LES GUERRES DE LA RÉVOLUTION

MAYENCE

PREMIÈRE PARTIE. — LES PATRIOTES

 

CHAPITRE IV. — LA CONVENTION RHÉNANE.

 

 

I. Composition de l'assemblée. Les matadors, Hofmann, Forster. Séance du 18 mars. Proclamation de l'indépendance du pays entre Bingen et Landau. Décret du 21 mars. Vœu d'incorporation. Forster à Paris. — II. Déportations. Terrorisme de Hofmann. Echecs de Custine. Fuite de plusieurs députés. Dernière séance.

 

I. La Convention rhénane devait se réunir le 10 mars ; mais la plupart des représentants, nommés par la campagne, étaient commissaires délégués ; ils municipalisaient la contrée et s'efforçaient, comme disait Simon, d'obvier à tous les obstacles qu'on mettait aux élections. On différa d'une semaine la convocation de l'assemblée ; mais Simon s'embarrassait peu de ce léger retard ; la Convention qu'il avait créée et organisée, saurait travailler vite, expédier sa besogne en quelques jours, bâcler lestement l'annexion. Je vous garantis, écrivait-il à Le Brun, sinon l'unanimité, du moins la presque unanimité pour la réunion à la France[1].

Ce fut donc le 17 mars que se réunit la Convention nationale des Allemands libres. Elle siégeait à l'hôtel de l'Ordre Teutonique, dans la salle des Chevaliers. Soixante-cinq députés assistaient à la première séance ; d'autres devaient venir encore, de gré ou de force, lorsqu'on eut menacé les communes de leur faire payer par jour de retard autant de florins qu'elles avaient d'habitants, et dans la dernière semaine du mois, l'Assemblée compta 130 membres[2]. La moitié se composait de paysans dont quelques-uns savaient à peine signer leur nom et écrire correctement leur titre de Deputierter ; aussi la municipalité mayençaise proposait-elle, pendant le siège, de les employer au fauchage des blés[3]. L'autre moitié était formée de lettrés, d'étudiants, de professeurs, de légistes, d'ecclésiastiques. Grünstadt avait nommé Auguste Mossdorff, homme intelligent et habile, qui fut membre de l'administration centrale du Mont-Tonnerre et secrétaire-général de la régence de Westphalie[4]. Volxheim avait élu ce sentimental et enthousiaste Adam Lux, qui s'était nourri de la lecture des anciens et passionnément épris de Jean-Jacques Rousseau ; Lux, ce fou sublime qui voulut tenter une réconciliation entre Girondins et Montagnards, faire en pleine Convention un appel à la concorde et se brûler la cervelle après son allocution ; Lux qui crut, en volant à la guillotine, imiter Curtius et Decius, donner un éclatant exemple et sacrifier sa vie au salut de la chose publique ; Lux qui suivit au pied de l'échafaud Charlotte Corday, qui la proclama plus grande que Brutus, qui périt comme elle et pour elle, heureux d'accompagner dans la mort la femme héroïque dont il avait admiré le regard doux et pénétrant, capable d'émouvoir des rochers[5].

Les membres les plus remarquables de l'Assemblée étaient les clubistes de Mayence et surtout les matadors. Ils devaient donner le ton et diriger les débats. Toutefois, Dorsch, décrié, perdu dans l'opinion, ne jouait plus qu'un personnage effacé. Wedekind se consacrait à son hôpital et Böhmer à sa gazette. Hofmann et Forster, réconciliés, tinrent la Convention sous leur ascendant, et un pamphlet de cette époque les appelle les Dii Majores. Mais dans les premiers jours, Forster avait incontestablement le rôle le plus actif. C'était chez lui que les commissaires français et les matadors se réunissaient tous les soirs en petit comité pour préparer les décrets que la Convention aurait à voter le lendemain. Ses brillants discours, les vigoureux articles que publiait son journal, la présidence du club, sa mission dans le comté de Linange, ses aventures d'autrefois le rendaient populaire. Les campagnards regardaient curieusement et avec une admiration naïve le compagnon de Cook et, entraînés par sa parole ardente, adoptaient d'emblée tout ce qu'il proposait. Il était l'âme de la Convention comme de l'Administration générale[6].

Après avoir entendu la sainte messe et, comme disait Simon, chanté Veni, Creator spiritus, à cause des préjugés du pays, la Convention tint sa première séance dans la matinée du 17 mars. Depuis bien des siècles, écrivait le Moniteur, on n'avait pas vu en Allemagne ce spectacle imposant d'une assemblée d'hommes libres. Elle nomma président d'âge le vieil Eckel, et secrétaires les quatre membres les plus jeunes, Franck, Fuchs, Gerhardi et Schlemmer ; elle vérifia ses pouvoirs et prêta le serment d'être fidèle aux principes de liberté et d'égalité, de remplir avec conscience ses devoirs ; puis elle se proclama constituée.

Une deuxième séance eut lieu dans l'après-midi du même jour. La Convention élut Hofmann, président ; Forster, vice-président ; Franck, Fuchs, Gerhardi et Schlemmer, secrétaires. Elle décréta que ses membres étaient inviolables et ne pourraient être appréhendés au corps ou traduits devant un tribunal sans son autorisation. Elle reçut les hommages de la municipalité mayençaise, et six députés, Blau, Dorsch, Forster, Franck, Metternich et Patocki, allèrent, en son nom, remercier les commissaires français, Merlin, Haussmann, Reubell et Simon d'avoir rétabli la souveraineté du peuple rhéno-germanique, leur annoncer la constitution de l'Assemblée, solliciter leur assistance, les prier de se rendre dans la Convention pour la reconnaître et accueillir le témoignage de son amour fraternel. Enfin, dans une conférence privée, elle arrêta que les clubistes prendraient un uniforme : habit bleu à doublure blanche et à parements rouges, gilet rouge, longues culottes bleues, le sabre pendant à une large écharpe sur l'épaule droite ; ils auraient les cheveux coupés et sans poudre ; ils porteraient la moustache ; leur colonel serait Rieffel, possesseur de l'hôtel du Roi d'Angleterre où devait siéger le club[7].

Le 18 mars, disait Böhmer, fera pour toujours époque dans les annales de notre histoire. Après avoir accepté provisoirement le règlement de la Convention française, la Convention rhéno-germanique ouvrit la discussion sur le destin du pays entre la Queich et la Nahe. Wedekind déclara qu'il fallait s'unir à la France et rédiger un décret qui dépouillerait de leurs droits et privilèges les princes de la rive gauche du Rhin. Forster appuya Wedekind et, pour enlever le vote, il proposa de décider sur-le-champ, sans débat aucun, sans nul retard, que le territoire entre Landau, Bingen et Mayence était à jamais délié de ses devoirs envers ses précédents maîtres. Le décret, tout entier de la main de Forster, fut immédiatement adopté dans les termes suivants :

1° Dès à présent, toute l'étendue du pays entre Landau et Bingen inclusivement, dont les représentants constituent la présente Convention, ne fera plus qu'un état libre, indépendant, indivisible et soumis à des lois communes à tous et fondées sur les principes de la liberté et de l'égalité ;

2° Le seul souverain légitime de cet état, c'est-à-dire le peuple libre, déclare, par l'organe de ses représentants, que tous les liens politiques avec l'Empereur et l'Empire d'Allemagne sont rompus ;

3° L'électeur de Mayence, le prince de Worms, le prince de Spire, celui de Nassau-Weilbourg et Usingen, le margrave de Bade, le prince de Salm, les wild- et rhingraves de Stein et Grumbach, les princes de Linange et de Dürkheim, le comte de Falkenstein, les comtes de Linange-Westerbourg, Dachsbourg et Guntersblum, les comtes de Lowenhaupt et Manderscheid, ceux de Wartenberg, Degenfeld, Sickingen, Hallberg, les barons de Dalberg, les autorités des villes d'empire de Worms et de Spire, la chevalerie d'empire, tous les Etats d'empire et leurs vassaux, de même que toutes les corporations soit civiles soit du clergé, incompatibles avec la souveraineté du peuple, sont déclarés déchus de leurs prétentions à cet état ou à quelques-unes de ses parties, et sont anéantis à jamais les droits de souveraineté qu'ils avaient usurpés ;

4° Toutes les personnes d'autorité désignées dans l'article précédent, qui seraient saisies, travaillant au recouvrement de leurs soi-disant droits et prétentions aux pays qui composent cet état, où l'on ne reconnaît d'autres droits que ceux de citoyens libres et égaux, seront, eux et leurs fauteurs ou complices, punis de mort ;

5° Le présent décret sera incessamment imprimé, envoyé à toutes les municipalités, affiché et proclamé solennellement[8].

 

Trente coups de canon annoncèrent au pays rhénan la déchéance de ses anciens souverains. Les commissaires, Haussmann, Merlin, Reubell, Simon, et le général Custine, accompagné de son état-major, se rendirent dans la salle des séances. Ils promirent aux députés la protection et l'amitié de la nation française. Le monde entier, leur dit Haussmann, a les yeux sur vous ; vous allez détruire les vieux abus et fonder une constitution libre ; on espère de vous la constance et la fermeté que réclame un si grand dessein. Custine parla longuement ; il rappela son récent voyage à Paris ; il avait vu trente mille hommes voler au secours de la Belgique envahie ; il avait pris part aux délibérations du Conseil exécutif ; il était certain du succès. Nous sortirons vainqueurs, s'écriait-il, et tant que mon cœur battra, j'emploierai toutes mes forces pour empêcher qu'un despote asservisse de nouveau ce peuple libre ! Hofmann répondit, au nom de la Convention rhéno-germanique, en louant la générosité des Français qui ne combattaient que pour affranchir les opprimés et pour élever le genre humain à la dignité divine de sa nature ; il les remercia de prêter leur bras et l'appui de leur vigueur gigantesque à un état encore mineur ; il félicita Custine de ses exploits et le pria de ne pas remettre l'épée au fourreau tant que le monstre de la royauté ne serait pas terrassé : Non seulement le peuple rhéno-germanique, mais l'humanité entière attend dans l'angoisse l'affermissement de sa liberté ou la perpétuité de sa servitude. Tu as juré d'anéantir les hordes des tyrans, ne viole pas ce serment, et l'univers délivré s'étonnera qu'il y ait jamais eu des rois ! Custine, touché, embrassa Hofmann, vanta son patriotisme, et s'excusa de l'avoir, deux mois auparavant, menacé de la potence. Puis, les commissaires embrassèrent Hofmann. Vous vous êtes déclarés libres, dit Reubell, et je vous embrasse ; un homme libre n'embrasse pas un esclave. La scène, rapporte Simon, était attendrissante et faisait couler des larmes de joie ; tout le monde fut électrisé ; les deux peuples, dans la personne de leurs représentants, se donnaient le baiser fraternel. Custine et les conventionnels français quittèrent la salle au milieu des applaudissements et de longues acclamations d'allégresse. Mais l'émotion des membres de l'Assemblée rhéno-germanique .n'était pas à bout ; au bruit du canon et aux sons de la musique guerrière qui jouait la Marseillaise et le Ça ira, ils se jetèrent dans les bras les uns des autres et jurèrent avec feu de rester éternellement unis. Böhmer racontait le jour même, dans sa gazette, que ce spectacle indescriptible aurait épouvanté les despotes et fait tomber les armes des mains de leurs esclaves[9].

La Convention teutonique eut sûrement, dans cette séance du 18 mars, décrété d'enthousiasme l'incorporation du pays rhénan à la France. Les députés assuraient qu'ils désiraient sincèrement l'annexion. J'ai une certitude morale, écrivait Simon à Le Brun, que je pourrai vous annoncer le décret de réunion par la dépêche prochaine. Mais, la veille, l'Assemblée avait décidé qu'elle ne prendrait aucune mesure importante sans l'avoir mûrement examinée dans trois séances successives. Elle agita donc le 19, le 20 et le 24 mars la question suivante : le nouvel Etat, proclamé le 18 mars et baptisé au son de toutes les cloches de Mayence, serait-il indépendant ? Se mettrait-il sous la protection de la France ? Ou plutôt ne devait-il pas demander son incorporation pure et simple à la grande République ? Adam Lux opina qu'il valait mieux, en principe, organiser un petit Etat indépendant et qu'en tout cas, dans l'avenir, lorsque la liberté serait définitivement conquise, il fallait entrevoir la possibilité d'une séparation salutaire et d'une division en plusieurs républiques ; mais, ajoutait-il, on n'était pas assez nombreux pour résister aux ennemis du dedans et du dehors, et l'on devait avant tout coaliser les peuples contre le despotisme. Comme Lux, les matadors, Dorsch, Wedekind, Metternich, Hofmann. Forster, soutinrent qu'il fallait se donner à la France. Une république indépendante, disaient-ils, ne pouvait tenir tête aux princes allemands, ses adversaires naturels ; même en s'alliant aux Français, elle n'aurait pas la sécurité nécessaire ; elle ne saurait les indemniser, et, du reste, ils revendiquaient les biens des seigneurs, des nobles et des couvents. Le meilleur, l'unique parti était donc de s'offrir à la France et de lui faire don du nouvel Etat. Vainement, dans la séance du 21 mars, un membre pria l'Assemblée de ne pas brusquer sa décision. Forster entraina ses collègues par un discours plein de fougue et d'élan. Il déclara que la dernière heure de la tyrannie avait sonné, que la victoire de la raison était complète, et que l'humanité outragée entrait vraiment en possession de ses droits. Oui, une nouvelle ère s'ouvrait, et l'époque révolutionnaire, l'époque de la délivrance du genre humain, avait une aussi réelle importance que celle qui commençait huit cents ans auparavant. Les représentants du peuple rhéno-germanique avaient planté l'étendard de la souveraineté populaire sur la rive du grand fleuve. Mais après avoir fait le premier pas, ils devaient faire le second. Ils avaient proclamé la liberté de leurs concitoyens ; ils devaient à présent leur donner l'impénétrable bouclier qui leur garantirait à son ombre la jouissance de cette jeune liberté. Ne savaient-ils pas l'approche des ennemis ? Où est l'armée que vous opposerez à cet adversaire ? où sont les trésors que la guerre dévore ? où est le courage qui triomphe de tous les obstacles et qui aime mieux se jeter dans une mort certaine que de survivre aux funérailles de la liberté ? Le nombre de vos soldats n'est-il pas insignifiant ? Une longue et énervante oppression n'a-t-elle pas amorti leur ardeur ? Votre avoir n'a-t-il pas été dissipé par les princes et leurs valets ? Mais vous me montrez les vaillantes cohortes de vos libérateurs : le noble peuple des Français est en armes et il étend ses ailes protectrices sur les peuples faibles et peu belliqueux qu'il arrache au despotisme. Je les vois et m'étonne avec vous ; je vois des guerriers libres sacrifier leur vie, pour le bonheur des autres hommes, avec une grandeur d'âme sans exemple ; je les vois se précipiter dans la mêlée, leurs éclairs écrasent les hordes des esclaves ; ils croisent la baïonnette, ils font brèche. Victoire ! Victoire sur victoire ! les ennemis humiliés implorent grâce et votre drapeau de liberté flotte au vent !... Mais regardez dans l'avenir. La haine des tyrans ne meurt qu'avec eux. Quand ils seront guéris de leurs blessures, quand ils auront aiguisé de nouveau leurs épées, ils essaieront encore d'abattre et de fouler aux pieds la liberté qui germe et s'élève. Soudain, à l'improviste, ils surprendront vos tranquilles demeures ; vos défenseurs seront loin ; ils vous immoleront, vous, vos innocentes compagnes, et vos enfants jouant sur les genoux des vieillards ; l'incendie consumera vos chaumières ; les cendres et des amas de ruines marqueront l'endroit où la liberté, le bonheur, l'amour habitaient naguère ! Vous frissonnez à cette image terrible ! Ah ! sauvez, sauvez rapidement par une sage résolution, la vie, la félicité, la liberté de ceux qui vous ont envoyés ; assurez pour toujours contre la perfidie et l'humeur sanguinaire des ennemis un bon peuple qui ne peut se protéger lui-même. Conservez dans le pays vos champions et vos libérateurs ; attachez-vous à eux, serrez-les dans vos bras, ne les laissez point partir, jurez de leur rester à jamais fraternellement unis, prononcez cette grande et décisive parole : Les Allemands libres et les Français libres sont désormais un peuple inséparable ![10] Ce discours emporta le vote. Hofmann déclara qu'il fallait clore le débat, et, sur la proposition de Metternich, la Convention rhénane décréta par acclamation la réunion de l'Allemagne libre à la République française.

Ce décret du 21 mars, le plus important, disait Böhmer, qui eût jamais été donné et sera donné dans ces contrées, fut aussitôt publié au son des cloches et au bruit du canon. Ce n'est pas, écrivait Simon à Le Brun, une légère satisfaction pour moi d'avoir enfin atteint le but à travers toutes les difficultés que l'intrigue et la malveillance se sont évertuées à nous susciter[11]. Il ajoutait qu'il y aurait, le soir même, comédie, illumination, bal et grand souper. Mais on était en carême ; on craignit de scandaliser la population par le spectacle de la danse et de réjouissances tumultueuses ; on arrêta que les fêtes n'auraient lieu que lorsque la Convention nationale de France aurait accepté le vœu de réunion départementaire.

Forster avait rédigé le décret en ces termes :

La Convention nationale rhéno-germanique, considérant que ce n'est qu'à la République française et à ses armes victorieuses, que l'Etat naissant du pays situé sur la rive gauche du Rhin entre Landau et Bingen doit son indépendance décrétée le 18 mars 1793 ; que les liens de l'amitié, de la reconnaissance et des avantages réciproques invitent les deux nations à une réunion fraternelle et indissoluble, décrète à l'unanimité : que le peuple rhéno-germanique libre veut l'incorporation à la République française, et la lui demande ; qu'il sera nommé une députation, prise dans le sein de la Convention nationale rhéno-germanique, à l'effet de manifester ce vœu à la Convention nationale de France[12].

 

La députation se composait de trois membres : Forster, Lux et Patocki. Tous trois savaient parfaitement le français. La Convention avait décidé de retarder leur départ jusqu'à l'arrivée de Fabricius et de Reissinger qui devaient signer, au nom de la ville de Spire, le décret d'incorporation. Mais Forster démontra, dans la séance du 24 mars, qu'une telle résolution serait contraire à la dignité de l'Assemblée[13]. Les trois Mayençais partirent le lendemain. Haussmann les accompagnait et les présenta le 30 mars à la Convention nationale de France comme les députés des peuples libres de la Germanie[14]. Forster prit la parole après Haussmann et prononça le discours suivant :

Citoyen président,

Députés vers l'auguste assemblée des législateurs de la France, par un peuple régénéré, dont les guerriers de la liberté ont brisé les fers, nous vous demandons la permission de parler en son nom et d'offrir ses adorations à la divinité, qui, du fond de ce sanctuaire, règnera sur l'univers. Après avoir juré de vivre libres ou de mourir, la seule ambition qui convienne aux hommes affranchis, c'est celle de devenir libérateurs à leur tour et de partager, pour cet effet, le nom du seul peuple de la terre qui ait jamais exercé cette sublime fonction. C'est là le vœu du peuple germanique sur la rive gauche du Rhin, que ses représentants rassemblés à Mayence ont émis au bruit du canon prussien. Ce canon, tiré pour alarmer les enfants nouveau-nés de la liberté, n'a fait que provoquer leur courage, et n'a servi qu'à rendre plus imposante la promulgation de leurs décrets. Le grand fleuve qui nous sert de rempart naturel ; Mayence, imprenable en elle-même, défendue par la tête du pont, approvisionnée pour dix-huit mois et couverte par une armée nombreuse, pourvue de tous les moyens pour humilier l'orgueil des rois conjurés, et ne respirant que les combats ; la présence enfin de vos collègues et d'un général qui a su mériter la confiance d'un peuple dont il a chassé les tyrans, voilà, citoyen président, les garants de notre indépendance et le présage des nouvelles victoires que la République française remportera bientôt sur un ennemi profondément atteint, qui sera la victime de ses propres efforts. Oui, c'est sur les bords du Rhin que vous allez reconquérir et Liège et Aix-la-Chapelle, et que vous fermerez à jamais l'entrée de la terre libre aux myrmidons des despotes. Les Allemands libres qui vous demandent la réunion, sont ambitieux de partager la gloire qui attend le nom français[15].

 

Puis Forster lut l'adresse de la Convention nationale rhéno-germanique à la Convention nationale française. C'était lui qui l'avait rédigée dans les deux langues. Quatre-vingt-dix députés l'avaient approuvée et signée[16]. Le peuple rhéno-germanique, disait Forster, avait renversé les trônes de vingt petits tyrans qui s'engraissaient de la sueur des pauvres, et les représentants qu'il avait choisis et investis de sa confiance et de la plénitude de son pouvoir, demandaient sa réunion à la grande République. Le pays rhénan n'appartenait-il pas à la France dans les premiers siècles ? Les rois ne l'avaient-ils pas convoité ? Aujourd'hui, redevenu libre, il se donnait, dans un élan de reconnaissance, à ceux qui brisaient sas chaînes. Nous venons vous offrir, ajoutait Forster, un pays où la nature a répandu ses dons d'une main prodigue, un sol fertile, un climat tempéré, des coteaux couverts de vignes, une ville dont le site incomparable est embelli par la majesté du fleuve qui baigne ses murs. Nous venons vous offrir Mayence, le siège de ce prêtre superbe, dont l'ambition démesurée ne lui vaudra dans l'histoire que le nom d'incendiaire ; Mayence où le commerce d'Allemagne viendra se concentrer entre les mains du négociant français ; Mayence, la clef de l'empire germanique, et la seule ouverture par laquelle vos provinces étaient accessibles à vos ennemis ; Mayence reconnu par les maîtres de l'art pour un chef-d'œuvre de fortification où les efforts des despotes ligués contre vous viendront échouer !

Les plus vifs applaudissements accueillirent le discours de Forster et l'adresse de la Convention nationale rhéno-germanique. Le président Jean de Bry donna l'accolade aux trois députés, et l'Assemblée décréta par acclamation que les villes et communes de Mayence, de Worms, de Dürkheim, de Grünstadt, etc., faisaient partie intégrante de la République française[17]. Le lendemain soir, Forster se rendait au club des Jacobins et y prononçait un second discours[18]. Il répéta que la nouvelle République devait joindre à son domaine les terres de l'ancienne Gaule ; il rappela que le Rhin formait la limite naturelle de la France, que Mayence couvrait les frontières orientales, que le pays réuni la veille fournirait à la République cent cinquante millions de biens nationaux. Le caractère des Allemands, ajoutait Forster, diffère infiniment de celui des Français ; nous ne possédons pas cette vivacité d'esprit, cette fougue qui vous caractérise ; nous sommes plus lents, mais quand nous avons pris un parti, nous y tenons jusqu'à la mort. Après lui, Adam Lux et Patocki jurèrent de vivre en républicains français ou de mourir[19].

 

II. Pendant que Forster et ses deux collègues couraient sur le chemin de Paris pour offrira la France le pays rhénan, la Convention de Mayence, dirigée par Hofmann, prenait contre ses adversaires les mesures les plus rigoureuses. Déjà Merlin et Reubell avaient fait déporter tous les moines au delà du Rhin. L'endurcissement est tel, disait Forster le 14 mars, qu'il faut user de la plus implacable sévérité ; tous les jours on déporte sur l'autre rive du fleuve trente à quarante personnes qui refusent l'hommage ; s'il est nécessaire, on finira par dépeupler la ville, et il comparait la révolution mayençaise à une cure énergique et violente qui exige des vomitifs et des amputations[20]. Le 27 mars, paraissait un décret de l'Assemblée sur les non-jureurs, leurs familles et leurs biens ; décret terrible, que les officiers de la garnison française jugèrent barbare et que Bohmer déclarait arraché par la triste nécessité de la guerre[21].

Tous ceux qui, dans trois jours, n'auraient pas prêté le serment civique, seraient expulsés, ainsi que leurs familles. Les femmes des privilégiés et des fonctionnaires publics, les veuves et les filles majeures des ci-devant nobles, étaient tenues de jurer. Un étranger ne pouvait rester dans le pays qu'après avoir fait le même serment et prouvé la pureté de ses intentions par le témoignage de douze bons citoyens de la localité qu'il habitait. Les biens, meubles et immeubles de tous ceux qui refuseraient l'hommage ou qui seraient convaincus d'entretenir des intelligences avec l'ennemi et de prendre une part active à ses plans, seraient confisqués. La femme d'un déporté qui demanderait le divorce, parce que son mari refusait le serment, conserverait sa propriété et la jouissance de sa fortune. Les fils des déportés qui auraient atteint leur 21e année, n'auraient droit à leur part de patrimoine que s'ils prêtaient le serment.

Un autre décret du 28 mars déclara émigrés tous ceux ou celles qui avaient fui depuis l'arrivée des Français. On leur enjoignit de rentrer sous trois semaines, de se présenter à la municipalité de l'endroit où ils étaient domiciliés, de prêter le serment civique et de renoncer solennellement à leurs privilèges antérieurs. Quiconque entretiendrait les moindres rapports avec les émigrés, subirait le double châtiment de la déportation et de la confiscation. Tout émigré ou déporté qui prendrait les armes contre le nouvel état ou la République française, serait puni de mort.

Le 29 mars, autre décret. L'Assemblée savait qu'un grand nombre de fonctionnaires et de serviteurs de l'ancien régime étaient encore à Mayence et n'avaient pas juré. Elle décréta que tous les individus appartenant au personnel de l'ancienne cour, les huissiers, coureurs et domestiques du gouvernement, des tribunaux, du vicariat, du Grand-Chapitre, des églises et des couvents, tous les laquais des aristocrates, valets de chambre, cochers, chasseurs, piqueurs, coureurs, heiduques, cavaliers de la garde et tous les anciens soldats de Mayence, qu'ils fussent ou non au service, devaient, s'ils n'avaient pas prêté le serment obligatoire, se trouver le lendemain matin à huit heures sur la place du Château, avec toute leur famille pour être déportés. Quiconque désobéirait à cet ordre, serait arrêté et puni comme espion ou comme traître. Le décret reçut son exécution. Quatre à cinq cents personnes se rendirent le 30 mars, sur la place du Château. Les clubistes leur firent traverser le pont du Rhin et les abandonnèrent au pied des remparts de Kastel. Les exilés marchèrent aux avant-postes prussiens en agitant leurs mouchoirs ; un officier vint à leur rencontre et les conduisit au camp de Hochheim[22].

Mais pendant que l'Assemblée décrétait les déportations, Custine était rejeté sur Landau. Le Çà ira, écrivait Kastner, se change en Ça s'en va ! Faut-il vous le dire, écrivait un pamphlétaire, ces maudits Prussiens viennent troubler la fête. Nous ne les craignons pas : Mayence est inaccessible, inattaquable, imprenable ; Custine l'a dit, et Custine ne ment pas. Mais malgré cela on tremble ; ils sont horriblement près. Custine a promis de les battre, et il les battra ; mais je crains qu'après les avoir battus, il ne se sauve encore, comme il fait toujours[23]. Bientôt arrivaient à Mayence les grenadiers de Neuvinger, éperdus, épouvantés, criant que les Prussiens les avaient écrasés sous le nombre et que Custine les menait à la boucherie[24]. Les représentants Couturier et Dentzel quittèrent en hâte Bergzabern et ces trente-deux communes réunies qui se voyaient à l'embouchure du canon de leur ci-devant despote[25]. Les alliés occupèrent le territoire de Worms et de Spire. Partout ils annonçaient la fin de la comédie. Partout les clubistes et gallomanes étaient arrêtés, chargés de coups, jetés en prison. On les forçait, au milieu des rires et des huées, d'abattre de leurs propres mains l'arbre de la liberté, de brûler les papiers du club, de balayer les immondices des casernes françaises, de démolir les retranchements élevés par les républicains. Le maire de Worms, l'intègre et habile Winckelmann, était envoyé à Königstein, après avoir subi toute sorte d'indignes traitements[26].

L'ennemi, disaient les journaux de Paris, n'a pu effrayer la Convention rhéno-germanique ; elle continue de délibérer avec beaucoup de calme et de dignité sur les moyens d'assurer les droits du peuple souverain[27].

En réalité, la crainte s'était emparée des cœurs. Déjà, le 29 mars, les commissaires de la Convention faisaient enlever et envoyer aussitôt à Belfort seize des bourgeois les plus considérables de Mayence qui serviraient d'otages[28]. Ils projetaient même, à l'instigation de Simon, d'expédier dans l'intérieur de la France quelques centaines de notables du pays rhénan. Mais il était trop tard. Les nouvelles désastreuses se succédaient. Custine ordonnait à Schaal de quitter Mayence sans retard avec deux bataillons de grenadiers, le 14e régiment de cavalerie et un grand convoi d'artillerie. Merlin et Reubell, prévoyant le siège de la ville, résolurent d'accompagner ce détachement. Ils laissèrent leurs pleins pouvoirs à Hofmann et emmenèrent avec eux seize nouveaux otages. Le 30 mars, dans l'après-midi, ils ralliaient à Oppenheim un escadron de chasseurs à cheval et six bataillons d'infanterie commandés par le général de Blou. Mais la colonne fut mise en déroute à Guntersblum et reflua sur Mayence. Les Prussiens délivrèrent les otages et arrêtèrent plusieurs clubistes, Köhler, et deux membres de la Convention teutonique, Blau et Scheuer. Trois autres députés, Dorsch, Blessmann, Wedekind, s'étaient joints à la colonne ; Dorsch put rentrer dans Mayence ; Blessmann et Wedekind parvinrent à gagner l'Alsace. Mais quelques jours plus tard, deux patriotes renommés tombèrent entre les mains des ennemis : Arensberger, chapelain de Kastel, et Arand, curé de Nackenheim et député, qui fut reconnu à Bodenheim, sous un déguisement, par un de ses paroissiens. Tous ces prisonniers, Köhler, Blau, Scheuer, Arensberger, Arand, furent menés à Königstein. Durant le trajet, et surtout dans les rues de Francfort, la foule les couvrit d'injures et d'outrages. A la vue de ceux qu'ils regardaient comme tes auteurs de leurs maux, les déportés mayençais, pris d'un accès de rage, les accablèrent d'invectives et, se jetant sur eux, la canne levée, les rouèrent de coups. Blau, déjà souffrant, mais stoïque et inébranlable, faillit périr sous la bastonnade[29].

Le 30 mars, à la nouvelle du départ des commissaires, la Convention rhéno-germanique n'avait pas dissimulé sa colère. Onze députés, Berg, Blau, Blessmann, Dorsch, Dier, Gimpel, Müller, Pétri, Scheuer, Wedekind et Weinert, avaient quitté leur poste à la sourdine, sans donner une excuse ni demander un congé[30]. Böhmer et Metternich firent décider que les membres de l'Assemblée qui souillaient par une fuite honteuse la foi solennellement jurée au peuple, seraient dénoncés à la Convention nationale de France comme déserteurs et privés — de tout emploi public durant dix ans. Dorsch écrivit le lendemain qu'il était parti pour servir d'interprète à Merlin de Thionville, et il joignit à sa lettre un certificat du représentant. Mais Böhmer objecta que Dorsch aurait dû préférer son devoir de député aux fonctions de trucheman. Il assura, pour ranimer les courages, que les commissaires de la Convention avaient chargé le commandant de la ville de comprendre les patriotes dans le premier article de la capitulation. D'autres proposèrent de déclarer l'Assemblée en permanence et la patrie en danger. Mais la débâcle commençait. Les députés du plat pays, tout fiers d'abord et satisfaits de leur inviolabilité, et de leur indemnité quotidienne de douze livres, prenaient en dégoût une mission qui devenait périlleuse. N'avaient-ils pas voté les lois les plus indispensables ? L'incorporation de Mayence à la République française n'était-elle pas certaine ? Le 31 mars, jour de Pâques, l'Assemblée se réunit une dernière fois pour élire la nouvelle administration générale. Elle chargea Hofmann de faire les choix. Hofmann s'adjoignit dans cette tâche quatre autres députés, Lœwer, Metternich, Mossdorff, Schlemmer, et l'administration générale fut ainsi composée : Hofmann, président ; Boost, Cämmerer, Caprano, Clausius, Fuchs, Herrer, Koster, Lœwer, Metternich, Mossdorff, Schmilt, Goswin Schweicard, Solms et Stumme, presque tous membres de la Convention rhénane[31].

Ainsi finit la Convention de Mayence. Déjà les habitants recevaient l'ordre de tenir des seaux d'eau tout prêts dans les greniers, de planter des légumes dans les jardins, de se pourvoir de vivres pour sept mois. Dès les premiers jours de février le génie avait fait brûler les jolies maisons qui couvraient le Gartenfeld et abattre tous les arbres autour de la ville. La grande allée du Rhin n'existait plus ; ses tilleuls et ses châtaigniers séculaires étaient tombés sous la hache du soldat. La Favorite avait été démolie, et des redoutes s'élevaient sur l'emplacement de ce magnifique jardin de plaisance. Le blocus commençait, et bientôt personne ne reconnut plus du dehors cette cité naguère si animée, si pleine de mouvement et de bruit, où les cloches sonnaient du matin au soir, où tant de gens allaient et venaient, entraient, sortaient par toutes les portes : plus de promeneurs dans la campagne, plus de voitures et de carrosses sur les chemins, plus d'autre cloche que celle de la cathédrale, plus d'autre bruit que les coups de canon, et ce bruit seul révélait qu'il y avait encore des hommes derrière les remparts[32]. Les journaux cessèrent de paraître. Le club se ferma. Les choses les plus importantes, rapporte un témoin, avaient été réglées dans la Convention teutonique, et les frères ne pouvaient plus, à cause de leurs occupations militaires, assister aux séances[33].

Mais les clubistes siégeaient encore dans la municipalité, dans le comité de surveillance et de sûreté, dans l'administration générale, et ces comitistes, ces arlequins à l'écharpe tricolore, comme disaient les Mayençais, s'étaient emparés de tous les emplois[34]. Hofmann, maître absolu de Mayence depuis le départ de Forster, toujours certain de l'assentiment de Reubell et de Merlin, poursuivit sans relâche et sans pitié les déportations. 15.000 personnes abandonnèrent la ville, soit de leur plein gré, soit à leur corps défendant. Il n'y avait plus à Mayence que sept ecclésiastiques, et le conseil de guerre dut ordonner que tous les gens de métier nécessaires au service de l'armée, cordonniers, tailleurs, charpentiers, serruriers, resteraient dans la place, même s'ils étaient non-jureurs.

Mais ces ouvriers montrèrent pendant le siège la plus mauvaise volonté. Loin de trouver secours et appui dans la population, il fallut employer une partie des troupes à faire la — police intérieure et à éteindre les incendies. Après la reddition, les blessés et les otages français durent quitter la cocarde ; nous sommes, écrivait un chirurgien, regardés comme des bêtes fauves, tout le monde nous jette la pierre, et le nom de régicide est la dénomination la moins outrageante qu'on nous accorde. Ce fut là qu'aboutit à Mayence, en 1793, le mouvement révolutionnaire ! Malgré les fréquentes et nombreuses déportations, a dit le général d'Oyré, les habitants étaient si mal affectionnés que le gouvernement électoral n'en compta que cent cinquante attachés à nos principes, et les deux tiers mêmes refusèrent de se retirer en France[35].

 

 

 



[1] On essaie ici de reconstituer la liste de ces députés : Jacob Albrecht (Kalkofen) ; Karl Friedr. Ampt (Flonheim) ; Arand (Nackenheim) ; Heinrich Armbrust (Hefersweiler) ; Adam Baum ; Joh. Adam Bauer (Tiefenthal) ; Phil. Adam Becker (Oberlustadt) ; Jos. Berg (Budenheim) ; Bittong (Bingen) ; Fried. Blantz (Potzbach) ; Blau (Bodenheim) ; Blessmann (Karlsberg) ; Böbmer (Ober-Olm) ; Peter Bohlander (Höringen) ; Boost (Wendelsheim) ; Caprano (Dudenhofen) ; Chelius (Ilbesheim, dans le comté de Falkenstein) ; Christoph-Heinrich Clausius (Bobenheim) ; Joh.-Jacob Decker (Obrigheim) ; Dier ; Kaspar Dietz (Sarm-Eheim) ; Dorsch (Neu-Bamberg) ; Joh. Dotzauer (Nieder-Saulbeim) ; Heinrich Eckard (Rudolfskirchen) ; Eckel (Mayence) ; Joh, Enger- W onrast (Reichsthal) ; Daniel Ernst (Hertlingshausen) ; Georg — Heinrich Fischer (Kindenbeim) ; Joh.-Adam Flicker (lmbsbach) ; Forster (Mayence) ; Ludwig Franck (Fussgönheim) ; J.-D. Frantz (Alsenbrück) ; Johann Fruth ; Ant. Fuchs (Eckelsheim) ; Georg Gabel (Nieder-OIm) ; J.-B. Gaul (Zornheim) ; Christian-Friedr. Geiger (Mühlheim an der Eiss) ; Peter Geipp (Relsberg) ; J.-Friedr. Gerhardi (Schornsheim) ; Germann (Kirchheim an der Eck) ; Friedrich G. Gienant (Winnweiler) ; Peter Gimbel (Heidesbeim) ; Gœbel ; Friedr. Güllich (Gommersheim) ; Léon. Haas (Wattenheim) ; Joh. Hangen (Sprendlingen) ; Hauser ; Ludwig Heisel (Worms) ; Phil. Herrer (Harthausen) ; Hierthes (Essingen) ; Hofmann (Mayence) ; Andreas Hoffmann (Niederlustadt) ; Hbpfner (Battenberg et Klein-Karlbach) ; Heinrich-Adolf Horn (Bissersheim) ; Bened. Iselhard (Freisbach) ; Caspar Jager (Schönborn) ; Heinrich Jenner (Hahnheim) ; Heinrich Kaiser (Algesheim) ; Wilhelm Katiffeld (Wartenberg) ; Georg Keber (Frankeneck) Klein ; Ad.-Michael IŒngmalln (Altdorf) ; Knode (Worms) ; Michael Konrad (Nussbach) ; Samuel Kôster (Colgenslein et Heidesheimj ; Georg Kübler (Sanct-Alban) ; Mich. Lantzer (Morbach) ; Joh. Lidi (Niederliochstadt) ; Lindejiburger (Dittelsheim) ; Lœwer (Roxheim) ; Jac. Looss (Ober-Saulheim) ; Lux (Volxheim) ; Christ. Manweiler (Finkenbach) ; Joh.-Marx (Schweisweiler) ; Matthaeus Mayer (Landstuhl) ; Peter Meininger (Erpolzheim) ; Joh.-Georg Messer (Weissenheim) ; Metternich (Mayence) ; Meuth. (Wöllstein) ; Mossdortf (Grünstadl) ; Christ. Môser (Ungstein) ; Joh. Muldenberger (Dietersheim) ; Erasmus Muller(Ockenheim) ; Georg Münch (Kallsladt) ; Georg-Phil. Munck (Asselheim) ; Conrad Neuhauser (Mertesheim) ; Mich. Nunheim (Bretzenheim et Zahlbach) ; Georg-Friedr. Oehler (Gross Bockenheim) ; GeorgHeinrich Olstatt (Walilheim) ; Parcus (Alt Leiningen) ; Patocki (Siefersheim) ; Petri (Gerolsheim) ; Joh. Prinz (Lohnsfeld) ; Racke (Morschheim) ; Razen (Mayence) ; Nicolaus Reuter (Quirnheim) ; Joh.-Jac. Rittersbacher (Kerzenheim) ; Mich. Rômmer (Reipoldskirchen) ; Rompel (Rugheim) ; Peter Rörig ; Mich. Schaefer (Herxheim) ; Georg Schefer (Göllheim) ; Scheuer (Klein — Winternheim) ; Scblemmer (Gumbsheim) ; Fred. Schmitt (Sausenheim) ; Peter Schraut (Albsheim) ; Christ. Schiitz (Sembach) ; Jacob Schwallbach (Marienboml ; Lorenz Seib (Kastel) ; Solms (Diïrkheim) ; Martin Steingasser (Weisenau) ; Philipp Streiss (Klein Bockenheim) ; Stumme ; Wilhelm Tischleder (Dromersheim) ; Caspar Trümpler (Monsheim) ; Carl-Joachim Vola (Uffhofen) ; Voll ; J.-Georg Wagner (Bornheim) ; Georg-Heinrich Weber (Münchweiler) ; Wedekind (Pleitersheim) ; Daniel Weinert (Guntersblum) ; Wendelinus Weadel (Büdesheim) ; Weslhofen (Mayence) ; Peter Wilz (Eisenberg) ; Georg Wirth (Ebertsheim) ; Friedr. Wittig (Neu-Hembsbach) ; Christian Wolf (Drais). On laisse de côté les deux députés de Spire, Fabricius et Reissinger, qui n'ont pas siégé.

[2] Plus de 130 députés (Hofmann, Des nouvelles limites de la République française, p. 5). Germann ne partit que le 27 mars et Rittersbacher, que le 28, Wilz ne fut élu que le 27 (Remling, I, 275, 280, 281).

[3] Cf. Klein, 567, les signatures du décret du 21 mars (A. N.) et Mainz im Genusse der Freiheit, 192.

[4] Voir sur Mossdorff, né le 6 avril 1758, à Eckartsberga (Saxe), mort à Mayence, le 14 juin 1843, Remling, I, 266 et II, 376 ; Bockenheimer, Gesch., 1813-1814, 103-104 ; Hausser, III, 242. Il était greffier du tribunal de Vieux-Linange et beau-frère de Parcus. Rudler le jugeait plus tard bon administrateur, probe et actif, et Shée disait de lui : La manière distinguée dont il remplit sa place, sa réputation de zèle, d'intégrité, de capacité et de civisme m'ont fait passer sur sa qualité d'étranger, et les preuves multipliées qu'il a données de la fermeté de ses principes politiques, ne laissent aucun doute sur sa conduite future. Jeanbon Saint-André le regardait comme un esprit de tout temps tourné du côté de l'intrigue et assure qu'il a vendu un domaine près de Landau pour employer le produit aux agiotages d'un bas et vil commerce d'argent, que le public voit de très mauvais œil, qu'il a acquis à Mayence une maison vendue par le Domaine, et de l'adjudication de laquelle les concurrents furent écartés par son influence. (30 nivôse an XIII) ; mais il le reconnaît zélé, actif et capable. (5 avril 1812, A. N.).

[5] Cf. sur le Mayençais Adam Lux (né à Obernbourg, le 27 déc. 1765) ; Klio, 1795, vol. I, p. 334-354 et Justin Kerner, Bilderbuch aus meiner Knabenzeit, p. 75-92 ; Journal de la Montagne, 4 sept. 1793 ; Forster, IX ; l'excellent article de Louis Bamberger, Revue moderne, 1er oct. 1866, p. 109-130 ; Vatel, Charlotte Corday, 1864-1872, I, passim et II, 108-110 ; Wallon, Hist. du trib. révol., 1880, I, 218-224 ; Welschinger, Le Roman de Dumouriez, 1890, p. 127-177 ; Borckel, Adam Lux, ein Opfer der Schreckenszeit, 1892. La Liste des clubistes le nomme un paysan philosophique.

[6] Rapport de Simon, 13 août 1793 (A. E.) ; Forster, VIII, 334 et 336 ; Maint im Genusse der Freiheit, 175. L'administration générale subsistait encore provisoirement (Nau, IV, 474-475).

[7] Mainzer Zeitung, 18 mars 1793 ; Moniteur, 29 mars et 1er juillet ; Darst., 801-803 ; Belag., 156 ; Schaber, 26 ; Schaab, 334 ; Klein, 455-456 ; Nau, IV, 456-472. Le soir, dit Simon, on représenta au spectacle d'une société d'amateurs une pièce de circonstance.

[8] Décret de la Convention nationale de Rhineaux (sic) germanique, assemblée à Mayence, du 18 mars 1793 sur l'abolition des pouvoirs arbitraires et usurpés dans l'étendue du pays depuis Landau jusqu'à Bingen (texte français). Cf. Chronique de Paris, 2 avril 1793, et Le Batave, n° 43.

[9] Mainzer Zeitung, 18 mars 1793 ; Darst., 805-808, 836-849 ; Nau, IV, 497-498 ; Klein, 457-461 ; Moniteur, 29 août 1793 (procès de Custine, déposition de Hofmann) ; cf. le rapport de Simon et sa lettre du 18 mars : Le canon ronflait sur les remparts pour annoncer la nouvelle République ; les Prussiens, vis-à-vis de nous, parurent effrayés et se mirent sous les armes.

[10] Klein, Forster in Mainz., 420-425 ; Nau, IV, 400-404 et 501.

[11] Simon à Le Brun, 18 et 24 mars (A. N. D. XLII, 4) ; cf. dans Le Batave, n° 46, une lettre de Mayence du 23 mars : Le 18, nous avons proclamé la déchéance de tous nos tyrans, et le 21, émis à l'unanimité et par acclamation, le vœu de réunion. La République est inabordable à l'avenir ; les rois de France et leurs ministres avaient bien senti ce vaste avantage ; mais il fallait la force irrésistible d'une république pour l'acquérir et le conserver.

[12] Décret de la Convention nationale rhéno-germanique assemblée à Mayence, du 21 mars 1793 (texte français).

[13] Nau, IV, 527-528.

[14] Rec. Aulard, II, 581.

[15] A. N. C. 250.

[16] Voici leurs noms, dans l'ordre où ils ont signé. Tous ont ajouté à leur signature le nom de l'endroit qu'ils représentent. Hofmann, Forster, Franck, Fuchs, Meuth, Gerhardi, Schlemmer, Parcus, Solms, Wedekind, Razen, Albrecht, Ampt, Armbrust, Flicker, Arand, Blanlz, Blau, Bœhmer, Berg, Bohlander, Becker, Biessmann, Caprano, Chelius, Dorsch, Dolzauer, Dietz, Decker, Jenner, Eckel, Enger-Wonrast, Eckard, Ernst, Fischer, Frantz, Gabel, Gienant, Güllich, Boost, Geipp, Geiger, Hangen, Horn, Hoffmann, Hierthes, Heisel, Jäger, Kaiser, Konrad, Koster, Kauffeld, Klingmann, Lantzer, Lux, Lidi, Loos, Müldenberger, Mayer, Manweiler, Mossdorff, Lœwer, Marx, Metternich, Clausius, Gimbel, Neuhauser, Nunheim, Müller, Olslatt, Ohler, Patocki, Prinz, Römmer, Rompel, Kübler, Scheuer, Steingässer, Schwallbach, Seib, Streiss, Schütz, Tischleder, Trümpler, Vola, Wendel, Weber, Wagner, Wittig, Wolf.

[17] Décret du 30 mars 1793. Les noms qui figurent dans le décret sont ceux des villes et communes représentées par les quatre-vingt-dix signataires de l'adresse : Mayence, Worms, Grünsladt, Dürkheim, Fusgönheim, Eckelsheim, Wöllstein, Schornsheim, Gumbsheim, Alt-Leiningen, Pleitersheim, Kalkofen, Flonheim, Hefersweiler, Imbsbach, Nackenheim, Polzbach, Bodenheim, Ober-Olm, Budenheim, Höringen, Oberlustadt, Karlsberg, Dudenhofen, Ilbesheim, Neu Bamberg, Nieder-Saulheim, Sarmsheim, Obrigheim, Hahnheim, Reichstal, Rudolfskirchen, Herllingshausen, Kindenheiin, Alsenbrück, Nieder-Olm, Winnweiler, Gommersheim, Wendelsheim, Relsberg, Mühlheim an der Eiss, Sprendlingen, Bissersheim, Niederlustadt, Essingen, Schönborn, Algesheim, Nussbach, Colgenstein et Heidesheim, Wartenberg, Altdorf, Morbach, Volxheim, Niederhochstadt, Ober-Saulheim, Dietersheim, Landstuhl, Finkenhach, Roxheim, Schweisweiler, Bobenheim, Heidesheim, Mertesheim, Bretzenheim et Zahlbach, Ocken heim, Wahlheim, Gross-Bockenheim, Siefersbeim, Lohnsfeld, Reipoldskirchen, Rugheim, Saint-Alban, Klein-Winternheim, Weisenau, Marienborn, Kastel, Klein Bockenheim, Sembach, Dromersheim, Monsheim, Uifhofen, Büdesheim, MÜDchweiler, Bornheim, Neu-Hembsbacli, Drais. La Convention a mis en tête de la liste Worms, Grünstadt et Dürkheim dont les représentants occupent sur la liste les numéros 47, 61 et 9.

[18] Journal des Jacobins, n° 385 et 386 (séance du 31 mars). Le même jour, dans la matinée, les trois députés recevaient à leur hôtel la visite des dames de la Halle qui les embrassèrent et leur souhaitèrent la bienvenue ; il nous en coûta, dit Forster, un assignat de 25 livres qu'il fallut donner aux poissardes (IX, 4). Cf. sur ces députations solennelles des harengères, Mém. de Saint-Simon, éd. Boislisle, VIII, 244.

[19] Le 29 juin 1793, la Convention décida qu'une indemnité quotidienne de 18 livres serait accordée, jusqu'à la fin de ses séances, aux trois députés. Forster mourut de maladie le 10 janvier 1794 ; cf. p. 27 ; voir sur Lux, p. 117 et sur Patocki, p. 11.

[20] Klein, Forster in Mainz, 444-445 ; cf. 317-319.

[21] Belag., 164 ; Darst., 822 ; Preuss. Augenzeuge, 153.

[22] Darst., 828.

[23] Sur Custine et Mayence, par un citoyen manqué, p. 8.

[24] Note inédite d'Eickemeyer (A. G.).

[25] Supplément au rapport de Couturier et de Dentzel, p. 136.

[26] Die Franzosen am Rheinstrome, 242-248 (cf. III, 15-27, le propre récit de Winckelmann) ; Moniteur, 9 et 17 juin 1793 ; Preuss. Augenzeuge, 202-204 ; Laukhard, III, 340-359, 471-472 ; Revolutions-Almanach von 1794, p. 319-321 ; Remling, I, 315-317.

[27] Le Batave, n° 56 (lettre de Mayence, du 1er avril) et Chronique de Paris, 4 avril 1793. Le 20 mars, le même journal annonçait que le célèbre Trenck allait s'établir à Mayence, pour y continuer une feuille périodique qui prêcherait les maximes de la liberté.

[28] Entre autres, Erasme Lennig.

[29] Custine, 255-257 ; Rebmann, Die Deutschen in Maine, an VII, p. 94-103 (extrait du récit de Köhler) ; Klein, 475 et 495 ; Bockenheimer, M. P., 3-4 ; cf. Simon, rapport du 13 août (A. E.), et Moniteur, 2 mai 1793.

[30] Le lendemain, 31 mars, on remarquait encore l'absence de Stumme. Nau, IV, 546, 552, 556.

[31] Nau, IV, 551-556 ; Klein, 510-511. Cämmerer et Schmitt figurent en tête de la liste. Ils n'appartenaient pas à la Convention, mais ils représentaient Bingen dans l'administration générale. Cf. sur Philippe-Joseph Cämmerer (né en 1758) et ses querelles avec le Grand Chapitre de Mayence le discours de Hofmann, Ueber Fürstenregiment, 17 ; bailli de Bingen, il avait été élu maire de la ville, et il devint juge de paix du canton d'Ober-Ingelheim. Quant à Frédéric Schmitt, homme de loi et procureur-syndic de Bingen, on le trouve plus tard juge de paix et président du tribunal civil à Mayence (Bockenheimer, M. P., 29, et Gesch., 163).

[32] Preuss. Augenzeuge, I, 233 ; Belag., 168-169 ; Klein, 368-370.

[33] Schaber, Tagehich, 51.

[34] Bauer et Steinem étaient employés dans le corps du génie, et Dresler au bureau des assignats. Illig était commissaire de police ; Kunkel, ainsi que Stöber, receveur de la douane ; Pierre, secrétaire de la municipalité ; Schmidle, capitaine en second des charrois ; Koch, commis aux magasins des effets militaires ; Sommer, commis de barrière ; Weiss, copiste de l'administration générale. Gutensohn était huissier du Comité de surveillance. Groa et Ohaus étaient pareillement huissiers. Falciola père, Bittong, Emmerich, Hafelin, Hauser, Melzer, Wilhelm Müller, Joseph Preyser appartenaient au Comité de surveillance et de sûreté générale (Falciola, président ; Bittong, secrétaire ; Preyser, rapporteur). J.-A. Becker était secrétaire du Comité des finances (après avoir été Kanzlist ou commis-rédacteur de la Convention rhénane, avec Falciola fils, Weiss et Kühné). Stenner de Bretzenheim et Wohlstadt étaient membres, et Falciola fils, secrétaire du Comité de liquidation (Darst., 912 ; Nau, IV, 530 ; papiers de Merlin, docum. des Aff. étrang.).

[35] Klein, 533 ; Reynaud, Merlin, II, 87 ; d'Oyré, Compar. des défenses de Mayence (A. G.) ; cf. Forster, IX, 93 (il dit qu'on a dû tenir en bride les bourgeois, mehr feindlich als gut gesinut, et id., 85, wegen der übeln Stimmung des Pöbels).