I. — CONDITION DES ITALIENS.Pour dompter les peuples de l’Italie, Rome avait profité de ces haines municipales qui empêchèrent toujours les villes de concerter leur résistance ; pour assurer leur obéissance après la victoire, elle avait encore accru par l’inégalité des conditions qu’elle imposa, les vieilles jalousies nées de la diversité des origines, des idiomes et des cultes. Ce plan réussit, et nous avons vu la fidélité des Italiens résister aux plus dangereuses épreuves. Mais les alliés eurent le sort des plébéiens : tant qu’on les crut nécessaires, on les respecta ; dès qu’ils devinrent inutiles, ils furent méprisés. Les grands, qui avaient des alliances avec toute la noblesse des cités latines, l’avaient attirée à Rome, en stipulant que celui qui aurait exercé une charge municipale, ou qui laisserait dans sa ville un enfant pour le représenter, acquerrait le jus civitatis en venant habiter Rome[1]. Quand tous les nobles des municipes les eurent ainsi quittés, on s’inquiéta peu de la foule obscure qui y était restée. Les traités qui réglaient leurs privilèges, les distinctions établies entre leurs villes, furent oubliés. Ceux qui n’avaient plus souci, à Rome, du peuple-roi, pouvaient-ils respecter davantage les droits des vaincus ? Une commune oppression effaça donc moralement toute différence ; et, bien que les noms de colonies, de municipes, de préfectures, etc., subsistassent toujours et répondissent à des distinctions réelles, il n’y avait, à vrai dire, au point de vue politique, dans toute la péninsule, que deux grandes divisions, les citoyens romains et ceux qui ne l’étaient pas[2]. Dans l’enceinte de la frontière romaine était la légalité (legitima judicia) ; au delà, l’arbitraire et le
despotisme (dominium). Préneste était libre, et les
traités lui garantissaient une complète indépendance. Cependant un simple
particulier, Postumius, venu dans cette ville pour sacrifier dans le temple
de Locres était fédérée, et l’on sait quelle conduite y tint Pleminius[4]. Calès, Teanum, Ferentinum, étaient d’anciennes colonies, des villes municipales, et voici ce que Caïus Gracchus racontait du haut de la tribune : Dernièrement notre consul étant à Teanum, sa femme voulut aller aux bains des hommes. Le questeur de la ville chargea Marius de les faire aussitôt évacuer mais il y eut quelque retard. La matrone s’indigna, et le consul ordonna à ses licteurs de saisir Marius, d’arracher ses vêtements, de le lier à un poteau, au milieu de la place publique, et de le battre de verges, lui, le premier citoyen de la ville. À cette nouvelle, les habitants de Calès défendirent par un édit l’entrée des bains, tout le temps qu’un magistrat romain serait dans leur ville. À Ferentinum, pour le même motif, notre préteur ordonna l’arrestation des questeurs. L’un se précipita du haut des murs, l’autre fut pris et battu de verges. L’usage des légations libres causait aux alliés de grandes dépenses. Tout sénateur voyageant pour son plaisir ou ses affaires obtenait une mission, c’est-à-dire le droit de faire payer aux alliés les frais de son voyage. heureux quand ils n’avaient pas, en outre, a souffrir de ses caprices out de son orgueil. Un homme de Venouse, disait encore Caïus, rencontra, il y a quelques années, un jeune homme voyageant dans une litière. Est-ce que vous portez un mort ? demanda-t-il en riant aux esclaves. Ce mot lui coûta la vie, il périt sous le bâton. Pour un Romain le mot de ce rustre était de mauvais augure, et le voyageur avait détourné le présage, en le, faisant expier par celui qui en était l’auteur involontaire. Dans une ville alliée que Caton ne nomme pas, un consulaire, Q. Thermus, sous prétexte de quelque négligence,, dans le soin des vivres qui lui étaient destinés, fit publiquement battre de verges tous les magistrats, des hommes de bonne maison pourtant et de grande vertu ! Et quel ressentiment, s’écriait le prudent censeur, ne croyez-vous pas qu’ils en gardent, eux et leurs concitoyens, témoins de tant d’outrages ?[5] — Mais, dit Cicéron, nous aimons mieux inspirer la crainte que l’affection[6]. — En 183, les habitants de Naples et ceux de Nola se disputaient un territoire : le consul Q. Fabius Labeo, pris pour arbitre, assigna les terres contestées au peuple romain : c’était peut-être juste suivant le droit ; c’était d’une souveraine iniquité suivant la politique[7]. De pareils faits ne se passaient ni en tous lieus ni chaque jour. Sur mille points, au contraire, les rapports entre citoyens et alliés étaient excellents, et les traités onéreux ne s’exécutaient pas à la lettre, d’abord parce qu’aucune autorité n’était expressément chargée de veiller à leur exécution ; ensuite parce que, l’intérêt public qui les avait imposés à l’origine paraissant n’exister plus, les intérêts privés se donnaient libre carrière dans les transactions primitivement interdites. Un jour, entre deux batailles, les troupes italiennes et celles de Rome fraternisèrent un instant comme des parents et amis qui se seraient rencontrés[8]. Mais quelques excès commis çà et là suffisaient à faire comprendre qu’ils pouvaient être commis partout, et beaucoup d’Italiens se disaient que les mieux partagés d’entre eux n’avaient pas de garantie contre l’arbitraire d’un magistrat ou contre l’insolence d’un citoyen. Les pouvoirs publics montraient eux-mêmes qu’ils ne prenaient pas au sérieux l’indépendance des alliés. Le décret du sénat sur les Bacchanales viola leur liberté religieuse, comme les plébiscites de Didius et de Sempronius, sur les dépenses des festins et sur l’usure, violaient leur liberté civile[9]. Pour tous, il était évident qu’il n’y avait en Italie, malgré la diversité des titres, qu’un peuple souverain et un peuple sujet, l’un exploitant l’autre. Depuis la destruction de la classe moyenne à Rome, c’était en effet sur les Italiens que retombait tout le poids des guerres entreprises par la république ; leurs soldats, doubles en nombre des soldats romains, étaient honteusement exclus des légions, quelquefois du pillage et des distributions qui suivaient les triomphes[10] ; du moins ne leur était-il accordé qu’une part inférieure à celle des légionnaires. Ils avaient l’égalité des sacrifices, du dévouement et de la mort, mais non celle des honneurs et des récompenses. Leurs chefs mêmes étaient Romains, et cependant les plus grands généraux de Rome, Marius et Scipion, les préféraient aux légionnaires Leur sang avait payé la conquête du monde, et dans l’exploitation du monde rien ne leur était laissé. En droit, la plupart d’entre eux ne pouvaient ni commercer ni acquérir hors dut petit territoire de leur municipe. Le préteur refusait de reconnaître à leur propriété le caractère inviolable de la propriété quiritaire[11], à leur qualité de chef de famille la puissance paternelle, à leur titre de citoyen municipal le droit d’appel et celui d’exil volontaire. Celui qui pouvait s’écrier Civis Romanus sum, voyait dans la province s’arrêter la justice, et à Rome la loi perdre sa sévérité. Coupable des plus grands crimes, il en était quitte pour s’exiler aux portes de la ville[12]. L’Italien condamné périssait sous les verges[13]. L’un ne payait pas d’impôt et vivait de son vote, de son témoignage ou des distributions ; l’autre, loin de recevoir, dépensait pour solder et entretenir les contingents alliés[14]. On ne leur laissait pas même la jouissance des biens que la nature leur avait donnés. Défense leur était faite d’exploiter ces mines[15] qui avaient enrichi l’Étrurie, et ils ne pouvaient tirer la pierre ou le marbre de leurs carrières qu’en payant un droit. C’est sur les provinces que pesait surtout l’avidité des publicains ; cependant le portoricain ou droit de péage existait en Italie, et les publicains en étaient les fermiers ; enfin les lois agraires devaient rendre l’aisance aux prolétaires de Rome ; elles dépouillaient l’Italien. Les alliés, que ni la langue ni les mœurs ne distinguaient des Romains, n’avaient donc pas les profits de la conquête ni les honneurs militaires ; ils n’avaient pas les privilèges politiques ni les droits civils des citoyens. Le descendant d’un affranchi était plus que tel glorieux soldat qui avait aidé un consul à vaincre. Aussi beaucoup d’Italiens aspiraient-ils à ce titre qui libérait d’impôt, ouvrait la carrière des honneurs et faisait monter au rang des maîtres du monde. Cependant toutes les prérogatives du citoyen de Rome n’étaient pas également enviées : qu’importait aux pauvres, même à la bourgeoisie de Venouse ou d’Ariminum, le droit de voter au Champ de Mars et de faire un consul ? Pouvaient-ils, à chaque nundine, couvrir les routes et faire le voyage de Rome ? Les droits politiques n’auraient donc été pour eux qu’un inutile privilège. Il n’en était pas de même des droits civils renfermés dans le jus civitatis. Les alliés avaient sans doute leurs lois particulières qui réglaient équitablement leurs rapports entre eux. Mais les citoyens romains formaient alors une partie considérable des habitants de la péninsule. Ils avaient, avec les alliés, de fréquentes relations d’affaires, où se montrait à chaque instant l’infériorité de l’Italien, blessé non seulement dans son amour-propre mais dans ses intérêts. Les ravages de la seconde guerre Punique, la ruine de l’agriculture, la diminution de la classe des petits propriétaires, avaient laissé une grande quantité de terres en friches et sans maîtres. Or celui qui avait légitimement la possession juridique d’une chose (civilis possessio) pouvait, s’il était citoyen, la convertir en propriété quiritaire, par l’accomplissement de certaines conditions déterminées, ou par une possession non interrompue d’une année pour un meuble, de deux ans pour un immeuble. S’il n’était pas citoyen, jamais la possessio ne se changeait en dominium, et il pouvait toujours être expulsé de son fonds : adverses hostem æterna, auctoritas. Par la rei vendicatio, le propriétaire quiritaire revendique son bien ; par la negatoria actio, il peut le défendre contre quiconque met obstacle à son droit, en prétendant user d’une servitude acquise[16]. Mais celui-là seulement qui avait le dominium était placé sous la protection de ces deux actions, et le dominium n’appartient qu’au citoyen. Dans les rapports judiciaires du créancier et du débiteur, le jus civile accordait une action au créancier contre le débiteur, pour obtenir la prestation déterminée entre eux. Mais les obligations naturelles fondées sur le jus gentium, c’est-à-dire en dehors de la protection du droit civil romain, n’assuraient au créancier aucune action contre le débiteur. Entre Romains et Italiens les mariages étaient fréquents ; toutefois les conséquences légales de ces unions ne compétaient pas à ceux des alliés qui n’avaient ni le jus connubii ni le jus commercii ; ils ne pouvaient hériter d’un citoyen ni lui acheter, ou du moins ces actes n’étaient plus couverts de l’énergique protection que leur donnait la loi romaine, quand ils avaient eu lieu de citoyen à citoyen. Leur liberté enfin n’avait pas la garantie de l’appel au peuple, ni leur vie celle des lois Porcia et Sempronia[17]. Longtemps il n’y eut cependant de la part des Italiens, pour l’obtention du droit de cité, que des efforts individuels. En 187, on trouva douze mille Latins qui s’étaient établis à Rome et avaient donné leurs noms aux censeurs[18] : le sénat les chassa. D’autres eurent recours à la fraude : par une vente simulée, ils livraient leurs enfants à un citoyen qui les affranchissait aussitôt. En 477, une nouvelle enquête fit connaître un grand nombre d’étrangers ainsi entrés dans la cité par la baguette du préteur et avec le bonnet d’affranchi. Le sénat les renvoya encore et défendit ces ventes fictives[19], mais sans succès. Fréquemment les villes latines se plaignaient d’être abandonnées de leurs concitoyens : la fuite à Rome laissant retomber sur ceux qui restaient le poids plus lourd de l’impôt et du contingent, que le sénat ne diminuait pas. Ce mouvement des habitants du Latium vers Rome se communiqua au reste de l’Italie. En 177, les Samnites et les Péligniens demandèrent qu’on renvoyât dans leurs foyers quatre mille de leurs compatriotes qui s’étaient établis à Frégelles, ville latine, pour y jouir des privilèges du nom latin et passer de là dans Rome[20]. Ainsi les alliés se glissaient un à un dans la cité ; un événement inattendu généralisa ces dispositions. La plus grande partie de l’Italie était devenue, par le fait de la conquête, domaine publie. De là une immense quantité de terres vagues occupées, autour de Rome et dans les régions les plus fertiles, par les nobles Romains ; mais aussi, dans les contrées éloignées ou écartées des grands chemins, par les Italiens. Quand la reprise de la loi agraire par les Gracques eut effrayé les détenteurs de terres publiques, tous les Italiens se trouvèrent réunis par un même et pressant intérêt, et ils n’eurent d’autre alternative que d’empêcher la loi de passer en réunissant leurs efforts à ceux des riches de Rome ; ou, en obtenant le droit de cité, de contraindre le peuple à partager avec eux. Ce motif, le désir depuis longtemps conçu d’obtenir les droits civils des Quirites et l’égalité avec le peuple souverain, le besoin de se mettre sous ce titre à l’abri du despotisme des magistrats, enfin la légitime ambition d’hommes comme Papius et Pompedius, qui sentaient leurs talents et qu’on enfermait dans les charges obscures d’un municipe marse ou samnite, amenèrent l’explosion longtemps contenue. Elle fut terrible, car ce n’était plus la révolte mal concertée de quelques cités, hier ennemies et qui demain le redeviendront, lisais le réveil d’une nation. En menant ses alliés à la conquête du monde, en tenant
pendant deux siècles réunis sous ses enseignes : Étrusques, Samnites, Grecs
et Ombriens ; en opposant, par d’importants privilèges, les habitants du sol
italique aux habitants du sol provincial, Rome, à son insu, avait en effet
formé ce que Nous avons dit quels furent peut-être les secrets desseins
de Scipion et quel rôle les Italiens devaient y jouer ; sa mort arrêta tout ;
après lui, le patronage des alliés passa aux chefs populaires. Les promesses
de Fulvius amenèrent le soulèvement des Frégellans, que ce consul fut
contraint d’abandonner pour une guerre dans II. — PREMIÈRE ANNÉE DE
|
[1] Hi qui vel magistratum (le duumvirat) vel honorem (l’édilité ou la questure) gerunt, ad cititaiem Romanam perveniunt (Gaius, I, 96 ; et Pline, Panégyrique, 69). Un troisième moyen d’obtenir la cité, accordé plus tard aux Latins, fut de convaincre un magistrat romain de concussion, mais ce n’était pas la noblesse qui avait créé ce privilège.
[2] Salluste (Catilina, 12) dit : Ignavissumi homines, per summum scelus omnia ea sociis adimere qum fortissumi viri victores hostibus reliquerant ; et Cicéron (de Off., II, 21) : Tanta, sublatis legibiis et judiciis, expilatio direptioque sociorum, ut imbecillitate aliorum, non nostra virtute valeamus.
[3] Tite-Live, XLII, 1. Cf. Tite-Live, XLII, 5 ; Valère Max., I, 1, 20. Cicéron combattit cet abus (de Leg., III, 8).
[4] Tite-Live, XXXLV, 41.
[5] Aulu-Gelle, Noct. Att., X, 5.
[6] De Off., II, 8.
[7] Ibid., I, 10 ; Valère Max., VII, 5, 4.
[8] Diodore, XXXVII, 15.
[9] Didius étendit à toute l’Italie la loi somptuaire de Fannius, et Sempronius la loi sur l’usure. Il arrivait souvent que des socii prissent des lois civiles de Rome. (Cicéron, pro Balbo, 8.)
[10] Au triomphe de G. Claudius Pulcher, en 177, les soldats alliés n’eurent que la moitié des gratifications faites aux légionnaires. (Tite-Live, XLI, 15.)
[11] Le legitimum dominium donnait le droit au propriétaire, quand il avait perdu la possession de la chose, d’en exiger, par la rei vendicatio, la restitution gratuite de tout détenteur indistinctement chez qui il la trouvait, et de la lui enlever. La mancipatio assurait à l’acheteur les plus fortes garanties.
[12] On confisquait alors ses biens ; mais, avec un peu de prévoyance, il pouvait se les réserver au moyen d’un prête-nom.
[13] Ainsi Turpilius..., verberatus capite pœnas solvit, nam is civis ex Latio erat (Salluste, Jugurtha, 69).
[14] Cf. Tite-Live, XXIII, 5 ; XXVII, 9. Italia stipendiaria, dit Tacite (Ann., XI, 22).
[15] Pline, Hist. nat., XXXIII, 4. Il y avait près de Volaterra de riches mines de cuivre et des mines d’or près de Verceil.
[16] La formule de cette action était : Jus illi non esse ire, agere, etc. ; de là son nom d’actio negativa ou negatoria. (Gaius, Inst., IV, 5 ; Digeste, VIII, §, 2.)
[17] Cf. Heineccius, Élém. du droit rom. ; Hugo, Hist. du droit rom. ; Laboulaye, Hist. du droit de propriété foncière en occident ; Marezoli, Droit privé des Romains ; Rudorff, Rœm. Rechtsg., Bethmann-Holweg, etc.
[18] Tite-Live, XXXIX, 5.
[19] Tite-Live, XLI, 9.
[20] Tite-Live, XLI, 8.
[21] Dans la région
sabellienne, on parlait encore l’osque, et au lieu du mot Italia gravé sur les médailles marses, on lit
Vitelia sur celles des Samnites.
La ligue sabellienne du Nord était plus romaine que celle du Sud. Le grec était
encore la langue du peuple dans une partie considérable de
[22] L’aqueduc de Spolète, digne des Romains et qui leur a été souvent attribué, paraît avoir été construit au septième siècle par les ducs lombards.
[23] Il semble avoir fait de même en Afrique après la prise de Jugurtha. (César, Bell. Afr., 35.)
[24] Cicéron, de Off., III, 11.
[25] Florus et Paterculus. Cum jus civitatis, dit le premier, solii justissime postularent. Causa fuit justissima, dit le second.
[26] Plutarque, Sylla, 4.
[27] Atque appellarant Italicam (Vellius. Pat., II, 16). Les médailles portent Italica. Cf. Diodore, XXXVII, 1. Ce sénat ne devait très certainement connaître que des affaires de la guerre ; au reste, le peu de durée de cette république fédérative ne laissa rien s’établir d’une manière précise. L’idée de copier Rome était ancienne ; les soldats italiens de Scipion, qui s’étaient révoltés en Espagne, avaient donné à leurs deux chefs le titre et les insignes de consul. (Tite-Live, XXVIII. 24 ; Florus, III, 19.)
[28] Dans l’Étrurie, les descendants des lucumons possédaient tout le pays, et une insurrection populaire devait les effrayer autant que les nobles de Rome.
[29] Cicéron, pro Font., 14 ; Appien, Bell. civ., I, 56.
[30] Dion, fr. 257.
[31] On fait grand bruit des Marses ; mais, en 225, ils n’avaient pu, réunis aux Marrucins, aux Frentans et aux Vestins, mettre sur pied plus de vingt-quatre mille hommes. (Polybe, II, 24.)
[32] Le cens de l’an 125 avait donné trois cent quatre-vingt-dix mille sept cent trente-six citoyens ; celui de 114, trois cent quatre-vingt-quatorze mille trois cent trente-six. (Tite-Live, Épit. LX et LXIII.) Tous les manuscrits s’accordent à donner ce chiffre. Si l’on objectait les pertes faites durant la guerre des Cimbres, il y aurait à répondre que les Italiens avaient autant perdu que la population romaine, et que d’ailleurs celle-ci, même durant la seconde guerre Punique, augmenta.
[33] Aulu-Gelle, Noct. Att., II, 27, d’après Salluste, et Plutarque (dans Sertorius).
[34] Un
sénatus-consulte du
[35] Tite-Live, Épit. LXXIV et LXXV. C’est le préteur Sempronius Asellio.
[36] Valère Max., II, VIII, 3.
[37] Diodore, fr. CXIV.
[38] L’Épitomé LXXIV de Tite-Live place le rétablissement des deux rois en l’année 90, et Clinton accepte cette date. (Voyez Fasti Hellen., à l’appendice du volume III, Kings of Bithynia, page 419.)
[39] Appien, Bell. civ., I, 39.
[40] Tite-Live, Épit. LXXII.
[41] Le Velinus tombe dans le Nar, qui se jette lui-même dans le Tibre. Toutes ces vallées aboutissent donc au fleuve qui forme comme la grande route de l’Apennin central sur Rome.
[42] Appien croit que
le Liris fut la ligne d’opération de Rutilius. Ovide (Fastes, VI, 565)
place le consul sur le Tolenus, qui convient mieux, puisque Carseoli est sur
cette rivière et que la vallée où il coule est le débouché naturel du pats des
Marses vers
[43] La position du corps d’armée de Perperna n’est pas indiquée, mais Appien place sa défaite par Egnatius après la prise de Venafrum, et il ajoute que Rutilius lui ayant retiré son commandement, donna le reste de ses troupes à Marius. Plus loin, il montre Marius à la droite de Rutilius, sur le haut Liris, non loin des lieux où nous plaçons Perperna. Cependant, comme on trouve plus tard Marius à la gauche de Rutilius sur le Tolenus, il serait possible que Perperna eût été placé non entre Rutilius et César, mais entre Rutilius et Pompée.
[44] Ces dispositions ne sont exprimées nulle part dans Appien ni dans Diodore, et c’est là ce qui fait ordinairement de la guerre Sociale un inextricable chaos ; mais elles ressortent, ainsi que le plan de campagne des alliés, de l’étude attentive des faits et des localités.
[45] Appien, Bell. civ., 1, 40.
[46] Cicéron, in Pison, 36.
[47] Cf. Diodore, XXXVII, frag., et Tite-Live, Épit. LXXIII.
[48] On fit sortir de la place les esclaves, que les assiégeants accueillirent ; les deux chefs romains, L. Scipion et L. Acilius, s’échappèrent aussi. On mangea les chiens. (Diodore, Exc. Vat., II, 119, et Appien, Bell. civ., I, 41.)
[49] Cicéron, Agr., II, XXIX.
[50] Micali, II, 18.
[51] .... de iis rebus peccatum non esse. Nous avons encore ce sénatus-consulte : Orelli, n° 3114 ; il est sans date, mais divers motifs tirés de l’examen du texte font penser qu’il est du temps de la guerre Sociale. Avec cette table de bronze, on trouva à Tivoli le buste du préteur Cornelius, Iconographie romaine de Visconti, pl. IV, n° 6.
[52] Un fragment de Diodore paraît commencer le récit d’un combat singulier entre Lamponius et Crassus. (Exc. Vat., II, 121.)
[53] Diodore, fr. XXXVII, 20, et Exc. Vat., II, 114.
[54] Appien place à tort cette défaite après la victoire de César, dont il est parlé plus bas.
[55] Appien, Bell. civ., I, 47.
[56] J’ajoute au texte d’Appien, le long de la voie Appienne qui traverse tout le Latium, alors en grande fermentation. Les alliés n’ayant pas un vaisseau, il était inutile d’échelonner des garnisons le long de la côte. D’ailleurs, de Minturnes à Sinuessa, la voie Appienne suit presque la côte, et ailleurs elle ne s’en éloigne que de quelques milles.
[57] Siciliam nobis non pro penaria cella, sed pro ærario illo majorum vetere ac referto fuisse ; nam sine ullo sumptu nostro, coriis, tunicis, frumentoque suppeditando, maximes exercitus nostros vestivit, aluit, armavit (Cicéron, II, in Ver., II, 2).
[58] Tite-Live, Épit. LXXIII ; Orose, V, 48.
[59] Asculum était sur la via Salaria, la seule route qui, de ce côté, traversât l’Apennin.
[60] Tite-Live, Épit. LXXIII : Æquatum ei cum C. Mario esset imperium.
[61] Diodore, XXXVII.
[62] Florus, III, 18 ; Tite-Live, Épit. LXXIV. Ocriculum, qui dut à sa position sur la voie Flaminienne une durable prospérité, est appelée dans quelques inscriptions splendidissima civitas. On y a trouvé une admirable mosaïque, aujourd’hui au Vatican.
[63] Diodore, XXXVII, 3.
[64] Peut-être fut-il tué par le jeune Marius, parce que Porcius avait mal parlé de son père. (Orose, V, 48 ; Velleius Pat., II, 16.)
[65] Appien, Bell. civ., I, 50 ; Velleius Pat., II, 1.
[66] Tite-Live, Épit. LXXV, LXXVI ; Florus, III, 18.
[67] Cicéron, Philippiques, XII, 11.
[68] De Benef., III, 23.
[69] Tite-Live (Épit. LXXVI) attribue la soumission des Marses, aliquot præliis fracti, à Murena et à Metellus Pius. Velleius Paterculus (II, 21) donne aux alliés, à cette bataille, plus de soixante mille hommes, et soixante-quinze mille aux Romains. Ii y a une évidente exagération. Appien (Bell. civ., I, 50) ne parle que de cinq mille morts.
[70] Appien, Bell. civ., I, 52 — Tite-Live, Épit. LXXVI).
[71] La prise de Venouse est peut-être de l’année suivante, 88. Cf. Diodore, fragm. XXXVII.
[72] Appien (I, 50), pour la première fois depuis le commencement de la guerre, donne ici de gros chiffres, trente mille hommes tués dans la déroute, et vingt mille dans le second combat.
[73] Épit., LXXV.
[74] Cependant cet esprit de discipline s’affaiblissait. Mous en avons eu déjà plusieurs preuves. On en trouve mie autre dans cette guerre : Porcius Caton aurait été lapidé par ses soldats soulevés si, raconte Dion Cassius (fr. 100), ils avaient trouvé des pierres dans les champs labourés où ils campaient ; ils se contentèrent de lui jeter des mottes de terre qui ne lui firent aucun mal.
[75] Diodore, XXXVII, 2.
[76] Diodore (ibid.)
appelle μεγάλην
δύναμεν cette armée de trente
mille hommes qu’on avait réunie à grand’peine en rappelant tous ceux qui
avaient déjà servi ; les armées, dans cette guerre n’étaient donc pas si fortes
que les rhéteurs l’ont dit. Florus (III, 18) estime cette guerre, plus terrible
que celle d’Annibal, et Velleius Paterculus affirme qu’elle conta à l’Italie
trois cent mille hommes ; mais ne porte-t-il pas les forces de Cinna, en
[77] Appien, Bell. civ., I, 42.
[78] Tite-Live (Épit., LXXV) dit qu’il fut tué dans une rencontre avec Mamercus Æmilius, et place seulement après sa mort la prise d’Asculum. Évidemment c’est trop tard.
[79] En voici le texte rapporté par Cicéron dans le pro Archia, 4 : Data est civitas,... si qui fœderatis civitatibus adscripti fuissent ; si tum, cum lex ferebatur, in Italia domicilium habuissent, si sexaginta diebus apud prætorem essent professi. Ce plébiscite avait été proposé par les deux tribuns M. Plautius Silvanus et C. Papirius Carbo. Trois préteurs reçurent les déclarations Appius Claudius Pulcher, P. Gabinius Capito et Q. Cœc. Metellus Pius. Appius, dit Cicéron, tint ses registres avec négligence ; et la légèreté de Gabinius ôta aux siens toute créance. (Ibid., 5.) La loi Julia avait donné le jus civitatis à tous les alliés fidèles ; la loi Plautia l’accorda à toutes les villes fédérées, mais quelques-unes de ces villes, comme on le verra, aimèrent mieux garder leurs coutumes particulières ; la loi Plautia-Papiria, pour créer, même dans ces cités, un parti romain, permit qu’on vint prendre à Rome, individuellement, le titre de citoyen.
[80] Florus, III, 18.
[81] L’usage, réglementé plus tard, d’accepter à Rome le cens fait chez les fundani, par les magistrats municipaux, existait peut-être déjà, ce qui aurait diminué le nombre des déplacements, ce nombre put encore être réduit par la faculté qui parait avoir été accordée en d’autres circonstances de se faire représenter (Varron, de Ling. Lat., VI, 86) ; mais tous n’en avaient pas le moyen, et beaucoup crurent que le plus sûr était d’obéir strictement à la loi, en se rendant à Rome dans les soixante jours. La désignation de trois préteurs pour recevoir tes déclarations prouve que l’on eut besoin de prendre des mesures extraordinaires pour suffire à l’enregistrement des nouveaux citoyens.
[82] Le jus civitatis devait être formellement accepté par le peuple qui l’obtenait : ce peuple devenait alors fundus (Cicéron, pro Balbo, 8), et ses habitants étaient fundani. Mais on ne pouvait être citoyen de Rome et d’une autre ville : il fallait opter. (Cf. Corn. Nepos, Att., 3.) Cicéron le dit formellement : Ex nostro jure duarum civitatum nemo esse possit, tum amittitur hæc cviitas,... cuva is.... receptus est.... in aliam civitatem (Pro Cæcina, 34 ; cf. pro Balbo, 13).
[83] C’est une opinion généralement adoptée que toute l’Italie eut alors le droit de cité. Cependant Cicéron, clans le pro Balbo, ne parle que de certains peuples associés à la cité romaine ; il cite une concession de ce droit faite par Crassus à un habitant d’Alatrium, et la loi Papia, qui chassa encore une fois de la ville, en l’an 66, les peregrini, comme l’avait fait déjà la loi Licinia-Mucia. Enfin le cens, qui, avant la guerre, accusait trois cent quatre-vingt quatorze mille trois cent trente-six citoyens, n’en indique, en 86, que quatre cent soixante-trois mille. Il est vrai que cette guerre coûta, dit Velleius Paterculus (II, 13), trois cent nulle hommes aux Italiens et autant aux Romains, c’est-à-dire, en deux ans, plus du double de la seconde guerre Punique, mais j’ai déjà montré l’exagération de ces chiffres, en additionnant les nombres que donne Appien pour les morts laissés sur les champs de bataille et en rappelant que, si, à une époque où l’Italie était plus peuplée que durant la guerre Sociale, les mêmes peuples n’avaient pu lever deux cent mille hommes, ils n’ont pu en perdre trois cent mille dans cette guerre. La raison tirée des pertes faites par l’Italie dans cette guerre ne petit donc rendre compte du faible chiffre du cens. Il n’y a qu’une explication possible, c’est que toute l’Italie n’eut pas le droit de cité. Plusieurs villes fédérées, comme Naples, Héraclée (Cicéron, pro Balbo, 8), hésitèrent à l’accepter, ou le refusèrent, comme Pouzzoles (Cicéron, de Leg. apr., II, 31), comme l’avaient déjà refusé trois cités Herniques en 506. (Tite-Live, IX, 43.) Brindes ne l’eut pas ; car Sylla, à son retour d’Asie, έδωxιν άτέλειαν, (Appien, Bell. civ., I, 79). Bien d’autres étaient comme Brindes, puisque, à l’approche de Sylla, Cinna demande des secours à toutes les villes d’Italie, surtout à celles qui venaient de recevoir le droit de cité (Appien, Bell. civ., I, 76). Aussi son armée était-elle divisée non en légions, mais en cohortes, parce qu’elle renfermait beaucoup plus d’alliés que de citoyens, Plutarque (Mar., 35) dit : Les italiens étant soumis, on ne parla plus de la concession du droit de cité. Velleius Paterculus (II, 17) : Victis adflictisque.... quam integri universis civitatem dare maluerunt. Nous verrons Sulpicius le vendre à qui voudra l’acheter, et Carbon, en 84, en faire encore des gratifications (Tite-Live, Épit., LXXXIV). L’Épitomé de Tite-Live dit expressément des Marses, Vestins et Péligniens : in deditionem accepti, c’est-à-dire réduits à la condition de sujets ; des Hirpins, domili, les Lacaniens restés encore en armes sous Lamponius et Cleptius, les Samnites sous Pontius Telesinus, ne pouvaient avoir reçu ce droit. Après ces explications, on comprendra combien sont erronés tous les calculs de statistique qu’on a déduits de cette donnée, que, toute l’Italie ayant ce droit, le chiffre du cens à Rome permettait d’établir exactement celui de la population même de l’Italie. Niebuhr a dit (t. I, p. 387), dans ses leçons publiées à Londres : It is a very common but erroneous opinion that the lex Julia conferred the privilege of Roman citizens upon the Italians, who, in fact, nover acquired those privileges by any one law, but gained them successively one by one.
[84] Velleius Paterculus (II, 20) dit huit ; Appien (Bell. civ., 1, 49), dix. Après Sylla, on ne trouve que les trente-cinq anciennes tribus. Cf. Cicéron, de Leg. agr., II, 7 ; Verrés, I, 5 ; Philippiques, VI. Cette suppression fut salis doute opérée par Cinna, qui répartit les nouveaux citoyens dans les anciennes tribus. L’Italie n’eut plus alors que trois sortes de villes : des municipes, des colonies et des préfectures. (Cicéron, pro Sextio, 14, 32 ; in Pison., 22, 51 ; Philip., IV, 3, 7.)
[85] Cicéron, pro
Balbo, 14 et 18. Les Insubriens, les Helvètes et quelques barbares de