LES CÉSARS DU TROISIÈME SIÈCLE

TOME TROISIÈME

LIVRE X. — FIN DE L'EMPIRE PAÏEN - 305-323

CHAPITRE PREMIER. — LA TÉTRARCHIE BRISÉE - 305-310.

 

 

Nous approchons maintenant du terme de notre labeur, de cette époque, immortelle dans l'histoire du monde, où pour la première fois un souverain confessa la vérité du christianisme, et où trois siècles de persécution furent payés à l'Église par une liberté solennellement proclamée. Quels que soient les événements qui ont suivi, quelques taches qu'on puisse signaler dans le caractère de Constantin, quels que soient les nuages qui ont pu assombrir sa gloire et mettre en péril la liberté de l'Église, toute âme tant soit peu élevée au dessus des vulgarités de la terre appellera un grand jour ce jour où le maître du monde (si jamais homme a pu se nommer ainsi) reconnut au dessus de lui un autre Maître et abaissa sa royauté d'une heure devant l'éternelle royauté du Christ.

De plus, pour que cette victoire de la vraie foi fût plus complète et manifestât plus hautement l'intervention de la divine Providence, il s'est trouvé que ce triomphe dans l'ordre moral de la religion sur l'idolâtrie et de la vérité sur le mensonge a été en même temps un fait bien rare dans l'histoire, le triomphe dans l'ordre politique de l'équité sur l'injustice, de la modération sur la violence, de la clémence sur la barbarie. Cette fois, Dieu a permis que les dons qui font les rois et les conquérants, le sens politique, le génie militaire, la séduction du caractère et de la parole, se trouvassent dans le camp de l'équité ; des futurs vainqueurs il a commencé par faire d'honnêtes gens afin qu'à la veille de leur victoire ils devinssent plus facilement des chrétiens.

Après l'abdication de Dioclétien, celle de Maximien et la création de deux nouveaux Césars (1er mai 305), c'était toujours la tétrarchie, deux Augustes et deux Césars ; le quadruple empire subsistait, le même dans la forme, mais entre les hommes quelle différence[1] !

Jusque-là ceux qui étaient arrivés à la pourpre sous la suprématie de Dioclétien avaient été précédés par une certaine illustration militaire. Maintenant il n'en était plus ainsi. Il n'est pas même dit de Sévère, l'un des deux nouveaux Césars, qu'il ait jamais été soldat ; on ne sait rien de son origine si ce n'est qu'il était illyrien[2]. Quant à l'autre, Daïa ou Daza, que Galère, pour lui donner un nom moins barbare, faisait appeler Maximin et qu'il surnommait Jovius pour le rattacher à Dioclétien, Daïa était fils d'une sœur de Galère, c'était là son seul mérite. Il avait comme ses ancêtres fait paître des troupeaux en Illyrie, puis on l'avait enlevé à son étable pour le faire passer rapidement par deux ou trois grades militaires[3]. Sévère et lui étaient de grands buveurs, des débauchés insatiables et Daïa de plus était un païen effréné[4]. Au temps où Dioclétien avait choisi des Césars, il avait su les mieux choisir.

De plus, les quatre empereurs qui régnaient suivaient une politique bien différente et faisaient à leurs peuples des conditions bien opposées.

En Orient, Galère, enfin délivré de l'incommode tutelle de Dioclétien, dominait depuis le Danube jusqu'au Tigre, ayant à sa droite et à sa gauche les deux Césars ses créatures. Sa nature barbare, libre enfin, avait fait explosion. Le spectacle du despotisme persique avait tourné la tête à ce vainqueur de la Perse — le despotisme a tant de séduction pour celui qui l'exerce, et quelquefois même pour ceux qui le subissent ! En Perse, Galère avait vu le sujet réduit ouvertement à l'état d'esclave, le roi ouvertement élevé à l'état de dieu. Dans l'Empire romain, à quelque hauteur de despotisme qu'on fût parvenu, on n'était pas encore parvenu jusque-là. Et ce régime, Galère, qui le proclamait hautement admirable, commençait à le mettre hardiment en pratique.

Ainsi, le droit de torture qui auparavant n'existait contre aucun homme libre, qui depuis tin siècle respectait du moins les sénateurs et les magistrats des cités, dut exister désormais contre tous, tant Galère aimait l'égalité ! Pour tous aussi, les supplices étaient aggravés ; les privilégiés étaient mis en croix, les plébéiens brûlés à petit feu, les mendiants dont l'Empire était encombré étaient entassés sur des barques et coulés en pleine mer. Et le nombre des mendiants s'accroissait de plus en plus ; car le chiffre des impôts ne faisait que s'accroître. Chaque jour on possédait moins, et chaque jour il fallait payer davantage ; le tortureur était appelé en aide au percepteur ; le recensement des propriétés et des personnes qui jusque-là s'était fait au moyen de libres déclarations, se faisait maintenant sur le chevalet. Pour découvrir les secrets du maître on torturait les esclaves ; pour connaître les richesses du mari on donnait la question à la femme ; pour faire parler le père on torturait les enfants. Ne soupçonnons pas ici Lactance d'exagération[5] ; rien n'est atroce comme la rapacité fiscale qui, après avoir appauvri un pays, l'accuse toujours de dissimuler sa richesse et ne veut jamais croire aux pauvres qu'elle a faits[6].

Ajoutez à cela la haine pour les lettres et les lettrés, le droit et les jurisconsultes ; ajoutez les juges militaires, ignorants et violents, qu'on envoyait dans les provinces juger seuls et sans assesseurs du patrimoine et de la vie des citoyens. Ajoutez un libertinage effréné, violent, tyrannique ; il semblait que toutes les femmes appartinssent de droit au gynécée du prince, comme tous les hommes à ses bourreaux[7]. Le libertinage était le honteux écueil sur lequel venait échouer la dignité personnelle et la modération politique de tous ces Césars ; Maximien s'y était brisé comme Galère ; et après Galère, Daïa, et plus tard Maxence et Licinius : qui n'était pas tyran par politique, l'était par libertinage.

Tel était le régime de l'Asie-Mineure, de la Grèce, de la Thrace, des provinces danubiennes sous Galère ; tel allait être probablement celui de l'Italie et de l'Afrique sous Sévère, et certainement celui de la Syrie et de l'Égypte sous Daïa. Sévère et Galère étaient liés l'un à l'autre par la dépendance de l'homme obscur et sans mérite envers celui qui a fait sa fortune. Galère et Daïa, ces deux bouviers illyriens, étaient du même sang et avaient les mêmes mœurs. Les provinces qu'ils gouvernaient voyaient donc dominer toutes les mauvaises passions, revivre toutes les traditions mauvaises que pendant vingt ans l'autorité de Dioclétien avait refrénées.

En face de cette servitude de l'Orient, la liberté relative de l'Occident ; en face de ces pâtres devenus Césars, Constance et après lui Constantin, devaient former le contraste le plus frappant. Eux aussi avaient du sang barbare dans les veines ; ils en avaient l'énergie, et Constantin en eut quelquefois la dureté. Mais une éducation meilleure, une origine plus romaine puisque leur famille avait déjà donné à Rome des Empereurs, les rapprochaient davantage des populations civilisées. Je ne dirai pas le scepticisme, mais bien plutôt le déisme religieux de Constance, sa tolérance pour les chrétiens, le faisaient aimer des chrétiens sinon de tous ses sujets. Chez tous deux, une intelligente courtoisie pour les lettres et pour les lettrés témoignait d'un goût meilleur et d'une âme plus élevée. Leur chasteté à tous deux, remarquable et remarquée en ce siècle, faisait contraste avec la débauche insatiable et violente des autres princes ; mariés de bonne heure, époux fidèles parce que leur âme était assez haute pour apprécier la dignité d'un amour pur, Constance et Constantin avaient passé sans se souiller à côté du bourbier Césarien.

Une autre différence existait encore entre cette famille et les autres familles décorées de la pourpre. Ils avaient le respect de la vieille Rome ; ils l'avaient, sinon comme des fils pieux, du moins comme des politiques éclairés. Ils savaient que cet empire et cette civilisation ne pouvaient se maintenir qu'à la condition de demeurer romaine ; et nous verrons plus tard Constantin se faire gloire de délivrer la ville de Rome tandis que Galère à Nicomédie rêve d'appeler l'Empire romain, Empire dacique. Sous la domination de Constance, l'Occident, vaillamment défendu sur le Rhin et sur les monts Cheviots, ne connaissant (sauf ses exceptions) ni la persécution antichrétienne ni les abus de la tyrannie fiscale, avait la paix intérieure et extérieure, la paix civile et la paix religieuse. Les princes de la famille Flavia étaient évidemment parmi les gouvernants du monde romain les honnêtes gens, les politiques sages, l'espérance de l'Empire[8].

Or, entre ces princes si divers, le lien était désormais brisé[9] ; le génie, l'ascendant, la suprématie de Dioclétien manquait ; le respect n'était plus rendu à personne par personne. Sans doute, Constance, dont l'âge était à peu près celui de Dioclétien, aurait eu le droit de prétendre à être, après lui et de la même façon que lui, le chef réel de la tétrarchie. Mais Constance n'aspirait pas à jouer ce rôle, ou plutôt il le savait impossible ; donner la paix et la prospérité à un tiers de l'Empire romain lui semblait une assez belle tâche. Galère d'ailleurs ne lui eût jamais permis de diriger de loin et par son ascendant personnel l'Empire romain tout entier. Si, après avoir subi pendant treize ans l'ascendant de Dioclétien, Galère avait fini par le secouer et par détrôner Dioclétien lui-même, ce n'était pas pour transporter sur Constance, fait César en même temps que lui, la déférence qu'il avait eue pour Dioclétien, le père commun de leur pouvoir.

Aussi, loin d'accepter la suprématie d'un autre, il rêvait maintenant la suprématie pour lui-même. Il avait auprès de lui son vieux camarade Licinius, son conseiller habituel ; et il rêvait, lorsque Constance âgé et maladif aurait été enlevé par la mort, de faire Licinius Auguste et de maintenir ainsi la Tétrarchie complète sous sa domination suprême. Puis, quand la vieillesse serait venue, après avoir célébré solennellement le vingtième anniversaire de son règne, il aurait proclamé Auguste le César Sévère à la place duquel il aurait fait César son bâtard Candidianus (c'était à l'époque dont nous parlons un enfant de neuf ans) ; cela fait, il aurait déposé la pourpre, et, laissant les soins du monde aux deux Augustes et aux deux Césars, il aurait pu, retiré dans quelque olympe terrestre, achever au sein d'une paix splendide sa vieillesse déifiée[10]. Tel était son rêve ; et déjà, pour écarter un obstacle à ses projets, il gardait auprès de lui sous un prétexte ou sous un autre, tantôt dans le palais de Nicomédie, tantôt dans les périls de la guerre, le jeune Constantin[11], le fils et bientôt l'héritier de Constance.

Voilà les deux influences qui se partageaient et qui bientôt, on devait le croire, allaient se disputer l'Empire veuf de son chef suprême.

Quelques mois néanmoins se passèrent en paix, parce que Galère attendait la mort de Constance. Comme témoignage de cet accord momentané des quatre princes, régnants et des deux princes en retraite, nous avons l'inscription qui dut figurer à Rome sur les thermes de Dioclétien enfin achevés. Elle est écrite au nom de nos seigneurs invaincus Dioclétien et Maximien anciens Augustes[12] ; des Césars invaincus, Constance et Maximien (Galère) Augustes ; de Sévère et de Maximien (ou plutôt Maximin, c'est-à-dire Daïa), très-nobles Césars et ceux-ci consacrent au nom de Dioclétien leur frère les thermes heureusement achevés qu'ils dédient à leurs chers Romains[13].

Mais cet accord, officiel sinon réel, allait cesser à la mort de Constance.

Il se sentait vieillir, et, inquiet sur le sort de son fils après lui, il voulait l'arracher de Nicomédie et le redemandait à Galère. Galère cherchait toujours à retenir auprès de lui le jeune tribun des soldats. Il ne voulait point rompre ouvertement avec le père ; mais le fils était un gage qu'il eût aimé garder, peut-être aussi un obstacle qu'il eût aimé détruire. Les demandes cependant se renouvellent, Galère ne peut plus s'y refuser : un soir (306) il donne à Constantin, avec la permission de partir, le diplôme au cachet impérial nécessaire pour se procurer des chevaux sur la route. Attends seulement jusqu'à demain, lui dit-il, j'aurai quelque ordre à te donner. Il se réservait ainsi l'espace d'une nuit pour dresser des embûches au voyageur, ou pour faire dire à Licinius, commandant en Thrace et en Illyrie, de l'arrêter. Mais le lendemain, Galère, resté dans son lit jusqu'à midi pour retarder le départ, quand il jugea à propos de s'éveiller, ne trouva plus Constantin ; la veille au soir, au sortir du souper, Constantin était parti. Galère veut envoyer à sa poursuite ; on ne trouve plus de chevaux : à chaque relai Constantin a emmené avec lui le plus de chevaux qu'il a pu ; il a fait mutiler le reste. Galère en pleure de rage ; tous ses rêves sont détruits[14].

Constantin traverse donc rapidement la Bithynie, la Thrace, l'Illyrie, le nord de l'Italie, la Gaule ; il arrive auprès de son père qu'il trouve prêt à s'embarquer à Boulogne pour une expédition dans l'île de Bretagne[15]. Il l'y accompagne et cette fois encore un succès militaire couronne les armes des Flavii ; les Pictes qui envahissaient la Bretagne romaine sont repoussés dans leurs montagnes. Mais cette dernière victoire a épuisé les forces de Constance, et bientôt, dans la ville d'York, ses sept enfants et les chefs de son armée entourent son lit de mort. En leur faisant ses derniers adieux, il désigne pour lui succéder le fils d'Hélène, qui échappé des mains de Galère est arrivé jusqu'à lui comme par miracle ; les autres, nés de Théodora, sont encore des enfants. Tous, frères, sœurs, généraux, soldats, acceptent ce vœu du mourant. Constantin ne voudrait être que César : ses soldats veulent qu'il soit Auguste ; un roi alleman, Eroc (Eric ? Crocus ?) auxiliaire de l'armée romaine, se montre de tous le plus ardent à faire un empereur romain. Constantin tout en larmes est couvert de la pourpre, amené par les chefs de l'armée devant le front des légions ; et le moribond, qui de son lit de douleur entend les acclamations des soldats, s'écrie :  Je meurs maintenant en repos (25 juillet 306)[16].

Ce fut un nouveau déboire pour Galère, lorsque lui arriva, avec l'image de Constantin[17] ornée de lauriers comme c'était l'usage, la nouvelle de cet événement. Il avait compté sur la mort de Constance ; et la mort de Constance lui donnait, au lieu d'un rival vieux et affaibli, un rival jeune, énergique, populaire, ambitieux[18], un fils de Constance dont le beau visage reproduisait les traits de son père[19]. Il fut sur le point de faire brûler le message et même le messager. Mais le séjour forcé de Constantin à Nicomédie lui avait donné l'occasion de s'y faire aimer des soldats ; Galère prévit que ses propres légions ne toléreraient pas une telle insulte envers Constantin. Il se résigna donc, envoya, comme c'était l'usage, la pourpre au nouvel Empereur, mais à titre de César seulement, non d'Auguste. Pour maintenir la hiérarchie établie par Dioclétien, ce fut Sévère qu'il fit Auguste. Constantin ne se plaignit point ; il ne perdait rien à avoir un titre inférieur et il gagnait à faire preuve de modération[20].

La paix de l'Empire ne fut donc pas encore troublée. Et plus tard, quand elle le fut, quand il y eut un acte d'hostilité contre Galère, Constantin n'en fut pas l'auteur. Sous les premiers empereurs, lorsque les cités provinciales gardaient encore une certaine liberté, Rome, plus directement soumise aux Césars, était de toutes les villes la moins libre. En ce siècle-ci au contraire, où la liberté des villes avait été si complètement absorbée, Rome, protégée par ses souvenirs, par la grande ombre de son sénat bien qu'il ne fut plus qu'une ombre ; et surtout, depuis Dioclétien, émancipée en quelque sorte par l'absence de tout César ; Rome était I devenue la ville de l'Empire la moins subjuguée et la moins servilement obséquieuse. Nous avons déjà vu Dioclétien abréger l'unique visite qu'il lui fit parce qu'il était choqué de la liberté de ses propos ; tant on était devenu difficile en fait de servitude ! Aussi lorsque Galère, ou Sévère, qui n'était que son lieutenant, voulut étendre à l'Italie et à la ville de Rome, le système de fiscalité aveugle qui florissait en Orient, Rome se rappela de vieilles franchises en fait d'impôt, bien oubliées ou bien diminuées. En même temps qu'on voulait la faire payer comme l'Orient, on prétendait éloigner d'elle les prétoriens qui étaient devenus les soldats de la cité plus que ceux de l'Empereur. Soldats et peuple se soulevèrent, tuèrent les censiteurs et les juges ; et, comme ils avaient à peu de distance de Rome[21] un fils ou un prétendu fils de l'Empereur émérite Maximien, ils lui mirent la pourpre sur les épaules (28 octobre 306)[22]. Maxence était le nom de ce cinquième Empereur que la force populaire prétendait imposer aux quatre autres[23].

Cette nouvelle émut Galère sans trop l'effrayer. Quoiqu'il eut donné sa fille à Maxence, il le haïssait comme arrogant et le méprisait comme incapable. On nous représente Maxence comme contrefait de corps et d'esprit et n'ayant jamais su se faire aimer de personne. Il était, disait-on, fils d'un Syrien ; et la femme de Maximien, se voyant stérile, avait eu l'audace de le faire passer pour son fils afin de s'attacher par une paternité prétendue le cœur de son mari. Maximien semblait se douter de cette fraude, tant il était froid et dédaigneux pour celui qu'on appelait son fils ! Mou, paresseux, débauché, Maxence ne semblait pas à Galère un rival redoutable, et il crut que Sévère aurait promptement reconquis la ville éternelle.

Il n'en fut pas ainsi. Quand Sévère, sur l'ordre de son impérieux collègue, se mit en marche contre Rome (307), il trouva qu'il avait à faire, non au seul Maxence, mais au vieux Maximien sorti de sa retraite. Celui-ci avait abdiqué à contrecœur et, lorsque, dans la Lucanie où il habitait, il vit la pourpre lui arriver de la part de son fils, il eut un transport de joie ; le fils sentait le besoin d'être soutenu par une renommée moins jeune que la sienne, et le père n'eut garde de refuser son aide à la royauté naissante de son fils[24]. Les deux Augustes, nouveau et renouvelé, auraient même voulu s'associer Dioclétien sans lequel Maximien n'avait jamais su marcher ; et un message traversant l'Adriatique alla offrir la pourpre à ce vieil ermite trop perspicace et trop prudent pour l'accepter[25]. Sévère avait donc en face de lui, non-seulement Rome, non-seulement Maxence et sa naissante fortune, mais Maximien et sa vieille renommée. Et il n'avait pour les combattre que les légions d'Italie, c'est-à-dire d'anciens soldats de Maximien ou des soldats qu'un long séjour dans Rome avait faits les amis du peuple romain. Avec un peu d'or, Maxence acheva de les gagner. Arrivés sous les murs de Rome, ils se refusèrent à combattre, et Aurélien préfet du prétoire de Sévère fut le premier à le trahir. Sévère ne put que s'enfuir dans Ravenne, n'osa pas s'y défendre, et se rendit à Maximien en lui remettant la pourpre qu'il avait portée deux ans. La seule chose qu'il gagna à cette soumission fut quelques mois de captivité, et, quand on fut las de le laisser vivre, la permission de mourir à sa guise ; sur sa demande on lui ouvrit les veines (avril 308)[26].

Ce premier succès des deux nouveaux empereurs fut bientôt suivi d'un autre. C'était le tour de Galère d'aller se faire battre en Italie ; mais, tandis qu'il s'y préparait lentement, Maximien eut le temps d'aller dans les Gaules y chercher un appui pour sa cause. Il y mena sa fille Fausta et la fit épouser à Constantin (31 mars 307[27]) — on ne sait si Minervina, la première femme de Constantin, était morte ou si elle fut répudiée. Constantin était séparé ainsi de Galère dont il savait la haine irréconciliable ; il acceptait la révolution qui s'était accomplie dans Rome[28]. Il ne déclarait, il est vrai, la guerre à personne, il ne promettait à son beau-père aucun secours armé ; mais enfin, toute la moitié occidentale de l'Empire se trouvait désormais réunie, sinon sous les mêmes drapeaux, du moins dans les mêmes espérances.

C'est alors que Galère entre &titane, fier, menaçant, annonçant qu'il va brûler Rome et exterminer le Sénat. Il approche même de cette cité ; Empereur romain, César ou Auguste depuis seize ans, il voit ce jour-là Rome pour la première fois ; il reste confondu de sa grandeur, effrayé de ses préparatifs de défense. :I1 essaie de traiter ; il espère que Maxence consentira à lui demander la pourpre qu'il porte déjà et la tenir non de sa propre volonté, mais de la main du plus ancien des Augustes. Maxence lui refuse cette satisfaction, assuré que Galère, comme Sévère l'année précédente, sera abandonné par ses troupes. En se prosternant devant les soldats, en les suppliant, en leur promettant d'immenses largesses, Galère obtient seulement de n'être pas livré à son ennemi. Il se retire à travers l'Italie, accordant à ses soldats, comme première récompense, la liberté de piller, de brûler, de tuer, de violer. Tels sont les adieux de ce César, après sa première et dernière visite à la terre romaine[29].

Mais ses ennemis, plus heureux que lui, n'ont pour cela ni plus de sens ni plus d'honnêteté. Le vieux Maximien devrait être satisfait ; il porte la pourpre, il la porte avec son fils, ce qui ne devrait pas être pour lui un sujet de regret. Ne craignant plus rien de Galère et de l'Orient, rassuré du côté de l'occident par son alliance avec Constantin, il est désormais affermi dans la possession de l'Italie. Mais Maximien n'est pourtant pas satisfait : il est mécontent de l'Afrique qui tarde à reconnaître son Empire ; il est mécontent de son gendre qui n'a pas voulu prendre les armes contre Galère, il est mécontent de son fils qui prétend être Auguste comme lui et même plus que lui. Pour l'écarter, Maximien un jour rassemble ses soldats ; il les harangue, plaint les maux de l'Empire, en accuse Maxence, le saisit et lui arrache la pourpre. Il comptait sur sa vieille popularité parmi les soldats : mais Maxence, lui, pouvait compter sur son or ; le fils, protestant contre la violence de son père, se jette en bas du tribunal où ils siégeaient tous deux, se réfugie dans les rangs de l'armée et est accueilli par une acclamation favorable. Maximien, hué par les soldats, cherche à leur persuader que ce qu'il vient de faire était un jeu et qu'il a voulu seulement mettre à l'épreuve leur amour pour son fils. On ne l'écoute pas, il s'enfuit loin de Rome ; et le catalogue si variable des empereurs en exercice, corrigé cette fois encore par une révolution militaire, compte un Auguste de moins[30].

L'Empereur rayé ne se tient cependant pas pour battu. Cet infatigable doyen de la pourpre (puisque Dioclétien ne compte plus) court à Trèves implorer son gendre contre son fils. Mais Constantin sait trop bien juger ces ambitions vaniteuses et passionnées pour intervenir en faveur de l'une ou de l'autre. Repoussé à Trèves, Maximien court vers Nicomédie, et de ce côté-là il sera plus heureux. Le hasard fait que Galère, venu à Carnuntum en Pannonie, se rencontre avec lui dans ces parages ; l'ambition dépitée de Maximien se réconcilie sans peine avec l'ambition dépitée de Galère et tous deux sont résolus de relever contre Maxence le drapeau de la vieille tétrarchie. Mais quelle gloire et quelle force si à la tête de la tétrarchie restaurée on pouvait remettre son ancien chef toujours vénéré, Dioclétien t Ils font venir Dioclétien de Salone, et leurs ambitions réunies espèrent réveiller cette vieille ambition qui sommeille. Mais le vieillard en avait assez de pareilles entreprises et de pareils colloques : Venez à Salone, dit-il, vous verrez les beaux légumes que j'y cultive de ma main et vous jugerez si la pourpre doit me tenter encore[31]. Rare sagesse, même quand il s'agit de la pourpre la plus ternie et la plus difficile à porter !Que de malheurs eussent été épargnés à notre siècle si un autre César détrôné eût pris autant de goût aux choux et aux laitues de l'île d'Elbe

En effet, ses anciens collègues demeurés ou rentrés sur la scène pendant qu'il se reposait dans les coulisses, c'est-à-dire dans son magnifique palais de Spalatro[32], ses anciens collègues jouaient un bien pauvre rôle. Son refus ayant fait manquer la restauration projetée de la tétrarchie, qu'allaient devenir ces alliés d'un jour, Galère et Maximien ? Galère avait à remplacer son co-auguste Sévère, et choisit, comme on pouvait s'y attendre, son ami et son ancien lieutenant Licinius qui lui avait rendu de grands services dans la guerre de Perse, Dace ou Illyrien comme tous ces Césars, grossier comme eux, débauché et païen comme eux. Mais le faire César, c'est-à-dire adopter pour son fils un homme probablement plus âgé que lui-même, eût été de la part de Galère trop ridicule ; il le fait donc tout de suite Auguste (11 novembre 307)[33], et pour donner à son investiture une solennité plus grande, il appelle à cette cérémonie le vieux Dioclétien. Dioclétien ne lui refuse pas cette complaisance, et faisant acte d'empereur pour la dernière fois, le grand prêtre de la tétrarchie consent à sacrer, en lui donnant la pourpre, le nouveau prince[34].

Mais Galère comptait sans son neveu, Maximien Daïa, lui aussi Illyrien, païen, débauché, barbare. Gouvernant depuis deux ans à titre de César la Syrie et l'Égypte, Daïa trouve qu'il avait droit à cet avancement plus que le nouveau venu ; il l'écrit insolemment à Galère. Celui-ci qui ne veut pas se brouiller avec l'Occident et l'Orient tout à la fois répond modestement en faisant valoir les droits que l'âge et les services militaires donnent à Licinius. Essayant de contenter tout le monde, il propose à Daïa de le faire fils d'Auguste, dénomination nouvelle qu'il invente, puisque personne ne veut plus être César. Mais le pâtre Dace n'entend rien à ces distinctions, il veut être Auguste et se fait proclamer tel par son armée (novembre 307 ou janvier 308 ?). Il l'écrit à Galère, et Galère, vaincu par l'arrogance de son neveu, admet qu'il y aura dans l'Empire quatre Augustes égaux en titre et en droit. Vaines querelles, mais qui suffisent à envenimer les cœurs et après lesquelles l'édifice élevé par Dioclétien reste à jamais brisé[35] !

De son côté, que fait Maximien ? Repoussé de toutes parts mais non résigné, il joue un rôle plus pauvre encore que celui de Galère. Il retourne auprès de Constantin, une seconde fois se dépouille solennellement de la pourpre et ne demande, dit-il, que l'hospitalité. Elle lui est accordée, amicale, honorable, respectueuse même ; Constantin veut qu'on lui obéisse, il lui demande conseil, il le fait presque régner auprès de lui. — Cependant un armement des Francs menace la Gaule. Constantin part, n'emmenant d'après le conseil de Maximien qu'une faible partie de son armée. Maximien l'accompagne quelque peu vers le Nord, puis redescend lentement vers le Midi, le long de la Saône et du Rhône, épuisant les magasins sur sa route afin de rendre une poursuite plus difficile. Au bout de quelques jours, lorsqu'il présume Constantin entré sur la terre barbare, il reprend la pourpre, s'empare du trésor, jette l'argent autour de lui, se met à la tête des soldats, écrit aux légions éloignées pour les gagner à sa cause. Constantin, averti de tette trahison, revient sur ses pas avec une célérité merveilleuse, descend la Saône et le Rhône, débarque à Arles lui et son armée. Maximien perd la tète, ses soldats l'abandonnent, il va s'enfermer dans Marseille ; Constantin investit cette ville. Du bas des remparts il a un colloque avec son beau-père ; il lui parle sans colère, Maximien répond par des injures. Mais pendant cette conférence, à l'autre bout de la ville, habitants ou soldats ouvrent les portes aux assiégeants. Maximien est fait prisonnier ; amené devant le vainqueur, il quitte une troisième fois la pourpre et il a grâce de la vie[36]. Nous verrons encore une fois se réveiller son éternelle monomanie de la pourpre.

Pendant ce temps, un nouvel incident troublait la vie orageuse de ces Césars. Maxence qui avait l'Afrique dans sa part de l'Empire y envoyait ses images pour les faire, adorer, comme on disait. La légion qui était là ne les recevait pas, et, jalouse d'être sous le sceptre de Daïa plutôt que sous celui de Maxence, elle s'embarquait pour Alexandrie. La flotte de Maxence l'obligeait cependant à rentrer au port, et l'Auguste de Rome était proclamé à Carthage. Mais ensuite, se fiant peu au phrygien Alexandre qui commandait dans ce pays, Maxence lui demandait un otage, et pour otage son fils ; Alexandre refusait parce qu'il craignait pour ce jeune homme les voluptés de Rome et le voisinage d'un prince débauché ; Maxence répondait à ce refus par une tentative d'assassinat, et les soldats indignés, se révoltant de nouveau, mettaient hardiment la pourpre sur les épaules d'Alexandre (308)[37].

A cette heure-là donc, Maxence était réduit à la seule Italie ; Daïa gouvernait la Syrie et l'Égypte ; Licinius occupait la Grèce, la Thrace et les provinces danubiennes ; Galère, entre ces deux Augustes qu'il avait faits, trônait à Nicomédie ; le fils de Constance gardait la Gaule, la Bretagne et l'Espagne. Ce partage de l'Empire entre cinq Augustes, sans compter l'usurpateur Alexandre, sans compter Maximien déchu et Dioclétien retiré, ne s'était pas fait amicalement, on l'a vu ; Galère ne reconnaissait peut-être point encore Maxence ; Maxence ni personne ne reconnaissait Alexandre ; Constantin était au moins froidement avec Galère ; et Daïa ne pouvait guère avoir de déférence pour l'Empereur par lequel il s'était fait faire Auguste bon gré mal gré. Dioclétien, cet homme divin, comme disait vers ce temps un panégyriste ; Dioclétien, qui le premier de tous avait d'abord partagé puis abdiqué le pouvoir et qui, lui du moins, ne se repentait pas de sa retraite toute volontaire ; Dioclétien qui, homme privé, disait-on encore, recevait les hommages de tant de princes et se plaisait à vivre sous l'ombre de ces jeunes arbres sortis de son propre tronc[38] ; Dioclétien pourtant ne devait guère reconnaître son œuvre et comptait peu sans doute sur la durée de tels ombrages.

Il y eut cependant un certain temps, non de réconciliation, mais de répit ; il y eut un an ou deux sans nouvelle tragédie et sans nouvel empereur. Mais ce qui ressort clairement des querelles d'ambition et d'orgueil de cette étrange famille impériale, c'est que parmi tous ces Césars, un seul grandissait, un seul pouvait être pris au sérieux, un seul pouvait être une espérance pour l'Empire : Constantin. Depuis qu'il était César, il n'avait pas une seule fois passé les Alpes, laissant à leurs dissentiments et à leurs colères Maxence et Galère, Galère et Daïa, Maximien et son fils. Étranger à ces luttes, il avait consacré sa vie et ses forces à la tâche, honorée de tous, de la défense de l'Empire sur le point où l'Empire était le plus vigoureusement attaqué. En face des Francs, à cette heure les plus redoutables ennemis de l'Empire romain, en face d'autres peuples encore, sur le Rhin et sur la Tweed, il avait courageusement combattu. L'année même de la mort de son père (306), il rejetait au delà du Rhin les Francs qui, enhardis par cette mort, avaient manqué à la foi jurée ; il livrait deux de leurs rois, Ascaric et Gaïs, au supplice de l'amphithéâtre — acte de cruauté romaine et païenne qu'exalte son panégyriste[39] païen — ; il passait même le Rhin, pénétrait sur le territoire des Francs Bructères et en faisait périr un grand nombre ou sur le champ de bataille ou sur l'arène[40]. Comme pour défier les barbares et montrer qu'il comptait plus souvent les attaquer que se défendre contre eux, il bâtissait à Cologne un pont sur le Rhin, garnissait de châteaux forts la rive de ce fleuve, entretenait sur ses eaux une flotte nombreuse, voyait les chefs barbares effrayés par cette menace s'humilier devant lui[41], et fondait des jeux franciques (du 14 au 20 juillet), pour célébrer chaque année sa victoire. Un peu plus tard (308), pendant que se tramait le complot de Maximien ou pendant que Constantin l'étouffait, les Francs étaient de nouveau vaincus ; reparti de Marseille pour achever de les repousser, Constantin apprenait que d'eux-mêmes ils s'étaient retirés ; il n'avait plus qu'à rendre grâces dans le temple d'Apollon le plus voisin[42].

Ainsi, pendant que l'Italie et l'Orient étaient déchirés par les querelles de leurs Empereurs, la Gaule, l'Espagne, la Bretagne étaient paisibles. Elles pouvaient compter, grâce à la famille Flavia, treize années an moins de sécurité au dehors, de repos au dedans. Si, des invasions franciques ou alémaniques des années précédentes, de l'invasion permanente du fisc impérial si lourde avant que Constance n'en eut atténué le fardeau, il restait encore dans l'intérieur même de la Gaule[43] des traces désolantes, la prospérité de ces contrées n'en était pas moins supérieure à celle du reste de l'Empire. La Bretagne elle-même, sortie depuis peu de temps de la barbarie, nous est peinte par un rhéteur gaulois comme une terre fortunée ; le ciel et le sol lui sont également propices ; ses hivers ne sont pas trop rigoureux, ni ses étés trop brûlants ; elle recueille les dons de Cérès et ceux même de Bacchus ; elle n'a ni bêtes féroces ni serpents ; ses nombreux troupeaux lui donnent en abondance le lait et la laine[44]. Trèves, cette capitale militaire de la Gaule, voyait ses murailles relevées, ses temples restaurés, son cirque, ses basiliques, son Forum renaître plus grandioses que jamais ; si bien qu'elle se réjouissait presque d'avoir été ruinée puisque Constantin la refaisait plus belle[45]. Libre des querelles qui occupaient les autres Augustes, plus vigilant et plus intelligent qu'eux, Constantin veillait sur ses provinces et son premier soin avait été de les visiter toutes[46]. Il leur donnait la paix ; il leur épargnait les guerres du dehors, les guerres du dedans, et la guerre plus déplorable encore que la persécution faisait à la vérité. Ce dernier mot nous ramène à l'Église, et nous avons à voir ce que faisaient d'elle ces Empereurs insensés et ce sage Empereur.

 

 

 



[1] Inscription de la seconde tétrarchie :

DD. NN. FLAVIO VALERIO CONSTANTIO ET GALERIO MAXIMIANO INVICTIS AC CLEMENTISSIMIS AVGG. ET DD. NN. FLAVIO VALERIO SEVERO ET GNEIO VALERIO MAXIMIANO DAIA NOBILISSIMIS AC FORTISSIMIS (cœsaribus). (Groin, 1057).

L'ordre de préséance s'établit, d'après les monnaies, comme il suit :

1° Constance Auguste : marqué A dans les monnaies de Carthage, P(rima) et un soleil dans les monnaies de Rome. 2° Galère Auguste : à Carthage B, à Rome S(ecunda) et une couronne. 3° Sévère César : à Carthage Γ, à Rome T(ertia) et un soleil. 4° Daïa César : à Carthage Δ, à Rome Q(uarta) et un soleil.

Il y a aussi des monnaies à l'effigie de Dioclétien et de Maximien abdiqués ; elles les intitulent les heureux vieillards et parlent de leur repos : BEATISS (imus) SEN (ior) AVG (ustus). — PROVIDENTIA DEORVM. — QVIES AVG ou AVGG.

[2] Flavius Valerius Severus, César en 305, gouvernant l'Italie et l'Afrique ; Auguste en 306 ; consul en 307 ; vaincu et pris par Maxence en 307 ; tué en 308. Ses monnaies portent : perpetuitas, concordia, utilitas publica, Herculi victori, etc. Inscription milliaire en son nom et au nom de Daïa, en Afrique. (Renier, 4040).

[3] Galeries Valerius Maximinus Daïa (ou Daza), neveu de Galère, originaire comme lui de la Dacia ripensis ; César en 305, et surnommé Jovius ; gouverne la Syrie et l'Égypte, Auguste en 308, vaincu par Constantin et Licinius en 313, s'empoisonne et meurt à Tarse. Ses monnaies : Gaudium romanorum, etc.

[4] De mortib. persecut., 49.

[5] De mortib. persecut., 21-23.

[6] De mortib. persecut., 21-23.

[7] De mortib. persecut., 21.

[8] Le témoignage des historiens païens est ici conforme à celui des chrétiens : Constance à qui suffisait la dignité d'Auguste refusa de se charger de l'Italie et de l'Afrique ; homme supérieur, d'une simplicité parfaite, adoré comme un dieu par les habitants de sa province, ne soutenant pas avec passion les intérêts du fisc, jugeant qu'il valait mieux que la richesse fût aux mains des particuliers que dans les coffres de l'État ;.... aimé et vénéré des Gaulois qui échappaient, grâce à lui, à la prudence soupçonneuse de Dioclétien, et à la brutalité sanguinaire de Maximien. (Eutrope, X, I.)

[9] A la belle harmonie de Dioclétien et de ses collègues, succéda une musique discordante et confuse. Aussi Némésis empêcha-t-elle deux des concertants (Maxence et Daïa) d'arriver même au vestibule du lieu où étaient les héros. Julien, De Cæsaribus.

[10] De mortibus persec., 20.

[11] Sur les dangers que courut Constantin dans la guerre contre les Sarmates, V. l'anonyme édité par Valois.

[12] SENIORES AVGVSTI.

[13] THERMAS FELICES ROMANIS SVIS. (Orelli, 1056.)

[14] De mort. persec., 24, les deux Victor, Zosime, II, 8, et l'anonyme de Valois.

[15] Eumène, Panegyr. ad Constantinum, 7.

[16] Aurel. Victor, De Cæsarib. Lactance, De mort. persec. 24. Eumène, Panegyr. Constantini, 8. Eusèbe, Hist. Ecclés., 13. Vita Constantini, I, 21, 22. Socrate, I, 2. Zosime, II, 9.

[17] C. Flavius Valerius Aurelius Claudius Constantinus, né le 27 février vers l'an 274, à Naïsse, ville de la Dardanie, fils de Constance Chlore et de sainte Hélène, — fait la guerre d'Égypte avec Dioclétien en 296. — Proclamé Auguste par les soldats (25 juillet 306), n'accepte que le titre de César. — Auguste en 308, — consul en 307, 312, 313, 315, 319, 320, 326, 329, — meurt le 22 mai 337.

Épouse : 1°  Minervine.. ; 2° (en 307), Flavia Maximiana Fausta, fille de Maximien Hercule et d'Entropie, née à Rome — Augusta, en 308 ; — elle périt étouffée en 326.

[18] Cujus jam a puero ingens potensque animus imperitandi ardore agitabatur. Victor, de Cæsarib. — Vir ingens et omnia efficere nitens quæ animo præparaverat, simul principatum totius orbis affectans. Eutrope, X, 4.

[19] Eumène, Panegyr. ad Constantin., 4.

[20] Lactance, De mort. persec., 25.

[21] In villa sex millibus ab urbe discreta, itinere Lavicano. Victor, Épitomé. Qui haud procul urbe in villa publica morabatur. Eutrope, X, 2.

[22] Lactance, De mort. persec., 26. Aur. Victor, de Cæsarib. Eutrope, X, 2. Zosime, II. Maxence est mentionné 17 ans auparavant par le panégyriste Mamertinus : Alacrem sub dextera filium, etc. Panegyr. ad Maximian., I, 14.

[23] M. Aurelius Valerius Maxentius, fils (ou au moins supposé tel) de Maximien Hercule et d'Eutropia, proclamé Auguste à Rome en octobre 306. — Consul, 308, 312, — vaincu et noyé au Pont Milvius, 28 octobre 312. — Ses monnaies l'appellent conservator urbis, — victor omnium gentium. — Inscriptions en son nom, Orelli, 1066, 1067 : RESTITVTORI LIBERTATIS ET PUBLICAE SECVRITATIS, à Palerme, ibid., 1071.

Sa femme : Valeria Maximilla, fille de Galère (Victor, Epit. 40 : De mortib. persecut., 18).

Leurs fils : 1° M. Valerius Romulus, consul en 308, meurt jeune et est déifié par son père. Les traces de cette apothéose sont nombreuses. Monnaie : DIVO ROMVLO AETERNAE MEMORIAE ; inscription : DIVO ROMVLO, dans le cirque dit de Romulus, sur la voie Appia (Orelli, 1069).

Une double inscription, dédiée par ce Romulus à son père et à sa mère, pro more caritatis ejus, etc., à Zagarolo, maintenant à Rome, au palais Rospigliosi (Henzen, 5571 ; Muratori, p. 753).

2° Un autre fils, qui survécut à son père, mais dont on ne sait rien.

[24] Il y a des monnaies de cette seconde royauté de Maximien : MAXIMIANVS SEN (ior) P. F. AVG. — CONCORDIA MILIT (um), FELICIT (as) ROMANA, etc.

[25] Zosime place cette négociation un peu plus tard, après la défaite de Galère par Maxence et pendant le voyage de Maximien hors d'Italie. Mais peut-être la confond-il avec une autre négociation dont nous parlerons ci-après. Il attribue le refus de Dioclétien à l'inspiration divine qui lui faisait prévoir des révolutions, II, 10.

[26] Lactance, ibid., 86 ; Aur. Victor (de Cæsaribus) dit seulement : Ravennæ obiit. L'autre Victor (Épitomé) met sa mort aux Tres tabernœ près de Rome. Eutrope (X, 2), à Ravenne. V. encore Panegyric. incerti ad Constantin., 3.

Hunc per perjurium Maximianus decepit, in villa publica Appho ad XXXII milliarium custodiri jubet. Postea, veniente Galerio, jugulatur, et in monumentum Gallienum ad VIII. mill. refertur. (Anonymus apud Valesium.) — Zosime le fait périr traitreusement aux Tres tabernœ, allant de Ravenne à Rome (!), II, 10.

[27] Voyez l'Epithalame prononcé à l'occasion de ce mariage par un rhéteur inconnu (dans la collection des panégyriques), et ce qui est dit du premier mariage de Constantin : (Te ab ipso fine pueritiæ illico matrimonii legibus tradidisti..., novum jam tum miraculum, juvenis uxorius, 4.) — Sa liaison d'enfance avec Fausta (6). — Les prières adressées à Maximien par la ville de Rome, pour qu'il daignât reprendre la pourpre, et l'héroïsme avec lequel, sur la prière de cette mère vénérée, Maximien a repris le fardeau de l'empire qu'il avait déjà porté pendant vingt ans (11).

[28] C'est sans doute au désir de Maxence de s'attirer les bonnes grâces de Constantin qu'il faut attribuer la déification faite par lui de Constance Chlore. (Monnaies : DIVVS CONSTANTIVS. — MAXENTIVS DIVO CONSTANTIO ADFINI.) C'est donc à tort que Zosime voit dans le mariage de Fausta une manœuvre de Maximien, toujours tracassier et perfide, contre son fils Maxence. Id., ibid.

[29] De mortib. persec., 27 ; Aurel. Victor, de Cæsaribus ; Zosime, II, 10 ; Anonym. Vales.

[30] De mortib. persec., 27. Eutrope, X, 2.

[31] De mort. persec., 29. Aur. Victor, Épitomé.

[32] La ville archiépiscopale de Spalatro en Dalmatie, non loin de l'ancienne Salone, n'est autre chose que le palais de Dioclétien transformé en cité. Les ruines de ce palais ou celles des édifices voisins ont fourni une cathédrale, deux autres églises, etc. Trois portes, des portions d'aqueducs, d'autres ruines subsistent encore.

[33] C. Flavius Valerianus Licinius ou Licinianus, originaire de la Dacia ripensis, vers 260, — proclamé Auguste par Galère et surnommé Jovius, le 11 novembre 307. — Consul en 312, 313, 314, 318, — défait par Constantin, à Andrinople et à Chrysopolis, en 323, — pris et mis à mort à Thessalonique.

Sa femme : Constantia, fille de Constance Chlore et de Théodora, mariée en 313, meurt vers 330.

Son fils : Valerius Licinius Licinianus, fait César à l'âge de vingt mois en 317. Consul en 319, dépouillé de la pourpre en 323, tué en 326.

[34] De mortib. persec., 25.

[35] Lactance, 33.

[36] De mort. persec., 29, 30 ; Eumène, Panegyr. Constantin., 14, 20 ; Eutrope, X, 1.

[37] Zosime, II, 18. Aur. Victor, de Cæsaribus et Épitomé. — Monnaie d'Alexandre, portant : IMP. ALEXANDER P F. AVG. et au revers, INVICTA ROMA FELIX KARTHAGO, ou encore, GLORIA EXERCITVS KARTH.

[38] Eumène, Panegyr. Constantin., 15.

[39] Eumène, Panegyric. Constantini, 10, 11, 13.

[40] Eumène, Panegyric. Constantini, 14. Nazarii Panegyr., 16, 18, 19.

[41] Eumène, Panegyric. Constantini, 13.

[42] A Lyon ou à Vienne, croit-en. — Eumène, Panegyric. Constantini, 21, 24.

[43] Eumène, Oratio pro Flaviensibus, 5, 8.

[44] Eumène, Panegyr. Constant., 9.

[45] Eumène, Panegyr. Constant., 22.

[46] Eusèbe, De vita Const., I, 45.