LE SIÈGE DE BITCHE

6 août 1870 – 27 mars 1871

 

CHAPITRE NEUVIÈME.

 

 

L'alerte du 1er février. — Une dépêche de l'ennemi annonce l'armistice. — Omission. — Respect à la loi. — Froids rigoureux. — Voyage à Paris. — Une lettre du ministre de la guerre. — Sauf-conduit. — Correspondance inutile. — Le post-scriptum de Ferrières. — Journée du 15 mars. L'honneur du drapeau.

 

Dans la nuit du 31 janvier au 1er février, les sentinelles du château signalent un feu allumé sur la ligne du chemin de fer. Sa lueur éclaire l'adversaire prenant ses dispositions pour l'enlèvement des rails. Jusqu'à l'aube, nos pièces envoient des projectiles dans cette direction. Tandis qu'elles lancent leurs dernières bordées, un officier ennemi accourt au galop de son cheval. Le tir de la place ralentit l'ardeur du cavalier. Il s'arrête, tourne bride, disparaît. Une heure plus tard, on annonce un parlementaire.

— Qu'avez-vous fait ! s'écrie ce messager ; eh ! quoi, vous persistez à pointer vos canons sur nous ?

— Certes !

— A cette heure ?

— Pourquoi non ?

— Vous le sauriez si, tantôt, vous n'aviez éloigné notre chef. Le colonel Kollermann, depuis quelque temps, a repris le commandement des troupes assiégeantes ; il venait en personne vous annoncer la conclusion d'un armistice. en attendant la paix.

Un armistice ! On s'entre-regarde en secouant la tête. La paix ! Allons donc ! Paris tombé, ne reste-il pas la France ?

— Le colonel, continue l'envoyé, vous apportait des paroles de conciliation, et c'est à coups de mitraille que vous le recevez !. Il est revenu indigné de voir Bitche poursuivre les hostilités au moment même où votre pays renonce officiellement à la lutte.

On doute encore ; les regards semblent dire : ces gens nous trompent, leur mensonge déguise quelque ruse infâme.

— Retirez-vous ! réplique-ton, nous n'avons aucun ordre de notre gouvernement.

— Mais j'ai des preuves à vous montrer !

— Inutile ; elles seraient sans valeur à nos yeux : aussi longtemps que nous n'aurons pas reçu de communication directe, nous continuerons à tirer sans ménagement sur tout assiégeant qui s'avancera à portée.

Le parlementaire insiste :

— Voici une dépêche du gouverneur d'Alsace-Lorraine, il est de mon devoir de vous la communiquer.

La dépêche dit :

Un armistice est conclu avec la France jusqu'au 19 février. Je vous adresserai ultérieurement les clauses détaillées de cet armistice.

— Qu'importe ! Ce sont là les affaires de la Prusse, non les nôtres. A ceux qui défendent Bitche, le pays a confié une forteresse : ils la garderont jusqu'au jour où le pays en aura décidé autrement.

— Mais c'est vouloir rester en guerre avec nous, reprend l'Allemand, c'est nous pousser à quelque extrémité que vous regretterez.

— D'accord ; entendez-vous nous attaquer ?

Libre à vous. Nous prétendons rester libres de notre défense.

— Ainsi, pas de trêve conclue, pas de convention entre nous ?

— Non, tant que le gouvernement n'aura pas délié Bitche par des instructions authentiques.

Cette affirmation de principes paraît clore la discussion.

Il est bien évident que les avances de l'ennemi pourraient cacher un piège. Indépendamment de l'absence d'instructions, comment accepter l'armistice dans l'état de statu quo, c'est-à-dire les deux parties gardant leur position respective ? Pendant que, dans la place, nos troupes demeureraient immobiles, les Bavarois n'auraient qu'à établir, en arrière des hauteurs, de façon à nous masquer ces préparatifs, des batteries qui, en cas de reprise des opérations, réduiraient en peu d'instants le fort à l'impuissance.

Même, l'hypothèse d'une entente admise et Bitche étant comprise dans l'armistice, le soin de notre sécurité ordonnait d'exiger de l'adversaire qu'il se retirât au delà d'un rayon nettement délimité et qu'une zone neutre, fixée d'un commun accord, assurât l'avenir contre toute cause accidentelle de rupture.

Mais si l'existence de la convention est hors de doute, il n'est pas moins certain que Bitche n'y figure en aucune façon. L'histoire enregistre parfois de ces invraisemblances qui sont des vérités.

Dans la matinée du 5 février, deux nouveaux parlementaires apportent, sous pli cacheté, une copie en français du traité conclu pour le pays entier, sauf Belfort et l'armée de l'Est.

Le pacte engloba les places de Givet, de Langres, encore investies par l'ennemi. Tout est prévu, tout est réglé, tout... à l'exception de Bitche, aussi oubliée que si ses remparts, depuis six mois, n'avaient pas immobilisé les forces d'un assaillant plein d'audace.

L'origine de l'omission ? Sans doute l'effarement de cette heure critique, la précipitation d'une solution hâtive ; deux centres de gouvernement, l'un à Paris, l'autre à Bordeaux, en divergence de vues ; un conflit d'opinions entre M. Jules Favre, négociateur, et M. Gambetta, partisan de la lutte pour l'honneur national.

Si le souvenir de Bitche échappait à la diplomatie française, la diplomatie allemande, peu soucieuse de provoquer des revendications possibles en échange d'une place qui résistait encore, n'avait garde de le lui rappeler.

Que faire en une telle occurrence ? Se rallier strictement aux prescriptions de la loi : tenir jusqu'à épuisement de munitions et de vivres. Pour des soldats habitués au respect des règlements et fermement décidés à n'obéir qu'à des inspirations loyales, toute difficulté était tranchée d'avance. Le devoir n'est-il pas le guide le plus sûr ?

On attendait une communication du gouvernement ; cette communication n'arrivant pas, le capitaine Mondelli offre de se rendre à Bordeaux pour y chercher des ordres.

Le conseil de défense, assemblé, accepte sa proposition. Dans le but de faciliter l'entreprise, un laissez-passer est sollicité du commandant des forces ennemies.

Ce dernier répond, le 6, au commandant de la citadelle :

Monsieur le colonel,

Demain, je ferai partir un officier de ma suite pour Strasbourg, afin de demander au gouverneur un sauf-conduit pour M. le capitaine Mondelli, se rendant à Paris.

Mon officier sera probablement de retour le soir même ; alors, après-demain matin, j'aurai l'honneur de vous envoyer la réponse.

Agréez, etc.

Colonel KOLLERMANN,

 

Le 7, sans doute en possession des ordres de l'autorité militaire de laquelle il relève, le chef assiégeant écrit que le gouverneur de Strasbourg a cru devoir lui-même en référer au grand quartier général, à Versailles.

Plusieurs journées se passent à attendre une réponse qui ne vient pas. Peut-être, en présence des dispositions belliqueuses que manifeste la place, l'ennemi préfère-t-il éviter, entre Bitche et Paris, des communications de nature à amoindrir les exigences du vainqueur.

Cependant, la situation intérieure se complique.

Un malaise moral a envahi les troupes, chez lesquelles la certitude du désastre final brise ce grand ressort : l'espérance. Le froid sévit avec rigueur, une neige épaisse couvre le sol, l'humidité pénètre les abris improvisés. Une vague torpeur hante l'esprit du soldat.

Le 11 février, M. Mondelli se décide à partir.

Le nord de la France étant occupé, il doit renoncer à voyager par le Luxembourg et la Belgique.

Muni d'un bon guide, il se dirige vers Wissembourg, à travers des chemins que l'ennemi surveille étroitement ; il parvient à Bordeaux le 17 au matin.

L'intrépide capitaine ne tarde pas à s'apercevoir que, pour un homme de sa trempe, il est plus facile de jouer le rôle d'assiégé dans Bitche que celui d'assiégeant autour du gouvernement. Les séances de l'Assemblée sont laborieuses, on reconstitue un ministère ; MM. Thiers et Jules Favre sont à la veille de regagner la capitale. Mondelli est reçu par le général Leflô, qui le renvoie à son aide-de-camp, le colonel Barry, qui le renvoie au général Suzanne, ministre par intérim à Paris.

L'émissaire quitte Bordeaux pour Paris. Il y arrive le 22 février, et il expédie au colonel Teyssier cette importante lettre, que lui a remise, pour le commandant de Bitche, le ministre de la guerre :

Bordeaux, le 19 février 1871.

Mon cher colonel, M. le capitaine Mondelli m'a rendu compte de votre situation si digne d'intérêt de toute façon.

Par une omission que je regrette profondément, M. Jules Favre, notre négociateur avec l'état-major allemand, n'a pas mentionné votre place de Bitche, que vous avez défendu pourtant avec assez d'honneur pour qu'on ne l'oubliât pas dans la convention.

J'ai écrit aujourd'hui même à M. Thiers, qui sera à Versailles après-demain, pour qu'il soit stipulé en faveur de Bitche, dans la première conférence, au moyen d'un codicille à ajouter à la convention du 1er février.

Vous vous trouverez ainsi compris régulièrement dans l'armistice.

Je dis régulièrement ; car, en principe, il ne saurait être douteux que le bénéfice de cet armistice ne s'étendît à votre place comme à celles de Besançon et d'Auxonne. Quoiqu'il en soit, je vous autorise, dès à présent, à accepter la suspension d'armes qui vous a été offerte par le commandant des troupes prussiennes que vous avez devant vous. Vous devriez éviter tout renouvellement d'hostilités qui ne pourraient entraîner, pour votre brave garnison, qu'une continuation de sacrifices désormais inutiles, en raison de votre situation complètement isolée.

Si la paix se conclut, j'espère que vous n'aurez pas à abandonner une place qui restera française, et si, par un malheur que je ne veux pas admettre, il en était autrement, vous recevriez, en temps opportun, les ordres et les instructions nécessaires.

Recevez, en attendant, toutes mes félicitations sur l'énergique résistance que vous avez opposée à l'ennemi ; félicitez votre brave garnison, etc., etc.

Le ministre de la guerre,

Signé : Général LE F.

 

A Paris, l'envoyé erre à travers les ministères. Le général Suzanne lui demande un rapport. Un rapport en un pareil moment ! Le chef de cabinet du ministre par intérim, M. de Clermont- Tonnerre, expédie à Bitche, par la voie allemande, des dépêches recommandant une suspension immédiate des hostilités ; il promet que des instructions précises suivront de près.

Il avait d'abord écrit au capitaine Mondelli :

Paris, le 24 février 1871.

Mon cher camarade,

Il n'y a rien encore de décidé relativement à la place de Bitche. Si demain j'avais quelque chose à vous dire, je m'empresserais de vous le faire savoir. Dans tous les cas, je suis tout à votre disposition quand vous voudrez bien prendre la peine de passer à mon cabinet.

Le colonel chef du cabinet,

Comte DE CLERMONT-TONNERRE.

 

Une semaine plus tard, le chef de cabinet transmet au capitaine le sauf-conduit que les Prussiens se sont enfin décidés à délivrer :

1er mars 1871.

Mon cher camarade,

Je vous adresse, exclusivement pour n'en pas conserver le dépôt, le laissez-passer que les autorités allemandes me font à l'instant parvenir.

J'espère vous rendre, demain ou après-demain, votre liberté.

Veuillez recevoir, mon cher camarade, etc.

Le colonel chef du cabinet,

Comte DE CLERMONT-TONNERRE.

 

Cependant, la paix est signée et une solution continue à se faire attendre. — L'officier est témoin d'un échange de lettres entre Paris et Bordeaux pour le règlement de cet étrange litige. Les pourparlers restent sans résultat.

Le 4 mars, impatienté de tant d'inexplicables délais, inquiet de l'impression que sa trop longue absence court le risque de produire, Mondelli reprend tristement le chemin du bercail. Durant les dernières journées écoulées, les élections ont eu lieu selon les prescriptions de la loi.

Cette fois, en vertu du sauf-conduit dont il est porteur, l'envoyé a pu effectuer son trajet par les voies les plus rapides.

Le 7 mars, un ordre du commandant de Bitche expose la situation :

ORDBE DE LA PLACE

M. le capitaine Mondelli, envoyé en mission auprès du gouvernement français est de retour.

Cet officier a rempli sa mission avec le plus grand dévouement.

Il n'a pu attendre les instructions qui vont nous être envoyées pour l'évacuation de la place, mais il a rapporté des lettres du ministre, par lesquelles Son Excellence me charge d'adresser en son nom des félicitations à la garnison sur son courage, sa patience et son dévouement.

Le ministre de la guerre demande également, avec un rapport sur les opérations du siège, l'état des récompenses accordées et celui de nouvelles propositions pour de nouvelles récompenses.

Les préliminaires de paix étant approuvés par l'Assemblée nationale, et le territoire que nous occupons devant être cédé, l'évacuation de la place est prochaine et inévitable.

Bientôt nous nous retrouverons au milieu de nos frères d'armes de l'intérieur, et nous pourrons nous montrer fiers, malgré les malheurs qui accablent notre patrie, d'avoir tenu bon jusqu'à la fin de la guerre, sans nous laisser aller au découragement en voyant tant de places tomber l'une après l'autre au pouvoir de l'ennemi, malgré une résistance souvent héroïque.

Les travaux de défense proprement dits cesseront dès aujourd'hui et il ne sera plus commandé que les travailleurs nécessaires pour les travaux d'urgence et d'entretien.

A dater d'aujourd'hui, 7 mars, la ration de riz sera portée de 40 à 60 gr. ; la ration de foin sera portée à 2 kilog.

Le commandant de la place,

TEYSSIER.

 

En conséquence, on se prépare à l'évacuation.

Dans la soirée du 9, un parlementaire se présente, porteur d'un télégramme en langue allemande qui est aussitôt traduit :

Au colonel Kollermann.

Colonel,

Comme Bitche, d'après l'article Ier du traité de paix, est cédé à l'Allemagne, le commandant de place, sur l'ordre du comte de Moltke, doit être sommé immédiatement de l'évacuer et d'abandonner avec ses troupes le territoire allemand, par le chemin le plus court. Les gros bagages peuvent être expédiés plus tard. La terminaison ne peut être différée par le commandant faute de wagons.

Strasbourg, 9 mars 1871.

Signé : Comte DE BISMARCK-BOEHLEM.

 

A cet ultimatum, le commandant de la place répond :

Bitche, 10 mars 1871.

A Monsieur le colonel Kollermann.

Monsieur le colonel,

Je n'ai pas encore eu con naissance, d'une manière officielle, du traité de paix ; je sais néanmoins qu'il existe un traité.

Il est de droit international que le commandant d'une place ne l'évacue point. — même par cession de territoire. — sans une notification de son gouvernement.

L'officier que j'avais envoyé à Paris est de retour depuis plusieurs jours et il m'a rapporté l'assurance, de la part du ministre de la guerre par intérim, qu'un officier me serait envoyé porteur d'instructions écrites, dès que les conditions d'évacuation seraient arrêtées entre les deux gouvernements.

J'attends, d'un instant à l'autre, l'arrivée de cet officier, ou tout au moins des instructions écrites.

N'ayant point de télégraphe à ma disposition, je vous serai fort obligé de faire parvenir deux copies de la dépêche ci-jointe, l'une à M. le ministre de la guerre, à Bordeaux ; l'autre à M. le ministre de la guerre par intérim, à Paris :

Monsieur le ministre, je reçois avis de sommation d'avoir à évacuer immédiatement la place et de quitter le territoire allemand par le chemin le plus court. J'attends un officier venant de votre part ou des instructions écrites sur ce que je dois faire du matériel, des vivres, des munitions et de l'armement Sur quel point de la France nous dirigerons-nous ? Que faire des douaniers ?

Le commandant de la place,

TEYSSIER.

 

Il était impossible de mieux concilier les devoirs du patriote avec les obligations du soldat.

Afin de ne perdre point de temps au moment où viendront les ordres attendus, on démonte les pièces de 24 et de 12, en les transporte à la gare ; dans l'esprit du conseil de défense, ce matériel conservé à la France au prix de si lourds sacrifices doit rester la propriété du pays. Le 12, un officier ennemi apporte la dépêche suivante, signée du ministre des affaires étrangères :

Je m'étonne que vous n'ayez reçu ni officier, ni ordre de M. le ministre de la guerre. Je l'ai prévenu depuis plusieurs jours. Vous devez sortir avec les honneurs de la guerre, vos armes, vos drapeaux, vos archives, et regagner les premiers postes français par la voie la plus courte. Ceci est entendu avec l'autorité allemande.

JULES FAVRE.

 

Le commandant de place ne saurait se tenir pour satisfait ; il écrit au chef des troupes d'investissement :

Bitche, 13 mars

Monsieur le colonel,

J'ai reçu hier au soir la dépêche de M. Jules Favre que vous m'avez fait l'honneur de me transmettre. L'avis contenu dans cette dépêche me donne l'espoir que je recevrai très prochainement l'officier envoyé par M. le ministre de la guerre avec un ordre écrit, mesures sans lesquelles je ne puis quitter le poste que j'occupe. Le ministre de la guerre peut seul donner les ordres nécessaires pour que l'évacuation de la place se fasse dans les conditions convenues entre les deux gouvernements.

Si, comme je n'en doute pas, vous avez eu la complaisance de faire parvenir mes deux dépêches télégraphiques du 10 courant, un officier doit être en route en ce moment, ou tout au moins une dépêche écrite authentique. Je prends toutes les dispositions pour une prompte évacuation, aussitôt l'ordre reçu.

Le commandant de la place,

TEYSSIER.

 

La vérité est qu'un codicille spécial à Bitche a été signé à Ferrières le II mars ; mais le pouvoir central a négligé l'envoi de ce document, Son silence se prolonge.

Autant pour se procurer les sommes nécessitées par les frais de route que pour soustraire à l'en nemi la plus grande quantité possible des ressources de la place, le conseil de défense ordonne la vente aux enchères du vieux matériel, d'une partie des vivres, des débris de démolitions, d'armes hors de service. La plupart de ces épaves sont achetées, pour une centaine de mille francs, par l'usine métallurgique de Niederbronn. Les Bavarois en permettent l'enlèvement sous la réserve expresse de reprendre tous leurs droits en cas de contestations ultérieures avec l'autorité supérieure française.

Mettant à profit la circonstance, nos soldats bouleversent les travaux qu'ils ont édifiés de leurs mains ; ils arrachent de leurs gonds les portes, les fenêtres ; ils achèvent de détruire les édifices restés debout au fort, enlèvent jusqu'aux palissades des avancées, jusqu'aux grilles en fer qui bordent les ponts-levis.

Une émotion triste et douce à la fois remplit la journée du 15 mars. Les troupes sont convoquées dans le camp retranché pour recevoir, des délégués de Bitche, un drapeau offert par les habitants. Cette solennité est l'occasion des démonstrations les plus touchantes.

Ce drapeau, dit le colonel Teyssier dans un éloquent ordre du jour, sera présenté au chef de l'Etat ; j'en demanderai le dépôt au musée d'artillerie jusqu'à l'époque où il pourra être rapporté ici par une armée française valeureuse et triomphante.

Quelques heures plus tard, une députation des dames de Niederbronn apporte au commandant de la place un bouquet et une couronne de lauriers, témoignages de reconnaissance, souvenirs d'efforts valeureux.

 

Certains d'entrer bientôt dans la forteresse, les Allemands permettent aux populations environnantes d'en visiter les ruines ; nos chefs, toujours vigilants, se montrent fermement résolus à ne se retirer que sur des instructions en règle. Ces instructions n'arrivant pas, les soldats commencent à murmurer, des symptômes de découragement se manifestent. Une fois encore, Mondelli se dévoue.

Muni de son sauf-conduit périmé, le capitaine quitte Bitche le 18 mars. Il est à Paris le 19. Il cherche le gouvernement. Il n'y a plus de gouvernement : le comité central est le seul maître. Le nouveau débarqué vole au ministère : le ministère est occupé par la garde nationale. Un fédéré obligeant indique à M. Mondelli la nouvelle adresse du pouvoir régulier. L'ofticier se transporte à Versailles aussitôt.