I. Idées de Berthelmy sur la situation. — Opinions de Gadolle, de Ronsin, de Jeanbon Saint-André, de Bentabole, de Guffroy, de Delbrel, de Barère. — Attaquer en masse est le schibboleth du temps et le mot à la mode. — Renforts donnés à l'armée du Nord et demandés par Sauviac, Gay-Vernon, Kilmaine et Houchard. — Ordres du Comité. — Mission de Jeanbon et de Prieur. — Lettre impérieuse du Comité aux représentants. — L'offensive. — II. Le plan esquissé par Berthelmy. — Conférence de Cassel (25 août). — Projet d'Ernouf. — Plan excellent de Gay-Vernon. — Il faut marcher sur Menin et Furnes. — Attaque du 28 août. Engagements de Wervicq, de Lannoy et de Roncq. — Prise de Tourcoing. — Excès des soldats. — Suite du grand dessein. — Lettres de Bouchotte et de Carnot à Houchard. — Le salut de Dunkerque avant tout. — III. Seconde conférence à Douai (30 août). — Changement de plan. — On ira droit aux Anglais par Cassel et Hondschoote. — Observations de Bouchotte et de Carnot. — Organisation de l'armée. — Mesures diverses. — Destitution de Petitjean. — Ardeur de Berthelmy. — Tristes pressentiments de Houchard.I. Les Français avaient peine à s'imaginer que les
coalisés eussent pris réellement la résolution de se séparer. Ils craignaient
un piège et ne voyaient dans le mouvement de York qu'un stratagème. Houchard
n'en revenait pas : Je me défie de ces ruses,
écrivait-il au Comité de salut public. Châles, un des commissaires de la
Convention, trouvait la marche des alliés vraiment bizarre
et, ne concevait pas qu'ils pussent renoncer à l'attaque de Lille ou de Douai
; ils veulent, pensait-il, nous distraire et diviser
nos forces[1].
Mais, au bout de quelques jours, les doutes se dissipèrent. La faute des ennemis
était flagrante, et il fallait en tirer parti. Anglais et Autrichiens réunis
présentaient un front invincible ; puisque les uns allaient à droite et les
autres à gauche, on pouvait les assaillir successivement. Ce fut le chef d'état-major de Houchard, l'actif et avisé Berthelmy, qui conçut et proposa ce dessein. Le 23 août, il mandait aux représentants qu'on devait profiter de la mésintelligence au moins apparente des alliés et de leur partage en deux armées distinctes, rester sur la défensive en face des Autrichiens, mais chauffer et foudroyer les Anglais, fondre d'abord sur le duc d'York qu'on aurait à meilleur marché que Cobourg, et, par un premier succès, assurer le second[2]. Le plan était simple et grand. Il marque une révolution dans l'histoire de la stratégie. L'art de la guerre ne consiste plus désormais à surveiller toutes les routes, à occuper tous les passages, à n'avancer qu'avec circonspection sans laisser une place derrière soi, à cheminer lentement en se gardant de tous côtés sans se découvrir, à tourner une ligne par d'ingénieuses et subtiles manœuvres. Former une masse, la mouvoir rapidement, la jeter sur les ennemis et les écraser par la supériorité du nombre : tel est le nouveau système. Il n'appartient pas à un seul homme. Tous, commissaires, représentants, généraux, le recommandent à l'envi. Il faut, écrit Gadolle, — ou un De profundis menace la République —, il faut un Dies iræ national contre la coalition du Nord, c'est-à-dire le mouvement d'une masse colossale[3]. Ronsin prévoit une infructueuse campagne si l'armée du Nord ne reçoit pas un renfort de 20.000 fantassins et de 10.000 cavaliers ; sans ces 30.000 hommes, pas d'offensive, pas d'entreprise hardie qui stimule l'ardeur du soldat et relève son courage[4]. Jeanbon Saint-André et Prieur de la Marne déclarent que les revers ne doivent être imputés qu'aux chefs, aux Lafayette, aux Dumouriez, aux Custine ; qu'un bon général, entouré de patriotes intelligents, rendra le succès aux armes françaises s'il ramasse ses forcés au lieu de les disperser : que ce général ne donne pas à chaque bourgade, à chaque hameau, une garnison ou un cantonnement ; qu'il se porte sur les points essentiels ; qu'il sache, par une marche rapide, atteindre, accabler les ennemis, et le soldat, plein de zèle et de confiance, heureux de ne plus languir dans l'oisiveté, fera des prodiges et d'un élan chassera l'envahisseur ![5] Bentabole combat avec véhémence la méthode de guerre que les généraux ont jusqu'alors pratiquée. N'y a-t-il pas 150.000 hommes répartis dans les camps et garnisons du Nord ? Et, malgré ce chiffre formidable, les villes sont prises et les troupes demeurent inactives ! Ne sait-on pas que le Français aime l'attaque ? Ne peut-on arrêter l'adversaire en réunissant une armée considérable ? Ne doit-on pas, lorsqu'on dispose d'une telle quantité de soldats, sortir de l'état d'humiliation où l'on est présentement[6] ? Guffroy demande avec fougue qu'on marche révolutionnairement au pas de charge, à l'arme blanche, qu'on renonce aux pétarades de postes, qu'on attaque toujours en masse comme les Francs, quand ils conquirent le pays que nous habitons. Lui aussi, prétend que les généraux se contentent d'une guerre stérile de tactique, les accuse de s'engraisser par de sanglantes parades, les compare à ces empiriques qui savent nourrir les maladies pour mieux faire bouillir leur pot-au-feu[7]. Delbrel assure que la défensive érigée en système a causé tous les échecs, qu'elle oblige l'armée à se morceler et par suite à s'affaiblir, qu'elle flétrit l'âme des soldats, que les troupes, accoutumées à la présence de l'ennemi, s'endorment à sa barbe dans une sécurité profonde et qu'il les aborde à son gré, à son heure, en prenant ses avantages et sur les points qu'il choisit. L'offensive, tel est le vœu de Delbrel : l'offensive va mieux au génie national, et il faut la saisir aussitôt en rassemblant une armée immense contre laquelle les alliés ne sauront tenir[8]. Barère, le porte-voix du Comité et de la Convention,
exprime les mêmes idées en phrases souples, habiles, brillantées[9]. Il rappelle la furia francese et s'étonne que la France ne
soit plus cette belliqueuse nation qui marchait à travers l'Europe comme un
torrent irrésistible et dont la valeur passait en proverbe dans l'Italie
trois fois conquise. Jusques à quand nos généraux méconnaîtront-ils
notre tempérament qui se détruit par l'attente et qui remporte des victoires
dès qu'il se met en mouvement ? Et Barère ajoute que l'irruption,
l'attaque soudaine conviennent seules aux Français ; que la guerre actuelle
est, non pas un tournoi de rois, non pas un jeu de calcul et de combinaison
où triomphent les plus adroits, mais la guerre de la liberté, c'est-à-dire une
inondation qui renverse en un instant les digues du
despotisme et couvre des flots bouillonnants du courage et du patriotisme les
hordes ennemies ; que, pareille à l'impétuosité gauloise qui abattit
l'empire romain, l'impétuosité française doit abattre le colosse de la
coalition[10]. Attaquer et attaquer en masse, était donc le schibboleth des camps et comme le mot à la mode. Dès les premiers jours de son arrivée en Flandre, Berthelmy disait qu'il fallait, non plus aller à tâtons et guerroyer en détail, mais avant tout former des masses agissantes avec les troupes disponibles et toutes les garnisons dont les places seraient couvertes par la marche de l'armée ; qu'on pouvait créer de la sorte une force imposante et de beaucoup supérieure à celle des ennemis ; qu'on arracherait la victoire si l'on renonçait au compassement et faisait un de ces mouvements brusques, une de ces attaques imprévues et promptes, vigoureuses et précipitées qui réussissent toujours. Les représentants suivirent ce conseil. Levasseur et Bentabole décidèrent de ne laisser dans les villes que des dépôts et d'en tirer sans scrupule et sans crainte tous les bataillons capables d'agir. Ils chargèrent Dufresse de se rendre dans les chefs-lieux des départements du Nord, du Pas-de-Calais, de la Somme et de l'Oise pour mettre en réquisition les gardes nationales et les jeter dans les forteresses. Ils requirent Favart d'envoyer à la frontière la garnison de Lille et de la remplacer par la garde nationale. Bouchotte rappelait qu'aux termes d'un arrêté du Conseil exécutif, 4.000 hommes au moins devaient rester à Lille. Le vieux Favart se plaignait, objectait qu'il n'avait plus que 1.600 volontaires et qu'une cité de 80.000 âmes ne se défend pas avec si peu de soldats, que l'armée s'éloignait à huit ou dix lieues, qu'un adversaire exactement renseigné pouvait passer derrière elle et tomber sur les places, que Lille aurait peut-être le destin de Schweidnitz dans la guerre de Sept Ans, que la prudence exigeait de ne pas jouer ainsi le sort de ce boulevard de la Flandre. Gay-Vernon le traita de radoteur. Les représentants dégarnirent Lille et répondirent au timide Favart : Nous vous couvrons[11]. Mais il ne suffisait pas de dégarnir Lille. Il fallait grossir l'armée du Nord aux dépens des autres armées, lui envoyer les bataillons instruits et bien encadrés qui demeuraient inactifs sur le Rhin et la Sarre. Carnot grondait, murmurait. Il lui semblait qu'une armée qui comptait plus de100.000 hommes n'avait pas un besoin si pressant de renforts. Pourquoi ne pas modifier simplement les mauvaises dispositions qui l'avaient disséminée et diminuée ? Néanmoins, il fit tout ce que demandait Houchard. Le général désirait des chevaux d'artillerie ; il les aurait en grand nombre. Il désirait 5 à 6.000 cavaliers ; il les aurait aussi tôt que possible. Il désirait des troupes de l'armée de la Moselle et de celle du Rhin ; on ne négligerait rien pour hâter leur arrivée[12]. Le second Comité adoptait donc le plan que Custine développait au mois de juin, que Gay-Vernon appuyait alors avec chaleur, que Sauviac, Tardy, Gobert et les représentants Hentz et De La Porte avaient énergiquement soutenu : appeler sur les rives de l'Escaut et de la Scarpe les meilleures brigades des armées du Rhin et de la Moselle[13]. La plupart des conventionnels et tous les hommes de guerre se ralliaient à ce plan et le regardaient comme le seul moyen qui pût rétablir les affaires. Valenciennes est rendu, criait Couthon, l'indignation dans mon cœur est à son comble, il faut que la France se lève, nous allons faire marcher sur Valenciennes les 100.000 hommes qui allaient à Mayence ![14] Il est instant, écrivaient Billaud-Varenne et Niou, de porter l'armée du Nord, celle qui dans ce moment doit fixer toute votre attention, à 20.000 hommes de plus qu'on pourrait tirer des armées du Rhin et de la Moselle[15]. Dans un nouveau mémoire, Sauviac avançait que les troupes de Lorraine et d'Alsace, aguerries, disciplinées, exercées par un chef aussi habile que Custine, devaient passer dans les points les plus vivement attaqués, tandis que les contingents occuperaient les points qui n'étaient que faiblement menacés[16]. Gay-Vernon proposait avec plus d'insistance que jamais de faire refluer sur l'armée du Nord toute l'armée des Ardennes et la cavalerie entière de l'armée de la Moselle[17]. Berthelmy mandait à Bouchotte qu'on n'avait besoin que de renforts pour chasser l'adversaire et qu'il suffisait d'augmenter la cavalerie et d'amener30.000 combattants de la région de l'Est[18]. Kilmaine déclarait qu'il fallait laisser à l'armée de la Moselle 25.000 hommes et dépêcher le reste soit dans les Flandres, soit dans les camps de l'armée des Ardennes qui se joindrait à celle du Nord : L'égoïsme nous perd, disait-il, et il accusait, non sans raison, les généraux, les départements, les villes, de penser à leur propre intérêt et à leur défense particulière, et non pas à l'ensemble. Le Nord n'était-il pas le point principal, l'endroit sur lequel les alliés tournaient leur plus violent effort ? N'était-ce pas là, par conséquent, que devraient se réunir les forces les plus sérieuses de la République ? Quoi ! l'armée du Nord combattait dans un pays de plaines immenses, et elle avait moins de cavalerie que les autres armées ! L'infanterie, ajoutait Kilmaine, n'est que secondaire en cette région ; souvent même elle nuit ; au lieu d'en obtenir du secours, il faut la secourir, la dégager et passer son temps à la sauver du péril[19]. Houchard pensait comme Kilmaine. Lui aussi affirmait qu'il
y avait trop d'armées, que toutes étaient paralysées,
qu'aucune ne pouvait agir offensivement et porter de grands coups, qu'on ferait bien de
calculer différemment, de former des corps considérables, de dégarnir l'armée
de la Moselle dont les positions défensives ne pourraient être enlevées qu'après
de rudes combats[20]. Le Comité céda. Déjà, par un arrêté du 23 juillet, il avait ordonné de prendre aux armées des Ardennes et de la Moselle 6.000 hommes d'infanterie et 3.000 hommes de cavalerie. Déjà, Prieur de la Marne et Jeanbon Saint-André, chargés par un arrêté du 1er août de se concerter avec les généraux, obtenaient, non sans peine, de Beauharnais et de Schauenburg 11.375 hommes qui seraient dirigés sur le Nord tout organisés et prêts à se battre. Le 8 août, le Comité prescrivait à Prieur et à Jeanbon de tirer des armées de la Moselle et du Rhin 30.000 hommes qui seraient transportés en poste dans un camp intermédiaire, à Péronne et à Saint-Quentin, et il consacrait une somme de cinq millions aux frais de l'opération. Les circonstances, disait le Comité, étaient devenues de plus en plus aggravantes ; il fallait refouler Cobourg qui faisait des progrès rapides et qui menaçait Paris, par suite la République dont l'existence dépendait de la sûreté de Paris ; il fallait sauver tout le corps politique ; il fallait envoyer à l'armée du Nord un secours effectif et si nombreux que tous les esprits fussent rassurés et comprissent que le mal, le véritable mal qui était au Nord, allait être sur-le-champ réparé ; il fallait lui envoyer les troupes les mieux armées et les plus aguerries, la rendre égale à l'armée que Cobourg, Clerfayt, les Anglais, les Hanovriens, les Hollandais et les Hessois rassemblaient sur cette malheureuse ligne de la Flandre ; il fallait fermer l'oreille à toute autre considération et sans le moindre délai, sans crainte aucune, sans souci des réclamations, des objections les plus fortes et des plaintes les plus vives de telle ou telle partie du pays qui se croirait abandonnée, découvrir les frontières de l'Alsace et de la Lorraine. Ces frontières étaient encore intactes ; elles pouvaient résister longtemps grâce à une simple défensive ; elles se trouvaient à cent lieues de Paris. Mais Valenciennes et Condé, dont l'ennemi s'emparait, étaient à quarante lieues de la capitale, et Cobourg préparait évidemment une vigoureuse attaque. Ne devait-on pas le combattre avantageusement et avec des forces respectables, et toute autre mesure, toute mesure contraire à la prompte formation d'une puissante armée du Nord ne perdait-elle pas la République ? Le sort de la France, concluait le Comité, se fixait entre Cambrai et Péronne ; si l'on s'opposait à la réunion des meilleurs bataillons là où était le seul et réel danger, il ne restait plus qu'à se voiler la tête[21]. Prieur et Jeanbon exécutèrent sans hésitation et sans retard l'arrêté du Comité. L'infanterie se rendit à Soissons et la cavalerie à Péronne. Houchard reçut permission de porter l'une et l'autre où il voudrait, et aucune colonne ne marcherait sans ses ordres. La cavalerie fit diligence. Quelques détachements arrivèrent même assez tôt pour être enveloppés dans la retraite du camp de César. A l'instant où Kilmaine pliait ses tentes, le 5e régiment de hussards entrait au Catelet ; assailli sur ses derrières par les escadrons anglais et entouré, il s'ouvrit un passage le sabre à la main. Un parti du 16e régiment de cavalerie, moins heureux, fut mis en déroute à Villers-Plouich[22]. Sûr de ses renforts, Houchard pouvait agir. L'armée du Nord n'était plus l'armée du camp de César, cette pauvre armée, comme on la nommait naguère, dépourvue d'armes et remplie de recrues inexpérimentées. Après n'avoir osé jusqu'alors pousser en avant, elle allait désormais, selon le mot de Delbrel, prendre l'offensive en grand ; elle allait, suivant l'expression de Collombel, sortir de cette léthargie qui la tuait et qui tuait la République[23]. II. Berthelmy avait, dans une lettre du 22 août à Bouchotte, esquissé le plan d'opérations. Il y aurait trois corps. Le premier ou le corps de Cassel compterait 25.000 hommes et attaquerait les flanqueurs de l'ennemi, c'est-à-dire l'armée de Freytag et de Wallmoden qui bloquait Bergues et couvrait l'investissement de Dunkerque. Le deuxième ou le corps de. Maubeuge, formé de 20.000 hommes ainsi que des troupes du camp de Gavrelle, surveillerait Cobourg et le tiendrait en échec. Le troisième corps ou l'armée principale, forte de 50.000 hommes, se rassemblerait au camp de la. Madeleine, devant Lille, et ferait coup double : il se jetterait sur le prince d'Orange, puis sur le duc d'York[24]. Le 23 août, pendant que Berthelmy restait à Gavrelle, Houchard arrivait à Cassel avec Gay-Vernon et tenait conseil de guerre. Ernouf proposa de délivrer Dunkerque en tombant sur Freytag qui serait aisément débusqué d'Hondschoote et des rives de l'Yser ; Freytag mis en fuite, l'armée victorieuse irait passer le canal de Furnes à Bulscamp ; elle prendrait Furnes ; elle intercepterait la chaussée qui relie Furnes à Dunkerque par les Dunes et l'Estran ; elle cernerait le duc d'York qui n'avait pas d'autre chemin pour reculer. Houchard et Gay-Vernon jugèrent le projet excellent. Mais Gay-Vernon déclara qu'il avait en tête un plan meilleur encore. On devait, opinait-il en étalant la carte, réunir de grandes forces, dégarnir hardiment le camp de Gavrelle, tirer six bataillons du camp de Cassel, et, avec cette masse considérable, emporter Menin et mettre le prince d'Orange en déroute, marcher sur Furnes et de là sur Nieuport et Ostende, couper ainsi plus sûrement la retraite au duc d'York et à Freytag : on battait à la fois les Hollandais et les Anglais ; avant la fin de septembre, on serait maître des Pays-Bas. Le représentant Duquesnoy reconnut que le dessein était beau ; mais il se défiait de Gay-Vernon ; il prétendit que les mesures, pour n'être pas mauvaises étaient au moins très hasardées ; il remontra que le coup pouvait manquer ; il objecta que, si l'expédition avortait, les départements du Nord et du Pas-de-Calais courraient de graves dangers et seraient certainement la proie de l'envahisseur. Néanmoins, malgré l'opposition de Duquesnoy, le plan de Gay-Vernon fut adopté. Ernouf, converti, félicitait Gay-Vernon et jurait qu'il était impossible de faire rien de mieux combiné, rien de plus décisif. Houchard mandait au Comité qu'il allait, en huit jours, ramasser 50.000 hommes pour une grande attaque, qu'il se jetterait sur Menin avec cette armée exterminatrice, et qu'après avoir écrasé les Hollandais, il traverserait la Lys et déboucherait par Ypres et Furnes sur le flanc gauche des Anglais[25]. La grande attaque commença le 28 août. Il fallait, disait Berthelmy, entamer d'abord les Hollandais qui gardaient les derrières de l'armée anglaise. La lutte s'engagea sur quatre points différents, à Wervicq, à Lannoy, à Roncq et à Tourcoing. On ne devait faire à Wervicq qu'une démonstration. Mais les troupes de Dumesny, parties de Pont-à-Marcq, avaient Beaulieu en face d'elles, et lorsqu'elles s'avancèrent contre une flèche construite à la pointe du bois de Cysoing, elles furent arrêtées par deux régiments d'infanterie wallonne, le régiment de Wurtemberg et le régiment de Clerfayt, par le bataillon des chasseurs de Le Loup, par les cuirassiers de Kavanagh que commandait le comte de Hohenzollern. Elles s'enfuirent en abandonnant quatre pièces de canon. Macdonald échoua pareillement contre Lannoy. La brigade d'Anspach, conduite par le général-major de Reitzenstein, défendait ce poste qui couvrait la droite des Hollandais et fermait la chaussée de Lille à Tournai. L'affaire, de l'aveu des représentants, n'eut pas d'effet décisif. Mais les Hollandais, intimidés par les forces que l'adversaire déployait de tous côtés, et craignant d'être débordés, se retirèrent dans la soirée. Dumas s'empara de Roncq. Mais les Hollandais reçurent des secours de leur camp de Menin. Ils reprirent le village. Pourtant, comme à Lannoy, et pour le même motif, ils n'osèrent garder la position, et, à la tombée de la nuit, ils l'évacuèrent. L'effort principal des nationaux se portait sur Tourcoing. Lejeune général de brigade Pierre Dupont, promu de l'avant-veille, accompagné de Houchard, de Béru, des représentants Levasseur et Bentabole, dirigeait l'attaque. Tourcoing, aujourd'hui grande ville, n'était alors qu'un gros village entouré de bois épais. On n'y arrivait que par une chaussée garnie d'un retranchement. Durant quatre heures, les deux partis furent aux prises. On ne faisait que tirailler et canonner au hasard, et Houchard avoue que les siens étaient cruellement maltraités et qu'à travers les haies et les fourrés ils ne pouvaient accoster l'ennemi. Enfin, à onze heures, les républicains forcèrent le retranchement à la baïonnette et pénétrèrent dans le village. Ils rencontrèrent encore dans les rues une très vive résistance. Les Hollandais disputaient le sol pied à pied pour sauver leur artillerie et leurs munitions. Mais, au bout d'une demi-heure, les carmagnoles battirent la charge et furent maîtres de Tourcoing. Comme à Furnes au 1er juin, comme à Linselles au 18 août, ils se débandèrent aussitôt pour courir au pillage ou s'enivrer. Ils envahirent les caves ; ils brisèrent les armoires et volèrent les assignats ; ils enlevèrent les lits, les meubles et des effets de toute espèce. Vainement Houchard, Béru, Pierre Dupont, les officiers, les représentants, les dragons d'escorte tentèrent d'empêcher ce saccage. Les volontaires les couchèrent en joue et crièrent que les habitants de Tourcoing étaient des aristocrates qu'il fallait dépouiller. Le désordre fut épouvantable, et il y eut, rapporte Houchard, de tels excès d'ivrognerie qu'il était impossible de rien entreprendre et que si les Hollandais fussent revenus sur leurs pas, ils auraient eu bon marché de leurs vainqueurs. Au lieu de rassembler sa colonne et de la mener en droiture au camp. de Menin, comme c'était d'abord son intention, le général dut ordonner la retraite qui se fit en hâte et avec une confusion extrême. Deux pelotons de cavalerie se montrèrent au loin ; la panique saisit les troupes ; elles s'enfuirent sur la route de Mouveaux. Un bataillon du Finistère avait imprudemment engagé ses pièces de 4 dans un chemin difficile ; il les y laissa. La journée était favorable aux républicains. Ils avaient pris un obusier, des munitions, des approvisionnements de diverse sorte, et une centaine de Hollandais dont cinq officiers ; ils avaient débarrassé la frontière, mis les moissons en sûreté, gagné plus de trois lieues de terrain ; ils occupaient des postes importants où le prince d'Orange avait placé de forts détachements ; ils pouvaient désormais inquiéter sérieusement l'ennemi et, comme on disait, le tracasser. Les représentants citaient de nombreux actes de courage. Un soldat, Antoine Sicardy, de Ville-sur-Arce, qu'on venait d'amputer de la jambe, s'écriait, en apprenant que les Français étaient entrés à Lannoy : Je ne regrette plus ma jambe ! et un autre, un grenadier du 5e régiment d'infanterie, Louis Boutry, à qui le chirurgien coupait le bras : C'est égal, il me reste un bras pour défendre la République ! Mais les Français avaient près de cent morts et de quatre cents blessés. De nouveau, des conducteurs d'artillerie avaient coupé les traits de leurs chevaux et pris la fuite sans se soucier de leurs pièces. Les commissaires remarquaient avec douleur que des hommes bien répréhensibles retardaient la marche des troupes, traversaient les projets de l'état-major et arrachaient la victoire aux généraux. Béru réclamait des lois sévères qui réprimeraient les malheureux excès, et déclarait qu'on ne pourrait faire de vastes opérations tant que les volontaires auraient cette ardeur effrénée de pillage. Houchard écrivait que la conduite des soldats dans ce village français enlevé si bravement aux ennemis, était inconcevable ; que tout succès serait impossible si l'on n'employait des moyens sûrs et prompts pour châtier le brigandage et rétablir l'obéissance ; qu'il fallait convoquer un Conseil de guerre qui jugerait et ferait exécuter sur l'heure les indisciplinés et les pillards. Ce qui l'irritait surtout, c'était la perte des canons. Comment les bataillons de volontaires n'attachaient-ils aucun prix à leurs pièces d'artillerie ? Pourquoi les abandonnaient-ils sans défense ? Et il proposait de recourir aux mesures les plus violentes, de destituer le chef et les capitaines de tout bataillon qui ne disputerait pas ses canons avec acharnement, d'imprimer au bataillon entier une marque de déshonneur[26]. Cette affaire de Tourcoing refroidit un peu Houchard et ses deux coopérateurs et conseillers, Berthelmy et Gay-Vernon. Pouvait-on, avec de telles troupes, être entreprenant et téméraire ? Pouvait-on, à la tête d'une pareille armée, tenter quelque chose de hardi ? Sans doute, mandait Berthelmy à Bouchotte, elle avait été systématiquement désorganisée et accablée par des trahisons sans nombre. Mais elle se montrait pillarde au dernier degré. La plupart des bataillons, livrés à l'insubordination, n'écoutaient personne. L'état-major n'avait pas de bons officiers. Les trois quarts des généraux étaient des ganaches et semblaient perclus, presque morts. Bref, la machine ne se remonterait qu'avec le temps[27]. Toutefois, ni Houchard, ni ses deux confidents ne renonçaient au grand dessein qu'ils avaient conçu. Ils sentaient, comme disait Berthelmy, que le plus petit délai serait funeste et qu'ils devaient résoudre rapidement le problème et sauver Dunkerque, ce Dunkerque que les Anglais serraient de près et se disposaient à bombarder. De tous côtés affluaient d'alarmantes nouvelles sur le péril de Dunkerque. Deux administrateurs du district de Bergues, enfermés dans la place, prévenaient leurs collègues que la situation paraissait désespérée. Des députés du Conseil général de la commune annonçaient à Houchard et aux représentants que Dunkerque était dans l'état de crise et qu'un brusque assaut, une surprise pouvait livrer la forteresse aux Anglais. Hoche informait le Comité que la ville était de la plus haute importance, qu'elle avait une artillerie considérable, que sa perte entraînerait celle de Bergues, puis celle de Gravelines. En pleine Convention, Barère s'écriait que Dunkerque était l'objet que convoitaient le plus les ennemis[28]. Bouchotte priait Houchard d'agir au plus tôt pour dégager la place : Je compte, lui écrivait-il, que vous vous en occupez essentiellement, et il le pressait d'attaquer les coalisés, de les battre, de leur interdire les quartiers d'hiver sur le sol de la Flandre ; il l'assurait qu'à la première victoire des sans-culottes, la ligue des rois se disloquerait et que le peuple anglais demanderait la paix. Pitt, ajoutait le ministre, espérait, en prenant Dunkerque, tenir une des clefs du territoire français et influer à son gré sur les affaires intérieures de la République ; si Houchard délivrait Dunkerque, il réduirait à zéro ces calculs politiques ; Dunkerque débloqué, c'était la campagne perdue pour les alliés[29]. Carnot faisait au général les mêmes exhortations. Lui aussi envisageait le salut de la place, non pas précisément sous le point de vue militaire, mais principalement sous le point de vue politique[30]. Très mal renseigné sur les sentiments et les dispositions de l'étranger, croyant qu'un parti s'agitait dans le Royaume-Uni en faveur de la France républicaine et que la Convention écossaise qui ne devait s'assembler qu'au mois de novembre, allait prochainement siéger à Édimbourg, non seulement pour demander le suffrage universel et un parlement annuel, mais pour protester avec éclat contre la guerre, Carnot s'imaginait volontiers, de même que Bouchotte, que le déblocus de Dunkerque donnerait le signal d'un soulèvement en Angleterre. Il fallait donc, disait-il à Houchard, sauver avant tout et à quelque prix que ce fût Bergues et Dunkerque, parce qu'il fallait sauver l'honneur de la nation qui était là. La conquête de ces deux places était pour les ennemis de la plus haute conséquence, et Pitt n'avait pas d'autre moyen pour raffermir son crédit chancelant et consoler ses compatriotes des-frais énormes de la lutte et de la ruine totale de leur commerce. Délivrer ces deux villes, c'était produire inévitablement en Angleterre la révolution la plus complète, c'était renverser le ministre perfide qui égarait le peuple britannique, c'était briser la coalition des tyrans. et consolider à jamais la République. Perdre Dunkerque et Bergues, serait répandre infailliblement en France le découragement le plus affreux. Aussi Carnot engageait-il Houchard à jeter des forces immenses dans la Flandre maritime et à chasser les envahisseurs coûte que coûte de ce point si important de notre frontière ; le général commandait la principale armée et justifierait le choix de la nation française, soutiendrait la réputation que lui avaient méritée ses talents et ses vertus républicaines[31]. III. Le 30 août, une conférence des généraux et des officiers supérieurs de l'armée du Nord avait lieu à Douai. Houchard, Berthelmy, Gay-Vernon, les deux frères Dupont, Dupont-Chaumont et Pierre Dupont, les représentants Delbrel et Levasseur, les, adjudants-généraux Allain et Merlin assistaient à ce Conseil de guerre. On arrêta de nouveau qu'une armée de 50.000 hommes pousserait sur Menin et Furnes pour couper la retraite aux Anglais qui seraient assaillis en même temps par la division de Cassel. Mais, au sortir de la conférence, Dupont-Chaumont eut des scrupules, et comme s'il voyait pour la première fois les dangers de l'aventure, il dit aux commissaires de la Convention que l'armée, en se portant sur Furnes, prenait le chemin le plus long ; que sa marche pourrait être ralentie par quelques combats ; qu'elle arriverait peut-être trop tard au secours de Dunkerque ; qu'elle ferait mieux de se diriger par Arras, Béthune et Cassel ; que le général en chef avait déjà préparé sur ce point de Cassel de grands moyens d'attaque lorsqu'il méditait une diversion sur les places maritimes ; que toutes les troupes, s'acheminant vers Cassel, seraient promptement réunies ; qu'elles n'auraient plus qu'à s'avancer sans faire de détour et à refouler devant elles le corps d'observation du maréchal Frey tag. C'était le plan qu'Ernouf exposait le 25 août. Pierre Dupont se rendit aux raisons de son frère et les développa dans une lettre qu'il écrivit incontinent à Houchard. Les représentants Delbrel et Levasseur coururent au camp. Dans une nouvelle conférence, Houchard, Berthelmy, Gay-Vernon renoncèrent au dessein de tourner le duc d'York par Menin et Furnes. Ils apprenaient que Dunkerque était vivement pressé, que l'assiégeant recevait des pièces d'artillerie qu'il mettait en batteries. Comme Dupont-Chaumont, ils jugèrent que le mouvement projeté entraînerait des lenteurs, perdrait du temps, et, pour débloquer Dunkerque aussitôt que possible, ils résolurent d'aller aux Anglais par la ligne la plus courte et de les aborder de front. L'armée irait de droite à gauche, non plus par Lille, mais par Cassel qui serait tout ensemble son lieu de rendez-vous et sa base d'opérations ; elle attaquerait Freytag dans ses cantonnements ; elle tomberait ensuite sur le duc d'York. Il faut sauver Dunkerque, marquait Berthelmy à Jourdan ; c'est le cri de toute la France ; c'est là que tous les yeux sont fixés ![32] Levasseur s'était hâté de gagner Cassel pour prévenir Jourdan et Ernouf. Ce dernier ne cacha pas son étonnement. Comment Gay-Vernon avait-il abandonné le projet qu'il défendait naguère avec tant de chaleur ? Et devant Levasseur, Ernouf répétait qu'en poussant sur Menin et Furnes, on ôterait aux Anglais, pris entre deux feux, tout espoir d'échapper. Mais la résolution de Houchard était cette fois irrévocable, et, dès le 30 août, Berthelmy avait informé le commissaire-ordonnateur en chef Petitjean que les dispositions étaient changées et que 40.000 hommes devaient se rassembler à Cassel. Le premier plan, le plan de Gay-Vernon, était le meilleur. Houchard, marchant sur Menin, battait aisément les Hollandais ; puis, passant la Lys, descendait sans obstacle sur Ypres, sur Furnes, et, s'il faisait diligence, acculait Freytag et le duc d'York à la mer[33]. En adoptant le second plan, il laissait au prince anglais une route de retraite. York, certain qu'une armée ne manœuvrait pas sur ses derrières, aurait toujours le temps de lever le siège de Dunkerque, de se replier à Furnes et de se mettre hors d'atteinte. Peut-être Houchard se disait-il en lui-même qu'il avait tort. Ce ne fut que le 3 septembre, comme s'il craignait de recevoir un contre-ordre de Paris, qu'il annonça le changement de plan à Bouchotte ; il assurait que les lettres du ministre et du Comité l'avaient déterminé ; au lieu de tourner ses efforts vers Menin et la rive droite de la Lys et de prendre les Anglais à revers, il réunirait ses troupes à Cassel et agirait directement pour délivrer Dunkerque. Ni Bouchotte, ni le Comité ne firent à Houchard
d'objections ou de reproches. Bouchotte écrivait, comme à son ordinaire,
qu'il ne pouvait prescrire au général ses opérations et la manière de les
exécuter ; il n'avait pas de données et ne
lui envoyait que des réflexions en lui laissant
toute la latitude possible ; il avait approuvé l'attaque de Menin et
jugé la défaite des Anglais fort probable ; si vous
prenez un autre chemin, c'est qu'il est nécessaire, et le ministre
protestait que Houchard avait la confiance du Comité, du Conseil et de tous
les patriotes. Il le félicitait de ses débuts : N'oubliez
jamais que les sans-culottes vous regardent avec intérêt ; ils iront toujours
bien quand ils auront des généraux de même étoffe qu'eux ; courage et
persévérance, et nous triompherons ![34] Carnot vit avec peine que Houchard eût soudainement abandonné le projet d'envelopper l'armée anglaise : il croyait que le général, en frappant ce grand coup, aurait peut-être. mis fin à la guerre ; mais, ajoutait-il, si vous avez pensé que le succès fût douteux, nous ne pouvons qu'approuver la résolution que vous avez prise ; c'est à vous de juger ; pleins de confiance dans vos talents militaires, votre civisme et votre expérience, nous ne voulons gêner aucun de vos mouvements et vous laissons la libre et entière disposition de vos troupes[35]. Ces troupes s'organisaient. Le corps d'armée qui défendait
le camp retranché de Maubeuge, s'augmentait de 12.000 hommes, et cette
division qui comprit désormais 30.000 combattants, était assez forte pour
imposer à Cobourg. 7.000 hommes restaient au camp de Gavrelle sous les ordres
de Davaine qui commandait d'Arras à Pont-à-Marcq et qui devait couvrir
surtout les places d'Arras et de Douai presque dépourvues de garnison. 50.000
hommes étaient destinés au débloquement de Dunkerque. On répandit le bruit
qu'ils se rassemblaient sous les murs de Lille pendant qu'ils filaient sur
Cassel. Ils se réunirent en quelques jours malgré les cris d'alarme que
jetaient les communes. Point de villes, dit
Berthelmy, point de généraux et de commandants
particuliers qui ne se crussent trop faibles ou ne voulussent avoir une armée
; souvent, pour l'exécution des ordres, il fallait les donner deux fois.
Houchard forma des divisions. Chaque division, conduite par un général de
division et deux généraux de brigade, compta deux brigades d'infanterie. Des
règlements fixèrent dans les plus petits détails le service de la cavalerie
ainsi que les marches et les campements. Il y eut des pelotons de tirailleurs
d'élite : 64 hommes étaient choisis dans chaque bataillon parmi les soldats
les plus valeureux et les plus adroits, et ils avaient pour chefs deux
officiers expérimentés du même bataillon. Houchard déclara qu'à la moindre négligence,
il ne s'en prendrait qu'aux divisionnaires : il était temps, disait-il, de
sortir de l'insouciance. Il supprima les escortes de parade et les trop
nombreuses ordonnances que s'attribuaient les officiers. Il menaça ceux qui
traînaient encore des femmes à leur suite, de les dénoncer au ministre et de
proposer leur destitution ; quant aux femmes, la gendarmerie avait mandat de
les appréhender, de les barbouiller de noir et de les promener à travers le
camp[36]. Les représentants aidaient, assistaient Houchard et, selon le mot de Châles, essayaient, par leur zèle et leur bonne volonté, de remplir l'attente de la nation. Ils obligeaient les administrations à marcher. Ils mercurialisaient les officiers et leur rappelaient que la Convention les surveillait, qu'elle saurait punir les traîtres et les lâches. Le 3 septembre, Bentabole, Châles, Collombel et Levasseur arrêtaient que lorsqu'un bataillon abandonnerait ses canons à l'ennemi sans les disputer à outrance, le chef et tous les capitaines en premier ainsi que les officiers d'artillerie seraient destitués de leurs fonctions ; que le bataillon serait renvoyé sur les derrières de l'armée et privé de l'honneur de combattre ; que son nom, ainsi que les noms des officiers, seraient publiés pour être voués à l'infamie. Le surlendemain, afin de mieux coopérer à la délivrance de Dunkerque, Hentz et Levasseur décidaient qu'un tribunal militaire, établi dans l'armée de débloquement, jugerait les coupables dans les vingt-quatre heures après leur arrestation, sur la simple audition des témoins et que la sentence serait exécutée sur-le-champ en présence des troupes[37]. De Paris, Bouchotte stimulait les généraux, Houchard,
Berthelmy, Béru, leur promettait des armes, des chevaux, des pièces de
campagne, leur assurait qu'il avait donné les ordres les plus précis pour la
subsistance des camps et l'approvisionnement des places, leur disait que leur
armée était bonne et bien plus disponible qu'on
ne l'imaginait, qu'il fallait fréquenter les soldats, leur parler souvent,
leur inspirer l'audace, remonter leur espoir et leur
courage en leur faisant envisager les nouveaux efforts de la
République et les puissants moyens de tout genre qu'elle déployait : Vous êtes soutenu ; le peuple est derrière vous. Allons
donc, peut-être un peu moins bien d'abord, mais surtout allons et propageons
par des attaques réitérées la terreur qui s'empare des ennemis instruits de
nos mesures vigoureuses ! Et, s'adressant à Houchard qu'il savait
perplexe et tout près de succomber sous le fardeau : Le
Comité et le Conseil, lui écrivait-il, n'ont
pas cessé d'avoir confiance en vous ; les patriotes sont tranquilles sur
votre compte et ne montrent aucune inquiétude de vous voir chargé d'un aussi
grand commandement dans des circonstances aussi importantes. Berthelmy vous
secondera bien ; je le regarde comme un bon républicain[38]. Mais dans le même moment, Bouchotte destituait le
commissaire-ordonnateur en chef, Petitjean. Ce Petitjean était un des
vivriers les plus habiles et les plus infatigables qui fussent alors dans les
armées. Les généraux, Beurnonville, Labourdonnaye, Miranda, Dumouriez, se
l'arrachaient. Tous rendaient hommage à son activité. Defrenne louait ses
connaissances très vastes et La Marlière, son exactitude. Gasparin le
proclamait le seul homme qui aille et qui ait la clef
de la situation, Kilmaine jugeait qu'il faisait son possible et
Courtois, qu'il était fort nécessaire. Lui-même assurait, non sans raison,
qu'il avait, après l'abandon du camp de César, mis un tel soin à surveiller
les subsistances et les équipages que l'armée lui devait son salut. Mais le
Conseil général de la commune et le Conseil permanent du district de Cambrai
l'inculpaient de trahison parce qu'il voulait tirer des greniers de la ville
20.000 sacs de grains. Berthelmy, Houchard, Levasseur lui reprochaient de
vider les magasins de Douai. Houchard, n'osant laisser Douai en cet état de
détresse et impatient de suivre les Anglais dans la Flandre maritime,
déclarait à Petitjean qu'il n'acceptait aucune excuse et le requérait de
ravitailler aussitôt Douai, sous peine de mort. Levasseur, violent, emporté,
méprisant les obstacles, sommait Petitjean d'approvisionner Douai en six
jours : sinon, lui disait-il, je vous livre à la garnison que vous affamez et qui fera
de vous ce qu'elle voudra, et si vous n'êtes pas traité comme vous le
méritez, je vous donne ma parole d'honneur que je vous brûle la cervelle.
Il ne se contentait pas de menacer Petitjean ; il le dénonçait au Comité, le
qualifiait de hâbleur qui promettait tout et ne tenait rien. Enfin, Ronsin
rappelait les liaisons intimes de Petitjean avec Dumouriez et proposait de
l'arrêter, de lui demander compte des millions qui lui avaient passé par les
mains sous le généralat de Custine. Il incriminait outre Petitjean, le
commissaire-ordonnateur de la division de Lille, Ollivier, qu'il regardait
comme une créature du comte de Provence. Selon Ronsin, le
commissaire-ordonnateur Lambert, plein de lumières et de patriotisme, était
l'homme le plus propre à recueillir la succession de Petitjean ; pour Ollivier,
il serait facilement suppléé par le franc républicain Leboursier[39]. Bouchotte suspectait la moralité de Petitjean et le nommait l'homme de Dumouriez. Sa façon de penser, écrivait Vincent le 5 juillet, est toujours la même sur Petitjean, et il n'y a pas de confiance. Le 19 août, après avoir lu la dénonciation de Ronsin, Bouchotte remplaçait Petitjean par Lambert et Ollivier par Leboursier. A cette nouvelle, Houchard et Levasseur se repentirent d'avoir porté plainte contre Petitjean. Houchard protesta que l'arrestation de Petitjean produisait un mal horrible : l'armée avait des besoins énormes en tout genre et devait tirer des vivres des forteresses du Nord ; depuis quinze jours, les chevaux de la cavalerie et de l'artillerie n'avaient plus d'avoine, et quelques-uns mouraient faute de nourriture suffisante ; sans les représentants, les subsistances auraient manqué. Et, en cet instant critique, on destituait Petitjean ! On le remplaçait par Lambert, par un homme qui ne semblait guère actif, qui ne connaissait pas les ressources de la région, et qui ne pourrait assurer promptement les fournitures indispensables ! Je suis, s'écriait Houchard, cruellement entravé dans tous les détails de l'exécution, et je ne sais comment je ferai. Et il demandait pourquoi le ministre ne laissait pas Petitjean à l'armée sept ou huit jours encore. Il demandait que Petitjean, accompagné d'un gendarme qui répondrait de sa personne, pût terminer du moins les opérations commencées. Les représentants, Levasseur, Bentabole, Delbrel, Châles, déploraient pareillement la destitution de Petitjean. Quoi ! dans un moment des plus intéressants pour le salut de la France, lorsqu'il fallait unanimement seconder Houchard et mettre plus que jamais l'accord dans tous les mouvements, Bouchotte prenait des mesures si précipitées et si alarmantes ! Il arrêtait Petitjean à l'heure où l'armée entière s'ébranlait ! Il lui donnait un successeur incapable ! Ignorait-il qu'un nouveau commissaire-ordonnateur, si patriote qu'il fût, aurait à, faire un long apprentissage, et que ces sortes de stage étaient toujours funestes ? Et, en outre, Bouchotte suspendait Ollivier qu'il remplaçait par le médiocre Leboursier ! Levasseur et Bentabole n'hésitèrent pas à surseoir à l'exécution des ordres ministériels : ils savaient qu'Ollivier possédait des talents, qu'il s'acquittait très bien de son service et qu'il avait une grande connaissance des localités ; ils gardèrent Ollivier, l'engagèrent à continuer ses fonctions avec autant de zèle qu'auparavant, le prièrent même d'assumer provisoirement la besogne de Petitjean. Châles, plus hardi encore, prescrivait à Petitjean de désobéir au ministre ; le besoin de l'armée disait-il, était urgent et l'ensemble des circonstances, difficile ; on se trouvait à la veille d'une action générale ; Petitjean resterait à son poste jusqu'à ce qu'il reçût des représentants la permission de se retirer ; sa place, qui tenait à toutes les administrations militaires, avait une trop haute importance pour être vacante une seule minute. Houchard, mandaient les conventionnels, est affecté de ces contrariétés. Le pauvre général ne dissimulait pas sa douleur. Tout lui paraissait s'unir pour retarder l'expédition ou du moins pour en assombrir les débuts. Il comptait que Bouchotte lui enverrait des canons et des chevaux ; mais son parc d'artillerie était misérable et il lui manquait 600 chevaux pour traîner le peu de pièces qu'il avait. Il comptait mener avec lui 50.000 soldats ; il en aurait 5.000 de moins : les 30.000 hommes de renfort s'étaient réduits à 22.000, parce que les représentants en gardaient 8.000 sur les bords de la Sarre. Il comptait recevoir le corps des carabiniers, et les carabiniers, également retenus par les commissaires de la Convention, restaient à l'armée de la Moselle et devaient y rester jusqu'à la fin de l'année, malgré les instances du ministre et les arrêtés du Comité. Il réclamait 10 millions, 6 pour acheter des fourrages et 4 pour acheter de la viande, répétait que la cavalerie était sans avoine, que les chevaux se mouraient, qu'il ne pourrait former de magasins tant qu'il n'aurait pas d'argent. Il se méfiait de ses lieutenants. Je voudrais vous voir ici, marquait-il au ministre, pour que vous puissiez vous-même les juger ; vous sentiriez véritablement notre misère et notre embarras sur ce point. Tous ou presque tous ressemblaient à ce général Bécourt, gouverneur de Péronne, qui refusait de donner un seul ordre par écrit, en citant le dicton latin verba volant, scripta manent. Ils n'osaient rien prendre sur eux-mêmes, et la crainte de leur responsabilité les rendait impuissants et difficultueux. Tantôt, ils prétextaient que leur commandement était trop étendu ; tantôt, ils épiloguaient sur le détail des opérations et se livraient à des observations minutieuses et mesquines : plusieurs que le ministre avait annoncés, n'arrivaient pas ou, lorsqu'ils arrivaient, se hâtaient de dire qu'ils n'étaient bons à quoi que ce soit. Je fais, avouait Houchard, la plus triste grimace du monde ; la chose n'en ira pas aussi bien[40]. Le 5 septembre, à l'aube, au moment où les troupes se concentraient, Freytag attaquait leurs avant-postes, comme s'il voulait, suivant le mot de Houchard, tenter partout une reconnaissance et savoir ce qu'il y avait derrière les lignes françaises. Le 36e régiment d'infanterie, pris au dépourvu, essuya quelques pertes : Il ne s'est pas levé, gémissait Houchard, aussi matin qu'il en avait ordre, et il aurait dû être plus vigilant[41]. Mais Bouchotte s'efforça de rassurer le général. Il lui répondit que le changement de Petitjean était nécessaire et, au lieu de nommer Lambert commissaire-ordonnateur en chef, il nomma Pinthon, homme intelligent et actif, qui avait déjà travaillé sur là frontière du Nord. Il envoya des bidons et des marmites. Il envoya des caissons. Il envoya 10 millions et dès lors, témoigne Berthelmy, l'armée, certaine de ses fournitures de viande et d'avoine, ne se voyait plus réduite à un dénuement total au milieu de l'abondance[42]. Deux représentants, Levasseur et Delbrel, qui n'épargnaient pas leur personne et qui devaient assister à tout, aux combats comme aux conseils, accompagnaient Houchard. Berthelmy et Gay-Vernon étaient à ses côtés pour l'aider de leurs avis : Gay-Vernon, froid, mesuré, réfléchi ; Berthelmy, vif, prompt, audacieux. Le jeune chef d'état-major avait reçu un coup de pied de cheval ; il boitait et ne pouvait porter de bottes ; il eut la plus grande peine à se mettre et à se tenir en selle. Mais, dès le 29 août, il écrivait à Brune qu'il allait se livrer pendant cinq ou six jours à un travail agréable, qu'il préparait la victoire et qu'il y serait, même non botté ; il jurait de vaincre tous les obstacles, d'établir de l'ensemble dans la disposition des forces, de suppléer de son mieux à la tiédeur des généraux, à l'incapacité de l'état-major, au manque d'artillerie : Nous allons parler aux soldats, tonner contre les officiers, les réveiller, les échauffer ; il faudra bien que ça aille ! Et, emporté par son zèle jacobin, il conseillait, non seulement de chasser des places de la Flandre maritime les malintentionnés et les suspects, mais de les enfermer dans les vaisseaux en rade et au besoin de couler les bâtiments à fond. Il ne doutait pas du succès. Grâce à la supériorité du nombre, les Français accableraient le duc d'York : Il faut absolument que notre affaire soit heureuse ; mais l'armée sera telle que nous sommes sûrs de battre York et de le faire repentir de sa fantaisie sur la Flandre maritime. Si Dunkerque fait la résistance républicaine que nous avons lieu d'attendre, nous devons précipiter les Anglais dans la mer ![43]. Pourtant, quelle que fût l'ardeur de Berthelmy et malgré les exhortations de Bouchotte, Houchard partait sans gaieté ni confiance pour cette bataille d'Hondschoote à laquelle s'est attaché son nom. Il mandait plaisamment au ministre qu'il allait faire un déjeuner à l'anglaise. Mais il restait pensif et mélancolique ; il semblait avoir sur le front l'ombre des angoisses qui n'avaient cessé d'agiter son cœur depuis son arrivée en Flandre ; il se demandait anxieusement s'il pourrait mener son monde et le tenir dans la main et, sans songer à l'importance dont serait la victoire, il n'avait en lui d'autre sentiment que la peur d'un échec. Il se savait épié, soupçonné. Des membres du Comité, Jeanbon Saint-André et Prieur de la Marne, n'avaient-ils pas insinué qu'il n'était pas assez bien entouré et que ses intimes ne voulaient appliquer que le système défensif, le custinisme, entièrement contraire au caractère français ? Un adjoint du ministre, Auger, n'avait-il pas dit aux Jacobins qu'on pouvait être né sans-culotte et devenir fripon, que les grandes liaisons de Houchard avec Custine suffisaient à le rendre suspect ? Houchard redoutait, s'il subissait un revers, d'être accusé de trahison. Il s'écriait, en apprenant l'exécution de Custine : C'est donc un parti pris de guillotiner les généraux ! — Et toi aussi, lui répondait durement Levasseur, on te guillotinera si tu nous trahis ! Le reître lorrain craignait, s'il était vaincu, d'être envoyé à l'échafaud et condamné à une mort infamante, au lieu de mourir en glorieux vétéran dans sa maison de Sarrebourg[44]. |
[1] Châles au Comité, 17 août ; Houchard au Comité, 29 août (A.G.).
[2] Berthelmy aux représentants, 23 août, et à Brune, 29 août (A. G.).
[3] Gadolle, lettre du 3 juillet (A. E.)
[4] Rapport de Ronsin, 17 août (A. G.)
[5] Cf. le rapport imprimé de Jeanbon et de Prieur.
[6] Lettre de Bentabole, 13 août (Rec. Aulard V, 510.)
[7] Rougyff, n° 15, 37, 38, etc.
[8] Delbrel, rapport du 23 sept. (A. G.)
[9] Brillanter est un des mots favoris de Barère.
[10] Discours du 14 et du 16 août.
[11] Berthelmy à Houchard, 17, 25, 29 août, et à Gadin, 2 sept. ; arrêté de Levasseur et de Bentabole, 17 août ; lettre des mêmes à Favart, 14 août ; Bouchotte à Houchard, 15 sept. ; Favart à Bouchotte et aux représentants, 22 août et à Houchard, 13 sept. ; Gay-Vernon à Audouin, 3 août (A. G.)
Cf. Mémoires sur Carnot, I, p. 391. Le fils de Carnot a vu clair en ce point et refuse à son père l'initiative de ce plan d'attaquer en masse ; dès le début de la crise, ces mots sortirent de la bouche de tous.
[12] Carnot aux représentants, 25 août (A. G.).
[13] Valenciennes, 124-131.
[14] Mège, Correspondance de Couthon, 255.
[15] Billaud et Niou au Comité, 11 août (A. G.)
[16] Mémoire de Saurin, 31 août (A. G.).
[17] Gay-Vernon au Comité, 1er août (A. G.).
[18] Berthelmy à Bouchotte, 23 août (A. G.).
[19] Kilmaine à Bouchotte, 3t juillet, 7 et 10 août (A. G.).
[20] Houchard à Bouchotte, 12 et 19 août (A. G.)
[21] Rec. Aulard, V, 344, 345, 442 ; Wissembourg, 63-69 ; lettre du Comité aux représentants, sans date, mais bien probablement du 8 août.
[22] Relation d'Arnaudin ; Kilmaine à Bouchotte, 10 août ; Bouchotte à Houchard, 20 août, et aux commissaires de la trésorerie nationale, 9 août (A. G.). On a vu que le transport des troupes devait coûter cinq millions. Trois millions furent donnés aux postes et messageries nationales ; douze cent mille livres, à la section des étapes de l'administration des subsistances militaires ; huit cent mille livres, à l'administration des transports militaires. L'opération ne fut pas aussi prompte et efficace qu'on l'avait cru. Les troupes qui viennent à pied, écrivit alors l'adjudant-général Damas, sont bien moins fatiguées et en bien meilleur ordre que celles qui viennent en poste ; cette manière de les faire voyager est extrêmement dispendieuse et destructive ; les armes sont ou mutilées ou perdues, et les soldats, harassés de fatigue ; le résultat pour la célérité de la marche se réduit à rien. On a l'état des bataillons tirés des armées du Rhin et de la Moselle pour renforcer celle du Nord : 1er et 2e bat. du 36e, 1er et 2e bat. du 67e, 1er bat. du 49e et du 74e, 2e, 5e et 8e bat. du Haut-Rhin, 2e et 11e des Vosges, 6e et 7e du Jura, 4e du Var, 4e de la Gironde, 8e de Seine-et-Oise, 7e du Doubs, 2e bat, du 13e des fédérés, 3e des 83 départements, 6e de l'Oise, 3e de la Haute-Marne, 3e de l'Eure.
[23] Rapport de Delbrel, 23 sept. ; Collombel au Comité, 23 août (A. G.).
[24] Berthelmy à Bouchotte, 22 août, et à Brune, 29 août (A. G.).
[25] Déposition d'Ernouf à l'interrogatoire de Gay-Vernon (A. N.) ; Duquesnoy au Comité, 26 août (A. G.) ; cf. Houchard au Comité, 22 et 29 août ; Berthelmy à Bouchotte, 26 août (A. G.).
[26]
Houchard au Comité, 29 août (A. G. et Moniteur du 5 sept.) : Béru aux
représentants, 28 août (A. G.) ; lettre de Bentabole et de Levasseur, 28 août (Moniteur
du 2 sept.) ; lettre de Hentz, 5 sept. (Rec. Aulard, VII, 160) ; Dohna, Der Feldzug der Preussen, III,
328-329 ; Crossard, Mém., I, 51-52.
[27] Cf. les lettres déjà citées de Berthelmy à Bouchotte et à Brune, 23 et 29 août (A. G.).
[28] Houchard à Bouchotte, 26 août et Mém. du 29 sept. ; lettre des administrateurs de Bergues, 25 août (A. G.) ; Rousselin, II, 2 ; discours de Barère, 2 sept. (Moniteur du 13).
[29] Bouchotte à Houchard, 28 et 30 août, 3 sept. (A. G.).
[30] Après Hondschoote, Berthelmy écrivait à Bouchotte (13 sept. A. G.) que les Anglais alarmés n'étaient pas en grande intelligence avec les Autrichiens, que les mouvements du peuple étaient tels qu'il fallait des succès au duc d'York pour arrêter le parti de l'opposition, qu'on ferait donc bien de prendre toutes les mesures imaginables pour communiquer à Londres les détails de la bataille d'Hondschoote. Hentz et Duquesnoy écrivaient de même le 15 septembre : L'Angleterre saura tout, et tous les gens qui connaissent le terrain nous assurent que Pitt pourra bien se repentir de ses perfidies.
[31] Carnot à Houchard, 28 août (A. G.) ; cf. l'adresse, rédigée par Carnot : Le Comité à tous les braves qui défendent Bergues et Dunkerque. (Collection Charavay.)
[32] Lettre de Levasseur, ter sept. ; Houchard à Bouchotte, 3 sept. et mémoire du 29 sept. ; Berthelmy à Jourdan, 31 août (A. G.) ; Mém. de Berthelmy (Seilhac, III) ; Tableau historique, II, 309. Nous croyions, avoue Levasseur le 1er septembre, la ville de Dunkerque plus pressée qu'elle n'est.
[33] C'est ce que reconnaît un émigré, attaché au duc d'York, Arnaudin. Il est de la plus grande évidence que les armées d'observation et de siège étaient exposées au danger le plus pressant, si l'ennemi avait profité de tous ses avantages. Dès le commencement de l'affaire, les républicains étaient en mesure d'arriver à Furnes avant les deux armées et d'envelopper l'une et l'autre.
[34] Bouchotte à Houchard, 30 août, 5 et 11 sept. (A. G.).
[35] Carnot à Houchard, 5 sept. (A. G.).
[36] Houchard à Bouchotte, 22 août ; Davaine à Bouchotte, 14 sept. ; Berthelmy à Bouchotte, 22 et 26 août ; Mém. de Berthelmy (Seilhac, 111) ; instruction pour l'armée du Nord, 23 août (A. G.).
[37] Arrêtés des 3 et 5 sept. (A. G.) ; Rec. Aulard VI, 103 ; VIII, 160 ; Du Casse, Vandamme, I, 56-59.
[38] Bouchotte à Houchard, 19 et 25 août ; à Berthelmy, 20 août ; à Béru et à Viger, 25 août (A. G.).
[39] Moniteur du 18 août ; Berthelmy à Bouchotte, 17 août ; Levasseur au Comité, 13 août ; rapport de Ronsin, 17 août. Cf. sur Petitjean, Jemappes, 162 ; Trahison de Dumouriez, 32 ; Charavay, Carnot, II, 32 ; lettre de Vanquer, 2 avril ; Defrenne à Bouchotte, 6 mai ; Kilmaine à Bouchotte, 4 août ; Bouchotte au Comité de surveillance des subsistances 18 juillet, et justification de Petitjean (A. N. w. 360.) Petitjean répond victorieusement aux Cambrésiens qu'il a très souvent averti les administrateurs du district de se précautionner, qu'il doit subvenir aux besoins du soldat et non du bourgeois, qu'il a laissé des subsistances pour six mois à la garnison de Cambrai, et que l'approvisionnement des militaires est si considérable qu'il a été requis d'ôter des farines à Cambrai pour les donner à Lille.
[40] Lettre des représentants, Levasseur, Bentabole et Châles, Lille, 3 sept. (Foucart et Finot, Il, 91) ; arrêté de Châles, 25 août ; Bouchotte à Berthelmy, 27 août : Houchard à Bouchotte, 29 août et 3 sept. (A. G.) ; Rec. Aulard, VI, 103 et 218.
[41] Houchard à Bouchotte, 5 sept. ; Mém. de Houchard, 29 sept. (A. G.) ; lettre de Hentz (Aulard, VII, 160).
[42] Bouchotte à Houchard, 5 sept. ; Houchard à Bouchotte, 3 sept. ; Berthelmy à Brune, 29 août (A. G.).
[43] Mém. de Berthelmy (Seilhac, 110) ; Berthelmy à Brune, 29 août. (A. G. Brune avait été chargé avec Calandini par le Comité de salut public de visiter les armées et les places fortes du Nord et des Ardennes ; cf. Rec. Aulard VII, 42.) Notons en passant que le représentant Hentz n'était pas à Hondschoote, comme dit Gay-Vernon fils (p. 258) ; il était alors à Gravelines (Moniteur du 10 sept.).
[44] Mém. de Levasseur, II, 3 ; Auger aux Jacobins, 19 août (Journal de la Montagne, 21 août).