LES TRANSFORMATIONS DE LA ROYAUTÉ PENDANT L'ÉPOQUE CAROLINGIENNE

LIVRE III. — [LES INSTITUTIONS MONARCHIQUES SOUS LE GOUVERNEMENT DES CAROLINGIENS]

 

CHAPITRE IX. — LES ASSEMBLÉES GÉNÉRALES.

 

 

[À côté du conseil se trouve l'assemblée générale, conventus generalis, dont il est un élément.] Le conseil nous apparaît souvent en dehors du conventus ; mais chaque fois qu'il y a un conventus, il y a en même temps un conseil.

L'étude des assemblées générales est difficile. Cela ne tient pas à ce que les documents fassent défaut. Ils sont au contraire très nombreux. La tenue des assemblées est ce que les annalistes ont noté avec le plus de soin. Dans cet espace de cent vingt années qui va de Pépin le Bref à la fin de .Charles le Chauve, nous connaissons environ cent vingt-cinq assemblées, mentionnées par des écrits contemporains avec l'indication, sinon de tout ce qui s'est fait, du moins de la principale chose qui s'est faite dans chacune d'elles. Si la cause de la difficulté n'est pas dans l'absence de documents, elle est plutôt dans la manière dont l'esprit moderne les a observés. Habitué que l'on est aujourd'hui à vivre au milieu d'institutions bien déterminées et bien précises, on croit volontiers que l'on trouvera le même caractère dans les institutions du IXe siècle. Mais il s'en faut beaucoup que l'assemblée générale de cette époque fût une institution rigoureusement définie.

Nous devons remarquer tout d'abord qu'il n'existait pas dans la langue un terme spécial pour la désigner. On la désignait par trois termes, appartenant tous !es trois à la langue latine : conventus, placitum, synodus. Les trois mots étaient employés indifféremment, comme synonymes. Tous les trois étaient par eux-mêmes des termes vagues ; car ils s'appliquaient à toute espèce de réunion, grande ou petite, quel qu'en fût l'objet, et nous les trouvons maintes fois appliqués, en effet, à des réunions qui ne ressemblaient en rien à des assemblées générales. Quant à un terme officiel qui existât dans la langue pour les désigner, nous le chercherions en vain. Il ne s'en rencontre aucun, ni dans la langue latine ni dans la langue germanique. Les rois eux-mêmes, dans leurs actes législatifs, employaient l'un ou l'autre des trois termes que nous venons de voir.

Ainsi l'assemblée générale n'avait pas un nom précis et certain d'où nous pourrions tirer quelque lumière sur sa nature. Pour nous en faire une idée exacte, nous devrons passer en revue tous les textes où il est parlé d'elle. Nous devrons surtout observer attentivement ce qu'on nous dit qu'il s'est fait dans chacune de ces assemblées. Mais quand on fait ce travail, on s'aperçoit d'une très grande diversité. Non seulement la nature et la composition de l'assemblée se modifient de règne en règne ; mais encore, dans le même règne et quelquefois dans la même année, deux assemblées peuvent différer. entièrement par leur nature et par leur objet. C'est que l'institution des assemblées générales était une institution très variable, très flottante, et surtout très complexe.

Dans le conventus generalis de l'époque carolingienne, il y avait trois choses fort distinctes : une convocation militaire, une assemblée judiciaire, et une réunion politique. Nous étudierons ces trois choses l'une après l'autre.

 

1° LE PLAID DE 6UERRE AU CHAMP DE MARS.

 

Je commence au règne de Pépin et je prends la première assemblée générale de ce règne. La Chronique contemporaine dit qu'en 754, après avoir vu le pape lui demander de faire la guerre contre les Lombards, aux calendes de mars[1], le roi Pépin ordonna à tous les Francs, suivant la règle du pays, de venir vers lui à sa villa royale de Braisne ; là, après qu'il eut pris conseil avec ses grands, au moment de l'année où les rois ont l'habitude de marcher à la guerre, l'armée des Francs et de tous les peuples soumis s'avança contre le pays des Lombards. — Analysons ce passage : 1° il y a avant toutes choses un ordre du roi, præcepit ; 2° l'objet de cet ordre est de se rendre auprès du roi, ventre ad se, et le lieu de rendez-vous est une maison royale ; 3° l'ordre s'adresse à tous les Francs, omnes Francos, c'est-à-dire, suivant les usages de la langue du temps, à tous les hommes libres de l'État franc ; il y faut ajouter, ainsi qu'il est dit à la ligne suivante, les hommes des peuples soumis, c'est-à-dire les Bavarois, les Alamans, les Frisons, et peut-être les Aquitains ; 4° tous ces hommes arrivés au rendez-vous fixé, le roi tient un conseil, non avec tous ces hommes, mais avec ses grands, c'est-à-dire avec ses conseillers seuls ; 5° il donne l'ordre de marcher en Lombardie, et l'armée se met aussitôt en marche. De tout cela il résulte nettement qu'il y a eu au printemps de 754 une réunion générale, mais que cette réunion n'était pas autre chose qu'une armée. On remarquera que le chroniqueur dit dans la première partie de sa phrase omnes Francos, et dans la seconde Francorum agmina, désignant les mêmes hommes par ces deux expressions. — Un autre chroniqueur s'exprime un peu autrement : Le roi Pépin tint le placitum aux calendes de mars suivant l'usage dans la villa royale de Braisne, et, ayant délibéré avec les grands, il décida qu'il marcherait en Italie[2]. Les traits essentiels du premier récit se retrouvent ici. Ce que l'un appelait omnes Francos est appelé par l'autre placitum ; le roi ne délibère qu'avec les grands ; et quand le roi a pris sa décision, l'armée se porte vers l'Italie. Le placitum, n'a pas été autre chose, cette année-là, qu'un rendez-vous des soldats de tout le royaume. Ces hommes ne se sont réunis que pour recevoir du roi un ordre de guerre.

En 761, le chroniqueur signale le placitum deux fois à peu d'intervalle. Il dit d'une part : Le roi, ayant décrété le placitum, ordonna à tous les grands de l'État franc de venir à lui à Duren au Champ de Mai, pour traiter du bien du pays et des intérêts des Francs[3]. Il est visible que, dans ce premier passage, le chroniqueur ne décrit pas une réunion militaire. Il s'agit d'une de ces assemblées au caractère politique que nous étudierons plus tard. Il ne s'y trouve d'ailleurs que tous les grands. — Mais ensuite le chroniqueur ajoute que, sur la nouvelle d'une prise d'armes de l'Aquitain Waïfer, le roi irrité, décrétant un autre placitum, ordonna à tous les Francs de se rendre en tenue de guerre sur la Loire, et, l'armée se mettant en mouvement, le roi passa par Troyes, Auxerre, Nevers, franchit la Loire et vint mettre le siège devant le château de Bourbon[4]. — Il y eut donc cette année, à la distance de quelques semaines, deux assemblées, l'une des grands à Duren pour délibérer sur des intérêts généraux, l'autre de tous sur la Loire pour faire la guerre. Le chroniqueur les appelle toutes les deux du nom de placitum ; elles ne se ressemblèrent pourtant en rien[5].

Voici en 767 une réunion que le chroniqueur appelle un Champ de Mai, campus madius[6]. Ayant ordonné une levée générale des Francs[7], il vint par Troyes et Auxerre jusqu'à Bourges ; c'est là que se tint par son ordre le Champ de Mai accoutumé ; il y tint conseil avec ses grands ; il y décida que la reine resterait avec une partie des comtes à Bourges, et lui-même avec tout le reste des Francs marcha contre Waïfer[8]. — On voit que ce Champ de Mai n'est pas autre chose qu'une année. Nous [verrons plus loin] que dans l'Etat franc il n'y avait pas d'armée permanente ; chaque fois qu'il y avait guerre, ou seulement prévision de guerre, le roi envoyait dans toutes les provinces l'ordre de la levée générale ; et tous les hommes libres et propriétaires de quelque bien devaient se rendre en armes au lieu fixé par le roi. Quand le chroniqueur dit que le roi ordonne que le Champ de Mai se tienne à Bourges, c'est comme s'il disait que, cette année, Bourges est le lieu fixé par le roi pour la réunion de tous les soldats. Le Champ de Mai n'a été, ici du moins, qu'un rendez-vous militaire. Aussi voyons-nous que cette armée ne délibère sur rien ; le roi ne prend conseil que de ses grands, et sur son ordre l'armée se met en marche[9].

Si nous passons au règne de Charlemagne, nous j trouvons plusieurs assemblées qui ont le même caractère. En 773, nous voyons le roi tenir à Genève ce que les annalistes appellent la réunion générale des Francs[10]. — Mais il ne s'agit nullement ici d'une assemblée délibérante ; ce qui se réunit, c'est une armée. En effet, quelques jours auparavant, le roi avait tenu conseil avec ses grands à Thionville et avait résolu de porter la guerre en Lombardie[11]. Il avait donc indiqué Genève, au pied des Alpes, comme le rendez-vous général des soldats, et il s'y était rendu lui-même. La preuve qu'il ne s'agissait ici que d'une réunion militaire, c'est que, suivant tous les annalistes, il n'y fit pas autre chose que de partager cette armée en deux corps, et de leur ordonner de franchir les Alpes à la fois par le mont Cenis et par le Saint-Bernard[12]. Lorsque Éginhard écrit, à l'année 775 : Le roi résolut de porter la guerre en Saxe, et, la réunion générale ayant eu lieu à Duren, il traversa le Rhin, avec toutes les forces du royaume[13], on reconnaît bien que cette réunion générale, conventus generalis, n'est pas autre chose que la réunion de l'armée. Observez la phrase de l'historien, et vous remarquez que conventu generali désigne la même chose que totis regni viribus. La réunion est qualifiée generalis, parce qu'elle comprend les soldats de toutes les provinces de l'État, et c'est pourquoi à la ligne suivante l'historien dit toutes les forces du royaume[14].

En 777, la guerre recommence en Saxe ; aussi est-ce en Saxe que le lieu de la réunion générale est fixé cette année-là. Le roi, dit Éginhard[15], voyant qu'il ne pouvait pas se fier aux promesses des Saxons, partit (de Nimègue) pour aller tenir la réunion générale de son peuple au lieu appelé Paderborn et avec une grande armée se porta sur la Saxe. — Dans ce curieux passage deux choses sont à noter. L'une est que Paderborn, qui n'était pas encore une ville[16], se trouvait alors en dehors de l'État franc, en pleine Saxe, c'est-à-dire en pays ennemi ; ce n'est pas là qu'il eût été naturel de convoquer une assemblée politique. L'autre est que, dans cette même phrase de l'annaliste, le conventus et l’exercitus sont visiblement la même chose ; puisqu'il n'existe pas à cette époque d'armée permanente, l'armée qui entre en Saxe ne peut pas être autre chose que la multitude qui vient se réunir auprès de Charlemagne. L'annaliste a écrit : La réunion générale de son peuple, generalem populi sui conventum. Or, quand on est familier avec la langue de ce temps, on sait que populus se dit souvent d'une armée[17]. Comme il n'y avait pas d'armée distincte de la population, comme l'armée n'était que la réunion des hommes libres appelés par le roi, il était naturel que les hommes confondissent dans leur langue lé peuple et l'armée[18].

Deux de nos Annales appellent cette même réunion générale de 777 du nom de Champ de Mai[19]. — Ce terme, qui avait remplacé celui de Champ de Mars[20], exprimait l'idée d'une armée qui se groupe avant de faire campagne. Il faut remarquer, en effet, que, toutes les fois que les annalistes emploient cette expression campus maii ou campus madius, ou bien ils placent à côté un mot comme exercitus ou castra, ou bien ils racontent une expédition militaire. Pas une seule fois, au contraire, ils n'énoncent la délibération d'une assemblée. Un Champ de Mai n'était pas autre chose que le groupement de tous les soldats venant de toutes les provinces se réunir dans une même plaine[21]. L'expression s'explique, d'ailleurs, si l'on songe que le mot campus éveillait déjà par lui seul l'idée d'une armée dressant ses tentes[22]. On disait campus comme nous disons un camp, et le mot vient de là. Même l'idée de guerre s'y joignait, et souvent on désignait par le seul mot campus la rencontre de deux armées ou le duel régulier de deux champions[23]. On doit noter, au contraire, que jamais la langue n'attacha au mot campus l'idée de délibération ou d'assemblée politique.

Sans doute on peut considérer encore comme de pures réunions militaires celle de 779, dont un annaliste dit seulement : La réunion fut à Duren et de là on se dirigea du côté de la Saxe[24], et dont un autre parle ainsi : Champ de Mai à Duren et marche des Francs sur la Saxe[25]. — Réunion militaire aussi, celle qui eut lieu en pleine Saxe en 780 et qui eut pour effet de soumettre de nouveau les Saxons[26]. — Réunion militaire encore, celle de 782, que la Chronique de Moissac appelle expressément la réunion de l'armée, conventum exercitus[27]. — De même encore celle de 795, que les uns appellent un placitum, que d'autres désignent par le nom d'armée, et qui n'eut d'ailleurs d'autre résultat que le ravage du pays saxon[28].

Les Capitula ires marquent très nettement la nature de cette sorte de réunion. Ils l'appellent un placitum ; mais ils y ajoutent quelquefois l'épithète exercitale, et surtout ils la décrivent comme une pure convocation militaire. Il est dit, par exemple, en 802 que, lorsque le placitum de guerre a été décrété par le roi, celui qui y manquera payera une amende de 60 sous[29]. Il est dit en 807 que tous doivent se rendre au plaid du roi bien armés et en tenue de guerre[30]. Dans un autre capitulaire qui concerne spécialement la levée des soldats, [nous lisons] que chacun devra se rendre au plaid indiqué, ad condictum placitum[31]. Cette expression, fréquente dans la langue du temps, signifie le rendez-vous qui est fixé quant au jour et quant au lieu à tous les hommes libres armés. Charlemagne écrit un jour : Au sujet du plaid qui a été fixé (cette année) à la frontière, il est obligatoire pour tous de s'y réunir, conformément à notre ordre[32]. Il écrit encore : Le comte doit avoir soin que tous les hommes dans son comté, sous peine de 60 sous d'amende, soient rendus au plaid au jour annoncé, au lieu que notre ordre a fixé, chacun avec lance, bouclier, arc et flèches.... Qu'ils soient exacts au jour fixé pour le plaid et qu'on fasse revue de leurs armes[33]. Un capitulaire de 811 punit les retardataires : Si un homme appelé à l'armée n'est pas arrivé au plaid fixé, par chaque jour de retard après le plaid fixé il sera condamné à un jour de privation de viande et de vin[34].

Nous avons l'une des formules de la convocation au plaid. Elle est conçue ainsi : Charles, sérénissime auguste, empereur et roi des Francs, à l'abbé Fulrad. Nous te faisons savoir que nous avons fixé notre plaid général pour la présente année dans la partie orientale de la Saxe, au lieu appelé Starasfurt. En conséquence nous t'ordonnons que tu te rendes en ce lieu, à la date du 17 juin, avec tous tes hommes bien armés et équipés. L'équipement de tes hommes sera tel, que m puisses, à partir de cet endroit, sur notre ordre, marcher en guerre. Ils auront donc armes, vivres, vêlements, ustensiles et tout le matériel nécessaire pour faire campagne[35].

Il existait donc un plaid militaire[36]. L'institution était assez régulière pour qu'en l'espace d'un demi-siècle les Capitulaires la mentionnent cinq fois et les annalistes plus de vingt fois. A vrai dire, elle était annuelle, parce que presque chaque année il y avait une guerre ou tout au moins une prévision de guerre. Elle était si bien une institution, que les annalistes disent souvent ut mos erat, comme c'était la règle du royaume, ou bien secundum consuetudinem, comme c'était la coutume. On l'appelait un Champ de Mai, parce que le mot campus éveillait l'idée de guerre. On l'appelait aussi une réunion, conventus, synodus, ou un plaid du roi, placitum nostrum. C'était au fond une convocation de tous ceux qui devaient le service militaire[37].

De tous les faits que nous venons de citer, il ressort encore une remarque : chaque fois que cette armée se réunit, nous constatons qu'elle n'est pas consultée sur la guerre. Pas une fois cette question ne lui est posée. Pas une fois elle ne délibère ni n'émet un vœu. Toujours la guerre a été résolue auparavant, par le roi seul ou par le roi en son conseil. L'armée, réunie au jour et au lieu qui ont été fixés à tous, ne fait qu'une chose : elle marche où le roi la conduit ou sous les chefs qu'il a désignés. L'ordre de convocation porte : Une fois arrivé au lieu du rendez-vous, tu marcheras en guerre du côté où notre ordre t'indiquera d'aller[38].

 

2° DES JUGEMENTS QUI SE FAISAIENT DANS LES ASSEMBLÉES GÉNÉRALES.

 

Ces grandes réunions n'avaient pas toujours pour objet la guerre. Même les années où les rois n'avaient aucune guerre en vue, ils les convoquaient. Aussi lisons-nous maintes fois chez les annalistes des phrases comme celle-ci : Cette année fut sans guerre ; les Francs vinrent seulement à Worms pour le plaid[39].

Parmi les actes qui se faisaient dans ces réunions, citons d'abord les jugements. Nous pouvons citer huit exemples de jugements rendus dans les conventus. Dans un grand Champ de Mai tenu à Valenciennes, probablement en 771, tandis que l'armée avait établi son camp autour du prince, un duc fut accusé par ses deux sœurs de les avoir frustrées de leur héritage, fut jugé et condamné[40]. En 782, dans une assemblée militaire tenue aux sources de la Lippe, un évêque et un abbé se présentèrent pour vider un différend qu'ils avaient entre eux relativement à la possession d'un monastère ; et c'est dans ce conventus tenu en pays ennemi que le procès fut examiné et jugé[41]. En 786, plusieurs comtes et hauts fonctionnaires d'Austrasie, qui avaient conspiré contre Charlemagne, furent jugés dans un conventus réuni à Worms[42]. En 788, le duc de Bavière Tassilo fut accusé et jugé dans la grande assemblée d'Ingelheim[43]. C'est au conventus de Ratisbonne en 792 que Pépin, qui s'était révolté contre Charlemagne, fut déclaré coupable et condamné à mort[44]. En 818, Bernard, roi d'Italie et neveu de l'empereur, fut jugé dans un conventus tenu à Aix-la-Chapelle[45]. En 820, au milieu d'une assemblée réunie à Aix, nous voyons juger un comte de Barcelone nommé Béra[46]. Enfin en 828, après une expédition malheureuse en Aquitaine, nous voyons mettre en jugement les chefs de l'expédition dans un conventus publicus tenu encore à Aix[47].

Si l'on s'en tenait à ces simples indications, on pourrait supposer que ces assemblées générales de la nation franque étaient investies d'un pouvoir judiciaire, que cette grande niasse des hommes libres formait un immense tribunal, et qu'à elle appartenait la juridiction suprême. Mais il faut regarder de plus près chacun de ces récits des annalistes, afin d'y voir quel fut chaque fois le vrai rôle de l'assemblée.

Le jugement rendu dans le plaid de Valenciennes nous est ainsi décrit : Charles ordonna la réunion d'un grand Champ de Mai, suivant l'usage des Francs[48]. Tous les grands s'y rendirent, tous les chefs des provinces, toute la population, et ils établirent leur camp en cercle. Quand tous furent réunis, il se trouva parmi eux un duc, qui était particulièrement cher au roi. Mais les deux sœurs de ce duc vinrent se plaindre au roi, lui disant : Très glorieux roi, aie pitié de nous qui sommes orphelines, et ordonne à notre frère de nous rendre notre part d'héritage. Charles manda aussitôt le frère et s'enquit avec soin en l'interrogeant s'il avait quelque juste droit de posséder la part de ses sœurs. Et il lui ordonna de leur rendre leur héritage. Mais, le frère s'y refusant, Charles décida qu'il devrait prêter serment sur le tombeau d'un saint ; et, dans ce scrutent, l'homme mourut[49]. — Dans ce récit, très clair et très vivant, nous voyons bien qu'il s'est tenu une grande assemblée ; mais ce n'est pas cette assemblée qui a jugé. Les demanderesses ont porté leur plainte, non à l'assemblée, mais au roi. Elles se sont adressées à lui seul : O rex gloriosissime, jubeas... Lui seul aussi a mandé le défendeur, lui seul l'interroge, lui seul a prononcé qu'il devait restituer', lui seul l'a condamné à un serment judiciaire qui, dans la pensée des hommes, doit le faire mourir. En tout cela, l'assemblée n'a joué aucun rôle. Nous ne savons même pas si elle a assisté au jugement, et si le roi n'a pas jugé sous sa tente, ou dans une maison, ou dans son palais voisin à Valenciennes.

Dans l'assemblée générale de 782, nous trouvons le jugement d'un procès entre un évêque et un abbé. L'écrivain s'exprime ainsi : Le roi Charlemagne, pendant que la réunion générale se tenait en Saxe aux sources de la Lippe, prit sur lui l'examen du procès, en présence des grands de presque tout le royaume et des premiers personnages de l'ordre laïque et de l'ordre ecclésiastique ; de l'avis de tous ceux qui prirent pan au jugement, il fut décidé que le serment judiciaire serait prononcé par le représentant de l'abbé ; et celui-ci s'étant acquitté de l'épreuve, le roi, avec l'assentiment des siens, adjugea à l'abbé l'objet en litige[50]. — Dans ce récit encore, on reconnaît que le jugement a eu lieu pendant que se tenait la réunion générale, mais on reconnaît aussi que ce n'est pas l'assemblée générale qui a prononcé ce jugement. L'écrivain note même que le procès a été jugé seulement en présence des grands du royaume, comtes et évêques ; ainsi il établit formellement une distinction entre le peuple entier qui était campé aux sources de la Lippe, et une assemblée beaucoup moins nombreuse et plus aristocratique quia jugé. Cette assemblée des grands siégeait autour du roi qui avait évoqué l'affaire à lui ; le roi examina l'affaire au milieu de-ses grands ; ses grands furent unanimes, et le roi prononça. On ne peut s'empêcher de remarquer que c'est ici la procédure ordinaire du tribunal du roi, Il juge aux sources de la Lippe comme il aurait jugé dans son palais d'Aix ou d'Attigny.

Le jugement de l'année 786, au plaid de Worms, a le même caractère. Charlemagne, dit l'annaliste, ayant appris que quelques comtes d'Austrasie avaient conspiré, ordonna à ces hommes de venir vers lui. On était au mois d'août. L'empereur fit réunir à Worms nue assemblée d'évêques et un grand conventus, et là il décida que ceux qui avaient trempé le plus avant dans la conjuration, seraient révoqués de leurs fonctions et auraient les yeux crevés ; aux moins coupables il fit grâce[51]. — Ici encore on voit que c'est le roi qui juge. Lui seul est nommé comme auteur de la condamnation et de la grâce. Je n'en conclus pas qu'il ait jugé seul : l'usage était qu'il eût un conseil autour de lui. Quelques-uns de ces évêques dont parle l'annaliste ont sans doute siégé au tribunal, et sans doute aussi un bon nombre de grands. Mais il est visible que l'assemblée générale, c'est-à-dire le peuple entier, n'a ni délibéré, ni discuté, ni prononcé la sentence.

Sur l'assemblée de 788, les expressions des chroniqueurs permettent quelque doute. Il est vrai aussi qu'il s'agissait d'un cas particulièrement grave ; l'accusé était le duc des Bavarois Tassilo, c'est-à-dire un chef de peuple et presque un souverain. Il est possible que la procédure ait été autre que s'il se fût agi d'un homme de l'Etat franc, d'un sujet, d'un simple particulier. Voici d'abord comment s'exprime Éginhard : Le roi avait décrété qu'une assemblée générale de son peuple se tînt dans la villa royale d'Ingelheim, et il avait ordonné à Tassilo, comme à tous les autres vassaux, de s'y rendre[52]. Tassilo obéit et vint en présence du roi[53]. Il fut accusé par des Bavarois du crime de lèse-majesté. Il ne put nier. Reconnu coupable, il fut de l'avis de tous condamné comme criminel de lèse-majesté à la peine capitale. Mais la clémence du roi lui fit grâce de la vie ; et il fut enfermé dans un monastère. — On distingue bien ici qu'il y a eu d'autres juges que le roi, puisque tous ont prononcé la mort, tandis que le roi a commué la peine. Mais Éginhard ne dit pas précisément que ce soit l'assemblée générale du peuple qui ait prononcé le premier arrêt. Cet avis unanime dont il parle, suivant une formule assez fréquente, peut, n'être pas autre chose que l'avis de tous ceux qui siégèrent au tribunal royal. Ce fut probablement ce tribunal qui émit l'opinion que l'accusé méritait la mort, et le roi adoucit la sentence.

Mais les Annales de Lorsch s'expriment autrement : Charlemagne réunit une assemblée dans la villa d'Ingelheim, et Tassilo y vint sur l'ordre du roi, ainsi que tous les autres vassaux. Les Bavarois fidèles l'accusèrent d'avoir violé la foi promise. Il ne put nier et demeura convaincu. Alors Francs et Bavarois, Lombards et Saxons, et tous ceux qui avaient été appelés de toutes les provinces à cette réunion, jugèrent qu'il était digne de mort. Mais, tandis que tous d'une seule voix criaient qu'il méritait le dernier supplice, Charlemagne ému de pitié contint la sévérité de ses fidèles, de sorte qu'il ne mourut pas, et il l'enferma dans un monastère[54]. — Ce que nous voyons dans ce nouveau récit, c'est moins un peuple — car le peuple n'est pas nommé — qu'une réunion de vassaux et de fidèles. Le trait saillant du récit est la présence de Lombards, de Saxons, de Bavarois dans cette réunion, et cela se comprend, puisqu'il s'agit de juger un homme qui n'est pas un Franc. Il est jugé par des vassaux, parce que le lien qui l'attache à Charlemagne n'est pas la sujétion ordinaire, mais la vassalité, et parce que le crime dont on l'accuse est d'avoir violé sa foi. L'écrivain ajoute que tous le condamnèrent : mais tous ne signifie pas ici tout un peuple ; il signifie tous les vassaux et fidèles qui avaient été convoqués de toutes les parties de l'Empire à cette réunion. Il y a lieu de croire que le tribunal fut ce jour-là exceptionnellement nombreux et composé d'autres éléments que ne l'était d'ordinaire le tribunal royal. Mais il n'y a pas dans ce récit de l'annaliste un trait précis qui permette de croire que ce fut l'assemblée générale de la nation franque qui jugea[55].

En 792, un fils naturel du roi, nommé Pépin, ayant conspiré contre lui, le jugement fut rendu dans le conventus tenu à Ratisbonne. Une Chronique en parle dans des termes qui donnent tout de suite l'idée d'une justice populaire : Quand Charlemagne eut appris le complot de Pépin et de ses partisans, il réunit une assemblée de Francs et des autres fidèles à Ratisbonne ; et là tout le peuple qui était avec le roi jugea que Pépin et ses complices méritaient la confiscation et la mort ; mais le roi ne voulut pas que son fils mourût et les Francs jugèrent qu'il serait consacré à servir Dieu ; le roi l'enferma dans un monastère[56]. — Mais ce qui diminue l'autorité de ce récit, c'est qu'on ne trouve rien de semblable dans aucune des autres Annales. Elles parlent bien du jugement, de la punition de Pépin et de ses complices ; mais elles ne mentionnent aucune assemblée[57]. Même l'auteur de ce récit, à le regarder de près, n'a pas dit que ce fût une assemblée générale ; il n'a pas employé l'épithète generalis. Il se sert à la vérité du terme populus ; mais on ne peut s'empêcher de remarquer que ce terme a un sens étrangement vague chez cet écrivain, puisque six lignes plus loin il s'en sert de nouveau pour désigner- une réunion de fidèles à qui Charlemagne prodigue des présents[58]. Il faut, en examinant les textes, tenir compte des habitudes de langage des écrivains et du sens qu'ils attachaient aux mots.

Sous Louis le Pieux, en 818, il s'agissait de juger Bernard : chose grave, car Bernard était un petit-fils de Charlemagne et avait reçu de lui le royaume d'Italie. Sur la manière dont il fut jugé nous possédons la relation de cinq annalistes et un diplôme de Louis le Pieux. Il faut rapprocher ces documents et en dégager la vérité. — Éginhard dit seulement : Le roi Bernard et les auteurs de la conjuration furent condamnés à la peine de mort par le judicium Francorum, et l'empereur leur faisant grâce de la vie, leur fit seulement crever les yeux[59]. Il ne parle pas d'un conventus. L'expression judicium Francorum, ainsi que nous l'avons vu plus haut, est une des expressions consacrées pour désigner le tribunal des grands du Palais. — L'auteur anonyme de la Vie de Louis le Pieux et les Annales de Fulde s'expriment à peu près de même ; ils mentionnent, non une assemblée générale, mais un judicium Francorum, c'est-à-dire un jugement des grands du roi [60]. — Thégan mentionne bien un conventus, mais il ne dit pas précisément que ce conventus ait jugé : L'empereur tint une grande réunion de ses peuples, et il fit l'enquête sur la conjuration ; tous ceux qui furent trouvés coupables furent condamnés à mort, à l'exception des évêques, qui furent seulement déposés. L'empereur refusa d'ailleurs d'exécuter l'arrêt de mort, et ses conseillers firent crever les yeux à Bernard et à ses complices[61]. — La Chronique de Moissac signale un conventus, qu'elle ne qualifie pas de generalis. Elle marque surtout que, comme il y avait parmi les accusés des laïques et des évêques, il y eut aussi deux tribunaux, l'un qu'elle appelle une assemblée de Francs, l'autre qu'elle appelle une réunion d'évêques et d'abbés. Sur le premier elle s'exprime ainsi : L'empereur fit une assemblée de Francs, et il leur renvoya l'examen de l'affaire, voulant voir ce que ses fidèles jugeraient de Bernard et de ses complices ; tous unanimement les jugèrent dignes de mort : mais l'empereur leur fit grâce de la vie[62]. On doit noter dans cette phrase que l'expression conventus Francorum et l'expression fidèles sui désignent les mêmes hommes. Ceux qui forment cette assemblée ne sont que les fidèles particuliers de l'empereur, c'est-à-dire ses grands. L'empereur leur a présenté l'affaire et a voulu voir ce qu'ils jugeraient, c'est-à-dire leur a demandé leur avis. Il n'a même pas été obligé de suivre leur avis, et il a prononcé une autre peine. C'est la procédure ordinaire du tribunal du roi. On peut penser que le tribunal fut ce jour-là plus nombreux que d'habitude, mais il ne fut pas d'autre nature. — Enfin, ce qui tranche la question et ce qui marque bien comment il faut comprendre ce langage des annalistes, c'est un diplôme émané de la chancellerie de Louis le Pieux, et où nous lisons : Nul n'ignore que Bernard, roi d'Italie, et quelques-uns de ses sujets ont été infidèles à noire égard, et que, pour cette infidélité, ils ont, par le jugement de nos grands, subi la peine qu'ils méritaient[63]. Dans cet acte officiel, il n'est pas fait mention d'une assemblée populaire. Le judicium procerum nostrorum qui y est mentionné est la même chose que le judicium Francorum dont parlent Éginhard et l'Astronome, la même chose que le judicium fidelium dont parle la Chronique de Moissac. C'est le jugement des grands du roi, c'est-à-dire d'un vaste tribunal composé de comtes et de vassaux.

Nous dirons peu de chose de deux jugements eu 820 et 828. Éginhard parle de l'un et de l'autre comme ayant eu lieu pendant un conventus ; mais ses deux récits ne contiennent pas un seul mot d'où l'on puisse induire que ce soit l'assemblée générale qui ait jugé[64].

Voilà donc huit actes judiciaires qui nous sont assez bien décrits par les documents. Dans deux d'entre eux, ceux de 781 et de 786, le roi est représenté comme jugeant et décidant seul, ce dont il ne faut pas conclure qu'il n'eût pas son conseil et son tribunal autour de lui, Dans un troisième, celui de 782, il est bien marqué que le jugement est rendu par un conseil de grands et d'évêques bien distinct du conventus generalis. Ceux de 788 et de 792 l'ont été par des vassaux et fidèles du roi ; l'arrêt de 818 est l'œuvre du jugement des Francs ou du jugement des grands du roi, ce qui est la même chose. Ceux de 820 et de 828, malgré les termes vagues des annalistes, semblent bien avoir été rendus dans les mêmes conditions. Enfin, dans les huit jugements, la vraie et définitive sentence est toujours prononcée par le roi seul, souvent en opposition avec l'opinion que le tribunal a émise.

S'il y a une conclusion scientifique à tirer de ces observations de détail, c'est que l'assemblée générale du peuple n'est jamais décrite par les écrivains comme ayant exercé le pouvoir judiciaire. Les huit jugements dont nous venons de parleront été rendus pendant un conventus, mais non pas par un conventus. Ils ressemblent d'ailleurs à ceux que le roi rendait en dehors du conventus, presque tous les jours de l'année. La seule différence est que le tribunal du roi s'est trouvé plus nombreux ; et cela tient à ce que la réunion générale avait groupé autour du roi tous les comtes, tous les vassaux, tous les évêques. C'est pour cette raison que les affaires particulièrement graves, comme celles de Pépin et de Bernard, ont été réservées par le prince au moment où il tiendrait son conventus ; mais rien n'autorise à penser qu'il les ait réservées en vertu d'un droit supérieur de la nation franque ou de l'assemblée générale.

 

3° CES ASSEMBLÉES OÙ L'ON S'EST OCCUPÉ D'AFFAIRES POLITIQUES OU ADMINISTRATIVES.

 

Il est nécessaire que nous passions en revue les assemblées qui nous sont signalées par les documents. Mus observerons ce qui s'est fait dans chacune d'elles, el ce n'est qu'après cette suite d'observations précises 1ue nous pourrons tirer des conclusions générales. Nous a>oib, déjà vu quatorze de ces assemblées qui ont été de simples convocations militaires ; nous en avons vu huit dans lesquelles des jugements ont été rendus. Il iu>Ils reste à étudier celles où des affaires de politique en d'administration ont été traitées.

Voici d'abord l'assemblée de 761[65]. Le roi Pépin, dit un chroniqueur fixa le plaid à Duren[66] ; il tint à Duren, dit un autre, l'assemblée générale[67]. La réunion eut lieu par son ordre. Il ordonna à tous devenir vers lui[68]. Elle eut pour objet de traiter du bien de l'État et des intérêts du royaume des Francs[69]. Mais le chroniqueur qui dit cela ne dit pas que ce fut le peuple qui traita des affaires ; il ne parle au contraire que des grands[70]. Il est bien vrai que nous devons entendre que chacun de ces évêques et de ces comtes a amené avec lui une suite, une troupe d'hommes ; c'est donc bien ici un conventus generalis, ainsi que le dit Éginhard, et dans un certain sens on peut soutenir que le peuple est là. Mais quand il s'agit de traiter des affaires publiques, le chroniqueur ne pensé qu'aux : grands et ne voit qu'eux. — Un autre annaliste exprime la même pensée lorsqu'il écrit : En cette année 761, le roi tint le conventus des Francs dans la villa royale de Duren, et traitant des affaires du royaume, il y réunit tous ses grands[71]. On entrevoit déjà ici une vérité qui peu à peu deviendra plus claire, à savoir que, s'il est vrai qu'il y ait une réunion générale de la population, ce n'est-pourtant qu'avec ses grands que le roi délibère.

Les chroniqueurs mentionnent un conventus ou placitum generale tenu à Nevers en 765, et un autre tenu à Worms en 764 ; mais ils ne disent pas ce qui y fut fait[72].

Sur le placitum ou conventus generalis qui se tint à Attigny en 765[73], nous trouvons une anecdote caractéristique dans l'auteur de la Vie de saint Goar[74]. Quelques mois auparavant, un abbé de Prum, nommé Assuérus, avait porté plainte au roi contre un personnage nommé Erpingus qui détenait le monastère de Saint-Goar, et le roi lui avait répondu qu'il lui donnerait satisfaction au moment opportun. Puis avait eu lieu la réunion générale d'Attigny, et l'abbé s'y était rendu. Alors, dit l'écrivain, le roi, qui résidait dans son palais d'Attigny, manda vers lui l'abbé et, lui rappelant sa plainte antérieure, lui fit donation de ce môme monastère de Saint-Goar. — De ce petit récit nous tirons plusieurs enseignements. D'abord, une plainte a été portée au roi alors que le conventus n'était pas réuni, et le roi a remis sa décision à un temps plus opportun, c'est-à-dire au temps où il réunirait ce conventus. Ce trait, que l'on rencontre plus d'une fois, marque que les rois ne s'occupaient volontiers des affaires qu'à l'époque des assemblées générales. Puis, ce conventus ayant été convoqué, nous voyons que l'abbé de Prum s'y est rendu ; les abbés et les évêques avaient le devoir de se rendre à ces réunions, aussi bien que les comtes et les guerriers. Ensuite l'hagiographe nous laisse voir que, tandis que le conventus populi se tient dans la plaine aux environs, le roi n'est pas au milieu [de l'assemblée] ; c'est dans son palais qu'il se tient, positus in palatio. Enfin, c'est le roi seul qui agit ; il mande l'intéressé près de lui et, sans consulter en rien l'assemblée, il décide l'affaire dans son palais[75].

Pour le règne de Charlemagne, nous avons la mention d'un grand nombre de réunions générales ; mais il est assez rare que les annalistes nous disent ce qui s'y est fait. Ces réunions générales eurent lieu, en 770 à Worms, en 771 à Valenciennes, en 772 à Worms, en 775 à Genève à cause de la guerre en Lombardie, en 775 à Duren, en 776 à Worms, en 777 à Paderborn, en 779 à Duren, en 780 en Saxe. Les annalistes n'en mentionnent pas dans les années 774, 778, 781, soit qu'il n'y en ait pas eu, soit qu'on n'en eût pas gardé le souvenir.

Nous avons un trait à signaler dans l'assemblée de 782. D'une part, les annalistes sont d'accord pour marquer qu'il s'agit ici d'une armée ; cette réunion est formellement appelée par eux du nom de exercitus[76], et c'est pourquoi elle se tient en pays saxon. Mais en même temps ils l'appellent du nom de conventus[77]. Il a suffi, en effet, que l'armée s'arrêtât quelques jours et établît son camp, pour qu'il y eût par ce seul fait un plaid du roi[78]. Le roi traita plusieurs affaires[79], et notamment reçut les ambassades d'un roi danois et de quelques chefs des Avares[80]. Il est donc vrai de dire que le roi pouvait tenir son plaid au milieu même de l'année et s'y occuper des affaires du pays[81].

Il faut noter la manière dont Éginhard parle de l'assemblée de 787 : Le roi, qui avait passé l'hiver en Italie, revint en France et décida que la réunion générale de son peuple aurait lieu à Worms. Là il exposa devant ses grands ce qu'il avait fait dans son voyage d'Italie, et termina en rapportant les promesses de fidélité que le duc dès Bavarois lui avait faites à Rome[82]. — Nous apercevons ici l'une des habitudes du roi, qui profitait de la réunion du conventus pour faire connaître ses actes et aussi ses intentions. D'ailleurs nous y voyons aussi que cette notification royale n'était pas faite à la réunion générale, mais seulement aux grands du roi. Il les consultait aussi sur ce qu'il y avait lieu de faire, et c'est sans doute après avoir pris l'avis des mêmes grands que Charlemagne se décida à éprouver ce que valaient les promesses du Bavarois' en se portant avec une armée eh Bavière[83].

Sur la réunion de 790, un annaliste s'exprime ainsi : Le roi tint la réunion à Worms, et il régla tout ce qu'il lui parut utile de régler dans son royaume[84]. — Ici encore, le temps de la réunion générale nous apparaît comme le temps où le roi s'occupe surtout des affaires publiques et prend ses décisions ; mais nous n'apercevons pas que la réunion soit consultée sur ces affaires[85].

Du conventus qui eut lieu à Francfort en 794[86], nous ne savons autre chose, sinon que les évêques y formèrent une réunion particulière pour s'occuper des affaires purement ecclésiastiques[87]. Le roi d'ailleurs présida ce concile[88].

Une réunion d'un caractère particulièrement militaire eut lieu aux frontières de la Saxe en 795[89]. — Il y en eut une autre en Saxe en 797[90]. — Pour l'année 800 Éginhard ne cite qu'un conventus generalis que Charlemagne tint au mois d'août à Mayence[91]. Mais la Chronique de Moissac, entrant dans plus de détails, mentionne deux assemblées dans cette môme année : une première eut lieu au printemps à Tours, parce que le roi se trouvait alors dans cette ville[92] ; une seconde eut lieu en été à Aix-la-Chapelle : mais, suivant l'annaliste, elle fut composée seulement des grands du roi et de ses fidèles[93]. C'est dans celle-ci que fut résolu le voyage en Italie qui devait aboutir au couronnement de Charlemagne comme empereur.

En 801, il n'y eut pas de conventus au printemps, parce que Charlemagne était en Italie et qu'il y resta jusqu'à la fin de juin ; les annalistes n'en mentionnent pas non plus dans la seconde partie de l'année.

La plupart des annalistes ont passé sous silence un conventus très important qui eut lieu en 802[94]. Nous savons pourtant qu'il y eut un conventus generalis convoqué au mois d'octobre à Aix-la-Chapelle[95]. Et ce qui est surtout remarquable dans la description qui nous est faite, c'est que nous voyons le conventus se partager en deux assemblées. L'une est composée des évêques, prêtres et diacres ; l'autre est formée des ducs, des comtes et du reste du peuple chrétien. Il s'y fit deux choses de la plus haute importance, une réforme de la discipline ecclésiastique, et une révision de toute la législation civile. Y eut-il de longues discussions ? Quelle fut en si grave matière la part du prince, la part des grands, la part du peuple ? Nous ne pouvons le savoir que par le rapport des deux chroniqueurs.

Voici comment ils s'expriment sur la première réforme : L'empereur rassembla à Aix un synode général d'évêques, de prêtres, de diacres, et leur fit donner lecture des canons de l'Église et des décrets des souverains pontifes. Il rassembla dans le même synode tous les abbés de ses Etats et tous les moines qui étaient venus ; ils firent une réunion entre eux ; on leur donna lecture de la règle de saint Benoît, et copie en fut remise, écrite par hommes instruits, aux abbés et aux moines[96]. Cela fait, ordre fut donné par l'empereur à tous évêques, abbés, prêtres, diacres, ecclésiastiques de tout rang d'avoir à veiller à ce que chacun, dans les évêchés, monastères et toutes églises, se conformai aux constitutions de l'Église ; en sorte que les chanoines vécussent suivant les canons, que les fautes des ecclésiastiques ou des laïques fussent amendées, et que dans les monastères la règle de saint Benoît fût rétablie[97]. — Tel fut, au dire des deux annalistes, le conventus ecclésiastique. Visiblement, les intentions de la majorité devaient être d'accord avec celles du roi ; mais c'est le roi qui prend l'initiative, qui dirige tout et qui ordonne.

Voici maintenant ce que disent les mêmes annalistes, de la révision des lois civiles : Pendant que cela se passait, l'empereur réunit les ducs, les comtes, le peuple chrétien, avec tous ceux qui connaissaient les lois. Il fit lire toutes les législations en usage dans son royaume, et fit remettre à chaque homme la sienne. Il fit corriger là où il était nécessaire de corriger, et fit mettre en écrit la loi corrigée. Il ordonna que tout juge jugeât d'après le texte écrit. Il défendit aussi aux juges de recevoir des présents et voulut que les pauvres aussi bien que les riches eussent la justice dans son royaume[98]. — Il nous semble que l'action respective du roi, des grands, du peuple, est assez visible ici. La révision, même imparfaite, de tant de législations a exige sans nul doute un très long travail ; mais ce travail s'est fait dans le silence du cabinet de Charlemagne ; puis le conventus s'est réuni pendant quelques jours, quelques semaines peut-être, et le prince n'a guère fait que lui donner lecture des résultats du long travail, en exigeant que les lois nouvelles fussent désormais observées par tous[99].

Les annalistes décrivent avec quelque précision le conventus de 806[100]. Il se tint dans les premiers jours de février[101]. Il avait pour objet principal le partage des États de Charlemagne entre les trois fils qu'il avait alors. Or il se trouve que les annalistes ne prononcent pas ici une seule fois le mot peuple, et qu'ils ne parlent que des grands[102]. Il ne semble même pas, à lire leurs récits, que ces grands aient eu aucune initiative ; et ils ne mentionnent aucune discussion. Charles, disent-ils, tint un conventus avec les grands du royaume des Francs en vue d'affermir la paix entre ses fils et de partager le royaume entre eux. Quand il eut fait ce partage, il le fit confirmer par le serment des grands[103]. — Ainsi l'on ne signale même pas que ces grands aient été consultés. Il semble que le prince ne les ait réunis que pour leur notifier sa volonté et pour exiger d'eux le serment de l'observer dans l'avenir.

Or cette impression est confirmée par l'acte officiel qui nous est parvenu[104]. C'est le roi qui parle, et l'on voit qu'il' s'adresse à des hommes qui l'écoutent. Il ne leur dit pas qu'il les consulte. Il leur dit : Nous voulons que vous sachiez que notre désir est que nos trois fils partagent avec nous la royauté que Dieu nous a donnée, et en soient héritiers après notre mort, si Dieu le permet[105]. Pour ne pas leur laisser de cause de litige après nous, nous avons fait décrire et marquer sur quelle portion chacun d'eux régnera. Suit une série de vingt articles dans lesquels le roi parle en son nom seul, disant : Nous assignons à Charles... nous assignons à Louis... nous décidons... il nous a plu... nous ordonnons et prescrivons.... Il n'y a pas un mot dans ces longues pages qui soit l'indice d'une consultation des grands, encore moins d'une volonté populaire.

En 807, Charlemagne tint son conventus dans le palais d'Ingelheim, avec les évêques, les comtes et les autres fidèles[106]. De ce qui s'y fit, nous ne savons qu'une chose, c'est qu'il commanda à ces évêques, à ces comtes, à ces fidèles, de faire bonne justice dans son royaume[107]. Il semble qu'il n'ait ainsi convoqué auprès de lui tous les fonctionnaires du royaume que pour leur 'donner des instructions.

Il s'est tenu trois conventus à Aix en 811[108], en 812[109], en 813. Nous ne savons rien des deux premiers. L'objet du troisième était d'assurer l'héritage de Charlemagne au seul fils qui lui restât. Il voulait couronner Louis comme roi et empereur. Charlemagne malade revint à Aix, et, tenant dans cette ville la réunion générale, il mit la couronne sur la tête de son fils Louis et l'associa à la dignité impériale[110]. Eginhard ne dit rien de plus[111]. Thégan décrit une réunion d'évêques, d'abbés, de comtes, de vicaires ou lieutenants[112], et montre Charlemagne adressant à ces hommes une harangue pour leur présenter son fils Louis comme souverain[113]. Il les interroge même un à un, leur demandant de dire s'il leur plaisait que Louis fût roi et empereur[114]. Chacun répondit affirmativement, et quelques jours après le couronnement eut lieu dans une église devant toute la multitude des évêques et dés grands du roi[115]. La Chronique de Moissac mentionne aussi un conseil tenu par Charlemagne avec les évêques, les abbés, les comtes et tous les grands du royaume[116] ; il ajoute en même temps que cela plut au peuple[117]. Tout ce qu'il y avait là de peuple donna des marques d'assentiment et fit entendre des acclamations au moment où Charlemagne établit empereur son fils Louis et lui mit la couronne sur la tête, et le peuple cria tout d'une voix : Vive l'empereur Louis ![118] Il faudrait ajouter beaucoup à ces récits pour leur faire signifier qu'un véritable peuple ait été consulté et ait prononcé ici une décision[119]. [Si prenons l'une après l'autre les assemblées que réunit Louis le Pieux, nous ne voyons pas qu'elles aient un caractère nouveau. Tout au plus peut-on constater que] le caractère militaire s'est un peu effacé : [|es guerres sont en effet plus rares et moins importantes].

Je dois noter d'abord qu'en 814 Louis prend le pouvoir sans réunir l'assemblée. Eginhard dit qu'il reçoit les ambassadeurs étrangers et qu'il fait un traité avec l'empereur grec avant la réunion du conventus. Cette réunion n'a lieu qu'après. Sur cette réunion elle-même, si je compare Éginhard et le Chroniqueur de Moissac, je dois remarquer que le premier l'appelle generalis populi conventus[120], et que le second ne voit qu'une réunion d'évêques, d'abbés, de ducs et dé comtes, avec lesquels l'empereur conféra sur les choses nécessaires et sur les intérêts de l'Eglise[121].

Nous ne savons rien du conventus de 815, sinon qu'il se tint dans la Saxe[122], et qu'il était surtout une armée, exercitus[123].

Aucune réunion n'est mentionnée en 816[124]. Celle de 817 nous est très nettement décrite. Elle se tint au mois de juillet à Aix-la-Chapelle[125]. Trois chroniqueurs l'appellent un conventus generalis ou un conventus populi ; mais l'un d'eux définit le mot populus. L'empereur, dit-il, ordonna la réunion au palais d'Aix du peuple de tous ses États, c'est-à-dire des évêques, des abbés, des comtes, et de tous les hommes de haut rang du royaume des Francs[126]. Cette définition mérite qu'on s'y arrête.

On se tromperait également si l'on se figurait une simple réunion d'évêques et de grands, ou si l'on se représentait la réunion d'un peuple. Il y aurait du vrai et du faux dans chacune des deux opinions. D'une part, ce n'était pas seulement la réunion d'une centaine d'évêques et d'abbés, de quelques centaines de comtes, vicaires et vassaux royaux, et cela ne ressemblait pas à ce que serait aujourd'hui un Sénat ou une Chambre des Lords. En effet, chacun de ces évêques, comtes et vassaux ne venait pas seul. Il amenait avec lui une suite, une petite troupe, quelques dizaines ou quelques centaines d'hommes qui lui obéissaient. La réunion générale avait donc toute l'apparence d'un peuple. Ce n'était pourtant pas un peuple dans le sens moderne du mot. Ce n'était pas un peuple convoqué directement, ce n'était pas un peuple d'égaux, réunis en comices. C'étaient bien des milliers d'hommes, mais venus chacun sous un chef ; c'était une juxtaposition de petites troupes obéissant l'une à un évêque ou à un abbé, l'autre à un fonctionnaire royal ou à un vassal du roi. On pouvait donc dire indifféremment que c'était la réunion du peuple, ou la réunion des évêques et des comtes.

[Nous n'avons pas à revenir sur ce qui se passa dans l'assemblée de 817. Nous avons vu plus haut comment Louis le Pieux y régla sa succession. Or il fit ce règlement de sa propre autorité.] Il y a eu [sans doute] assemblée générale des grands et de leurs suites, c'est-à-dire du peuple. Le prince a consulté les grands seuls, mais il leur a imposé sa volonté. Il a décidé lui-même. Il a décrété lui-même l'unité de l'Empire. Les grands ont accepté sa décision, et le peuple l'a acclamée

[Les assemblées tenues les années suivantes n'offrent rien de nouveau à signaler. Mais] le conventus de 822 mérite d'être étudié avec attention. Il se tint au mois d'août, à Attigny, sur l'ordre de l'empereur[127]. Les annalistes mentionnent la présence du populus[128] ; mais ils nous montrent aussi l'empereur appelant à lui pour le conseil les évêques, les abbés, les hommes d'Église, et les grands de son royaume[129]. Le principal objet de la délibération fut un scrupule de conscience dont Louis le Pieux était tourmenté au sujet de la mort de Bernard d'Italie dont il se croyait responsable, et de quelques autres sévérités du début de son règne[130]. Le conseil, où les ecclésiastiques paraissent avoir été en majorité, fut d'avis qu'il fît une pénitence publique. Cela était conforme à toutes les idées de l'époque, et nous nous tromperions en supposant qu'un prince même en fût humilié et rabaissé dans l'esprit des sujets[131]. Cette pénitence, conseillée dans un conseil secret, eut lieu en public, en présence du peuple entier[132].

Cela fait, les délibérations furent reprises, et l'empereur continua à tenir son conseil et à s'occuper des affaires. Ici nous possédons une lettre de l'ëvêque A goba rd qui nous fait pénétrer dans le détail de la procédure habituelle à ces réunions. L'évêque écrit à un ami[133] : Dans ces jours où notre maître sacré l'empereur, ayant convoqué le conventus à Attigny, agissait avec un grand zèle, veillant à tous les intérêts des peuples qui lui sont confiés, il en vint à l'étude d'un projet très nécessaire : il désirait trouver comment il pourrait recommander aux. évêques et à ses fonctionnaires le progrès de la religion et la disparition de toutes les fautes. — Il s'agissait probablement d'une de ces grandes réformes morales que Louis le Pieux rêva de réaliser pendant toute la première moitié de son règne et auxquelles il ne renonça que lorsque de cruelles expériences lui en eurent montré le néant, et même le danger. Il y réfléchit avec l'inspiration de Dieu ; il trouva avec discernement ce qui était à faire ; et vint de sa propre bouche nous communiquer ses intentions. Ces choses ont d'ailleurs été écrites et distribuées en chapitres, et tout le monde en doit avoir connaissance.

Toute cette première partie du récit se trouve expliquée par un passage d'Hincmar. C'était l'usage, dit-il, pour occuper les grands pendant le conventus, de leur remettre au nom du roi une série de chapitres que l'esprit du roi avait conçus par l'inspiration de Dieu, pour qu'ils en conférassent et en fissent l'examen[134]. Hincmar ajoute que le prince n'assistait pas d'habitude aux délibérations et que c'était par les dignitaires du Palais qu'il envoyait ses projets à l'assemblée ou en recevait les réponses[135].

L'évêque Agobard continue : Le projet de l'affaire nous fut apporté par nos maîtres. — Voici une expression qui surprend à première vue. On se demande quels sont les hommes qu'un archevêque de Lyon peut appeler ses maîtres. Mais si l'on est familier avec la tangue du temps, surtout avec la phraséologie usitée au Palais impérial, on ne doute pas que les maîtres ne soient ici les hauts dignitaires. En effet, la suite de la lettre donne les noms de deux de ces personnages, Adalhard, qui était alors tout-puissant à la cour de Louis, et Hélisachar, qui était chancelier. Un comte du Valais, un apocrisiaire étaient aussi des maîtres. Un archevêque de Lyon devait appeler du nom de maître l'abbé Adalhard, parce que, tout en lui étant supérieur dans la hiérarchie ecclésiastique, il lui était inférieur dans le Palais. Comme l'empereur dominait tout, les favoris de l'empereur et ses représentants étaient pour tous des maîtres. Ce sont ces hommes qui au nom du prince apportèrent dans l'assemblée le projet impérial. L'un d'eux, Adalhard, fit une harangue, où il dit qu'il n'avait rien vu de plus beau, de plus glorieux, de plus utile, depuis les temps du roi Pépin jusqu'à ce jour. Il termina en disant à l'assemblée : Tout ce que votre sagacité pourra trouver d'utile pour arriver à extirper les péchés, pour conjurer les périls des âmes, pour relever la religion, pour fortifier la foi, dites-le avec confiance, et soyez sûrs que l'empereur fera tout ce que vous lui proposerez de bon, si c'est la volonté de Dieu.

Après ce discours, très élégant et agréable, des ministres du gouvernement, la délibération commença. Agobard prit à la lettre la permission qui était donnée de présenter des amendements ou des additions à la proposition impériale. Et moi, quoique le plus humble et le dernier de tous, j'osai suggérer aux ministres du prince un avis, avec toute la modestie qui convient quand on parle à si grands personnages. L'avis de l'évêque était qu'il fallait restituer aux églises et aux monastères les biens qui leur avaient été enlevés et étaient détenus par des laïques : question grave, que le gouvernement impérial ne pouvait pas résoudre en un jour. Aussi l'évêque ajoute-t-il : Lorsque j'eus fini mon discours, les révérends Adalhard et Hélisachar me firent une réponse honnête ; mais portèrent-ils ma proposition à l'empereur, c'est ce que j'ignore. — Ici finit le récit de l'évêque, et cette fin même est digne d'attention. Dans cette assemblée d'évêques et de grands, les commissaires impériaux ont apporté un projet du prince et ont invité les hommes à parler. Un seul membre, semble-t-il, a pris la parole. Sa proposition n'a même pas été discutée, et aucun vote n'a eu lieu. Les commissaires du gouvernement ont fait une réponse honnête, et ils ont pu à leur choix ou en référer à l'empereur ou ne pas même lui en parler. Ainsi les propositions d'un membre de l'assemblée ne peuvent avoir quelque effet que si l'empereur les adopte et les fait siennes. Quant à l'assemblée, elle n'a pas eu à délibérer.

Une autre lettre du même prélat nous montre, comme la précédente, quelle était l'attitude d'un archevêque même, je ne dis pas devant l'empereur, mais devant les ministres de l'empereur. C'est à quelques-uns d'entre eux qu'elle est adressée[136]. A mes révérendissimes seigneurs et maîtres Adalhard, Wala, Hélisachar. A la fin du dernier placitum, lorsque la permission de quitter le Palais nous eut été donnée, votre bonté voulut bien s'arrêter un moment à entendre mes humbles paroles au sujet des Juifs de mon diocèse. Après un échange de paroles, vous vous rendîtes chez l'empereur. Je vous suivis et me tins à la porte. Vous avez fait un peu d'effort pour que je pusse entrer dans le cabinet du prince ; pourtant je n'ai rien entendu d'autre qu'un ordre de me retirer. Ce que vous avez dit autres excellent empereur, ce qu'il vous a répondu, je I ignore ; je n'ai pas osé revenir m'approcher de vous, et je suis rentré chez moi bien troublé. — Telle était la pratique de ces grands plaids royaux ; on voit assez combien ils étaient subordonnés à l'empereur, et par le peu qu'était un archevêque vis-à-vis des ministres on peut juger du peu qu'étaient ces assemblées vis-à-vis du prince.

[Nous pourrions analyser ainsi, l'une après l'autre, toutes les assemblées qui se réunirent sur l'ordre de l'empereur Louis. Mais nous n'aurions pas à constater de changement dans la nature et le mécanisme de l'institution. Elle subsistera, sans se modifier encore, sous le règne de Charles le Chauve. Hincmar, qui en donne comme la théorie dans son De Ordine palatii, ne fait que résumer les règles administratives en usage au temps de Charlemagne. Il nous laisse supposer qu'elles ne furent modifiées ni sous son fils ni sous son petit-fils[137]. Nous connaissons en particulier dans ses moindres détails le plus célèbre des conventus que tint Charles le Chauve, celui qu'il réunit à Kiersy-sur-Oise en 877, quelques semaines avant sa mort. Or il ne s'y passa rien que nous ne retrouvions dans les assemblées des règnes précédents. Le prince demande et reçoit des avis, mais c'est lui qui décide et qui annonce au peuple sa volonté[138].]

 

[4° CONCLUSION[139].]

 

[De ce qui précède] nous pouvons dégager les vérités suivantes :

1° [On peut remarquer tout d'abord qu'il n'existe] .aucun texte législatif sur la matière. [Nous ne lisons] rjen dans aucune des lois barbares ni dans les Capitulaires. Ce n'est donc pas, en tout cas, une institution légiférée. C'est une pratique, devenue peu à peu un usage et une institution.

2° Sous Clovis, sous ses fils, sous ses petits-fils, nous æ trouvons rien que des réunions militaires. Sous Clotaire II, Dagobert Ier, Clovis II, [on trouve] quelque chose [qui ressemble à des assemblées] : mais ce sont des assemblées de grands, chacun étant suivi de ses hommes, et alors s'établissent des conférences, Sous Pépin d'Héristal, [il y a à la fois] des réunions de l'armée et une consultation des chefs, (du moins si l'on en croit les Annales de Metz, qui probablement représentent plutôt ce qui se passe au IXe siècle). Sous Pépin le Bref, les réunions [sont] surtout militaires. [Il en est] à peu près de même sous Charlemagne. Le caractère militaire s'efface un peu sous Louis le Pieux et sous Charles le Chauve.

5° La réunion militaire est le germe premier et reste le principal élément de l'institution.

4° Il y avait un conventus chaque année ; si ce n'était une règle absolue, c'était du moins une habitude[140] ; mais ce qui marque bien que ce n'était pas tout à fait une règle, c'est qu'il y a des années où le conventus ne se réunit pas.

5° Jamais le conventus, comme l'armée elle-même, ne se réunit sans un ordre du roi. Les expressions ordinairement employées sont rex habuit placitum, rex tenuit conventum. Jamais le conventus ne s'assemble de lui-même. Ces expressions ne signifient pas seulement que le roi préside les réunions : c'est lui qui les convoque. Aussi ces termes sont-ils quelquefois remplacés par ceux-ci : le roi ordonna à tous de venir vers lui, ad se venire præcepit, adesse jussit, coire jussit[141]. Pas une fois [on ne lit] une expression qui indique une assemblée se réunissant spontanément et par son droit.

6° La réunion n'a pas lieu à des époques réglées ; c'est le roi qui décide en quel mois de l'année et à quel jour elle s'assemblera. La date de chaque conventus est le jour fixé par le roi.

7° Elle ne se tient pas en un lieu déterminé d'une manière constante. C'est le roi qui fixe chaque fois le lieu du rendez-vous. Elle se tient toujours à l'endroit où est le roi, auprès et autour de lui. On ne rencontre jamais une seule assemblée sans le roi.

8° La réunion a toujours lieu[142] auprès d'un palais ou d'une villa royale. Attigny, Worms, Francfort, Thionville, Duren, Aix-la-Chapelle, Ingelheim, Kiersy, sont des villæ du roi. Ainsi la réunion se tient sur un sol qui est propriété privée du prince[143]. Rien ne montre un centre national où la nation tiendrait ses assises. Ceux qui feraient cette supposition auraient contre eus les textes.

9° La foule campe dans les environs du palais. C'est dans le palais que le roi réside ordinairement. Les chefs sont au palais[144].

10° Aller au conventus n'est pas pour les hommes un droit : c'est une obligation, adesse jussi sunt. Y assister, c'est faire acte de soumission, de déférence, de fidélité. Aussi les étrangers et les vaincus y doivent-ils venir aussi bien que les Francs.

11° [Tous les grands doivent s'y rendre], les évêques et les abbés aussi bien que les guerriers et que les comtes, par la raison que les ecclésiastiques aussi doivent le service de guerre et le service de conseil.

12° Les hommes s'y rendent par groupes obligés, c'est-à-dire les hommes de l'évêque sous leur évêque, et ainsi de suite, et les hommes libres sous le comte qui est leur chef.

15° Dans le palais le roi traite les affaires publiques, il s'occupe de tout ce qui concerne les intérêts du pays, de salute patriæ et de utilitate regni. Il juge, il prend des décisions. Il reçoit les ambassadeurs, il donne des instructions à ses agents. Il prend conseil aussi et délibère avec ses évêques et ses grands. Ces évêques et ces abbés sont des dignitaires qu'il a nommés et dont il se sert comme d'un instrument de gouvernement. Ces ducs et ces comtes ont été choisis par lui et sont toujours révocables par lui ; derrière eux sont ses vassaux qui : détiennent ses domaines, tous sont ses fidèles d'une façon spéciale, et doivent lui donner leurs avis et recevoir ses volontés. Quant à la foule que chacun de ces grands, a amenée à sa suite, elle peut bien former une apparence de peuple ; mais on ne la consulte pas : elle ne délibère, ni ne discute, ni ne vole. A peine le roi lui demande-t-il parfois, s'il le veut, ses acclamations. [Il arrivait aussi, et cela devint plus fréquent au IXe siècle, que le roi adressât au peuple une allocution[145]. Il lui donnait des conseils, lui faisait des réprimandes, au point que parfois son discours prenait le ton d'un sermon. Mais le peuple n'avait jamais à répondre à ce discours du roi.]

14° [Cette assemblée enfin, réunie par le roi, est congédiée par le roi], populus ad sua ire dimissus. Le peuple était venu sur l'ordre de l'empereur, il ne pouvait se retirer que sur un ordre nouveau. S'il y avait guerre, l'empereur, le faisait marcher à l'ennemi ; autrement il lui donnait la permission de rentrer dans ses provinces.

[On remarquera la ressemblance qui existe entre ce conventus generalis et celui des derniers temps de l'époque mérovingienne. C'est le même nom, ce sont les mêmes formules. L'assemblée a toujours à s'occuper de salute patriæ et de utilitate regni. Elle est entre les mains du roi, qui la convoque, et la convoque chez lui. Comme au VIIe siècle, ces conventus ne sont que. des réunions de grands, fonctionnaires royaux, et s'il y a un peuple, c'est que ces grands ont une suite nombreuse[146].]

Mais le conventus ne décide pas, n'agit pas. Il ne paraît être là que pour recevoir les ordres du rot et entendre son annuntiatio. Apparemment parce que nul n'avait dans l'idée qu'il en pût être autrement. [Ni les grands ni le peuple ne délibèrent à l'écart du roi et ne lui exposent leur volonté. Le roi prend conseil des uns : il profite de la présence de l'autre pour se montrer à lui, lui notifier les décisions prises, réclamer plus tôt son obéissance et se faire volontiers acclamer. Plus tard, comme sous les Mérovingiens, l'assemblée a pu devenir un élément d'agitation et la faiblesse des rois y accroître la force des grands. Le prince parlera moins et écoutera davantage. Mais, à l'état normal, sous Pépin, sous Charlemagne, même sous Louis le Pieux et sous Charles le Chauve, le conventus n'est que le rendez-vous de tous ceux qui aident le roi à administrer et qui le suivent au combat.]

Peut-être ce peuple, par le seul fait de sa présence, aurait-il été tout-puissant. Mais il aurait fallu qu'il voulût l'être, et d'abord qu'il pensât à l'être. Celte grande réunion ne représente que l'obéissance : qui n'est pas un fidèle sujet n'y vient pas. Elle pourrait faire opposition ; mais, suivant les idées de ces hommes, l'opposition se marquerait plutôt par l'absence. Elle n'est pas une garantie de liberté : les hommes feraient plutôt consister la liberté à la supprimer.

On voit bien que de telles réunions deviendront hostiles à la royauté le jour où les évêques et les comtes seront devenus indépendants d'elle. Mais aussi longtemps que ces mêmes hommes seront ses premiers serviteurs, elles ne devront être qu'un moyen de gouvernement. Elles étaient un procédé commode pour faire parvenir au pouvoir central les forces et l'argent des Sujets, et pour faire descendre vers les sujets les volontés et les inspirations du pouvoir central. Elles étaient la centralisation même sous sa forme la plus rigoureuse et la plus dure, puisque tous les hommes libres de l'empire devaient chaque année se rendre en personne auprès du maître.

 

 

 



[1] Continuateur de Frédégaire, c. 120 [37, Krusch], Bouquet, V, 2.

[2] Annales Mettenses, année 754, Bouquet, V, 355.

[3] Continuateur de Frédégaire, c. 125 [42]. — Annales de Metz. — Annales Tiliani, année 761. — On notera que les trois chroniqueurs emploient les trois mots placitum, conventus, synodus pour désigner une même chose. Les Annales de Lorsch emploient le terme synodus ; les Annales d'Éginhard appellent cette même réunion un generalis conventus.

[4] Continuateur de Frédégaire, 125. Sur le sens du mot hostiliter, cf. capitulaire de 813, arl. 10, p. 171. — Les Annales de Lorsch et les Annales Tiliani disent seulement : Pippinus cum exercitu iter peragens. Celles de Metz : Cum exercitu ad Ligerim venit. Les Annales d'Éginhard ne parlent aussi que d'une armée.

[5] Nous pourrions citer encore comme ayant un caractère militaire un conventus de 763 ; Éginhard, Annales, On voit bien ici que le oonventus de la première partie de la phrase et l'exercitus de la seconde sont une même chose, et qu'il n'y a pas autre chose qu'une guerre. Voir comment s'exprime sur le même fait le Continuateur de Frédégaire, c. 130 [47]. Annales de Lorsch, eodem anno. Enfin les Annales de Metz appellent cette même réunion un placitum generale Francorum, sans parler d'autre chose que de l'expédition militaire.

[6] Continuateur de Frédégaire, c. 132 [49], Bouquet, V, 7.

[7] Commoto omni exercito Francorum. L'expression commovere ou promovere exercitum signifie ordonner la levée militaire ; commovere omnem exercitum, ordonner une levée générale.

[8] Continuateur de Frédégaire, c. 132 [49], Bouquet, V, 7.

[9] La réunion de 767 est décrite sous les mêmes traits par les autres annalistes. Les Annales d'Éginhard l'appellent conventus in campo et ne parlent pas d'autre chose que de la guerre. Les Annales de Metz appellent cette réunion conventus Francorum in campo magii ; elles ne signalent pas qu'il s'y soit fait autre chose qu'une expédition militaire. Les Annales de Lorsch l'appellent synodus in campo. Les Annales Tiliani s'expriment de même. — On notera qu'Éginhard, les Annales de Lorsch et les Tiliani disent que cette réunion eut lieu au mois d'août, ce qui n'empêche pas qu'on l'appelle un campus madius.

[10] Annales de Lorsch, année 773. — Annales Tiliani. — Annales Guelferbytani et Nazariani, Pertz, 1, 40. — Annales de Metz. — Chronique de Moissac. — Les Annales d'Éginhard appellent simplement cette réunion exercitus.

[11] Cela est bien marqué dans les Annales de Lorsch, d'Éginhard, de Moissac ; il y avait eu à Thionville un conseil d'optimates, et la guerre avait été décidée avant la réunion des soldats à Genève.

[12] Annales de Lorsch. — Éginhard, Annales. — Chronique de Moissac. — Annales Tiliani.

[13] Eginhard, Annales, année 775.

[14] Les autres Annales ne parlent pas non plus d'autre chose que de guerre. Annales de Lorsch. De même les Annales Tiliani. Chronique de Moissac. Annales de Metz. — J'incline à penser que le placitum de 776 n'est pas non plus autre chose qu'une réunion de l'armée (Annales de Lorsch). Éginhard dit à peu près de même. Il est vrai que les Saxons, ne résistant pas, firent une soumission complète ; cela fait dire à plusieurs annalistes : Eo anno magi campus ad Wormatia et inde in Saxonia, jam sine bello (Annales Guelferbytani et Nazariani) ; mais cette réunion n'en avait pas moins la guerre pour objet, et ce Champ de Mai était bien la réunion d'une armée. Le Poeta Saxo, I, 179-202, racontant plus longuement et distinguant mieux les différents actes, écrit qu'il y eut d'abord à Kiersy un conseil de proceres où Charlemagne résolut la guerre, puis à Duren un conventus populi, c'est-à-dire une réunion de l'armée.

[15] Éginhard, Annales, année 777.

[16] Padrabrunna n'était pas autre chose que la source de la Padra ou Pader.

[17] Nous avons vu plus haut des exemples de ce sens de populus dans la langue mérovingienne [Monarchie franque]. Ajoutons-y quelques exemples du IXe siècle. La Chronique de Moissac dit qu'en 812 Charlemagne envoya tres scaras, trois corps d'armée, dans le pays des Slaves Willzes ; mais, ceux-ci ayant fait leur soumission, l'armée revint. Qu'on lise dans l'Astronome, c. 48, les événements du Champ du Mensonge en 853, on remarquera que les différentes armées sont appelées en même temps copiæ, valida manus, acies, et populus. Dans la Chronique de Saint-Bertin, année 834, p. 15 et 14, on notera que l'armée de Pépin est appelée d'abord exercitus (p. 15), puis populus (p. 14), et que l'armée de Louis le Germanique qui s'avance en France est désignée par les mots populi multitudo (p. 14). Le même chroniqueur, en 854, p. 84, parlant de l'armée de Charles le Chauve qui ravage l'Aquitaine, appelle cette armée ejus populus. Dans Nithard, III, 4-7, on remarquera que les deux armées de Charles et de Louis sont appelées exercitus, plebs et populus. A Fontanet, Francorum innumerus populus acie gladii feritur ; Adon de Vienne, VII, 54.

[18] D'ailleurs les Saxons ne firent pas de résistance et, effrayés apparemment de l'arrivée de cette multitude de guerriers, ils firent tous leur soumission. Il résulta naturellement de là que le conventus de guerre se changea en un conventus de paix où les Saxons vinrent faire acte d'obéissance. — Eginhard, Annales. Annales de Lorsch, eodem anno. De même, Chronique de Moissac. Annales de Fulde.

[19] Annales Laureshamenses, dans Pertz, I, 31, année 777. Chronique de Moissac, eodem anno. — Nous avons vu plus, haut, en 776, dans les Annales Nazariani : Ea anno magii campus ad Wormatia et inde in Saxonia.

[20] Annales Petaviani, Bouquet, V, 13. — Vita S. Remigii ab Hincmaro, c. 31 (Migne, I, 1156).

[21] De là le français camp, et l'un des sens du mot campagne, et encore le mot champion.

[22] Déjà dans l'ancienne langue latine ; Sidoine, Carmina, V, Panegyricus Majoriano, vers 439. —Annales de Lorsch, année 783.

[23] Grégoire de Tours, X, 10. — Capitulaire 806, De divisione imperii, art. 14. — Capitulaire de 819, art. 10, Borétius, p. 285. — Capitulaire de 805, Additum Legi Ripuariæ, art. 7, p. 118.

[24] Annales Tiliani, année 780 (779).

[25] Annales Nazariani, année 779. Les Annales de Lorsch disent simplement : Iter peractus est partibus Saxoniæ ; et la Chronique de Moissac : Perrexit in Saxonia. — Éginhard appelle cette réunion conventus generalis, mais marque bien que ce n'est qu'un exercitus.

[26] Annales de Fulde, année 780. Annales Nazariani. Annales Pelaviani. Annales Tiliani. Éginhard, même année. Annales de Lorsch. Chronique de Moissac. Annales de Metz. — Dans ces différentes manières dont les annalistes s’expriment sur un même fait, on notera que trois d'entre eux appellent exercitus ce que deux autres appellent synodus, et que le synodum tenere des Annales de Lorsch est rendu par castra metari dans Éginhard.

[27] Chronique de Moissac, année 782. — Annales Petaviani. — Annales Tiliani. — Annales de Lorsch. — Éginhard, ici encore, rapproche le conventus de l'exercitus, Annales. — Il est vrai que les Saxons ne luttent pas ; d'où il suit que, conventu completo, Charles revient en Gaule.

[28] Annales Petaviani, année 795. — Annales Tiliani. — Annales de Lorsch. — Éginhard, Annales. — Annales de Metz.

[29] Capitulare missorum, de 802, art. 18, Borétius, p. 101. — Comparer un autre capitulaire de 802, art. 7 Borétius, p. 95, où exercitale placitum est remplacé par hostile bannum, les deux expressions désignant la même chose.

[30] Capitularia, édit. Borétius, p. 136, art. 3.

[31] Capitulare de exercitu preeparando, de 807, Borétius, p. 134, 135 ; art. 1 et 3.

[32] Capitulare incerti anni, Borétius, p. 206, art. 4.

[33] Capitulare Aquisgranense, anni incerti, art. 9, Borétius, p. 171.

[34] Capitulaire de 811, art. 3, Borétius, p. 166.

[35] Karoli ad Fulradum abbatrm epistola, dans Jaffé, Liber carolinus, p. 347, ou dans les Capitulaires de Borétius, p. 168. On peut admettre que cette lettre adressée à Fulrad n'est qu'un exemplaire d'une circulaire générale adressée aux évêques, aux abbés et aux comtes. — Ce Fulrad était abbé de Saint-Quentin. La lettre a été écrite entre 804 et 811.

[36] On peut rapprocher de la lettre à Fulrad une lettre de Loup de Ferrières écrite en 851, n° 113.

[37] Nous avons pris nos exemples sous Pépin et Charlemagne ; on en trouve d'autres, moins nombreux à la vérité, sous Louis le Pieux et Charles le Chauve. Dans les Annales de Saint-Bertin, à l'année 832, p. 7, il y a un placitum qui n'est visiblement que la convocation de soldats ; p. 8, le roi indique un placitum generale où tous doivent se rendre en tenue de guerre, hostiliter. Mêmes Annales, année 867, p. 106.

[38] Borétius, p. 168.

[39] Année 781 : Annales Pelaviani, Bouquet, V, 15. — ; Année 764 : Annales de Lorsch. — Année 790 : Annales Pelaviani, Bouquet, V, 16. — Année 790 : Annales de Lorsch.

[40] Vita S. Salvii, c. 17, Bollandistes, 26 juin, p. 205, Bouquet, III, 647. — La date de ce conventus est difficile a établir. Le nom de Carolus se trouve souvent dans le récit, mais tantôt il est accompagné du titre de dux et tantôt du titre de rex. Il s'agit donc ou de Charles Martel ou de Charlemagne. Dom Bouquet affirme qu'il s'agit de Charles Martel, et le plaid se placerait à une date inconnue entre 717 et 742. Papebroch, éditeur de cette Vie dans les Bollandistes, penche pour Charlemagne, à cause du mot rex. Dom Bouquet réplique que rex est pour dux, erreur qui se rencontre chez ceux qui ont parlé de Charles Martel, et que d'ailleurs, à la ligne plus haut, l'écrivain a écrit ubi dux residebat. — Nous pensons, après lecture attentive de cette Vie, que l'hagiographe lui-même a confondu les deux personnages. De Charles, duc des Francs, et de Charles, roi des Francs, il ne fait qu'un même homme ; cela est surtout visible aux chapitres 12, 13, 14, où il lui donne à la fois les deux titres. Le Charles du commencement me paraît être Charles Martel, sous qui commence la carrière du saint (c. 2 et suiv.). Puis quand le saint a péri assassiné par Génard et Winegard, le Charles qui punit les meurtriers est peut-être encore Charles Martel, peut-être Charlemagne ; sur ce point j'hésite. Mais plus tard, aux chapitres 16 et 17, c'est-à-dire au moment du plaid dont nous avons à parler, je crois qu'il ne peut être question que de Charlemagne. Ce plaid se tint à Valenciennes ; car dans notre récit il est question d'un serment prêté sur le tombeau du saint ; or le tombeau de Salvius était dans le pays de Valenciennes. Charlemagne tient, en effet, à Valenciennes un plaid en 771 (Annales Laurissenses, Tiliani, Fuldenses, Mettenses, même année), et je ne connais pas d'autre plaid qui se soit tenu dans le même lieu avant celui qui eut lieu sous Charles le Chauve en 855. — On serait plus assuré de la date si l'on connaissait l'année de la mort du saint ; mais l'écrivain ne donne aucun renseignement sur ce sujet. S'il fallait en croire Sigebert de Gembloux, Salvius ne serait mort qu'en 801 (Bouquet, V, 378) ; mais les érudits regardent cette date comme impossible, à cause des premiers chapitres de la Vie du saint où il est parlé visiblement de Charles Martel. — J'incline donc, malgré l'autorité de dom Bouquet, à placer le jugement dont il va être question, dans le plaid tenu à Valenciennes en 771.

[41] Miracula S. Goaris, c. 4. Mabillon, Acta Sanctorum, II, 291. Bouquet, V, 454.

[42] Éginhard, Annales, année 785, in fine. Annales Laureshamenses, année 781, Pertz, I. 32, Bouquet, V, 27. Chronique de Moissac, année 786, Bouquet, V, 72.

[43] Éginhard, Annales, année 788. Annales de Lorsch, même année, Bouquet, V. 46.

[44] Chronique de Moissac, année 702, Bouquet, V, 73. Éginhard, Annales. Annales Laurissenses, Annales Fuldenses, Annales Tiliani, même année.

[45] Chronique de Moissac, année 817, Bouquet, VI, 172 ; Thégan, c. 22. Cf. Éginhard, année 818, qui ne parle pas d'assemblée.

[46] Éginhard, Annales, année 820. L'Astronome, c. 33.

[47] Éginhard, Annales, année 828. L'Astronome, c. 42.

[48] Vïta S. Salvii, c. 17. — Notre pensée est que campus a ici le même sens que l'expression campus martius ou campus madius.

[49] Notons que tout cela était conforme à la procédure ordinaire. Déférer le serment était une véritable condamnation, en ce sens que, dans les idées du temps, si l'homme était coupable, le faux serment devait entraîner sa mort ; et s'il refusait le serment, il s'avouait coupable.

[50] Miracula S. Goaris, c. 46, dans Mabillon, Acta Sanctorum ordinis Benedicti, II, 291, dans dom Bouquet, V, 454.

[51] Annales Laureshamenses, Pertz, I, 32 ; Bouquet, V, 27. — La Chronique de Moissac, année 786, Bouquet, V, 72, s'exprime dans les mêmes termes. — Les Annales d'Éginhard parlent de la révolte et du châtiment, mais ne mentionnent même pas l'assemblée. Les autres annalistes n'en disent rien.

[52] Éginhard, Annales, année 788.

[53] Il est bon de noter que ad regis præsentiam forment une expression ordinairement employée pour désigner le tribunal du roi.

[54] Annales Laurissenses, Pertz, I, p. 172 ; Bouquet, V, 46.

[55] Les Annales Tiliani sont, avec plus de brièveté, d'accord avec les Laurissenses, et représentent surtout cette réunion comme une réunion de fideles. La Chronique de Moissac fait surtout ressortir le trait qu'il y eut là la présence d'hommes étrangers à l'État franc, c'est-à-dire de Lombards, de Saxons, de Bavarois ; et la preuve que le chroniqueur n'entend pas par là que tous ces peuples vinrent à Ingelheim, c'est qu'il ajoute qu'après cela Charlemagne se rendit en Bavière, à Ratisbonne.

[56] Annales Laureshamenses, Pertz, I, 55. — La Chronique de Moissac s'exprime textuellement dans les mêmes termes ; l'un des deux annalistes a copié l'autre, ou tous les deux ont copié une source commune. Les deux textes n'ont que la valeur d’un seul document.

[57] Éginhard, Annales, année 792. — Les Annales Laurissenses minores n'ont pas un mot non plus sur l'assemblés (Pertz, p. 119). On remarquera que le texte qu’a publié dom Bouquet, V, 48, 2e colonne, n'est pas dans le manuscrit ; aussi Pertz ne l'a-t-il pas admis. — Pas un mot non plus d'une assemblée dans les Annales Pelaviani, dans les Tiliani, dans les Fuldenses, dans les Mettenses.

[58] Annales Laureshamenses, Pertz, I, 35. La Chronique de Moissac répète textuellement la même phrase. On ne supposera sans doute pas que dans cette phrase populus signifie la population entière ; Charlemagne n’était pas assez riche pour combler tous les hommes libres d'or, d'argent, d'étoffes de soie et de présents de toute espèce.

[59] Eginhard, Annales, année 818.

[60] Vita Ludovici, c. 29. — Annales Fuldenses, année 818.

[61] Thégan, c. 22.

[62] Chronique de Moissac, année 817, Bouquet, V, 172.

[63] Formulæ impériales, édit. Zeumer, n° 8, p. 293, Rozière, n° 40 ; Sickel, Acta Ludovici, n° 171 : Pro qua infidelitate, juxta procerum nostrorum seu cunctæ nobililatis Francorum generale judicium, dignam subierunt sententiam. — Les mots cunctæ nobilitatis Francorum ne sont que le développement des mots procerum nostrorum ; les grands du roi et la noblesse des Francs étaient à cette époque une seule et même chose.

[64] Éginhard, Annales, année 820. — Ibidem, année 828. — De même l'Astronome, c. 42, mentionne bien un conventus publicus, mais ne dit pas que ce fut ce conventus qui jugea.

[65] Nous avons parlé plus haut de l'assemblée qui se tint à Braisne en 754. Nous savons qu'il s'en tint une autre à Compiègne en 757 (Annales Tiliani, Einhardi, Mettenses).

[66] Continuateur de Frédégaire, c. 125.

[67] Éginhard, Annales, année 761.

[68] Continuateur de Frédégaire, c. 125.

[69] Continuateur de Frédégaire, c. 125 : Pro salutem patrie et utilitatem Francorum tractandum. — Ces mots, que l'on rencontre assez souvent dans les textes, ne doivent pas se traduire par le salut de la patrie. D'abord, dans la langue du temps, le mot patria n'avait pas le sens que nous attachons depuis quatre siècles au mot patrie, ni celui que les anciens Romains y attachaient ; il ne signifiait pas autre chose que le pays. Puis il est bien certain qu'en 761 le salut de la patrie n'était pas en jeu ; lisez le chapitre de Frédégaire et vous verrez que la révolte de Waïfer n'a eu lieu qu'un peu plus tard, et que, si un placitum a pu avoir pour objet le salut de l'État franc, c'est celui qui a eu lieu quelques mois après sur la Loire. Les mots pro solide patriæ formaient une sorte d'expression reçue et conventionnelle pour signifier d'une manière générale l'intérêt de l'État. C'est ainsi que le même écrivain disait au c. 123 : Pippinus legationem mittens Constantinopolis pro salutem patrie.

[70] Voir la phrase entière du Continuateur de Frédégaire, c. 125.

[71] Annales Mettenses, année 761, Bouquet, V, 558.

[72] Armée 763 : Annales Tiliani. Éginhard, Annales. Annales Laurissenses Majores. Annales Mettenses. — Année 764 : Eginhard, Annales. Annales Laurissenses majores.

[73] Année 765 (Annales d'Éginhard. Annales Laurissenses majores).

[74] Vita S. Goaris, c. 44 ; Mabillon, Acta Sanctorum, II, 298 ; Bouquet, V, 454.

[75] En 766, le plaid se tint à Orléans ; ce fut un plaid militaire, un exercitus ; le Continuateur de Frédégaire. c. 151, emploie les mots exercitus et campus madius. En même temps le même chroniqueur note un trait sur lequel nous aurons occasion de revenir [c. 13, § 1].

[76] Annales Laureshamenses, Pertz, I, 32, année 782.

[77] Chronique de Moissac. Éginhard, Annales, année 782.

[78] Éginhard, Annales, année 782.

[79] Éginhard, Annales, année 782. Cf. Poeta Saxo, II, 20.

[80] Éginhard, Annales, année 782

[81] Même observation sur le plaid de 780, tenu également en Saxe (Éginhard, Annales Laurissenses majores). — Même observation encore sur le plaid de 785 tenu à Paderborn (Éginhard, Annales).

[82] Éginhard, Annales, année 787. — Cf. Annales Laurissenses majores.

[83] Éginhard, Annales, année 787.

[84] Annales Mettenses, année 790.

[85] Nous ayons parlé plus haut du conventus de 792. — En 795, il y en eut un à Ratisbonne (Chronique de Moissac, année 793). Annales Laureshamenses, Pertz, I, 35.

[86] Eginhard, Annales, année 794.

[87] Voir Éginhard, Annales, année 794. Annales Tiliani, Laurissenses majores, Fuldenses, Mettenses, Chronique de Moissac, même année. Tous ces annalistes, sauf Éginhard, parlent seulement du concile des évêques, parce que c'est la seule chose qui les ait frappés ; il n'en est pas moins vrai que ce concile n'est qu'une fraction du conventus generalis.

[88] Capitulaire de 794 (Borétius, p. 75). Actes du concile (Mansi, XIII, 884).

[89] Éginhard, Annales, année 795. — Nous avons dit plus haut que more solemni signifie suivant la coutume ordinaire. — En 799, le roi marchant contre la Saxe tint son placitum à Fremersheim sur le Rhin (l'Astronome, c. 9, Bouquet, VI, 91).

[90] Cela n'est pas dit formellement par Éginhard, mais cela ressort de tout son récit de l'année 797.

[91] Eginhard, Annales, année 800.

[92] Chronique de Moissac, année 800.

[93] Chronique de Moissac, année 800.

[94] Il n'est mentionné ni par les Annales d'Eginhard, ni par les Tiliani, ni par les Laurissenses, ni par les Fuldenses, ni par les Mettenses, ii est signalé seulement par les Laureshamenses et par la Chronique de Moissac qui s'expriment dans les mêmes termes. Alcuin le mentionne aussi. Lettres, édit. Wattenbach, n° 191, p. 673.

[95] Cela se voit nettement si l'on rapproche ces deux phrases des Annales Laureshamenses : 1° Mense octimbrio congregavii universalem synodum, et ibi fecit episcopos, etc. ; 2° douze lignes plus bas, interim quod ipsum synodum factum est, congregavit duces, comites, et reliquo christiano populo. Il y eut donc à la fois la réunion des deux ordres, ecclésiastique ot laïque, par conséquent un conventus generalis. — De même dans la Chronique de Moissac.

[96] Annales Laureshamenses, année 802, Borétius, p. 105. — Mêmes expressions dans la Chronique de Moissac, Bouquet, V, 80.

[97] Annales Laureshamenses.

[98] Annales Laureshamenses.

[99] Les Annales S. Amandi (Pertz, I, 14 ; Bouquet, V, 29-30) ajoutent que dans cette réunion Charlemagne obligea tous les assistants à lui jurer le serment de fidélité.

[100] Éginhard, Annales ; Annales Tiliani, Laurissenses, Mettenses.

[101] Le capitulaire est daté du 6 des ides de février.

[102] Conventum habuit imperator cum primoribus et optimatibus Francorum, dit Éginhard, Annales, année 806 ; et les mêmes termes se retrouvent chez tous les autres annalistes en parlant de ce même conventus.

[103] Annales Laurissenses.

[104] Divisio regnorum, de 806, Baluze, I, 439 ; Pertz, 1, 140 ; Borétius, p. 126.

[105] Divisio regnorum, de 806, Baluze, I, 439. — Remarquer que le verbe optare, qui n'était pas exactement synonyme de cupere, exprime en latin, non un simple désir ou un vœu, mais un choix, une résolution, une volonté.

[106] Chronique de Moissac, année 807.

[107] Annales Laurissenses majores, année 811. Éginhard, Annales.

[108] Annales Laurissenses majores, année 811. Éginhard, Annales.

[109] Eginhard, Annales, année 812.

[110] Eginhard, Annales. — Les Laurissenses s'expriment de même.

[111] L'Astronome ne dit non plus autre chose, c. 20.

[112] Thégan, c. 6.

[113] Thégan, c. 6.

[114] Thégan, c. 6.

[115] Thégan, c. 6.

[116] Chronique de Moissac, année 813, Bouquet, V, 83 ; Pertz, I. 510.

[117] Chronique de Moissac, année 813.

[118] Chronique de Moissac, année 813.

[119] Thégan ne mentionne aucune question qui ait été adressée, même pour la forme, au peuple. — Il est bon de noter qu'Éginhard, qui dans les Annales appelle cette réunion generalis conventus, la désigne dans l’Histoire de Charlemagne par les mots primoribus congregatis de toto regno Francorum (Vita Caroli, c. 20).

[120] Éginhard, Annales, année 814. — L'Astronome, c. 25.

[121] Chronique de Moissac, année 814, Bouquet, VI, 171. — Thégan n'en parle pas, ni Ermold.

[122] Éginhard, Annales, année 815 ; Thégan, c. 14 ; l'Astronome, c. 25.

[123] Chronique de Moissac, année 815.

[124] La Chronique de Moissac signale seulement que l'empereur eut à Compiègne un consilium cum episcopis, abbatibus et comitibus suis.

[125] Capitulaire de 817, Borétius, p. 270.

[126] Chronique de Moissac, année 817.

[127] L'Astronome, 35. Eginhard, Annales, année 822. Thégan, c. 29.

[128] Éginhard, Annales.

[129] L'Astronome, 35. — Eginhard.

[130] Éginhard. Annales, année 822. — L'Astronome, 35.

[131] L'Astronome compare ici Louis le Pieux à Théodose le Grand. Il ajoute que cette pénitence fut toute spontanée.

[132] Éginhard, Annales. — Cf. Vita Adalhardi, c. 51, Mabillon, IV, p. 315, Bouquet, VI, 278. Vila Walæ, Mabillon, IV, 490 et suiv.

[133] Agobardi epistolæ, n° 4, édit. Baluze, 1, 268, Bouquet, VI, 361.

[134] Hincmar, De Ordine palatii, c. 34.

[135] Hincmar, De Ordine palatii, c. 34.

[136] Agobardi epistolæ, Baluze, I, 98 ; Bouquet, VI, 358.

[137] Il faut ajouter qu'Hincmar n'est pas toujours d'une exactitude parfaite ; il résume trop.

[138] [Voir les Nouvelles Recherches sur quelques problèmes d'histoire, p. 440 et suiv.]

[139] [Cf. Compte rendu des séances de l'Académie des Sciences Morales et Politiques, t. CV, 1876, p. 612 et suiv. ; Revue des Deux Mondes, janvier 1876, p. 134 et suiv.]

[140] De là les expressions si fréquentes ut mos erat, secundum consuetudinem, more solemni, solemniter.

[141] On dit encore : Rex conventum habere statuit. Quelquefois on dit : Rex placitum condixit.

[142] Sauf quelques exceptions lorsqu'on se trouve en pays ennemi, comme en 782 et en 785.

[143] Quelques exceptions rares, par exemple l'assemblée de Nevers, qui n'est d'ailleurs qu'un rendez-vous de guerre, l'assemblée de Tours qui paraît s'être tenue sur les terres de l'abbaye.

[144] [On peut rappeler] l'exemple de Hilduin, qui, parce que l'empereur est mécontent de lui, est exclu du palais et contraint de demeurer sous la tente.

[145] [Voir plus loin, c. 11, § 2 et 4.]

[146] [Et encore c'est le roi qui règle l'importance de cette suite.] Dans le conventus de 830, Louis a ordonné aux grands de l'Ouest de venir sans suite nombreuse. L'abbé Hilduin qui a amené avec lui beaucoup d'hommes, hostiliter, est réprimandé, puni, et exclu du palais.