LES IDÉES MORALES DE CICÉRON

 

CHAPITRE II. — MORALE PRATIQUE.

LES DEUX PARTIES DE LA MORALE. - LEURS OBJETS. - AUTONOMIE ET RAISON.

 

 

Les principes généraux de la moralité trouvent leur application et leur expression dernière dans nos divers devoirs. Cicéron en fait déjà la remarque très précise :

Toute la morale se divise en deux parties ; après la première qui s’occupe de déterminer le souverain bien, il en vient une seconde consacrée aux préceptes qui doivent régler toutes les actions de la vie[1]. Ainsi la vie entière est réglée par le devoir ; que vous soyez homme public ou privé, dans le sein de votre maison ou en pleine place publique que vous ayez affaire à vous-même ou à votre semblable, vous êtes soumis à des devoirs. Si vous les respectez vous êtes honnête homme, malhonnête si vous les négligez[2].

Tout ce qui est vrai, pur et simple convient admirablement à la nature de l’homme. Au besoin de connaître le vrai se joint un goût très vif pour l’indépendance ; une âme bien née ne veut obéir à personne si ce n’est à ceux qui l’instruisent ou qui ont reçu un juste et légitime pouvoir dans l’intérêt de tous, c’est de cette fierté naturelle que naît la grandeur d’âme et le mépris des choses humaines. Ce n’est pas non plus une médiocre prérogative pour l’homme que ce bel attribut de la raison, de comprendre ce que c’est que l’ordre la décence, quelle mesure il faut apporter dans les paroles et dans les actions. Seul parmi les animaux, l’homme sait goûter la beauté, la grâce, la proportion de tout ce qu’il voit. Mais la raison l’élève bientôt de ce spectacle des sens à la conception de la beauté morale ; il attache alors un bien plus grand prix à l’ordre, â la constance dans les desseins et les actions ; il prend garde â ne rien commettre de honteux et d’indigne de lui, à ce que rien de vicieux ne s’introduise dans ses pensées, ne lui échappe dans sa conduite. C’est de toutes ces choses que se compose et résulte l’honnêteté que nous cherchons, l’honnêteté qui, inconnue et sans honneur, n’en conserverait pas moins tout son prix et dont il est vrai de dire qu’elle serait digne de toute louange lors même qu’elle ne serait louée de personne[3].

 

 

 



[1] De of., I, 3.

[2] De of., I, 2.

[3] De of., I, 4.