Les Italiens, plus que tous les autres peuples, ont toujours montré un goût extraordinaire pour les divertissements en plein air. La festa italienne d'aujourd'hui associée en général, comme dans l'Antiquité, à quelque cérémonie religieuse est pleine de gaîté : toilettes éclatantes, musique, danses, feux de joie, courses, mascarades, improvisations poétiques, rien n'y manque, et tout ce que nous savons des fêtes rurales de l'Italie antique nous porte à croire qu'elles avaient le même caractère de joyeuse animation. Tibulle nous en donne bien l'idée[1]. Il serait facile de trouver, dans les poètes du siècle d'Auguste, presque tous nés et élevés à la campagne, de nombreuses allusions à des divertissements analogues ; comme Virgile, ils aimaient la vie honnêtement occupée à un travail sain et entrecoupée de jeux, au milieu des vallées et des collines italiennes. Mais nous ne nous occuperons ici que des féries et des divertissements de la grande ville ; si nous avons mentionné les fêtes rurales c'est qu'on y retrouve en germe tout ce qui caractérise les réjouissances urbaines. Les fêtes du calendrier romain avaient pour origine le retour régulier de cérémonies religieuses chez le cultivateur romain le plus ancien. La cité grandissant, ces anciennes réjouissances agricoles perdirent beaucoup de leur simplicité et de leur naïveté primitives ; quelques-unes survécurent en qualité d'actes religieux ou sacerdotaux ; d'autres s'avilirent et se transformèrent en amusements licencieux ; mais la musique, la danse, les toilettes voyantes, les courses, les mascarades ou les jeux scéniques se retrouvent à la ville sous une forme ou sous une autre, des origines à la fin de l'histoire romaine. Le mot latin feriæ (féries) appartenait au vocabulaire de la loi religieuse (jus divinum). A strictement parler, il désigne un jour que le citoyen a consacré, en entier os en partie, au service des dieux[2]. De même qu'autrefois, à la ferme, tout travail cessait ce jour-là, à la ville on ne pouvait vaquer à aucune affaire publique. Cicéron définissant dans les termes de la vieille langue ce que prescrivait le ius divinum à propos des féries s'exprime ainsi : Feriis iurgia amovento, easque in familiis, operibus patratis, habento, ce qu'il explique ensuite comme signifiant que les citoyens doivent s'abstenir, ces jours-là, de tout procès et les esclaves de tout travail[3]. Cette idée d'un jour de repos ressemblait beaucoup à celle du sabbat juif et provenait d'une observance religieuse. Mais que Cicéron reproduise exactement les termes d'une vieille loi ou qu'il les invente, il ne se conforme certainement pas aux habitudes urbaines de son temps ; la soumission à des prescriptions aussi sévères était impossible dans la capitale d'un Empire comme l'Empire romain. A la ferme même on avait dû, déjà depuis longtemps, admettre des exceptions. Ainsi Virgile nous dit[4] : Quippe etiam festis quædam exercere diebus Fas et iura sinunt : rivos deducere nulla Religio vetuit, segeti prætendere sæpem, Insidias avibus moliri, incendere vepres, Balantumque gregem fluvio mersare salubri. De même à la ville, il était impossible que tout travail cessât durant les féries dont le nombre annuel s'élevait à plus de cent, y compris les Ides de chaque mois et quelques-unes des Calendes et des Nones. En fait, les choses s'étaient modifiées de deux façons depuis que la Ville et son territoire s'étaient rapidement étendus à l'époque des guerres puniques. On commença par négliger des divinités dont la vogue déclinait ou qui, en leur qualité de divinités champêtres, n'avaient plus aucune signification pour une population urbaine ; même au cas où les prêtres continuaient à célébrer les rites prescrits, tout le monde l'ignorait et personne ne s'en inquiétait[5]. En outre, il est douteux que l'État soit resté fidèle aux prescriptions religieuses qui fixaient les heures auxquelles il était permis de s'occuper d'affaires pendant les féries[6]. De plus, certaines fêtes restées populaires durèrent trois jours, ou même plus, au lieu d'un ; dans deux ou trois cas, comme nous le verrons, elles se prolongèrent pendant treize ou quinze jours pour laisser le temps nécessaire à des divertissements publics compliqués, tels que les courses de char et les représentations théâtrales que l'on comprenait dans le nom de ludi (jeux) ; ou bien, à la fête des Saturnales, qui se célébrait en hiver, on voulait que toutes les classes sociales eussent le temps de se distraire à leur aise dans les jours si courts de la fin de l'année et on y consacra sept matinées au lieu d'une. C'était évidemment là une manière de procéder beaucoup plus commode et plus populaire que de répartir les jours fériés un à un sur toute la durée de l'année et cela arrangeait les riches ambitieux qui cherchaient à gagner la faveur du peuple par des spectacles et des jeux organisés sur un si grand pied qu'il fallait plusieurs jours de suite pour en déployer toute-la magnificence. Ainsi l'ancien terme religieux de feriæ (féries) fut graduellement supplanté, dans le sens de jours de divertissements publics, par le mot de ludi (jeux) et finit par prendre le sens de vacances comme celles de nos écoliers[7]. Avant de parler des jeux, notre sujet principal, nous mentionnerons une ou deux anciennes féries qui semblent s'être toujours maintenues, au moins à l'usage des classes inférieures, qui y trouvaient une occasion de festoyer. L'une d'elles tombait aux Ides de mai ; on la célébrait au moment même où César fut assassiné en 44 A. C. C'était la fête d'Anna Perenna, antique et mystérieuse déité du cycle de l'année. Le bas peuple, nous dit Ovide[8], affluait alors au Champ de Mars et y passait la journée ; des couples de buveurs, hommes et femmes, dispersés çà et là y faisaient bombance. Les Mis s'établissaient en plein. air ; les autres dressaient des tentes ou construisaient de grossières huttes de branchages sur lesquelles ils étendaient leurs toges pour s'abriter. Ils buvaient en priant déesse de leur accorder autant d'années de vie qu'ils parviendraient à absorber de coupes de vin. Le caractère ordinaire de la testa italienne se retrouve ici ; on y chantait, avec force gestes, les airs qu'on avait pu attraper au théâtre — et jactant faciles ad sua verba manus — ; on y dansait, les femmes laissant flotter sur leurs épaules leur longue chevelure. Le résultat forcé de ces prouesses, c'est qu'on rentrait chez soi en état d'ivresse, à la grande joie des spectateurs. Ovide ajoute qu'il avait lui-même rencontré de ces ivrognes et qu'il avait vu une vieille femme traînant après soi un vieillard aussi ivre qu'elle. D'autres ébats populaires du même genre durent avoir lieu aussi dans d'autres occasions, par exemple aux Neptunalia où nous retrouvons la même curieuse coutume d'élever des huttes ou d'autres abris temporaires[9] ; mais la fête d'Anna est la seule dont nous ayons une description par un témoin oculaire. Des fameuses Lupercales en février, et d'autres fêtes qui ne disparurent pas entièrement et qui ne se transformèrent pas en ludi (jeux), nous ne connaissons que le rituel et nous ne saurions dire si elles étaient l'occasion de réjouissances populaires. Une fête fameuse du vieux calendrier religieux, celle des Saturnales, le 17 décembre, resta toujours en faveur et finit, avec l'assentiment unanime, par se prolonger durant sept journées[10]. Elle avait sans doute pour origine des réjouissances qui avaient lieu à la ferme au milieu de l'hiver à un moment où, les travaux d'automne terminés, lès hommes de condition libre et les esclaves avaient le temps d'en prendre à leur aise. Des coutumes aussi anciennes ont de la peine à disparaître et même ne disparaissent jamais, et tel fut le cas des Saturnales. Il est facile en effet de reconnaître, entre les Saturnales et la fête de Noël chez le paysan italien bien des points de ressemblance. Personne n'ignore quelques-uns au moins des usages qui caractérisaient les Saturnales, celui entre autres, en vertu duquel les maîtres régalaient leurs esclaves[11] : cela n'est pas sans analogie aves certaines coutumes des Grecs et passe même maintenant pour leur avoir été emprunté directement. On jouait à divers jeux, entre autre à celui du Roi, auquel nous avons vu le jeune Caton prendre part avec ses compagnons[12]. Sénèque nous dit que, de son temps, Rome tout entière semblait, ce jour-là, avoir perdu la tête. Venons-en maintenant aux vrais ludi que l'État avait organisés en leur donnant une durée et une importance toujours plus grandes. Les plus anciens et les plus solennels étaient les Jeux Romains ou Grands Jeux (Ludi romani aut Magni), qui, au temps de Cicéron, duraient du 7 au 19 septembre. L'origine en était le retour à Rome, à la fin de la campagne, d'une armée victorieuse ; le roi ou le consul avait alors à s'acquitter du vœu qu'il avait prononcé au début de la guerre. D'ordinaire il prenait l'engagement de donner au peuple, lors du retour de l'armée, des jeux qui portèrent à l'origine le nom de Ludi votivi, avant d'avoir été compris au nombre des féries célébrées à intervalles réguliers. Quand ils furent devenus annuels, tout divertissement promis par un général dut se placer à d'autres jours. Ainsi en 70 A. C. les jeux votifs en l'honneur du triomphe de Pompée précédèrent immédiatement les Jeux Romains de cette année[13], ce qui procura au peuple une trentaine de jours de vacances en tout. La date primitive des Jeux Romains était les Ides de septembre (13 sept.) ; c'était aussi celle du repas sacré de Jupiter (epulum Jovis[14]) et l'anniversaire de la dédicace du temple de Jupiter Capitolin ; tout le cérémonial était en relation étroite avec ce temple et le grand dieu qui y résidait. La procession triomphale se rendait, par la Voie Sacrée, au Capitole et de là au Grand Cirque où se célébraient les jeux. Le spectacle en devait être fort imposant. En tête s'avançaient des jeunes garçons et des jeunes gens, à pied et à cheval ; puis venaient les chars et les cochers qui allaient prendre part aux courses accompagnés d'une foule de danseurs et de joueurs de flûte[15] ; enfin paraissaient les images des divinités du Capitole portées sur des brancards (fercula). Le peuple romain aimait ces spectacles, ces processions qui semblent être Testés un des traits permanents des Jeux Romains, que ce fût ou non à l'occasion d'un triomphe ; il en fut de même pour d'autres, comme les Jeux Apollinaires et les Jeux Mégalésiens[16]. Ainsi se maintint l'idée que la grandeur et la prospérité de Rome étaient dues avant tout à ce Jupiter Très Bon et Très Grand qui, depuis les jours des Tarquins, avait veillé sur son peuple du haut de son temple au Capitole[17]. Les Ludi plebeii (jeux plébéiens) en novembre semblent avoir été la contrepartie populaire des Jeux Romains. L'organisation en était achevée à la fin de la République. Ils duraient du 4 au 7. Le jour central était, à l'origine, les Ides (le 13) ; ce jour-là, comme le 13 septembre, il y avait un epulum Jovis au Capitole[18]. Ils rappellent ce Flaminius qui construisit au Champ de Mars le cirque portant son nom ; champion des droits populaires, il fut tué peu de temps après à Trasimène et il est probable qu'en créant ce nouveau lieu de divertissements, il voulait assurer au peuple la jouissance d'un bâtiment qui ne lui rappelât pas l'aristocratie. Par malheur, l'histoire de ces jeux plébéiens nous est à peu près inconnue. Si les jeux plébéiens ont été institués immédiatement avant la seconde guerre punique, par contre trois autres grands jeux furent organisés au cours de cette même guerre sans doute pour soutenir le moral ébranlé de la population urbaine. Les jeux Apollinaires sont dus au vœu d'un préteur urbain en 212, au moment où le sort de Rome était en suspens ; ils se donnaient au Circus Maximus. Fixés primitivement en 208 au 13 Juillet, ils se prolongèrent dans la suite et durèrent 8 jours, du 6 au 13[19]. En 204 on décréta les Ludi Megalenses (jeux mégalésiens) en l'honneur de l'arrivée à Rome de la Magna Mater apportée de Pessinonte à Rome le 4 avril. Ils finirent par durer jusqu'au 10[20]. Enfin en 202 les Ludi Ceriales, qui existaient probablement déjà sous une autre forme, furent déclarés permanents et fixés au 19 avril ; ils prirent plus tard sept jours, du 12 au 19[21]. A partir de la fin de la guerre nous ne voyons pas qu'on ait établi plus d'une autre série de jeux permanents : les Jeux Floraux qui datent de 173. Le jour originaire était le 28 avril et l'occasion depuis longtemps, de grossières réjouissances populaires. Comme les autres jeux ils se prolongèrent et en vinrent à durer jusqu'au 3 mai[22]. Remarquons à ce propos que le mois d'avril se passait, presque tout entier, en féries ; les Ludi Megalenses, Ceriales et Florales, ne prenaient pas moins de dix-sept jours sur vingt-neuf. Quand Sylla voulut commémorer sa victoire de la Porte Colline, il institua les Ludi Victoriæ, à la date de la bataille, le 1er novembre. Il semble qu'ils furent maintenus après même que la plus grande partie de l'œuvre de Sylla fut devenue caduque ; Cicéron les mentionne, dans le passage des Verrines déjà cité, sous leur nom de Ludi Victoriæ, mais il n'en est pas souvent question ailleurs. Notons avant de décrire la nature de ces nombreux divertissements que les spectateurs ne payaient pas leur place ; l'Etat donnait ces jeux gratis, comme dépendant de certaines fêtes religieuses que son devoir était de perpétuer. On mettait de côté pour cela certaines sommes dont le montant variait. Ainsi en 217 A. C. pour les Jeux Romains, pour lesquels on avait dépensé jusque-là 200.000 sesterces, on en vota 333.333 parce que le nombre 3 était de bon augure et que l'Etat courait alors de grands dangers[23]. Il n'est question qu'une seule fois d'une collecte publique au profit des Jeux ; en 186 A. C., dit Pline, les bourses étaient si bien garnies, grâce sans doute à l'énorme butin rapporté de la guerre d'Orient, que chacun souscrivit une petite somme pour les jeux de Scipion l'Asiatique[24]. On se montrait de plus en plus exigeant en fait de magnificence, ce qui rendit nécessaire un subside ajouté aux sommes fournies par l'Etat. C'était d'ordinaire le magistrat chargé des jeux qui avait à y subvenir à lui seul ou avec l'aide de ses amis. Comme l'organisation de tous les jeux, sauf les Apollinaires, incombait aux édiles, ils prirent l'habitude, quand ils aspiraient à la préture ou au .consulat, de lutter entre eux de munificence. Dès l'an 176 A. C. le Sénat avait tenté de mettre des bornes à l'excès de ces dépenses personnelles. Ti. Sempronius Gracchus avait fait des frais énormes pour ses jeux ; il avait pressuré (on ne sait comment) les populations sujettes et celles des provinces pour défrayer les plaisirs du peuple romain[25]. Aucun décret du Sénat, en pareille matière, n'eut d'effet permanent ; les grandes familles dont les jeunes membres cherchaient à gagner la faveur populaire par leurs libéralités, étaient beaucoup trop puissantes pour se laisser contraindre à la modération. Aux derniers temps de la République, l'édile avait été forcé, de par ses fonctions même, de compléter la contribution de l'État ; pour y parvenir, il lui fallait contracter d'énormes dettes et il se voyait, dès le début de sa carrière politique, en proie à des embarras financiers. Cicéron, dans son de officiis[26], à propos de la libéralité, donne une liste des édiles qui s'étaient montrés généreux pendant la durée de leur charge. Il cite les deux Crassus, Mucius Scævola (homme, dit-il, plein de réserve), les deux Lucullus, Hortensius et Silanus ; il ajoute que, pendant son propre consulat, P. Lentulus surpassa tous ses prédécesseurs et fut imité par Scaurus en 58 A. C.[27] Cicéron lui-même eut à pourvoir aux Jeux Romains, Mégalésiens et Floraux pendant son édilité, mais il ne nous dit pas comment il s'y prit[28]. César fut contraint, sans aucun doute, d'emprunter largement, car ses dépenses d'édile furent énormes[29], et sa fortune personnelle était médiocre. Notre ami Cælius Rufus fut élu édile curule à l'époque, de sa correspondance avec Cicéron ; ses lettres nous donnent une idée exacte de l'état d'esprit d'un jeune ambitieux résolu à faire son chemin. Il se montre dans une agitation perpétuelle à propos de ses jeux ; il lui faut à toute force des panthères pour figurer dans une chasse ; il écrit lettre sur lettre à Cicéron, alors en Cilicie, pour le presser de les lui procurer. Quelle honte pour vous, lui écrit-il, quand Patiscus a envoyé dix panthères à Curion, de ne pas m'en procurer beaucoup plus[30]. Un gouverneur de province, ajoute-t-il avec insistance, peut faire tout ce qu'il veut ; que Cicéron fasse venir quelques hommes de Cibyra, qu'il écrive en Pamphylie où les panthères abondent et il aura tout ce qui lui manque ou plutôt tout ce qui manque à Cælius. Il lui arrive même, à la fin d'une lettre où il a rendu compte à Cicéron des affaires publiques les plus importantes, où il lui envoie des copies de sénatus-consultes (ad. Fam. 8, 8), de revenir à la charge. Cicéron raconte à ce propos à Atticus qu'il a reproché à Cælius son insistance à lui demander ce que sa conscience lui défendait ; qu'à son avis, il était contraire au devoir d'un gouverneur de province de contraindre les Cibyrates à fournir des panthères pour des jeux romains[31]. Il semblerait, d'après la même lettre, que Cælius avait en outre tenté d'obtenir de Cicéron d'autres mesures que celui-ci désapprouvait ; il s'agissait probablement d'extorquer de l'argent aux provinciaux au profit de ces mêmes jeux. Nous n'avons pas la lettre de Cicéron. à Cælius, mais nous croyons que Cicéron eut le courage de faire des reproches à son ancien disciple dont les réclamations incessantes avaient outrepassé tout ce que l'amabilité de Cicéron lui-même était capable de supporter. D'autres gouverneurs furent sans doute moins scrupuleux et l'Histoire naturelle a constaté que les Jeux Romains contribuèrent, dans une grande mesure, à diminuer le nombre des animaux sauvages dans les pays riverains de la Méditerranée et même à en anéantir certaines espèces. De nos jours, ce sont les chasseurs de gros gibier qui se chargent de ce genre de travail ; ils poussent plus loin, il est vrai, dans l'intérieur des terres ; mais le plaisir du massacre n'est plus à la portée que des riches amateurs qui chassent pour leur propre divertissement et non plus pour celui de la populace. Ainsi les citoyens avaient le droit d'assister gratis à ces jeux[32]. On devine comment le gouvernement romain fut, par suite, entraîné à des mesures qui eurent de si déplorables conséquences. Nous avons montré précédemment comment il y eut, à l'origine, connexité entre les jeux et certaines fêtes religieuses que l'État, ses prêtres et ses magistrats avaient le devoir de maintenir. Les Romains, comme tous les Italiens, aimaient les spectacles et les fêtes en plein air ; comme la population, qui avait beaucoup augmenté, était devenue plus impressionnable sous l'influence persistante des grandes guerres contre Carthage, il parut nécessaire de développer les anciens jeux et même d'en créer de nouveaux pour qu'elle conservât sa gaîté et sa bonne humeur, et il aurait été contraire à tous les précédents de faire payer au peuple ses plaisirs. Le gouvernement, comme nous pouvons l'inférer d'après l'histoire, semble avoir pris soin de ne pas aller trop loin dans cette politique de divertissements à outrance et il s'écoula quelque temps avant qu'aucun d'eux, sauf les Jeux Romains, devinssent annuels et se prolongeassent comme cela eut lieu plus tard. Le soudain afflux des richesses, après la grande lutte, fut responsable de ce mal, comme de tant d'autres fâcheuses tendances. Nous avons vu que le peuple lui-même fut eu mesure en 186 de verser une contribution et s'y montra disposé ; or maintenant les édiles avaient le moyen de placer avantageusement leurs capitaux dans des entreprises populaires qui devaient les rémunérer plus tard largement en leur permettant de s'élever à ces hautes magistratures et à ces gouvernements provinciaux où il était facile de refaire sa fortune. Les fâcheuses conséquences de cet état de choses sont aussi évidentes ici que dans le cas analogue des distributions de blé ; on dépensa des sommes énormes sans profit réel pour le peuple qui s'habitua, peu à peu, à regarder l'Etat comme responsable de ses plaisirs ainsi que de son alimentation. Ne nous hâtons pas cependant de con-dure qu'il y eut là de la part de l'Etat une politique préméditée. Il fut poussé par des courants dangereux en dépit des efforts occasionnels de quelques pilotes clairvoyants ; et il aurait fallu une intelligence plus pénétrante qu'il ne s'en trouvait alors pour discerner nettement la direction des courants et les écueils sur lesquels ils entraînaient l'Etat. Il nous reste à examiner la nature de ces divertissements et s'ils contribuèrent à l'amélioration et à l'éducation du peuple. A l'origine ce furent seulement des spectacles militaires, comme les Ludi Romani et spécialement des courses de chars à l'ancien Circus Maximus. Les Romains paraissent avoir eu toujours du goût pour les chevaux et pour les courses, quoique leur cavalerie ne soit jamais devenue une arme importante et n'ait jamais joué un rôle réellement efficace dans les opérations militaires. Il est probable que la position du Circus Maximus dans le Val Murcia[33] fut due à des courses de chevaux près de l'autel souterrain de Cousus déité des moissons ; le plus ancien calendrier romain mentionne des Zquirria (courses de chevaux), le 17 février et le 14 mars, sans doute en relation avec la préparation de la cavalerie pour la prochaine campagne ; le très vieux et curieux rite connu sous le nom de Cheval d'octobre comprenait une course de chars à deux chevaux, au Champ de Mars, à la fin de la saison de guerre. On y sacrifiait à Mars le cheval de gauche de d'attelage victorieux[34]. Les Ludi Romani consistèrent surtout en courses de chars jusqu'en 364 A. C. — époque du début des représentations théâtrales — avec d'autres évolutions ou exercices militaires tels peut-être que ce Ludus Troiæ des jeunes Romains décrit par Virgile au cinquième livre de l'Enéide. Nous ne connaissons pas le caractère des Ludi Plebeii tels qu'ils étaient à l'origine, mais il est probable qu'eux aussi commençaient par des circenses ; c'est le mot propre pour les courses de chars. Les Ludi Ceriales comprenaient certainement des circenses ; les représentations théâtrales ne firent partie de leur programme que sous l'Empire ; mais le 19 avril on avait l'étrange coutume de lâcher des renards dans le Cirque, des brandons attachés à la queue[35] ; cette pratique, très ancienne, sans aucun doute, est peut-être l'origine de ces venationes pour l'une desquelles Cælius demandait ses panthères. Tout ce que nous savons des trois autres jeux Apollinaires, Mégalésiens et Floraux, c'est qu'ils comprenaient des courses de chars et des représentations théâtrales ; il est probable que les premières figurèrent au programme dès le début. Il n'est pas nécessaire de décrire ici en détail ces courses de chars. Nous pouvons nous représenter cependant le Circus Maximus rempli d'une foule compacte de 150.000 spectateurs environ[36], les sénateurs à leur place réservée et le Consul ou un autre magistrat présidant ; les chars, ordinairement au nombre de quatre, peints à cette époque en rouge ou en blanc, les cochers portant les mêmes couleurs, sortent des carceres à l'extrémité du cirque voisine du Forum Boarium et du fleuve ; au signal donné ils s'élancent pour faire le tour d'une piste allongée, d'un kilomètre et demi environ, divisée en deux moitiés par une spina ; à l'extrémité de celle-ci il fallait tourner court, ce qui présentait quelque danger et donnait à la course son intérêt principal. Sept tours complets faisaient un missus, c'est-à-dire une course[37], et le nombre des courses en un seul jour variait suivant la saison et le matériel. La rivalité entre factions, qui fut plus tard si célèbre et dura pendant tout l'Empire, débutait à l'époque de Cicéron. Il en est peu question dans la littérature du temps : tout ce que nous en savons c'est qu'il y avait déjà deux couleurs rivales, le blanc et le rouge. Pline nous raconte l'histoire d'un propriétaire de chars, un certain Cæcina de Volaterres qui transportait à la ville des hirondelles peintes à ses couleurs et, en cas de victoire, les lâchait pour annoncer chez lui son succès[38]. Dans les grandes villes, la nature humaine semble réclamer des stimulants qui réveillent son intérêt ; sans cela les courses auraient risqué de paraître monotones. Y pariait-on ? Y jouait-on pour de l'argent ? Nous l'ignorons ; personne n'en a rien dit. Petit à petit, comme les capitalistes plaçaient de grosses sommes en chevaux et en cochers, les factions aux couleurs différentes se multiplièrent et l'on en vint à s'intéresser à leurs rivalités comme nous aux courses[39]. Les combats de gladiateurs ne faisaient pas encore partie des jeux ni des fêtes publiques, mais on peut en dire un mot ici parce que la populace était déjà disposée à y trouver son divertissement favori. Cicéron en parle, dans le Pro Sestio[40], comme d'un spectacle où toutes sortes de gens se pressent et où la multitude prend grand plaisir. La conséquence fut que les candidats aux magistratures saisirent toutes les occasions de recourir à cette façon d'amuser le peuple et Cicéron, durant son consulat, inséra dans sa loi de ambigu (de la brigue) une clause qui le leur interdisait pendant les deux années précédant l'élection. Jusqu'à l'an 105 A. C. des particuliers seuls[41] donnèrent des combats de gladiateurs, soit au Forum soit dans un des cirques ; cette année-là les consuls en organisèrent, mais il y a lieu de croire qu'ils étaient destinés. à enseigner aux soldats un meilleur usage de leurs armes. L'État avait alors grand besoin de soldats bien dressés ; Marius inaugurait un nouveau système de recrutement et d'armement et l'on nous dit que le consul Rutilius employa à l'instruction des soldats les meilleurs gladiateurs qu'il trouva dans l'école d'entraînement d'un certain Scaurus[42]. Si l'État avait su mettre à profit l'habileté des gladiateurs au maniement des armes pour faire d'eux des instructeurs militaires, il n'y aurait pas eu d'inconvénient à en entretenir une troupe. Mais le fait est qu'ils restèrent la propriété des particuliers et il devint impossible d'en limiter le nombre. Ce fut une menace perpétuelle pour la paix publique, comme nous l'avons vu en traitant de l'esclavage. Quant à l'usage fréquent qu'on faisait d'eux à cette époque dans les jeux funéraires il nous semble fort répugnant. Ces jeux étaient une antique cérémonie religieuse qu'on célébrait le neuvième jour après l'incinération et portaient le nom de Ludi Novondiales. Ils sont connus de tous grâce à Virgile qui eut l'heureuse idée d'en introduire une description au cinquième livre de l'Enéide, le jour anniversaire des funérailles d'Anchise, comme une sorte de reproduction romaine des jeux homériques. Naturellement Virgile y a omis les gladiateurs, mais longtemps avant lui, on avait coutume de profiter des funérailles d'un parent pour offrir au peuple des combats de gladiateurs afin de se concilier sa faveur[43]. C'est ainsi que le jeune Curion s'y ruina en 53 A. C. Cicéron y fait allusion dans une lettre à Curion[44] les avantages que vous tenez de la nature, du travail, de la Fortune, serviront plus que tous les combats de gladiateurs à vous ouvrir la voie de tout ce qu'il y a de plus élevé dans la République ; on est désabusé de ce prestige de la richesse qui permet pareille dépense où le mérite n'entre pour rien ; il n'est personne qui n'en soit las jusqu'à la satiété. La grossièreté de ces spectacles répugnait au goût raffiné de Cicéron ; mais les jeunes gens comme Curion, pour attachés qu'ils fussent au grand orateur, négligèrent de suivre ses salutaires conseils[45]. Nous arrivons maintenant à l'élément dramatique introduit dans les jeux, surtout pour chercher à nous rendre compte si, à l'époque de Cicéron, il eut quelque importance réelle dans la vie sociale du peuple romain. Le théâtre romain avait eu, avant le dernier siècle A. C., une grande histoire que nous ne saurions traiter ici en détail. Il avait toujours été possible aux organisateurs des jeux de mettre à la scène une tragédie ou une comédie, soit composée pour la circonstance, soit reprise avec des acteurs qualifiés et avec la musique nécessaire, et il paraît certain que les tragédies adaptées du grec (fabulæ palliatæ) ou de caractère national (fabulæ togatæ) étaient fort goûtées des auditeurs. Au temps des guerres puniques et plus tard quand tout ce qui venait de Grèce fut populaire, des auditeurs romains furent capables de trouver du charme aux légendes de la mythologie grecque mises en œuvre dans les tragédies d'Ennius, de Pacuvius ou d'Accius ; s'ils ne surent pas y découvrir les grands problèmes de la vie humaine, ils y voyaient pourtant avec plaisir les vicissitudes de la Fortune ; peut-être eurent-ils de temps en temps l'occasion d'assister à la représentation d'une tragédie ou plutôt de quelque drame historique fondé sur une légende à eux connue et se rapportant à leur propre histoire. Les conditions de la vie sociale ne différaient pas assez, de Rome à Athènes, pour que la Comédie Nouvelle athénienne, remaniée par un grand génie comme Plaute, ne fût pas à la portée des spectateurs romains, qui se délectaient à des plaisanteries plutôt grossières et à des situations comiques. Après Plaute vinrent Cæcilius et Térence plus raffinés, avant que la comédie nationale d'Afranius et d'autres remplaçât la comédie grecque. Il faut bien admettre que, dans ces temps primitifs du théâtre romain, les auditeurs étaient intelligents et capables de prendre d'utiles leçons aux pièces qu'ils voyaient représenter, sans parler de ce qui flattait leur goût naturel pour le spectacle en lui-même, pour le jeu des acteurs et pour la musique[46]. Avant l'époque dont nous nous occupons, la longue dynastie des grands écrivains dramatiques s'était éteinte. Accius, neveu de Pacuvius, mourut très âgé quand Cicéron était encore un jeune garçon[47], et personne ne succéda à Afranius dans la comédie nationale. Les temps étaient troublés et la population turbulente ; clic s'incorporait sans cesse des éléments hétérogènes ; la vie du Forum restait aussi divertissante que les émeutes et les désordres de la rue ; les combats de gladiateurs furent organisés sur un grand pied. Ecouter en silence une bonne pièce ennuyait d'autant plus la plèbe qu'elle devenait plus remuante. Quant aux gens de bonne éducation, leur goût se corrompit aussi sous l'influence du luxe et de l'oisiveté. La politique, les personnages politiques, voilà ce qui intéressait les contemporains et nous savons que les auditeurs profitèrent souvent d'une représentation théâtrale pour témoigner à un homme d'Etat leur approbation ou leur improbation. Dans une lettre à Atticus, datée de 59[48], première année du Triumvirat, Cicéron raconte avec jubilation comment, aux jeux Apollinaires, l'acteur Diphilus fit allusion à Pompée en insistant sur ces mots d'une tragédie que nous ne connaissons pas : Nostra miseria tu es Magnus, et fut contraint par la foule de les répéter plusieurs fois. Quand il déclama le vers : Eandem virtutem istam
tempus veniet cum graviter gentes[49], le théâtre tout entier éclata en applaudissements frénétiques. De même encore, dans un passage du pro Sestio, Cicéron nous dit avoir entendu raconter que le grand acteur tragique Æsopus, jouant dans l'Eurysaces d'Accius, avait fait habilement ressortir des allusions au rappel prochain du grand orateur son ami personnel et qu'il fut interrompu par des applaudissements réitérés[50]. Il ajoute modestement que les mots summum amicum, summo in bello, summo ingenio præditum, furent repris par le peuple enthousiasmé — sans aucun doute au grand dommage de la pièce. Tout ce morceau de Cicéron est très pittoresque et, s'il ne provoque pas notre enthousiasme à nous, c'est que nous savons que Cicéron n'était pas présent à la représentation. Ce passage et d'autres analogues prouvent bien que l'on jouait encore des tragédies au temps de Cicéron, mais ni dans sa correspondance, où nous aurions espéré le trouver, ni dans ses œuvres philosophiques, il ne nous donne aucun renseignement sur l'influence éducative ou esthétique que les représentations théâtrales purent avoir sur lui-même ou sur d'autres. Il cite constamment les anciennes pièces, surtout les tragédies ; il les connaît très bien ; mais quand il les cite, c'est presque toujours et exclusivement en littérateur. Une ou deux fois, il rappelle le geste ou la diction de quelque grand acteur, mais quant à la pièce même, ce qu'il y apprécie c'est la poésie, ce n'est pas la valeur dramatique. Remarquons à ce propos qu'il fut alors de mode de composer des pièces de théâtre sans avoir l'intention de les produire sur la scène. Nous lisons, non sans étonnement, dans une lettre de Cicéron à son frère Quintus alors en Gaule, que celui-ci s'était mis à composer des tragédies, qu'il en avait achevé quatre en seize jours et cela apparemment au cours de la campagne[51]. De Bretagne il en envoya une, l'Erigone, à son frère ; elle se perdit en route. C'est là tout ce que nous savons de ces pièces et nous n'avons aucune raison de croire qu'elles fussent dignes de survivre. Aucun auteur célèbre de cette époque n'écrivit pour le théâtre ; la seule, personne de quelque réputation que nous sachions l'avoir fait, fut Cornélius Balbus le jeune, fils de l'ami intime et secrétaire de César. Ce personnage composa une tragédie latine sur son voyage à Gadès, sa ville natale, l'y fit représenter et versa des larmes à la représentation[52]. Quand on parle d'œuvres dramatiques, sans intention de les faire représenter et de tragédies destinées à servir de prétexte à des allusions politiques, nous pouvons être bien certains que le théâtre est en pleine décadence. On en trouvera une preuve si l'on veut se reporter a-u premier livre de l'Ars amatoria d'Ovide qui appartient, il est vrai, au siècle d'Auguste. Le poète y décrit les divers lieux de rendez-vous où un jeune homme peut rencontrer sa maîtresse ; quand il en vient au théâtre, il fait un joli tableau des élégantes à la mode qui s'y pressent, mais : Spectaturn veniunt, veniunt spectentur ut ipsæ. Puis, sans un mot de la pièce, sans la moindre allusion à l'intérêt que ces représentations auraient pu avoir pour ces dames, ou pour lui-même, il se lance dans le récit bien connu de l'Enlèvement des Sabines parce qu'il avait eu lieu, suivant la tradition, pendant des jeux donnés par Romulus. Il est assez curieux que ce soit au moment où l'intérêt pour le drame en lui-même languit de plus en plus que se place l'événement le plus remarquable de l'histoire du théâtre à cette époque, soit la construction du premier théâtre permanent. Durant toute la période où le drame fut populaire, le gouvernement n'avait jamais autorisé l'érection d'un théâtre permanent à la mode grecque ; quoiqu'il fût impossible d'interdire la représentation de pièces adaptées du grec, il semble qu'on eut des scrupules étranges à permettre la construction à Rome d'un monument, signe- apparent de l'influence grecque. On dressait au Forum ou au Cirque des tréteaux, les spectateurs se tenant d'abord debout, puis on leur fournit des sièges placés dans une cavca de bois. Chaque fois qu'on représentait des Ludi scænici, on confiait à des entrepreneurs l'organisation de tout le spectacle, y compris la pièce, les acteurs et les musiciens[53] chargés d'accompagner les voix au besoin. Enfin en 154 A. C : les censeurs pensaient à faire construire un théâtre, probablement de pierre, quand Scipion Nasica, sous l'influence d'une réaction anti-grecque, persuada au Sénat de s'opposer à ce symptôme de décadence et fit décréter qu'il n'y aurait plus désormais de places assises : ut scilicet remissioni animorum standi virilitas propria Romanæ gentis iuncta esset[54]. Ce décret extraordinaire dont la légalité aurait pu être mise en question une génération plus tard resta-t-il en vigueur ? Nous l'ignorons ; les Sénateurs et, à partir de Caius Gracchus, les Chevaliers étaient assis et occupaient des places réservées. Cependant Rome dut se passer d'un théâtre de pierre jusqu'au moment où Pompée, lors de son second consulat en 55 A. C., en fit construire un fort grand pouvant contenir 40.000 spectateurs. Lui-même, nous dit-on, n'en vint pas à bout sans s'exposer aux critiques des vieillards fidèles aux anciennes coutumes, tant était encore vivace le préjugé contre tout ce qui aurait eu l'apparence de transformer Rome en une ville grecque[55]. A en croire une histoire, dont il est difficile de découvrir l'origine exacte, Pompée fut forcé, par l'opinion publique, de dissimuler son dessein en élevant au-dessus de la cavea un temple à Vénus victrix ; les marches aboutissaient à la salle de spectacle[56]. Ce théâtre était situé au Champ de Mars ; nous en connaissons assez bien le plan grâce aux fragments du Plan de Rome trouvé au Capitole[57]. Pompée y ajouta un portique magnifique à l'usage des spectateurs et une curie où le Sénat pouvait se réunir et où onze ans plus tard, le grand dictateur fut assassiné et tomba aux pieds mêmes de la statue de Pompée. Malgré toute sa magnificence, ce bâtiment ne devait pas rendre la vie ni la prospérité à l'ancienne tragédie et à l'ancienne comédie. Dès l'inauguration, les signes de la décadence devinrent évidents. Par bonheur pour nous, Cicéron se trouvait alors à Rome et, dans une lettre à un ami, il le félicite de ce qu'une indisposition l'a empêché de s'y rendre et d'y voir gâter de vieilles tragédies par un luxe extravagant de mise en scène[58] : Les jeux, dit-il, n'ont pas eu même l'agrément des jeux ordinaires ; la vue du luxueux appareil ôtait tout le charme du spectacle et, à mon avis, vous vous consolerez aisément d'en avoir été privé. Le beau plaisir que de voir six cents mulets défiler dans la Clytemnestre (d'Accius) trois mille cratères exposés dans le Cheval de Troie ou, dans je ne sais quel combat simulé, toutes les armes de l'infanterie et de la cavalerie ? Voilà de quoi remplir d'admiration le populaire, mais cela aurait manqué de charme pour vous. Cette ostentation dans la mise en scène est bien faite pour nous rappeler ce que nous voyons de nos jours, ainsi que les rugissements de ces énormes orchestres qui font les délices des compositeurs modernes et de leurs auditeurs. Les œuvres dramatiques ne suffisaient pas à elles seules à composer tout le spectacle ; on y voyait des combats d'athlètes. Cela ne semble pas avoir eu beaucoup d'intérêt pour les spectateurs romains et Cicéron nous dit que Pompée constata cet insuccès. En revanche, il y avait des chasses de bêtes sauvages (venationes) qui durèrent cinq jours magnifiques, continue Cicéron, personne ne le conteste, mais quel plaisir pour un spectateur de goût délicat que de voir un pauvre homme mis en pièces par quelque bête monstrueuse ou un superbe animal transpercé d'outre en outre par un épieu..... Le dernier jour fut celui des éléphants ; grande surprise pour le vulgaire et pour la foule ; mais de plaisir point. Au contraire, ce spectacle sembla éveiller la pitié et je ne sais quelle idée que cet animal a quelque chose de commun avec le genre humain. Un passage de l'Histoire naturelle de Pline confirme cette impression ; il affirme que l'émotion du peuple fut si grande qu'il accabla Pompée de malédictions[59]. Les derniers temps de la République furent une époque de transition ; le peuple n'était pas encore habitué à la vue du sang et à la cruauté envers les animaux comme il le fut plus tard quand, privé des luttes politiques, il ne lui resta plus d'autres distractions que celles de l'amphithéâtre. Au début de la même lettre, Cicéron annonçait à son ami Marius que certains vieux acteurs qu'il croyait retirés de la scène pour toujours y avaient reparu à l'occasion de ces jeux. Le seul dont il donne le nom est le grand acteur tragique Aesopus qui se montra si inférieur à lui-même que l'opinion unanime ne pouvait qu'approuver sa retraite. La voix lui manqua à un moment important. Rappelons-nous à ce propos qu'Æsopus fut le dernier des grands acteurs tragiques, que ses succès les plus marquants dataient de la première moitié du siècle — autre preuve de la déchéance du drame proprement dit. Il était intimement lié avec Cicéron et les quelques passages où celui-ci nous parle de l'acteur nous permettent de nous faire une idée de son talent. Cicéron nous dit, entre autres, l'avoir vu un jour si impétueux et gesticulant avec tant de passion qu'il semblait avoir perdu tout contrôle sur lui-même[60]. Dans la description déjà citée de ce qui se passa au théâtre avant son retour d'exil, Cicéron parle de cet artiste éminent débitant les allusions à l'exilé avec infiniment de force et de passion. Et cependant la tradition postérieure le représente comme sérieux et maître de lui-même dans son jeu. Horace le traite de gravis et Quintilien aussi parle de sa gravitas[61]. Une curieuse anecdote conservée par Valère Maxime montre avec quel soin il préparait ses gestes : lui et Roscius le grand comédien avaient coutume d'assister aux plaidoyers d'Hortensius pour étudier l'action de ce célèbre orateur[62]. Roscius aussi fut de bonne heure lié intimement avec Cicéron qui semble, avoir su, comme César, apprécier l'amitié de tous les hommes de talent sans égard à leur origine ni à leur profession. Il est probable que Roscius était un affranchi[63] ; son plus beau temps datait de la jeunesse de Cicéron ; il mourut en 61 A. C., au grand chagrin de tous ses amis[64]. Son jeu était si parfait que le nom de Roscius devint une sorte de nom commun pour désigner un acteur d'Un mérite hors ligne. Aucun de ses élèves ne parvenait à le satisfaire entièrement ; plusieurs avaient des qualités, mais le maître était impitoyable pour la moindre défaillance[65]. Dans le de oratore, Cicéron nous donne quelques renseignements intéressants sur cet acteur : comment il savait faire ressortir à la perfection les mots importants, réservant ses gestes pour le moment de les faire valoir ; comment on ne l'admirait jamais autant que quand il jouait sans masque, si grand était l'art avec lequel il savait donner à son visage l'expression nécessaire[66]. Dans les dernières années de Cicéron, après la mort de Roscius et la retraite d'Æsopus, nous n'entendons plus parler de grands acteurs. Avec ces deux hommes les beaux jours du théâtre romain sont finis ; après eux, les pièces favorites du public ne sont plus que des farces dont nous dirons un mot pour terminer. Ces farces, comme toute la comédie latine et probablement aussi la satire littéraire, ont eu pour origine les facéties et les plaisanteries grossières en vogue aux féries campagnardes et particulièrement quand elles se célébraient au moment de la moisson[67], comme nous le dit Horace[68]. Ces divertissements accompagnés de musique et de danses se transformèrent graduellement en petites pièces plutôt grossières mais conformes à un type assez fixe avec un dialogue improvisé ; jouées d'abord dans la rue, elles le furent plus tard au théâtre dans les entr'actes et parfois à la fin de la représentation. Au temps de Cicéron, deux espèces de farces avaient la vogue. Dans sa jeunesse on préférait celles qui portèrent le nom d'Atellanes ; elles venaient de Campanie et devaient probablement leur nom à la ville d'Atella près de Capoue. Par malheur ces farces, dont il ne reste que quelques fragments, sont mal connues[69]. Quoique sans doute fort amusantes, il était cependant possible de s'en lasser, car le nombre des personnages était limité et chacun d'eux portait toujours le même masque ; c'était toujours Pappus le vieillard, Maccus le glouton, Dossennus le filou, etc. Vers le temps de Sylla, les mimes remplacèrent ces vieilles farces dans la faveur populaire probablement parce que le comique en était plus varié ; les acteurs n'y portaient pas de masques ; par suite l'improvisation pouvait se donner libre carrière. La grossièreté était la même dans ces deux sortes de pièces ; c'était la mise en scène et en action de la vie du bas peuple de la capitale et des villes de province. Le goût de Sylla en fait de théâtre ne paraît pas avoir été fort raffiné, à en croire Plutarque ; il affirme que le futur dictateur, dans sa jeunesse, passait une grande partie de son temps avec des mimes et des bouffons et que, à l'époque de sa dictature, il ramassait, chaque jour, au théâtre les gens les plus dissolus pour s'en aller boire et rivaliser avec eux de grossières plaisanteries[70]. Il faut peut-être voir là le témoignage d'un ennemi, mais le fait n'est pas improbable et il est possible que Sylla et César, en patronnant les mimes, aient voulu empêcher les allusions personnelles si fréquentes, comme nous l'avons vu, aux représentations des tragédies[71]. Vers l'an 50 A. C. le Syrien Publilius, le même dont il a été question précédemment, arriva en Italie. Il composa des mimes en vers, ce qui leur donna, pour la première fois, un tour littéraire. César, toujours à l'affût des hommes de talent, fit venir l'auteur à Rome et lui décerna la palme pour ses pièces[72]. Les mimes de Publilius se distinguaient sans doute des autres par des qualités d'esprit et de style supérieures et qui égalaient peut-être celles de l'ancienne comédie nationale (fabula togata) par leur bon goût. Cicéron y fait allusion deux fois ; dans une lettre à Cornificius en octobre 45 il dit avoir écouté avec grand plaisir les poèmes de Labérius et de Publilius[73]. Nihil mihi tam deesse scito quam quicum hæc familiariter docteque rideam ; ici le mot docte semble suggérer que la représentation était au moins digne de l'attention d'un homme cultivé. Labérius, qui était chevalier romain, composa des mimes comme Publilius et fut battu par lui dans un concours. On raconte que César l'engagea à jouer dans un de ses propres mimes ; il n'osa pas résister au dictateur mais, pour se venger de ce qu'il considérait comme infamant pour un Romain bien né, il composa le prologue qui nous a été conservé par Macrobe[74]. Il est permis de croire que ses pièces étaient du même genre que celles de son rival et farcies de ces sages dictons (sententiæ) que le peuple romain se montrait encore capable d'apprécier. Même au temps de Sénèque les auditeurs ne ménageaient pas leurs applaudissements à des paroles qui leur paraissaient à la fois vraies et frappant juste[75]. Ainsi le mime dépassa le niveau de la farce improvisée et prit place dans la littérature. Il put même accidentellement avoir quelque vertu éducative. Mais il garda sa grossièreté ; les danses restèrent grossières, les plaisanteries obscènes et, comme on l'a dit avec raison, l'intrigue comportait des scènes d'amour qui n'avaient rien de commun avec la morale ordinaire. Aux premiers temps de l'Empire les auditeurs goûtaient ce genre de spectacles ainsi que les danses de toute sorte, le chant, la musique instrumentale et, par-dessus tout, la pantomime où l'acteur se bornait à gesticuler sans parler. C'est là, ainsi que la disparition du vrai drame, un des nombreux faits prouvant que la population urbaine était en train de perdre à la fois sa virilité et son intelligence. |
[1] TIBULLE, II, 1, 51 sqq. Comp. II, 5,
83 sqq. Plusieurs descriptions d'Ovide dans ses Fastes. On trouvera aussi une
charmante description d'une fête dans un village toscan contemporain dans A
nook in the Apennines, par Leader SCOTT, chap. XXVIII et XXIX ; c'est
un livre de valeur pour tout ce qui concerne la vie rurale en Italie dans
l'antiquité et de nos jours.
[2] WISSOWA, Religion und Kultur,
p. 432 sqq. (2e édit.). Le mot feriæ
finit par s'appliquer uniquement aux fêtes publiques, tandis que festus dies se disait de tous les jours de congé.
[3] De Legibus, II, 8, 19.
Cp. 12, 29.
[4] La loi religieuse et la loi
civile permettent de faire certains travaux même pendant les jours fériés ;
aucune prescription religieuse n'interdit de curer les ruisseaux, d'entourer la
moisson d'une haie, de tendre des pièges aux oiseaux, de mettre le feu aux
broussailles et de plonger le troupeau dans une eau courante et salubre. Géorgiques,
I, 268 sqq. CATON avait déjà dit la même chose : de Agricultura, II,
4.
[5] C'est ainsi qu'OVIDE décrit les cérémonies
effectuées par le Flamen Quirinalis à
l'antique fête agricole des Robigalia (Robigus, déité de la rouille des blés), comme
s'il s'agissait d'un curieux reste d'anciennes pratiques dont plus personne ne
savait rien. Fasti, 4, 901 sqq.
[6] GREENIDGE, Legal Procedure in Cicero's
time, p. 457.
[7] C'est le même mot que notre
foire.
[8] Fasti, III, 523 sqq. Roman
Festivals, p. 51.
[9] Roman Festivals, p.
185. Cette coutume avait sans doute une origine religieuse.
[10] Roman Festivals, p.
268. Auguste réduisit les jours à trois.
[11] WISSOWA, Religion und Kultur,
p. 206 (2e édit.). Le culte de Saturne fut fortement modifié par l'influence
grecque, mais cette coutume particulière provenait plus probablement des usages
de la ferme latine.
[12] MARQUARDT, Privatleben, p. 838. FRAZER, Golden Bough. (2e éd.),
vol. III, p. 188 sqq.
[13] CICÉRON, Verr., I, 10, 31 ;
Cicéron se plaint de la difficulté qu'il éprouva à poursuivre son procès vu le
nombre des Ludi, d'août à novembre de
cette année-là.
[14] Roman Festivals, p. 210
sqq.
[15] Voir la description : Dion.
Hal., VII, 72, d'après FABIUS PICTOR.
[16] Voir Friedlænder dans MARQUARDT, Staatsverzvaltungen,
III, p. 508, note 3.
[17] Pour la description complète
de la procession et toute la question des Ludi
Romani, voir FRIEDLÆNDER, loc. cit. ; WISSOWA, Religion und Kultur,
p. 451 sqq. (2e éd.). Tous ces comptes-rendus doivent beaucoup à MOMMSEN, Römische Forschungen,
II, p. 42 sqq.
[18] Sur le parallélisme entre les Ludi Plebeii et Romani,
voir MOMMSEN,
Staatsrecht, II, p. 519, note 4.
[19] Roman Festivals, p. 179
sqq.
[20] Roman Festivals, p. 69.
[21] Roman Festivals, p. 72
sqq.
[22] Roman Festivals, p. 91
sqq.
[23] TITE-LIVE, XXII, 10, 7 ; DENYS D'HALICARNASSE, VII, 71.
[24] PLINE, N. H., XXXIII, 138. La
même chose arriva une ou deux fois sous Auguste.
[25] TITE-LIVE, XL, 44.
[26] II, 16, 57 sqq.
[27] Nous avons dans PLINE, N. H., XXXVI, 114, des
détails sur les prodigalités ridicules de cet édile. Il bâtit un théâtre
temporaire qui fut décoré comme s'il s'agissait d'un monument permanent.
[28] Verr., V, 14, 36.
[29] PLUTARQUE, César, 5.
[30] CICÉRON, ad Fam., VIII, 9.
[31] Ad Att., VI, I, 21.
[32] Il n'y a pas de preuves que,
sous la République, les esclaves y fussent admis. Columelle, sous Néron, est le
premier qui mentionne leur présence aux jeux (R. R., I, 8, 2), à moins
de considérer le villicus d'HORACE, Epist., I, 14, 15
comme un esclave. Voir Friedlænder in MARQUARDT, Röm. Staatsverw., III,
p. 491, note 4.
[33] Roman Festivals, p.
208.
[34] Roman Festivals, p.
242.
[35] Roman Festivals, p. 77
sqq.
[36] DENYS D'HALICARNASSE, III, 68 indique ce nombre
pour le temps d'Auguste qui n'avait pas, que nous sachions, agrandi le cirque.
[37] AULU-GELLE, III, 10, 16.
[38] PLINE, N. H., X, 71 ; il
semble se reporter à un temps plus ancien et ce Cæcina fut peut-être l'ami de
Cicéron. Dans un autre passage de Pline, il est question de la faction rouge
vers l'époque de SYLLA (VII, 186. Friedlænder, op. cit., p. 517). Cp. TERTULIEN, de Spectaculis, 9.
[39] Pour la description
pittoresque de la scène au cirque au temps d'Auguste, voir OVIDE, Ars amatoria, I, 135
sqq.
[40] Chap. 59.
[41] Voir SCHOL. BOB., pro Sestio, p. 140, I sqq. (éd. Stangl.).
[42] VALÈRE MAXIME, II, 3, 2. La conjecture
concernant le but de cette exhibition par les consuls est de BUECHELER, Rhein. mus., 1883, p.
476 sqq.
[43] L'exemple fut donné, suivant TITE-LIVE, Epitomé, 16, par un
Junius Brutus au début de la première guerre punique.
[44] Ad Fam., II, 3.
[45] L'origine de ces spectacles sanguinaires
exige un examen plus approfondi. Elle peut se rattacher à une coutume primitive
et sauvage de sacrifier des captifs aux mânes d'un chef, de laquelle on trouve
un souvenir dans le sacrifice des captifs, par Enée : VIRGILE, Enéide, XI, 82.
[46] Voir à ce sujet l'utile
ouvrage de G. MICHAUT, Sur les tréteaux latins (1912), en particulier le
ch. IX.
Voir
LUCIAN
MÜLLER,
Ennius, p. 35 sqq., où il défend, contre Mommsen, l'intelligence et le
goût des Romains du IIe siècle. A. C. LEGRAND, Daos, p. 620 sqq.,
aboutit à peu près aux mêmes conclusions. Voir encore LEO, Gesch. der Röm. Liter.,
I, p. 139 et p. 212-217. Il conviendrait de distinguer entre le public de
Plaute et celui du milieu du IIe siècle A. C.
[47] CICÉRON, Brutus, 28, 107, où il
dit avoir connu le poète lui-même.
[48] Ad Att., II, 19.
[49] Le
temps viendra où tu déploreras amèrement tes succès même.
[50] Pro Sestio, 56, 121 sqq.
[51] Ad Q. Fratr., III, 5.
[52] Il n'est que juste d'ajouter
que nous tenons cette histoire d'une lettre d'Asinius Pollion à Cicéron (ad
Fam., X, 323), et comme Asinius Pollion avait toujours un mot piquant pour
tout le monde, nous pouvons rabattre de l'épisode des larmes.
[53] On traduit généralement, à
tort, tibicines par joueurs de flûte ; l'instrument, essentiellement italien,
était un hautbois primitif, sorte de chalumeau ordinairement double (deux
pipeaux à embouchure commune) ; on en voit encore parfois en Italie.
[54] VALÈRE MAXIME, II, 4, 2 ; TITE-LIVE, Epitomé, 48.
[55] TACITE, Annales, XIV, 20.
[56] TERTULIEN, de Spectaculis, 10 ; PLINE, N. H., VIII, 20.
[57] Voir l'excellent compte-rendu
dans Hülsen, vol. III de la Topographie de JORDAN, p. 524 sqq. Quelques arcades
sont encore visibles.
[58] Ad Fam., VIII, 1.
Tyrell traite cette lettre d'exercice de rhétorique ; n'est-ce pas plutôt une
de ces lettres où Cicéron, prenant quelque peine, écrit avec moins de naturel
que d'ordinaire ?
[59] PLINE, N. H., VIII, 21.
[60] De Divin., I, 37, 80.
Cp. avec PLUTARQUE, Cicéron, 5.
[61] HORACE, Epist., II, I, 82 ; QUINTILIEN, II, 3 ; III.
[62] VALÈRE MAXIME, VIII, 10, 2. On disait que
Cicéron avait eu pour maîtres de gesticulation Æsopus et Roscius. Les textes
concernant ces deux artistes se trouvent dans RIBBECK, Die Römische Tragödie,
liv. VII. — PLUTARQUE, Cicéron, 5.
[63] PLINE, N. H., VII, 128.
[64] Pro Archia, 8.
[65] De Oratore, I, 28, 129.
[66] De Oratore, III, 27,
59.
[67] Un compte-rendu utile et
succinct de la littérature de ce sujet difficile se trouvera dans SCHANZ, Gesch. der Röm. Literatur,
vol. I (éd. 3), p. 21 sqq. Voir aussi MICHAUT, Sur les tréteaux latins,
ch. I et II.
[68] HORACE, Epist., II, 1, 145
sqq.
[69] La manière de voir de MOMMSEN, Röm. Gesch., II, p.
438 sqq. (8e éd.) est en général abandonnée maintenant. Pour plus de détails,
voir SCHANZ,
op. cit., II, p. 2 sqq. MICHAUT, op. cit., chap. VII.
On infère des lettres de CICÉRON, ad Fam., IX, 16, que
ces pièces étaient à la mode avant les mimes.
[70] PLUTARQUE, Sylla, 2, cap. 36.
[71] Toutefois on trouvait des
allusions politiques dans les mimes. Cp. CICÉRON, ad Att., XIV, 3, de 44
A. C. après la mort de César. Marx, dans PAULY-WISSOWA, II, s. v. Atellanæ Fabulæ.
[72] Tous les passages concernant
Publilius se trouvent réunis dans l'édition de ses Sententiæ, p. 10
sqq., donnée par Bickford Smith, ou en tête de l'édition de G. Meyer (Teubner,
1880). Sur les mimes en général, voir MICHAUT, op. cit., ch. VIII et
l'énorme et confus ouvrage de H. REICH, der Mimus (Berlin
1903) ; DIETRICH, Pulcinella, p. 146 sqq.
[73] Animo æquissimo, ad.
Fam., XII, 18. Il
entend peut-être plutôt que les flatteuses allusions à César ne le choquaient
pas.
[74] Voir RIBBECK, Fragment. comic. Lat.,
p. 359 sqq. (3e éd.).
[75] SÉNÈQUE, Epist., 108, 8.