires. De leur côté, et pour se mettre en garde, Orléans et Condé ne perdaient aucune occasion de rendre la reine suspecte, et d'exiger, contre le retour de son ministre, les gages qu'il lui répugnait le plus d'accorder. Ils réclamaient l'éloignement de Letellier, de Servien, de Lyonne, créatures et agents connus de Mazarin. N'ayant pu prévenir la disgrâce de Châteauneuf que la reine ne pouvait plus souffrir, ils s'en vengèrent en l'empêchant de donner les sceaux au premier président, en la menaçant d'exciter dans Paris un soulèvement dont la perspective toute seule faisait frissonner madame de Longueville (2 avril 1651). Condé ne se laissait pas même gagner par des faveurs personnelles. Depuis longtemps les Bordelais réclamaient la retraite du duc d'Épernon, toujours ajournée quoique promise l'année précédente ; des assemblées populaires, formées sur la butte de l'Ormée, depuis si célèbre, commençaient à constituer dans cette ville une opposition démocratique menaçante[12]. On offrit, on donna à Monsieur le Prince le gouvernement de la Guienne, au lieu de la Bourgogne, mais en lui laissant dans cette dernière province les villes occupées par ses troupes. Il accepta sans rien abandonner de ses antipathies, et quelque temps après, il aspirait à réunir le gouvernement de Provence à celui de Guienne. S'il l'obtenait, comme disait Mazarin, il n'y avait plus qu'à le conduire à Reims. Mais il avait déjà trouvé son maître dans l'art des intrigues, et pour la seconde fois il travaillait lui-même à sa ruine. Il ne garda pas longtemps les amis qui s'étaient ligués pour obtenir sa délivrance. Il oublia ses promesses pour ne plus penser qu'à lui-même, ou se garantir des prétentions qu'il avait provoquées. Il perdit madame de Chevreuse, en s'opposant au mariage de mademoiselle de Chevreuse avec Conti ; maintenant qu'il n'était plus au Havre, il s'apercevait de la différence des rangs, ou peut-être de la mauvaise réputation de cette fille, trop suspecte de relations avec Gondi. Il perdit le coadjuteur par l'impuissance où il se trouva de lui faire donner le chapeau. Il perdit la Palatine, parce qu'il ne fit pas arriver aux finances le marquis de la Vieuville ; la Palatine, qui avait espéré devenir riche par le moyen de ce marquis dont le fils était de ses amis[13], se rapprocha de la reine et du cardinal. Il perdit le premier président, parce que, au lieu de Champlâtreux, fils de ce magistrat, il annonçait l'intention de substituer le président Viole à Letellier[14]. Il finit par s'aliéner le duc de Bouillon et Turenne pour avoir défendu trop faiblement, à leur gré, les intérêts de leur famille, et leur fameux dédommagement. Il demeurait à peu près seul, pendant que tous ces défectionnaires allaient offrir leur influence, leurs bandes de cabaleurs, à ses ennemis, pour en tirer la solde qu'ils n'avaient pas reçue de sa main. Il en advint comme après les coups de pistolet. La cour n'avait pas hésité. à se servir des frondeurs pour emprisonner Monsieur le Prince ; elle n'hésita pas davantage à exploiter encore une fois leur concours pour le chasser de Paris. De tous ces condottieri, le plus redoutable, comme le plus
habile, était le coadjuteur ; c'était aussi celui pour lequel la reine avait
le plus d'aversion. Depuis quelque temps, mécontent de Condé, incertain des
intentions du duc d'Orléans, il avait pris le parti de feindre la retraite,
le dégoût des agitations publiques. Il se renfermait dans le cloître de
Notre-Dame, ne voyait que des chanoines et des curés, et s'amusait, contre
une de ses croisées, à siffler des linottes
en volière. Le bon père ermite ! comme l'appelait Conti. Cependant, il ne s'abandonnait pas à la Providence jusqu'à dédaigner
les moyens humains. D'accord avec les
colonels et capitaines de quartiers, il tenait une émeute toute prête ; il
distribuait des hommes armés dans les maisons de la rue Neuve ; le soir, il
allait, en cachette et déguisé, à l'hôtel de Chevreuse. Sur l'apparence
seule, on eût pu le croire uniquement appliqué aux devoirs de sa profession[15] ; au fond, il se
dégageait de tous les partis pour être plus libre de choisir celui qui lui
offrirait le plus d'avantages. La tentation vint de la cour. Par les conseils
de Mazarin, et même de madame de Motteville qui
la pressa de feindre, la reine, surmontant sa répugnance, donna un
rendez-vous secret au coadjuteur. Il raconte lui-même ce qui se passa dans
cette entrevue. D'abord, invité à prendre parti pour Mazarin, il refusa
absolument ; mais, dès que la reine eut articulé la promesse du chapeau, il
répondit : J'obligerai Monsieur le Prince à sortir
de Paris avant huit jours, et je lui enlèverai Monsieur dès demain. — Touchez là, lui dit la reine, en lui tendant la main, vous êtes après-demain cardinal
et, de plus, le second de mes amis. Charmé de cette perspective et
peut-être déjà du cynique espoir d'être bien
traité par la reine[16], il finit par se
radoucir à l'égard du cardinal, promit de ne garder contre lui que les
apparences de l'inimitié, et fit voir que Mazarin trouverait son compte à
cette comédie, destinée à tromper le peuple. Il sortit comme il était entré,
par toutes sortes de détours, sous la conduite d'une dame, qui le mena
presque à la porte des cuisines. Mais, tout en se cachant, il emportait un
plan tout fait ; dans quelques jours, Monsieur le Prince allait se retrouver
aux prises avec ce dangereux jouteur et avec ses propres amis. Le conspirateur eut bientôt dressé ses batteries. Il rallia la duchesse de Chevreuse, et sa fille, et Laigues, son favori, la Palatine et la Vieuville, et même ce misérable Châteauneuf, ambition tombée en enfance, qui ne pouvait se consoler de sa récente disgrâce, et, depuis quelques semaines, rampait devant les serviteurs de la reine pour redevenir quelque chose. Il en coûte d'ajouter que le premier président ne resta pas tout à fait étranger au complot, si l'on en juge par la part qui lui fut alors promise et qu'il a, en effet, recueillie au bout de quelques mois. Du concert de toutes ces avidités, il sortit un traité avec Mazarin, qui est bien la plus singulière, la plus impudente insulte à la probité politique et à la naïveté des honnêtes gens. Le coadjuteur se réservait, pour se bien maintenir dans la créance des peuples, de parler, au Parlement et ailleurs, contre le cardinal Mazarin, jusqu'à ce qu'il trouvât l'occasion favorable de se déclarer pour lui sans rien hasarder. Chevreuse, Châteauneuf et le coadjuteur feraient tous leurs efforts pour détacher le duc d'Orléans de Monsieur le Prince. Châteauneuf serait premier ministre, Molé garde des sceaux, la Vieuville surintendant des finances, moyennant 100.000 livres données au cardinal. Mazarin assurait au coadjuteur le chapeau et la charge de ministre d'État. Il donnait à Noirmoutiers les honneurs de duc, à Laigues 100.000 l., à son propre neveu, Mancini, le duché de Nevers et le gouvernement de Provence, et lui ferait épouser mademoiselle de Chevreuse. Le coadjuteur, Châteauneuf et Chevreuse s'engageaient à procurer le retour de Mazarin toutes et quantes fois qu'il se pourrait. La présente union était faite particulièrement contre Messieurs les Princes ; l'intérêt commun desdits sieurs cardinal Mazarin, Châteauneuf, coadjuteur et dame de Chevreuse, étant fondé sur la ruine de Monsieur le Prince ou du moins sur son éloignement de la cour[17]. L'effet de cette alliance ne se fit pas longtemps attendre. Au Parlement, le coadjuteur, en renchérissant sur les plaintes de Condé contre Mazarin, s'y forma un parti qui fut bien vite supérieur à celui de Monsieur le Prince. Au dehors, il le harcela, le fatigua par une guerre de libelles ; car ce genre de guerre, quoique ralenti, n'avait jamais cessé entièrement. On lisait, à ce moment, la Mazarinade, faussement attribuée à Scarron et fort sensible à Mazarin[18]. Condé avait à ses gages un misérable, capable de tout écrire, au profit ou au détriment de tous, Dubosc-Montandré, dont le nom, comme celui de certains êtres malfaisants, a droit à la flétrissure de l'histoire, et qui a, plus d'une fois, compromis son maitre par les doctrines horribles dont il lui infligeait la responsabilité, en les faisant servir à sa cause. Gondi avait également son faiseur, l'avocat Bluet ; mais, le plus souvent, il mettait lui-même la main à l'œuvre, et son style tout seul, dans bien des écrits anonymes, est une signature irrécusable. Il lança d'abord l'Apologie de l'ancienne et légitime Fronde, dont la lettre, dit-il franchement, paraissait être contre le Mazarin, et dont le sens était proprement contre ceux qui se servaient de ce nom pour abattre l'autorité royale. Cinquante colporteurs, appuyés de gens apostés pour cela, la débitèrent dans les rues. Condé voulut répondre. Alors ; on vit se croiser la Défense du coadjuteur, la Lettre du marguiller au curé, contre Gondi, la Lettre du curé au marguiller, pour Gondi, le Solitaire, etc., etc. Mais Condé fut le moins fort ; il se lassa le premier, il resta sous le coup des imputations les plus capables de lui ôter toute popularité. La rapidité du succès faillit même, un moment, le compromettre. Au milieu de ces attaques à haute voix, il se tramait tout bas, autour de la reine, de sinistres projets contre le prince ; on parlait de l'arrêter, même de le tuer. Gondi se défend d'avoir donné le conseil du meurtre, les confidents de la reine le lui imputent expressément ; mais, de quelque côté que la pensée en fût venue, le prince, averti par Lyonne, quitta brusquement Paris (6 juillet 1651). Sous prétexte d'hommes armés, qui rôdaient autour de son hôtel, et qui n'étaient qu'un renfort envoyé à des contrebandiers par un capitaine du régiment des gardes, il se retira à Saint-Maur, d'où il écrivit au Parlement pour dénoncer ses ennemis. Ce fut une brusque surprise, qui déconcerta ses adversaires. On n'osait pas encore l'assaillir de front ; on se résigna à composer. Pour le tirer de Saint-Maur, on parut lui accorder tout ce qu'il désirait. Le premier président parla de la nécessité de ne pas tourner contre la tranquillité publique la liberté que le Parlement avait fait rendre à Monsieur le Prince. La reine protesta de l'innocence de ses intentions, renouvela ses engagements contre Mazarin, et, comme dernière garantie, consentit à chasser de son conseil Letellier, Lyonne et Servien, que Monsieur le Prince ne voulait plus souffrir. C'était subordonner la reine aux volontés du prince. A ces conditions, il revint à Paris. Mais son triomphe fut court. Ses ennemis s'étaient donné le temps de mieux concerter le coup décisif ; ils l'attendaient à quelque nouvelle faute, qu'il ne tarda pas de commettre. Son arrogance s'était encore accrue. Il affectait de ne voir ni le roi, ni la reine, et un jour, comme par bravade, il les rencontra au Cours, ce qui fut blâmé de tout le monde. Il marchait dans Paris avec une suite plus grande et plus magnifique que celle du roi. Il réclamait du Parlement un arrêt en forme contre les ministres, dont il avait obtenu l'éloignement, comme si la décision de la reine ne suffisait pas. On sut bientôt qu'il négociait avec l'Espagne, qu'il rassemblait des troupes et de l'argent. On le vit envoyer sa femme et son fils au château de Montrond, pour les garantir par de hautes murailles contre les desseins de ses ennemis. Il y avait là assez de griefs pour constituer une accusation ; aussi, tout à coup (17 août 1651), le roi lança au Parlement, à la chambre des comptes, à la cour des aides et au corps de ville, une déclaration en forme contre ce sujet audacieux. C'était l'œuvre de plusieurs, remaniée selon les différents avis. Le premier président lui-même, y trouvant trop de vinaigre, y avait mis du sel, selon son expression. Rien n'y manquait de ce qui pouvait rendre l'accusé odieux : cupidité insatiable, sommes immenses reçues de la libéralité du roi, au détriment de l'entretien des armées ; accumulation de gouvernements et de villes entre ses mains, arrogance envers le roi, pratiques criminelles avec l'étranger, pillages exercés par ses troupes en Picardie et en Champagne. D'où il s'ensuivait que, sans un prompt remède, il devenait impossible de faire la paix avec les ennemis du dehors, et de réformer les abus dans un royaume agité par tant de pernicieux desseins et entreprises. Condé, furieux de cette dénonciation, écrivit à tous les parlements pour se justifier. Dans celui de Paris, il alla droit au coadjuteur et l'accusa d'être le principal auteur des poursuites dont il était l'objet. La reine se réjouit de voir en lutte ces deux hommes, qu'elle haïssait également et qu'elle espérait détruire l'un par l'autre. Le duc d'Orléans se promettait aussi un grand plaisir de leur chamaillerie ; mais le plaisir faillit tourner à la tragédie la plus sombre. Si la naissance du prince réunissait et retenait autour de lui un nombre encore respectable de gentilshommes et de serviteurs, le coadjuteur n'avait pas moins de satellites, gentilshommes, officiers de la garde bourgeoise, bons bourgeois, tous armés de pistolets et de poignards sous leurs manteaux ; la reine, au besoin, lui envoyait des chevau-légers et des gens d'armes. Les deux rivaux ne venaient plus au palais qu'avec ce cortège menaçant. Le 21 août, on put craindre un affreux massacre en plein Parlement. Gondi avait garni les buvettes d'hommes armés, pour prendre en flanc et par derrière le parti de Monsieur le Prince ; les armoires étaient remplies de grenades. La délibération commença par un dialogue violent. Condé s'étonnant qu'il y eût des gens assez hardis pour lui disputer le pavé, Gondi répliqua qu'il y avait des gens qui ne devaient quitter le pavé qu'au roi. Je vous le ferai bien quitter. — Cela ne sera pas aisé. Au milieu de ces bravades, on vint avertir les magistrats que, la grande salle étant pleine d'armes, il était impossible d'opiner en sûreté. Après quelques débats, les deux partis convinrent de renvoyer leurs troupes. Déjà le coadjuteur s'était élancé vers la grand'salle pour exécuter cette promesse, lorsqu'à sa vue les hommes de Condé tirèrent leurs épées, et les siens immédiatement dégainèrent avec fureur. Il prévit un combat à outrance s'il ne se hâtait de disparaître, et, pour s'effacer plus vite, il se rejeta sur le petit parquet des huissiers. Mais, à peine il en avait ouvert la porte, qu'elle retomba sur lui par une manœuvre de La Rochefoucauld, et, assujettie au moyen d'une barre de fer, le retint serré entre les deux battants. Exposé par le flanc aux coups de ses ennemis, et dans l'impuissance de se défendre comme de remuer, il appelait au secours sans être entendu ou écouté ; il commençait à désespérer de sa vie, quand le fils du premier président accourut enfin, retira la barre de fer et lui rendit la liberté. Rentré à sa place dans la grand'chambre, il dénonça cette violence tout à la fois comme un crime et une ingratitude ; c'était bien mal reconnaître, disait-il, la modération dont il avait voulu donner l'exemple en congédiant ses hommes d'armes. On ne lui répondit que par de nouvelles menaces ; Condé l'eût volontiers pris à la gorge, comme il l'avoua plus tard. La Rochefoucauld, lui montrant les poings, criait qu'il était prêt à l'étrangler avec Brissac, son ami. Alors Gondi, le regardant avec dédain : Mon ami La Franchise, lui dit-il, ne faites pas le méchant ; vous êtes poltron et moi je suis prêtre, le duel nous est défendu[19]. La plaisanterie mit fin à l'irritation. On se calma devant le sang-froid de Gondi ; on fit sortir les deux troupes sans combat et les magistrats purent se retirer sains et saufs. Mais une pareille séance avait dû apprendre à Condé à quel rude ennemi il avait affaire et comment il n'était plus le maure dans Paris. Cette attitude des partis fut, en effet, le coup de grâce pour Condé ; en démontrant son impuissance, elle amortit le zèle de ses partisans et confirma les espérances de ses adversaires. Après tant de bruit, l'affaire de la déclaration tomba en langueur. Le Parlement priait la reine de réconcilier la maison royale ; le duc d'Orléans, toujours incertain et lâche, proposait de déclarer que Monsieur le Prince n'était pas aussi coupable qu'on l'avait cru d'abord ; les magistrats conseillaient de satisfaire l'opinion publique par une nouvelle protestation contre Mazarin, et la reine leur laissait le soin de la rédiger. A la faveur de tous ces renvois, le 7 septembre arriva : c'était le second jour de la quatorzième année. du roi, le terme rigoureux auquel, selon l'interprétation la plus large de l'ordonnance de Charles V, commençait sa majorité. La reine se hâta d'en faire une fête au Parlement et dans les rues. Elle déposa ses pouvoirs de régente et annonça que son fils régnait par lui-même. La joie populaire, animée par le spectacle d'un brillant cortège et par les flots de vin qui coulaient des fontaines publiques, salua ce changement d'apparences comme une ère nouvelle, le gage d'un gouvernement plus stable désormais. Les cris de Vive le roi ! les décharges d'artillerie et les illuminations par toute la ville semblaient encourager la reine à tout espérer de l'opinion publique. Condé avait eu la maladresse de se donner un tort de plus ; il n'avait pas assisté à la cérémonie de la majorité, s'excusant sur le besoin de se tenir en garde contre les complots qui le menaçaient. Cet isolement volontaire fut puni sans délai. Il périra ou je périrai, dit la reine, en recevant les explications qu'il lui faisait transmettre, et aussitôt elle exécuta le traité conclu secrètement entre Mazarin et ses nouveaux auxiliaires. Châteauneuf fut rétabli au ministère, La Vieuville eut les finances, Molé eut les sceaux ; enfin, le coadjuteur fut présenté par le roi pour le chapeau de cardinal. Tout ce que Condé avait promis et n'avait pas tenu, tout ce qu'il avait refusé à ses anciens alliés et courtisans, leur arrivait enfin par la main du parti opposé. Voyant donc que les affaires se faisaient sans lui, malgré lui et contre lui, il écrivit au duc d'Orléans qu'il ne voulait plus rester à la cour, et il sortit de Paris pour commencer la guerre civile[20]. FIN DU TOME PREMIER |
[1] Il (le duc de Nemours) me manda que les princes avaient été transférés à Marcoussi avec tant de troupes qu'il n'avait pas jugé à propos de paraître. Je remerciai la noblesse et chacun se retira chez soi. Mais avant que de nous séparer je proposai de faire une union entre nous pour la liberté des princes ; ils y consentirent, et on en fit deux originaux séparés, signés de tout ce qu'il y avait de gentilshommes. Chanlost en garda l'un et moi l'autre. (Mémoires de Bussy.)
[2] Lettre circulaire de l'assemblée de la noblesse : La plus pressante de ces occasions, et la plus passionnée pour la noblesse, a été l'instance à faire pour la liberté de nos seigneurs les princes du sang, et comme ils l'ont heureusement reçue en ce temps-là, nous en étant conjouis avec eux, ils ont eu la bonté de nous dire que nos vœux n'y avaient pas peu contribué.
[3] Plaintes de la noblesse contre les partisans et les mange-peuples.
Le mérite esprit se retrouve dans le Tombeau du sens commun et le Dérèglement de l'État, deux pamphlets de Dubosc-Montandré, dirigés principalement contre le luxe des bourgeois, et la richesse des financiers, des femmes de rôtisseurs ou de simples marchands, des filles de bouchers ou des blanchisseuses. (V. plus bas, ch. XI, § II.)
[4] Remontrances au roi par Paumier.
[5] Remontrance du clergé, 25 avril 1654.
[6] Voltaire, Siècle de Louis XIV : Il est incontestable que l'Église de France est celle de toutes les Églises qui a le moins accumulé de richesses..... On dit que l'Église possède le tiers du royaume comme on dit au hasard qu'il y a un million d'habitants à Paris..... Ceux qui ont examiné cette affaire, avec des yeux aussi sévères qu'attentifs, n'ont pu porter les revenus de toute l'Église gallicane au delà de 90 millions. Ce n'est pas une somme exorbitante pour l'entretien de 90.000 personnes religieuses, et environ 160.000 ecclésiastiques..... Mais on se fait des idées vagues et des préjugés sur tout (ch. XXXV).
[7] Relation véritable de ce qui s'est passé ès environs de la ville de Reims et l'état déplorable du pays.
Extrait de quelques informations des violences et désordres commis par les troupes du général Rose dans le pays de Thiérache, diocèse de Laon, où elles ont été pendant l'hiver, et ont entièrement désolé le pays. — Du 30 avril 1651.
[8] Abelly, Vie de saint Vincent de Paul.
[9] Abelly, liv. II, ch. XI.
[10] La contradiction était si flagrante, qu'Omer Talon lui-même se croyait obligé de la reconnaître et s'efforçait de l'expliquer. En 1656, le but de la bulle d'Innocent X était moins d'établir un principe, que d'offenser le roi de France dans la personne des Barberins. L'homme du roi avait dû ne voir que cette intention et la combattre dans l'intérêt de la dignité royale. Mais, en 1654, il n'y avait plus à considérer que la valeur du principe ; et ce principe de la résidence à Rome était bon, parce qu'il fermait aux cardinaux l'entrée aux fonctions publiques dans les différents États. Cette exclusion se justifiait sans peine quand on savait que les cardinaux, prêtant serment de fidélité au pape, se croyaient plus redevables au pape qu'à leurs souverains, que les papes prétendaient être seuls juges de la conduite des cardinaux, et que Richelieu lui-même leur avait reconnu ce droit, enfin que les cardinaux, tels que Duperron, dans les assemblées françaises, se montraient contraires aux libertés de l'Église gallicane. — Omer Talon, Mémoires.
[11] Journal d'Olivier d'Ormesson.
[12] Mémoires du P. Berthod.
[13] Motteville. — Ce mot tout seul, de la part d'un témoin si discret, a une signification qu'il n'est pas besoin d'expliquer.
[14] Il y a, dans Mathieu Molé, de singulières oppositions. Ici on ne voit que l'ambitieux mécontent, et madame de Motteville a raison de dire de lui : Les hommes les plus sages cessent de l'être quand il s'agit de leurs intérêts, voilà la source de toutes les fautes de ce sage magistrat. Sa prétention l'avait rendu trop partial du prince de Condé, et l'avait fait souvent manquer à son devoir ; mais les dégoûts qu'il eut de ce prince le rendirent plus fidèle. Ailleurs, il montre un désintéressement qu'on ne peut qu'admirer. Après le 2 avril, quand la reine lui redemande les sceaux que les princes ne veulent pas lui laisser, il se comporte avec une dignité que madame de Motteville et Omer Talon honorent également : Il rendit à l'instant les clefs des sceaux. La reine lui offrant la nomination au cardinalat, il la refusa ; elle lui offrit de faire créer une cinquième charge de secrétaire d'État pour Champlâtreux, son fils, il la remercia fort généreusement ; elle voulut lui donner la survivance de sa charge pour ce même fils, il dit que son fils n'avait pas assez servi pour mériter un honneur de cette qualité ; même on voulut lui donner 400.000 écus qu'il refusa. Le temps fera connaître s'il les acceptera ou non. Omer Talon, Mémoires.
[15] Mémoires de Retz.
[16] C'est Retz lui-même qui, un peu plus loin, dans ses Mémoires, donne à entendre que, sur une parole de madame de Chevreuse, il eut cette pensée libertine.
[17] L'authenticité de ce traité est incontestable. Lesdits articles furent trouvés sur le chemin de Cologne dans un paquet appartenant au marquis de Noirmoutiers. Les princes les firent imprimer au moment de la majorité.
[18] La Mazarinade, recueil de saletés et de mauvais vers, a eu un tel retentissement, qu'elle a donné son nom à tous les écrits du même genre qui l'avaient précédée ou qui l'ont suivie. — Mazarin s'en vengea en faisant retirer à Scarron une pension de 1.500 livres ; cependant il est prouvé que Scarron n'en était pas l'auteur.
[19] Madame de Motteville écrit : Nous ne nous ferons pas grand mal. Nous avons préféré la version de Retz qui nous parait plus heureuse et plus conforme à son style et à son caractère. — Il est remarquable que La Rochefoucauld, dans ses Mémoires, ne parle pas de cette riposte devant laquelle il resta muet.
La Franchise était un petit nom de guerre que les amis de La Rochefoucauld lui avaient donné pendant la guerre de Paris.
[20] Nous renvoyons encore une fois pour l'ensemble de ce paragraphe aux Mémoires déjà cités, et, entre autres pièces officielles, à la déclaration du roi contre Condé, et à la déclaration du Parlement contre Mazarin, d'autant plus faciles à trouver, l'une et l'autre, qu'elles sont rapportées textuellement dans les Mémoires de Motteville et de Retz.