I. — FRONTIÈRE DE L’EST ET DU SUD.Vers l’an 19 av. J.-C., époque du dernier voyage d’Auguste en orient, l’œuvre de la fondation du gouvernement impérial, tel qu’il l’avait comprise, était achevée. Depuis six ans il avait fermé le temple de Janus, et le calme régnait dans les esprits comme dans les provinces. Cépion et Muréna, qui avaient osé conspirer contre une prospérité si grande, n’avaient point trouvé de complices. Le travail reprenait possession de ce monde, d’où il avait été chassé, et, par une exception rare dans l’histoire des nations, une reconnaissance unanime saluait comme un dieu sauveur l’auteur de tous ces biens. Auguste n’avait cependant encore accompli que la moitié de sa tâche. Il restait à s’assurer, par la politique ou par les aimes, d’assez solides frontières pour que des attaques importunes ne pussent troubler ce grand travail d’apaisement. En Europe, il fallait fortifier la barrière du Rhin, enfermer les Alpes dans l’empire et porter au Danube les avant-postes des légions ; en Asie, placer l’Arménie sous l’influence romaine et intimider les Parthes ; en Afrique, contenir les nomades et rouvrir, dans ce vieux monde, les anciennes routes de commerce suivies par Carthage et les Ptoléméen À en croire un document officiel, tout cela fut fait avec d’innombrables victoires : J’ai été, dit Auguste, proclamé vingt et une fois imperator ; pour les succès de mes lieutenants, le sénat décréta cinquante-cinq fois des actions de grâces aux dieux, et huit cent quatre-vingt-dix journées ont été employées à ces sacrifices ; dans mes triomphes, neuf rois ou enfants de rois ont été conduits devant mon char. Le nouveau prince ne fut pas si belliqueux ; il avait peu de goût pour la guerre, et, dans l’histoire militaire de son règne, on doit moins voir des combats et des conquêtes, qu’une suite de mesures de police prises sur une grande échelle. Nul souverain n’a plus sincèrement que lui cherché la paix dans la guerre. En Orient, où la société grecque depuis longtemps soumise
et réglée lui laissait peu de chose à faire, il avait mis son séjour à profit
pour déterminer les rapports de l’empire avec les Arméniens et les Parthes.
De ce côté les Romains ne touchaient à l’Euphrate que par En Arménie régnait Artaxias, le fils de cet Artavasde si indignement traité par Antoine, et naturellement ennemi des Romains. En l’an 20, des intrigues que nous ne connaissons pas, et que Tacite appelle un complot de ses proches, mais où l’on peut, sans trop de scrupules, voir la main de Rome, le précipitèrent du trône, et des députés vinrent prier Auguste de leur donner pour roi Tigrane, autre fils d’Artavasde. Ce prince, élevé à Rome, ne pouvait être qu’un proconsul impérial sur le trône d’Arménie. Auguste se hâta de l’envoyer en Asie, avec Tibère et une armée. L’armée fut inutile ; les Arméniens tuèrent Artaxias, et Tibère, qui croyait combattre, n’eut qu’à poser la couronne sur la tête du nouveau vassal de l’empire. A ces nouvelles les Parthes s’effrayèrent. Depuis ses
victoires sur Antoine, Phrahate avait passé par bien des vicissitudes. Chassé
deux fois de ses États par un compétiteur, auquel Par son effet sur l’opinion, ce succès valait mieux qu’une victoire ; Auguste en témoigna sa gratitude à Phrahate par de riches présents. Mais ces dons étaient encore une perfidie. Il lui envoya une belle Italienne, Thermusa, qui prit sur l’esprit du monarque barbare un tel empire, qu’après avoir supplanté ses rivales et s’être fait déclarer reine[1], elle obtint de lui qu’il confierait tous ses enfants à Auguste. Depuis ce jour, Rome eut le moyen de répondre à une agression des Parthes en leur renvoyant la guerre civile. Les successeurs d’Auguste trouvèrent le procédé bon et firent souvent aux princes de l’Orient des cadeaux de vases d’or et d’argent élégamment ciselés, de riches étoffes, de vins précieux, surtout de belles esclaves. La frontière de l’Euphrate allait donc être en sûreté, grâce aux quatre légions cantonnées dans la Syrie[2], aux États vassaux échelonnés le long du fleuve, à ce Tigrane d’Arménie que Tibère a couronné, mieux encore à l’italienne qui règne au profit de Rome dans Ctésiphon, et qui a pris les mesures nécessaires pour réserver à son fils Phrahatace l’affection et la couronne du vieux monarque : c’étaient de solides avantages. À Rome, l’opinion attendait mieux : on n’y parlait que de conquêtes qui donneraient à l’empire l’Océan pour ceinture, de sorte qu’il y aurait sur la terre un prince chef des nations, comme il y avait au ciel un dieu maître suprême de l’Olympe[3]. Properce, Tibulle, Horace, avaient un instant oublié leurs amours pour célébrer les héros qui allaient franchir les remparts de Bactres, enlever à ses chefs parfumés leurs robes de lin, dompter les Sères aux chevaux bardés de fer, les Gètes glacés et l’Indien que brûlent les feux du soleil. Virgile partageait l’ivresse générale et voyait déjà Auguste élevant des colonnes triomphales aux deux extrémités du monde[4]. Le prince, plus sage que ses poètes, s’était contenté d’obtenir des Parthes un acte de déférence, qu’on pouvait faire passer pour un acte de soumission, et il s’était assuré des garanties contre eux, en se donnant le moyen d’intervenir dans leurs affaires. Afin de les tenir plus sûrement en paix, il avait renoué les relations de Marc Antoine avec Kanichka ou son successeur, et ce puissant roi de Bactriane, qui commandait, dit Strabon, à six cents princes sur les deux rives de l’Indus, lui envoya, à Samos, une somptueuse ambassade, dont l’arrivée fit grand bruit dans l’empire, surtout lorsque en présence d’Auguste un philosophe, venu avec les ambassadeurs, fut entré en riant dans le bûcher qu’il s’était fait préparer à Athènes. Une chose plus sérieuse que l’inutile mort de ce fou
vaniteux était l’établissement de relations amicales avec le prince indien et
sans doute avec d’autres, car la même politique se retrouve sur toutes les
frontières. Dans l’inscription d’Ancyre, Auguste énumère avec complaisance
les peuples qui avaient demandé son amitié, et se vante d’avoir, le premier
des chefs de Rome, plusieurs fois reçu des ambassades indiennes ; il a raison
d’en tirer gloire, le commerce était intéressé à ces relations autant que la
politique, c’est-à-dire la richesse autant que la paix de l’empire. Pendant
tout son principat, l’ordre ne fut pas une seule fois troublé sérieusement
dans les provinces orientales. L’expédition que l’empereur envoya de ce côté
en l’an 1" de notre ère, sous les ordres de C. César, eut moins pour but
de défendre Un événement, qui fit moins de bruit que ces catastrophes royales, est pour nous plus significatif : la mort de Lollius que l’empereur avait donné pour guide ü son petit-fils. Le conseiller vendit son crédit aux rois de l’Orient et amassa en peu de temps une fortune scandaleuse ; le roi parthe, qu’il voulait sans doute mettre à trop forte rançon, ayant dénoncé ses manœuvres, Caïus le chassa de sa maison, et il s’empoisonna[5]. Nous tirons de cette mort la conséquence que, si les habitudes proconsulaires n’étaient pas encore oubliées, c’était avec de grands risques qu’on les pratiquait. Dans Au sud de l’empire, quelques guerres avaient eu lieu avant et pendant le séjour d’Auguste en Orient. Chaque année, des flottes considérables traversaient la nier Rouge pour gagner l’Inde, et, naviguant dans une mer difficile, avaient besoin de trouver le long de la route des ports de refuge. Auguste se proposa de soumettre les peuples qui habitaient ces rivages et de mettre la main sur l’Yémen, où l’antiquité croyait que la nature avait placé d’inépuisables richesses. L’an 24, Ælius Gallus partit d’Égypte avec dis mille soldats sous la conduite d’un chef des Nabatéens[6]. Ces Arabes, dont la capitale était l’entrepôt du commerce de toute la péninsule, avaient intérêt à faire échouer l’expédition. Gallus, trompé par son guide, erra sis mois dans des solitudes affreuses. Il prit toutefois plusieurs villes et pénétra jusqu’à cieux journées de chemin du pays des aromates. Mais les maladies et le manque de vivres le forcèrent à revenir sur ses pas[7]. Cependant Cette double expédition des deux cinés du golfe Arabique n’avait pas réussi. Du moins le nom romain et une crainte salutaire avaient été portés dans ces régions, et le commerce de la mer Rouge en prit un plus libre essor[10]. Les fastes capitolins placent en cette année 21 un
triomphe de Sempronius Atratinus pour l’Afrique, et en l’an 19 un second
triomphe africain décerné à Cornelius Balbus[11]. Ce proconsul
d’Afrique avait pénétré sur les traces des anciens marchands carthaginois
jusqu’au Fezzan[12],
vaste oasis qui a toujours été le principal marché de l’Afrique septentrionale.
C’est le point de rencontre des caravanes qui viennent du Maroc et de
l’Égypte, du Soudan et des rives de Ainsi, en Afrique, les Romains perçaient à travers le désert pour renouer les anciennes relations de Carthage, des Cyrénéens et de l’Égypte, avec les marchés intérieurs, et leurs flottes s’aventuraient à travers l’océan Indien. Sur cette frontière la politique d’Auguste était toute commerciale, entreprenante, active, et le résultat sera pour ces provinces une prospérité plus grande et plus durable qu’en aucun autre point de l’empire. En Asie, où il s’était trouvé en face de vieux États dont il savait les ressources, il avait été ferme, mais réservé : il avait lutté d’adresse plutôt que de force ; il avait fondé ce système d’influence et d’intervention pacifique qui fera longtemps régner la paix sur les bords de l’Euphrate. Aussi, lorsque, après ces trois années si bien remplies (21-19), il rentra dans Ronde, qu’Egnatius Rufus venait d’agiter au nom de la liberté des comices, le peuple, oubliant les plaintes et les conseils de l’ambitieux qu’il avait un instant suivi, comme il suivait toute curiosité, courut au-devant du prince et lui offrit le consulat à vie avec la préfecture des mœurs. Il n’y avait en cela ni lâcheté ni faiblesse, car tous étaient sous le charme, tous acceptaient cette domination qui, ne cherchant que la paix, trouvait encore la victoire ; et l’on répétait les beaux vers où l’ami de Mécène montrait la reine d’Éthiopie fugitive, l’Arménie presque domptée, les Daces vaincus, et, au milieu d’une cour formée par les députés du monde, un chef parthe à genoux devant Auguste, recevant de ses mains une couronne, comme si Phrahate devait la sienne à l’empereur[15]. Rien n’avait flatté l’orgueil romain comme cette apparente soumission d’un ennemi réputé invincible. En souvenir de cette victoire sans larmes, un arc de triomphe fut élevé à celui qui avait délivré les aigles captives ; et on les plaça dans le temple de Mars Vengeur, où tous les rois qui solliciteront l’amitié d’Auguste viendront attester leur bonne foi en face de ces trophées reconquis. Auguste était donc à ce moment heureux où tout souriait à sa fortune et servait sa grandeur. La paix régnait aux frontières, à l’intérieur l’anarchie avait été vaincue, et de bonnes lois, de sages réformes, légitimaient son pouvoir. Autour de lui se groupaient une famille nombreuse et de glorieux génies. Octavie lui restait ; Julie, mariée à Agrippa et protégée contre ses vices par les vertus de son époux, répondait aux vœux de l’empereur par une heureuse fécondité. Deux Princes, Caïus et Lucius, adoptés par Auguste, allaient continuer le sang des Césars[16]. Cependant Livie ne voyait pas encore dans ces enfants des rivaux pour ses fils ; Tibère ne montrait que des talents, et Drusus, aimé du peuple et des soldats, allait signaler son courage. Quelques nuages cependant avaient déjà passé à cet horizon brillant. Lucius César Marcellus était mort, et la poésie se voilait de deuil, car le chantre d’Énée expirait à cette heure même dans Brindes, et Tibulle le suivait au tombeau. Mais la mort de Marcellus, ce favori du peuple qui eût trompé peut-être ses espérances, avait rendu Agrippa à l’empire ; Ovide et Properce remplaçaient Tibulle, et les Muses pouvaient partager entre Horace et Tite Live la couronne tombée du front de Virgile. II. — FRONTIÈRE DU RHIN ET DU DANUBE.
Le premier coup contre cette prospérité si grande lui vint
des lieux d’où viendront tous les dangers de l’empire, des bords du Rhin. Des
Sicambres, Usipètes et Tenctères avaient franchi le fleuve, battu la
cavalerie romaine et enlevé à Ichius l’aigle de la cinquième légion. A cette
attaque, comme à un signal convenu, répondit tout le long du Danube un long
cri de guerre. Le monde barbare sembla se lever tout entier. L’Istrie et Entre les Gaules et Les vainqueurs se firent aussitôt pionniers, percèrent des
routes, bâtirent des forts ; et Auguste jeta audacieusement au delà des
montagnes et du Rhin, à deux pas du Danube, une grande colonie, Augusta Vindelicorum (Augsbourg). En communication avec
l’Italie par une voie qui traversait le pays des Grisons, et assise sur le
Lech, qui tombe dans l’un des deux grands fleuves allemands et à ses sources
près de l’autre, la capitale des nouvelles provinces était bien située pour
barder la partie la plus vulnérable de la frontière romaine sur la Germanie[20]. Plus bas, sur
le Danube, au point de rencontre du Norique et de A l’autre extrémité de l’empire, Agrippa visitait La modestie d’Agrippa était commandée par celle du prince : à son retour des Gaules, Auguste rentra de nuit dans la ville. Le lendemain, après avoir salué le peuple accouru autour de sa demeure, il alla au Capitole déposer aux pieds de la statue de Jupiter les lauriers qui couronnaient ses faisceaux, puis à la curie rendre compte au sénat assemblé de ce qu’il avait fait depuis son départ de Rome. Le calme partout rétabli ou maintenu, les deux chefs de
l’empire étaient rentrés presque en même temps dans Rome (13 av. J.-C.).
Auguste y prit enfin le grand pontificat, et Agrippa fut continué pour cinq
ans dans la puissance tribunitienne. Mais la vie si bien remplie de ce grand
ministre touchait à son terme. Envoyé contre les pannoniens révoltés, il
n’eut qu’à se montrer pour les soumettre, et, il revenait, quand une maladie
l’arrêta dans Sa mort laissa dans la famille impériale un vide que rien ne put combler, et marqua le commencement de cette seconde période des longs règnes, si souvent languissante et triste. Depuis ce jour, la solitude et le deuil se firent, chaque année, plus grands autour d’Auguste. Déjà Mécène semble en disgrâce[25], et Horace refuse les avances du maître du monde. Entouré d’intrigues et de complots, entraîné à des guerres dangereuses, frappé d’un grand désastre public, Auguste verra tous les siens tomber l’un après l’autre ou couvrir de honte sa maison, et il restera jusqu’à soixante-seize ans le dernier vivant de ses amis, de ses enfants, de ses grands hommes, seul en face de Tibère. Le travail ébauché une première fois pendant le second séjour d’Auguste au delà des Alpes demandait à être repris et consolidé. Drusus, laissé en Gaule pour y achever le dénombrement et veiller star les Germains, s’attacha les provinciaux par ses manières affables, et les amena à faire la démonstration dont il a été parlé, l’érection du temple de Rome et d’Auguste. La docilité des provinces chevelues lui ôtant toute préoccupation sur ce qu’il laissait derrière lui, il passa le Rhin, en visita attentivement la rive droite, construisit des forts pour commander les passages, et, ces précautions prises, prépara une expédition sérieuse. La vaste plaine de l’Allemagne septentrionale est coupée par plusieurs cours d’eau l’Ems, le Wéser et l’Elbe, qui, courant du sud au nord, forment, contre un ennemi venant du Rhin, une suite de lignes de défense. Si l’ennemi arrive par nier, ces fleuves, au contraire, lui donnent accès jusque clans l’intérieur du pays. Drusus prit la dernière route, qui le portait rapidement sur les derrières des tribus les plus remuantes. Pour éviter la navigation dangereuse du littoral batave, il creusa, du Rhin à l’Yssel[26], un canal (Fossa Drusiana) qui mena ses navires au lac Flevo (Zuyderzée), dont l’émissaire s’ouvrait sur la mer du Nord. Les Frisons s’étant laissé gagner, il pénétra hardiment dans l’Ems, où il vainquit les Bructères en un combat naval, et aux bouches du Wéser, où ses vaisseaux, laissés à sec par le reflux, auraient couru le risque d’être détruits par les Chances, si les Frisons qui suivaient par terre ses mouvements n’étaient arrivés à temps pour le dégager. Cette première expédition effraya, ou attira dans
l’alliance de Rome, les peuples du Nord depuis longtemps ennemis de leurs
voisins du Sud, entre autres les Chances qui gagnèrent à leur défection cet
éloge de Tacite : Ils sont la plus noble des
nations germaniques, la seule qui fasse de la justice le soutien de sa
grandeur. Mais les Sicambres, les Chérusques et les Suèves,
oubliant leurs inimitiés, unirent leurs forces contre ces Romains qui
venaient les chercher jusque dans leurs forêts. Les Cattes refusèrent
d’entrer dans la ligue. C’était un peuple puissant dont l’infanterie était
renommée : Les autres Barbares vont au combat,
dit le peintre de Par la soumission récente des Battes et des Vindéliciens,
Rome s’était approchée du Danube ; mais ce fleuve appartenait encore aux
Barbares. Durant les campagnes de Drusus en Germanie, ils se soulevèrent, et
tout fut en feu, du Norique au Pont-Euxin. Dans De ce côté, la guerre fut conduite par Tibère. En l’an 12
avant J.-C., il dévasta toute Les défaites répétées des Dalmates et des Pannoniens,
l’amitié du grand peuple des Scordisques et la vigilance de Rhémétalcès,
permettaient de compter sur la paix le long du Danube. Auguste voulut voir de
près l’autre frontière, celle du Rhin ; en l’an 10, il passa une troisième
fois dans Tous ces points étaient bien choisis pour faire du Rhin
une barrière infranchissable ; ils l’étaient aussi pour favoriser
l’offensive, car de leurs camps Ies légions pouvaient s’élancer au cœur de Auguste fut surpris, au milieu de ces travaux, par des bruits de guerre éclatant sur la double frontière qu’il croyait déjà pacifiée. Les Dalmates se révoltaient ; les Daces, franchissant le Danube sur la glace, envahissaient le territoire pannonien, et les Cattes, cette fois unis aux Sicambres, parce que les Romains voulaient les obliger à changer de, demeure, reprenaient les armes. Les deux fils de Livie coururent à ces ennemis qu’ils connaissaient. Tibère triompha sans peine des Dalmates et dompta leur turbulence, en les obligeant à tourner leur activité vers l’exploitation des mines[33]. Dans les provinces danubiennes, il disposa si habilement ses garnisons, que la paix y fut rétablie pour quinze ans. Les marchands romains y accoururent, apportant avec eus les mœurs et la langue de l’Italie. La connaissance de la discipline, même celle de l’idiome des Romains, dit un témoin oculaire, étaient répandues chez les Pannoniens ; beaucoup cultivaient les lettres et s’étaient familiarisés avec les exercices de l’esprit[34]. Sirmium, Siscia, Salone, étaient les principaux foyers d’où rayonnait l’influence romaine. Drusus, de son côté, s’était résolu à faire aussi de L’hiver approchant, Drusus avait repris la route de ses
cantonnements, lorsque, par une chute de cheval, il se blessa mortellement.
Tibère, alors à Pavie, franchit les Alpes en toute hâte et put recevoir les
derniers embrassements de son frère. Ce vaillant prince n’avait que trente
ans : sa mort était une perte irréparable pour l’empereur. Drusus avait mis
sa gloire dans la conquête de En l’an 8, Auguste partit une quatrième fois pour Les victoires de Tibère semblaient avoir dompté les Germains. Auguste se décerna l’honneur de reculer le pomerium, puisqu’il croyait avoir reculé les frontières de l’empire (8 av. J.-C.)[40]. Pour la troisième fois, il ferma le temple de Janus, et pendant douze années ces portes d’où sortait la guerre ne s’ouvrirent point. C’est au milieu de ce silence des armées que naquit Celui qui allait mettre au ciel un seul Dieu et sur la terre un seul dogme : la fraternité[41]. Cette paix universelle n’était cependant pas si complète
que l’empereur pût craindre pour ses légions la dangereuse oisiveté des
camps. Préoccupé de consolider la puissance romaine sur le Rhin et le Danube,
il avait presque oublié l’Euphrate, lorsque des troubles en Arménie et
l’intervention des Parthes dans ce royaume que Rome devait garder sous sa
tutelle l’obligèrent, pour ne pas laisser défaire l’œuvre de ses plus belles
années, d’envoyer son petit-fils Caius en Orient (1 av. J.-C. - 4 après). Le jeune prince
visita d’abord l’Égypte, traversa avec des forces considérables le pays
Nabatéen, Dans Pendant que ce travail s’accomplissait au nord, entre le
Rhin et l’Elbe, un grand royaume barbare s’élevait au sud, à deux pas des
avant-postes romains. Un Marcoman, Marbod, accouru à Rome comme tant d’autres
Germains, avait été frappé de cette organisation savante où tout était
admirablement disposé pour la domination. La leçon lui profita. De retour au
milieu des siens, avec l’autorité d’un homme qui a vu de grandes choses et
qui est en état clin faire, il saisir, le pouvoir, retire son peuple des
bords du Mein, où il a été vaincu, et l’établit dans Auguste s’alarma de cette puissance, que Tibère en plein sénat
estimait plus à craindre pour Rome que ne l’avait été Pyrrhus ou Antiochus,
et il résolut de l’abattre avant qu’elle eût encore grandi. Une armée
formidable de six légions, réunie sur le Danube, s’apprêta à franchir le
fleuve pour attaquer Leur plan avait été cependant bien calculé. Toutes les
troupes romaines cantonnées dans leur pays étaient allées rejoindre Tibère ;
qu’ils eussent attendu un mois, et la guerre engagée avec 14arbod n’eût pas
laissé un soldat entre le Danube et les Alpes : l’Italie leur était ouverte.
Mais ils voulurent prévenir le départ des corps auxiliaires qu’ils avaient dû
fournir et qui, dans le camp romain, eussent été des otages. Leurs premiers
coups furent dirigés contre les villes, foyers de la domination et de
l’influence romaines. Les Pannoniens se jetèrent sur Sirmium, les Dalmates
sur Salone : huit cent mille hommes, disait-on à Rome, étaient soulevés ;
deux cent mille avaient des armes, et des chefs habiles conduisaient le
mouvement. Ils formèrent trois corps : le premier resta à la garde du pays,
le second envahit Des mesures énergiques et promptes furent prises. On fit
des levées ; on rappela les vétérans et cinq légions d’outre-mer. Les
sénateurs et les chevaliers promirent pour toute la durée des hostilités des
contributions régulières, les riches, suivant leur fortune, un ou plusieurs
soldats, pris parmi leurs esclaves, avec six mois de vivres. On dissimula la
honte de cette ressource extrême, en donnant à ceux-ci, avec les armes, la
liberté. Tibère ne s’occupa la première année que du soin de couvrir l’Italie
; il s’établit fortement à Siscia, où il barrait la vallée de Auguste fit de nouveaux efforts ; au printemps (7 de J.-C.), il envoya
à Tibère son neveu Germanicus, avec une seconde armée. Quinze légions,
c’est-à-dire la force la plus considérable qu’on eût vue depuis les guerres
civiles, étaient réunies. Mais ce pays coupé de fleuves et de montagnes était
admirablement propre à une guerre de partisans ; l’année se passa sans amener
de résultats ; encore les Romains n’eurent à se vanter que d’un succès de
Germanicus contre les Dalmates et d’une victoire qui avait failli leur coûter
cinq légions. Auguste, plus inquiet, se rendit, malgré ses soixante-dix ans,
à Ariminum, afin d’être plus prés des événements. Par malheur, ces peuples,
qui faisaient tête si courageusement à deux cent mille Romains, n’avaient pas
compté sur un ennemi plus terrible, la faim ; les terres, laissées sans
culture, ne donnèrent point de moissons, et une mortalité affreuse, causée
par des aliments insalubres, les décima. Sans avoir été vaincus, ils cédèrent[44] ; ils ne
rendirent pas leurs armes, elles leur tombèrent des mains. Pourquoi, demandait Tibère à Bato, le chef des
Dalmates, as-tu causé cette révolte ?
— Pourquoi, répondit hardiment ce
brave, envoyez-vous, pour garder vos troupeaux,
des loups au lieu de chiens et de bergers ? Le futur empereur se
souviendra de cette parole. Afin d’étouffer sous des ruines les dernières
étincelles de l’incendie, on soumit Ainsi, la guerre était enfin rejetée loin des populations laborieuses ; et l’on n’entendit plus, même aux frontières, le bruit de cette mer sourdement agitée qui brisait encore contre les postes avancés des légions. Le peuple romain, ivre de sa grandeur, célébrait lui-même son apothéose en disant celle de Rome, et recevait de ses postes la prouesse d’une puissance sans bornes et d’une durée sans fin : His
ego nec metas rerum nec tempora pono : Imperium sine fine dedi[46]. C’est au milieu de ces prospérités que se fit entendre le cri lugubre, présage de l’avenir : Varus est mort ! Les Romains n’avaient pas en Germanie oublié leur prudence ordinaire. Les inimitiés héréditaires des tribus axaient été mises à profit. Toute la côte jusqu’à l’Elbe était alliée ; le long du Rhin, les Usipètes et les Tenctères étaient soumis ; quarante mille Sicambres avaient été transportés en Gaule, et l’on croyait pouvoir compter sur les Bructères. Des postes fortifiés, s’appuyant sur la grande forteresse d’Aliso, aux sources de la lippe, surveillaient le pays ; et à Cologne, comme à Lyon, s’élevait un autel dont les Germains étaient les prêtres et Rome la divinité[47]. Çà et là se formaient déjà quelques établissements où les Barbares apportaient leurs produits grossiers, et s’initiaient à la vie romaine[48]. Leurs chefs, attirés au service dans les légions, allaient verser leur sang pour Rome[49] ; et, rentrés dans leurs tribus avec des colliers d’or et des armes d’honneur, récompense de leur courage, ils racontaient les merveilles qu’ils avaient vues, et cette Italie couverte d’autant de cils qu’ils avaient de cabanes, et cette grande home peuplée comme un monde, et ces maîtres de l’empire qu’on adorait comme des dieux, parce qu’ils en avaient la puissance. Ces récits frappaient l’imagination des Barbares, et la divinité d’Auguste paraissait bien plus certaine aux bords du Wéser que sur ceux du Tibre. Un jour, dit Velleius Paterculus (II, 109), nous campions sur l’Elbe, en face des Barbares rangés sur la rive opposée. Tout à coup, un de leurs chefs, vieillard d’une taille majestueuse, détache un canot, et, s’avançant au milieu du fleuve, demande à voir César. On y consent ; il aborde, et, après avoir longtemps contemplé Tibère en silence : Nos guerriers, dit-il, sont insensés. De loin ils vous honorent comme des dieux ; de près ils craignent de se confier à votre foi. Pour moi, César, je te remercie de la faveur que tu m’as accordée ; car ces dieux que je ne connaissais que par la renommée, aujourd’hui je les ai vus. Ce jour est le plus heureux de ma vie. Il obtint de toucher la main du général, et, rentrant dans son canot, les yeux toujours attachés sur César, il regagna le camp de ses compatriotes. Qu’on laisse faire au temps, et le charme exercera son influence sur des peuples simples à qui toute grandeur impose. Il avait bien opéré sur ces Gaulois qui, en présence d’Alexandre, terrible et menaçant, ne craignaient que la chute du ciel ; qui, en face de Caligula, monstre couronné, ne trouveront qu’à railler et à rire. Mais on voulut précipiter leur conversion ; la violence rappela à ces enfants qu’ils étaient des hommes. La position prise par Marbod et la révolte des Pannoniens
avaient décidé Auguste à hâter !’œuvre de la transformation de Mais ce vargus, les licteurs romains l’arrêtent, les verges le déchirent, la hache le frappe, lui que les dieux seuls peuvent frapper ! Pour les moindres délits, des plaidoyers sans fin. Le barbare offre en vain de tout décider par un serment ; Varus veut des enquêtes, des témoins, des discussions de faits et de textes. Faut-il s’étonner qu’au contact de ces deux sociétés contraires le génie romain et le génie barbare se soient sentis ennemis pour toujours ? Siffle donc, vipère, disaient les Germains vainqueurs aux légistes dont ils avaient arraché la langue et cousu la bouche. Cette haine féroce montre d’où la révolte partit. La noblesse se mit à la tête du mouvement ; un jeune chef des Chérusques, Hermann, fils de Sigimer, fut l’âme du complot. Livré aux Romains comme otage, il leur avait plu et avait reçu l’anneau d’or avec le commandement d’une troupe d’auxiliaires germains. Mais il était l’ennemi héréditaire d’un autre chef des Chérusques, Ségeste, et il satisfit à la fois sa haine contre lui et sa passion pour la belle Thusnelda en ravissant cette fille de son rival. C’était une mortelle offense dont le père, ami des Romains, devait un jour ou l’autre obtenir de Varus la vengeance. Hermann, personnellement menacé, sentit plus vivement alors les griefs de son peuple. Il appela les chefs principaux des Cattes, des Chérusques, des Marses et des Bructères à de secrets conciliabules où l’on arrêta un soulèvement général. En vain Ségeste avertit Varus : Fais-nous arrêter, disait-il, et, sans nous, le peuple n’osera rien entreprendre ; plus tard tu découvriras la vérité. Varus garda sa confiance. Cependant on lui apprend qu’une peuplade éloignée se révolte. C’était un piège pour l’attirer hors de son camp et loin des postes fortifiés. Les chefs qui l’entourent s’offrent à guider sa marche ; ils l’égarent, puis, s’échappant sous prétexte d’aller chercher pour lui des secours dans leurs tribus, ils vont se mettre à la tête des bandes qui déjà approchent. Un fils de Ségeste était prêtre de Rome et d’Auguste, à l’Autel des Ubiens, il rejoignit ses frères. Embarrassées d’un immense bagage, les trois légions
avançaient péniblement, sur une longue ligne, à travers des forêts profondes
et humides, sans précaution et comme en pleine paix. D’abord quelques troupes
de Barbares se montrèrent, puis leur nombre grossit, et la forêt sembla
s’animer tout entière ; l’armée était enveloppée. Elle put cependant gagner
un terrain libre et campa. Varus fit brider les bagages et le lendemain
rebroussa chemin pour gagner le fort Aliso. Sur cette route il retrouvait,
entre les sources de l’Ems et de Ce fut cinq jours après la soumission définitive des Pannoniens et des Dalmates qu’on apprit à home le désastre de Varus. La nationalité germanique se levait victorieuse et menaçante au moment où la dernière nationalité qui résistât dans l’intérieur de l’empire succombait ; elle se levait pour dire sur le Rhin à cette puissance qui depuis trois cents ans avançait toujours, ce que sur l’Euphrate les Parthes lui avaient dit déjà : Tu n’iras pas plus loin. Hermann, en effet, poursuivait sa victoire. Il enleva tous
les châteaux que les Romains avaient bâtis, même celui d’Aliso ; et du Rhin
au Wéser, toute la terre de Germanie redevint libre. Il avait fait couper la
tête au cadavre de Varus et envoyé ce trophée sanglant au roi des Marcomans.
Que ce grand chef, naguère la terreur de Rome, s’unisse à la confédération
des tribus du Nord ; que, réparant la faute commise trois ans plus tôt, au
montent de la révolte des Pannoniens, il franchisse le Danube, tandis que le
libérateur de Heureusement, Marbod était jaloux de la gloire d’Hermann, et, loin de répondre à son patriotique appel, il renvoyait à l’empereur la tête de Varus. Tranquille de ce côté, Tibère put accourir sur la frontière gauloise, fortifier tous les postes, rétablir la discipline, chasser des camps le luxe et les trop nombreux équipages, même risquer les aigles au delà du Rhin. Après lui, Germanicus resta à la tête des huit légions qui garnissaient la rire gauche du fleuve. Content d’avoir vaincu, l’ennemi ne passait point de la résistance à l’attaque. L’empire était sauvé ; mais la gloire d’un long règne était ternie, car home attendra cinquante années que les généraux rapportent au temple de Mars Vengeur la dernière des trois aigles de Varus, et c’est au bruit de la guerre renaissante qu’allait descendre au tombeau le prince qui avait réduit l’art de régner à l’art de mettre partout la paix et le plaisir. |
[1] Josèphe, Ant. Jud., XVIII, 5. On a des médailles où Thermusa est représentée comme reine et divinité céleste.
[2] Tacite, Ann., IV, 5. Il y avait aussi une garnison aux Pyles Syriennes.
[3] Horace, Carm., III, V, 1-3.
Cœlo tonantem credidimus Jovem
Regnare ; præsens davus habebitur
Augustes....
[4] Properce, Carm., III, IV et XII ; IV, III ; Tibulle, Carm., IV, I ; Horace, Carm., II, II ; III, V ; Epist., I, XII ; Virgile, Georg., II, 172 ; III, 16.
[5] Velleius Paterculus, II, 101-2 ; Pline, Hist. nat., IX, 58.
[6] Je suis la
chronologie de Clinton, Fasti Hellen.
Cependant Strabon, l’ami de Gallus, place l’expédition de
[7] Gosselin met la
ville de Marsyaha, où il s’arrêta, à deux journées de
[8] Pline, Hist. nat., VI, 29.
[9] Strabon, XXII, p. 821, et XV, p. 719.
[10] Le jaune Caius alla plus tard montrer encore les enseignes romaines en Arabie et jusqu’au bord de la mer Rouge, ou, s’il faut en croire Pline (Hist. nat., II, 67), il reconnut les débris de vaisseaux espagnols naufragés sur ces côtes.
[11] Florus (IV, 12) parle d’une expédition heureuse de Quirinius contre les Marmarides et les Garamantes.
[12] Sa capitale
actuelle, placée au centre du pays, Mourzouk, est à trente-cinq journées de
Tripoli. Cf. Ritter, Erdkunde, Th. I,
3, 989. Le capitaine Lyon (A narrative of
travels in Northern Africa), parti de Mourzouk le
[13] Pline, Hist. nat., V, 3. Les deus principales villes prises par Balbus étaient Cydamus, aujourd’hui Ghadamès, à 80 lieues de Tripoli, et Garama (Germah), beaucoup plus loin.
[14] L’inscription
qu’on y lit porte le nom de Septime Sévère. (Lyon’s Narrative of travels, chap. VII, p. 240.) Ce voyageur trouva
(en 1819) cette grande oasis bien aride, mais il la regarde comme l’étape
nécessaire pour ceux qui veulent pénétrer de
[15] Suétone, Octave, 21 ; Justin, XLII, 5 ; Horace, Epist., I, XII ; Carm., I, XI ; II, IV, 8.
[16] Nés l’un en l’an 20, l’autre en l’an 27, et adoptés par leur grand-père.
[17] Dion, LIV, 20. En l’an 9, Crassus avait triomphé des Besses et des Bastarnes. (Id., LI, 24.)
[18] Dion, LIV, 20. J’ai jugé sévèrement les Germains ; je viens de trouver la confirmation textuelle de mes paroles dans un livre récent du Dr. Sickel, Geschichte der deutschen Staatsverfassung, qui déclare (p. 59) que cette race n’avait guère un sentiment du droit plus développé que celui qui régnait dans l’armée de Clovis, et que la deutsche Treue tant vantée est une légende historique.
[19] Horace, Carm., IV, 44 ; Strabon, VII, p. 292.
[20]
[21] Je ne sais à quelle époque elle fut bâtie, mais en l’an 5 de J.-C. elle servait de place d’armes à Tibère. (Velleius Paterculus, II, 109.)
[22] Plusieurs des colonies d’Auguste en Gaule et en Espagne sont de cette époque. (Dion, LIV, 23 et 25.)
[23] Strabon, XVI, 736 ; Josèphe, Ant. Jud., XVI, 2.
[24] Dion, LIV, 28. Il avait cinquante et un ans. (Pline, Hist. nat., VII,8.) Auguste prononça son oraison funèbre et le fit ensevelir dans le tombeau qu’il s’était préparé à lui-même.
[25] C’est du moins Tacite qui le dit (Ann., III, 30) : Ætate provecta, spieciem magis in amicitia principis quam vim tenuit, et il ajoute une fort belle phrase sur la fatalité du pouvoir qui ne saurait toujours durer et sur ce dégoût dont se laissent prendre les princes qui ont tout donné, les favoris qui ont tout obtenu. Pline dit beaucoup plus simplement et avec plus de vérité (VII, 52) que Mécène souffrit longtemps d’une maladie nerveuse et d’une fièvre qui, dans les trois dernières années de sa vie, ne lui laissa pas une heure de sommeil. Il est évident qu’un conseiller dans un pareil état de santé devait être bien rarement consulté. Que de fois le grand style de Tacite couvre l’erreur ou le vide !
[26] Au retour, il chercha de prétendues colonnes d’Hercule, confus souvenir laissé peut-être sur ces côtes par quelque navigateur carthaginois. L’audace ne lui manqua pas, dit encore Tacite, mais l’Océan protégea les secrets d’Hercule et les siens. Depuis, nul mortel n’a tenté unetelle recherche : on a jugé plus discret et plus respectueux de croire aux œuvres des dieux que de les approfondir. Belles paroles, d’autant plus sonores qu’elles sont creuses.
[27] Ce fut à cette
occasion que
[28] Des auxiliaires gaulois servaient dans l’armée de Drusus, où des Nerviens se signalèrent. (Tite Live, Epit., CXXXIX.) Après la défaite de varus, les Beiges offrirent d’attaquer les Germains et de venger sa mort. (Tacite, Ann., I, 43.)
[29] Il n’y a point de
date précise pour ce démembrement ; il paraît avoir eu lieu sous Auguste, car,
en l’an 9 de J.-C., Cologne avait, comme Lyon, un autel de Rome et d’Auguste,
avec un sacerdos élu, ce qui permet de supposer une organisation provinciale.
(Tacite, Ann., I, 39, 57.)
[30] Dion, LIV, 35, et
Florus, IV, 12. Les travaux sur
[31] Tacite, Germanie, 29.
[32] Vindonissa (Windisch), à peu de distance du
Rhin et des points où se rencontrent l’Aar,
[33] Velleius Paterculus, II, 110.
[34] Florus, IV, 12.
[35] Strabon, VII, p. 205.
[36] Tacite, Ann., I, 35 ; II, 41, 82 ; Suétone, Claude, 1.
[37] Suétone, Octave, 21 ; Tacite, Germanie, 29.
[38] Dion, LV, 6.
[39] Les Allemands
applaudissent à cette politique ; dans ces colons, ils voient les pionniers des
futures invasions germaniques. (Preuss, Kaiser
Diocletian, p. 55.) Durant mon ministère, j’ai fait tous les efforts que la
loi aie m’interdisait pas pour remplacer l’allemand par le français dans les
écoles primaires des cantons allemands de
[40] Velleius Paterculus, II, 97 ; Dion, LV, 6.
[41] La date de la naissance du Christ est l’an de Rome 747 suivant Fisher, Ideler et Reynold, 749 selon Clinton et Zumpt. Saint Luc et saint Matthieu font naître Jésus deux ans environ avant la mort d’Hérode, qui mourut certainement en 750. L’ère chrétienne devrait donc être reculée de quatre a cinq ans.
[42] Josèphe, Ant. Jud., XVIII, 5. Suivant
Saint-Martin, Phrahate n’était pas mort, mais Phrahatace, le fils de Thermusa,
avait déjà le titre de roi. Il tua son père en l’an 9. Comme il sera question
plus tard de
[43] Dion, LV, 28. Il parle (LVI, 43) d’un brigand si redouté en Espagne, qu’Auguste promit 250.000 drachmes à qui le lui livrerait.
[44] Dans
[45] Sur cette guerre, Dion, LV, 29, 55, et Velleius Paterculus, qui y prit part, II, 110-14.
[46] Virgile, Énéide, I, 278-279.
[47] Tacite, Annales, I, 57, Ara Urbiorum.
[48] Dion, LVI, 18.
[49] On en voit dans les guerres de Dalmatie. (Dion, LVI, 11.)
[50] Strabon, VII, p. 290 ; Tacite, Annales, II, 45. Quelques mouvements ayant éclaté en Judée, il avait fait mettre en croix sur les routes deux mille prisonniers. (Josèphe, Ant. Jud., XVII, 10.)
[51] Sur cette procédure, voyez Grimm, Deutsche Rechtsalterthümer, mais je crains qu’elle ne soit d’une époque comparativement récente.
[52] Sénèque, Epist., 47 : Multos splendidissime natos, senatorium per militiam auspicantes gradum. (Tacite, Annales, XII, 27.) Quarante ans plus tard, il y avait encore des prisonniers romains chez les Cattes. (Id., ibid. Cf. Dion, LVI, 10-21 ; Velleius Paterculus, II, 118-9 ; Tacite, Annales, I, 55, 57, 61.) Les trois légions détruites portaient les numéros %VII, YVIII et XI% ; ces numéros, considérés comme de mauvais augure, ne reparurent plus dans l’armée romaine. On a beaucoup disserté sur le lieu de la catastrophe. Par le monument commémoratif élevé en 1867 sur le haut du mont Teutberg, les Allemands ont fixé le dernier acte de cette tragédie aux environs de Detmold.
[53] Dion, LVI, 25.