ABGARE, nom de plusieurs souverains qui
régnèrent sur l’Osrohène, pays de ABGARE, l’un des successeurs du précédent,
vivait du temps de Jésus-Christ et Procope dit qu’il jouissait de la faveur
d’Auguste. Eusèbe, dans son Histoire
ecclésiastique, rapporte que ce prince, attaqué d’une maladie très grave
qu’aucune science humaine ne pouvait guérir, entendit parler des cures
miraculeuses que Jésus-Christ opérait en Judée, qu’il lui écrivit pour le
prier venir lui rendre la santé, et lui promit un asile contre ses ennemis.
Le même historien ajoute que Jésus-Christ répondit au monarque, et que,
quoiqu’il refusât de venir le voir, il promit de lui envoyer un de ses
disciples. Eusèbe rapporte le texte de ces deux lettres, et ajoute qu’après
l’ascension de Jésus-Christ, St. Thomas, un des douze apôtres, envoya dans
Édesse Thaddée, l’un des soixante-dix disciples, qui convertit Abgare à la
foi chrétienne, le guérit miraculeusement, et opéra plusieurs autres
prodiges. Eusèbe ajoute qu’il ne parle que sur des rapports traduits
littéralement de la langue syriaque. Malgré l’autorité de cet historien, qui
n’élève aucun doute sur l’authenticité de cette histoire, il est permis de
penser qu’elle est fabuleuse ; rien ne prouve qu’il ait possédé la langue
syriaque, ni qu’il soit allé lui-même à Édesse, pour y consulter les
traditions et les archives d’où il dit avoir tiré les deux lettres. Le fait
n’est rapporté par aucun écrivain ecclésiastique antérieur à lui, et ceux qui
lui sont postérieurs n’en ont parlé que rarement. St. Jérôme en fait mention
dans ses Remarques sur St. Matthieu ; et il s’appuie sans doute sur
l’autorité d’Eusèbe car il dit : L’Histoire ecclésiastique nous apprend que l’apôtre St.
Thaddée fut envoyé à Édesse vers le roi Abgare. Sans s’arrêter aux
raisons qui peuvent faire rejeter cette histoire, il suffira d’ajouter que la
lettre de Jésus-Christ à Abgare parait avoir été inconnue aux pères de
l’Église (qui étaient d’ailleurs persuadés que
Jésus-Christ n’avait rien écrit) ; quelle n’est mentionnée dans aucun
ancien catalogue de lois canoniques ; et qu’enfin elle ne parait point avoir
fait partie du Nouveau Testament, où sans doute, une lettre écrite de
la propre main de Jésus-Christ aurait obtenu la première place. Ajoutons
encore qu’au concile de Rome, tenu en 494, sous le pape Gélase, cette lettre
fut rejetée comme apocryphe. On a encore attribué au même prince le projet de
faire la guerre aux Juifs pour venger le déicide qu’ils avaient commis sur la
personne de Jésus-Christ (Voyez Basnage, Histoire des
Juifs, liv. I, ch. 7, et les Prolégomènes
sur |