HISTOIRE DES EMPEREURS ROMAINS

 

DE CLAUDE À CARIN

LIVRE UNIQUE

§ VI. Carus et ses fils Carin et Numérien.

 

 

FASTES DU RÈGNE DE CARUS, ET DE SES FILS CARIN ET NUMÉRIEN.

 

 PROBUS AUGUSTUS V. - ..... VICTORINUS. AN R. 1033. DE J.-C. 282.

Carus, préfet du prétoire, proclamé empereur, peut-être même du vivant de Probus, est reconnu de tout l'empire. Il était de Narbonne, et il avait passé par toutes les charges civiles et militaires, y compris le consulat.

Il notifie son élection au sénat.

Il nomme Césars ses deux fils Carin et Numérien. Il défait les Sarmates, et assure la tranquillité de 'Illyrie.

M. AURELIUS CARUS AUGUSTUS II. - AURELIUS CARINUS CÆSAR. AN R. 1034. DE J.-C. 283.

Carus, prêt à marcher contre les Perses, envoie Carin son fils aîné en Occident, pour contenir les Barbares du Nord.

Il est à croire qu'il le nomma alors Auguste, aussi bien que Numérien son second fils, qu'il menait avec lui.

Jeux donnés à Rome par Carus. Carin y préside.

Carin remporte quelques avantages sur les Barbares : du reste il se conduit en vrai tyran, mêlant la cruauté à la débauche.

Carus se rend maitre de la Mésopotamie, prend les villes de Séleucie et de Ctésiphon.

Il périt au-delà du Tigre, tué, dit-on, par le tonnerre. Mais il est plus que probable que ce fut par les intrigues criminelles d'Arrius Aper, préfet du prétoire, qu'il perdit la vie.

Sa mort tombe sur la fin de cette année, ou au commencement de la suivante.

Il fut mis au rang des dieux.

M. AURELIUS CARINUS II. - M. AURELIUS NUMERIANUS, AUGG. AN R. 1035. DE J.-C. 284.

CARIN et NUMÉRIEN, empereurs.

Numérien ramène son armée du pays des Perses, et traverse l'Asie.

Il est tué près de Périnthe, en Thrace, par le même Aper qui avait fait périr Carus.

Dioclétien est élu empereur par l'armée à Chalcédoine, le 17 septembre. Il tue Aper de sa main. Numérien est mis au rang des dieux.

CARIN et DIOCLÉTIEN, empereurs. AN R. 1036. DE J.-C. 285.

Carin et Dioclétien se préparent à la guerre l'un contre l'autre.

C. VALERIUS DIOCLETIANUS AUGUSTUS II. - ..... ARISTOBULUS.

Dioclétien avait eu un premier consulat avant que de devenir empereur.

Carin s'était fait consul cette année pour la troisième fois. Mais Dioclétien, resté seul empereur, fit effacer son nom des fastes.

Dioclétien s'avance dans l'Illyrie.

Carin, venant au-devant de lui, défait en Italie, près de Vérone, Sabinus Julianus, qui avait pris la pourpre impériale. Julianus fut tué dans le combat, ou peu après.

Les armées de Carin et de Dioclétien se rencontrent dans la Mésie supérieure. Bataille de Margum, où Carin vainqueur est tué par les siens, dont il s'était attiré la haine par des débauches énormes.

Les poètes Némésien et Calpurnius ont écrit sous les règnes de Carus et de ses enfants.

TYRAN sous Carin.

SABINUS JULIANUS en Italie.

 

L'histoire ne marque aucun intervalle pendant lequel l'empire ait été vacant après la mort de Probus[1] : ce qui s'accorde avec le récit de Zonaras qui assure que Carus était déjà nommé empereur lorsque Probus fut tué. Il ne lui restait donc qu'à se faire reconnaître ; et c'est à quoi il avait préparé les voies, si l'on doit croire qu'il ait contribué à la mort de son prédécesseur. Ce qui est certain, c'est qu'il fut proclamé Auguste sans difficulté et sans délai par l'armée qu'avait commandée Probus en personne. L'estime que l'on faisait de son talent pour la guerre, et la charge de préfet du prétoire qu'il avait exercée, lui aplanissaient le chemin.

Tout l'empire se soumit paisiblement à ses lois ; et c'est sans doute une preuve du mérite de ce prince qu'il ait reçu sur ses épaules le poids de l'empire romain, comme un poète du temps l'en félicite, sans que la révolution qui changeait l'état de l'univers ait été accompagnée des horreurs de la discorde ni des malheurs d'une guerre civile.

Carus était de Narbonne ; et comme cette ville avait rang entre les plus anciennes colonies romaines, c'est sans doute à ce titre qu'il se glorifiait d'être romain, à la différence de plusieurs de ses prédécesseurs, tels que Claude II, Aurélien et Probus qui étaient nés en Illyrie. Il s'éleva par tous les degrés des fonctions civiles et militaires, et il parvint, comme je viens de le dire, jusqu'au rang de préfet du prétoire sous Probus. Il paraît qu'il avait été consul une première fois avant que de devenir empereur, puisque le consulat qu'il prit au mois de janvier qui suivit son élection à l'empire, est compté dans plusieurs anciens monuments pour le second. Il fut aussi proconsul de Cilicie ; et nous avons de lui dans cette magistrature une lettre qui présente une idée avantageuse des principes par lesquels il se gouvernait. Il s'était choisi pour lieutenant-général un certain Junius, et en écrivant il l'exhorte à se comporter d'une manière qui fasse honneur à son supérieur. Car nos ancêtres, lui dit-il, comptaient, lorsqu'ils étaient en place, donner un gage et comme un essai de leurs mœurs et de leur conduite par le choix des personnes à qui ils confiaient une partie de l'autorité publique. Probus faisait un très-grand cas de la vertu de Carus, et persuadé que son intégrité méritait récompense, il écrivit au sénat pour ordonner qu'on lui dressât une statue équestre, et qu'on lui bâtit une maison aux frais de l'état.

Cependant, si nous en croyons Vopiscus, la réputation de Carus n'était pas fort bien établie dans le public. Le sénat crut tout perdre en tombant entre ses mains au sortir de celles de Probus. L'historien lui-même regarde Carus comme un caractère mal décidé, et qui ne mérite d'être mis ni au nombre des mauvais ni au nombre des bons princes. Il est vrai qu'il observe que sa principale tache était d'avoir un fils perdu de vices. Mais le père passait lui-même pour un esprit dur et fâcheux.

Carus élu par les soldats écrivit au sénat, non pas néanmoins de ce ton de déférence et de soumission qu'avait pris Probus en pareille circonstance. Nous n'avons pas sa lettre en entier. Mais les expressions du fragment que Vopiscus nous en a conservé marquent moins un recours à l'autorité de la première compagnie de l'état pour obtenir sa confirmation, qu'une simple notification de ce qui s'est passé. Vous devez être bien aises, dit-il aux sénateurs, qu'on ait fait empereur un membre de votre ordre, un citoyen de votre ville. Nous nous efforcerons de faire en sorte que des étrangers ne vous paraissent pas mieux mériter votre estime que ceux de votre sang. Il est incertain si Carus eût vérifié cette promesse. Il n'a pas régné assez longtemps pour être mis à l'épreuve.

Deux objets l'occupèrent, la guerre et l'établissement de sa famille. Pour commencer par ce dernier article, qui fut aussi son premier soin dès qu'il se vit empereur, il décora du titre de César, et quelques temps après il éleva même au rang d'Auguste ses deux fils, Carin et Numérien, princes qui se ressemblaient très-peu, et dont l'un était aussi aimable que l'autre se montrait digne de haine et de mépris.

Numérien, le plus jeune des deux, ne témoigna dès son enfance que d'heureuses inclinations. Il aima l'étude et il y réussit. Il faisait des vers assez bien pour disputer la palme à Némésien, le meilleur poète qui fût alors ; et quant à ce qui regarde les exercices de l'éloquence, encore dans les bras de sa mère, suivant l'expression d'un autre poète contemporain, ses jeux furent des plaidoyers et des discours. Il s'en était conservé plusieurs qui marquaient de la facilité et du talent, quoique, suivant le goût du temps, le style se ressentit plutôt de la déclamation que de l'éloquence cicéronienne. Devenu César, il envoya au sénat une harangue qui fut trouvée si belle, qu'on lui érigea une statue avec cette inscription : À NUMÉRIEN CÉSAR, LE PLUS EXCELLENT ORATEUR DE SON SIÈCLE. On soupçonnera aisément que la flatterie entrait pour quelque chose dans un éloge si magnifique ; mais de la façon dont s'exprime Vopiscus, elle n'en faisait pas seule les frais. Les qualités du cœur l'emportaient dans ce jeune prince sur celles de l'esprit : une conduite sage et modeste, des sentiments dignes de son rang, un respect plein de tendresse pour son père qui aussi, l'aimait uniquement.

Carin son frère aîné était un caractère entièrement opposé, et toute l'histoire n'en parle qu'avec horreur et abomination. On avait pris les mêmes soins de son éducation : on s'efforça, suivant l'usage pratiqué par rapport à toute la jeunesse romaine, de le former à l'éloquence, et surtout sans doute aux bonnes mœurs. Mais un sol essentiellement mauvais se refuse à toute culture. Carin, dès ses premières années, se livra aux plus grands excès de débauche et de corruption ; et lorsque l'élévation de sa fortune le mit en état de développer ses vices, il devint un monstre de tyrannie. Son père le connaissait bien. En partant pour la guerre contre les Perses, dont je vais parler incessamment, obligé de laisser Carin en Occident pour gouverner l'Italie, la Gaule et les provinces adjacentes, il gémissait de ce que Numérien, trop jeune encore, ne pouvait pas être chargé de cet important emploi. Il fit ce qui était en son, pouvoir pour remédier au mal, en donnant à Carin un conseil composé des meilleurs têtes. Mais la fureur du vice renversa aisément ces faibles digues. Carin se porta à de tels excès, que son père, lorsqu'il en reçut, les nouvelles, s'écria : Non, il n'est a pas mon fils. Et il délibéra s'il n'ôterait pas la vie à un si indigne héritier la mort le prévint lui-même.

Cacus eut à faire.la guerre contre les Sarmates et contre les Perses. La mort de Probus avait relevé le courage de tous les Barbares ; et les Sarmates en particulier se promettaient d'envahir la Thrace, l'Illyrie, l'Italie même. Carus rabattit bientôt leur arrogance : il alla à leur rencontre, et leur ayant livré bataille, il leur tua seize mille hommes, fit sur eux vingt mille prisonniers, et rétablit ainsi le calme et la sécurité dans toute cette partie de l'empire.

Cette expédition promptement et heureusement terminée le mit en état d'aller porter la guerre chez les Perses et venger enfin Valérien. Déjà deux empereurs, Aurélien et Probus, avaient été tués lorsqu'ils se préparaient à poursuivre cette vengeance. Carus profita du premier moment où il fut libre pour l'exécuter. Ce fut afin de n'être détourné de cette grande entreprise par aucun autre soin, qu'il chargea Carin son fils aîné, actuellement consul avec lui, du soin de défendre l'Italie et les Gaules contre les Germains, perpétuels et infatigables ennemis, pour qui la mort de Probus avait été une occasion de se remettre en mouvement. Carus marcha donc coutre les Perses au commencement de l'année de J.-C. 285, menant avec lui son fils Numérien.

La conjoncture lui était favorable : les Perses, qu'il ses succès allait attaquer, se détruisaient eux-mêmes par des divisions intestines, dont les causes ne nous sont point expliquées, mais dont l'effet nécessaire était leur affaiblissement. Il vainquit sans beaucoup de peine des ennemis dont les forces étaient partagées. Il reconquit la Mésopotamie ; il prit même Séleucie et Ctésiphon. On peut croire que ce fut près de l'une de ces deux villes, toutes deux situées sur le Tigre, qu'arriva ce que rapporte Zonaras, que les Romains étant campés dans un endroit creux, les Perses dérivèrent sur mis les eaux du fleuve, et les mirent en péril d'être submergés ; mais que leur courage, animé par la grandeur même du danger, leur devint une ressource, et les rendit victorieux de ceux qui avaient espéré les faire périr.

Ces succès furent le fruit d'une seule campagne, et ils méritèrent à Carus le surnom de Persique ou de Parthique : car l'un et l'autre titres lui sont attribués dans les monuments anciens, les Romains, comme je l'ai déjà remarqué, confondant encore alors dans leur langage les Perses et les Parthes.

Carus prétendait pousser plus loin ses victoires. Il était campé au-delà du Tigre et de Ctésiphon, et il se proposait d'aller en avant, s'embarrassant peu de l'opinion superstitieuse qui faisait regarder la ville de Ctésiphon comme un terme fatal que les destins ne permettaient pas aux Romains de passer. Sa mort arrivée dans ces circonstances confirma le préjugé populaire.

On a débité qu'il fut tué du tonnerre ; mais une lettre écrite par Calpurnius, l'un de ses secrétaires, au préfet de Rome, doit nous donner d'autres idées. Je vais la rapporter : Notre empereur Carus étant malade, il est survenu un orage affreux avec des tonnerres et des éclairs si violents, qu'ils ont répandu la consternation dans toute l'armée, et nous ont empêchés de discerner au vrai ce qui s'est passé. Après un coup de tonnerre plus furieux que tous les autres, tout d'un coup on s'est écrié que l'empereur était mort, et les valets de chambre, dans la douleur où les jetait la perte de leur maître, ont brûlé sa tente. De là est né le bruit que c'est le tonnerre qui l'a tué ; mais dans la vérité il est mort de sa maladie. Cet officier en savait vraisemblablement plus qu'il n'en dit ; et voici ce que les circonstances nous donnent lieu de conjecturer.

Carus avait pour préfet du prétoire Arrius Aper homme avide de régner, et qui pour y parvenir tua comme nous le dirons bientôt, Numérien son empereur et son gendre. Vopiscus atteste que ce même Aper avait machiné la mort de Carus. Cela posé, on voit clair dans l'aventure qui priva ce prince de la vie. Il était malade : arrive un effroyable tonnerre ; l'ambitieux Aper profite de l'occasion pour se défaire de l'empereur en rejetant sur le tonnerre la cause de sa mort ; et il est si bien servi par ceux qui approchaient de la personne du prince, qu'ils brûlent sa tente, afin que son corps réduit en cendres ne puisse offrir aucun vestige de la violence meurtrière qu'il a soufferte. Telle est sans doute la vérité du fait.

Carus périt ou sur la fin de l'année 283 de J.-C., ou dans les premiers jours de la suivante, n'ayant régné que seize à dix-sept mois. Dans ce court espace il a fait preuve de courage et d'habileté dans la guerre. Pour ce qui est du fond de son caractère, nous ne pouvons en rien dire de certain.

On remarque dans le peu que nous savons de sa conduite, des preuves de hauteur, et on peut juger qu'il poussa ce vice fort loin, puisque non seulement  les poètes, nation toujours dévouée à la flatterie, mais quelques-unes de ses médailles lui attribuent les noms de seigneur et de dieu. Ce faste impie sied mal au successeur de Probus. Après sa mort il n'est pas étonnant, vu l'usage établi, qu'il ait été mis au rang des dieux.

Une expression du poète Némésien peut faire soupçonner qu'il y eut sous Carus quelques mouvements de guerre en Égypte vers le haut Nil.

Ce prince, sans être vraisemblablement jamais venu à Rome durant le cours de son règne, y donna néanmoins des jeux superbes auxquels présida Carin son fils. Nous en avons une description dans Vopiscus, et le poète Calpurnius les a chantés. Ceux qui sont curieux de ces magnifiques bagatelles peuvent consulter les écrivains que je viens de citer. Pour moi, j'aime mieux rapporter le jugement de Dioclétien, qui entendant beaucoup louer ces jeux devant lui, dit froidement Carus a donc eu la satisfaction de bien faire rire le peuple romain ! Les dépenses excessives des empereurs en ce genre excitaient une folle émulation dans les particuliers. Vopiscus fait mention d'un Junius Messala, son contemporain, qui s'y était ruiné ; et il lui reproche avec justice d'avoir frustré ses héritiers de son riche patrimoine pour le dissiper en largesses à des comédiens et à des farceurs'. Il faut joindre ce trait à celui que nous avons emprunté du même auteur sous le règne d'Aurélien touchant le consul Furius Placidus.

Carus et ses deux fils portaient les noms de Marcus Aurelius. Les monuments historiques donnent ces Aurélius mêmes noms à Probus et à Claude II. Tacite est appelé aussi Aurelius par Vopiscus dans la vie d'Aurélien, et son prénom était constamment Marcus. N'y a-t-il pas lieu de penser que c'était la vénération pour la mémoire de Marc-Aurèle qui rendait les noms qu'il avait portés si communs parmi les empereurs. 

 

CARIN ET NUMÉRIEN.

Il n'est fait mention dans l'histoire ni d'élection, ni d'installation par rapport à Carin et à Numérien. Ils succédèrent de plein droit à leur père, ayant été revêtus, pendant qu'il vivait encore, du caractère d'Augustes. Leur règne ne fut pas long. Numérien périt le premier par le crime de celui qui avait déjà ôté la vie à Carus.

Ce jeune prince ne se trouvait pas dans des circonstances qui lui permissent de continuer la guerre heureusement commencée contre les Perses. Il était même absorbé par la douleur de la perte qu'il venait de faire : et on dit qu'il pleura son père si longtemps et si amèrement, que l'abondance des larmes lui gâta les yeux, et le réduisit au point de ne pouvoir supporter la lumière. L'armée romaine se retira donc du pays ennemi, et nous ne voyons point qu'elle ait éprouvé de la part des Perses aucune difficulté dans sa retraite. Elle rentra tranquillement sur les terres de l'empire, et s'avança à travers la Syrie et l'Asie vers l'Occident et vers Rome. On portait Numérien au milieu des troupes-dans une litière bien fermée, et où le jour ne pouvait pas pénétrer, ni lui blesser la vue : il paraît que tous les soins du commandement roulaient sur Arrius Aper, son beau-père et son préfet du prétoire.

Cet ambitieux avait ainsi toutes sortes de facilités pour satisfaire la passion de régner qui le possédait : et après le premier attentat contre la personne de Carus, un second lui coûta peu. Il fit périr furtivement, son empereur et son gendre pat ; le ministère des officiers.de la chambre du prince, et de ceux qui l'approchaient de plus près.

Aper avait apparemment besoin de quelque temps pour dresser ses batteries, et il convenait ses vues de tenir cachée la mort de Numérien. Il y réussit. La litière fut portée durant plusieurs jours comme de coutume au milieu de la garde impériale, sans donner aucun soupçon : et la mort du prince ne fut annoncée, dit-on, que par la putréfaction et la mauvaise odeur du cadavre.

Une ancienne chronique témoigne que Numérien fut tué à Périnthe ou Héraclée dans la Thrace. On verra néanmoins par la suite, que le gros de l'année était encore à Chalcédoine en Asie. On peut croire qu'Aper avait fait prendre les devants à un détachement qui conduisait et escortait l'empereur : et son crime n'en aura été pour lui que plus aisé à commettre, par la diminution du nombre des surveillants.

Numérien avait régné huit à neuf mois depuis la mort de son père. Il était en pleine possession de l'empire avant le 12 janvier, et il périt avant le 17 septembre de la même année 284 de J.-C.

La mort de Numérien ayant été connue dans l'armée de la manière que je viens de raconter, on n'eut pas de peine à deviner qui en pouvait être l'auteur. On se saisit d'Aper ; et en attendant que l'on eût la preuve complète de son crime, on le garda prisonnier auprès des drapeaux. En même temps l'armée s'assembla pour élire un empereur à la place du prince que l'on venait de perdre.

Il est singulier que l'on ait regardé l'empire comme vacant par la mort de Numérien, qui laissait un are jouissant actuellement du titre et des droits d'Auguste. Nos maigres historiens ne nous fournissent aucune lumière sur cette difficulté : les vices de Carin semblent en donner la solution. Ce prime était si décrié, il se faisait tellement haïr et mépriser par le plus mauvais et le plus détestable gouvernement qui fut jamais, que l'on songea non à le reconnaître, niais à lui faire la guerre ; et que Fon crut avoir besoin d'un nouvel empereur, autant pour punir Carin que pour venger Numérien.

Tous les suffrages se réunirent en faveur de Dioclétien, soldat de fortune qui sans aucune recommandation du côté de la naissance, s'était élevé par son seul mérite jusqu'à l'un des premiers grades de la /Délice, et qui commandait alors la plus noble partie de la garde impériale : J'expliquerai dans la suite plus en détail ce qui regarde ses commencements.

Dès que Dioclétien fut élu, il monta sur le tribunal de gazon qui avait été préparé, et tirant son épée, attestant le soleil qui l'éclairait, il jura qu'il n'avait eu aucune part à la mort de Numérien. Ensuite se tournant vers Aper, que l'on gardait à la tête des drapeaux : Voilà, dit-il, l'auteur du crime ; et sur-le-champ il descendit du tribunal, courut à lui, et faisant à la circonstance présente l'application d'un vers de Virgile : Loue ton sorts Aper, s'écria-t-il, tu meurs de la main du grand Énée ; et il le perça et l'abattit à ses pieds.

Ce n'était point le zèle de la vengeance de Numérien qui emportait Dioclétien en ce moment, et qui l'engageait à prendre sur soi une exécution sanglante dont il pouvait charger un soldat. Jamais homme ne fut plus maitre de lui-même, ni moins sujet à ces saillies qui préviennent la réflexion, et qui font que l'on agit avant que d'avoir pensé. Dioclétien avait un motif mêlé d'ambition et de superstition en même temps. Il voulait remplir une prédiction qui lui avait été faite autrefois en Gaule par une femme druide.

Lorsqu'il était encore fort peu avancé dans le service, pendant un séjour qu'il fit à Tongres, la femme dont je parle remarqua qu'il ménageait sa dépense avec une extrême économie, et elle lui en fit des reproches. Vous êtes trop attentif à l'argent, lui dit-elle, vous poussez l'économie jusqu'à l'avarice. — Je deviendrai libéral, répondit l'officier, lorsque je serai empereur. La femme galloise répliqua avec vivacité : Ne prétendez pas badiner. Vous serez empereur lorsque vous aurez tué un sanglier. Or il faut remarquer que le nom, qui signifie sanglier en latin, est Aper. Ce mot fit une profonde impression

sur un cœur ambitieux : et les exemples de gens de bas lieu parvenus au rang suprême étaient alors si communs parmi les Romains, que Dioclétien pouvait se flatter de cette idée sans être taxé de se repaître de chimères. H tint la prédiction très-secrète, mais il se mit dans le cas d'en procurer l'accomplissement : et allant souvent à la chasse, il s'attachait à tuer tout autant de sangliers qu'il pouvait. Le succès pendant longtemps ne répondit pas à ses espérances : et voyant Tacite, Probus, Carus, élevés successivement à l'empire, il disait : Je tue le gibier, mais d'autres le mangent. Son élection, après le crime d'Aper, parut au nouveau prince une clé qui lui ouvrait l'intelligence de l'oracle ambigu qu'il avait reçu. Il voulut le vérifier pour affermir sa fortune, et après avoir tué Aper de sa main, il s'écria : Enfin j'ai tué le sanglier auquel était attaché mon destin. S'il n'eût pas eu ce motif, il disait lui-même dans la suite, que jamais il n'aurait marqué l'instant de son avènement au trône par une action qui pouvait donner de lai une idée fâcheuse, et le faire regarder comme aimant le sang.

Il semble difficile de douter de la vérité de ce fait, que le grand-père de Vopiscus tenait de la bouche de Dioclétien lui-même ; et il n'est ni impossible ni fort surprenant qu'une rencontre fortuite ait paru vérifier une prédiction témérairement hasardée. Les défenseurs des folies de la divination tiennent registre des événements favorables, et ils suppriment prudemment le très-grand nombre de ceux qui ont été contraires.

L'élection de Dioclétien se fit, suivant la Chronique d'Alexandrie, le 17 septembre à Chalcédoine, où nous devons par conséquent supposer qu'était l'armée. Le nouvel empereur fit son entrée le 27 du même mois à Nicomédie, qui devint comme sa ville impériale, et dont il affectionna durant tout son règne le séjour : alors il y avait pour lui une espèce de nécessité, vu que Carin était maître de Rome.

Le commencement du règne de Dioclétien fonde une époque célèbre parmi les auteurs ecclésiastiques : on la nomme l'ère de Dioclétien et des martyrs, et elle commence l'an de J.-C. 284.

Numérien fut mis au rang des dieux : et il est naturel d'attribuer aux ordres de Dioclétien cet honneur rendu à la mémoire d'un prince qu'il avait vengé.

 

CARIN ET DIOCLÉTIEN.

Par l'élection d'un empereur en la place de Numérien, l'empire se trouvait partagé entre deux rivaux, deux ennemis, Carin et Dioclétien, dont l'un possédait l'Occident et l'autre l'Orient, mais dont les prétentions réciproques embrassaient tout ce qui obéissait aux lois de Rome. Les armes pouvaient seules décider cette querelle, et l'on s'y prépara de part et d'autre.

Carin, fils et frère des deux derniers empereurs, avait à ces titres un grand avantage sur son concurrent. D'ailleurs il ne manquait pas de bravoure. Mais sa conduite étrangement vicieuse ruina toutes ses ressources, et le précipita dans le dernier des malheurs.

C'est une chose qui fait horreur que la description que nous avons dans Vopiscus des excès auxquels se porta ce prince, devenu encore plus effréné depuis la mort de son père.

Carlu, ainsi que je l'ai dit, lui avait tonné un conseil composé de personnes choisies. Carin les relégua, et il leur substitua tout ce qu'il connut d'hommes plus : méchants et plus pervers. Foulant aux pieds toute bienséance, il éleva un simple huissier au rang de préfet ou gouverneur de Rome. Il tua son préfet du prétoire, et choisit eu sa place Matronianus le ministre affidé de ses infantes plaisirs. Les premiers magistrats ne recevaient de lui aucune marque de considération. Il se déclara ennemi du sénat, auquel il écrivit des lettres pleines de hauteur et d'arrogance, et il promit à la plus vile populace les biens des sénateurs. C'était pour lui un jeu que de tuer. Il inventait de fausses accusations, dont il se rendait le juge, et sur lesquelles il prononçait des condamnations sanglantes. Les hommes les plus distingués étaient mis à mort pour son plaisir, comme on tuait des poulets pour son repas : c'est l'expression de l'auteur. Ses camarades d'études se voyaient, poursuivis criminellement et condamnés à mourir, pour den querelles qu'ils avaient eues avec lui durant sou enfance, pour n'avoir pas loué sa bonne mine et sa belle taille, pour n'avoir pas autant admiré qu'il le souhaitait les déclamations qu'il apportait à ses maîtres.

La corruption de ses mœurs égalait sa cruauté : il n'est point de débauche si abominable à laquelle il ne se livrât. Il remplit le palais de comédiens, de courtisanes, de pantomimes, et de ces misérables qui tournent en trafic et en gain la prostitution de la jeunesse. Dans un espace de temps, fort court, il se maria neuf fois, prenant et renvoyant des femmes sans autre règle que son caprice. Aurélien avait regardé comme une conquête précieuse deux dents d'éléphant, de dix pieds de haut, qui s'étaient trouvées dans le trésor de Firmus, tyran d'Égypte ; et il se proposait d'en faire un trône pour Jupiter dans le temple du Soleil. La mort l'ayant empêché d'exécuter son dessein, Carin donna à une de ses concubines cette offrande destinée à Jupiter ; et ce qui devait servir de trône au plus grand des dieux, devint le lit d'une femme impudique.

Le luxe de la table et des vêtements accompagne et entretient le désordre des mœurs. Les repas de Carin étaient d'une somptuosité infinie, en vins, en viandes, en gibier, en poissons de toutes les espèces : et il y appelait des convives dignes de lui. On y faisait litière des amas de feuilles de roses, et sur sa personne brillaient de toutes parts les pierreries. Chaque agrafe était une pierre précieuse. Son baudrier et jusqu'à ses souliers éblouissaient la vue par l'éclat des diamants.

Ce prince si corrompu montra néanmoins de la vigueur dans la guerre. Il avait, du vivant de son père, remporté des victoires sur les Barbares du Nord, s'il en faut croire le témoignage d'un poète : et il est certain par l'histoire, que dans le temps dont je parle ici, il défendit courageusement ses droits attaqués. Un certain Sabinus Julianus, gouverneur de la Vénétie, s'était révolté, et avait pris la pourpre. Carin le vainquit et le tua dans les plaines de Vérone.

Il lui restait un ennemi plus redoutable. Dioclétien s'avançait à travers 'Illyrie avec de grandes forces. Carin marcha au-devant de lui et les armées se rencontrèrent dans la Mésie supérieure. Il se livra plusieurs combats, dont les succès apparemment se balancèrent. Enfin la bataille décisive se donna près de Margum, entre Viminacium et le Mont-d'Or. Elle fut vivement disputée, et même Carin eut l'avantage : et il serait resté pleinement victorieux, s'il eût été autant aimé de ses troupes que vaillant contre les ennemis. Mais il en était détesté, particulièrement à cause de sa brutale incontinence, qui l'avait porté souvent à débaucher les femmes des officiers. Les maris offensés nourrissaient depuis longtemps dans leur cœur le désir de la vengeance, et ils en réservèrent l'exécution pour le moment de l'action générale. Voyant qu'il allait être vainqueur, et ne doutant point que la bonne fortune ne l'enhardît à de nouveaux excès, plus insupportables encore que les précédents, ils le firent abandonner par les soldats qu'ils avaient sous leurs ordres ; et un tribun s'étant mis à la tête de ceux qui, comme lui, avaient été outragés par le prince, le tua de sa main.

Ainsi les mauvaises mœurs de Carin lui arrachèrent la victoire et la vie ; et il est un grand exemple de l'inutilité des armes, quand le vice les décrédite et les rend odieuses. La victoire de Dioclétien et la mort de Carin tombent sous l'an de J.-C. 285 : ce qui donne pour la durée de l'empire de Carin un peu plus d'un an, à ne dater même que de la mort de son père.

Depuis Juvénal nous n'avons pu citer aucun poète latin dans cette histoire. Le règne de Carus et de ses fils nous en fournit deux qui ne sont point du tout méprisables, Némésien et Calpurnius. Comme ils ne sont pas aussi connus aujourd'hui parmi nous qu'ils l'étaient de nos ancêtres, qui, au rapport d'Hincmar, les faisaient lire aux jeunes gens dans les écoles publiques, je crois que l'on me permettra d'en donner ici une légère idée, et d'en rapporter quelques morceaux.

Némésien dédia aux empereurs Carin et Numérien un poème sur la chasse, dont il ne nous reste que trois cent vingt-cinq vers. Le début ou exorde en contient cent, dont l'expression et le tour ont de la poésie. Il commence par deux vers élégants et gracieux : Je chante l'art de la chasse diversifié en mille manières, joyeux travaux, courses légères, combats innocents au milieu des paisibles campagnes. Le poète rend raison de la préférence qu'il donne à cette matière sur toute autre. Elle est neuve, au lieu que les sujets de la fable, dont il fait un dénombrement trop diffus et assez dans le goût d'Ovide, ont été traités et épuisés par les poètes anciens. Pour nous, ajoute-t-il, ce sont les forêts qui nous attirent ; nous battons les routes des bois, les vastes plaines ; nous courons toute l'étendue de la campagne, et à l'aide d'un chien fidèle et docile, nous prenons différentes sortes de proies. Nous nous faisons un plaisir de vaincre à la course le lièvre timide et le daim fugitif, de combattre l'audace du loup, de tendre des pièges à l'adresse du renard.

Tels sont les essais d'une muse novice, après lesquels Némésien promet de s'élever à de plus nobles sujets, et de célébrer les victoires de Carin sur les Barbares du Septentrion, et celles de Numérien sur les Perses. On reconnaît là le langage flatteur de la poésie. Némésien ne fait aucune mention de Carus, le véritable vainqueur des Perses : et il transporte au fils vivant la gloire qui appartenait au père mort.

Après une invocation à Diane, déesse de la chasse et dès bois, le poète invite à la lecture de ses vers ceux qui, comme lui, frappés du goût de la chasse, ont horreur des procès, fuient le tumulte des affaires et du barreau, détestent la guerre homicide, et ne sont point emportés par l'avidité du gain au-delà des mers.

Outre le poème dé là chasse, nous avons encore quatre églogues attribuées à Némésien, dans lesquelles la pudeur n'est pas toujours assez respectée, et se trouve même quelquefois choquée grossièrement : ce qui prouve autant de mauvais goût et de barbarie, que de témérité contre les mœurs. Mais les vers ne sont point mauvais, et la troisième de ces pièces nous offre une description de la première vendange, qui fait tableau, et qui présente des images tout-à-fait propres au sujet.

C'est Pan qui chante les louanges de Bacchus. Il raconte sa naissance, et il suppose qu'en même temps que le dieu entra dans sa première jeunesse, la vigne commença à porter son fruit. Quand les raisins furent mûrs, Bacchus dit aux satyres : Enfants, cueillez ce fruit précieux, et foulez sous vos pieds ces grappes dont vous ignorez la vertu. A peine le dieu avait-il prononcé ces mots, que les satyres se mettent à l'ouvrage : ils cueillent les grappes sur la vigne ; ils les transportent dans des paniers de jonc, et les ayant amassées dans des cuves de pierre, ils se hâtent de les fouler par le mouvement de leurs pieds agiles. Le raisin pressé se crève et rend son aimable jus ; la vendange ruissèle en bouillonnant, et teint en pourpre les corps nus des vendangeurs. Ils se récompensent les premiers de leur travail. Leur troupe badine saisit tout ce qu'elle trouve de vases à boire, tout ce qui peut en tenir lieu : celui-ci prend une coupe à deux anses, celui-là boit dans une corne recourbée ; un autre forme sa main en creux, et porte ainsi la liqueur à sa bouche ; le plus avide se penche de tout le corps dans la cuve, et il puise le doux nectar avec ses lèvres vivement agitées. On en voit un qui, au lieu de s'amuser à tirer des sons de la cymbale, la fait servir de coupe[2], et en riant la remplit de vin. Un autre couché sur le dos, et pressant des raisins entre ses mains, en reçoit dans sa bouche le suc délicieux, qui lui inonde le visage, ruisseau mousseux qui pétille et qui coule sur son menton, sur son cou, sur ses épaules. Une gaîté folâtre répand la licence dans tous les esprits.

Je me suis assez étendu sur Némésien ; je serai plus court sur Calpurnius, dont la poésie se sent un peu de sa mauvaise fortune, tant par les plaintes fréquentes qu'il fait de sa misère, que par un ton moins poli, moins délicat, et plus rustique que celui de son contemporain.

Calpurnius était de Sicile : et il adresse les sept églogues que nous avons de lui à Némésien de Carthage, qui est sans doute le poète dont je viens de parler. On croit que Némésien y est désigné sous le nom de Mélibée, dont l'auteur implore le crédit auprès des princes régnants, et qu'il prie de leur présenter ses vers.

Des sept églogues de Calpurnius, trois, savoir la première, la quatrième et la septième, roulent sur des événements publics : les autres sont des fictions purement pastorales. La première chante l'avènement de Carus au. trône ; la quatrième a pour objet, si je ne me trompe, Carin venant prendre possession du gouvernement de l'Occident, pendant l'expédition de son père contre les Perses ; la septième contient, comme je l'ai déjà dit, la description des jeux que Carus donna à Rome, et auxquels son fils aîné présida en sa place. Je me contenterai de tracer en peu de mots le plan de la première, dont l'invention a été louée par l'un des plus ingénieux et des plus illustres écrivains de notre siècle.

Deux bergers vont chercher le frais dans un antre consacré à Faune, et pendant qu'ils se disposent à amuser leur loisir en chantant quelque sujet pastoral, l'un d'eux aperçoit et montre à l'autre des vers récemment gravés sur l'écorce d'un hêtre. La description de cette écriture est élégante. Voyez-vous, dit l'un des bergers à son compagnon, comment les fentes qui forment les lettres sont encore vertes, et n'ont point eu le temps de s'élargir par le dessèchement des fibres de l'écorce coupée. Ils approchent, et ils reconnaissent que c'est le dieu Faune lui-même qui parle dans ces vers, et qui prédit à l'empire la paix, la tranquillité, un bonheur parfait sous l'autorité du nouvel empereur. La pièce est assez bien versifiée. Les choses sont vagues, peu caractérisées, ou d'une façon peu convenable aux circonstances. Je remarquerai seulement que les idées de l'ancien gouvernement vivaient encore tellement dans les cœurs, que l'un des avantages annoncés avec pompe par le dieu, c'est le rétablissement du consulat dans tonte sa splendeur. On ne verra plus, dit-il, un consul qui aura acheté par des dépenses ruineuses l'ombre vaine d'une dignité surannée et flétrie, faire porter devant lui des faisceaux inutiles, et occuper en silence un tribunal auquel personne n'ait recours. Les lois reprendront leur vigueur ; la justice de retour rendra à place publique sa première majesté, et un dieu plus favorable bannira tous les vestiges des malheurs passés.

Je suis bien éloigné de comparer Némésien et Calpurnius à Virgile. Mais quand je lis ces poètes ou les orateurs latins qui ont vécu sous Dioclétien, sous Constantin et ses enfants, je plains le sort de l'histoire livrée à des mains grossières et malhabiles dans des temps où la poésie et l'éloquence au moins n'étaient pas entièrement éteintes.

 

 

 



[1] Vopiscus, qui a cru Carus innocent du meurtre de Probus, dit qu'il ne fut élu qu'après que son prédécesseur eut été tué. Mais il n'exprime aucun intervalle qui puisse être appelé vacance.

[2] La cymbale dont on se servait aux fêtes de Bacchus, aussi bien qu'à celles de Cybèle, était composée de deux pièces d'airain creuses que l'on frappait l'une contre l'autre en cadence.