ÉCONOMIE POLITIQUE DES ROMAINS

 

LIVRE SECOND — POPULATION

CHAPITRE IV — Discussion des textes qui ont servi de base aux évaluations exagérées du nombre d’esclaves.

 

M. Letronne a déjà très bien discuté, dans son mémoire sur la population de l’Attique, le chapitre emphatique d’Athénée. Les faits principaux, dit-il, reposent sur une faible garantie ; c’est le témoignage d’un compilateur du IIIe siècle, d’Athénée, qui cite un auteur inconnu. Lorsqu’on lit avec quelque attention la déclamation tout entière qu’Athénée met en cette occasion dans la bouche de ses interlocuteurs, on aperçoit des exagérations si extravagantes qu’on ne peut se dispenser d’y reconnaître un parti pris d’augmenter à l’excès le nombre des esclaves.

Il prétend, d’après Timée, qu’il y avait, dans la seule ville de Corinthe, 460.000 esclaves, ou un septième de plus que dans l’Attique.

L’exagération est bien plus sensible dans ce qu’il rapporte de la seconde révolte des esclaves en Sicile, qui eut lieu vers 135 avant J.-C. ; il y périt, selon lui, plus d’un million d’esclaves, ce qui est déjà fort difficile à croire. Mais on doit retrancher au moins les neuf dixièmes de ce nombre exorbitant ; car, selon Diodore de Sicile, les esclaves révoltés en cette circonstance ne s’élevèrent pas à plus de 200.000, et l’on ne saurait supposer qu’il ait péri plus de la moitié des rebelles[1].

A l’époque de cette révolte en Sicile, il y en eut une dans l’Attique : Athénée, en s’appuyant du témoignage de Posidonius, prétend que 20.000 esclaves, dans les mines, égorgèrent leurs gardiens, s’emparèrent de la forteresse de Sunium et ravagèrent pendant longtemps le pays. Le fait est vrai ; mais on ne risque rien de retrancher les dix-neuf vingtièmes des esclaves révoltés. Diodore rapporte que le nombre ne fut pas de plus de 1.000 ; et cela est très vraisemblable, parce qu’à cette époque les mines étaient presque entièrement épuisées. Ainsi Athénée est à peu près convaincu d’avoir exagéré le nombre qu’il a trouvé dans Posidonius.

Mais ce qui passe toute croyance, c’est le fait relatif à l’île d’Égine, et pour lequel il ose s’appuyer de l’imposante autorité d’Aristote. On y comptait, dit-il, 470.000 esclaves, ou 70.000 de plus que dans l’Attique ; ce qui suppose une population d’au moins 700.000 âmes répartie sur le terrain montagneux, rocailleux et infertile[2] d’un Etat qui n’a pas plus de quatre lieues carrées de surface[3] ; c’est 180.000 habitants par lieue carrée c’est-à-dire que la population y aurait été aussi pressée que dans Paris.

Voilà, pour cette fois, une absurdité palpable, qui ne peut être attribuée ni à Aristote ni à aucun homme de sens. Mais, comme si ce nombre n’était pas déjà assez merveilleux, un des interlocuteurs reprend qu’à Rome il y avait bien plus d’esclaves encore. Chaque Romain, dit Laurentius, en possède autant : beaucoup en ont 10.000, 20.000 et davantage ; non pas, comme le riche Nicias, pour s’en faire un revenu, mais, la plupart, pour avoir un nombreux cortége[4]. Ailleurs, si l’on en croit un autre convive, Alcibiade, ayant remporté le prix de la course des chars aux jeux Olympiques, donna un repas à toute la Grèce assemblée poser la célébration des jeux[5]. On s’étonne peu de ces exagérations quand on connaît la manière d’Athénée : on sait qu’assez ordinairement un de ses interlocuteurs avance une proposition paradoxale qu’il soutient à tort ou à raison ; un autre l’attaque et renchérit encore, au moyen d’assertions les moins croyables ; et dans ce cas les citations d’auteurs graves ne lui manquent jamais.

Les rapprochements que je viens de faire, dit toujours M. Letronne, en montrant combien Athénée a exagéré partout le nombre des esclaves, doivent nous tenir en défiance sur le témoignage qu’il allègue relativement à ceux de l’Attique : car, s’il n’a pas craint de citer évidemment à faux des auteurs tels qu’Aristote et Posidonius, on ne voit pas pourquoi il se serait fait scrupule d’en user de même avec un auteur aussi peu connu que Ctésiclès.

Les textes spécieux qui ont servi de base aux évaluations incroyables du nombre des esclaves en Italie ne méritent guère plus de confiance que les assertions des emphatiques Ctésiclès et Laurentius dans Athénée.

Ce sont, outre les 20.000 esclaves que ce dernier, qui écrivait dans le IIe siècle, attribue à quelques Romains[6], outre les 4.000 esclaves d’Isidore[7], les 5.000 d’Ovidius et les 8.000 de Mélanie[8], les fameux passages de Sénèque[9] dans ses déclamations sur la Clémence et sur la Tranquillité de l’âme, et celui où Pline, toujours admirateur du temps passé, laudator temporis acti, n’emporte contre l’improbité des esclaves de son temps[10].

Voici le premier passage de Sénèque :

On fit un jour, dans le sénat, la proposition de distinguer les esclaves des hommes libres par un vêtement particulier ; mais on vit le danger qui nous menacerait si les esclaves s’avisaient de nous compter.

Sénèque, comme on le voit, ne précise point l’époque de cette motion : Dicta est aliquando sententia. Supposons que ce fut sous les règnes de Caligula, de Claude ou de Néron. On s’est appuyé de ce texte vague, jeté dans une déclamation philosophique, et qui peut-être ne concerne que la capitale, pour porter, en Italie, le nombre des esclaves à dix fois, vingt fois au-dessus de celui des hommes libres. En effet, la phrase du rhéteur laissait un champ vaste à l’imagination et permettait de s’étendre à l’aise dans la région des conjectures.

Mais Vossius, Juste Lipse, Pignorius, MM. de Pastoret, Blair et de Saint-Paul, qui élèvent si prodigieusement les ressources, la population, l’industrie de Rome et le nombre de ses esclaves, n’ont pas rapproché de la déclamation de Sénèque ce passage d’un chroniqueur exact et naïf, de Lampride, qui dit[11] : Alexandre Sévère eut la pensée d’attribuer un costume particulier à tous les emplois, à toutes les dignités, de manière à les faire distinguer par leur vêtement. Il voulut même étendre cette disposition jusque sur les esclaves, afin que, pouvant être reconnus au milieu du reste de la population, ils fussent moins portés à la révolte et ne pussent être confondus avec les hommes libres. Niais Ulpien et Paulus combattirent ce projet, en disant qu’il y aurait beaucoup de querelles entre les diverses classes qu’un signe distinctif désignerait aux outrages. Alors on se contenta de distinguer les chevaliers des sénateurs par les proportions du clave[12].

Il est évident que, dans ce projet d’ordonnance impériale et dans la discussion préparatoire, il n’est pas question du nombre immense des esclaves et du péril qu’auraient couru les hommes libres si les serfs avaient pu se compter.

C’est un prince sage et éclairé, c’est le chef du gouvernement qui propose la mesure, preuve évidente, à mon sens, qu’il n’y voyait de péril ni pour l’État, ni pour sa personne, ni pour la société. Enfin ses deux habiles ministres, les fameux jurisconsultes Paul et Ulpien, ne font pas valoir cet argument si décisif du nombre immense des esclaves et du danger qu’il y aurait de leur faire connaître leurs forces : autre preuve qu’alors n’existaient ni le danger, ni la cause alléguée auparavant, à tort ou à raison, dans le sénat romain, comme pouvant mettre l’État en péril.

Cependant il n’y a aucun motif de croire qu’en 225, 45 ans seulement après la mort de Marc-Aurèle, la population servile fut beaucoup moins nombreuse en Italie que dans les derniers siècles de la république et sous les règnes de Claude ou de Néron. Ici donc, comme l’a fait M. Letronne pour la population de l’Attique, il faut peser la valeur des témoignages ; et celui de Lampride, qui cite les discussions des empereurs et de ses ministres, qui a pu consulter les procès-verbaux, a un bien autre poids que celui du philosophe Sénèque, qui, en dissertant sur la Clémence, s’occupe beaucoup plus des artifices de la rhétorique et du brillant des idées que de l’exactitude des faits et de la justesse des déductions.

L’autre passage du même philosophe stoïcien[13], qui a tant contribué à fausser les idées sur la proportion des esclaves aux hommes libres, est un éloge de la modération des désirs et le développement de ce célèbre axiome : omnia mecum porto : ce n’est véritablement qu’une déclamation philosophique. Regardes-tu comme pauvre, s’écrie-t-il, ou plutôt comme l’égal des Dieux immortels, celui qui s’est mis à l’abri de tous les coups de la fortune ? Penses-tu qu’il fût plus heureux, Démétrius, cet affranchi de Pompée, qui ne rougit point d’être plus riche que son maître ? Tous les jours on lui présentait la liste de ses esclaves, comme à un général l’état de situation de son armée, à lui qui aurait dû, depuis longtemps, se croire riche avec deux sous esclaves et un bouge un peu moins étroit. Le reste du chapitre contient l’éloge de la pauvreté de Diogène, de sa fermeté contre les coups de la fortune, lorsqu’il fut abandonné par son unique esclave, et les inconvénients de la richesse obligée de nourrir, de vêtir de nombreux domestiques, de se défendre contre leur rapacité... N’est-il pas plus heureux, ajoute-t-il, celui qui ne doit rien qu’à l’homme auquel il peut le plus facilement refuser, à lui-même ? Évidemment il n’y a, comme je l’ai dit, dans tout ce chapitre, qu’un parallèle de la médiocrité des désirs et des embarras de la richesse, qu’une antithèse brillante ornée de toutes les fleurs de la rhétorique. C’est le développement d’un précepte de morale, où l’auteur a cité un exemple fameux dont on s’est appuyé pour en tirer des conclusions, évidemment fausses et exagérées, sur le nombre total de la population servile.

Un troisième passage de Sénèque est une déclamation encore plus emphatique : il prêche le mépris des richesses ; l’hyperbole y respire dans toute son exagération[14].

Le passage de Pline, cité par Juste Lipse[15] dans son évaluation du nombre des esclaves, est une déclamation du même genre. Pline fait l’éloge de la vie antique et de la probité de cette époque où l’on pouvait ne rien fermer ni cacheter. Maintenant, dit-il, on est obligé de sceller les aliments et la boisson pour les soustraire aux rapines domestiques. C’est à quoi nous ont réduit ces légions de serviteurs, cette foule d’étrangers qui peuplent nos maisons et qui nous forcent d’employer un nomenclateur, même pour nos esclaves. Il en était autrement chez les vieux Romains ; un marcipor et un lucipor, compatriotes de leurs maîtres, mangeaient à leur table, avaient tous les vivres à leur disposition, et le père de famille n’avait pas besoin de se garder contre ses domestiques[16]. Ne reconnaît-on pas là le style ampoulé si ordinaire à Pline, et croit-on que cette brillante antithèse, où il s’est attaché à faire ressortir la modération et la probité antiques, pour les opposer au luxe et à la corruption des mœurs de son temps, soit un élément pur de toute exagération et bien propre à entrer dans la solution d’un problème de statistique ? C’est évidemment une déclamation contre le luxe, déclamation qu’on a envisagée comme un fait, et non, ainsi qu’on aurait dû le faire, comme une amplification de rhétorique.

Le passage de Pétrone, employé par Juste Lipse[17] et quelques autres comme une preuve du grand nombre des esclaves, montre combien peut errer une habile critique si elle est préoccupée par l’esprit de système. Il cite avec complaisance l’assertion du captateur de testaments, Eumolpe, lorsque ce chevalier d’industrie fait courir à Crotone le bruit qu’il avait tant d’esclaves, répandus dans ses terres de Numidie, qu’avec eux il aurait pu s’emparer même de Carthage[18].

Je ne citerai point quelques autres passages exceptionnels, moins positifs que les précédents, et qu’on a réunis sans critique et sans discernement pour appuyer des hypothèses sur le nombre excessif de la population libre ou esclave de l’Italie. Je puis affirmer qu’aucun d’eux ne renferme une donnée tant soit peu précise, qui permette d’arriver à une évaluation quelconque, et que, pour le problème du hombre de la population servile à diverses époques de la république et de l’empire, la question restait encore tout entière. Je me serais même interdit de l’aborder si je n’avais réuni d’autres bases, et trouvé des moyens plus directs d’arriver à une approximation aussi exacte que le sujet le comporte.

Le nombre des esclaves en Italie dut être, comme je l’ai déjà dit, très faible dans les cinq premiers siècles de Rome ; le principe d’agglomération qui a fait la grandeur de la république prédominait alors. On ôtait aux peuples vaincus une portion de leur territoire pour y placer des colons libres, et, généralement, on les soumettait à un tribut modéré sans les asservir. L’élément démocratique qui, en 388, signala sa prépondérance par l’établissement des lois Liciniennes, prévalut à Rome jusqu’à la conquête de la Macédoine[19]. Les lois somptuaires, qui défendaient, comme on sait, à tout citoyen, quel qu’il fût, de posséder plus de 500 jugères (126 hectares), fixaient un nombre circonscrit de domestiques, c’est-à-dire d’affranchis et d’esclaves, pour faire valoir ces terres ainsi partagées, et enjoignaient expressément de se servir d’Italiens et d’hommes libres.

Heyne[20] suppose que les guerres puniques et enfin la destruction de Carthage ont dû verser, à Rome et dans l’Italie, une masse énorme de Carthaginois et d’Africains ; mais il oublie que, pendant les deux premières guerres, il y eut, sauf de rares exceptions, un cartel d’échange pour les prisonniers, d’ailleurs peu nombreux, que le droit des gens était barbare, qu’entre les deux républiques rivales la haine fut terrible, l’animosité excessive, et que les tombeaux, en Afrique et en Italie, reçurent bien plus de morts que les champs et les villes d’esclaves prisonniers. Si les esclaves carthaginois ou africains avaient été si nombreux en Italie, comment leurs noms ethniques seraient-ils si rares dans les comédies de Plaute, représentées, en grande partie, durant la deuxième guerre punique[21], et ne se trouvent-ils pas dans celles de Térence, africain lui-même, et contemporain du vainqueur de Numance et de Carthage ? Or, parmi les noms de pays donnés aux esclaves dans ces drames, vous trouvez les noms de Syrus, de Syriscus, de Syra, de Geta, de Cappadox, de Messenio, et jamais ceux de Pœnus, d’Afer ou de Numida[22].

Les pays qui fournirent principalement d’esclaves la Grèce et Rome, jusqu’à la conquête des Gaules par Jules César, furent la Thrace, la Scythie, la Dacie, la Gétie, la Phrygie, le Pont, en un trot le sud de l’Europe occidentale et une partie de l’Asie-Mineure[23]. Les principaux marchés d’esclaves étaient, pour le Nord, l’emporium de Tanaïs, situé à l’embouchure de ce fleuve ; pour l’Asie-Mineure, Ephèse et Sidé ; pour la Grèce, Samos, Athènes et Délos. Il est évident que la nature du sol, dans les steppes de la Gétie et de la Scythie, l’aridité des grands plateaux de la Phrygie et de la Cappadoce, celle des montagnes de la Cilicie Trachée, de la Lycie et de la Carie, n’ont pu créer une quantité de produits alimentaires suffisante pour une exportation d’esclaves, dix fois ou même trois fois plus nombreux que les hommes libres, métœques ou affranchis de la Grèce et de l’Italie. Le seul passage de l’antiquité qui se prêterait, au premier coup d’œil, à cette hypothèse exagérée, est celui de Strabon[24], allégué si souvent comme un fait incontestable, sans la moindre observation critique ; le voici :

C’est Tryphon, ainsi que la faiblesse des princes qui régnèrent successivement à cette époque sur la Syrie et sur la Cilicie, qui donnèrent aux Ciliciens l’idée d’organiser une société de pirates... Ce qui surtout encourageait le crime, c’étaient les grands profits qu’on retirait de l’exportation des personnes réduites en servitude. Indépendamment de la facilité de faire des esclaves, les brigands avaient, à peu de distance, une place de commerce considérable et riche, l’île de Délos, capable de recevoir et d’expédier dans le même jour plusieurs milliers d’esclaves. Le texte grec porte : ή Δήλος, δυαμένη μυριάδας άνδραπόδων αύθηερόν xαί δέξασθαι, xαί άποπέμψαι. Presque tous les partisans de l’innombrable population des époques grecque et romaine ont pris au positif ce mot μυριάδας que Coray a traduit par plusieurs milliers. M. de Saint-Paul[25] a copié cette traduction. Il est facile de se convaincre que Strabon n’a voulu exprimer, par ce mot myriades, qu’un grand nombre d’esclaves, de même que Cicéron et les Latins emploient le mot sexcenta[26], de même que nous disons des myriades de canards ou d’étourneaux. Henri Étienne[27] le prouve par de nombreux exemples. Il suffit, pour démontrer l’absurdité de ce nombre pris au positif, d’une simple multiplication. Le mot μυριάδας est au pluriel ; en supposant que Strabon n’ait voulu indiquer que deux ou trois myriades, ce serait 20.000 ou 30.000 multipliant 365, c’est-à-dire 7.300.000, ou 10.950.000 esclaves que Délos aurait reçus et expédiés chaque année.

De plus, l’époque de cette affluence d’esclaves à Délos peut être fixée d’après ce texte de Strabon : C’est, dit-il, Diodotus, surnommé Tryphon, le même qu’Antiochus, fils de Démétrius[28], contraignit à se tuer, qui organisa chez les Ciliciens la première société de pirates. On peut présumer que ce fut de l’an 610 à 615 de Rome (144 à 139 avant J.-C.). La piraterie, dit Strabon, avait fait de grands progrès dans la Pamphylie et dans la Cilicie Trachée. Les habitants de ces deux provinces, ajoute-t-il, ont fait de leur pays un repaire de brigands, soit en exerçant eux-mêmes le métier de pirates, soit en offrant un abri aux vaisseaux des forbans, et des marchés où ceux-ci viennent exposer en vente les objets du pillage. C’est à Sidé, ville de Pamphylie, que ces brigands avaient établi leurs chantiers, et c’est là qu’ils vendaient à l’encan leurs prisonniers, sans même dissimuler qu’ils vendaient des hommes libres. Ce dernier fait est rapporté par Freinshemius[29] à l’année 675 de Rome, soixante ans après la mort de Tryphon. La destruction de la piraterie par le grand Pompée eut lieu dans les années 685, 686 de Rome. Il est donc probable que c’est entre 675 et 685 que Délos reçut en entrepôt ce grand nombre d’esclaves dont nous parle Strabon, et qui était le produit de la piraterie cilicienne, parvenue à son plus grand développement. Mais certainement la population servile de l’Italie ne s’accrut pas de tous les esclaves importés, d’abord parce que les Ciliciens enlevèrent sur les côtes de cette province beaucoup d’esclaves, beaucoup d’habitants qu’on ne revendit pas dans leur patrie, et enfin parce que les individus libres, qui étaient vendus dans les autres contrées soumises à la domination romaine, s’affranchissaient bientôt du servage, en réclamant contre ce rapt et en prouvant légalement leur ingénuité.

 

 

 



[1] Dion. Sic., Eclog., lib. XXXVI, p. 528, lin. 24.

[2] Voyez comme Démosthènes parle de cette île : Contra Aristocrat., p. 458. C. éd. Wolf.

[3] M. Bœckh, Écon. Pol., t. I, p. 64 et 65, admet sans scrupule ces chiffres de 460.000 esclaves à Corinthe et de 470.000 dans Égine. Cette aveugle crédulité m’étonne dans un critique aussi distingué. Ces nombres ridicules indiqués pour les esclaves d’Égine et de Corinthe ont été relevés par Niebuhr, Hist. rom., t. III, p. 97, et jugés par lui indignes de l’attention d’un homme sérieux.

[4] ATHÉNÉE, VI, p. 272. E.

[5] Ibid., I, 5, p. 3. E.

[6] L. c.

[7] PLINE, XXXIII, 47.

[8] PIGNOR, de Servis, præf., p. 5.

[9] De Clementia, 1, 24.

[10] PLINE, XXXIII, 6, tom. II, p. 605, lin. 85.

[11] Alexandre Sévère, c. XXVII.

[12] Aux sénateurs la tunique avec la laticlave, aux chevaliers avec l’augusticlave.

[13] De Tranquillitate animi, cap. VIII.

[14] O miserum, si quem delectat sui patrimonii liber magnus, et vasta spatia terrarum colenda per vinctos, et immensi greges pecorum per provincias et regna pascendi, et familia bellicosis nationibus major, et œdificia privata laxitatem urbium magnarum vincentia ! De Beneficiis, VII, 10.

[15] Not. in Sénèq. de Tranquil. Animi, ch. VIII.

[16] PLINE, XXXIII, 6, tom. II, p. 605, lign. 14, éd. Hard.

[17] Magn. Rom., II, 15, tom. III, p. 416. b.

[18] Familiam quidam tam magnan per agros Numidie sparsam habere ut vel Carthaginem posset espere. PÉTRONE, t. II, p. 120 ; éd. in-12, 1713.

[19] Voyez ci-dessus le chapitre II sur la population servile.

[20] Op. cit., p. 129.

[21] On trouve la courtisane Phœnicium dans le Pseudolus. Dans le Penulus même, il n’y a que Hanno, le père, et Giddeneme, la nourrice, qui portent du noms puniques.

[22] Voyez dans PIGNORIUS, de Servis, p. 61-69, la liste des noms ethniques appliquée aux esclaves chez les Grecs et les Romains ; pas un nom punique ou africain ne s’y rencontre.

[23] STRABON, VII, p. 305. HEYNE, p. 128.

[24] XIV, p. 668. Voyez aussi p. 664.

[25] P. 76.

[26] Sexcenta possum decreta proferre.

[27] Voc. Μύριοι, t. II, p. 990. B.

[28] Antiochus VII, dit Sidétès, fils de Démétrius Soter, et frère de Démétrius Nicator. Cf. APPIEN, de Rebus Syriac., ch. LXVIII. JUSTIN, XXXVI, 1. ROLLIN, Hist. anc., t. IX, p. 53.

[29] Supplem., ad Tite-Live, XC, 32.