HISTOIRE SECRÈTE DU DIRECTOIRE

TOME DEUXIÈME

 

CHAPITRE XVIII.

 

 

Il faut une compensation à l'empereur, Bonaparte la trouve aux dépens de Venise. — Précis des derniers moments de cette république. — Lettre de Bonaparte au doge. — Suite des évènements. — Proclamation du grand conseil. — Les Français à Venise. — Le lion de Saint-Marc. — Barrère élu aux cinq-cents et chassé. — Diatribe de Lalande contre La Harpe. — Récit du début de la lutte entre les conseils et le directoire. — Détails. — Séance du tirage au sort pour la sortie d'un directeur. — Fourberie du scrutin dévoilée. — Letourneur s'en va.

 

La paix à conclure avec l'empereur ne se présentait pas sous un point de vue facile résoudre. On ne pouvait guère espérer que ce souverain consentirait à renoncer 'à tout ce que nos armes lui avaient enlevé ; aux riches états de Belgique, à ce duché de Brabant, si fertile, si populeux, et dont l'industrie était la source de trésors, où, en cas de besoin, on puiserait. A cette perte, déjà consommée depuis quelque temps, il faudrait y joindre celle de la superbe Lombardie, de ce Milanais objet d'envie pour tous les souverains, et qui, maintenant érigé en république, ne pouvait plus retourner sous le joug de la tyrannie ; phrase de convention par laquelle on désignait, à cette époque, tout gouvernement monarchique.

Si donc on ne se flattait pas d'un abandon volontaire de ces beaux pays, il y avait également, d'une autre part, impossibilité entière de les rendre à leur ancien possesseur. La Belgique était devenue partie intégrale du système français ; et la Lombardie devait rester en république, fille de la nôtre, et fille, dont sa mère espérait retirer de grands profits. Comment donc asseoir sur une base solide cette paix pourtant avantageuse ? c'était un problème à résoudre. Barras espérait que la solution en serait retardée, parce qu'il ne voyait aucun moyen de concilier toutes les prétentions ; mais Bonaparte, mieux placé pour bien envisager les choses, se promit de dénouer plus facilement qu'on ne le présumait cet autre nœud gordien, et voici comment

Il y avait en Italie une puissance fausse, menteuse, perfide, autant par goût que par faiblesse, qui, à force de se redouter dans ses propres citoyens, avait fini par éteindre en eux toute vertu, tout courage, tout héroïsme. Elle s'enorgueillissait pourtant de son œuvre, parce qu'en place de ceci elle avait mis la duplicité. Elle pesait sur le peuple d'un poids de terreur, et pas de force. Il n'y avait là que du fantastique, et plus de réalité ; une apparence de gouvernement, et même de nation ; sorte d'ombre réelle, et qui ne résisterait pas au moindre choc dont on la frapperait. Cette puissance était la république de Venise.

Jadis elle joua un grand rôle ; maintenant elle vivait sur sa vieille réputation, entièrement vermoulue, et qui faisait eau de toutes parts. Venise existait en corps d'état, parce que nul autre royaume ne voulait sa chute, et la balance convenue de l'Europe assurait seulement la vie à ce gouvernement. Il vit, dès l'aurore de la révolution française, celle-ci de mauvais œil ; elle en eut une frayeur entière lorsque la révolution déborda sur l'Italie, et vint frapper aux frontières vénitiennes. Alors les patriciens de cette ville de mystère et d'exécution sanglante flattèrent la république par des bassesses, et en même temps s'attachèrent à lui nuire autant qu'il était eu leur pouvoir. Ils espéraient la tromper au moyen de cette politique tortueuse, jusqu'au moment où ils verraient jour à l'écraser. En conséquence, ils prêtaient en dessous aide à l'empereur, négociaient avec l'Angleterre, tâchaient de ressusciter une ligne italienne de tout le milieu et le midi de cette contrée ; fomentaient les révoltes, les émeutes, les assassinats, dans la portion occupée par les Français ; y répandaient les bruits sinistres, les fausses nouvelles ; croyant à l'avance avoir paré à tout en congédiant outrageusement Louis 30/111, qu'ils avaient d'abord accueilli à Vérone dans leur seul intérêt.

Mais de pareilles manœuvres ne pouvaient échapper au regard d'aigle de Bonaparte. Il voyait à découvert la fourberie vénitienne, la supportait par prudence attendant le moment favorable pour le punir. Il plaçait là d'ailleurs, l'indemnité qu'il faudrait accorder à l'empereur en dédommagement de la perte de ses états héréditaires. L'heure fatale de Venise sonna enfin dès l'ouverture des préliminaires de Léoben. Aussitôt Bonaparte se mit en mesure, et le premier coup de tonnerre de sa colère qui retentit à Venise, fut la lettre suivante, datée du quartier-général de Tunderbourg, le 9 avril, et adressée au sérénissime doge.

Dans toute la Terre-Ferme, les sujets de la sérénissime république sont sous les armes. Le cri de ralliement est : Mort aux Français !

Le nombre des soldats de l'armée d'Italie qui en ont été les victimes se monte déjà à plusieurs centaines. Vous affectez en vain de désavouer des attroupements que vous-même avez préparés. Croyez vous que, quand j'ai pu porter nos armes au cœur de l'Allemagne, je n'aurai pas la force de faire respecter le premier peuple du monde ? Pensez-vous que les légions d'Italie puissent souffrir des massacres que vous excitez ? Le sang de nos frères d'armes sera vengé ; et il n'est pas un seul bataillon français qui, chargé de cette mission généreuse, ne se sente trois fois plus de courage et de moyens qu'il ne lui en faut pour vous punir. Le sénat de Venise a répondu par la plus noire perfidie à notre générosité soutenue à son égard.

Je prends le parti de vous envoyer mes propositions par l'un de nies aides-de-camp et chef de brigade. La guerre ou la paix, si et vous ne prenez sur-le-champ toutes les mesures pour dissiper les attroupements ; si vous ne faites arrêter au plus tôt, et remettre en mes mains, les auteurs des meurtres qui se commettent, la guerre est déclarée.

Le Turc n'est pas sur vos frontières ; aucun ennemi ne vous menace, et cependant vous avez fait arrêter, de dessein prémédité, des prêtres pour faire naître un attroupement, et le tourner contre l'armée.

Si, malgré la bienveillance que vois a montrée le gouvernement français, vous me réduisez à vous faire la guerre, ne pensez pas que le soldat français, comme les brigands que vous avez armés, aille ravager les champs du peuple innocent et malheureux de la Terre-Ferme. Non, je le protégerai, et il bénira jusqu'aux forfaits qui auront obligé l'armée française de l'arracher à la tyrannie de votre gouvernement.

Signé BONAPARTE.

 

De telles expressions, des menaces aussi positives, étonnèrent singulièrement l'oreille superbe de ceux de Venise, mais n'éveillèrent pas dans leur âme la moindre étincelle du feu qui respirait dans leurs ancêtres. Ils comprirent qu'il fallait, en attendant mieux, continuer le rôle d'astuce. On répondit donc à la véhémence des reproches par une justification lâche et menteuse. Ils excusèrent l'insurrection de la Terre-Ferme par l'amour des peuples alarmés sur le compte de leur gouvernement chéri. Ils promirent une justice sévère des assassins que l'ou rencontrerait ; et l'on envoya deux provéditeurs, avec la mission de calmer Bonaparte. Au demeurant, on ne fit rien de ce qui aurait apaisé celui-ci les mêmes manœuvres continuèrent.

Le 3 mai, nouvelle proclamation menaçante de Bonaparte, Spécifiant ses griefs contre le sénat de Venise. Ils étaient graves ; ils devaient être amplement réparés. Il terminait par enjoindre au ministre de France de sortir de Venise, et à tous les Vénitiens de quitter dans vingt-quatre heures les lieux occupés par les républicains. En, même temps, le citoyen Lallement remit lui-même au doge une note dans laquelle il osait demander l’arrestation des trois inquisiteurs d'état..... les premiers de fait, et les plus puissants du gouvernement de Venise.

La guerre aurait dû être la réponse à cet outrage. Le sénat accéda à l'affront, en déclarant que l’emprisonnement des inquisiteurs aurait lieu. On croyait apaiser l'orage par une telle concession ; l'orage ne fit que redoubler. Bonaparte ne voulut entendre à aucun accommodement. Vérone fut occupée, ainsi que Padoue. Les troupes françaises parurent sur le bord des Lagunes ; et on signifia au gouvernement de Venise qu'on ne souffrirait plus son existence, et qu'il eût à se dissoudre, afin que le peuple souverain rentrât dans ses droits. Le sénat lutte encore, et prolonge seulement son agonie. Déjà des ferments d'insurrection se manifestent dans Venise. Le 9 avril la révolte éclate, et le 12 mai le doge, les autres autorités de l'état, le grand conseil, tous abdiquent ; et l'acte suivant consomme la chute d'un pouvoir qui se perpétuait depuis tant de siècles.

EN GRAND CONSEIL,

La nécessité de pourvoir au salut de la et religion, de la vie, et des propriétés de tous les chers habitans de cet état, a déterminé le grand conseil à prendre les délibérations du 1er et du 4 de ce mois, qui donnent à ses députés, près le général en chef de l'armée d'Italie, Bonaparte, tous les pouvoirs nécessaires pour remplir cet objet si important.

Aujourd'hui, pour le salut de la religion et de tous les citoyens, dans l'espérance que leurs intérêts seront garantis, et avec eux ceux de la classe patricienne et de tous les individus qui participaient aux privilèges concédés par la république, enfin pour la sûreté du trésor et de la banque ;

Le grand conseil, constant dans les principes qui ont dicté les deux déclarations susdites, et d'après le rapport de ses députés, adopte le système qui lui a été proposé d'un gouvernement représentatif provisoire, eu tant qu'il se trouve d'accord avec les vues du général en chef ; et, comme il importe qu'il n'y ait point d'interruption dans les soins qu'exige la sûreté publique, les diverses autorités demeurent chargées d'y veiller.

 

Ainsi l'antique gouvernement de Venise se suicida sans honneur. Il ne lui restait plus aucun moyen de résistance. Le peuple déjà sortait de sa longue et muette obéissance ; et aussitôt que cette délibération eut été prise, le grand conseil se dissipa, et tout fut fini. Après quelques jours d'agitation, l'ordre se rétablit. On créa une municipalité provisoire, composée de soixante membres, parmi les. quels dix patriciens seulement. Le 10, les Français entrèrent dans Venise ; le 4 juin, le fameux livre d'or fut brûlé en cérémonie devant l'arbre de la liberté et sur le livre ouvert que le lion de l'état tenait en ses pattes. À la place de l'ancienne légende : Pax tibi Marce evangelista meus, on substitua ces mots : Droits de l'homme et du citoyen.

Malgré cette révolution, le patriciat et enfin le peuple de Venise espéraient un meilleur sort de l'avenir ; il ne se réalisa pas. Bonaparte fit offrir à l'empereur, en compensation de ses états héréditaires, le beau duché de Venise dans sa totalité ; l'empereur, après avoir balancé, finit par accepter, et le traité de Campo-Formio lui assura plus tard ces provinces, qui valaient au moins tout ce que les Français lui avaient enlevé. Ce traité, auquel je reviendrai à l'époque où il fut conclu, mécontenta le parti républicain. Il était alors en pleine fermentation, et, pour montrer son intention secrète, il manœuvra de manière à faire nommer, dans les élections qui avaient lieu pour le renouvellement triennal des conseils, le fameux Barrère !... Barrère, devant qui la majorité du directoire elle-même recula au moment de rentrer dans la voie de la terreur, et qui fut exclu par le conseil des cinq-cents ! C'était une tentative déplorable, qui, en 1815, se répéterait avec plus de succès.

Chacun, à cette époque, se mettait en guerre avec son voisin. La littérature, la philosophie, étaient en combustion. On se battait au Parnasse et sous le Portique. La Harpe tenait tète aux gens de lettres et aux philosophes. Son cours, au Lycée, lui servait admirablement à soutenir cette lutte avec avantage. Il publia je ne sais quelle brochure, dans laquelle il déclarait les athées capables de tous les crimes. Lalande, qui faisait profession de ne pas croire eh Dieu persuadé que cette triste opinion accroissait son importance, Lalande prit feu, et, ne sachant comment se venger, fit insérer dans les journaux la note suivante, en manière de manifeste on de défense.

Le citoyen La Harpe, dans son ouvrage de fanatisme, s'obstine à confondre les athées avec les ennemis de la morale et des gouvernements ; rien ne peut expliquer, selon moi, ce désir de la calomnie, que la peur qui affaiblit les organes. L'auteur a été en prison, il a été en danger ; cela suffit pour excuser un homme d'esprit qui est parvenu à ce degré d'affaissement, Le citoyen La Harpe peut se consoler encore par l'exemple de Newton, ce génie étonnant d'ailleurs, qui finit par trouver l'histoire d'Angleterre dans l'Apocalypse. L'âge explique ce paradoxe, et il faut plaindre l’humanité exposée à une honteuse décrépitude.

Et Lalande avait signé. Alors il y avait une sorte de gloire à se dire athée ; aujourd'hui on vous sifflerait. La Harpe ne se tint pas battu non plus ; il confirma ses déclamations, et Lalande poursuivit la série de ses injures.

Il y avait véritablement dans Paris tous les éléments de la guerre civile ; plus nous allions, moins on s'entendait. C'était le moment où l'intrigue régnait en souveraine, où elle agitait les esprits par l'appât du pouvoir ou l'effroi de la proscription. Les membres du directoire, ceux de la majorité, n'étaient point sans inquiétude. Letourneur venait d'être nommé président ; c'était au moment précis où on travaillait à le faire consentir à la retraite. Le directoire, d'une autre part, frémissait à la vue des nouveaux membres que les élections amenaient c'étaient des hommes antipathiques avec lui, vrais républicains ou royalistes achevés. Il se demanda comment il pourrait s'y prendre pour diminuer le nombre de ses ennemis ; il crut l'avoir trouvé en proposant aux nouveaux élus un serment qu'il espérait déplaire à plusieurs, au point qu'ils refuseraient de le prêter. En conséquence, et dans la séance du 27 ventôse, il avait fait parvenir aux cinq-cents un message dans lequel il demandait que ce serment fût prêté par les électeurs avant les nominations.

Cette exigence du directoire excita de grands débats. On lui reprocha de vouloir jeter parmi les citoyens de nouveaux brandons de discorde. Pastoret le dit en termes précis. Enfin on convint d'un serment rédigé en ces termes :

Je promets attachement el fidélité à la république et à la constitution de l'an IV ; je m'engage à les défendre de tout mon pouvoir contre les attaques de la royauté et de l'anarchie.

Les conseils, en revanche de cette pierre d'achoppement, en jetèrent une au directoire qui fit beaucoup de bruit. Les cinq-cents, en particulier, jugeant que la constitution ne s'expliquait pas clairement sur la manière dont le sort déciderait de la sortie de l'un des membres du directoire exécutif, forma une commission pour lui proposer des mesures relatives à cet objet important. Dans la séance du 10 mai, le rapporteur de cette commission Philippe Delville, présenta deux projets, dont il laissa le choix au conseil. Par le premier, le directoire eût été chargé de régler le sort du tirage ; par le second, les deux conseils, ainsi que les premiers magistrats de la république, se fussent mis en séance dans leurs palais. respectifs, et l'on eût choisi au sort, dans chaque section du corps législatif, trois commissaires spéciaux. Ceux du conseil dés cinq-cents écriraient sur quatre billets différents le mot restant, et sur le cinquième le mot sortant. Ces cinq billets, cachetés et déposés dans une urne, que l'on eût scellée et remise à deux messagers d'état, auraient étier portée au directoire, sous l'escorte de cinquante grenadiers. Là le président eût brisé le scellé, et constaté le nombre des billets, sur l'un desquels chaque directeur eût inscrit son nom, après quoi ils eussent été réunis dans la même urne sans avoir été ouverts, et cachetés du sceau de la république. Les deux messagers d'état l'auraient enfin portée au conseil des anciens sous la même escorte. Le président, après avoir brisé le scellé, eût proclamé le nom qui eût été inscrit à l'extérieur du billet, portant à l'extérieur le mot sortant. Toutes ces opérations devaient être faites toujours séance tenante.

Ce projet parut ingénieux. La discussion néanmoins lui fut contraire ; on se rangea à celui proposé par Pastoret. Il réglait simplement que, pendant les années V, VI, VII et VIII, où le tirage au sort serait nécessaire entre les membres du directoire, ceux-ci le feraient entre eux, en audience publique, le 30 floréal (18 juin) suivant, à midi. Le directoire, à qui ce mode laissait une grande latitude, se refusa à l'adopter. Il voulut agir par lui-même sur ce point, et non en vertu d'une loi du corps législatif. En conséquence il adressa aux cinq-cents un message pour l’engager à ne pas sortir de la constitution. Le conseil trouva que le directoire en sortait lui-même, et, pour le lui faire sentir, on passa à l'ordre du jour ; puis on arrêta : et Que, quant à l'époque ou le membre sortant du directoire cesserait ses fonctions, et à celle où le membre nouvellement élu commencerait les siennes, celui-ci serait installé aussitôt as sa nomination, mais, dans aucun cas, le premier ne pourrait rester en exercice passé le 29 mai prochain.

Le directoire, malgré cette loi, ne se crut pas lié. Il tendait à s'affranchir de toute soumission envers la volonté des conseils légalement exprimée, et n'entendit pas se soumettre à celle-là qui, d'une manière très-imparfaite, réglait le mode de remplacement d'un de ses membres. En conséquence, et sans s'arrêter à aucune considération, ceux-ci se rassemblèrent, le vendredi 19 mars, en public, procédèrent à la cérémonie. Deux va ses étaient préparés sur le bureau, avec dix boules vides dans l'intérieur, fermant à vis, et destiné à recevoir les billets dont il va être fait mention. Cinq de ces boules furent successivement ouvertes, et dans chacune on renferma un billet contenant un numéro, depuis et compris le numéro 1 jusqu'à 5 chaque. Les billets furent lus par chacun des membres avant d'être renfermés dans les boules, et celles-ci furent jetées dans l'un des vases dont j'ai déjà parlé.

On fit ensuite cinq autres billets. Sur quatre étaient écrits, Membre du directoire restant ; sur le cinquième, Membre du directoire sortant. On ouvrit pareillement les cinq dernières boules restées sur le bureau, et chacun de ces billets fut enfermé dans une ; et toutes allèrent prendre leur place au fond de la seconde urne, où les attendait, dans une cachette adroitement pratiquée dans un double fond, celle que tirerait Letourneur : elle renfermait aussi un papier conforme aux autres, où était tracée la phrase de renvoi. On fit la jonglerie de fermer, de remuer, de renverser même les vases à plusieurs reprises ; puis chacun des membres, dans l'ordre d'âge, tira successivement du premier vase une boule, à l'effet de régler d'après le numéro qu'il obtiendrait l'ordre dans lequel se ferait le tirage en apparence plus important du vase second. Le sort décida de cette façon : La Révellière n° 1, Carnot n° 2, Barras, n° 3, Letourneur n° 4, Rewbell n° 5.

On passa à l'autre tirage. Le billet contenant le mot sortant échappa aux trois premiers qui puisèrent dans Fume Letourneur vint en quatrième ; il fit jouer le ressort intérieur, et trouva son renvoi, tandis que la boule de trop descendait à la place cachée ; si bien que le public crut à la sincérité de cette jonglerie. Le directoire transmit ce résultat aux conseils les cinq-cents l'admirent, sans rappeler que la loi rendue n'avait pas été exécutée ; et aux anciens, Durand Maillane ayant voulu en faire l’observation, des murmures couvrirent sa voix, et l'acte, approuvé par là reçut son exécution.