LES TRANSFORMATIONS DE LA ROYAUTÉ PENDANT L'ÉPOQUE CAROLINGIENNE

LIVRE IV. — [LE TRIOMPHE DE LA FÉODALITÉ]

 

CHAPITRE VI. — COMMENT LES ROIS PERDIRENT L'AUTORITÉ SUR LEURS FIDÈLES.

 

 

Les descendants de Charlemagne continuèrent à régner en France pendant un siècle et demi. Si l'on s'en rapporte aux circulaires qu'ils rédigeaient et aux formules de leur chancellerie, il semble qu'ils fussent de véritables monarques.

[Ils se donnaient les titres les plus solennels et se qualifiaient des épithètes les plus pompeuses[1].] Ils ne parlaient de leur royauté que comme d'un pouvoir indépendant et suprême. Si, au contraire, on regarde leur conduite et celle des hommes à leur égard, si l'on observe par quels moyens ils commandaient et de quelle façon ils étaient obéis, on s'aperçoit qu'ils étaient plutôt des chefs de fidèles que des monarques.

On ne les voit jamais réunir une armée qui se compose d'autres hommes que des fidèles qui ont bien voulu les suivre. On ne les voit pas faire une loi qui s'applique à une nation. Us portent encore le titre de roi, parfois même celui d'empereur ; mais on peut remarquer dans les actes que l'usage prévaut de plus en plus de lés appeler du nom de seigneurs[2]. Nous voyons de même dans les faits que ces princes s'appliquent uniquement à s'attacher des fidèles. Obtenir des hommes le serment de foi et les déterminer à respecter ce serment, telle est leur grande préoccupation et le fond de leur politique. La royauté se confond de plus en plus avec le séniorat, et la sujétion avec la fidélité.

Il semble à première vue qu'un pouvoir qui était fondé sur le contrai de foi dût être singulièrement solide. On croirait que l'homme qui avait prêté serment, qui avait engagé non seulement ses bras, mais sa conscience et sa volonté même, qui avait fait l'abandon complet de sa personne, qui s'était déclaré l'homme de son chef et son serviteur à fout jamais, qui recevait d'ailleurs pour cela un beau domaine, la richesse, les honneurs, on croirait, disons-nous, qu'un tel homme dût être un sujet docile et ne pût songer qu'à obéir. Les choses humaines ne se règlent pas suivant celle logique. De même que des régimes où la liberté est le plus hautement proclamée sont quelquefois ceux où l'homme est le moins libre, de même il peut arriver que ceux où l'obéissance est le plus rigoureusement imposée soient pourtant ceux où l'on obéisse le moins. Tout principe, dès qu'il est poussé à l'extrême, se heurte à un ensemble de sentiments et d'intérêts humains qui sont plus forts que lui et qui lui font produire le contraire de ce qu'il annonçait.

Les fidèles[3] étaient les hommes sur qui l'on pouvait le moins compter. Tour à tour très dévoués et très exigeants, ils passaient de l'extrême docilité à l'extrême insubordination. Il y avait à cela deux motifs.

L'un était que chacun de ces hommes se trouvait puissant par soi-même. Il n'est pas naturel que l'homme qui se sent fort se résigne à obéir. Celui qui se voit entouré de serviteurs nombreux est difficilement un serviteur ; au moins ne l'est-il qu'autant qu'il veut bien l'être. Un monarque règne plus aisément sur des millions d'individus égaux entre eux et également faibles que sur quelques centaines de chefs dont chacun est semblable à lui.

L'autre motif était que, dans ce régime de la fidélité, les intérêts de l'inférieur étaient trop dans la main du supérieur. C'est une erreur assez commune aux gouvernements de croire que, plus ils ont à donner, plus ils tiennent les hommes par l'intérêt, et plus ils peuvent compter sur leur soumission. On s'expose beaucoup, au contraire, quand on se fait le centre de tous les désirs, de toutes les ambitions, de toutes les convoitises.il es : bien vrai que les fidèles tenaient du prince leurs bénéfices et leurs dignités, l'aisance et l'éclat de leur vie ; ils ne vivaient en effet que par lui ; ils étaient, suivant l'énergique expression de cette époque, ses nourris. Mais, par cela même, ils avaient toujours à redouter d'être dépossédés par lui ; ils sentaient que sur un signe de sa volonté ils seraient rejetés dans le néant. Ils avaient donc les yeux toujours attachés sur ce chef dont ils pouvaient tout espérer et tout craindre. L'unique occupation de leur vie consistait en deux choses : recevoir de lui, et l'empêcher de reprendre. Leur possession, leur richesse, leur bonheur présent ei leur espoir pour l'avenir, tout était dans sa main ; ce n'était pas une raison pour se dévouer toujours à lui, mais c'en était une pour se défier toujours de lui. La révocabilité des bénéfices, loin d'être une force pour le pouvoir, le mettait dans un perpétuel conflit et avec ceux qui voulaient les obtenir et avec ceux qui craignaient de les perdre. Sous une apparence d'universel dévouement, c'était une lutte universelle.

Il faut se représenter la royauté carolingienne comme un immense domaine dont le roi était le propriétaire et dont les fidèles se partageaient le revenu. Se figure-t-on qu'ils dussent permettre au prince de gérer à sa guise ce qu'ils regardaient comme leur bien commun ? Comment ne se seraient-ils pas attribué le droit de surveiller et de diriger la gestion de ce qui semblait à eux ? L'État était le composé de leurs terres, de leurs offices, de leurs dignités, de tous leurs intérêts. Ils étaient eux-mêmes l'Etat. Comment n'auraient-ils pas prétendu, sous le nom du roi, gouverner eux-mêmes ? Pouvaient-ils souffrir que ce roi eût d'autres intérêts et d'autres volontés que les leurs ?

De tout temps il avait été indispensable de consulter les fidèles. Quand Pépin le Bref avait voulu faire une expédition en Italie, il leur avait demandé leur opinion, et plusieurs d'entre eux s'étaient opposés à sa volonté jusqu'à dire tout haut que, s'il y persistait, ils l'abandonneraient, et retourneraient chez eux[4]. Plus tard, Charlemagne n'osait passer les Alpes qu'avec l'assentiment exprès de ses fidèles[5].

Les faits de cette nature sont innombrables. Il ne faut les attribuer ni à de vieux usages germaniques dont personne ne se souvenait, ni à un généreux amour pour la liberté politique dont personne n'avait plus alors la notion. Ce qui est vrai, c'est que, les fidèles étant liés au roi par tous leurs intérêts, tout acte du roi les, touchait trop sensiblement pour qu'il fût possible de ne pas prendre leur avis. Ce n'était pas au nom de l'intérêt public, mais du leur, qu'ils étaient consultés. S'agissait-il d'une guerre, outre que c'étaient eux qui en supportaient les frais, il était avéré que le succès augmenterait le capital commun des fidèles et que le revers le diminuerait ; l'association avait donc le droit de décider si elle voulait ou ne voulait pas cette guerre.

Charles le Chauve[6] fut un chef de fidèles à qui les fidèles firent la loi. Il ne put gouverner que comme ils prétendirent qu'il gouvernât. Autant ils auraient dû dépendre de lui à cause de leur serment, autant il dépendit d'eux à cause de leurs intérêts. Il se forma une ligue de tous les bénéficiaires contre le grand propriétaire des terres bénéficiales, de tous les fonctionnaires contre le distributeur des fonctions, de tous les serviteurs contre le maître. Cette lutte n'avait rien de national et le fond de la population y était étrangère. Elle ne portait pas non plus sur des principes : elle avait pour unique objet l'intérêt matériel et personnel de chacun des membres du vasselage royal.

On voit dans un capitulaire de 844 qu'après le partage fait à Verdun et la réconciliation des trois frères, Charles le Chauve eut des conflits à soutenir dans son propre royaume[7]. Ce n'était pas chose facile, en effet, de faire la répartition de ce lot que le traité lui avait donné, de distribuer les comtés, les prélatures, les bénéfices, d'indemniser ceux des fidèles qui perdaient leurs possessions situées dans le lot des deux autres frères, de récompenser les fidèles étrangers sans léser ceux du pays, de respecter les droits acquis et de tenir en même temps toutes les promesses qu'on avait faites. Il y eut des mécontentements, même des troubles. Les fidèles se coalisèrent ; prélats et guerriers se réunirent en un conventus[8] ; après de longues conférences, ils rédigèrent une sorte de charte et obligèrent le roi à la signer[9].

Dans cette charte de 844, dont le texte nous est parvenu, le roi ne traite pas avec une nation, il traite avec des fidèles, c'est-à-dire avec des évêques, des comtes, des bénéficiaires de tout rang[10]. L'autorité royale y est formellement reconnue (art. 2) ; mais en échange le roi s'engage à laisser les fidèles en possession de leurs bénéfices et de leurs dignités (art. 5). Il ajoute que les fidèles auront un droit de contrôle sur tous ses actes : Vous veillerez tous, dit-il, à ce que nul ne nous suggère d'agir contre la justice et la raison ; si quelque mesure mauvaise a été obtenue de .nous par surprise ou par suite de la faiblesse humaine, votre fidèle dévouement nous avertira, afin que nous la corrigions (art. 4 et 5). Autrefois il avait été de règle que le seigneur fût un juge pour ses fidèles ; ici, Charles le Chauve écrit que si un de ses fidèles vient à violer la convention faite, il sera jugé par tous les autres. Le roi renonce à son droit de justice sur eux[11].

Le groupe des fidèles se partageait en ecclésiastiques et en laïques. Les prélats n'étaient pas plus portés à l'obéissance que les guerriers. En 844, les évêques réunis à Thionville dressèrent un acte où ils reprochaient au roi d'avoir fait une mauvaise distribution des biens des églises et de les avoir concédés à des laïques[12]. La réclamation était légitime, à ne la regarder que du côté de la religion ; mais elle touchait en même temps à l'une des règles du patronage. C'était en effet comme patrons des églises et des abbayes que Charles Martel, Pépin le Bref, Charlemagne et Louis le Pieux avaient eu le droit de distribuer les biens ecclésiastiques à titre de bénéfices et sous la charge d'une redevance envers ces églises et ces abbayes[13]. C'est à ce prix que, suivant les usages et la manière de penser de ce temps là, les églises avaient obtenu la mainbour des puissants princes d'Austrasie. Sous Charles le Chauve, elles se dégagèrent de cette obligation et, en conservant les profits du patronage royal, repoussèrent ce qui en était la compensation[14]. Cet ancien patronage avait eu pour effet de leur enlever dans une certaine mesure le domaine éminent de leurs terres ; elles voulurent le reprendre, faisant ainsi l'analogue de ce que les guerriers faisaient pour leurs bénéfices.

A l'égard de ceux-ci la royauté était de plus en plus faible. En vain essayait-elle (le tenir ferme contre eux : en 847, Charles le Chauve promit de ne jamais se conduire vis-à-vis de ses fidèles contrairement à la raison[15]. En 851, il s'exprimait ainsi : Nous voulons que tous nos fidèles soient bien assurés qu'à l'avenir nous ne condamnerons aucun d'eux et ne le priverons de ses bénéfices et dignités que suivant la loi et la justice, et nous nous conformerons aux avis qu'ils nous donneront en commun[16].

En 856, une partie des fidèles de Charles l'avait abandonné ; l'autre ne lui resta attachée qu'en lui imposant des conditions[17]. Nous n'avons plus le texte du pacte qui fui alors conclu, mais nous pouvons le deviner d'après un manifeste public que les partisans du roi, qui venaient de le rédiger, adressèrent à l'autre parti. Sachez, y disaient-ils, que le roi Charles s'est uni à nous, ses fidèles, à telle condition que, s'il lui arrivait d'enfreindre en quelque point le pacte qui nous lie, nous l'avertirions respectueusement de s'amender et de maintenir chacun de nous dans son droit et dans son rang. S'il s'y refusait, sachez encore que nous sommes unis tons ensemble entre nous si étroitement, du consentement même et de l'aveu du roi, que chacun de nous s'est engagé à ne jamais abandonner son pair et son associé, afin que notre roi ne puisse rien faire à aucun de nous contre la loi et la raison, quand même il le voudrait, ce qu'à/Dieu ne plaise[18]. Ils adjuraient ensuite les grands du parti adverse de se réunir à eux et de souscrire à la même convention : Rentrez, disaient-ils, dans la fidélité et sous le séniorat du roi Charles ; il promet de maintenir chacun de vous, ainsi que chacun de nous, en possession de tous ses droits ; joignez vos efforts aux nôtres, afin que nous fondions en commun les statuts qui conviennent le mieux à notre association ; le roi a convoqué pour le 24.juillet dans son palais de Verberie tous ses fidèles pour confirmer devant Dieu nos conventions, qui seront conservées à jamais entre ses successeurs et les nôtres[19].

Ainsi la royauté signait une nouvelle charte. Il est digne d'attention que cette charte lui était dictée non par une nation, mais par ses fidèles eux-mêmes[20]. Les Carolingiens n'ont jamais eu contre eux une nation ; leurs seuls adversaires ont été leurs fidèles.

A l'origine, le patronage ou séniorat n'avait donné lieu qu'à un seul serment : le fidèle s'engageait, le seigneur n'avait pas à s'engager. Les relations s'étaient tellement modifiées, qu'en 858 nous trouvons dans les Capitulaires le texte d'un double serment qui était prêté par le roi aussi bien que par les fidèles. Les fidèles disaient : Suivant mon pouvoir, avec l'aide de Dieu, sans fraude ni surprise, je vous serai fidèle et vous aiderai de conseil et de secours afin que vous conserviez la couronne royale que Dieu vous a donnée et que vous puissiez gouverner suivant la volonté de Dieu et l'intérêt de vos fidèles. Le roi répondait : Et moi, suivant mon pouvoir, avec l'aide de Dieu, je promets à chacun de vous bénéfices et protection, sans dol ni injustice, et je maintiendrai à chacun son droit, ainsi qu'un roi fidèle doit assurer à ses fidèles bénéfices, protection et droits ; si, par fragilité humaine, je m'écarte de ce que je dois, j'aurai soin de m'en amender[21]. Ainsi l'engagement était réciproque, et la fidélité devenait, contrairement aux anciens principes, un contrat systématique.

Ce qui était peut-être encore plus grave, c'est que le roi renonçait à distribuer lui-même les bénéfices et les honneurs qui étaient le prix de la fidélité. On remarque en effet dans les actes de Charles le Chauve deux déclarations qui se répètent fréquemment : l'une est qu'il ne reprendra les bénéfices d'un homme que de l'aveu et par le jugement des autres fidèles ; l'autre est qu'il ne donnera ces mêmes bénéfices que par le conseil des fidèles[22]. Ceux-ci forment donc entre eux une véritable association, qui administre elle-même le bien commun.

C'est ainsi que les rois perdirent la libre disposition de leurs domaines[23]. Ces terres bénéficiales étaient, en théorie, toujours révocables et la jouissance n'en était que viagère. Mais les rois ne pouvaient les reprendre que par le jugement des bénéficiaires eux-mêmes, ai les conférer à de nouveaux possesseurs qu'avec l'agrément du corps tout entier. Il arriva naturellement que ce corps s'entendit pour que les familles qui le composaient fussent maintenues dans la possession de ces terres. La jouissance bénéficia le passa ordinairement du père au fils. Il est vrai que le fils devait obtenir du roi le renouvellement de la concession ; mais le roi ne pouvait plus la refuser. Ce roi restait le propriétaire éminent d'un immense domaine ; mais il n'avait le droit ni d'en jouir, ni de choisir ceux qui en jouissaient. Tous les usufruitiers de ce domaine restaient, en théorie, ses fidèles ; mais ils étaient indépendants de lui.

Dès lors la fidélité, tout en restant théoriquement un principe d'obéissance et de discipline, ne procure presque plus d'obéissance effective, du moins en France, et pour les descendants de Charlemagne. La féodalité n'est plus un moyen suffisant de gouvernement. Le lien qui paraissait le plus fort se rompt ; l'obéissance disparaît chez ceux-là surtout qui semblaient le plus voués à l'obéissance. Les Carolingiens =ont des rois sans sujets et toute leur force s'évanouit.

 

 

 



[1] Capitulaire de 876 ; Walter, t. III, p. 189 [Pertz, p. 528]. — Baluze, t. II, p. 1500.

[2] Walter, t. III, p. 37, et alias passim. — Capitulaire de 858, Walter, p. 67 [Pertz, p. 449]. — En 897, les partisans de Charles le Simple expliquent leur fidélité en disant quod senior eorum filius esset sui quondam senioris. Annales de Saint-Waast, édit. Dehaisnes, p. 554.

[3] [On entend ici fidèles dans le sens étroit du mot : on a vu qu'à partir 'lu règne de Louis le Pieux il tend à remplacer le terme de grands ou d'optimates. Dans son sens large les fidèles désignaient aussi tous les sujets du roi.]

[4] Éginhard, Vita Caroli, 6.

[5] Réginon, Chronicon, année 775). — Il en était de même pour les lois (2e capitulaire de 819, c. 9, [Borétius, p. 297]).

[6] [Ce n'est pas à dire qu'il ait toujours été le roi faible et impuissant que la légende nous représente. Il a dû souvent plier, surtout dans les premières années de son règne. Mais il s'est souvent aussi relevé ; il a pu parfois reprendre avec vigueur les traditions de Charlemagne, et n'a jamais oublié même dans les dernières années de sa vie que les comtes n'étaient que ses agents, et que de la royauté seule émanait toute loi et dérivait tout pouvoir. Il leur a toujours parlé en maître quand bien même il leur ait parlé conformément à leur désir. Les deux célèbres édits de Pistes et de Kiersy en 864 et 877 montrent en particulier qu'il a toujours eu la conscience des droits de la royauté alors même que la force lui ait manqué pour les faire valoir. Voir Nouvelles Recherches, p. 440 et suiv.]

[7] Capitulaire de 844, Præfatio.

[8] Capitulaire de 844, Præfatio.

[9] Capitulaire de 844, Præfatio. — Art. 4.

[10] Baluze, t. II, p. 2 [Pertz, p. 576]. Dans cet acte, Charles le Chauve parle en son propre nom, suivant un usage constant que nous retrouverons en France comme en Angleterre pendant tout le moyen âge ; mais il ressort bien de l'ensemble de cet acte qu'il a été imposé au roi. Charles le Chauve ne s'adresse pas à la nation, mais aux fidèles (voir art. 4).

[11] Art. 6. — Les mots pontiftcalis auctoritas désignent les fidèles de l'ordre ecclésiastique, les évêques ; magnanimitas désigne les grands de l'ordre laïc ; le terme maqnanimitas est celui qui était officiellement employé à l'égard des comtes.

[12] L'Acte du synode de Thionville est dans Walter, Corpus juris germanici, p. 6-8 [et dans Krause, p. 112]. On y peut remarquer le ton hautain que prennent les prélats : Dieu est le seul roi, disent-ils, et il a voulu que son Église fut gouvernée par l'autorité épiscopale et la puissance royale.

[13] [Cf. plus haut. liv. III, c. 14.]

[14] On peut faire cette remarque en lisant les Capitulaires que les ecclésiastiques, qui auraient dû, suivant la coutume du patronage, s'appeler les fidèles du roi, prirent l'habitude, à partir de Louis le Pieux, de s'appeler les fidèles de Dieu.

[15] Capitulaire de 847, apud Walter, t. III, p. 55 (Pertz, p. 395, art. 4].

[16] Capitulaire de 851, art. 6. Le sens du mot dehonorare est priver de l’honor ; or on sait que dans la langue de cette époque honor se disait d'un bénéfice. — Cf. Annales de Saint-Bertin, édit. Dehaisnes, p. 75-76.

[17] Voir dans Walter, t. III, p. 65 [Pertz, p. 445].

[18] Art. 10 ; Walter, p. 64 [Pertz, p. 446].

[19] Art. 11, 12.

[20] C'est ce qui ressort de presque chaque ligne de cette singulière lettre ; les hommes qui l'écrivent se qualifient de fidèles ; ils appellent Charles le Chauve senior noster. Ceux h qui ils s'adressent sont aussi des fidèles qui se plaignent de n'avoir pas été assez payés de leur service (art. 6) et qui songent à se donner h un autre seigneur (art. 15). Il est si vrai que ces hommes ne sont que des fidèles ; ils ont été les nourris de Louis le Pieux et de Charles (Walter, p. 66 [Pertz, p. 448]). voir une autre lettre (ibidem, p. 67 [Pertz, p. 449]). — Il n'était d'ailleurs question en tout cela que de terres et de dignités à distribuer, de convoitises à assouvir. Ces mêmes fidèles de Neustrie et d'Aquitaine, un moment réconciliés par la charte de 856, abandonnèrent de nouveau Charles le Chauve en 858 et appelèrent Louis le Germanique, tant l'esprit de nationalité existait peu.

[21] Walter, Corpus juris germanici, t. III, p. 78 [Pertz, p. 457].

[22] Voir notamment Walter, p. 62, 63. 209.

[23] Il faut ajouter que beaucoup de terres furent données par les rois en alleu, c'est-à-dire en pleine propriété (Thégan, c. 19). — Voir sur ci point les Formules, édit. de Rozière, n° 141 et 142. — Beaucoup d'autres terres étaient usurpées par les détenteurs et transformées en propriétés allodiales (voir capitulaire de 846, art. 20, dans Walter. t. III, p. 23 [Pertz, p. 589]).