PARIS - H. FOURNIER ET Cie - 1841
I. — FLAVIUS JOSÈPHE À ROME. Triomphe de Vespasien et de Titus. — Premières démarches de Josèphe à Rome. — Guerre de Judée. — Affaire de Tarichée. — Siège de Jotapat. — Prophétie de Josèphe. — Siège de Jérusalem. — Josèphe à la cour des empereurs.II. — LES ANTIQUITÉS JUDAÏQUES ET LE MARTYRE DES MACHABÉES. Jugement d'Abrabanel sur Josèphe. — Josippon ben Gorion. — Controverse sur le passage relatif à Jésus-Christ. — Collaborateurs de Josèphe et composition de ses œuvres. - Examen des Antiquités et du récit de la mort des Machabées.III. —
Panégyrique des Romains par Josèphe. — Situation politique de Jérusalem et des partis. — Le droit du Zèle. — Falsifications de l'histoire par Josèphe. — Son invective contre les Grecs. — Ses accusateurs et ses défenseurs. — Bayle et Voltaire.IV. — CONCLUSION. - VALEUR HISTORIQUE ET LITTÉRAIRE DE FLAVIUS JOSÈPHE. Époque et mouvement de civilisation qu'il représente. — Son influence sur les littératures modernes. — Josèphe comparé aux grands historiens de l'antiquité.I. — FLAVIUS JOSÈPHE À ROMEL'an de Rome 822 et de l'ère chrétienne 71, au jour fixé
pour le triomphe de Vespasien et de Titus[1], vainqueurs de Ce peuple méprisé n'était cependant pas méprisable. Reconnaissant envers Pompée, soumis et obéissant à Vitellius, qui, tous deux, l'avaient ménagé, il se révolta sous les exactions et devint terrible sous les outrages. Il abattit à coups de hache l'aigle d'or que l'on voulait placer sur la porte du temple de Jéhovah. Il égorgea les soldats romains, lorsqu'un d'entre eux eut insulté, par un geste obscène[11], le culte du Dieu unique. On vit éclater toute la rage vengeresse[12] du caractère oriental et judaïque. Il fallut tuer un million trois cent trente-huit mille quatre cent soixante Juifs[13], dévaster le pays, détruire le temple, abolir la nation, pour venir à bout de cette indomptable fureur. Encore ne réussit-on pas à en effacer la trace ; ce qui restait de la nation juive poursuivit, à travers les siècles, Rome de sa colère ; les rabbins ne l'appelèrent plus que l'empire scélérat[14] ; Titus et Vespasien furent à jamais les maudits[15]. Le patriotisme judaïque était vaincu par la constance et
la bravoure romaines. Moins discipliné, plus farouche, et tombant d'une
hauteur plus sublime que le patriotisme romain, il devait se perpétuer après
sa défaite et survivre à la patrie avec une persévérance acharnée que les
vainqueurs ne prévoyaient pas. L'allégresse régnait à Rome. Les chevaux qui
portaient les deux triomphateurs avaient peine à fendre les flots du peuple[16]. On voyait l'image
de Parmi les spectateurs, se trouvait un Juif qui avait
renoncé à sa patrie vaincue, et l'avait assez complètement effacée de son
souvenir pourvoir d'un œil sec et joyeux cette pompe ignominieuse. Il l'a
décrite tout entière ; il en a recueilli les moindres détails, et son exactitude
scrupuleuse étonne encore le lecteur. On ne trouve cette description que dans
ses œuvres. Suétone, Dion Cassius et Zonaras se contentent de rappeler en
passant le triomphe de Vespasien et de Titus, comme s'ils partageaient encore
ce dédain pour Je ne connais rien dans l'histoire littéraire qui soit comparable ou analogue au récit de ce triomphe, que nous a laissé Flavius Josèphe. Tandis que les plus éloquents et les plus sensés des écrivains romains honoraient chez les peuples ennemis de Rome, les nobles actions et les héroïques résistances ; se montrant généreux et compatissants envers les vaincus ; rendant hommage au mérite guerrier de Vercingétorix le Gaulois, et à la fierté indomptable du Breton Caradoc[37] et de la reine Bowditch[38] ; voici un écrivain disert et un homme politique, qui consacre l'opulence de ses loisirs, la souplesse de son talent et l'abondance de son érudition à relever la grandeur de ses maîtres, de ceux qui viennent de détruire sa patrie, et de l'effacer de la liste des royaumes. Pour comble de singularité, c'est un Juif, un enfant de cette nation, dont chaque membre était l'élu de Dieu ; nation remarquable entre toutes par l'amour fraternelle[39] de ses membres ; par leur fidélité mutuelle et inviolable, leur dévouement aux coutumes transmises, leur horreur des choses étrangères[40], et ce fanatisme de la race et de la patrie, qui leur montrait sans cesse dans un Juif tous les Juifs, dans un père tous ses enfants[41], dans un homme tous ses aïeux, dans leur race, le genre humain, et dans le genre humain la volonté de Dieu présent et vengeur. Josèphe, fils de Mathias, Israélite déguisé sous le nom romain de Flavius, s'affiliant à la clientèle et à la famille de Vespasien, et paraissant comme un favori à la cour de ce prince, est donc un problème historique, dont l'intérêt singulier et l'énigme obscure ne promettraient point de solution, si Josèphe n'avait laissé des livres qui nous sont parvenus. C'est là qu'il faut chercher le sens, le but et la conduite de sa vie. En éclairant le caractère de Josèphe, ses ouvrages s'éclaireront eux-mêmes. Le critique qui les interroge avec bonne foi, n'approuve pas sans doute les invectives du Père Hardouin, de Baronius et de Salien, que le savant Casaubon nomme les bourreaux[42] de Josèphe ; mais il est forcé de reconnaître dans les actions comme dans les œuvres de cet homme trop habile, l'absence complète du sens moral et un caractère d'ineffaçable duplicité. Issu de race sacerdotale et royale, on le voit paraître
pour la première fois dans l'histoire, l'an 61 de l'ère chrétienne, lorsque
Festus[43] était intendant
de Josèphe, à son retour, voyant la guerre prête à éclater et tout le peuple ému, se retira dans le sanctuaire, en qualité de prêtre. Là il attendit les événements. Deux partis, étaient à prendre pour lui ; celui de la révolte nationale contre les Romains ; ou celui de la civilisation romaine contre le judaïsme. Ces deux résolutions avaient leurs dangers. Il n'embrassa ni l'une ni l'autre et se ménagea une position plus équivoque et plus sûre. D'accord avec les principaux Pharisiens, il encouragea[50] la rébellion du peuple, feignit de l'approuver et n'y prit aucune part. Cependant la difficulté de soutenir une guerre contre la discipline et le pouvoir de Rome, difficulté comprise par les rebelles, imprimait à tous leurs actes un caractère de violence effrénée et d'enthousiasme forcené. Josèphe voudrait nous faire croire que des bataillons de sicaires, armés de poignards cachés, parcouraient alors Jérusalem, tuant leurs semblables, pour le plaisir de tuer, sans intérêt comme sans but. Cela est impossible. Le cours entier de son histoire démontre un fait que toutes ses réticences ne peuvent voiler ; c'est que la passion universelle, le vœu général devenu frénésie chez quelques uns, tendaient à la conservation de l'institution judaïque, et à la répulsion définitive de l'invasion romaine. Le désir de la vengeance, la haine inspirée par Gessius Florus irritaient encore cette fureur. Une fois précipités (comme dit Josèphe lui-même) dans la rébellion[51] par la nécessité non par leur volonté, les juifs ne s'arrêtèrent plus et périrent. Josèphe, pour plaire à ses maîtres, transforma en assassins romanesques, artisans de meurtres inexplicables, les partisans d'une insurrection qu'il avait déclarée nécessaire. Pour lui, quand cette insurrection fut étouffée dans le sang, il alla vivre à Rome, paisible, dans la maison que Vespasien avait habitée, et calomnier ses frères ensevelis sous les ruines du temple. Cependant les événements acquirent tant de gravité, et les Romains, attaqués de toutes parts, massacrèrent tant de populations, que la perfide neutralité de Josèphe et des Pharisiens devint impossible. Le gouvernement civil et militaire des deux Galilées fut donné à Josèphe. Il commença par se détacher du pouvoir central résidant à Jérusalem, et par organiser[52] avec une habileté très-remarquable, une résistance isolée ; ménageant Agrippa, vassal des Romains, entretenant des rapports constants avec Bérénice leur protégée, et se préparant ainsi ou un royaume séparé ou un accommodement facile avec l'étranger. Les conséquences de cette conduite n'échappèrent pas aux magistrats de Jérusalem, et à ceux des Galiléens qui favorisaient l'insurrection. Cent raille hommes s'assemblèrent en tumulte, autour de la ville de Tarichée, où se trouvait Josèphe. Averti au milieu de la nuit par l^mon, chargé de la garde particulière de sa personne, que le peuple remplissait le cirque, et que déjà des cris de mort retentissaient, il repoussa le glaive que cet homme lut présentait, afin qu'il put mourir comme un général et non comme un lâche[53] ; sortit par une porte dérobée, passa une robe de deuil, en lambeaux, couvrit sa tête de cendres, suspendit un glaive à son col, et se dirigea vers la place publique, où le peuple était assemblé. A peine arrivé, il se prosterne, baigne la terre de larmes[54], la frappe de son front, confesse qu'il est coupable[55], obtient du temps, éveille la pitié, promet de se mieux conduire, invente un stratagème habile qui met aux prises les vieilles rivalités des Tarichéens et des habitants de Tibériade, et rentre dans sa maison, suivi par un groupe de séditieux. Il monte alors sur la terrasse de cet édifice et invite leur chef à entrer seul, ayant, dit-il, une somme d'argent à lui donner pour les siens. Maître de ce dernier, il le conduit dans une chambre écartée, le fait battre de verges, jusqu'à mettre à nu ses entrailles[56], et le renvoie, une main coupée et suspendue au col[57]. C'est lui-même qui raconte cette scène et qui en triomphe.
Les deux versions[58] différentes
qu'il en a données, selon son habitude, offrent quelques détails disparates,
mais elles sont également remarquables par le mélange d'une ruse profonde et
d'une inexorable férocité. S'il avait peu de scrupules, l'habileté ne lui
manquait pas ; son gouvernement, jusqu'à l'arrivée de Vespasien, est un
chef-d'œuvre de fourberie. Il échappe aux décrets comme aux embûches de la
magistrature centrale établie à Jérusalem, qui envoie inutilement des députés
et deux mille cinq cents hommes pour lui arracher ce gouvernement dont il a
fait son empire[59].
Entre lui et le parti hébreu, commandé par Jean de Giscala et Jonathas, commence
une grande lutte de stratagèmes. On essaie de se surprendre ; on rivalise de
ruses ; on ne se fait pas faute de crimes. Dans ce singulier combat, qu'il
développe complaisamment, c'est à lui que reste l'avantage. Il manœuvre avec
un sang-froid que rien ne déconcerte, opposant mensonge à mensonge,
stratagème à stratagème, interceptant les lettres de ses ennemis, enivrant
leurs messagers, les prenant dans leurs propres filets, les exposant sans
cesse à la vengeance populaire, enlevant ses antagonistes et les escamotant
quand il le peut[60]. On a beaucoup
de peine à démêler le nœud de ces intrigues, et à en comprendre le sens,
quand on lit la vie de Josèphe écrite par lui-même, ou le second livre de son
Histoire. Il efface à plaisir les motifs du soulèvement qui avait lieu
contre lui ; il remplace les reproches réels de ses adversaires par des
prétextes ridicules. Il ne dit point pourquoi on l'attaque ; pourquoi il se
défend. Selon lui, la révolte des cent mille hommes assemblés autour de
Tarichée a été suscitée par le caprice d'un ou deux jeunes gens, mécontents
du gouverneur, et qui, en peu de jours, ont appelé aux armes tous les
citoyens[61].
Il passe rapidement sur le fait si grave de sa désobéissance aux ordres venus
de Jérusalem. Il dit que Jean de Giscala était un homme abominable et un
ancien voleur ; mais il ne dit pas comment cet ancien voleur se trouve appuyé
dans ses accusations par toute la magistrature du gouvernement central. A
Jérusalem, on avait le droit de s'inquiéter dé ses ménagements envers Agrippa
et Bérénice, de ses flatteries pour les ennemis communs, et de l'autorité
exclusive qu'il s'était arrogée. Craintes qui n'avaient rien d'illusoire : il
arma en effet les deux Galilées contre les députés de Jérusalem vaincu par
son habileté supérieure et la vigilante activité de ses ruses. Juste de
Tibériade, contre lequel il dirige une[62] de ses plus
véhémentes allocutions, attribuait aux troubles de Il s'était créé un gouvernement indépendant et commandait à une armée de cent mille hommes, lorsque Vespasien parut en Judée. Le seul usage que Josèphe fit de cette armée, fut de s'enfermer dans un bourg fortifié, nommé Jotapat, dont le siège, raconté par lui dans tous ses détails, dura sept semaines. Ainsi, maître de cent mille hommes, comme l'observe très-bien Basnage, il tient un mois et demi contre les Romains ; c'est l'unique exploit de toute sa campagne. Il comptait bien (dit-il lui-même) recevoir sa grâce des vainqueurs[63], et la suite de son histoire le prouve assez. Dès qu'il prévoit que la ville dans laquelle il s'est enfermé tombera au pouvoir de l'ennemi, il prépare sa fuite ; il songe à se soustraire aux dangers du dernier assaut[64], laissant à la merci des vainqueurs, le peuple qu'il doit défendre et la garnison qu'il commande. cette nouvelle, on s'assemble en tumulte ; on ne veut pas souffrir cette lâche désertion. Josèphe harangue le peuple, et tente de lui persuader que le salut de la ville dépend de sa propre sûreté ; on ne le croit pas sur parole ; on exige qu'il reste. Je fus contraint d'obéir, dit-il encore[65], et j'eus l'air de prendre pour une supplication ce qui était un ordre. Il imagine alors de puérils stratagèmes dont l'invention lui paraît merveilleuse, jetant du fenouil cuit sur les machines des Romains pour faire glisser leurs pieds, et de l'huile bouillante dans leurs cuirasses, pour les contraindre à fuir ; ordonnant à ceux qui vont chercher des vivres de se cacher sous des peaux de bêtes, et de se traîner sur les pieds et sur les mains, afin de tromper l'ennemi. Il raconte gravement ces misérables finesses[66], et se complaît dans leur récit. Cependant la patrie est sur le point de périr. Il ne remplit aucun de ses devoirs de général, d'homme d'honneur, de citoyen. Par une forfanterie oratoire qui lui est assez familière, il s'indigne contre la pensée de trahir sa patrie, et de déshonorer le pouvoir qu'il a reçu de ses compatriotes. Action infâme : il aimerait mieux mourir mille fois[67]. Cependant les faits vont démentir ses paroles ; il commettra tout à l'heure le crime que lui-même a flétri ; il va quitter son poste, renier son pays, passer dans les rangs des envahisseurs, et chercher une vie paisible parmi ceux que son devoir était de combattre. On le force à défendre la brèche que le bélier romain vient de creuser. Il prétend s'être placé, lui sixième[68], au pied de cette brèche. Mais lorsque Vespasien, averti par un transfuge, eût surpris la ville endormie, Josèphe avait disparu ; et c'est une remarque due à Crévier, l'un de ses plus ardents panégyristes, que Josèphe, à cette heure suprême, ne se montra nulle part[69]. On n'entend parler de lui que longtemps après la décision de l'affaire, lorsque la ville n'est que cendres, lorsque douze cents captifs, restes de cette population infortunée, sont traînés en servitude, lorsque quarante mille cadavres hébreux jonchent le sol. Alors il se retrouve au fond d'une caverne, à laquelle aboutissait une citerne de la ville. Il prétend que quarante Hébreux s'y trouvaient avec lui ; il raconte qu'il sut les engager, à force d'éloquence, à se tuer l'un l'autre en tirant au sort l'ordre des victimes. Nous examinerons plus tard les détails de ce roman chimérique, soutenu avec beaucoup de sang-froid, mais dont l'ensemble et les circonstances répugnent à la raison. Il est enfin découvert et traîné devant Vespasien. Comment, du fond de ce repaire où on le trouve blotti, du sein de cette ruine de sa patrie, fera-t-il sortir sa propre fortune ? L'entreprise est difficile ; c'est son coup de maître ; c'est le chef-d'œuvre de sa présence d'esprit et de sa ruse. Néron était empereur. On le haïssait, et l'on méprisait à juste titre ceux que leur naissance rapprochait du trône, gens sans mœurs, perdus de vices. Vespasien seul était estimé ; il commandait aux plus grandes armées de l'empire, victorieuses sous son étendard. En Orient, et de l'Orient dans les régions occidentales de l'empire, un pressentiment vague s'était répandu[70], attesté par tous les historiens, transformé par le peuple en miracles et en signes célestes, et qui promettait la puissance souveraine au vainqueur des contrées du soleil ; un tressaillement singulier avertissait le monde qu'il se ferait un grand changement dans ses destinées. Les Juifs attendaient le Messie ; Rome, fatiguée, attendait un maître honnête homme. Quand le désir est universel et l'attente générale, c'est la volonté de Dieu qui se manifeste, c'est le cours nécessaire des choses humaines qui se trahit. Notre race, dit Tacite[71], voit, dans ce pressentiment, des prodiges qu'elle interprète à son gré. L'oracle du mont Carmel[72], consulté par Vespasien, lui avait promis tous les succès. Les victoires justifiaient l'oracle ; Tamour des soldats s'en augmentait, et leur superstitieux dévouement voyait partout des signes favorables à leur général, des avertissements divins[73], et des promesses d'empire, donnés par les songes et les prodiges[74]. Josèphe ne perdit pas de vue une seule de ces circonstances ; il était Juif et fils de prêtre ; il se donna pour prophète. Il était captif ; il prétendit être résigné à son sort. Il paraissait devant un général vainqueur qui désirait le trône ; il lui prédit le trône. L'Israélite se présenta donc en riant[75], et tombant à
genoux devant le général : Tu crois, Vespasien,
dit-il, n'avoir ici qu'un prisonnier[76] qui se remet entre tes mains ; tu as mieux ; je suis
l'ange qui annonce de grandes destinées. Tu veux m'envoyer à Néron ; pourquoi
? Toi-même tu seras empereur !... Garde-moi
près de toi ; rends mes chaînes plus pesantes ; et si j'ai menti, punis-moi.
Tu seras maître dans peu, non de Josèphe seulement, mais de la terre, de la
mer et de tous les hommes ![77] C'était ne rien hasarder et se rendre maître de l'avenir, que de confondre ainsi par une habile équivoque Vespasien et le Messie de l'Orient ; c'était se donner pour prophète, relever son importance, empêcher Vespasien d'envoyer le captif à la mort, c'est-à-dire à Néron, que cette prophétie eût épouvanté ; enfin sauver sa vie par cet admirable mélange de terreur et de promesses, et se ménager la faveur prochaine d'un prince nouveau. Il calculait bien. Vespasien se défia de lui, mais le garda vivant. Cet homme, disait-il, invente des contes pour détourner ma colère[78]. S'il est prophète, que ne prédisait-il sa propre captivité ? Josèphe affirma qu'il l'avait prédite. Vespasien, comme le remarque Basnage[79], ne fut pas plus dupe de cette seconde prophétie que de la première ; mais il avait intérêt à feindre d'y ajouter foi, et l'envoi d'un tel prisonnier et d'un tel oracle à Néron eût été dangereux. Josèphe fut sauvé. Parmi les savants qui ont signalé cette spirituelle fraude, nous citerons Georges Olearius[80], Basnage[81], et l'anglais Crull[82], qui attribue même à l'Israélite une intention que Josèphe n'a jamais eue, celle de donner Vespasien pour le fils de Dieu. Comment ces écrivains, avertis par une si éclatante preuve de fourberie, n'ont-ils pas rapproché de cette circonstance notable les actes différents de la même vie et les écrits du même auteur ? Il mentait en se prétendant prophète ; il mentait en affirmant que Dieu lui révélait la souveraineté prochaine de Vespasien ; mais il mentait à propos, ce qui est un grand art. Quand même on admettrait cette explication toute moderne, qui efface les vestiges de l'Orient judaïque et donne les prophètes pour des hommes éclairés et des sages, cette confusion de l'israélitisme et de la philosophie, de l'inspiration divine et du raisonnement humain, n'excuserait point Josèphe. Il n'est pas l'homme dont parle Maimonide, qui s'adonne à la recherche de la vérité d'une manière exclusive, parce que la substance de son cerveau est parfaite[83]. Il admet le mot prophète dans le sens populaire ; il a eu un songe ; il a causé avec Dieu ; il accourt de la part de Jéhovah, dont il est l'ange. Il ne se donne pas pour un homme qui voit bien ; il annonce la parole divine. Captif, il suivit l'armée de Vespasien, jusqu'au moment où ce prince devint maître de l'empire. La grande prophétie était réalisée. Vespasien pensa qu'il y allait de sa gloire de payer un mensonge comme une dette, et qu'il devait laisser entrevoir des récompenses éclatantes à quiconque imiterait Josèphe et croirait à sa fortune. Il brisa les fers du Juif. Un homme qui est venu m'annoncer l'empire ne doit pas rester esclave ; cela serait honteux pour moi[84], dit-il. Rien ne prouve mieux la sagacité de Josèphe, que le passage de son histoire dans lequel il démêle et caractérise ce qu'il y avait de prudence et de politique au fond de cette générosité impériale[85]. Titus se chargea d'achever l'oeuvre de son père et la fortune du faux prophète. Josèphe, se jetant sans réserve dans les bras des Romains, reçut le nom de Flavius, abjura les coutumes nationales, épousa une captive de Tarichée, mariage défendu par la loi judaïque, et suivit son protecteur Titus sous les murs de Jérusalem, de la ville sacrée, dont il devint l'ennemi le plus dangereux. Il indiqua les points d'attaque, dirigea les campements[86] et le jeu des machines, essaya de persuader à ses compatriotes de se rendre à discrétion[87], et ne réussit qu'à se faire chasser à coups de pierres par la fureur de ces assiégés, décidés à se laisser exterminer par le glaive ou la famine. La seule grâce qu'ils demandèrent quand la ville fut pleine de morts, et que la disette et l'incendie eurent tout dévasté, ce fut la permission de se retirer an désert, comme leurs ancêtres. On la leur refusa. Ils périrent alors avec le Temple, et Josèphe ose les accuser de peu de courage ![88] Dion Cassius, qui était Grec, n'en parle pas ainsi ; il admire cette invincible résolution d'une race qui meurt tout entière, le peuple devant le sanctuaire, les sénateurs sur les degrés, et les prêtres devant l'autel[89] ; vaincus, ajoute-t-il, non par les Romains, mais par les flammes. Josèphe s'est bien gardé de faire de tels aveux ; il écrivait pour les Romains. Après avoir enlevé du Temple en ruines les livres saints, que Titus lui donna, il revint à Rome à la suite de ses nouveaux maîtres, et fut témoin de ce triomphe^que nous avons décrit d'après lui. Il recueillit ensuite le prix de toutes ses finesses. Le reste de sa vie, protégé par les Flavius dont il avait pris le nom et dont il était le fils adoptif ; par Titus, qui lui donna de vastes domaines en Judée ; par Vespasien, qui lui assigna une pension annuelle ; par le cruel Domitien et par un affranchi nommé Épaphrodite, que l'on croit être non le secrétaire de Néron[90], mais l'affranchi de Trajan ; s'écoula doucement au milieu de sa famille, de la considération publique et de ses travaux littéraires. Le même Épaphrodite, qui le protégeait à la cour, avait pour esclave Epictète, c'est-à-dire la vertu et le génie. Sous l'abri de la bienveillance impériale, Josèphe brava la haine persévérante des Juifs, qu'il avait bien méritée, et qui lui tendit, à ce qu'il raconte, plusieurs pièges. L'amitié des Romains lui suffisait. Narrateur disert de leurs exploits dans l'Orient, il avait droit à leur reconnaissance, et, selon Eusèbe[91], ils lui élevèrent une statue. C'est ainsi qu'il vécut. Il nous reste à examiner si, dans ses œuvres, il a pu dire la vérité, s'il a voulu la dire, et s'il l'a dite. II. — LES ANTIQUITÉS JUDAÏQUES. - LE MARTYRE DES MACCHABÉES.Rome croyait avoir vaincu La conquête chrétienne continua. Rome, devenue chrétienne,
guida la civilisation pendant le moyen-âge. Les vieux Juifs la poursuivirent
d'une haine infinie et impuissante ; héritière des destructeurs de Jérusalem
et centre lumineux du catholicisme, elle avait un double titre à leur
exécration. Souvent charitable et tolérante envers eux, elle ne les dompta
pas. Saint Grégoire, Alexandre II, saint Bernard, Clément YI, les protégèrent
contre la fureur des peuples. Saint Hilaire d'Arles
fut tellement chéri par eux (dit l'abbé
Grégoire), qu'à ses obsèques ils mêlèrent
leurs larmes à celles des chrétiens, et chantèrent des prières hébraïques[93]. Mais, pour la
masse des israélites, le souvenir de Jérusalem détruite vivait toujours, et
Rome victorieuse était maudite. Apipior,
mot araméen qui, selon les rabbins, indique un oiseau
de proie, désigna le chef de l'Église. Les plus effroyables anathèmes
tombèrent sur cette villa abhorrée. En 1495, c'est-à-dire quatorze cent vingt-trois
années après le triomphe de Titus et l'apostasie de Josèphe, un autre juif,
exilé de Portugal et d'Espagne, don Isaac Abrabanel, le dernier et éclatant
rayon de l'école rabbinique espagnole, longtemps ministre de quatre rois
chrétiens, alla se réfugier à Rome, dans cette ville même qui avait offert,
quatorze siècles plus tôt, un asile au fils de Mathias. L'aspect de Ainsi se perpétua l'héritage de la colère juive contre
Flavius Josèphe ; un rabbin du XVe siècle ramassait pour la lui lancer la
pierre dont un de ses concitoyens assiégés l'avait blessé à la tête. Il
suffisait que les israélites récusassent son témoignage pour que les
chrétiens l'acceptassent sans restriction. Ils fermèrent les yeux sur les
nombreux passages de ses œuvres dans lesquels Quant aux chrétiens, ils ne se contentèrent pas de l'admettre comme un des historiens les plus véridiques de l'antiquité ; ils consacrèrent des volumes à l'examen contradictoire d'un seul paragraphe, énonçant, en quelques lignes, l'avènement du Christ, et dont l'interpolation, évidente pour les uns, inadmissible aux yeux des autres, ne nous occupera pas ici. Ces lignes insignifiantes, que l'on a discutées avec un infatigable acharnement[101], peuvent appartenir à Josèphe, à un scoliaste, à un chrétien, à un juif, sans que les fondements de la religion chrétienne en soient ébranlés ou affermis. Que, contre la coutume des israélites, attentifs (dit Photius), à ne jamais nommer le Christ, Josèphe ait raconté sèchement qu'un certain Jésus, homme sage, fit des choses merveilleuses et fut crucifié ; ces mots seraient tout au plus une preuve de l'apparition de Jésus-Christ. Mais l'importance que les parties adverses ont attribuée à cet aveu nous semble très-exagérée. Élevé dans le pharisaïsme, pharisien parla doctrine et la conduite, Josèphe n'a pas pu confesser la divinité du Christ ; en effet ce passage est loin de l'admettre. Asservi aux Romains, il n'a pas dû vanter, dans un livre écrit pour les Flavius, ces chrétiens que Tacite livre au mépris ; en effet, le passage ne contient pas un seul éloge, mais le plus bref résumé des faits. Que prouvent donc ces huit lignes ? Josèphe peut les avoir écrites ; elles sont remplies de ses ménagements ordinaires et de ses habituelles réticences ; il peut ne les voir pas écrites, fidèle à cette habitude qu'il n'oublie jamais, de taire ce qui peut lui nuire. La seule question sérieuse est celle de la véracité de Josèphe ; placé dans la main de ses maîtres, comme le dit Abrabanel, écrivant sous leurs yeux, et tremblant sous leur loi. L'indignation du rabbin espagnol n'a point marqué avec
assez de précision les divers buts que la prudence de Josèphe se proposait en
écrivant ses ouvrages. S'il se fût contenté de flatter les Romains, cette
complaisance eût avili son caractère, sans avancer sa fortune. Essayer une
conciliation apparente entre les mœurs, les rites, les idées de Rome, et les
dogmes, l'histoire, le caractère de Pour atteindre ce résultat, il fallait attribuer à un
petit nombre d'assassins désavoués de toute la nation la résistance acharnée
et le patriotisme farouche de ces défenseurs de Jérusalem, qui avaient tenu
si longtemps en échec la discipline et les forces de Rome. Il fallait en
outre arracher des Écritures saintes ces pages nombreuses qui, exaltant
l'orgueil individuel de la race juive, lui défendaient comme un crime toute
union avec les peuples étrangers. Enfin il était nécessaire de compléter la
falsification, en rapprochant par une identité factice les croyances juives
des croyances stoïques ; et il fallait confondre les exemples anciens de
l'obstination juive avec les actes de vertu héroïque admirés par les Romains
et consacrés comme des témoignages de force virile et de puissance morale par
la philosophie contemporaine de Sénèque et d'Helvidius. Toutes ces
métamorphoses furent accomplies par l'historien, dans ses Antiquités
judaïques, version des histoires bibliques, ramenées au sens romain ;
dans son Livre contre Apion, défense de l'antiquité juive et de la
moralité juive contre les assertions des Égyptiens et des Grecs ; et dans Vivant à Rome dans l'opulence, environné de sophistes grecs[102] dont sa connaissance encore imparfaite de la langue hellénique lui rendait le secours nécessaire, car il ne savait pas prononcer cette langue[103], il fit de ce travail l'œuvre de toute sa vie. Son premier soin fut de protester hautement qu'il dirait la vérité. Il était prêtre ; il se prétendait prophète ; il était fils de rois[104]. Mentir eût été une infamie indigne de son rang, de son nom et de sa consécration divine. Mais, au lieu d'altérer les faits, il les plaçait sous un jour favorable à ses desseins. Aux traditions bibliques, il ajoutait les ornements des fables populaires. On reconnaît même aisément que ses Collaborateurs qui traduisirent et amplifièrent apparemment son œuvre, écrite d'abord en syro-chaldaïque, pour les Barbares[105] ; ces Grecs, habitués au mensonge historique[106], ne se firent point faute de mêler au texte les additions brillantes, nées de leur imagination. Ce qui paraît le prouver, ce sont les doubles versions du
même événement qui, diversement brodé, se reproduit sous des formes
dissemblables dans les ouvrages différents de Josèphe ; comme si deux
collaborateurs avaient développé selon leur fantaisie un seul thème original.
Tel fait, consigné dans les Antiquités, reparaît dans les Mémoires,
chargé de détails contradictoires. Ce que les Mémoires racontent d'une
manière romanesque, est rapporté dans Dès le début des Antiquités, il efface l'anthropomorphisme judaïque et omet ces mots importants : Dieu fit l'homme à son image ; il dit seulement : Dieu forma l'homme[117]. C'est mal remplir la promesse qu'il vient de faire, de conserver exactement les mots, le sens et l'ordre des Écritures Saintes, d'apporter à ce travail une fidélité extrême, de ne rien ajouter et de ne rien omettre. Il a beaucoup ajouté et beaucoup omis. Après avoir fait disparaître celte présence matérielle de Dieu, gloire, terreur et espérance des Israélites, il détruit, dès l'origine, l'isolement judaïque ; il prétend qu'Abraham voulut aller en Egypte pour y étudier la religion de ses prêtres[118] ; il affirme que Moïse protesta de sa vénération pour les philosophes étrangers[119] ; il va jusqu'à détruire cette hostilité contre les rites des autres peuples, la plus juste et la mieux prouvée des accusations intentées contre les Israélites. Josèphe insère, dans le Deutéronome, l'injonction divine de ne point blasphémer les Dieux étrangers et de ne pas piller leurs temples[120] ; il revient encore sur ce mensonge fondamental dans son livre contre Apion[121]. Il sait bien cependant que Dieu commandait aux Juifs la destruction des idoles et des temples[122], et que toute l'institution judaïque était fondée sur l'isolement de la race. Mais, comme le dit l'abbé Anselme[123], il avait les Romains sous les yeux, et songeait à leur plaire. Une analogie, même éloignée, semble-t-elle se présenter à lui entre un miracle biblique et un événement ou un fait païens, il saisit avidement cette analogie. C'est ainsi qu'il fait chanter à Moïse un cantique en vers hexamètres[124], confond le passage de la mer Rouge avec celui de la mer de Pamphylie par les troupes d'Alexandre, disant que Dieu qui a permis l'un a bien pu permettre l'autre[125] ; attribue au grand-prêtre Mathathias au discours tout stoïque, qui semble emprunté à Zénon ou Gaméade[126], et cherche à faire passer pour authentiques deux prétendus décrets de Claude, qui accordent aux Juifs, alors si méprisés, des privilèges considérables : falsifications dont l'audace paraît extraordinaire. A la tête de l'un de ces faux documents, Claude, qui ne prit jamais le titre d'empereur, selon Suétone, se déclare empereur[127]. Il se dit ensuite consul pour la quatrième fois, tandis qu'il n'était consul que pour la troisième fois, et il cite enfin, dans le corps de l'édit, contre toute coutume, le nom des porteurs du message[128]. L'autre document[129] attribue aux Juifs le droit de cité dans toutes les villes de l'empire, ce qui les aurait constitués citoyens de Rome : Rome les chassa cependant en masse. On voit ainsi se manifester partout, chez Josèphe, le désir ardent de relever la condition des Israélites, en les assimilant aux Romains, de les introduire au sein de la civilisation romaine, de les présenter comme frères des païens, et de faire oublier l'antipathie religieuse qui avait causé leur perte. Le but de l'homme politique est évident ; que dire de l'historien qui opère cette grande fraude historique ? Ainsi s'évanouit, sous l'habileté de Josèphe, le mystère
de la race juive et ce que les païens appelaient[130] son énorme
impiété ; car elle était impie à leurs yeux. Josèphe ne veut plus que les autres peuples haïssent A la fin de ses Antiquités, il annonce qu'il complétera un jour son œuvre, et qu'il éclaircira tous les doutes relatifs aux rites des Juifs, à leur abstinence de certains mets et à leurs coutumes[132] ; c'est-à-dire qu'il ramènera ces coutumes nationales aux idées romaines. C'est le but de tous ses écrits ; long commentaire destiné à vaincre l'antipathie et le mépris de Rome, en captant sa bienveillance et son estime. Ce compromis systématique est l'œuvre non seulement d'un courtisan qui, ne pouvant s'abjurer, se transforme ; qui étouffe sa voix quand elle déplaît, et cache sa pensée quand elle blesse ; mais aussi d'un diplomate habile, et qui cherche à se confondre avec ceux qui l'ont vaincu. Il est vrai que, dans les temps modernes, on a essayé
d'effacer encore ce caractère primitif des institutions de Moïse[133]. L'idée paradoxale de composer un commentaire libéral et
constitutionnel dans le sens américain, sur une législation asiatique, ne
pouvait, dit un autre Israélite[134], venir qu'à un homme d'esprit, et être exécutée que par
un écrivain de talent. Si l'on s'en tenait en effet aux passages
habilement rapprochés par l'écrivain du XIXe siècle, et à ses ingénieux
commentaires, toute la philosophie moderne, sa vaste charité, son indulgence
énervée, appartiendraient à Moïse ; et ce redoutable législateur qui a dit
aux hébreux : Vous ne ferez pas grâce[135] aux Amalécites ; serait un philanthrope aussi
éclairé que Voltaire. Mais cette hypothèse n'a rien de vraisemblable. Les
Hébreux, supérieurs par leur dogme à tout ce qui les environnait, avaient
cette supériorité qui offense, cet orgueil qui irrite ; et ils étaient
faibles. Si la race juive, comme un soldat indomptable et châtié, a passé par les verges, à travers toute l'histoire,
comme le dit avec éloquence et justesse un autre historien Israélite[136] moderne, c'est
qu'elle a professé dès l'origine cet isolement que les peuples ne pardonnent
pas et que Josèphe veut faire oublier. Dépositaire farouche de la grande
idée, l'unité de Dieu, elle a conservé avec une opiniâtre constance ce trésor
inviolable ; elle s'en est enorgueillie, et, trop faible pour soutenir les
prétentions de sa fierté, elle a irrité et armé le monde. Le peuple d'Israël, dit le Deutéronome, est un peuple de choix... supérieur
à tous les autres[137]. La haine de
l'étranger est son principal caractère. Moïse gradue comme il suit l'antipathie
sacrée des Israélites contre les autres peuples : ils doivent haïr, 1° les
Amalécites ; 2° les Chananéens ; 3° les Ammonites et les Moabites ; 4° les
Égyptiens, et enfin les Édomites. Sois béni,
répètent encore aujourd'hui, dans leurs prières, les Hébreux fidèles à la
loi, Dieu qui as choisi ton peuple avec amour !...
Toi qui ne nous a pas faits comme les autres.
Le Talmud va plus loin : on y lit ces paroles : L'univers n'a été fait que pour les Juifs[138]. — Nulle nation, dit le Deutéronome, n'a son Dieu aussi proche, et nous l'invoquons pour toutes
choses[139]. — L'imprécation
et l'anathème contre les nations que Dieu n'a pas choisies retentissent dans Isaïe,
dans les Psaumes de David et dans les Machabées. Pour la
première fois, l'apôtre Paul vint proclamer, d'après le Christ, la fraternité
humaine : Entre le Juif et le Grec, dit-il, il n'y a point de différence[140]. Mais de son
vivant même et du temps de Josèphe, on lisait sous les portiques du Temple
les malédictions d'Isaïe contre l'étranger, son culte, ses mœurs et ses
idoles. Dans les Machabées, mêmes anathèmes : Moi,
passer aux coutumes étrangères[141], s'écrie
Éléazar ! j'aime mieux la mort. Je ne veux point
trahir la loi nationale[142]. C'est une curieuse étude que celle de la transformation subie par les deux livres des Machabées sous la plume de Josèphe. Il les change en héros stoïques ; il ne laisse pas trace de cet invincible attachement aux mœurs judaïques qui fait le fonds du récit ; il efface complètement ce fanatisme indomptable, pour ne laisser paraître que la force morale dans les supplices, et se mêler ainsi aux déclamateurs païens. C'est un thème très-philosophique que je soutiens, dit-il au commencement de son ouvrage ; et ce thème, un peu moins éloquent que les amplifications de Sénèque sur la souveraineté de la raison, contredit formellement les idées et les principes de l'hébraïsme : c'est un contresens moral dont Josèphe connaît la portée. Les Machabées et leur mère n'obéissent plus à Jéhovah et à Moïse ; ils songent seulement à la sagesse stoïque, à l'εύλογιστία, à la volonté raisonnable, que Cicéron a si bien décrite, d'après Carnéade[143]. Ce n'est point une volonté raisonnable de se refuser obstinément à manger de la chair de porc Éléazar et les Machabées, dans le récit original, veulent rester fidèles aux lois de Dieu, Dei leges[144] ; ils ne veulent point abandonner les coutumes nationales[145]. A quatre-vingt-dix ans, s'écrie Éléazar, je ne passerai point aux coutumes étrangères[146]. Josèphe lui attribue une longue harangue explicative, et lui fait dire qu'un bon citoyen doit respecter la loi dans les petites comme dans les grandes choses. Cet appareil de subtilités n'a aucune analogie avec le texte ; les frères Machabées ne prétendent point remporter les palmes de la vertu[147], mais ils craignent de devenir Grecs, et d'abjurer leur patrie en mangeant des viandes prohibées[148]. Dieu les voit ; Dieu les consolera[149] s'ils succombent. C'est la patrie qu'ils croient défendre. Leur mère, pour les encourager, leur parle en hébreu et leur rappelle que Jéhovah est plus grand que les rois terrestres[150]. C'est le monothéisme qui lui inspire ce mouvement sublime : Je ne suis pas votre mère ; je ne sais comment vous avez paru dans mon ventre ; mais celui qui vous a créé, qui a fait vos nerfs et vos muscles, c'est le Créateur du monde, et on vous ordonne de l'abjurer[151]. Au lieu de cette allocation terrible, Josèphe invoque la raison abstraite, la sagesse métaphysique, le système philosophique. Je ne te démentirai pas, loi souveraine ; je ne te repousserai pas, abstinence chérie ; je ne te déshonorerai pas, raison philosophique ![152] A la un de cette belle déclamation, Josèphe s'écrie encore : Ô raison, maîtresse des passions ![153] En vain voudrait-on enlever à Josèphe l'honneur de cette amplification ou écrite ou commandée par lui. C'est toute sa méthode ordinaire ; le roman mêlé à l'histoire ; des détails puérils, une description circonstanciée des tortures infligées aux Machabées, de longs discours placés dans la bouche de chacun des personnages. C'est ainsi qu'il traduit toujours, à l'usage des Romains, et toujours en le trahissant, le génie de sa nation. Je ne pense pas que toutes les additions et tous les changements introduits par Josèphe dans ses Antiquités aient eu pour origine cet intérêt politique. La recherche de l'élégance, l'imitation des Grecs, la crainte de donner prise à la, raillerie par l'exacte reproduction de la brièveté biblique, peut-être l'admission des commentaires des docteurs et des gloses populaires ; mais surtout les libres paraphrases de ses collaborateurs ont concouru à cet ensemble romanesque. Un des écrivains les plus judicieux de l'Angleterre
actuelle observe avec raison que l'emploi des ornements affectés et le luxe
des détails inutiles prouvent le peu de sérieux de l'historien ou de
l'orateur[154].
Josèphe en est rempli. Samuel Bochart, Leydecker, Le Clerc, dom Calmet, le P.
Gillet, se plaignent sans cesse de ces altérations. On
ne peut savoir, dit Bochart, pour quelle
raison il s'écarte si souvent du texte sacré. C'est que Josèphe veut
composer un livre agréable. Il n'a pas d'autre raison que Varillas ou le P.
Berruyer, pour imaginer ou adopter un roman sur Caïn, chef de brigands, inventeur des poids et mesures[155] ; sur les connaissances stratégiques de Jacob disposant son
arrière-garde et son avant-garde, pour aller à la rencontre de son frère[156] ; sur la
jeunesse de Moïse, dont il fait, longtemps avant l'auteur de Moïse sauvé[157], une pastorale
élégante[158]
; sur les trésors incalculables, ensevelis par Salomon dans le tombeau de
David[159],
et qu'il suppute comme s'il les avait vus et touchés ; sur Nabuchodonosor,
dont il ne trouve pas l'histoire asses merveilleuse[160] ; sur les
bandits Asinée et Anilée[161] ; et sur
l'étrange spectacle que, selon lui, Agrippa voulut donner aux Hébreux,
lorsqu'il força quatorze cents de leurs compatriotes, divisés en deux bandes,
à se tuer les uns les autres, sans qu'il en restât
un seul[162]. Le bon père
Gillet, bibliothécaire de Sainte-Geneviève, traducteur de Josèphe et son
apologiste fidèle, a des scrupules sur cette affaire ; il pense que les quatorze cents combattants auraient dû se jeter
sur leurs persécuteurs, et ne pas s'entr'égorger si complaisamment. Il n'est
pas moins embarrassé, quand il veut expliquer l'histoire des cheveux
d'Absalon, qui pesaient deux cents sicles, et que
l'on ne pouvait couper[163] qu'après huit
jours de travail. Ces puérilités ajoutées aux merveilles de Le roman inventé par Josèphe ou ses scribes est-il trop
développé et trop important, pour qu'on l'attribue à l'interpolation d'un
copiste ; le P. Gillet se rejette alors sur les Deutéroses
(Δευτερώσεις)
ou sur les traditions secondaires que Josèphe a pu recueillir dans le temple,
adopter et introduire dans sa compilation. Quand même on admettrait cette
hypothèse, ce n'est point un procédé judicieux, c'est le travail d'un
romancier frivole de mêler ainsi, dans une histoire sérieuse, la tradition
orale et populaire aux écrits consacrés. Justinien condamne les Deutéroses, nommées par les Israélites Mischna. Sa Novelle cent quarante-sixième,
relative aux Hébreux, déclare indignes de foi, comme n'étant point comprises
dans les Livres saints, et n'émanant ni de Dieu ni des prophètes[165], les traditions
vagues ou Deutéroses dont on avait rempli, aux IIe et IVe siècles, Moyennant ces réticences, ces omissions et ces embellissements, un Israélite sans probité pouvait donner aux Romains quelque idée, mensongère il est vrai, des traditions anciennes de sa patrie, et y ajouter l'histoire judaïque depuis les Maccabées jusqu'au règne d'Hérode. Hais une fois parvenu à l'époque du grand conflit entre la nationalité juive et la toute-puissance romaine, l'embarras devenait excessif. Il y avait là deux passions en regard, deux obstinations également acharnées, deux génies inconciliables dont l'un avait écrasé l'autre et tenait l'historien sous sa main. Si Josèphe eût été le compatriote et le compagnon d'armes des vainqueurs, rien n'eût été plus facile que de s'écrier : Malheur aux vaincus ! les dieux de Rome triomphent ! Mais Josèphe est resté Juif ; c'est en qualité de prophète qu'il a reconstruit hardiment sa fortune. Il ne peut ni blasphémer sa patrie, ni irriter Rome victorieuse. La difficulté de cette situation de Juif demi-apostat, de citoyen romain né en Orient, d'Italien adoptif et de prophète civilisé, situation extraordinaire et unique, ne l'a point effrayé. Nous verrons bientôt par quels ménagements il a tout concilié dans sa Guerre judaïque, celui de ses ouvrages qui excite le plus d'intérêt et mérite le plus d'attention. III. —
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[1] A la fin du mois d'avril, selon Pagi, An. 71, § 6.
[2] Guerre judaïque, par Flavius Josèphe, VII, V, § 3, p. 413. Ed. Havercamp.
[3] Guerre judaïque, par Flavius Josèphe, VII, V, § 3, p. 413. Ed. Havercamp.
[4]
Guerre judaïque, par Flavius Josèphe, VII, V, § 3, p. 413. Ed. Havercamp.
[5] Tacite, Hist., l. V, chap. VIII. — SUBLATIS POP. ROM. NOST. PERNICIOSISSIMIS. (Médaille. Tristan.)
[6] Tacite, Hist., l. V, chap. XIII.
[7] Tacite, Hist., l. V, chap. XIII.
[8] Cicéron, ad Atticum, L. II,
l. 9.
[9] Horace, Sat. I, v.
105.
[10] Macrobe, Saturnales, II, chap. IV.
[11] Guerre judaïque, par Josèphe, II, XII.
[12] Dion Cassius, XLIX, XXII.
[13] Selon le calcul de Basnage. Voy. Hist. des Juifs, tome I, 2e partie, page 579.
[14] Ahaboda Zara, (Du Culte étranger) ; Traité hébraïque, chap. intit. Liphne edehen (Avant leur malheur). L'empire scélérat tenait depuis cent quatre-vingts ans Israël en sa puissance.
[15]
Titus le maudit, et son père Vespasien le maudit,
etc. Echa Rabati, ch.
[16] Guerre judaïque, par Josèphe, VII, V, § 3.
[17] JUDEA CAPTA. Médaille. Voy. Mionnet, Méd. rom., t. I, p. 154.
[18] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[19] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[20] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[21] Tacite, Histoires, V, 8.
[22] Isaïe, passim.
[23] Dion Cassius, LXVI, VII.
[24] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[25] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[26] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[27] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[28] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[29] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[30] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[31] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[32] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[33] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[34] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[35] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[36] Josèphe, Guerre judaïque, VII, V, § 5.
[37] Caractacus. L'identité de ce héros avec Caradoc, semble indiquée par le souvenir de Caër-Caradoc, le château de Caradoc, dont quelques vestiges subsistent. Celle de Boadicée et de Bowditch n'est fondée que sur l'analogie des sons et celle des lieux. Le champ de bataille où elle mourut est devenu un quartier de Londres : Bowditch.
[38] Voyez Tacite.
[39] Josèphe, Guerre judaïque, III, VII, § 33.
[40] Machabées, II, VI, v. 24.
[41] Les sangs d'Abel ont crié. Genèse, IV, v. 10. Toutes les générations que devait enfanter Abel, sont tuées par Caïn. Un homme, c'est toute la race, depuis le premier ancêtre, jusqu'à l'éternité. Cette passion de la race, de la descendance et des aïeux, enfantait le mépris de la mort, et l'amour de la paternité, si bien indiqués par Tacite, le Montesquieu des temps anciens. Generandi amor, moriandi contemptus.
[42] Josephomastiges, Exercitat, XIII, XII, n° 2.
[43] Josèphe, dans ses Antiquités judaïques, a nommé Festus, le même homme que dans sa Vie, il appelle Félix. On doit adopter la correction du Père Gillet, et lire Festus, dans les deux ouvrages. Œuvres de Fl. Josèphe, trad. par le P. Gillet, t. I, notes, p. 60.
[44] Ovide, Fastes, l. V.
[45] Vie de Josèphe, II, § 3.
[46] Antiquités judaïques, XX, VIII, § 9.
[47] Voyez Le Nain de Tillemont, Ruine des Juifs, note 21, p. 1076.
[48] Tacite, Annales, II, 42.
[49] Photius, Biblioth. Codic. 76, p. m. 169.
[50] Vie de Josèphe, 5.
[51] Vie de Josèphe, 6.
[52] Voyez le chapitre XX du livre III. Guerre jud.
[53] Guerre, III, XX, § 28. Le P. Gillet trouve cette proposition singulière. Elle n'avait rien d'étrange chez les peuples païens. Shakespeare qui avait étudié Plutarque, ne néglige pas ce trait de mœurs : let us die, after the kigh roman fashion, Antony and Gleopatra, A. III
[54] Guerre, III, XX, § 28.
[55] Guerre jud., III, XX, § 28. Voy. aussi Antiquités jud., ut supra.
[56] Guerre jud., II, XXI, § 5.
[57] Vie, 30.
[58] Vie, 30, et Guerre jud., l. II.
[59] Guerre jud., II, XXI.
[60] Vie, 43.
[61] Vie, 43.
[62] Vie, 65.
[63] Guerre judaïque, III, VII, § 2.
[64] Guerre judaïque, III, VII, § 15.
[65] Guerre judaïque, III, VII, § 17.
[66] Guerre judaïque, III, VII, § 11.
[67] Guerre judaïque, III, VII, § 2.
[68] Guerre judaïque, III, VII, § 25.
[69] Histoire des Empereurs, III, p. 466.
[70] Suétone, Vespasien.
[71] Tacite, Hist., l. I, 10.
[72]
Suétone, Vespasien, chap. V.
[73] Tacite, Hist., l. I,
10.
[74] Dion Cassius, LXVI.
[75] Dion Cassius, LXVI, ch. 11.
[76]
Georg. Philipp. Olearius, qui a très-bien jugé ce point unique de la vie de
Josèphe, dans son excellente dissertation, de Vaticinio Josephi,
rétablit, d'après un ms. de
[77] Guerre, III, VIII, § 9.
[78] Guerre, III, VIII, § 9.
[79] Histoire des Juifs, t. I, 2e part. 559.
[80] De Vaticinio Josephi, Lipsiæ, 1699.
[81] Hist. des Juifs, t. I, 2e part. 556.
[82] Diss. ad Hist. judaicam, ex Josepho et aliis. Londres, 1708.
[83] More neboukim, II, 36, 290.
[84] Guerre, IV, X, § 7.
[85] Guerre, IV, X, § 7.
[86] Dion Cassius, l. LXVI, chap. IV.
[87] Josèphe, Guerre jud., l. VI, passim.
[88] Guerre, VI, IX, § 1.
[89] Liv. LXVI, § 74.
[90] Selon Grotius, cet Épaphrodite, nommé Κράτιστος par Josèphe, est l'affranchi et le procurator de Trajan. (Grotius, ap. Lucam, c. I, v. 3.) A l'époque où Josèphe écrivait ses Antiquités, en l'an 13 de Domitien, l'autre Épaphrodite se trouvait en exil.
[91] Eusèbe, l. III, chap. IX.
[92] Rutilius Numatianus, v. 384 à 398.
[93] Hist. des sect. relig., II, 351.
[94] Chap. XXXIV et XXXV d'Isaïe. Commentaire d'Abrabanel.
[95]
Don Isaac Abrabanel, Commentaires sur Daniel, Source 10, Palme 7. — Voy.
sur ce passage R. Ganz., Tzémach David ; — Vorstius, observat. in Chronol.
sacro-profanam ; — Manassi Ben Israël, Lettre française à M. Amauld
(7 déc. 1651) ; Christophe Arnold, in Epistol. viror. doctor. de Testimonio
Flav., 170 ; — Chr. Noldius,
Historia Idumœa, Prœfat.
[96] Josephus... Grœcus Livius... Epist.,
22 ad Eustochium.
[97] Daubuz., De Test. Flav., 93,
221, 212, 224.
[98] Hudson, 18, 6, 2.
[99] Fils de Gorion.
[100]
Pseudo-Gorionides, tot eruditorum stylis confossus. Snellius, Epist. de Testamento Flav.
[101]
Miré digladiantur eruditi, J. F. Philippus Ripert. De Testimontis
gentilium de Christo, Lips., 1698.— V, surtout Christ. Amoldi, de Test.
Flav. Epistolæ, Norimb., 1661. — Huet, Démonstr. Evang., p. III,
562. — Tenzel, Monatliche unterreden, 1697. Jul. 555. — Le P. Gillet, t.
III, Trad. des Antiq. jud., Note V, p.
[102] Lib. I, in Apionem, § 9.
[103]
[104]
[105]
[106] Juvénal, X, 174.
[107] II, § 1
[108] XVIII, I, § 3.
[109] XV, VI, § 4.
[110] I, XXII, 5.
[111]
[112] Guerre jud., I, XXI, 4.
[113]
[114]
[115] Non de
industria mendax, sed improvide credulus. (P.
Brinch, Examen historiœ Josephi, Ad calcem).
[116] Quia aliter credere nolebant. Notes sur Etienne de Bysance, p. 766.
[117] Ant. jud., I, II, § 2.
[118]
[119]
[120]
[121] T. II, p. 1077, éd. Havercamp.
[122] Paralipom., 20, 2.
[123] Mémoires sur les premiers monuments, etc., Mém. de l'Ac. des Inscr., t. VI, p. 9.
[124] Ant. jud., II, XVI, § 4.
[125] Ant. jud., II, XII, § 2.
[126] Ant. jud., XII, VI, § 3.
[127] Prænomine imperatoris abstinuit... Suétone, Claude.
[128] Ant. jud., XX, I, § 2.
[129] Ant. jud., XX, VI, § 2.
[130] Grande impiæ gentis arcanum... Florus.
[131] Ant. jud., l. III, VII, 7.
[132] XX, § dernier.
[133] Histoire des Institutions de Moïse, par M. Salvador, Paris, 1829.
[134] Notes sur l'Election du peuple juif, par M. S. Munk. Bible trad. par Cahen, t. IX, p. 72.
[135] Deutéronome, XXV, 17, 18, 19.
[136] Léon Halévy, Résumé de l'Histoire des Juifs.
[137] Deutéronome, ch. XXVI, v. 18, 19.
[138] Isaïe, trad. de Cahen, p. 69. Notes.
[139] Deutéronome, ch. IV, v. 6 et 7.
[140] Epître aux Romains, ch. X, v. 12, 13.
[141] Mach., II, VI, v. 24.
[142] Mach., II, VII, v. 2.
[143] Tusculane, IV, 6.
[144] Machabées, II, v. 11.
[145] Machabées, VII, v. 2.
[146] Machabées, VI, v. 24.
[147] Machabées, VI, v. 24.
[148] Mach., II, v. 2.
[149] Mach., VII, v. 6.
[150] Mach., VII, v. 8.
[151] De Machab., VII, v. 22, 23.
[152] De Machab., § V.
[153] De Machab., § XV.
[154] So
délicate is the perception attained by a high cultivated taste of the
proprieties of all grave and earnst composition, that it not only feels an
enmity with the meretricious or viciously ornate, but immediately perceives
that the grealest beauties of certain species of prose composition would become
little better than downright bombast, if transplanted into any composition, the
object of which was serious. Macaulay, Edimb. Rev.,
oct. 1840, p. 79.
[155]
[156] Ant. jud., XX, § 1.
[157] Saint-Amant.
[158]
[159]
[160] Ant. jud., X, II, § 6.
[161] Ant. jud., XVIII, IX, § 6.
[162] Ant. jud., XIX, VII, § 4.
[163] Ant. jud., VII, VIII, § 5.
[164]
Trad. de F. Josèphe, t. II, 76. Notes.
[165] Novell. 146. Rit. I. Constantinople, Fev. 553.
[166] Recensio operis Thalmudici.
[167] Bibliotheca Rabbinica.
[168]
[169]
[170]
[171] Machab., 6.
[172] Ant. jud., II, XII, 2. — II, XIII, 3.
[173]
[174]
[175] Guerre jud., c. XII.
[176] Ant. jud., IX, X, § 2.
[177] Ant. jud., VI, I, § 2. — Quinque podices aureos.
[178] Ant. jud., VII, II, § 5. — Sexaginta prœputia.
[179] Πέντε άνδριόντας. V. Le Clerc, Com. sur les Rois, l. I, c. VI.
[180] Mos absurdus et sordidus. Tacite, Hist., l. V.
[181] Vie de Josèphe, 33.
[182] Vie de Josèphe, 33.
[183] Guerre jud., VII, 2.
[184] Guerre jud., III, V, 1.
[185] Guerre jud., III, V, 1.
[186] G. P. Olearius a très-bien caractérisé Flavius Josèphe : In rébus gerendis dexteritatem, in consiliis promptitudinem ac sagacitatem... mirati. Vir πολιτικώτατος qui... Romanorum res perspectissimas habuit... Istius, quale Josepbo erat ingenii homines, agiles nimirum, versuti... etc. Voy. supra.
[187] Guerre jud., III, V, 6.
[188] Guerre jud., III, IV, 2.
[189] Guerre jud., III, V, 8.
[190] Jus zelotarum. — V. Hammond, Selden, Heidegger, Hist. patriarch, I, 623, et surtout un traité curieux et peu connu de G.-F. Wille (Dissertatio de Jure zelotarum in gente Ebrœa, Halle, 1699).
[191] Chap. IX, § ult.
[192]
Si zelotæ trucidant... laudantur. Hilc. issure Biah., c. II.
[193] Guerre jud., IV, IX, § 10.
[194] Guerre jud., IV, III, § 11.
[195] Guerre jud., IV, III, § 12.
[196] Guerre jud., IV, III, § 12.
[197] Guerre jud., IV, III, § 12.
[198] Guerre jud., III, 30.
[199] Guerre, V, IX, § 4.
[200]
Guerre, V, IX,
[201] Guerre, V, IX, 2.
[202] Guerre, V, IX, 2.
[203] Cette scène est assez belle pour n'avoir besoin d'aucune addition. M. Salvador y ajoute un vieux manteau, l'œil terrible et le front morne. Josèphe dit simplement : λευκούς χιτονίσκους... πορφυράς χλανίδα. Il ajoute une circonstance très-pittoresque, oubliée par M. Salvador : έκ γής άνεφάν, il sortit de terre. Guerre, VII, III, 1.
[204] Guerre, V, IX, 4.
[205] Guerre, V, IX, 4.
[206] Dion Cassius, LXVI, IV.
[207] Dictionnaire Philosophique, art. Juifs.
[208] Guerre, V, X, § 3.
[209] Guerre, V, X, § 3.
[210] Mém. Acad. Inscr. IV, 237.
[211] T. I, note 6.
[212] Vie de Josèphe, § 2.
[213] Vie de Josèphe, § 3.
[214] Geschichte der Israeliten, seit der Zek der Maccabœer, bis auf unsere tage, nach den quellem bearbeitet, von J. M. Jost. Berlin 6 vol. 1899. Un des meilleurs ouvrages de la littérature allemande moderne, et qui n'a pas été traduit en français.
[215] Jost., Ib., t. I. Anhang zum Zweiten Buche, s. II.
[216]
Les principaux adversaires de Josèphe sont Bayle, Voltaire, Basnage, Salien,
Salméron, G. Olearius, Baronius (Ann. eccles.), et malheureusement le P.
Hardouin, De num. Herod. La colère du P. Hardouin contre Josèphe s'est
manifestée d'une manière si étrange, qu'elle a dû servir la cause de l'écrivain
juif. Je ne veux plus l'appeler Joseph, dit-il,
ce serait le confondre avec saint Joseph... Je n'ai que du mépris pour ce Josèphe ; car je le nommerai
toujours ainsi... Bayle s'élève souvent contre la fécondité d'inventions
frauduleuses que Josèphe se permet. V. Dict. histor. et littér.,
[217]
Die schwierigkeit einer verbesserung der Joseph...
liegt besonders in dem gœnslichen mangel
gleichzeitiger Schriften über denselben gegenstand. Jost., Ib., 8. 10.
[218] Von Dr. Ludwig Wachler, Leipzig, 1833,
Ier. th., p. 337.
[219] Von Dr. Ludwig Wachler, Leipzig, 1833,
Ier. th., p. 319.
[220]
Josèphe a exercé plus d'influence sur les littératures du Nord et sur les
œuvres des écrivains protestants que sur les littératures méridionales et
catholiques. Voltaire lui doit un épisode de