Desportes et d'Esebeck. Custine et le capitaine Boos. Entrevue du 12 avril. Conférence d'Oppenheim. Beaupuy diplomate. Négociation de Corbeau. Paquet de lettres remis à Böhmer. Le joaillier Clausius et Simon.De curieuses négociations se mêlèrent aux opérations du siège. Le Comité de salut public, élu le 6 avril, s'était attribué le pouvoir exécutif et prenait toutes les mesures de défense. Danton, qui le dirigea jusqu'à la fin du mois de juillet, résolut de négocier. Il fit voter le décret du 13 avril qui déclarait que la Convention ne s'immiscerait en aucune manière dans le gouvernement des autres puissances, et, aidé du ministre des affaires étrangères Le Brun, il essaya de détacher les Prussiens de la coalition. Custine et l'ancien envoyé de la République à Deux-Ponts,
Desportes, entrèrent avec ardeur dans les idées de Danton. Custine proposait
à cet instant de porter dans le Nord tout l'effort de la guerre et d'accabler
les Autrichiens en Belgique. Desportes, souhaitant de faire concorder les ambitieux désirs d'un despote avec les grandes vues
révolutionnaires, dressait un plan de partage des électorats
ecclésiastiques : Mayence serait une république ; la Bavière obtiendrait
l'électorat de Mayence et une moitié de l'électorat de Trèves ; le roi de
Prusse, l'électorat de Cologne et l'autre moitié de l'électorat de Trêves
avec le pays de Berg et de Juliers que lui céderait le palatin[1]. Desportes se flattait d'avoir conservé des intelligences à Deux-Ponts. Il conçut le dessein de s'aboucher avec le ministre d'Esebeck qui languissait dans la prison militaire de Metz. Selon lui, délivrer Esebeck et se l'attacher, c'était se procurer par le rapprochement de la maison palatine une voie secrète de négociation avec la cour de Prusse. Le Brun approuva Desportes ; la détention d'Esebeck, écrivait-il au Comité, ne semble pas légale ; il serait expédient de le relâcher et d'user de ses bons offices pour amener l'électeur palatin réconcilié avec le duc de Deux-Ponts à des démarches utiles à l'armée de la République. Dubuisson fut envoyé à Metz ; il trouva le malheureux Esebeck gisant, lui troisième, moitié par terre, moitié sur un grabat, dans une mauvaise petite pièce ; il lui fit donner une chambre à part. Puis arriva Desportes. Esebeck lui remit un mémoire pour le Comité de salut public et une lettre pour Danton ; il nommait Danton le plus grand homme de la République française et, ajoutait-il, si j'en crois mon cœur, il doit être aussi le plus généreux. Il se disait dévoué aux intérêts de la France et promettait de ne pas lui être inutile dans les pays étrangers. La négociation se nouait. Déjà Desportes recevait l'assurance qu'il aurait un sauf-conduit du roi de Prusse. Déjà le baron de Luxbourg, chambellan de Frédéric-Guillaume, se rendait à Metz et visitait Desportes qu'il avait autrefois connu à la cour de Deux-Ponts ; l'envoyé français lui donnait un exemplaire de ce décret du 13 avril qui proclamait la renonciation de la France à toute propagande et Luxbourg déclarait que Desportes trouverait bon accueil à Mannheim, que le roi de Prusse verrait avec plaisir un ministre de la République en Allemagne. Esebeck fut aussitôt tiré de sa prison et conduit à Paris. Mais le Comité de salut public était changé ; Danton, éliminé par Robespierre, ne tenait plus le pouvoir ; Deforgues succédait à Le Brun, et en vain Esebeck s'entretint longuement avec le nouveau ministre des affaires étrangères et manda au duc de Deux-Ponts qu'il avait à lui communiquer des choses essentielles et de la plus grande conséquence pour la maison palatine ; en vain le duc Charles lui répondit que ses lettres arriveraient aisément par un trompette aux avant-postes prussiens. Desportes fut rappelé, et la négociation rompue[2]. Custine n'avait pas été plus heureux. Le Brun lui conférait pleins pouvoirs pour pénétrer les intentions des Prussiens, ces alliés naturels de la République : Custine, insinuait-il, ferait bien de s'entretenir avec leurs officiers afin de connaître les desseins du Hohenzollern et de ses entours ; il pourrait même inquiéter Frédéric-Guillaume et lui donner de la jalousie en simulant une négociation avec l'Autriche. Custine était grand parleur et se croyait propre à la diplomatie. Ne disait-il pas à Biron qu'il était homme à mettre tout en usage, politique et mouvements audacieux, pour imposer à ses ennemis[3] ? Il écrivit aussitôt à Wurmser dans un style modéré ; comme citoyen et comme ami de l'humanité, il souhaitait la fin d'une guerre qui désolait l'Europe. Wurmser lui répondit en termes vagues et lui envoya son aide de camp, le baron d'Ettinghausen. Les pourparlers n'aboutirent pas. L'empereur François défendait à ses généraux de s'engager dans des négociations qu'il regardait comme inutiles et insidieuses[4]. Quant aux Prussiens, ils s'efforcèrent dé jouer Custine. Le général devait, d'après les instructions de Le Brun, s'informer adroitement s'il pourrait obtenir une suspension d'armes en livrant Mayence. Dans ses entretiens avec les officiers de Frédéric-Guillaume, il hasarda que le gouvernement de la République consentirait à céder la ville sous certaines conditions, et il déclarait à la femme du commissaire national Simon qu'on travaillait à la paix générale, que Mayence ferait un des articles principaux du traité, que la place, ainsi que Worms et Spire, serait nécessairement restituée aux ennemis[5]. Forts de ces aveux, les Prussiens cherchèrent à se rendre maîtres de Mayence par la ruse. Le 9 avril, on vit durant toute la journée leurs officiers parler aux vedettes françaises, leur montrer de l'argent, les engager à la désertion[6]. Le 12, un trompette remettait à d'Oyré deux lettres, l'une du capitaine Boos, commandant des deux compagnies de chasseurs du 96e régiment d'infanterie, l'autre du major de Zastrow, aide de camp de Frédéric-Guillaume. Boos annonçait qu'il était chargé par le général Custine de s'aboucher avec d'Oyré ; Zastrow ajoutait que le roi de Prusse autorisait l'entrevue à condition qu'elle aurait pour témoins deux officiers prussiens, Zastrow et le major de Kleist. Le Conseil de guerre décida que d'Oyré irait au rendez-vous avec Dazincourt, Kléber, et le commissaire de la Convention nationale Reubell : ce dernier avait exprimé le désir d'assister à la conférence, et la présence d'un représentant du peuple était indispensable, puisqu'il s'agirait probablement du salut de la République. La conférence eut lieu le 12 avril, en avant de Hechtsheim, à quelque distance des vignes. Boos dit d'abord, assez bas et comme en balbutiant, qu'il apportait de mauvaises nouvelles. Parlez tout haut, lui répliqua Reubell, il faut que tout le monde entende. — Paris, reprit Boos, est en insurrection, la Convention nationale a été dissoute, Dumouriez a proclamé le Dauphin et marche sur Paris pour rétablir l'ordre. Reubell et ses compagnons se récrièrent. Mais Zastrow tira de sa poche un Moniteur et assura que Boos ne mentait pas. Quelle est, dit d'Oyré à Boos, la mission que vous avez reçue du général Custine ? — Le général, répondit Boos, n'a pas assez de troupes pour combattre l'ennemi ; il désire être rejoint par la garnison de Mayence et vous invite à rendre la place. — Avez-vous des pouvoirs ? — Non. — Et vous nous appelez ici pour conférer avec vous ! Vous avez eu raison de ne pas entrer à Mayence, je vous aurais fait arrêter. Reubell prit la parole. Nous avons des lois qui règlent notre conduite en cas de siège, et mon devoir est d'en requérir l'exécution. Mais, si l'on veut ouvrir une négociation générale, je suis prêt à conférer avec le roi de Prusse, j'ai confiance en sa loyauté ; je me rendrai dans l'endroit qu'il m'indiquera. — Pour moi, ajouta d'Oyré, je suis soldat et je dois obéir à la loi ; je défendrai la ville autant que je pourrai ; j'ai une brave garnison et j'espère qu'elle saura, par sa valeur, mériter l'estime des ennemis. On se sépara, mais Boos eut le temps de couler un billet dans la main de d'Oyré. Ce billet, daté du 9 avril, et signé de Custine, était ainsi conçu : Vous pourrez ajouter foi à ce qu'on vous dira de ma part. J'ai le besoin le plus pressant de renforcer l'armée par la garnison de Mayence. Tâchez de prendre vos mesures pour une capitulation honorable le mieux que vous pourrez. L'Alsace est en danger. Il s'en faut cependant que j'aie perdu l'espoir de faire repentir l'ennemi de ses entreprises, pourvu que vous me joigniez à temps. L'on m'enlève des troupes pour réparer les pertes de Dumouriez. D'Oyré remit le billet au Conseil de guerre. On reconnut que la signature du général était fausse et trop allongée. Custine lui-même, lorsqu'il fut informé de l'incident, protesta de toutes ses forces, jura qu'il ignorait l'existence de Boos et qu'il n'avait chargé d'aucune mission ce vil scélérat. Il ne serait jamais assez lâche, mandait-il aux commissaires, pour désirer, moins encore pour solliciter l'évacuation d'une ville devant laquelle l'infanterie allemande devait trouver son tombeau. Mais il savait que Boos était prisonnier de guerre, et il devinait que cet homme, originaire du pays de Trêves, agissait pour le compte des Prussiens. Comme disait Haussmann, la conduite de Boos était un acte de trahison. Custine se plaignit à Brunswick. Cette machination venait sans doute de ces intrigants dont les cabales avaient précipité l'Europe dans la guerre la plus désastreuse ; mais le duc avait horreur de l'imposture ; il ne refuserait pas de comprendre Boos dans le prochain échange de prisonniers et de l'envoyer aux avant-postes français sous bonne et sûre garde. Je ne laisserai pas, ajoutait Custine, ignorer à l'Europe une intrigue dont le but serait de déshonorer le caractère que je crois avoir développé depuis le commencement de la Révolution et de cette guerre ![7] Boos resta dans le camp prussien. Mais les assiégeants ne se découragèrent pas. Reubell avait fait quelques ouvertures. Ne pouvait-on négocier de nouveau ? Le 13 avril, le major de Zastrow priait Reubell de s'aboucher à Oppenheim avec Kalkreuth. Reubell partit, accompagné de Le Dieudeville et de Beaupuy. Ce dernier, plus exalté que jamais et résolu de montrer à Kalkreuth un vrai jacobin, s'était, dit-il, boutonné de la tête aux pieds dans une anglaise nationale : les trois couleurs n'étaient pas oubliées, les boutons à la République, les cheveux très courts, la grande moustache, le chapeau de travers, la froideur d'un quaker. Oh ! ma foi aussi, tous ces officiers, tous ces crachats l'entouraient, et, à chaque pas qu'il faisait, la gueule béante, ils paraissaient tout ébahis. Reubell fut poli. Le Dieudeville se confondit en révérences et en courbettes. Beaupuy, indigné de cette platitude, demeura roide et jamais ne se tint si droit[8]. L'entrevue fut curieuse. Un petit homme, secrétaire de Frédéric-Guillaume, assis au fond de la chambre, mettait par écrit tout ce qui se disait. C'est une précaution dont je crois devoir user, remarqua le général prussien, car le Moniteur a, l'an dernier, reproduit très infidèlement mon entretien avec Galbaud[9]. Mais ni Kalkreuth ni Reubell n'avaient rien à proposer, et la conférence ne fut qu'une conversation sans importance politique. Reubell parla des conditions de la paix future et Kalkreuth répondit qu'il ne pouvait être question que de Mayence. Durant le cours de l'entretien, Kalkreuth offrit à Beaupuy
deux numéros du Moniteur. Le brave colonel s'en saisit avidement. Le
Prussien s'étonne. Oh ! général, dit Beaupuy,
c'est que j'aime ma patrie ! C'est que, depuis treize
jours, j'en suis séparé ! Tout mon cœur est à elle ; toutes mes pensées
lui appartiennent. Je suis républicain, et les républicains n'ont d'autre
intérêt que l'intérêt public, d'autre but que la prospérité de la patrie.
Jugez par suite des sentiments que m'inspire la vue de ce journal. — Ce journal, repartit Kalkreuth, vous apprendra les malheurs de la France. Les jacobins la
trahissent. Ce sont des agitateurs, de faux patriotes, des hommes sans état
et sans fortune qui veulent pécher en eau trouble et qui ne désirent la
subversion de toutes choses que pour s'enrichir eux-mêmes. — Quelle erreur, général ! Ces sans-culottes, ces jacobins
que vous méprisez, ressemblent aux gueux de la Hollande qui triomphèrent du
duc d'Albe. Vous en voyez trois devant vous et qui s'enorgueillissent de
l'être, quoiqu'ils aient chacun cinq à six cent mille francs de biens fonds[10]. — Mais est-il permis en France, à l'heure actuelle, d'avoir
plus de cent mille francs de biens ? — Oui,
général. — Et où mène votre Révolution ? Nous
aussi, en Allemagne, nous avons des lois ; nous aussi, nous sommes libres ;
nous aussi, nous sommes égaux. — Comment,
général, avec vos crachats et vos cordons ! A ce moment, le secrétaire
demanda la permission de lire l'adresse de Dumouriez à son armée, et Beaupuy
ne put contenir son indignation. Le traître ! Le
scélérat ! Le f..... gueux ! Mais n'importe, malgré tous nos revers, malgré
la lâcheté des rois unis contre un peuple généreux qui ne veut que le
maintien de ses droits... — Comment,
interrompit Kalkreuth, vous insultez le roi mon
maître ! Vous êtes le premier Français qui ait tenu de semblables propos en
ma présence. — Général, dit Reubell, le colonel Beaupuy s'est cru au milieu des siens. —
Oui, s'écrie Beaupuy, et je me suis bien trompé ! Le bouillant républicain n'insista
pas ; il craignit de compromettre Reubell ; s'il avait été seul, racontait-il
plus tard, il eût soutenu son opinion, au risque de perdre la tête ou d'être
conduit à Spandau. Au retour, Beaupuy fut grondé par d'Oyré. Vous avez, lui dit le général, commis une grave imprudence. — Je vous avais prévenu, répondit Beaupuy, et je ne crois pas que vous m'envoyiez une autre fois en ambassade. Mais Dubayet, Meusnier, Merlin félicitèrent le colonel. Voilà, répétait Merlin, voilà un républicain ![11] Un court récit de la conférence d'Oppenheim fut imprimé et distribué parmi les soldats. Le Conseil de guerre annonçait aux troupes la défection de Dumouriez ; mais, ajoutait-il, la France était ainsi débarrassée de son écume, et la Convention déployait le plus grand caractère ; la garnison sentirait que le salut de la patrie dépendait de la fierté de sa contenance. Il faut, écrivait le chef du génie Gaudin, considérer Mayence comme le palladium de la France. Si nos armées sont malheureuses, les perles qu'elles auront essuyées peuvent être compensées et réparées par l'échange de la place. Si elles sont heureuses, c'est de Mayence que partiront nos forces pour faire respecter, honorer et chérir une Constitution qui, lorsqu'elle sera ce qu'elle doit être, fera le bonheur de la génération présente ! Huit jours plus tard, les commissaires de la Convention lisaient au Conseil de guerre deux lettres, l'une du commandant d'artillerie Corbeau, chargé d'affaires à Mannheim, l'autre, du major prussien de Kleist. Le commandant Corbeau priait les représentants de se rendre à Oppenheim pour y négocier la reddition de Mayence ; le major Kleist informait Reubell qu'il était prêt à le recevoir aux avant-postes. Le Conseil, indigné, déclara derechef qu'il n'avait ni le pouvoir ni la volonté de traiter sans des ordres supérieurs, et les commissaires de la Convention rejetèrent l'entrevue. C'était Corbeau qui, soit sur le conseil de Custine, soit plutôt de son propre mouvement et sur les instances des bannis mayençais, avait proposé de nouveaux pourparlers Merlin et Reubell lui mandèrent sèchement qu'il ferait bien de rentrer en France ; sa mission prenait fin, puisque le commissaire de l'Électeur palatin avait quitté Mayence ; d'ailleurs il n'avait aucun droit de s'ingérer dans les négociations relatives soit à la reddition dont il n'était pas question, soit à l'intérêt général de la République dont Monsieur Corbeau n'était nullement chargé. Corbeau, tout penaud, confus de s'être tant avancé, gagna Strasbourg et fut mis aussitôt en état d'arrestation[12]. Mais ce ne fut pas la dernière tentative des Prussiens. Le 28 avril, un paysan apportait un paquet de correspondances à la femme de Georges Böhmer. On assurait la dame qu'elle aurait sa grâce ainsi que son mari, si certaines missives étaient remises à leur adresse. Il y avait des lettres pour Merlin, d'Oyré, Dubayet et les principaux officiers. Toutes, dit un membre du Conseil de guerre, étaient d'une perfidie atroce et leurs auteurs croyaient trouver des traîtres comme eux. On décida de passer à l'ordre du jour[13]. Une suprême intrigue se noua vers la fin du mois de mai. Le 21, le commissaire du pouvoir exécutif Simon reçut une lettre d'un déporté mayençais, joaillier de l'Électeur, Clausius, qui lui proposait une entrevue aux avant-postes prussiens, tout près de Marienborn. Simon alla le surlendemain au rendez-vous avec Steinmetz, aide-de-camp de Schaal. Mais, au lieu de Clausius, c'était Kalkreuth qui l'attendait, et le général ne s'entretint avec Simon que de choses indifférentes, comme de l'élévation de Bouchotte au ministère de la guerre et du départ de Custine pour la Flandre. Le jour suivant, 24 mai, Simon revint au même endroit et y trouva Clausius, accompagné du comte de Voss. Le roi de Prusse, dit le joaillier, fait des préparatifs immenses ; le siège sera terrible ; ne pourrait-on prévenir tant d'horreurs et s'arranger à l'amiable ? — La loi est précise, répondit Simon, et nous ne pouvons nous en écarter ; plus les Français sont libres, plus ils sont esclaves de la loi ; tant qu'il nous restera des moyens de défense, nous ne saurons entrer en négociation. Puis, se tournant vers le comte de Voss, toutefois, si la nation française avait des raisons politiques qui la déterminent à rendre Mayence et à rappeler la garnison, sa volonté devrait se manifester à nous par une voie légale et officielle ; je vous propose donc, de nous permettre, à Reubell et à moi, d'aller à Paris pour connaître sur cet objet l'intention des représentants du peuple ; nous jurons de regagner ensuite notre poste à Mayence. — M. Reubell, répliqua le comte de Voss, a déjà fait cette proposition, et Sa Majesté prussienne l'a refusée. — Mais, dit Simon, pourquoi ne fixez-vous pas aux avant-postes, ou sur la frontière un endroit où se tiendrait une sorte de congrès ? Nous pourrions, de là, communiquer avec la métropole. Voss déclara qu'il ferait son rapport au roi, et la conférence prit fin[14]. |
[1] La même pensée hantait les têtes allemandes, et Girtanner (Die Franzosen am Rheinstrome, 106), disait nettement qu'il fallait terminer l'anarchie, réunir les petits Etats aux grands Etats, et donner à la Prusse ou à l'Autriche les principautés de la rive gauche du Rhin, plutôt que de les laisser entre les mains de la France.
[2] Dubuisson à Le Brun, 12 et 18 mai ; le ministre au Comité, 6 juin et 9 juillet, à Desportes, 26 juillet, 5 et 10 août ; Desportes au ministre, 9 juin ; Esebeck à Desportes, à Danton, au Comité, 12 juin, au duc de Deux-Ponts, 13 août ; le duc de Deux-Ponts à Esebeck, 28 août 1793 (A. E.). Cf. Sybel, trad. fr., II, 295 ; Sorel, l'Europe et la Révolution, III, 422 et 433 ; Aulard, La Révolution française, 14 mars 1890, p. 238-247.
[3] Custine à Biron, 14 nov. 1792 (A. G.).
[4] Entretien de Custine avez Mandar, 1er mai 4793, p. 4-7 ; Custine à Le Brun, 10 avril 1793 (A. E.) ; Sorel, III, 400-401 ; Ternaux, Terreur, VII, 83 ; Zeissberg, Quellen zur Gesch. der deutschen Kaiserpol. Oest., 1882, I, 44-46.
[5] Déposition de Custine au tribunal révolution (Moniteur, 21 août 1793) ; rapport de Simon, 13 août 1793 (A. E.).
[6] Journal de Damas (A. G.).
[7] Journal du siège ; Récit imprimé et mis sous les yeux de l'armée (A. G.) ; Custine aux commissaires, 4 mai, et à Brunswick, 5 mai 1793 (Moniteur, 14 mai) ; Haussmann au Comité, 3 mai (A. N. DXLII, 4) ; Procès de Custine, dépos. de Kléber (Moniteur, 29 août 1793) et de Reubell (22 août). La lettre de Boos était en effet forgée. Cf. l'aveu du chef d'escadron Wedel, aide-de-camp de Kalkreuth, (Czettritz, 77) Custine avait donc raison de dire devant ses juges : C'est un tour des Prussiens ; ils sont les rédacteurs du billet.
[8] Beaupuy (Bussière et Legouis, p. 67) et ms. de la guerre.
[9] Cf. Retraite de Brunswick, 189-193, et la rectification de Kalkreuth (Minerva, VI, 162-179).
[10] Comme je mentais ! dit Beaupuy à cet endroit de son mémoire.
[11] Bussière et Legouis, Beaupuy, 66-70. Le capitaine Mangin, Mayençais qui avait, comme Eickemeyer, passé de l'Electeur au service de la République française, semble avoir accompagné Reubell à Oppenheim ; il rapporta à son retour ce que les Prussiens lui avaient dit : la Convention était dissoute et le Dauphin proclamé roi ; Dumouriez marchait sur Paris ; la garnison de Mayence ne devait pas se battre pour des gens qui n'existaient plus. (Mém. de Decaen.)
[12] Darst., 918-919 ; Belag., 200 ; Merlin et Reubell à Corbeau, 20 avril 1793 ; Haussmann au Comité, 3 mai (A. N., DXLII, 4) ; Rec. Aulard, IV, 17 ; Gaudin, Journal du siège, 20 avril (A., G.). Antoine-Pierre-Laurent Corbeau de Saint-Albin, né le 24 février 1750, à Saint-Albin, dans le Dauphiné, successivement aspirant (17 sept. 1768), élève (6 juillet 1770), lieutenant en second surnuméraire 1er nov. 1774), lieutenant en second (9 mai 1778), lieutenant en premier d'ouvriers (9 juin 1779), lieutenant en premier au régiment de Metz 17 nov. 1782), capitaine par commission (11 juin 1786), capitaine en second (29 août 1789), capitaine-commandant (25 juillet 1791), avait remplacé à Mannheim l'adjudant-général Lafond et s'intitulait lieutenant-colonel au 5e régiment d'artillerie. Biron, qui le nomme un patriote très prononcé, assure, le 21 octobre 1792, que le capitaine Corbeau est sous tous les rapports d'une grande utilité à la garnison de Neufbrisach et au général d'Harambure, qu'il a beaucoup d'influence sur le club, et, le 11 février 1793, on lisait, à la Société de Mayence, un discours de Corbeau sur les désavantages de la royauté (Nau, V, 577). Mais une note anonyme le caractérise ainsi : C'est une espèce d'original, qui a la manie de se croire seul capable de faire le bien ; il est impudent et sans moyens ; je le crois méchant et même dangereux. On l'avait envoyé dans le Midi, à l'époque de la réunion du Comtat. Replacé chef de bataillon, le 13 pluviôse an III, puis destitué par arrêté du Directoire, le 29 floréal an V, et admis à la retraite, le 19 thermidor an VIII, il mourut le 6 octobre 1813. Il avait adopté le fameux Rousselin, qui prit le nom de R. C. de Saint-Albin.
[13] Gaudin ; Journal du siège. D'Oyré proposa d'expulser Böhmer, qui ne s'était pas assuré du porteur ; mais on objecta que ce serait livrer Böhmer à une perte certaine.
[14] Rapport de Simon, 13 août (A. E.) ; Gamlin ; Czettritz, 162. Après la capitulation, ajoute Simon, j'ai vu Clausius, qui m'a dit que le roi avait trouvé mes propositions très justes ; qu'il avait choisi Reubell et moi pour ouvrir une conférence à Spire, lieu du Congrès, d'où nous aurions pu envoyer librement des courriers à Paris et en recevoir les réponses ; que le duc de Saxe-Weimar, Kalkreuth et autres avaient été de cet avis, et avaient même conçu l'espérance de jeter à Spire les fondements d'une paix générale ; mais Heymann avait tout gâté et poussé le roi à faire incessamment bombarder la ville. Cf. sur Clausius, Die Belag. von 1793, par Bockenheimer, p. 43. Il ne faut pas le confondre avec Christophe-Henri Clausius, jacobin et municipal de Worms, envoyé par Bobenheim à la Convention rhénane, emprisonné après le siège, et qui devint inspecteur des forêts (Die Franz. am Rheinstrome, III, 62, et Remling, II, 40).