LES CÉSARS DU TROISIÈME SIÈCLE

TOME DEUXIÈME

LIVRE IV. — UN EMPEREUR HOMME DE BIEN. - ALEXANDRE SÉVÈRE - 222-235

CHAPITRE II. — FINANCES.

 

 

Cette simplicité, je n'ai pas besoin de le dire, amenait avec elle l'économie : l'économie dans la maison du prince, l'économie dans l'administration de l'État. Qu'on me pardonne si j'entre ici dans des détails de ménage. Ces détails de ménage que Rome a recueillis étaient précieux pour elle ; ils constituaient à ses yeux toute une politique.

Du reste, l'économie était facile quand on succédait à un prince aussi sottement et aussi honteusement prodigue qu'Élagabale. S'il laissait après lui peu de recettes nouvelles à faire, il laissait beaucoup de dépenses à supprimer, avec un double profit et pour la bourse et pour l'honneur. On avait trouvé dans son palais un personnel à la fois ignoble et coûteux que j'ai souvent énuméré, et le balayage moral que le palais venait de subir était aussi un balayage financier. Quand le palais n'eut plus d'autres habitants que ceux qui rendaient d'utiles services[1], les histrions et les courtisanes étant sortis par une porte, les millions entraient par une autre. C'est bien le moins que la vertu ait sur le vice le petit avantage de coûter moins cher.

On avait trouvé des services nécessaires, mais vulgaires, érigés presque en dignités de l'État et rétribués comme tels, des foulons, des tailleurs, des peintres, des échansons, classés sur le pied des fonctionnaires publics ; Alexandre les réduit à une simple, tout au plus à une double ration : — des cuisiniers, des pêcheurs, des baigneurs, de condition libre et salariés à grands frais ; il les remplace par des esclaves — tout un monde de médecins pour les santés toujours compromises des amis d'Élagabale ; avec la tempérance pour premier médecin, il n'en garde que sept dont un seul payé en argent, les autres (esclaves ?) en rations[2] : — des soldats de parade[3] faits, non pour le combat, mais pour la montre, comme il y en a dans toutes les cours : ceux-là, Alexandre ne les supprime pas ; il sait que soldats et peuple sont enfants et aiment une certaine pompe sous les armes. Mais cette pompe qu'il accepte, il la modère ; il veut à ces soldats des costumes brillants mais non somptueux[4], c'est-à-dire sans or, argent, soie, ni pierres précieuses ; pour les drapeaux, pour toutes les magnificences royales, il accorde de l'or et de la soie, mais avec mesure. Le pouvoir, disait-il, repose sur la force, non sur l'éclat[5].

On avait trouvé enfin — ce que les prédécesseurs d'Alexandre estimaient peut-être une sage épargne — de vastes magasins qu'Élagabale n'avait pas été tenté de visiter ni de gaspiller et dans lesquels dormaient des trésors inutiles accumulés par une prévoyance maladroite ou par une frivolité orgueilleuse. Alexandre, qui a deviné les économistes modernes, se soucie peu de garder ces capitaux dormants, inutiles aujourd'hui et peut-être sans valeur le jour où Fon voudra en tirer parti. — Il y a là des bijoux et des pierreries gardés plus encore à titre de richesses qu'à titre d'ornements. Alexandre estime peu cette richesse improductive, et trouve, au moins pour lui, cette parure trop puérile. Sa femme elle-même et sa mère ne possèdent en fait d'or et de pierreries qu'un réseau sur leur tête, des boucles à leurs oreilles, un collier[6], une couronne pour faire les sacrifices, un seul manteau parsemé d'or, une cyclas (draperie légère qu'on jetait sur le reste du vêtement) ornée au plus de six onces d'or. Le reste des pierreries du palais a été vendu. — Il y a des lingots, de la vaisselle d'or et d'argent par milliers de livres. Les lingots sont portés au trésor public, comme aussi la vaisselle d'or sans doute, car Alexandre ne veut pas de vaisselle d'or. Quant à son argenterie, il la réduit à un taux minime, deux cents livres (en tout ? ou pour chaque service ?)[7], dût-il, le jour où, par extraordinaire, il lui en faudra davantage, en emprunter à ses amis. — Une autre sorte de capital dormant, c'étaient de riches étoffes ; dans l'antiquité, une garde-robe plus ou moins magnifiquement remplie compte pour une bonne part dans une fortune ; pour des gens inquiets de l'avenir et craignant tous les genres de placement, c'était là aussi une manière de thésauriser ; la soie surtout avait une valeur énorme. Alexandre la trouve trop coûteuse comme parure, trop précaire comme placement ; plus confiant dans le crédit, il entend placer ailleurs que dans les armoires du palais. Lui-même ne porta jamais une étoffe toute de soie, rarement une étoffe mêlée de soie. Les magasins d'Élagabale demeurent donc vides ; quand un habit ou une étoffe précieuse a séjourné un an sans emploi dans les armoires du palais, elle est vendue[8]. — Le palais contenait enfin des milliers d'esclaves inutiles, capital non-seulement stérile, mais coûteux : Alexandre en réduit tellement le. nombre que, dans les circonstances extraordinaires, il aura encore recours à l'obligeance de ses amis.

Charlemagne réglait les comptes de sa maison et l'histoire n'a pas dédaigné de les conserver. On nous a conservé aussi les comptes de ménage d'Alexandre Sévère. Sa table était réglée à trente setiers (15 litres) de vin par jour ; trente livres (un peu moins de vingt livres françaises) de pain de pur froment ; cinquante livres de pain inférieur pour donner à ses serviteurs ; trente livres de diverses viandes, deux poulets ; les jours de fête, une oie ; aux calendes de janvier, au jour de réjouissance de la Mère des dieux (25 mars), aux jeux apollinaires (6 juillet), au festin de Jupiter, aux saturnales (16 décembre) et aux autres fêtes semblables, un faisan, quelquefois deux, accompagnés de deux poulets ; du lièvre tous les jours ; de la venaison souvent (et de plus il en distribuait à ses amis) ; quatre setiers de farine pure[9], deux setiers de farine mêlée de poivre ; et ainsi du reste : car tout était réglé, et Gargilius Martialis, écrivain contemporain, avait tout noté[10].

On criait à l'avarice, je n'en doute pas ; Mammée surtout était accusée plus encore que son fils, et l'empereur, disait-on, trouvait lui-même que sa mère épargnait trop. Alexandre lui aussi, était raillé par les courtisans désappointés de maison palatine ; critique méritée, mais critique honorable. Chez un empereur romain, l'avarice était une vertu. Les deniers qu'il épargnait, ce n'était pas seulement les deniers de ses peuples, c'était leur sang.

On raillait ; et cependant l'exemple ainsi donné était contagieux, et le bien que faisait aux peuples la suppression du luxe impérial se multipliait par le bien qu'allait leur faire la diminution du luxe privé. Le palais des Césars avait donné au monde assez d'exemples de faste, d'intempérance, de prodigalité, de débauches ; il était juste qu'il en donnât enfin de tempérance, de sagesse, d'épargne. Les premiers avaient été trop fidèlement suivis ; les seconds le furent au moins quelque peu. Les mœurs simples et dignes d'Alexandre descendirent de la demeure du mont Palatin dans le palais des grands de l'empire, et dans les villas des riches. Les hommes eurent honte et presque peur d'étaler un luxe que l'empereur n'étalait pas[11]. Les femmes elles-mêmes se firent quelque scrupule de porter plus de bijoux et des robes d'une soie plus éclatante que leurs impératrices n'en portaient. On abusa moins du travail, des forces, de la vie de l'esclave pour tisser la soie et monter des diamants ; on lui laissa quelques demi-journées ou quelques nuits de plus pour gagner, par un labeur utile et vulgaire, le pécule qui devait un jour le racheter ; on le mit plus près de la liberté, de l'aisance, de la joie. Cela ne vaut-il pas, belle romaine, quelques pierreries de plus sur un front qui n'en a pas besoin ? Et cela ne vaut-il pas, illustre Apicius, autant que le poisson de la mer Noire qui fait la satisfaction de votre palais délicat, mais le désespoir de vos pécheurs esclaves et la ruine de votre santé ?

Il faut bien se rappeler ce qu'était cet Empire romain où le travail, exercé par des esclaves, était esclave lui-même et ne servait que les fantaisies du riche, où il n'y avait pas assez de pain parce qu'il y avait trop de robes de soie et trop de vases d'or, où l'industrie utile n'avait pas assez de bras parce que l'industrie fastueuse les accaparait tous, où l'aiguille de la mère de famille manquait à ses enfants parce qu'elle était confisquée pour le gynécée de la matrone. Il faut se le rappeler, et on sentira quel bienfait public c'était qu'un peu de modération dans les voluptés du prince, dans les voluptés des grands, dans les voluptés des riches. En renonçant à une robe de soie, Mammée, sans le savoir, habillait toute une famille de colons grelottant sous le ciel de la Grande-Bretagne. En faisant disparaître de sa table les oiseaux du Phase et les huîtres engraissées dans le lac Lucrin, Alexandre donnait sans le savoir du pain à une centaine d'esclaves.

Du reste, n'en est-il pas et n'en sera-t-il pas toujours ainsi ? Le travail du genre humain lui donnera-t-il jamais les denrées nécessaires en si grande abondance qu'on puisse sans scrupule consacrer une part notable de ce labeur à la production des denrées inutiles ? Ces jouissances du luxe, si vaines, si mesquines, si puériles, si sottes, si promptement insipides, dans lesquelles il n'y a rien, ni pour le cœur, ni pour l'esprit, ni pour l'imagination, ni même pour cette partie élevée de nos sens qui perçoit le beau et cherche sa satisfaction dans les arts ; ces jouissances du luxe qui coûtent si cher à notre âme et la satisfont si peu et si peu de temps, méritent-elles que pour elles nous retranchions à ce pauvre esclave, à ce pauvre ouvrier, à ce pauvre laboureur un denier de sa bourse, encore moins une goutte de son sang, encore moins une parcelle de sa liberté et de sa dignité d'homme, de la paix de son âme et de la pureté de sa conscience ?

Enfin cette économie ou cette avarice dans la dépense personnelle du prince amenait à plus forte raison l'économie dans les dépenses de l'État. On a le droit de retrancher quelque chose à autrui quand on a beaucoup retranché à soi-même. Supprimant son théâtre domestique et laissant subsister le théâtre populaire, Alexandre pouvait restreindre un peu les magnificences de celui-ci, et ne pas faire payer si cher aux caisses de l'État ou à celles des villes les acteurs et les funambules de Rome[12]. En faisant cadeau au peuple romain de tout ce qu'il avait trouvé dans ce genre chez Élagabale, n'avait-il pas fait baisser le prix de cette triste marchandise ? Aussi, lorsqu'on lui demandait des récompenses pour ces talents si inutiles à la chose publique, se montrait-il fort avare ; il donnait de l'argent, peu et rarement ; des lingots, de la vaisselle précieuse, des étoffes de prix, jamais. Il se crut même en droit d'ôter à ces virtuoses les magnifiques costumes que leur avait donnés Élagabale. Pour lui un muletier valait bien un comédien, et le chasseur domestique qui tuait du gibier dans les forêts valait bien le chasseur théâtral qui, dans l'arène, tuait des ours et des panthères pour les plaisirs des spectateurs[13]. Cette barbarie, j'en conviens, était loin de la civilisation des cours modernes qui paient un chanteur plus qu'un général, et qui, après avoir comblé une danseuse de présents, lui font encore porter les armes par leurs soldats. Mais aussi les cours modernes nagent tellement dans la richesse ! les peuples modernes sont si opulents ! l'excédant de recettes de leur budget pèse si lourdement sur leur conscience ! Ils aiment tant à payer l'impôt ! Les sujets de l'empire romain n'avaient pas, ce semble, le même goût.

De même encore, ayant strictement réglé la dépense de sa maison, Alexandre pouvait se mêler quelque peu de régler la maison de ses subordonnés et ne pas astreindre le trésor public à payer toutes les magnificences de leur goût. Avec lui, tous les salaires, tous les traitements étaient réglés suffisamment, équitablement, mais strictement. Lampride nous donne le compte détaillé de ce qui était alloué à un gouverneur de province, dont le traitement, pour une partie du moins, se payait en nature : vingt livres d'argenterie, six patères (phialas, d'or ou d'argent sans doute pour les sacrifices), deux mulets, deux chevaux, deux costumes officiels, un autre costume pour l'intérieur, un autre pour le bain, cent pièces d'or, un cuisinier, un muletier, et, s'ils n'ont pas de femme, une concubina (puisqu'ils ne peuvent s'en passer). Leur temps d'administration fini, ils rendront le muletier, le cuisinier, les mulets et les chevaux ; le reste leur demeurera, s'ils se sont bien conduits ; sinon, ils le rendront au quadruple, sans préjudice de poursuites pour péculat ou concussion.

Et enfin, honnête homme pardessus tout, gardant la bourse de ses peuples contre ses propres faiblesses ou ses propres caprices, Alexandre était bien en droit de la garder sévèrement contre la cupidité d'autrui. D'abord il avait horreur de ces marchés qui s'étaient tant de fois pratiqués au palais et par lesquels le prince ou ses affranchis avaient vendu les charges, même celles qui entraînaient le droit de vie et de mort[14] : Qui a acheté, a besoin de vendre, disait-il. Si cet homme, après avoir acheté de moi le droit de juger, vend la justice, je ne puis plus le condamner. Les marchands de fumée, comme nous avons dit qu'on appelait les trafiquants de la faveur du prince, n'étaient pas moins l'objet de sa colère. Pour excuser une sévérité qui alla jusqu'à la cruauté, il faut comprendre ce qu'avant lui l'abus avait été sous un prince trop immoral pour ne pas encourager toutes les corruptions, trop aveugle pour ne pas les favoriser toutes, même à ses dépens. Sous Alexandre, les intrigants de tout genre avaient été mis à la porte du palais ; mais cette porte, ils espéraient toujours la voir se rouvrir. Ils rôdaient autour de la maison du prince et, s'ils n'y avaient pas leurs entrées, du moins ils prétendaient les avoir. Un certain Vetronius Turinus qui avait eu jadis quelque relation avec l'empereur, parlait du prince comme d'un sot dont lui Turinus pouvait faire ce qu'il voulait. Alexandre, ayant ouï quelque chose de ces propos, envoie à Turinus un affidé qui, jouant un rôle convenu, demande à l'intrigant son appui pour une requête adressée au prince. J'en parlerai à l'Empereur, dit Turinus ; et il se fait payer. Les mêmes instances se renouvellent, Turinus affirme qu'il a parlé et se fait payer encore. On arrive ainsi à lui remettre des sommes considérables, sans qu'en réalité il ait dit au prince un seul mot. Quand on en est là, Alexandre suffisamment édifié fait éclater la mine. Turinus est accusé, convaincu d'avoir vendu un crédit qu'il n'avait pas ; d'autres intrigues se révèlent : on apprend que, sollicité par deux parties adverses, il a reçu de l'une et de l'autre ; que des hommes nommés à des charges publiques l'ont rémunéré d'une assistance qu'il ne leur avait pas donnée. Il est condamné, condamné à mort, et par une dérision cruelle, Alexandre ordonne qu'il soit asphyxié par la fumée d'un bûcher, en faisant crier par le héraut : Il périt par la fumée pour avoir vendu de la fumée[15].

Et maintenant, le voleur proprement dit, le magistrat dilapidateur, le publicain qui pille les provinces, comment est-il traité ? Alexandre a trouvé la concussion partout, il la poursuit partout. Les voleurs de cette espèce lui sont odieux ; leur présence est une souillure pour son palais, et, de même que dans les mystères le héraut interdit l'entrée du temple à quiconque a la conscience chargée d'un crime, de même Alexandre fait crier à sa porte : Que nul ne vienne à l'audience impériale s'il se sent coupable de vol, car, découvert, il serait mis à mort. Lorsqu'un de ces hommes (et il y en avait beaucoup dont la réputation était faite) ose se présenter pour le saluer, Alexandre se trouble, pâlit de colère, il peut à peine parler ; il en demeure malade : Septimius Arabinus ici ! Arabinus vivant et venant ici au rang des sénateurs ! Jupiter dieux immortels ! Est-ce qu'il attend quelque chose de moi ? Est-ce qu'il me croit fou ou insensé à ce point ? Et quand il a à juger de tels voleurs, ces scélérats de tous les jours, ces ennemis de l'État, de tous les plus funestes comme il les appelle, il a peine à se contenir. Un secrétaire (notarius) qui a apporté au conseil du prince une pièce falsifiée, est puni par une incision au doigt, qui lui Ôte la faculté d'écrire. Un malheureux, qui, déjà coupable de vol, a, par l'entremise de certains rois vassaux de l'Empire, obtenu un emploi dans la milice, vole de nouveau et cette fois est surpris. Les rois, ses protecteurs, étaient à ce moment à la cour d'Alexandre. Celui-ci les fait venir, la cause est plaidée devant eux. Quelle est chez vous la peine des voleurs ? leur dit Alexandre. La croix. Et il le fait mettre en croix, condamné par ses patrons. N'excusons pas, cela est cruel ; et cependant l'homme était doux, tous les témoignages l'attestent, il n'avait pas de passion mauvaise ; il n'avait qu'une justice trop emportée, une haine du mal trop passionnée ; mais il fallait que le mal fût bien grand.

Du moins les peuples goûtaient-ils le fruit de cette sévérité. Les chiffres que nous donne Lampride peuvent sembler incroyables, ils ne le sont pas. D'un César livré à toutes les débauches et encourageant toutes les concussions à un César qui n'avait pas un vice et ne souffrait pas un désordre, la différence était telle que le peuple romain put voir sa condition changer de tout au tout. Dès son début, Alexandre avait fait remise à la ville de Rome de l'or coronaire[16], don de joyeux avènement que la flatterie avait offert et que le despotisme s'était habitué à exiger. Bientôt il put abaisser tous les impôts que ses prédécesseurs avaient singulièrement élevés. L'impôt indirect (vectigal) se payait exclusivement en or, parce que les princes, ayant altéré et altérant de plus en plus les pièces d'argent, ne voulaient pas reprendre cette monnaie variable et décriée qu'ils donnaient à leur peuple. Il se trouva donc que, là où Élagabale faisait payer dix pièces d'or (220 fr. ?), Alexandre ne fit plus payer que le tiers d'une ; c'est-à-dire qu'il abaissa l'impôt de trente à un. Élagabale, pour rendre la perception plus commode, avait fait frapper des pièces, deux, trois, quatre, dix fois, on dit même quatre-vingt et cent fois plus fortes que l'aureus[17]. Alexandre n'en eut plus besoin, les fit fondre, et tout au contraire, fit faire des demi aurei et des tiers d'aurei, pour que l'impôt réduit continuât à se payer en or ; il pensait même, pour faire face à une nouvelle réduction, à émettre des quarts d'aurei. Par toute une série de mesures, le système fiscal fut réglé de nouveau et réglé dans le sens de la modération[18]. Ce n'est pas assez de diminuer l'impôt, il faut le faire porter sur les denrées les moins nécessaires ; l'impôt indirect à Rome se percevait au marché et frappait surtout les objets de consommation. Alexandre Sévère en établit un autre (un très-bel impôt, dit Lampride) sur un certain nombre d'industries et en particulier d'industries de luxe[19], sur le trafic des étoffes de lin, des pelleteries, des objets de verre, d'or et d'argent, etc.

Mais l'abaissement de l'impôt ne suffit pas encore au soulagement du peuple ; il se plaint de la cherté des vivres ; au Forum ou au théâtre, il interpelle l'empereur, persuadé, comme le sont les peuples affamés, qu'au pouvoir il appartient de fixer le prix des denrées ; il veut que César fasse une loi de maximum (vilitatem) pour la viande[20]. Les lois de maximum étaient dans l'habitude des empereurs romains, et que de gens y croient encore Alexandre à cet égard en savait plus long que son temps. Quelle sorte de viande est trop chère ? fait-il demander au peuple par le crieur public. Le bœuf et le porc, lui répond-on tout d'une voix. Alexandre ne s'en prit pas aux marchands qui n'y pouvaient rien ; mais il s'en prit aux gourmets de son empire qui mangeaient la viande avant qu'elle ne fût née. Il défendit de mettre en vente et la femelle qui vient de mettre bas et l'animal qui tette encore — l'un et l'autre fournissaient au palais blasé du monde romain certains mets recherchés. Et ces pratiques gastronomiques étaient si répandues, qu'en moins de deux ans, leur cessation fit tomber le prix de la viande dans la proportion de huit à deux[21].

Le pauvre se plaint qu'il est dévoré par l'usure, ce mal endémique de la république romaine et de l'empire romain ; Alexandre vient encore à son secours. Il réduisit, nous dit-on, l'intérêt de l'argent à trois pour cent[22]. Ce résultat serait merveilleux. Nous avons vu, sous Trajan, le taux de cinq pour cent être considéré comme un taux non-seulement équitable, mais bienfaisant. Alexandre aurait-il obtenu un tel abaissement d'intérêt par un décret, par une simple intimation de sa volonté, je ne saurais le croire ; mais ici, comme en matière de luxe, il agit par la puissance de l'exemple. Lui-même il prête à trois pour cent et fait concurrence aux usuriers ; mieux encore, pour rejeter vers le travail des champs depuis si longtemps abandonné, la population souffrante de Rome, il lui prête sans intérêts des sommes au moyen desquelles elle achète des terres et s'acquitte avec leurs produits. Il engage les sénateurs à suivre son exemple, et d'abord à prêter comme lui sans intérêts ; il autorise simplement la stipulation d'un cadeau du débiteur au créancier ; mais plus tard, comme ce mot de cadeau peut être trop largement interprété, il revient sur sa défense et permet de demander six pour cent d'intérêts[23].

Le peuple ne travaille pas parce que le travail est sans honneur, sans encouragement, sans liberté ; parce que l'ouvrier esclave, soutenu par les capitaux de son. maître, fait une concurrence ruineuse à l'ouvrier 'libre, à peu près aussi méprisé que l'esclave. Pour soutenir et surtout pour honorer le travail libre, Alexandre a recours à l'association. Ces collèges d'artisans qui jadis inspiraient aux empereurs des craintes politiques, sont devenus, pour Rome appauvrie et pour des princes plus clairvoyants, trop évidemment nécessaires. Antonin et Marc-Aurèle ont commencé à les protéger. L'ouvrier qui appartient à ces corporations, n'est pas plus riche sans doute ; mais il se sent plus appuyé, plus encouragé, plus honoré, depuis qu'en vertu du sénatus-consulte protecteur de sa liberté, il peut avec ses compagnons se réunir, s'associer à des repas fraternels, concourir au culte de ses dieux, mettre de côté quelques deniers pour le soulagement des malades et pour les derniers honneurs à rendre aux morts. Alexandre protège, relève, multiplie ces associations ; il arrive à y faire entrer tous les corps d'état de la ville de Rome[24]. Il cherche ailleurs encore un aide à l'industrie ; il demande secours à la mécanique pour aider au travail de l'homme toujours inférieur à ses besoins ; il multiplie à Rome l'usage des machines[25].

Malheureusement toutes ces mesures ne nous sont connues que par le récit d'un écrivain du siècle suivant, récit singulièrement laconique, décousu, par suite obscur ; mais l'ensemble n'en laisse pas moins voir un prince qui voulait le bien et savait les moyens fie l'opérer ; un prince, non-seulement économe, mais économiste, dirais-je, bien que le mot soit moderne ; un économiste de l'école chrétienne, pratiquant la seule véritable et seule efficace économie politique, celle qui commence par l'abnégation. Il retranche de ses propres voluptés et des voluptés de ses pareils, pour améliorer le sort de ceux à qui manque, non la volupté, mais la vie. Il diminue les dépenses publiques afin d'accroître l'aisance privée. Il protège le travail pour amener la richesse, au lieu de confisquer le travail au profit de la richesse. Contrairement à la pratique des siècles païens qui cherchaient la satisfaction du petit nombre par la souffrance du grand, il veut amener le bien-être du pauvre par la volontaire abstinence du riche, la prospérité de tous par le travail de tous, le goût du travail par l'honneur et la liberté qu'il lui donne.

Mais de plus, Alexandre n'ignora pas tout à fait que le travail a besoin d'un supplément et d'un aide, la charité. Les fruits du travail étant inégalement répartis entre les hommes et quelques-uns d'entre eux se trouvant ainsi sans ressources, il faut que cette inégalité soit réparée par le dépouillement gratuit et volontaire de quelques autres. Quand nous disons avec l'apôtre : Celui qui ne travaille pas ne doit pas manger. (II Thess., III, 18) nous sous-entendons cette condition : s'il est en état de travailler. Mais s'il est infirme, s'il est vieux, s'il est enfant, si la somme de son travail possible est inférieure à celle de ses besoins ; si, époux et père, il travaille seul pour nourrir plusieurs ; il faudra bien que le don gratuit intervienne, et, en face de cette inégale puissance du travail, diminue la surabondance d'un côté, comble l'insuffisance de l'autre, et rétablisse une proportion plus égale[26]. Si nul ne travaillait que pour lui-même et n'avait de ressources qu'à l'exacte mesure de son travail, des millions d'hommes mourraient de faim. Et le don gratuit était plus nécessaire encore dans une société où, grâce à Dieu, l'esclavage tendait à diminuer. Jusque là, en effet, l'esclavage nourrissait mal, mais nourrissait des millions d'hommes. Il fallait maintenant que cette ration que le maître donnait à son esclave, d'une main avare, intéressée, contrainte, et pour prix d'un travail forcé, se convertit en une aumône donnée au pauvre parle riche, aumône libre, volontaire joyeuse, abondante, gratuite. Alexandre comprit cette nécessité. L'historien dit de lui ce qu'on n'a dit d'aucun autre César : il aida les pauvres (pauperes juvit)[27]. Il ne laissa pas passer un jour[28], dit-on encore, sans quelque acte de douceur, de condescendance, de pieuse libéralité ; veillant seulement à ne pas excéder les ressources du trésor, à ne pas faire des pauvres par l'impôt pendant qu'il soulageait d'autres pauvres par la bienfaisance. Les fondations alimentaires de Trajan, cette œuvre de bienfaisance semi-chrétienne, furent continuées et développées. Septime Sévère les avait maintenues[29], elles avaient même traversé les règnes désordonnés de Caracalla et d'Élagabale. Alexandre en augmenta le nombre. Les deux Antonins avaient institué en l'honneur des deux Faustines des Enfants Faustiniens ; il institua en l'honneur de sa mère des Enfants Mamméens[30], leur donnant cette fois une plus digne protectrice et faisant de sa piété envers les pauvres un hommage de sa piété filiale.

Les serviteurs de l'État, comme de raison, n'étaient pas oubliés dans ces libéralités d'Alexandre, et ne restaient ni sans rémunération, ni sans honneur[31]. Quand il fallait qu'ils se retirassent : La république te remercie, leur disait le prince ; et il assurait leur bien-être par de sages libéralités. Il aimait à installer un vieux serviteur de l'État ou un sénateur ruiné (pourvu qu'il ne se fût pas ruiné par le luxe) sur une terre qu'il pût cultiver, lui donnant des bœufs pour traîner sa charrue, des pierres pour édifier sa demeure, des ouvriers pour la bâtir, des marbres même pour l'orner. A des hommes d'un rang plus élevé et dont les services avaient été plus importants, il faisait parfois cadeau d'une maison magnifique bâtie tout exprès pour eux[32]. Il venait en aide à ces orateurs des villes municipales qui étaient à la fois pour leur cité et un honneur et un appui, aux rhéteurs, aux grammairiens, aux médecins, aux mécaniciens, aux architectes, aux aruspices même et aux astrologues ; il leur assignait des traitements, ouvrait des édifices pour leurs leçons, et pour me servir de l'expression moderne, fondait même des bourses pour des enfants pauvres destinés à être les héritiers de leur science[33] Il se plaignait quand on ne lui demandait rien, et, lorsqu'un nom digne d'estime manquait sur la liste toujours exactement tenue de ses libéralités ordinaires : Pourquoi, disait-il, ne me demandes-tu rien ? Veux-tu que je sois en dette vis-à-vis de toi ? Veux-tu te réserver le droit de te plaindre un jour de mon avarice ?[34]

Mais dans ses libéralités, comme en toute chose, il portait cette minutieuse exactitude et cette préoccupation de l'utile qui faisait de lui l'antithèse la plus complète de Néron. Il donnait rarement soit de l'or ou de l'argent en lingots, soit des pierres précieuses[35]. Aux sanctuaires même des dieux, il donna parfois quatre ou cinq livres d'argent, pas un grain d'or. A quoi sert l'or dans le sanctuaire, disait-il avec le poète[36]. Quand il donnait un lingot, ce n'était pas sans le faire peser devant lui ; une étoffe de prix, sans la faire mesurer[37]. Dispensateur du bien public, il ne se croyait pas en droit de le faire servir à ses fantaisies. Tout cela était sans doute moins grandiose, moins éblouissant, moins propre à lui faire des courtisans et des flatteurs, que les prodigalités aveugles d'Élagabale et les splendeurs infinies de la cour de Néron. Mais aussi, on pouvait dire d'Alexandre, ce qu'on n'a pu dire ni de Néron, ni de tant d'autres, ni du très-grand nombre des empereurs Romains : il n'envia jamais la richesse de personne[38].

Telles étaient donc à la fois et cette sage économie et cette piété bienfaisante d'Alexandre : devançant son époque de deux manières, d'un côté par une intelligence des besoins publics et par un mépris des jouissances égoïstes que le paganisme ne pouvait ni enseigner, ni comprendre ; d'un autre côté par une bienfaisance sérieuse, sincère, désintéressée, sans but politique, sans éclat et qui n'était pas non plus du paganisme.

Cependant le peuple païen ne perdait aucune de ses satisfactions légitimes. Les traditions de la munificence impériale subsistaient dans ce qu'elles avaient de noble, d'élevé, d'utile, de politique. Les spectacles eux-mêmes, quoiqu'on récompensât les acteurs par de moins folles largesses et par de moins serviles hommages, conservaient leur magnificence.

Ce père de la famille Romaine, ce financier si prudent, cet économiste si essentiellement utilitaire, savait cependant aimer les grandes choses. S'il donnait des spectacles à son peuple, à plus forte raison lui donnait-il des monuments. C'était non-seulement des greniers bâtis dans toutes les régions de Rome et ouverts à quiconque ne voulait pas garder son grain chez soi ; c'étaient aussi de nouveaux embellissements pour cette cité embellie par tant de princes et qui à force de s'embellir, devait finir par se gâter ; c'étaient des restaurations nombreuses ; de nouveaux édifices, nombreux aussi ; nulle destruction[39] : car Alexandre pour accomplir ses projets, n'employa ni le feu, comme Néron, ni la pioche comme tant d'autres ; il ne détruisit rien que des édifices qui lui appartenaient personnellement. C'étaient des travaux pour les thermes — car Alexandre, lui aussi, eut le tort de favoriser cette manie du peuple romain — : des portiques ajoutés aux thermes de Caracalla ; les thermes de Néron agrandis et connus désormais, au lieu de ce nom détesté, sous le nom de thermes d'Alexandre (227) ; un aqueduc nouveau pour ces nouveaux thermes (225) amenant d'une distance de 13 milles cette même eau que Sixte-Quint a retrouvée depuis et qui, du nom de baptême de ce pontife, s'appelle aujourd'hui Acqua Felice[40] ; à l'extrémité de ces aqueducs une vaste piscine qu'on appela le trône de l'Océan[41]. Et, pour mettre le comble à la satisfaction de ces infatigables baigneurs, les thermes approvisionnés d'huile pour la libéralité d'Alexandre furent éclairés du soir au matin. Pour faire face à ces dépenses, il consacra à l'entretien des thermes le revenu de certaines forêts et un impôt payé par les industries de luxe. La volupté payait ainsi la volupté et le vice était chargé de pourvoir aux dépenses du vice. D'ailleurs, un peu d'indulgence envers la sensualité publique était peut-être nécessaire pour se faire pardonner par les débauchés de Rome d'avoir supprimé la honteuse licence du temps d'Élagabale qui ouvrait aux deux sexes les mêmes bains aux mêmes heures[42].

Ce furent aussi, outre les thermes, outre le théâtre de Marcellus qu'Alexandre avait le projet de restaurer, des magnificences d'un ordre plus élevé. Ce fut pour les affaires publiques une basilique nouvelle construite sous le nom de Mammée. Alexandre en projetait une autre plus vaste que nulle ne le fut, toute reposant sur des colonnes, entre le champ de Mars et les septa d'Agrippa ; mais le temps lui manqua[43].

Alexandre enfin avait le culte des anciens souvenirs. Tous les peuples ne sont pas comme nous qui, depuis trois siècles et depuis un siècle surtout, démolissons avec plus de joie ce qui retrace plus glorieusement le nom de nos aïeux. Alexandre remplit Rome de statues colossales. Dans le forum de Trajan, il réunit des statues de grands hommes apportées de tous côtés. Dans les quatorze entrecolonnements du forum de Nerva, il mit les statues des quatorze empereurs divinisés, les uns à cheval, les autres à pied, et nus en leur qualité de dieux ; il y ajouta des plaques d'airain, rappelant les actes de chacun d'eux et enseignant au peuple cosmopolite de Rome l'histoire du peuple Romain[44].

Il fallait cependant que l'Empereur fit quelque chose pour l'Empereur, et que cette demeure Augustale du mont Palatin que la race de Sévère avait à peu près abandonnée et où Alexandre était revenu le premier, fût quelque peu embellie par son nouveau maitre. Il y multiplia les pavés de serpentine et de porphyre, qui étaient connus avant lui, mais qui, répétés fréquemment sous lui et après lui, ont reçu des modernes le nom d'ouvrage Alexandrin. Mais pour lui-même, il était disposé à faire peu de chose, et ces embellissements du palais furent pour lui un acte de piété filiale : ce fut sous le nom de sa mère qu'il consacra les édifices nouveaux ajoutés par lui aux constructions de ses prédécesseurs[45].

Rome ne devait pas seule profiter de sa magnificence. Les villes qui après un tremblement de terre avaient des édifices publics ou mêmes privés à relever, obtinrent que l'Empereur leur vînt en aide aux dépens du Trésor public. En Italie, les routes furent reconstruites ; les ponts que, dans son grand travail pour donner des chemins à la Péninsule, Trajan avait élevés, furent restaurés presque partout ; de nouveaux ponts furent ajoutés ; mais sur les anciens restaurés par Alexandre, le nom de Trajan resta seul[46]. Là aussi, Alexandre fit quelques travaux de pur agrément, mais tous consacrés à quelque affectueux souvenir. Baies fut pour lui un lieu destiné à rappeler les noms de sa famille[47] ; auprès d'un étang creusé de main d'homme et rempli des eaux de la mer, s'éleva un palais de Mammée, et ce nom, donné par la piété filiale, fut longtemps conservé par la reconnaissance populaire ; d'autres édifices gardèrent le nom de quelque personne de sa famille également aimée. On était touché de voir César aimer et honorer une autre personne que César.

Quand il en était ainsi, quand, malgré les impôts diminués, il se faisait d'aussi belles œuvres, de quoi le peuple romain pouvait-il se plaindre ? Remarquez que tout en encourageant le travail, on ne laissait pas que de donner à la fainéantise du citoyen romain le tribut qu'elle avait été accoutumée à recevoir. C'était le fantasque et dépravé Élagabale qui avait vidé les greniers de Rome ; c'était l'économe Alexandre qui les remplissait, qui multipliait les distributions de blé au Forum comme sous les princes les plus prodigues ; qui renouvelait ces approvisionnements aux dépens de sa fortune particulière ; qui encourageait le trafic des blés et accordait les immunités les plus larges aux armateurs de navires destinés à amener le froment d'Égypte ou d'Afrique. C'était encore Élagabale qui, avait supprimé ou amoindri, à force de tout laisser à la disposition de ses favoris, les distributions d'huile instituées par Sévère, et c'était Alexandre qui les rétablissait. Les largesses en argent ne faisaient pas non plus défaut ; il y en eut cinq sous Alexandre[48] et toutes cinq accompagnées de distributions de viande. Encore une fois, de quoi le peuple romain pouvait-il se plaindre ? Était-ce de ne plus voir dans les rues le cortège honteusement bouffon des bacchanales du fils de Sohémias ? Était-ce de ne plus voir de sénateur étranglé, assassiné sans jugement, par ordre du prince ? Était-ce de ne plus payer des doubles aurei pour suffire à toutes les fantaisies de cinquante valets syriens chargé de gouverner le monde ? En vérité si le peuple se fut plaint, le peuple eut été bien difficile.

 

 

 



[1] Nec quemquam passus est in Palatinis nisi necessarium hominem (Lampride, 16).

[2] Lampride, 41, 42.

[3] Ostensionales milites.

[4] Non pretiosis, sed speciosis clarisque vestibus ornabat, Lampride, 33.

[5] Lampride, 40. Imperium esse in virtute, non in decore.

[6] Baccato monili (Lampride, 41).

[7] Ducentarum librarum argenti pondus ministerium ejus nunquam transiit (Lampride, 34).

[8] Lampride 40.

[9] Au lieu de milii qui n'aurait pas de sens raisonnable, je lis avec Schrevelius amyli ; en grec άμυλος, farine obtenue sans moule, amidon, ou quelquefois aussi la plus pure farine.

[10] Lampride 37.

[11] Imitati sunt eum magni viri, et uxorem ejus matrone pernobiles (Lampride, 41).

[12] Lampride 43.

[13] Lampride, 37.

[14] Honores juris gladii (Lampride 41).

[15] Lampride 36.

[16] Aurum coronarium et negotiatorium. Lampride, 32.

[17] Formas bilibres et centenarias, dit Lampride, 39. Cela ferait donc des pièces de 2.200 francs !

[18] Leges de jure populi et fisci moderatas et infinitas sanxit. (Lampride, 16). Par ces deux mots Lampride désigne l'ærarium ou trésor public et le fiscus ou trésor du prince. Nous n'avons malheureusement pas d'autre trace de ces mesures financières d'Alexandre. Les textes du code Justinien ne nous ont fait connaître que des décisions juridiques rendues dans des cas particuliers, et en général restreignant les droits du fisc. Ainsi — restitution in integrum d'un mineur contre le fisc (2, C. J. si advers. fisc II. 37) ; — exception à la loi qui attribue au fisc les biens des déportés, 43 ibid. de bonis proscript ; — les juges fiscaux ne peuvent prononcer d'amendes, (2 ibid. de modo mulctar.) ; — différents droits contre le fisc., 6 — 8, C. J. de edendo ; 5, de privilegio fisci (VII, 73) ; 1. ne fiscus rem quam vendidit (X, 4) ; 1, de pœnis fiscalibus (X, 7) ; I. de fiscalibus usuris ? (X, 8) ; de venditione rerum fiscalium (X, 4 ; 1), de delatoribus (X, II) ; — la règle qui adjugeait au fisc les biens de l'accusé suicidé, restreinte au cas où, l'accusé poursuivi pour homicide, s'était suicidé par la seule crainte du jugement (2. C. J. de bonis eorum qui sibi mortem consciverunt (IX, 50).

Les testaments et legs faits à l'Empereur soumis à la loi des testaments ordinaires, 3. C. J. de testamentis (VI, 23) et 4 ibid. ad legem Falcidiam (VI, 50), car, est-il dit, bien que la loi de l'empire ait dispensé l'Empereur des formalités légales, rien ne convient mieux à la dignité impériale que de vivre selon les lois. (3, de testamentis).

[19] Braccarii (l'usage des braies celtiques se répandait à Rome, mais n'était pas encore général) ; linteones ? (la laine et non le lin formait le vêtement habituel du peuple) ; vitrearii (on sait que le verre était un objet de luxe) ; pelliones (fourreurs), plaustrarii (carrossiers), argentarii, aurifices et cœterce artes..... Lampride 25.

[20] Lampride 22.

[21] Suminatam ne quis (suem) occideret ; ne quis lactentem, ne quis vaccam, ne quis damalionem (vitulum tenellum)... Lampride, 22.

[22] Usuras fæneratorum contraxit ad trientes pensiones, c'est-à-dire à trois onces sur cent as par mois. L'once était le douzième de l'as.

[23] Semisses, 6 onces par mois sur cent as. Voyez sur tout ceci, Lampride, 21, 26.

[24] Parmi les corporations nouvelles, vinarii, lupinarii (fabricants de jetons), caligarii (fabricants de chaussures pour les soldats). Lampride, 33.

[25] Mechanica opera Romæ plurima instituit. Lampride, 22.

[26] Ut fiat æqualitas. II Cor., VIII, 14.

[27] Lampride 40, et ailleurs : pauperibus consulens. 26.

[28] Dies denique nunquam transiit quin aliquid mansuetum, civile, pium faceret, sed ita ut ærariurn non everteret. Lampride, 20.

[29] Mention de Mœcius Probus, préfet des aliments sous Septime Sévère (ou Caracalla) Orelli, 2267, — de C. Valerius Gratus Sabinianus (consul en 221 sous Élagabale), qui avait été Flaminiœ et alimentorum curator (Henzen, 50).

[30] V. Lampride, 57 et une inscription du temps d'Alexandre, qui porte CVRATOR VIAE AEMI (liœ) PR (fæctus) ALIMENT (orum). Henzen, 50.

[31] Lampride 32, 40.

[32] Lampride 39.

[33] Lampride 44.

[34] Lampride 46.

[35] Lampride 46.

[36] In sanctis quid facit aurum (Perse). Lampride 44.

[37] Lampride 40.

[38] Divitiis nullius invidit. Lampride 40.

[39] Opera veterum principium restauravit. Ipse nova multa constituit. Lampride, 25.

[40] Les thermes de Néron ou d'Alexandre étaient situés entre le Panthéon et la place Navone, où sont Saint-Louis des Français, Saint-Eustache, etc. Les régionnaires mentionnent près de là un cirque d'Alexandre, qui serait évidemment la place Navone et dont les restes se retrouvent dans les souterrains des maisons qui entourent cette place. Mais cette unique indication des régionnaires suffit-elle pour faire attribuer ce cirque à Alexandre ?

[41] Nymphœum (réservoir d'eau) d'Alexandre, dans la sixième région Esquiline (V. Rufus, P. Victor et la Notice de l'empire). On croit en retrouver les restes près de l'édifice appelé d'ordinaire temple de Minerve Medica.

[42] Voyez sur tout ceci Lampride, 24, 25.

[43] Lampride, 26. Il donne à cette basilique projetée une longueur de mille pieds sur une largeur de cent, ce qui parait bien peu admissible.

[44] Lampride, 28.

[45] Diœtœ Mammœanœ, d'où est dérivée la dénomination vulgaire ad Mammam donnée à l'angle oriental du mont Palatin, vers l'arc de Constantin.

[46] Inscriptions milliaires d'Alexandre, en Afrique. (Renier, 2802, 3803) Aquœ Alexandrinœ à Lambœsa. (Idem.)

[47] Lampride 26 : In matrem Mammcœam unice pius fuit.

[48] Les monnaies en comptent cinq : en 222, 225, 226, 228 etc. Lampride en nomme trois et trois distributions aux soldats (26).