LES CÉSARS JUSQU'À NÉRON

TABLEAU DU MONDE ROMAIN SOUS LES PREMIERS EMPEREURS

LIVRE DEUXIÈME. — DES DOCTRINES

CHAPITRE II. — PUISSANCE ET DÉVELOPPEMENT DU POLYTHÉISME.

 

 

§ I. — TEMPS D'AUGUSTE ET DE TIBÈRE.

Ce discrédit où tombaient le culte public, la foi officielle du monde et de Rome, entraînait-il le déclin de tout polythéisme, de toute religion, de toute piété ?

Le progrès, ou ce qu'on appelle ainsi, n'arrivera jamais à étouffer les instincts primitifs de l'homme : ni la philosophie, ni le scepticisme, ni l'indifférence ne seront assez forts pour changer la nature humaine. Une chose subsistait alors et, pour l'honneur du genre humain, subsistera toujours : ce mouvement, quelquefois confiant, plus souvent craintif, des âmes humaines vers ce qui est au-dessus d'elles ; ce sentiment qui les porte à se prosterner devant ce qui est grand, à redouter ce qui est inconnu, à prier ce qui est puissant ; ce besoin qui fait désirer au criminel une expiation de ses fautes, à l'ami survivant une satisfaction et un repos pour son ami mort, à notre faiblesse une protection, à notre tristesse et à notre ennui une espérance.

Une chose encore subsistait : — le souvenir, obscurci, mais universel, d'une condamnation primitive et d'une malédiction prononcée contre l'humanité ; par suite la présence intérieurement sentie d'un pouvoir étranger, hostile, sinistre, qui tenait l'âme sous sa possession. De là, un état de souffrance et de crainte tout autre dans l'antiquité qu'il n'a pu être chez les peuples chrétiens, un sentiment primordial de malaise et de terreur, une peur de Dieu, qui n'était jamais complètement étouffée. De là, mille efforts pour se relever de cet anathème, pour conjurer ce mauvais génie et faire sa paix avec ce fantôme ; mille superstitions, mille sacrifices absurdes, immondes, sanguinaires, pour contenter ce Dieu ennemi et acheter de lui le repos.

Ce qui subsistait enfin avec une force inébranlable, c'était la conséquence dépravée de ce double principe ou plutôt de ce double besoin ; c'était l'erreur fondamentale de l'antiquité, le polythéisme, avec ses formes différentes, soit qu'il adorât les éléments et la nature, soit qu'il se prosternât devant les dieux à formes humaines, soit qu'enfin, dans l'idolâtrie, ce crime commun à tant de nations, il divinisât l'œuvre manuelle de l'homme : toujours coupable de la même faute, toujours prenant pour Dieu ce qui n'est que la créature et la manifestation de Dieu.

Tout cela, dis-je, et le besoin naturel de la Divinité, et cette terreur instinctive qui fait partie de la nature de l'homme déchu, et cette fondamentale erreur du polythéisme avec toutes ses diversités ; tout cela subsistait, tout cela demeurait inexpugnable à tout raisonnement et à toute force humaine. En vain le grand nivellement romain affaiblissait-il les religions en ce qu'elles avaient de national ; en vain la philosophie les atteignait-elle par la moquerie et par le doute : le genre humain n'arrivait pour cela ni à mieux comprendre la Divinité, ni à prendre sur lui de s'en passer. L'athéisme d'un côté, de l'autre la foi en un Dieu unique et spirituel, étaient deux limites en deçà desquelles le vulgaire se tenait, soit dans son incrédulité, soit dans sa religion, deux limites que les philosophes eux-mêmes atteignaient rarement. D'un côté, l'épicuréisme lui-même n'osait ouvertement supprimer les dieux ; et de l'autre, si un Platon, par la force de son génie, avait pu s'élever à la notion du Dieu un, tout-puissant, universel, cette notion si simple et si belle, au lieu de s'étendre après lui, s'était effacée. Rarement on osa se dire athée, rarement aussi se proclamer monothéiste. Cicéron dit sans cesse : les dieux ; Cicéron, disciple de Platon, veut déifier sa fille Tullie ; de même que César, disciple d'Épicure, bâtit un temple à Vénus sa mère.

Ces sentiments et ces pensées faisaient tout le fond du paganisme ; dans le culte public, réglés, soumis à des formes certaines, dirigés vers un but, employés au service de la patrie ; dans le culte privé, vagues, indéterminés, gouvernés par des traditions diverses, variés sous des formes infinies pour satisfaire aux besoins infinis des âmes humaines.

Tant que les peuples furent indépendants, le culte privé resta dans l'ombre ; c'était la religion des hommes, non celle des peuples, en des siècles où l'homme n'était rien, où le peuple était tout. La conquête romaine, en amoindrissant la cité, faisait une place plus grande à l'être personnel de l'homme ; le culte privé, sous la conquête romaine, devenait véritablement la religion dominante.

C'est ce que, sous le règne d'Auguste, nous allons voir clairement se développer.

Le genre humain, qui venait de traverser les guerres civiles, témoin de tant de crimes et de désastres, épouvanté, non éclairé, se sentait poussé comme un coupable à chercher asile auprès des autels. La philosophie avait dévoilé dans les guerres civiles ses contradictions et son impuissance ; elle s'était noyée dans le sang de Caton.

Auguste comprit ce mouvement et voulut en profiter pour son œuvre favorite, la restauration de l'ancienne Rome. Il montra les dieux romains comme les bienfaiteurs éprouvés de la république et les protecteurs les plus sûrs que le genre humain pût choisir. Honorer les dieux parce qu'ils sont romains, craindre les philosophes parce qu'ils sont grecs ; telle fut la tradition politique qu'Auguste léguait à ses successeurs.

Il devait avoir bon marché de la philosophie. Les grandes et sérieuses écoles étaient tombées : il n'y avait plus, au temps de Sénèque, de pyrrhoniens ni de pythagoriciens[1] ; le dogmatisme de Platon avait péri devant le scepticisme de Carnéade ; Carnéade tombait à son tour ; et le stoïcisme, compromis dans les guerres civiles, demeurait suspect au prince de sédition, au peuple d'aristocratie.

L'épicuréisme seul avait la prétention de tenir école. Là, on jurait par la parole du maitre ; là, personne n'eût changé un mot à ses sacrés apophtegmes[2] ; on gardait son image dans sa chambre, sur sa poitrine, comme un talisman du comme une idole[3]. Le jour de la naissance d'Épicure était un jour de fête ; chaque mois des sacrifices étaient offerts à sa mémoire par des hommes qui n'en offraient à aucun dieu.

Mais cette parole du maître si fidèlement gardée n'était plus entendue comme le maître l'avait entendue. Épicure, ce prédicateur du plaisir qui ne vivait que d'eau et de légumes, avait cru fonder, sur une métaphysique toute négative, une morale presque sévère : il donnait le plaisir pour but à l'homme, mais il mettait le plaisir dans la vertu. L'inconséquence était choquante ; les disciples, plus logiques que le maître, n'entendirent de sa doctrine que le mot de plaisir et cette théologie toute critique au moyen de laquelle il donnait ce mot comme le dernier résultat de toute science. On cacha, comme dit Sénèque, les voluptés dans le sein de la philosophie ; l'épicuréisme ne fut qu'un prétexte commode pour tous les vices. L'obéissance aveugle à Épicure fut l'obéissance à ses propres penchants ; le culte d'Épicure fut le culte des commodités et des jouissances. L'épicuréisme, avec ses milliers de sectateurs, était presque un parti, presque une religion ; ce n'était plus une école.

Parlerons-nous des cyniques ? Le cynisme était le stoïcisme populaire. Mais ce qui était chez le stoïcien de l'orgueil, était chez le cynique de l'impudence. Sa brutale vertu allait en guenilles, demi-nue, la besace sur l'épaule, le bâton à la main, l'injure et le quolibet à la bouche. La vertu qui en vient là est bien près du vice ; le philosophe qui s'accoutre ainsi est bien près du saltimbanque. Au siècle suivant, Lucien nous le montrera en effet saltimbanque, mendiant, vicieux, athée[4].

A l'effronterie des cyniques, à la sensualité non pensante des épicuriens, ajoutez encore la puérilité des sophistes, ces jongleurs de la pensée, comme un ancien les appelle ; et vous comprendrez jusqu'où, depuis le temps des grands maîtres, la philosophie était tombée. Grâce à l'esprit frivole des Grecs, grâce au mépris héréditaire des Romains, peu de chose était à faire pour achever de décréditer des écoles qui se décréditaient ainsi. Les philosophes venaient argumenter à la table d'Auguste entre les bouffons et les comédiens[5] ; la fainéantise romaine s'amusait de ces docteurs ambulants (circulatores[6]), de ces parasites parleurs de vertu (aretalogi), mot qui prouve quel cas on faisait et de leurs discours et de la vertu[7]. On avait, quand on était riche, un philosophe chez soi, d'ordinaire un cynique, espèce de grazioso qui égayait le festin par sa morale. Nous lisons un mot qui peint bien cette manière de considérer la philosophie : Livie, femme d'Auguste, ayant éprouvé un malheur, et ne voulant pas en fatiguer les oreilles de César, se donna à consoler à un certain Aréus, philosophe de son mari[8]. Quand il pleuvait, quand les jeux du cirque étaient ajournés, on se faisait apporter Chrysippe, on entendait un stoïcien dans son école, un cynique dans la rue, gens qui connaissaient leur auditoire et n'avaient garde de l'ennuyer.

Ce discrédit de la philosophie ne laissait à Auguste autre chose à faire que de relever les autels des dieux romains. J'ai dit ailleurs le peu de succès de cette tentative, les vestales marchandées à prix d'argent[9], les sacerdoces négligés, la science des augures perdue[10], les livres sibyllins devenus tout à fait indéchiffrables[11], le droit pontifical obscurci[12]. Le monde, moins national que jamais, pouvait-il garder le principe de la nationalité des dieux ? Relever, quand la république était tombée, le culte de la république, une religion patriotique lorsqu'on avait supprimé toute patrie, la foi romaine quand Rome devenait cosmopolite, était-ce chose possible ?

Beaucoup de gens, il est vrai, acceptaient volontiers, à titre de devoir officiel, la religion que leur proposait Auguste. Horace, qui est le type de ces hommes, avouait qu'il avait été quelque peu épicurien ; mais un coup de tonnerre par un ciel serein l'avait converti[13], et il offrait pieusement son encens poétique à tous les dieux. Mais qui donc plus que Horace se moqua des hommes, des dieux et de lui-même ? Horace, à un certain diapason officiel, est Romain et croyant ; quand sa lyre descend d'un ton ou deux, il est Grec, débauché, incrédule. Horace qui maudit les soldats de Crassus époux déshonorés de femmes barbares[14], et qui trouve si beau et si doux de mourir pour la patrie[15], n'en rappelle pas moins en riant sa fuite si prompte au combat de Philippes, lorsqu'il jeta peu glorieusement son bouclier et que Mercure voulut bien le dérober tout tremblant derrière un nuage[16]. Horace, qui tant de fois prêcha pour les mœurs et pour les dieux, n'en reste pas moins un pourceau du troupeau d'Épicure[17] ; s'accommodant avec la conscience et les passions, de façon que ni celles-ci ni celle-là ne le gênent ou ne troublent sa santé ; faisant provision de courage contre le malheur, mais surtout, pour rien au monde, ne s'exposant au malheur :

Et mihi res, non me rebus submittere conor.

Et bien des épicuriens, à son exemple, après avoir brûlé leur grain d'encens officiel sur l'autel de Romulus, se moquent tout à leur aise de la louve de Romulus, et ne se croient pas obligés de refouler au fond de leur cœur la doctrine contemptrice des dieux[18]. Auguste soupe un jour chez un de ses vétérans, et lui raconte gravement que la déesse d'Ancalis a puni, par la perte des yeux et même par la mort, le sacrilège qui avait pillé son temple : César, dit le maître de la maison, c'est moi qui suis ce sacrilège et tu soupes aujourd'hui de la jambe de la déesse[19].

Mais tous ne parlaient pas ainsi. L'athéisme pratique des épicuriens ne pouvait convenir à la multitude, elle ne pouvait convenir surtout au lendemain des guerres civiles, après tant de désastres et tant de douleurs ; la religion officielle d'Auguste pas davantage. La philosophie ne lui présentait rien de certain, la tradition rien de satisfaisant, la politique rien de respectable : qu'importe ? elle cherchait ailleurs. Si le culte de la cité était brisé, est-ce à dire que l'homme devait rester sans culte ? Le besoin personnel de rites et de prières n'en avait que plus d'énergie ; l'homme n'en voulait que plus de cérémonies et de sacrifices, non pour l'État, mais pour lui-même ; la superstition privée succédait au culte public, l'instinct à la tradition, le polythéisme humain au polythéisme romain.

Ne cherchez ici ni dogmes positifs ni pratiques constantes ; tout était bon pour satisfaire l'éternelle soif de l'esprit humain : traditions héréditaires, cultes étrangers, mystères, superstitions, sciences occultes. Rien de réglé, rien de précis : sous les anciennes républiques la religion était loi, maintenant elle était caprice ; sous mille noms et sous mille formes diverses, les âmes se jetaient plus désespérément dans l'erreur au moment même où, du milieu des ténèbres, la lumière de la vérité naissait pour les justes[20].

Entrons dans le détail, examinons chacune des formes principales de la superstition humaine, et voyons si le polythéisme, en devenant personnel au lieu d'être politique, avait perdu de sa puissance et de sa vie.

Parlerons-nous d'abord de la superstition individuelle, de la foi aux talismans, aux songes, aux présages ? Celle-là croissait chaque jour. Horace demande, non pas à un homme du peuple, mais à son ami Julius Florus : Te moques-tu des songes, de la magie, des fantômes, des sortilèges nocturnes ?[21] Il eût pu faire cette demande même à l'incrédule César. César, depuis une chute qu'il avait faite, ne montait pas en char sans prononcer une parole magique qui devait le préserver de tout accident[22] ; César raconte dans ses mémoires les prodiges qui avaient annoncé sa victoire de Pharsale, et il gardait précieusement le palmier noir qui, ce jour-là, dit-il, avait percé tout à coup le pavé d'un temple[23].

Le froid Auguste est-il plus esprit fort que le brillant César ? Auguste craint le tonnerre ; il a peur des jours néfastes, des songes, des présages ; il attribue une révolte de son armée à l'imprudence qu'il avait commise de chausser ce jour-là son pied gauche avant son pied droit[24]. Livie enceinte fait couver un œuf pour savoir si elle aura un garçon ; il en sort un poulet avec une crête magnifique, qui présage la royauté de Tibère[25] Et Tibère lui-même, ce contempteur des dieux, tremble aux révélations d'un astrologue, et porte un laurier pour se garantir de la foudre[26].

Il y a plus : la superstition va gagnant du terrain. Tite-Live ne rapportait qu'avec un doute mal déguisé[27] les antiques traditions de la mythologie romaine. — Mais laissons passer une génération : Suétone, Tacite même, écrivant une histoire presque contemporaine, la rempliront de présages, de songes, de prodiges ; Pline l'Ancien, bien qu'il soit athée, sera plein de merveilles de ce genre : ces historiens étaient-ils plus faibles d'esprit, ou croyaient-ils devoir s'accommoder à des lecteurs plus crédules ? peu nous importe. Pline le Jeune écrit encore à Suétone : Tu es effrayé d'un songe, et tu veux faire remettre ta plaidoirie... Le songe, en effet, vient de Jupiter ; mais il faut te demander si d'ordinaire tes rêves sont contraires ou conformes à l'événement ; ceci est un point important[28].

Autrefois Cicéron se moquait des oracles et parlait, entre autres, des sorts de Préneste comme d'une vieillerie discréditée[29]. — Mais soixante-dix ans plus tard, Germanicus et Agrippine visitent tous les oracles qu'ils rencontrent sur leur chemin[30]. Tibère leur rend hommage par sa peur : il se fait apporter, pour les confisquer, ces petits morceaux de bois fatidiques qu'on appelle les sorts de Préneste ; mais, ô miracle ! dit Suétone, la caisse dans laquelle on les a apportés à Rome se trouve vide le lendemain, et les sorts, en une nuit, sont revenus tout seuls à Préneste[31].

Parlerai-je maintenant de la dévotion en commun, des temples, des sanctuaires, des assemblées Montrerai-je Alexandrie élevant avec un zèle égal des autels à tous les dieux ? Vous mènerai-je avec nos voyageurs lire sur les jambes mutilées du dieu Memnon les témoignages d'admiration ou de reconnaissance inscrits par des voyageurs moins incrédules que le sceptique Strabon, et qui croyaient avoir entendu le chant du dieu au lever du soleil[32] ?

Chez les peuples helléniques surtout, les sanctuaires religieux, les rendez-vous de la dévotion païenne étaient demeurés sacrés. Le culte grec était sans puissance politique ; mais il lui restait une grande sympathie avec les instincts poétiques et les affections populaires. Ces peuples, si peu soucieux de leur liberté, se révoltaient volontiers pour leurs temples. Ils défendaient contre Cléopâtre Arsinoé réfugiée dans le temple d'Éphèse. Le droit d'asile protégeait les débiteurs obérés, les esclavages fugitifs, les malfaiteurs impunis ; et quand la police romaine voulait sévir, elle était arrêtée par une insurrection populaire. Tibère, ce grand justicier, traita gravement cette question : il n'osa abolir les droits d'asile, il se contenta de les vérifier ; toutes les cités grecques envoyèrent leurs députés à Rome ; et ce fut un grand jour pour le sénat romain, une grave et importante discussion que celles de ces droits d'asile, dont on cherchait les titres et dans les édits du peuple romain, et dans les décrets des rois, et dans les traditions des dieux, auxquels on n'osa toucher qu'avec réserve, leur imposant des limites, mais dans un langage toujours plein de respect[33].

La gloire des sanctuaires illustres ne diminuait donc pas. Les tablettes votives n'étaient pas moins nombreuses à Cos et à Épidaure[34]. Jupiter Olympien n'était pas descendu du trône d'ivoire et d'or où Phidias l'avait placé[35]. Junon régnait toujours à Samos, Minerve à Athènes, Vénus à Paphos et à Aphrodise ; dans ce peuple de dieux qu'adorait la Grèce, il n'était si obscur vilain qui n'eût au moins sa chapelle, et cent ans plus tard, Pausanias décrit par milliers les temples, les oratoires et les statues. Enfin, dans la cité d'Éphèse, sur un des plus beaux points du monde romain, s'élevait le temple de Diane, bâti en quatre siècles avec l'argent de l'Asie entière[36]. Toute une classe d'artisans ne faisait que vendre de petites statues d'or et d'argent de la grande déesse ; et quand, à la face de cette grossière allégorie orientale, saint Paul vint prêcher son Dieu crucifié, on le chassa aux cris de : Vive la grande Diane des Éphésiens[37].

Car la Diane d'Éphèse avait en ce siècle une grandeur toute particulière. Placée sur les limites qui séparaient les peuples grecs des races asiatiques, elle était un centre puissant de croyances et d'adorations. Cette déesse si vénérée n'était plus la chasseresse hellénique, la vierge sauvage Artémis. C'était une idole aux nombreuses mamelles ; c'était, sous un autre nom, Mylitta, Astarté[38], ce dieu hermaphrodite de la Syrie que l'on nous peint, tenant à la main un sceptre et un rouet, et placé entre les deux autels du soleil et de la lune. Sous ces noms et ces symboles divers, était plus que jamais adoré le dieu-monde de l'Orient, la matière indépendante de l'esprit, aveugle et cependant puissante, inintelligente et pourtant créatrice.

Le génie romain surtout se sentait depuis longtemps poussé vers les cultes orientaux. Les Galls de Bérécynthe remplissaient Rome de leurs danses vagabondes[39]. Les dieux d'Égypte, proscrits par les lois, avaient fini par se faire reconnaître des lois elles-mêmes. Auguste avait lutté en vain contre cette invasion étrangère[40] : Isis, Sérapis, le dieu bœuf Apis pour lequel il témoignait son mépris, étaient, dès son époque, les vrais dieux du peuple de Rome, ceux que malade on invoquait, ceux qui recevaient les serments les plus sacrés, ceux autour desquels se rassemblaient les jeunes filles[41], ceux vers lesquels, folles et ardentes, les femmes poussaient leurs maris plus indifférents[42] ; Germanicus et Agrippine allaient les adorer dans leurs sanctuaires égyptiens[43].

Parlerai-je enfin du culte le plus secret et le plus intime, celui des mystères ? Là, nous retrouvons la même effervescence de dévotion, la même confusion d'idées, la même prépondérance du panthéisme oriental.

La foule, plus dégoûtée que jamais des religions avouées, plus avide de religions cachées et ténébreuses, se précipitait vers les sanctuaires redoutés d'Éleusis et de Samothrace. Varron, et après lui Germanicus[44] vinrent exprès se faire initier à ceux-ci ; Auguste respectait et protégeait ceux-là[45]. Mais ces adytes mystérieux étaient faits pour les pas discrets de quelques initiés ; la foule les profana. La religion du petit nombre se perdit en devenant la religion de la multitude. Le secret des mystères, dissipé sur tout un peuple, se divulgua et s'évanouit. Les tendances orientales l'emportèrent sur l'esprit hellénique ; le côté panthéiste et cosmogonique des mystères, sur leur côté spiritualiste et humain : la partie sainte et religieuse, celle qui encourageait à la vertu et promettait l'immortalité, demeura oubliée, incomprise ou perdue ; la partie philosophique, s'il y en avait une, dut s'effacer. La personnalité de l'homme qui, par les mystères, échappait à la tyrannie de la cité, ne put échapper à la tyrannie du panthéisme. Tant il est vrai que le moi humain, malgré son orgueil, devait toujours être asservi dans le paganisme, et qu'à la loi chrétienne seulement il appartenait en l'humiliant de l'affranchir[46] !

Cette vague et accablante idée du panthéisme était donc ce qui restait au fond des mystères ; avec elle, une pratique grossière, dénuée de toute espérance généreuse comme de toute claire intelligence ; avec elle, ce qui peut-être garda plus de puissance que tout le reste, la partie impure des mystères. Dès le temps de Cicéron, mystère et abomination étaient devenus presque synonymes. Le lien de ces sociétés fut souvent la communauté de honte qui unissait les associés. Ce peuple, qui n'eut pas gardé le secret d'un mythe ou d'une doctrine, garda le secret de son ignominie ; et il se passa dans l'ombre de telles choses qu'en ce siècle, où la corruption était si patente, on n'osait pourtant pas les avouer[47].

Ainsi la pensée romaine d'Auguste échouait contre les rêveries d'un siècle malade, qui ne savait supporter, ni ses maux, ni les remèdes à ses maux[48]. Ainsi se développait, au mépris des lois et des cultes héréditaires, cette vaine superstition, ignorante des anciens dieux[49]. Ainsi, par l'affaissement des cultes nationaux, par le progrès de la superstition personnelle, par le développement et la corruption des mystères, cette société abdiquait de plus en plus et sa dignité romaine et sa civilisation hellénique, pour aller se perdre dans le panthéisme ou le naturalisme de l'Orient. L'insurrection humaine de l'esprit grec reculait maintenant devant ce vieil antagoniste qu'elle croyait autrefois avoir vaincu. Le monde entier allait boire à cette coupe enivrante et grossière qui le débarrassait du souci de sa propre pensée et de toute estime pour son être ; il se rassasiait de ces ténébreux symboles qui tous proposaient à sa vénération les puissances inertes, aveugles, fatales, de la nature. Le polythéisme remontait à son origine ; il se rafraîchissait à sa source première ; il se rapprochait de cette idolâtrie primitive des peuples de l'Asie occidentale que les saintes Écritures nous ont peinte :en caractères si reconnaissables. A cette Assyrie, siège des abominations de Chanaan et de Babylone, à cette Égypte, mère féconde des superstitions les plus honteuses, la Grèce savante, la puissante Rome, demandaient leurs Attys et leurs Anubis, leur fétichisme grossier et leur symbolisme obscène, ces mutilations sanguinaires et ces sacrifices pour le mort, contre lesquels, vingt siècles auparavant, Moise prémunissait les Hébreux.

Une exception demeurait pourtant : un reste sérieux était debout de la religion politique de Rome, un reste aussi des adorations humaines de la Grèce, de ses complaisantes apothéoses et de ses dieux à la façon d'Évhémère. Le vrai culte public, celui qui est pratiqué chez tous les peuples et au nom de tous, c'était le culte des Césars. Auguste mort, Néron vivant, tenaient tète aux dieux orientaux et leur disputaient les prières. Ils avaient pour eux, non la persuasion, non la tradition, mais la crainte. César était le dieu auquel on croyait le moins et qu'on adorait le plus.

On peut, d'un règne à l'autre, noter le progrès de ce culte impie. Le principe que l'empereur devenait dieu seulement après sa mort et par décret du sénat, ce principe, toujours proclamé[50], fut souvent violé. Auguste, fait dieu de son vivant, bon gré mal gré, eut grand'peine à circonscrire sa divinité dans les provinces et à n'être en Italie qu'un simple mortel[51]. Il n'admettait pas il est vrai que son culte fût séparé de celui de la ville de Rome, et faisait par conséquent de ce double culte un acte d'adhésion des provinces à son empire[52]

Tibère fut à son tour accablé de demandes ; on le supplia de se laisser adorer. Il est curieux de l'entendre sur ce sujet : J'ai accordé cette permission aux villes d'Asie, et l'on m'a blâmé ; je le faisais pourtant par respect pour l'exemple d'Auguste... et d'autant plus qu'au culte de ma personne on ajoutait des marques de vénération pour le sénat. Y avoir consenti une fois peut être pardonnable, me laisser adorer dans toutes les provinces serait d'un intolérable orgueil... J'avoue que je suis mortel et que je subis les lois de l'humanité... soyez témoins de cette déclaration, et que la postérité s'en souvienne... Et depuis ce temps, ajoute Tacite, il persista dans son refus, modestie selon les uns, prudence selon d'autres, selon quelques-uns bassesse d'âme : Hercule et Bacchus, disaient-ils, n'ont-ils pas souhaité d'être dieux ? les plus hautes ambitions ne conviennent-elles pas aux âmes les plus hautes ? Auguste a prétendu à la divinité et il a mieux fait[53].

Le zèle des peuples était étrange. Lorsque Tibère eut permis que les villes d'Asie lui élevassent un temple, onze cités se disputèrent l'honneur inouï de posséder cet édifice. L'une vantait les services qu'elle avait rendus à Rome, l'autre son antiquité et sa gloire. Halicarnasse, disait-elle, était bâtie sur le rocher, nul tremblement de terre ne l'avait ébranlée depuis douze cents ans. Le temple de Tibère serait là éternel comme le dieu ! Mais, comme Milet avait déjà le temple d'Apollon, comme Éphèse possédait Diane, Pergame le dieu Auguste[54], le sénat pensa qu'elles pouvaient se contenter de ces divinités ; et Smyrne posséda le temple de Tibère[55].

Encore vivait-on sous un prince singulièrement modeste. Mais jetons un regard sur le temps qui va suivre. Caligula, dont j'ai dit la rage de divinité, eut des temples et dans toutes les provinces et même au Capitole[56] ; Claude s'en fit bâtir en Bretagne ; Néron à Rome même, par un décret solennel du sénat[57]. Rien de tout cela ne faisait obstacle au culte d'Auguste, culte éternel comme l'empire, culte imposé et respecté comme le nom romain[58], culte qui avait ses prêtres dans toutes les villes, et qui dura jusqu'aux derniers temps du paganisme. Et non-seulement Auguste, mais Germanicus, mais Livie[59] ; non-seulement Tibère, mais jusqu'à Séjan ; non-seulement Caligula, mais Drusille sa concubine et sa sœur ; non-seulement Claude, mais ses affranchis[60] ; non-seulement Néron, mais Poppée[61] ; plus tard, que dirais-je ? non-seulement un Hadrien, mais un Antinoüs, furent dieux : les uns après leur mort, les autres même de leur vivant ; les uns par le fait de l'adulation privée, les autres par un acte solennel de la servilité publique. Et Néron, faisant l'oraison funèbre de Poppée, la louait surtout d'avoir donné le jour à une déesse[62] ; cette déesse avait vécu quatre mois. C'étaient là vraiment les grands dieux de l'Olympe, c'étaient leurs autels qu'on entourait, leurs sacerdoces qu'on achetait pour des sommes énormes. Se parjurer par le nom de Jupiter, le mal était petit : mais il fallait prendre garde à tenir son serment quand on avait juré par le nom de César[63].

Par là, du reste, les cultes nationaux achevaient de se corrompre ; le culte des Césars était universel et prenait place auprès de tous les dieux. Toutes les provinces dédiaient des temples à Auguste. En Grèce, les images des empereurs étaient plus vénérées que celles de Jupiter[64]. Athènes achevait pour Auguste le temple qu'elle avait commencé pour le père des dieux ; Octavie avait un temple à Corinthe ; la Grèce complaisante rangeait à Olympie les statues des Césars autour de celle de Jupiter, et plaçait auprès de sa chaste Diane toutes les Julies et toutes les Drusilles de Rome[65].

Certes, en un tel siècle, ni le polythéisme, ni l'idolâtrie, n'étaient tombés. Voilà de leur puissance une double et éclatante manifestation. D'un côté, le naturalisme oriental avec ses croyances grossières et ses pratiques abominables, envahissant la civilisation de l'Occident, corrompait et la vertu romaine et la science grecque ; de l'autre côté, l'idolâtrie hellénique remplaçait le culte de la patrie par le culte des Césars, et ce culte de la dépravation par la peur était son plus insensé comme son plus infâme résultat. Les deux erreurs fondamentales du paganisme triomphaient donc à la fois, l'une dans les âmes par la superstition privée, l'autre dans les cités par le culte public. Les formes nationales des religions païennes périssaient corrompues et discréditées ; mais dans ce mélange leur principe commun se réveillait plus puissant ; ce vieux levain fermentait de nouveau parmi tant de souillures. Les débris des autels nationaux renversés par la conquête romaine formaient comme un seul autel, trophée du polythéisme, où des millions d'hommes adoraient ensemble des milliers de dieux.

 

 

 



[1] Senec., Natur. quæst., VII, in fine.

[2] Senec., Ép. 39. Eusèbe, Prépar. évang., XIV, 5. Lucien, Eum., 3.

[3] Pline, Hist. nat., XXXV, 2.

[4] V., sur la brutalité grossière des cyniques, Augustin, de Civit. Dei, XIV, 20 ; Épictète, in Arrien., III, 22 ; Lucien, in Fugit. ; Julien, Orat., VII, VIII.

[5] Aut acroamata, aut etiam triviales ex circo ludios interponebat ac frequentissime aretalogos. (Suet., in Aug., 74. Philon, in Legat.)

[6] Senec., Ép. 29, 108.

[7] Suet., in Aug., 74. Juvénal, XV, 46. Tacite, Annal., XIV, 16.

[8] Philosopho viri sui se consolandam præbuit. (Senec., ad Marciam, 4.) V. en quels termes Mécène parle à Auguste des philosophes, vains, dangereux, pas plus véridiques que les astrologues. Il excepte Arius (Aréus) et Athénodore. Apud Dion, LII, p. 491. A.

[9] Tacite, Annal., II, 86 ; IV, 18. Pour honorer les vestales, Tibère ne trouva rien de mieux que de placer à côté d'elles sa mère, la vieille et intrigante Livie. Id., IV, 16.

[10] Tacite, Annal., XI, 15.

[11] Tacite, Annal., VI, 12.

[12] Voyez la séance du sénat où un Flamen dialis demande à être appelé au gouvernement d'une province. Tacite, Annal., III, 58, 71 ; IV, 16.

[13] Ode I, 28. V. encore Ode III, 6, 24 ; IV, 15 ; Epod., 7 ; Carmen secul.

[14] Ode III, 5.

[15] Ode III, 2.

[16] Ode II, 7. Il était impossible de marquer plus complètement la contradiction entre la théorie et la pratique.

[17] Épit., I, 4.

[18] Doctrinam deos spernentem. (Tite-Live, X, 40.) V. aussi in Præf. : Nondum hæc qua tenet seculum negligentia deum venera. (III, 20.)

[19] Pline, Hist. nat., XXXIII, 24.

[20] Psaume CXI, 4.

[21] Horace, II ; Ép. II, in fine.

[22] Pline, Hist. nat., XXVIII, 2.

[23] Plutarque, in Cæs. Pline, Hist. nat., XVII, 25. Cæsar, de Bell. civ., III, 101, 105. Suet., in Cæs., 61, 81. La victoire de Pharsale aurait été, le jour même, révélée divinement à un prêtre de Padoue. Gellius, XV, 18.

Cicéron raconte avec quel sentiment de terreur, lui, Varron, Caton et d'autres, quelques jours avant Pharsale, entendirent répéter une prophétie d'un matelot grec, annonçant pillage, incendie, déluge de sang. — De Divin., I, 32. V. d'autres faits de ce genre de la part de César, de Cassius, etc. M. Boissier, de la Religion romaine, t. I, p. 76, livre I, I, § 1.

[24] V., sur les superstitions d'Auguste, les présages, songes, oracles, prodiges relatifs à sa vie, huit chapitres de Suétone, in Aug., 90-97 ; Pline, Hist. nat., II, 7 ; Dion, XLVIII ; Gellius, XV, 7.

[25] Suet., in Tiber., 14. Pline, Hist. nat., X, 55.

[26] Suet., in Tiber., 14, 63, 69. Pline, Hist. nat., XV, 30. Il tenait beaucoup à être salué quand il éternuait, et observait, pour se faire raser, les jours de la lune. Pline, ibid., XVI, 30 ; XXVIII, 2. Josèphe, Ant., XVIII, 8. Dion, LV. Tacite, Annal., VI, 21.

[27] Præf., et aussi I, 4.

[28] Pline, Épist., I, 18. Sylla aussi croyait aux songes et surtout à ceux du milieu de la nuit. Plutarque, in Sylla, 12 ; in Lucullo, 41.

[29] De Divin., II, 41, 57.

[30] Tacite, Annal., II, 54, 58.

[31] Suet., in Tiber., 63. Oracles : de Delphes, consulté par Néron (Suet., in Ner., 40) ; d'Apollon Clarius à Colophon, par Germanicus (Tacite, Annal., II, 54) ; de Trophonius, subsistant encore au second siècle (Plutarque, de Orac. defectu, 45 ; Pausanias, I, 34 ; VII, 21 ; IX, 39. Lucien) ; de Mopsus et d'Amphilochus à Malins en Cilicie (Plutarque, ibid. Pausanias, I, 34) ; des Branchides, etc.

[32] Pline, Hist. nat., XXXVI, 7. Strabon, XVII. Tacite, Annal., II, 61, et les inscriptions.

[33] Tacite, Annal., III, 60 et suiv., 14. On voit par là que Suétone s'est trompé quand il dit que les droits d'asile furent abolis. In Tiber., 37. V. aussi le procès devant le sénat entre les Messéniens et les Lacédémoniens, au sujet du temple de Diane Liménate. Tacite, Annal., IV, 43. V. dans Eckhel (t. IV, p. 483 et a.), les médailles de 78 villes de l'empire portant les unes ΙΕΡΑ (ville sacrée), les autres Ν (νεωκόρος, gardienne du temple) ; d'autres ΑΣΥΑ (asile).

[34] Strabon, VIII. V. dans Gruter et dans Bullet, Hist. du christian., p 119.

[35] Sur le temple d'Olympie, V. Pausanias, V, 10-12.

[36] Le temple d'Éphèse, bâti il y a 220 ans, fut établi dans un terrain marécageux pour ne pas être exposé aux tremblements de terre ; mais pour l'affermir on assit les fondements sur une couche de charbon pilé et de toisons de laine. Sa longueur est de 425 pieds, sa largeur de 220. Il y a 127 colonnes hautes de 70 pieds, dont chacune a été donnée par un roi ; 26 sont ciselées, l'une est de Scopas. Pline, Hist. nat., XXXVI, 15.

[37] Actes, XIX, 23 et s.

[38] Astarté à Sidon (Lucien, de Dea Syra. 4. Tertullien, Apolog., 24.) — Atergatis à Hiérapolis en Syrie (Strabon, XVI). — Aphaka dans le Liban (Eusèbe, de Vita Constant., III, 55). — Isis en Égypte ? — Séléné (la Lune) chez les Grecs. — Selon Lucien, Junon (Héra), mais Astarté a plus de rapports avec Artémis (Diane) ou avec Aphrodite (Vénus). — Sur ce culte, V. Lucien, de Dea Syra. — Le caractère panthéiste du culte d'Isis est indiqué par l'inscription suivante, d'une époque postérieure : TE TIBI VNA QVAE ES OMNIA DEA ISIS ARRIVS BALBINVS V. C. Orelli 1871.

Inscription de Sextilius Pollion en l'honneur de la Diane d'Éphèse, d'Auguste (vivant), de Tibère, fils d'Auguste, et de la cité d'Éphèse. Orelli 1649.

[39] Ovide, Fastes, IV, 180. Tibulle, I, Églogue, IV.

[40] Suet., in Aug., 93.

[41] V. Catulle.... Properce, II, 24 ; V, 1 ; Ovide, de Arte amandi, I, 75 ; Ép. ex Ponto, I, 37 ; Tibulle, I, Eleg., III, et alibi, et Horace (Ép. I, 17) : Per sanctum juratus dicat Osirim.

L'une des régions de Rome délimitées par Auguste portait le nom du temple d'Isis et de Sérapis.

[42] Strabon, VII.

[43] Tacite, Annal., II, 54, 59.

[44] Augustin, de Civ. Dei, VII, 38. Tacite, Annal., II, 54, 58.

[45] Suet., in Aug., 93.

[46] Sur le sentiment et la pratique du panthéisme sous les empereurs, V. les inscriptions. Pantheodivo PantheoSignum PantheiSignum PantheumLibero PantheoSancto Silvano PantheoPriapo Pantheo. Orelli, 2110-2117.

[47] V. saint Augustin, de Civ. Dei, VI, 7 ; Clemens Alex., Protreptikon, 2 ; Arnobe, Advenus gentes ; Juvénal, VI, 345 : Quel autel n'a aujourd'hui son Clodius ?

[48] Tite-Live, in Præf.

[49] Virgile, Æneid., VIII, 185.

[50] Tacite, Annal., XV, cap. ult. Tertullien, Apolog., 34.

[51] Les poètes ne se gênent pas pour diviniser Auguste vivant : Virgile, Églogues, I, 6. Georg., III, 15. Horace, Épit., II. Ovide, Fastes, IV.

Et même en Italie on ne se fît pas faute d'adorer les Lares d'Auguste (Lares Augusti). Orelli, 1658, 1659, 7115.

[52] Sur l'Augusteum d'Ancyre et les différents Augustea, V. la Revue archéologique, décembre 1871. p. 347 et s. Et en général sur ce qui touche les apothéoses impériales, M. Boissier, ibid., p. 156 et s.

[53] Tacite, Annal., IV, 15, 37, 38. J'ai parlé ailleurs de ces refus de Tibère, t. I.

[54] Pergamenos sede Augusti ibi sita satis adeptes.... Ephesii Milesiique, hi Apollinis, illi Dianæ cæremonia occupavisse civitates.... (Tacite, Annal., IV, 55, 50.)

[55] Tacite, Annal., IV, 55, 50.

[56] Philon, de Legat. ; Josèphe, Antiq., XIX, 1 ; XVIII, 18 ; de Bello, II, 9 ; Suet., in Calig., 22.

[57] Tanquam humanum fastigium egresso. (Tacite, XV, cap. ult.) — La fille de Soranus invoque Néron comme dieu : Nulla mihi Cæsaris mentio nisi inter numina. (XVI, 31.) — Tiridate à Néron. — Lucain exalte la divinité de Néron, maudit ensuite celle des Césars. — Sénèque de même pour Claude. (de Tranq. animi, I, 14.) — Germanicus eut aussi des autels. (Tacite, Annal., II, 83.)

[58] Cyzique, privée de sa liberté sous Tibère, pour avoir négligé la construction d'un temple promis à Auguste. (Tacite, Annal., IV, 36. Dion.)

[59] Tacite, Annal., II, 83.

[60] Vitellius avait une chapelle où il adorait les images de Narcisse et de Pallas. Suet., in Vitell., 3.

[61] On reproche à Thraséa Poppæam divam non credere. Aussi dit-on de lui : Spernit religiones, abrogat leges. (XVI, 22.)

[62] Quod divæ infantis parens fuisset. (Tacite, Annal., XVI, 6.) Sur la déification de la fille de Poppée, XV, 23. On compte 53 de ces apothéoses politiques dont 15 pour des femmes.

[63] V. Dion, LVII, 9 ; Tacite, Annal., I, 72 ; Cod. Just., 41 de transactionib., (II, 4), 2 de rebus creditis, (IV, 1) ; Digeste, 13, § 5 de jure jurando, (XII, 2). Tertullien, Apolog., 18 ; Minucius Félix, in Octavio, 25.

[64] Philostrate, in Apollon., I, 15.

[65] Pausanias, II, 3 ; V, 12. Temples de César et d'Auguste à Sparte, III, 11 ; des empereurs romains à Élis, VI, 25, etc. Sur ces faits et tous ceux qui sont relatifs à l'état religieux des nations soumises à l'empire romain, lisez l'ouvrage de Tzschirner : Der Fall des Heidenthums (La Chute du Paganisme). Leipsick, 1829. Liv. I, t. p. 30-73.