PAR
E. DELLA CERDA.
NAPLES - 1876
Note 1. Castellamare est une ville moderne, bâtie sur les ruines de l'ancienne Stabiæ. Celle-ci fut complètement détruite, après une énergique résistance, par Sylla, lors de la guerre sociale[1]. Il parait que la mémoire de Pline, qui périt tout près, à Resina, étouffé par les cendres du Vésuve lors de l'éruption de l'an. 79 de J.-C., est restée vivante à Castellamare, puisque dans une source d'eau que l'on voit à droite, sur une place, quand on traverse la ville en allant de Naples à Sorrento, on lit cette inscription gravée sur le marbre : Aquæ acidulæ, cujus vim in pluribus morbis Plinius olim commendavit. Ce qui veut dire, que Pline avait déjà dans les temps anciens indiqué les eaux acidulées comme efficaces contre plusieurs espèces de maladies. Après l'ensevelissement de Stabiæ par les cendres et les pierres lancées par le Vésuve, on a bâti en partie la ville de Castellamare sur ses décombres. Cependant lorsqu'on prend la route de Nocera, on peut encore voir sur le bord du chemin quelques vestiges des anciennes ruines, mais ailleurs on en trouve, qui sont beaucoup plus intéressantes. Pendant le siècle passé on y a fait des fouilles assez productives, car on voit au MUSÉE DE NAPLES, rez-de-chaussée, à droite, les deux Néréides et la Marchande d'Amours, deux chefs-d’œuvre en fresque trouvés à l'occasion des fouilles de Stabiæ. Note 2. On trouve à Ana Capri des ruines romaines et l'on prétend même que le terrain sur lequel est bâtie la ville est en partie artificiellement aplani : il y aurait des voûtes et des arcades, que les premiers habitants auraient construites dans le but de boucher les ravins et les petites vallées qui rendaient le sol trop accidenté pour permettre d'y asseoir des fondements.- Ainsi, lorsqu'on marche à Ana Capri l'on entend quelquefois résonner le sol comme si au dessous il existait de grandes cavités. On y vient de découvrir, à Tiberino, un atelier de sculpture des pierres précieuses, de même qu'à Palazzo Amaro une marbrerie. Les étangs remplis de la terre dont on faisait les vases murrhins étaient déjà connus du temps de Romanelli cité. Note 3. Ce rapprochement m'est venu à l'idée par la circonstance suivante. Les oies, qui crièrent la nuit que les Gaulois tentèrent escalader le Capitole, étaient nourries dans un temple de Junon, près de la citadelle. Ce temple fut depuis consacré à Junon qui avertit, Junon ad monendum ; Monitrix : expression dont par contraction le peuple fit Junon Moneta et plus tard simplement Moneta. Je suis donc porté à penser qu'à Capri, Tibère ayant consacré une villa à Junon qui avertit, à Junon ad monendum ; Monitrix : le peuple l'aurait aussi par contraction transformé en Junon Moneta ; et plus tard par une ellipse simplement en Moneta. Cette dénomination populaire s'accorde du reste avec l'opinion des érudits, qui ont placé dans le site nommé à Capri, Moneta, la villa de Giunone. Au MUSÉE DE NAPLES, au rez-de-chaussée, statues en marbre, première salle, on peut voir une statue drapée de Junon n. 147-78, et à coté un buste placé sur colonne ancienne. Mais la plus belle Junon se trouve au troisième portique dans une niche et porte le n. 100. Note 4. Nous ne connaissons, en effet, au Musée de Naples, comme provenant de Capri que : La belle mosaïque qui forme le pavé de la cinquième salle des vases italo-grecs à l'étage supérieur : Quelques mosaïques confondues avec celles de Pompéi et d'Herculanum, dans les salles des vases sus-mentionnés : Tibère à cheval avec une femme, conduit par un esclave devant Priape, dans la dernière salle des bas-reliefs : La curieuse clef des bains de Tibère, contenant encore de l'eau dans le trou bouché par la rouille et dont on sent le bruit, lorsqu'on la secoue. Note 5. Cybèle, que les Grecs appelaient aussi la Mère des Dieux, était adorée à Pessinunte, ville de Phrygie, sous la forme d'une pierre tombée du ciel ; petite, unie, de couleur noirâtre et devant ressembler aux aérolithes ferrugineux de nos collections minéralogiques. Pendant les terribles guerres de Carthage et l'invasion d'Annibal, on consulta à Rome les livres sacrés, et on y trouva qu'un oracle avait prophétisé que, Lorsque un ennemi aurait apporté la guerre en Italie, il pourrait être vaincu et chassé si Cybèle était apportée de Pessinunte à Rome. Le sénat envoya de suite des ambassadeurs à Attale, roi de Pergame et ami des Romains, pour lui demander la pierre sacrée : le roi lui-même la leur remit dans les mains. Plusieurs incidents marquèrent le retour de l'ambassade et le transport de la pierre : ainsi en chemin on consulta l'oracle de Delphes, qui augura tout bien de l'entreprise, sous condition que l'homme le plus honnête de Rome reçût la déesse à son arrivée. Ainsi lorsque l'ambassade fut arrivée à Terracina, elle informa le sénat de la recommandation de l'oracle et celui-ci désigna à cette fin Scipion Nasica[2], parent de Scipion l'Africain qui défit plus tard Annibal à Zama. Scipion Nasica obéit et partit pour Ostie ; reçut la déesse de la main des, prêtres Phrygiens, qui l'accompagnaient et la remit aux matrones romaines qui, ici comme souvent dans l'histoire romaine, jouent un rôle important. Mais le navire s'embourba dans les bas-fonds du Tibre, au pied de l'Aventin. On ne savait pas comment faire, et la peur d'avoir provoqué la colère de la déesse s'emparait de toutes les âmes. On consulta sur ce sujet les aruspices, qui répondirent que seulement des mains chastes pourraient et devraient faire mouvoir le navire. Claudia, une vestale, se présente et, l'ayant touché à peine, le navire se mit en marche[3]. Ce prodige ou miracle païen qui fit alors une grande sensation, s'est perpétué jusqu'à nous par un bas-relief que l'on voit au musée du Capitole à Rome, On déposa la déesse au temple de la Victoire, et on s'empressa de bâtir sur le Palatin le temple de la Mère des Dieux dont le culte voluptueux a duré jusqu'à la chute du paganisme. L'ara cylindrique trouvée à la villa Cybèle à Capri soutenait la déesse sous la forme de la pierre apportée de la Phrygie, dont elle aurait pu être une copie, ou bien sa statue. En réalité Cybèle ayant été personnifiée est représentée sous la forme d'une femme majestueuse, assise sur un trône, mais alors il s'agit de la Cybèle des Grecs, dont Phydias a enrichi l'art en la représentant par une splendide statue, dont de très-belles copies sont arrivées jusqu'à nous. Cybèle fut la première divinité qui de l'Orient vins établir son culte à Rome. Plus tard elle fut suivie : de la déesse de la fécondité, à qui était consacrée la vache et que l' on représentait quelquefois sous la forme d'une Diane avec une infinité de mamelles semées par tout le corps, l'Isis égyptienne : de Sérapis, dieu de la médecine, aussi égyptien, dont le, culte remplaça celui d'Esculape : du dieu persan Mithras, dont nous nous sommes longuement occupés : du dieu du soleil, Elagabale, dont M. Aurèle Antonin, fils de Caracalla et de Julie Semia, connu sous le nom de Héliogabale, était pontife à Emèse en Syrie, lorsqu'il y fut proclamé empereur par les légions ; ce dieu était représenté, comme Cybèle ; par une pierre, mais ronde à la base et terminant en forme de cône, assez grosse et noire, que cet empereur à son entrée à Rome porta avec une grande solennité et beaucoup de pompe, Après ces divinités, dont le culte était en général souillé par des pratiques plus ou moins impures, une religion véritable, qui s'était fait jour aussi en Orient, conquit l'empire romain et, en faisant écrouler l'édifice toujours vacillant et le système vicieux du monde païen, fit asseoir la société sur les bases d'une morale admirable, féconde pour la dignité de l'homme et le bien-être matériel des peuples. Au MUSÉE DE NAPLES, rez-de-chaussée, on peut voir : HÉLIOGABALE, buste n. 213-137 Salle des Empereurs. CYBÈLE, statue n. 71-66, tête n. 145-99, troisième salle à droite. ESCULAPE, statue colossale n. 123-94, troisième salle à droite. ISIS, statues en marbre gris n. 496 et n. 462-492 troisième salle à droite. SERAPIS et ISIS, statues, salle égyptienne n. 416 et 68. MITHRAS, bas-relief, salle des bas-reliefs, contre le mur. A POMPÉI on voit un petit, mais très-joli temple d'Isis ; à POUZZOLI des belles ruines d'un splendide temple de Sérapis. Note 6. Parmi les poissons qu'on pêche à Capri nous allons nommer à peine ceux qui sont estimés pour la table, en indiquant le poids maximum qu'ils peuvent atteindre d'après quelques exemplaires qu'on a souvent pris. Le Tonno (Thinnus) 120 kil., le Pesce-Spada (Gladius) 120 kil., la Sbriglia (Mullus) 130 kil., la Cernia (Cernua) à écailles comme tous ceux sous-nommés, 50 kil., la Leterata (Antherina) 30 kil., la Lecciola ou Leccia (Amia) 30 kil., il Dentici (Dentex), le Pragientici (Phragus) 8 kil., la Palamita ou Palamide (Limosa) 5 kil., le Scorfano (Scorpius) ou Cardinale à cause de la couleur rouge de ses écailles, 5 kil. Ce dernier poisson, la Triglia (Mullus) 1 kil. et le Merluzzo (Asellus) 4 kil. sont très-estimés, surtout la Triglia qui est quelque chose de délicieux même pour le palais du gourmet le plus difficile ou le plus blasé. Il y a encore une foule de petits poissons, tous à écailles, très-bons que nous allons nommer : la Sariga (Sargus) 1/2 kil., le Cefalo (Mugilis) 1/2 kil., la Brina (Umbra) 5 kil., le Capone ou Torcata (Cuculus) 6 kil., la Sarpa (Salpa) 314 kil., la Lacerta (Scomber) 3/4 kil., le Savero (Saurus) 3/4 kil., la Luce (Sudius) 3 kil., l'Occiata (Melanurus) 3/4 kil., le Macarello ou Maquerete (Scombrus) 2 kil., le Pesce di S. Pietro (Faber) 3 kil. La Voupa (Boca) la Aiata (Hiatula) la Menella (Mœna) l'Aguia (Acus) la Trascina (Draco Marinus) le Corvo (Coracinus) et quelques autres sont des poissons excellents pour le ménage. Il y a plusieurs espèces de Sepia, mais le Calamaio (Lolligo) 3 kil. est le plus tendre et pour cela il est assez estimé. Il Pulpo (Polypus) 12 kil., est assez abondant ; la Morena (Murœna) arrive à avoir 1,m50 de longueur et à peser 12 kil. Le Rongo (Conger) arrive à 2 mètres et au poids de 15 kil. Il y a trois espèces de Langouste : la Langusta, 1/2 kil., l'Elefante (Astacus marinus) et la Scigala (Silarius latus) atteint chacune facilement le poids de 2 kil. Il y a beaucoup de crevettes et d'une trés-bonne qualité. Nous avons employé la nomenclature latine de l'Aquatilium animalium historia, auctore HIPPOLYTO SALVIANO. Toutes les informations nous les avons puisées sur place soit directement soit en interrogeant les pécheurs, et les habitants qui pouvaient nous fournir de données exactes. Note 7. Plusieurs noms ont été donnés à Ischya. Énarie, parce que ce fut une station navale de la flotte d'Énée : Inarime c'est le nom que lui donne Homère : les grecs l'appelèrent Pithecusas. Pline[4] qui rapporte cela la nomme ailleurs[5] déjà Iscia. D'après lui la formation de Ischya et de Procida aurait été volcanique. Voici comment il s'exprime à cet égard[6]. Dans une époque reculée il est arrivé que près de la côte d'Italie, et parmi les îles Eoliennes, dans le golfe de Toscane, une île toute enflammée, en produisant un bouillonnement terrible, a surgi soudainement de la mer : on raconte qu'alors une masse de poissons, morts par la secousse et par la chaleur, flotta sur la surface de la mer, mais qui tous ceux qui en mangèrent périrent sur le coup. Ce fut de la sorte que fut formée Pithecusas (Ischya) dans le golfe de la Campanie. — Plus tard, continue Pline, le mont Epomeum, qu'on y remarquait, s'étant transformé dans un volcan, s'est mis en éruption et par la masse des matières rejetées s'est abaissé au niveau de la plaine. Ensuite le sol s'est de nouveau élevé, et plusieurs montagnes parurent, dont quelques-unes, en se détachant, formèrent l'île de Procida, qui est ainsi nommée parce qu'elle procède[7] de Parthenusas (Ischya). L'île de Saint Vincent, l'une des îles de l'archipel dd Cap Vert, que nous avons eu l'occasion de visiter, donne en partie une idée du phénomène décrit par Pline ; le sol y a encore l'apparence d'avoir subi l'action d'une température excessivement élevée, la couleur de brique fort cuite démontrant suffisamment l'action prolongée d'un feu violent ; pas un arbre, pas un brin de verdure, pas une source. Quant à Capri sa formation est toute différente ; c'est un tas de roches calcaires, formées par des détritus et excrétions de certains mollusques sous-marins[8]. Note 8.
Nous avons eu l'occasion de mentionner quelquefois Thrasylle qui était un
astrologue que Tibère connut à Rhodes et que depuis lors ne le quitta plus[9]. Il avait étudié
son art chez les Chaldéens[10], chez lesquels,
comme on le sait, est née la science de l'astronomie, les astres et les
étoiles leur servant de direction lorsque dans leur existence nomade ils
étaient obligés de changer de séjour, et d'amener vers une autre région leurs
innombrables troupeaux. DIODORE DE SICILE[11] l'affirme
lorsqu'il dit : Les Chaldéens de Babylone sont le
premier peuple qui se soit occupé d'astronomie ; puis, en parlant
d'aune comète, il ajoute : Quelques physiciens
attribuent la naissance de ce météore aux causes naturelles, en expliquant
que ces phénomènes se produisent nécessairement à époque déterminée. Les Chaldéens
de Babylone se sont accordés dans ces prédictions avec une exactitude
parfaite. Les Chaldéens ne s'étonnent pas lorsqu'un tel phénomène survient,
ils s'étonnent plutôt quand il ne se produit pas selon les périodes qui lui
sont propres, périodes qui s'accomplissent en vertu des mouvements éternels
des astres et de direction invariable. Ce fut donc chez ce peuple que Thrasylle acquit la science de l'astrologie, que dans notre temps on a nommé astronomie, en réservant sa dénomination primitive à l'art de lire l'avenir dans les astres. Thrasylle n'était donc pas un charlatan, et nous devons d'autant plus le croire que Tibère qui avait infiniment d'esprit, et de l'esprit très-cultivé, l'a toujours tenu en grand compte. Auguste, qui croyait aussi à l'astrologie[12], le plaçait à sa table et le traitait avec familiarité. Du reste toutes les prédictions de Thrasylle se réalisèrent. Ainsi lorsque étant à Rhodes il fut interrogé par Tibère, il lui prophétisa l'empire, et très-habilement lui dévoila[13] l'avenir. Lors de l'autorisation pour son retour de Rhodes, qu'il désirait beaucoup, Thrasylle lui certifia qu'un vaisseau qu'on apercevait sur la côte, lui apportait[14] la nouvelle heureuse. Enfin ses prédictions étaient si respectées par ceux qui le fréquentaient qu'à cause d'une Caligula construisit son pont célèbre entre Pozzoles et Baïa : Thrasylle ayant dit un jour que Caligula ne serait pas autant empereur, comme il ne traversait pas sur la voie Appienne[15], en voiture, la mer entre Pozzoles et Baïa. En honneur de Thrasylle il faut dire, qu'il ne fit jamais un mauvais usage de son art, car Suétone rapporte qu'il fit différer l'exécution de plusieurs projets de Tibère, qui aurait encore immolé plusieurs victimes et fini avec tous ses neveux et même avec son petit-fils Tibère, le fils de Drusus, si Thrasylle ne l'eût pas retenu[16], en lui assurant exprès qu'il aurait encore une très-longue vie. Thrasylle avait été professeur d'astrologie de Tibère depuis son séjour à Rhodes[17], où à cause de cette science deux fois il faillit[18] de perdre la vie, sacrifié par ce prince. Tibère profita beaucoup des ses leçons et devint si
instruit et si fort dans l'astrologie qu'il fit quelques prophéties[19]. Cela mit
peut-être à la mode cet art, car les astrologues étaient nombreux lors de son
départ définitif de Rome, puisque Tacite[20] dit : Les astrologues prétendirent que la position des astres au
moment de son départ annonçait que Tibère ne reviendrait plus à Rome et qu'il
mourait bientôt ; ce qui causa la perte de plusieurs, qui supposant sa fin
prochaine publièrent leur conjecture : on prédit bien en effet avec certitude
que Tibère ne reviendrait plus à Rome, mais on se trompa sur le reste,
puisque ce prince, qui vint souvent même sous les murs de Rome sans jamais y
entrer, atteignit une extrême vieillesse. Suétone[21] rapporte que
Tibère indigné de leur audace, les bannit, mais qu'après il leur pardonna (par esprit de corps on doit le penser) sous
promesse qu'ils abandonneraient leur art, dont les prédictions presque se
réalisant à Spelunca[22] agrandirent le
crédit. En outre Tibère craignait les astrologues, parce que P étant aussi, il avait découvert par les astres quel serait son sort ; de sorte qu'il savait longtemps auparavant à quelle infamie et à quelles horreurs[23] il était destiné. Pour moi, dit Tacite[24] : Ces faits me font douter si les évènements de cette vie sont asservis à une fatalité immuable, ou s'ils roulent au gré du hasard. Au reste, la plus part des hommes ne renonceront point à l'idée que — l'avenir de chaque mortel ne soit fixé dès le premier moment de sa naissance, — et que si les prédictions sont démenties par les faits, ce ne soit la faute des imposteurs, à cause des quels l'on n'a plus de confiance dans cet art, dont la certitude s'est démontrée par des faits et dans les temps anciens et dans le nôtre ; en effet, le fils de ce même Thrasylle prédit l'empire à Néron. Les Arabes, qui apprirent des Chaldéens l'astrologie transportèrent cette science en Espagne[25], d'où elle se répandit en Europe, où elle n'a pas dès longtemps été oubliée ; car pendant la « guerre de trente ans » on a vu encore le général Wallenstein se faire toujours accompagner de Séni, célèbre astrologue, qui lui fit des prédictions très-exactes et qui lui prophétisa même sa mort avec toutes les circonstances, qui l'entourèrent. Note 9. STRABON, le célèbre géographe, né l'an 50 avant Jésus Christ et mort dans les dernières années du règne de Tibère, n'a pas parlé de celui-ci parce que probablement il avait écrit sa notice sur Capri avant que Tibère s'y fût installé. Mais il dit positivement qu'Auguste fit bâtir à Capri, et qu'ayant échangé Ischya contre cette île il la fit entrer dans son domaine privé. Strabon ajoute encore qu'autrefois il y avait à Capri deux villes, mais que de son temps il n'y avait qu'une[26]. PLINE qui fleurit longtemps après Tibère, tout en s'occupant de Capri, fait mention de cet empereur, il dit[27] : A la distance de huit mille pas de Sorrento, se trouve Pile de Capri, fameuse par la citadelle de l'empereur Tibère, et dont le périmètre est de quatre-vingt mille pas. Note 10. Nous aurons ailleurs l'occasion d'ajouter quelques renseignements sur Livie ; quant à Tibère Néron, voilà ce que nous trouvons à dire. Il était descendant de la gens Claudia (famille des Claudes) qui parmi ses surnoms adopta celui de Néron, qui en langue sabine signifiait : brave et vaillant. Un des membres de cette famille défit Asdrubal, lors qu'il venait d'Espagne rejoindre son frère Annibal. Un autre Claude ayant tué dans un combat singulier un général ennemi nommé Drausus, prit pour lui et ses descendants le surnom de Drusus. Ce fut aussi une Claudia, qui retira des sables du Tibre, où il avait échoué, le navire qui portait la pierre sacrée[28] de Cybèle. Tibère Néron commanda avec beaucoup d'éclat la flotte romaine pendant la guerre d'Alexandrie. Il exerça aussi le pontificat et la préture. Compromis dans le meurtre de César, il se cacha et émigra. Mais après l'amnistie générale accordée par Auguste, il revint à Rome où il mourut quelque temps après lui avoir cédé Livie, sa femme, quoique enceinte de Drusus, et lui ayant déjà donné Tibère[29]. En effet il la céda (Uxoremque Liviam... petenti Augusto concessit)[30], moyennant le procédé qu'Auguste imagina à cette fin. Le mari se supposa père de la femme et se désista de ses droits sur elle, qui ainsi émancipée sortit de la puissance maritale, et devint libre. Par cette scandaleuse et inouïe fiction juridique, fut rompu le mariage de Livie avec Tibère Néron, qui se prêta à une si indigne manœuvre. Plus tard Caligula employa le même expédient lorsqu'il épousa Lollia, femme de Memmius[31]. Au MUSÉE DE NAPLES on peut voir une statue en bronze de Tibère Néron ; œuvre très-estimé. Elle porte ses vêtements de pontife. La statue se trouve dans la troisième salle des grands bronzes, près de la fenêtre, à droite. Note 11. Livie, que Suétone et Cornelius Nepos et d'autres écrivains appellent quelquefois Drusilla, de Drusus surnom de son premier mari, appartenait à la plus illustre noblesse, et par les Claudes dont elle était issue et par l'adoption des Livius et des Jules. Sa vertu a toujours été proclamée et sa réputation maintenue, quoiqu' elle se permît une facilité de manières inconnue aux femmes des premiers temps de Rome. Auguste l'enleva à son mari, Claude Néron, quoique enceinte de Drusus et ayant déjà mis au monde Tibère ; Tacite dit, qu'on n'a jamais su, si elle était d'intelligence avec son ravisseur[32]. Livie avait un bon caractère et aima toujours Auguste et son fils Tibère, qu'elle aida beaucoup à arriver à l'empire, Auguste étant fort enclin pour Germanicus. Elle avait appris d'Auguste toute son adresse et de Tibère un peu de sa dissimulation outrée[33]. Tacite prétend, qu'après avoir insidieusement ruiné la fortune de ses beaux-fils, Livie se parait en public d'une hypocrite commisération pour leurs malheurs[34]. Cependant cet écrivain reconnaît que son influence a beaucoup contribué à mettre un frein aux crimes de Tibère, dont la cruauté après sa mort ne connut plus de bornes[35]. Après la mort d'Auguste elle fut choisie pour être la prêtresse du temple qu'on lui érigea. Livie atteignit une extrême vieillesse (ætate extrema[36]). Dion Cassius la fait mourir à l'âge de quatre-vingt-six ans[37], ce qui se combine assez bien avec la naissance de Tibère. Pline[38] rapporte : Livia Augusta LXXXII annos vita Pucino vino retulit acceptos, non alio usa. Ce qui veut dire que Livie vécut jusqu'à l'âge de quatre-vingt-deux ans, grâce au vin de Pucino, dont elle fit un usage exclusif. Il paraît que ce vin était quelque chose d'extraordinaire, car au lib. III, 18, Pline avait déjà dit : Amnis Timalvus, castellum nobile vino Pucinum. C'est-à-dire que près de la rivière Timalvo existe un château où pousse le fameux vin de Pucinum. Le commentateur du texte de Pline, dans la magnifique édition de Turin, fait observer, qu'il s'agit du château maintenant nommé Castel Duino, qui est situé non loin des bords du Timavo, rivière qui se décharge entre Trieste et l'embouchure de l'Isonzo. Quant au vin et à sa qualité, nous pensons qu'il n'en connaissait goutte, car il n'en dit pas un mot. Au MUSÉE DE NAPLES se trouve une magnifique statue de Livie, au rez-de-chaussée, premier portique à droite, n. 574-538. Il y a aussi une Livie en vêtements de prêtresse d'Auguste, statue n. 77-506. Note 12. Cependant il ne faut pas omettre qu'Auguste avait déjà été fiancé à la fille de Servilius Isauricus, compagnon de César dans un consulat. Mais les besoins de la politique lui firent la répudier pour épouser Claudia, belle-fille de Marc-Antoine et fille de Fulvie qui, ayant pris le parti de celui-ci dans ses querelles avec Auguste, poussa ce dernier à répudier sa fille, quoique vierge ; le mariage ayant été ce qu'on appelle en notre droit canonique : ratum sed non consumatum. Ce fut après cette petite bourrasque qu'Auguste se maria avec Scribonia, de la noble famille des Scriboniens[39]. Elle était déjà deux fois veuve, et avait eu des enfants du second mari. Après en avoir eu Julie, unique rejeton de sa lignée car Livie après l'avoir épousé devint stérile, Auguste la répudia à cause de ses mœurs : morum perversitatem ejus[40]. Note 13. Octavie nièce de César, était une dame d'une grande beauté et d'une grande pureté de mœurs. Jules César, son oncle, eut l'idée de la faire épouser par Pompée, mais ce projet n'ayant pas abouti, elle épousa Claudius Marcellus[41], dont elle eut : deux filles nommées MARCELLA — une desquelles se maria avec Agrippa, et après en avoir été répudiée[42], avec Jules Antoine, fils de M. Antoine —, et un fils, MARCELLUS qui, marié extrêmement jeune avec Julie, fille d'Auguste, est mort à vingt ans. Il fut très-aimé et très-regretté des siens et du peuple romain[43]. Virgile le célébra dans le VI Chant de son Énéide[44]. Après la mort de C. Marcellus, Auguste pour fortifier son alliance avec Marc Antoine la fit épouser par celui-ci. Ce mariage, étant considéré comme ut moyen de concilier les deux chefs, était si désiré par tous les partis que, la loi défendant qu'avant dix mois écoulés la veuve pût contracter de nouvelles noces, par un arrêt du Sénat, rendu expressément pour le mariage d'Octavie[45], ce délai tut dispensé. Antoine qu'elle chercha toujours à diriger dans le bon chemin, mais que sa passion pour Cléopâtre entraîna à l'abîme, lui causa les plus grands regrets, car Octavie l'aimait avec une tendresse si grande que malgré ses écarts avec Cléopâtre elle tenait à Rome sa maison de façon à faire croire à tous ses esclaves, à ses connaissances et à elle-même que l'absence d'Antoine était passagère et qu'en peu de jours il devait retourner. Octavie eut de Marc Antoine deux filles : ANTONIA l'aînée et ANTONIA la jeune. La première fut femme de Domitius Enobarbus, dont elle eut deux filles : Lépida et Domitia, et un fils, Cn. Domitius, dont la vie souillée de meurtres, d'adultères et d'incestes fut abominable, et digne du père de Néron[46]. Ce fut Tibère en personne, qui à Capri fiança Cn. Domitius à Agrippine, fille de Germanicus, et leur ordonna de célébrer les noces à Rome[47]. Lepida périt par des motifs de femme, dit Tacite (muliebribus causis), sous la haine d'Agrippine, mère de Néron, qui avait du penchant pour la tante[48] ; quant à Domitia, l'on sait à peine que son mari Crispus périt empoisonné par ordre de cet empereur. ANTONIA la jeune épousa Drusus, frère de Tibère, dont elle eut plusieurs enfants ; mais seulement Germanicus, Claude et Livie survécurent à leur père[49]. Livie lors de sa condamnation à mort par la faim, lui fut remise pour subir chez elle ce supplice, qu'elle lui infligea avec la plus grande impassibilité[50]. Antonia la jeune, malgré les partis très-avantageux qui s'offrirent, resta toujours dans le veuvage, et put conserver une grande sévérité de conduite quoique, étant douée d'une grande beauté, elle vécût dans la société de Rome, où alors il régnait une immense corruption. Pline, qui donne quelquefois des renseignements
très-drôles, rapporte qu'elle s'amusa à apprivoiser un poisson et qu'elle
l'aima avec tant de tendresse qu'elle lui mit des boucles d'oreilles : il dit
aussi qu'on remarquait une singularité chez elle : celle de n'avoir jamais
craché[51]. Suétone[52] rapporte qu'elle
nommait son fils Claude : Une ombre d'homme, un
avorton et que lorsqu'elle voulait parler d'un imbécile elle disait : Il est plus bête que mon fils Claude. Elle avait à Rome un grand entourage, Tibère ayant conservé pour elle une grande estime ; car à la chasteté d'Agrippine elle réunissait une grande douceur et beaucoup de prudence. Cette estime augmenta de beaucoup, après qu'elle l'avertit de la conspiration de Séjan en envoyant à Capri, dans le plus grand secret, son fidèle esclave Palante avec une lettre où tous les détails de la conspiration étaient décrits. Tibère fit de suite arrêter Séjan par Macron, le juger par le sénat, et l'étrangler[53]. Antonia la jeune mourut des chagrins que lui causa Caligula, son petit-fils, après son avènement à l'empire ; on dit même qu'il l'empoisonna[54]. Octavie et Auguste s'aimèrent avec une tendresse qui ne se démentit pas, quoique à sa mort Auguste eut déjà atteint cinquante-quatre ans[55]. Elle reçut les plus grands honneurs funéraires, et même pendant sa vie Auguste lui avait dédié, ainsi qu'à son fils, quelques monuments, parmi lesquels on remarque le portique d'Octavie et le théâtre de Marcellus, dont on voit encore les ruines à Rome[56]. Note 14. Jules César était d'une race très-antique[57], qui se perd dans la nuit des temps ; en vérité, parmi les familles transportées d'Alba, la capitale du Latium, les Julii sont déjà nommés. Denys d' Halicarnasse parle d'une Julius Proculus, contemporain de Romulus. César s'était fiancé dès l'enfance à Cosutia, d'une famille non patricienne, mais fort riche. Il la répudia pour épouser Cornélie, qui lui donna bientôt une fille, Julie. Cornélie était fille de Cinna, personnage politique, et qui avait été quatre fois consul. Il est avéré que Sylla voulut marier sa fille à César en le poussant à répudier Cornélie, mais il ne l'obtint pas, et à cause de cet échec il prit César en haine, et chercha à s'en venger sous des prétextes politiques, au point de l'obliger à se cacher et à prendre la fuite, sa vie étant en danger. A la fin Sylla lui fit grâce, cédant aux instances de ses protecteurs ; mais ce fut alors qu'il prononça ce mot devenu célèbre : Il y a en César plusieurs Marius[58]. César, après la mort de Cornélie, épousa Pompéia, fille de Q. Pompéus, mais il s'en sépara à cause d'un scandale qui fit grand bruit à Rome. En vérité, à l'occasion d'une fête religieuse, en honneur de la Bonne Déesse, célébrée dans sa maison, et où seulement des femmes étaient admises, on découvrit, au beau milieu d'une cérémonie prescrite par le rite, qu'un homme, déguisé en joueuse de lyre, se trouvait parmi les célébrantes. Cela produit un tel effroi et une telle épouvante parmi les dévotes qu'un grand tapage en résulta, et le fait acquit une telle publicité que le plus grand ridicule tomba sur César. D'autant plus que le profanateur du sanctuaire féminin était Clodius, que toute Rome connaissait comme l'amant préféré de Pompeia, et qui, à la recherche d'émotions, s'était glissé au milieu des plus belles femmes de la société de ce temps. Mais la chose n'en resta pas là : on cria à l'adultère et au sacrilège, et Clodius par ordre du sénat dut être mandé par les consuls devant les comices[59]. Aurélie, mère de César et Julie, sa sœur, y furent entendues comme témoins, mais César refusa de parler en déclarant qu'il n'en savait rien ; et lorsqu'on lui demanda, pourquoi tout de suite après la fête il avait répudié sa femme, il répondit : C'est parce qu'il faut que la femme de César ne soit pas même atteinte d'un soupçon[60]. Caton, qui guettait toujours les scandales, saisit encore cette occasion pour prêcher morale ; l'orateur Hortensius en profita pour faire de belles péroraisons ; Cicéron intervint aussi, mais comme témoin, et fit une telle déposition contre Clodius que celui-ci devint depuis ce jour son mortel ennemi. Mais les juges étaient achetés et le Forum tumultueux, grâce aux partisans du prévenu, de sorte que Clodius fut acquitté[61]. César épousa alors Calpurnie, fille de L. Pison, et maria sa fille avec Pompée, qui la vit bientôt mourir[62]. Ce fut vers ce temps que, pour conserver l'amitié de Pompée, César lui offrit Octavie, fille de Atia et nièce de Julie, sa sœur[63], mais cet arrangement n'ayant pas abouti, il maria Octavie avec Marcellus. César avait[64] la taille haute, le teint blanc, le corps bien fait, le visage plein, les yeux noirs et vifs, le tempérament robuste. Dans les derniers temps de sa vie, il fut sujet aux syncopes subites et à des terreurs pendant le sommeil : il eut même deux attaques d'épilepsie. Scrupuleux pour la toilette, il se faisait couper les cheveux et raser avec grand soin ; mais il ne pouvait se consoler d'être chauve, d'autant plus que ses ennemis s'en moquaient, de sorte qu'il avait une immense peine à ramener sur son front le peu de cheveux qui lui restaient. C'est pour cela que, entre autres privilèges, le peuple lui ayant accordé celui de porter une couronne de laurier, il en fut si content qu'il la mit sans cesse[65]. C'est depuis lors, il nous semble, que la couronne de laurier a été considéré chez les Romains comme l'enseigne de la suprême puissance, quoique très-différente du diadème et de la couronne des rois : c'est de là que probablement Auguste la prit et qu'elle s'est maintenue comme un attribut des empereurs. César fut un homme très-extraordinaire, plus que cela, un grand génie dont la capacité embrassait toute la sphère des connaissances humaines. Il était doué d'une si grande mémoire et avait la faculté de l'attention tellement développée qu'il pouvait au même temps écrire, lire, dicter et écouter : aussi pouvait-il dicter jusqu'à sept secrétaires sans jamais encourir dans une seule faute[66]. César fut un grand capitaine, un grand orateur et un grand écrivain ; mais voulant devenir roi, et changer la forme du gouvernement de la République, il lui manqua l'adresse de son neveu Auguste, et il se conduisit avec une telle indiscrétion et un tel orgueil qu'il dut périr à la cinquante-sixième année de son âge[67] sous les poignards des républicains[68]. Au MUSÉE DE NAPLES, rez-de-chaussée, premier portique, on peut voir : Jules César, statue n. 249-163. Jules César, buste colossal n. 215-162 (œuvre estimé). Note 15. Auguste maria d'abord Julie à Marcellus, fils de sa sœur Octavie ; après la mort de Marcellus avenue à l'âge de vingt ans, il la maria avec Marcus Agrippa. Mais comme celui-ci était marié avec une sœur de Marcellus, et en avait déjà des enfants, Auguste eut à demander à sa sœur Octavie la faveur de lui céder son gendre[69]. Agrippa était d'obscure naissance, mais était un brave guerrier et le compagnon d'Auguste dans ses exploits militaires et dans deux consulats successifs, ce qui lui fit le prendre en amitié[70]. En réalité il l'estimait beaucoup, car lorsqu'Agrippa, encore très-jeune, épousa sa première femme, une fille de Pomponius Atticus, et eut d'elle sa première fille, Agrippine ; à peine celle-ci avait-elle atteint la première année de son âge qu'Auguste en fit la fiancée de Tibère, son beau-fils, qui plus tard l'épousa[71]. Agrippa éleva à Rome un grand nombre de beaux monuments, encouragé par Auguste, comme d'autres principaux citoyens, à embellir la ville[72]. Un des plus remarquables, le Panthéon, qui est arrivé jusqu' à nous assez bien conservé, fut par lui dédié à cet empereur. Note 16. Le caractère bas et féroce d'Agrippa détermina Auguste à le rejeter de la famille et à le reléguer à Sorrento ; mais voyant que loin de s'adoucir, il devenait chaque jour plus intraitable, il le transféra à l'île de Plasnasie, maintenant Pianosa, au sud de l'île d'Elbe, et par un sénatus-consulte il obtint qu'on le confinât à perpétuité dans cet endroit. Agrippa faisait souvent ostentation de sa force musculaire et comme il était un grand pêcheur, il se mit dans la tête qu'il était Neptune, le dieu de la mer. En outre, à ce qu'il paraît, il était devenu la proie de la rancune de Livie qu'il maltraitait et appelait marâtre ; il accusait aussi Auguste de retenir la succession de son père[73]. Il fut dans le lieu de son exil tué par un vaillant centurion, par ordre de Tibère, avant que la mort d'Auguste fût connue ; mais, quoique surpris et sans armes, il disputa longtemps sa vie, car il était doué d'une force prodigieuse[74]. En apprenant la mort d'Auguste, Clemens, un des esclaves d'Agrippa, avait imaginé de l'enlever de ruse ou de force, et de le conduire et le présenter aux armées en Germanie. Mais ce projet n'ayant pas pu être exécuté à cause du meurtre d'Agrippa, Clemens se fit donner pour celui-ci, et en parcourant les villes, où il se faisait voir le soir quoique sa ressemblance avec Agrippa fut frappante, il arriva à faire croire même à Rome que les dieux avaient sauvé Agrippa. Ces faits prirent une telle gravité que Tibère s'en inquiéta et, employant la ruse, il fit prendre l'imposteur par deux soldats, qui lui se présentèrent comme des adhérents. Mené devant Tibère qui lui demanda comment il était devenu Agrippa ; Clemens lui répondit : Comme toi César. On ne put le contraindre à déclarer ses complices, et Tibère, craignant la publicité du supplice, le fit mourir dans l'intérieur du palais, d'où à la nuit on emporta secrètement le corps. Quoiqu'on désignât des chevaliers et des sénateurs comme complices, Tibère laissa oublier ce fait sans en faire aucune recherche[75]. Note 17. C'est l'enfant dont Livie était enceinte lors de son mariage avec Auguste et qu'elle mit au monde trois mois après. Drusus épousa Antonia la jeune, fille de M. Antoine et Octavie ; elle lui donna plusieurs enfants, dont seulement trois lui survécurent : Germanicus, Livie et Claude, qui plus tard fut empereur[76]. Le peuple adorait Drusus, persuadé par sa gentillesse qu'il eût rétabli la liberté s'il fût parvenu à l'empire. En réalité son affabilité faisait contraste avec l'accueil arrogant et les paroles mystérieuses de Tibère[77]. A ces abords agréables, il réunissait beaucoup de capacité, dont il donna les plus grands témoignages pendant la guerre de Réthie et celle de Germanie, où il exerça le commandement. Il fut le premier des généraux romains, qui navigua sur l'océan septentrional. Ce fut encore lui qui creusa un canal en Germanie, long de huit mille pas. Dans la poursuite de l'ennemi, il ne s'arrêta qu'a l'apparition d'une femme gigantesque, qui sous la forme d'un fantôme lui défendit d'avancer plus loin. Il exerça la questure, la préture et le consulat ; il obtint par ses exploits militaires l'ovation et les ornements du triomphe ; le sénat lui accorda aussi le titre de Germanicus, pour lui et ses descendants[78]. L'arc triomphal que le sénat vota en honneur de Drusus[79], figure encore parmi les ruines de Rome. Le canal qu'il creusa en Germanie existe encore, il relie le village de Isseloort à la ville de Duisbourg, en Hollande. Au MUSÉE DE NAPLES on peut voir la statue de Drusus sous le n. 204 : celle d'Antonia la jeune sous le n. 208 ; celle de Claude sous le n. 233-153. Note 18. En vérité, pour obtenir le Triomphe il fallait avoir été général en chef et avoir exercé le commandement à l'occasion de l'exploit militaire, qui aurait mérité le triomphe ; il fallait encore que l'exploit fût d'une grande importance. C'est par cette dernière raison que Claude, quoique empereur, n'obtint d'abord que les ornements du triomphe[80]. Le général, au retour de l'expédition victorieuse, devait attendre hors de Rome, au champ de Mars, que le sénat lui eût accordé le triomphe et faire son entrée après. C'était probablement dans le but d'éviter une pression sur la délibération du sénat. Les exploits moins importants, ou obtenus par des généraux, qui n'exerçaient pas de commandement, étaient récompensés par l'Ovation. Dans le triomphe le général, en partant du champ de Mars, passait sous la Porta Triumphalis, se dirigeait vers le Capitole et y sacrifiait dans le temple de Jupiter un taureau. Pour y arriver, il traversait le Velabrum où, dans son triomphe des Gaules César fut renversé de son char, l'essieu s'en étant cassé[81] ; ensuite il parcourait toute la longueur du Circus Maximus, et en prenant à droite, il se dirigeait vers le Forum, d'où il montait au Capitole. Dans l'ovation il suivait le même chemin jusqu'à l'extrémité du Circus Maximus, mais au lieu de se diriger vers le Capitole il le laissait à gauche et, en prenant la via Appia, il allait jusqu'au Monte Albano, maintenant Monte Cavo, et y sacrifiait une brebis, en latin Ovis, étymologie du mot Ovation. Or, Auguste par la nouvelle constitution était princeps du sénat et imperator de l'armée et son commandant en chef, de sorte que Tibère était son subordonné. Dès lors celui-ci ne pouvait aspirer au triomphe. Cet honneur devait échoir à l'empereur comme le pratiquèrent ses successeurs. Mais Auguste, éludant la loi, conféra à Tibère les honneurs du triomphe, ce qui était une question de mot mais qui frappa tout le monde et fut considéré comme une innovation. Cependant cela rentrait dans sa politique, car pendant son règne il accorda le triomphe à plus de trente généraux, et les ornements du triomphe à un plus grand nombre encore[82]. En allant à Monte Cavo, au sommet duquel une église a remplacé le temple de Jupiter, on parcourt encore maintenant une partie de la route des Ovations qui est assez bien conservée. La Porta Triumphalis ne devait pas être extrêmement large, car Pompée lors de son triomphe d'Afrique y fut obligé de faire dételer les éléphants qui traînaient son char et qui furent les premiers qu'on vit à Rome[83]. Après qu'Auguste agrandit l'enceinte de la ville, le champ de Mars y fut compris ; dès lors les triomphateurs attendirent ailleurs la délibération du sénat, et firent leur entrée par la Via Triumphalis, située entre le Vatican et le mausolée d'Adrien[84]. Note 19. Cette Agrippine, qu'il ne faut pas confondre avec la femme de Germanicus, ni avec la mère de Néron, et que Tacite insiste à nommer Vispsania, à cause du surnom de son père, M. Agrippa Vispsanius, était fille de celui-ci et d'une fille de T. Pomponius Atticus, et nièce de cet autre Atticus à qui Cicéron a adressé des lettres qui sont arrivées jusqu'à nous[85]. Auguste, pour distinguer son favori Agrippa, fiança Tibère à sa fille, quand elle avait à peine une année, vix anniculam[86], dit Cornelius Nepos. Mais Pomponius étant un simple chevalier, et non un patricien, le peuple à Rome, lorsque Tibère épousa Agrippine, et en eut Drusus, ébloui par la noblesse de race, en faisait, moins de cas que de Germanicus et sa famille, dans les veines desquels il voyait bouillonner le sang illustre des Césars[87]. Malgré cela, Tibère ne répudia Agrippine que pour obéir à un ordre d'Auguste et à contre-cœur. Il l'aimait beaucoup, et lorsqu'il l'eut répudiée, l'ayant rencontrée un jour en société, il la regarda avec une telle expression (contentis et tumentibus oculis), qu'on prit garde dans la suite qu'elle ne parût plus devant lui[88]. Après avoir été répudiée par Tibère, Agrippine épousa[89] Marcus Gallus qui, à cause de cela, devint tellement odieux au prince que plus tard il le fit poursuivre. Gallus en effet, sous différents prétextes, fut mis en prison et traîna dans le cachot pendant trois ans, jusqu'à ce qu'un jour on le trouva mort. On sait qu'il périt par la faim, mais on ignore si sa mort fut volontaire[90]. Agrippine, dit Tacite, fut des enfants d'Agrippa le seul, qui échappa à une mort violente ; car Agrippa, périt avec certitude par le fer, et le reste, à ce qu'on croit, par la faim ou par le poison[91]. Note 20. Tibère était doué d'une si grande résistance à la fatigue que, lorsqu'il s'est rendu près de son frère Drusus gravement malade en Germanie, il est arrivé à faire en voiture, quoiqu'en en cassant trois et en marchant jour et nuit, jusqu'a deux cent mille pas romains, qui à 1,m 475 font 295 kilomètres en vingt-quatre heures, ce que fut considéré comme très-extraordinaire chez les anciens 8. Après la mort de son frère il fit transporter son corps à Rome et pendant tout le chemin il marcha toujours devant le convoi, à pied et la tête découverte 6. A soixante-dix-huit ans, car ce fut dans les dernières semaines de sa vie, dans l'Amphithéâtre d'Astura, où il assistait à un combat de bêtes, il a encore assailli un sanglier de plusieurs coups de javelot qu'il lança de sa place sur l'arène[92]. Note 21. Le crédit de Séjan près Tibère augmenta beaucoup après un accident arrivé à cet empereur et à toute sa suite. Il se trouvait à Spelunca, maintenant Sperlonga, village situé entre Itri et Gæta, et dînait dans une des grottes sauvages ou plutôt cavernes, qu'on y voit encore. Tout à coup des pierres se détachant de la voûte écrasent plusieurs esclaves. Devant cette catastrophe tout le monde, saisi de peur, se sauve en prenant la fuite. Mais Séjan reste et se précipite vers le prince, qu'il couvre de son corps, en soutenant de ses épaules et de ses mains les blocs qui se détachent. Les soldats, qui courent au secours, les trouvent encore dans cette effrayante position. Tibère fut extrêmement touché de ce dévouement et de cette preuve de fidélité, ce qui grandit la faveur et l'audace de Séjan[93]. Cependant, ayant élevé trop haut son ambition, il voulut épouser Livie, de la famille des Césars, veuve de Drusus (le fils de Tibère), laquelle nourrissait pour lui une véritable passion ; mais Tibère, par une lettre longue et très-dissimulée, lui en refusa la permission[94]. Dès lors il devint conspirateur, mais Antonia la jeune[95], ayant averti Tibère, celui-ci le fit arrêter par Macron, et l'exécuter de même qu'à son fils. Apicata, qu'il avait répudiée, voyant le corps de son enfant jeté aux gémonies révéla dans tous ses détails le complot de Séjan et de Livie pour l'empoisonnement[96] de Drusus. Note 22. Auguste, plus sensible au déshonneur qu'au scandale fit lire devant le sénat un mémoire contenant les motifs, qui l'avaient poussé à exiler sa fille. Suétone rapporte qu'il aurait été même question de la tuer[97]. Tacite[98] de son coté raconte qu'Auguste condamna à la mort ou à l'exil tous les amants de sa fille Julie et aussi ceux de Julie sa petite-fille. Il lui interdit dans l'exil l'usage du vin et toutes les recherches d'une vie délicate. Il ne souffrit pas qu'aucun homme, libre ou esclave, lui rendît visite sans sa permission et sans qu'il sût son âge, sa taille, sa couleur. Il l'exila d'abord dans l'île Pandatarie, maintenant Ventotene, dans le golfe de Gaéta, où elle resta cinq ans. Après ce temps il la transféra à Reggio, sur le détroit de Messine, et adoucit son sort. Cependant malgré les instances du peuple, jamais on obtint qu'il la rappelât[99]. Elle laissa une fille, JULIE, qu'épousa Lucius Paulus, fils d'un censeur, mais elle se conduisit si mai qu'Auguste l'exila dans l'île de Trimère (Tremiti) près de la côte de l'Apulie. Ayant pendant son exil donné le jour à un enfant, Auguste défendit qu'on le reconnût et qu'on l'élevât[100]. Elle vécut vingt ans dans ce rigoureux exil et elle y est morte, ne subsistant que des libéralités de Livie[101]. Note 23. Auguste était fils de C. Octavius, personnage extrêmement riche, jouissant d'une haute considération et descendant de la noble famille Octavia. C. Octavius, mort subitement, laissa de sa première femme Ancharia une fille, Octavie, et d'Atia[102], la fille de Atius Balbus et de Julie sœur de César, sa seconde femme, une autre Octavie et Octave. Atia, après la mort de C. Octavius, épousa Marcus Philippus[103], qui devint ainsi beau-père d'Auguste : nom que beaucoup plus tard fut donné à Octave par le sénat, son oncle[104] lui ayant laissé par testament celui de César. Mais César non seulement lui donna son nom, mais aussi l'institua[105] son héritier. Cette circonstance eut sans doute une grande influence sur la carrière d'Auguste, qui, ayant perdu son père à l'âge de quatre ans[106], arriva à une très-haute fortune. Cependant on doit penser que son avenir fut préparé par Atia, sa mère, qui, dit Tacite[107] : Présida à son éducation, comme Cornélie la mère des Gracques, et Aurélie la mère de César, avaient fait avec leurs enfants, qui devinrent les premiers hommes de leur siècle. Auguste fit son entrée dans la vie publique[108] sous les auspices de César, qu'il suivit en Espagne pour combattre les fils de Cn. Pompéus. Il se trouvait à Appolonie lorsqu'il apprit la mort de son oncle, qui l'institua héritier. Il eut le grand courage, les poignards qui avaient percé César n'étant pas encore remis dans les fourreaux, de se présenter à Rome pour en recueillir la succession[109]. Il y trouva la guerre civile allumée par les divergences entre le sénat, qui favorisait les assassins de César et le consul, Marc Antoine, qui s'efforçait de les accabler par la force des armes. Pendant ce temps, Marc Antoine fut déclaré ennemi de la. patrie par le sénat, et Auguste qui avait alors à peine dix-huit ans, ayant pour son compte levé des vétérans, fut en qualité de propréteur avec Hirtus et Pansa, consuls, envoyé contre Antoine[110]. Mais les deux consuls périrent dans la bataille où fut déconfis Antoine[111]. Dans cette circonstance toute l'armée resta sous le commandement d'un seul chef, Auguste, qui s'empressa d'accepter un arrangement[112], que lui proposa Marc Antoine de concert avec Lépide, ancien maître de cavalerie sous César. Auguste marcha alors sur Rome, sous prétexte de venger la mort de César, et se fit, à vingt ans, donner de force le consulat[113]. Cependant Brutus et Cassius, meurtriers de César, levèrent les armes en Orient, vers où Auguste et Marc Antoine marchèrent, en confiant l'Italie à Lépide. Mais ils perdirent la bataille de Philippes, en Macédoine, où cependant Cassius, le chef du parti de la noblesse périt ; Brutus[114], dans une seconde rencontre, eut le même sort. Ce fut .alors que les deux généraux se partagèrent la république : Auguste prit l'Espagne, les Gaules et l'Italie ; Antoine eut l'Asie, le Pont et l'Orient[115]. Lépide, qui avait resté en Italie, ne fut pas compris dans le partage, mais, voulant récalcitrer et prendre le premier rang dans l'état, il fut, malgré ses vingt légions, battu par Auguste, qui, le voyant prosterné à ses pieds, lui accorda la vie, se contentant de l'exiler[116] à perpétuité dans les îles Circeies. Cependant, l'arrangement fait par les deux généraux fut bientôt troublé par Marc Antoine, qui, répudiant sa femme Octavie, sœur d'Auguste, épousa Cléopâtre qui, voulant à toute force s'asseoir sur un trône à Rome, le poussa à la guerre civile. Mais, vaincu par Auguste dans la bataille d'Actium, il se tua de son glaive, en même temps que Cléopâtre[117] se faisait piquer par un aspic. Césarion[118], qu'elle se vantait d'avoir eu de César fut arrêté dans sa fuite et livré au supplice. Douze ans après son premier consulat, Auguste revint à Rome où, à la suite de l'abaissement de Lépide et de la mort d'Antoine, il se trouva être le seul chef du parti qui avait- soutenu César, et qui constituait une grande majorité, car la défaite de Brutus et de Cassius avait anéanti le parti républicain[119]. Auguste renonça alors au titre de triumvir et, se contentant de la dignité de consul, il y joignit la puissance tribunitienne qu'il se fit donner[120] à perpétuité par le sénat, Cette nouvelle dignité que Tibère[121] consolida (jus tribunitium), en apparence démocratique (ad tuendam plebem) l'élevant au grade de prince du sénat (princeps), car il y avait le droit de voter le premier, absorba tous les pouvoirs, et le rendit maître et souverain[122] de la république. Ce fut lui qui l'imagina, mais tous l'acceptèrent, car le parti républicain étant dérouté, les nobles trouvèrent plus avantageux d'accepter un changement, qui leur promettait des richesses et des honneurs que de s'exposer aux dangers et aux périls d'une résistance inutile. En effet, Auguste par ses largesses avait gagné les soldats[123] et, par ses distributions de blé, le peuple. La politique lui conseilla à faire occuper les principales fonctions de l'état par ses créatures ou ses parents, de là — l'édilité curule et le sacerdoce accordés à son neveu Marcellus, quoique enfant, — la puissance tribunitienne et deux consulats successifs accordés à Agrippa, son gendre — Lucius et Caïus, ses petits-fils, encore enfants, élevés à la dignité de princes de la jeunesse, — Tibère son beau-fils associé à la puissance tribunitienne — son beau-fils Drusus, et son petit-fils Germanicus honorés de commandements importants — enfin tout un système d'adoptions[124], dont visiblement le but était de fonder une monarchie héréditaire. Cependant il refusa, en fléchissant le genou, en abaissant la tête et en se découvrant la poitrine[125], le titre de dictateur qui lui fut offert par le peuple, de même qu'il ne voulut jamais prendre celui de roi[126] ; son intelligence éclairée lui faisant reconnaître que tous les deux étaient devenus odieux au peuple, l'un à la suite de l'expulsion des Tarquins et l'autre après les proscriptions de Sylla. Malgré cela le principat qu'il fonda, traversa des siècles car, l'ayant exercé durant plus d'un demi-siècle, il eut le temps d'enraciner la nouvelle institution en la soutenant par un despotisme tempéré que Tibère, marchant vers le même but, remplaça, durant un règne aussi très-long, par une tyrannie ensanglantée. Mais les pompeuses langes du principat ayant bientôt étouffé la liberté, Rome se précipita vers une décadence, qui offre le spectacle de tous les vices et de tous les crimes, sans jamais avoir laissé percer une lumière de la vertu et de la grandeur de la glorieuse période des temps anciens. Auguste gouverna la République pendant cinquante-six ans[127] dont douze ans avec Antoine et Lépide, et quarante-quatre ans seul. Il fut inexorable[128] pendant qu'il fit la guerre, et qu'il eut des adversaires, mais il devint bon et humain[129] lorsque la cruauté ne lui fut plus utile. Aussi laissa-t-il l'empire dans l'état le plus florissant à sa mort, survenue (l'an 14 de J.-C.) à l'âge de soixante-seize ans, et qui eut lieu, d'après Tacite, Suétone et beaucoup d'autres écrivains, à Nola (entre Caserte et Sarno) et, d'après Eutrope et Eusèbe, à Atella (Aversa, entre Naples et Caserte). On doit cependant croire, que ce fut à Nola qu'il mourut ; parce que ce fut là[130], qu'il tomba malade et s'alita, et où, après sa mort, on lui érigea un temple, que Tibère[131] consacra en personne. Auguste put voir le petit-fils de sa petite-fille quoique à la dernière année de sa vie[132]. Il eut la chance de mourir tranquillement dans son lit et dans la même chambre où son père finit ses jours[133], entouré de quelques amis et en récitant des vers ; au moment d'expirer il embrassa Livie et prononça ces mots[134] : Adieu, Livie, souviens-toi de notre union, adieu. Au MUSÉE DE NAPLES : rez-de-chaussée, premier portique, on peut voir : Auguste, jeune, (tête) n. 24-331, (statue) n. 258-169. Auguste, statue en image de dieu, portant, comme Jupiter, la foudre à la main, salle des Grands bronzes. Note 24. Elle était fille de Julie et d'Agrippa. Elle eut neuf enfants de son mariage avec Germanicus, mais à sa mort il lui en restait six[135]. Ceux-ci étaient : Drusus et Néron, qui furent condamnés à mourir de faim : Caligula qui, après avoir arrivé à l'empire, fut assassiné par un centurion : Agrippine, mère de Néron qui l'assassina : Julie et Drusilla que Tibère fiança à Capri avec Vimitius et Cassius, simples chevaliers, et dont il fit célébrer les noces à Rome[136]. Sa fierté était fort grande et son orgueil sous les coups de la fortune si exagéré que, au moment de sa mort, Germanicus à haute voix entre autres choses lui répéta qu'il fallait plier son caractère et se défendre d'une affectation de pouvoir qui blessait les plus puissants[137]. Tibère après la mort de Germanicus l'exila dans Pile de Pandataria (Ventotene) vis-à vis du Cap Circello. Ce fut là qu'elle subit la mort par la faim : après sa mort, avenue l'an 33 de J.-C., Tibère accabla injustement sa mémoire de toutes les infamies[138]. Au MUSÉE DE NAPLES, à gauche du vestibule, premier portique, on voit deux bustes d'Agrippine sous les n. 256-389 et 634-395. La statue d'Agrippine assise, œuvre très-estimé, se trouve au milieu du troisième portique n. 124. Note 25. Germanicus était fils d'Antonia la jeune et de Drusus, frère de Tibère, et par conséquent neveu de Tibère et petit-fils de Livie. Il épousa Agrippine, fille de Julie et petite-fille d'Auguste, dont il eut neuf enfants[139]. Germanicus fut empoisonné par ordre de Pison, dont le procès fut très-dramatique, mais n'arriva pas à la fin, car l'attitude de Tibère pendant les débats était si hostile, que l'accusé, selon Tacite, se coupa la gorge avec son épée[140]. Ce même écrivain dit : Je me souviens d'avoir entendu dire à des vieillards, qu'on avait souvent vu dans les mains de Pison des papiers qu'il ne publia point, mais qui, au dire de ses amis, contenaient des lettres de Tibère et ses instructions contre Germanicus ; que le dessein de Pison était de les montrer au sénat, et d'en accuser le prince, si Séjan ne l'eût assuré avec de vaines promesses[141]. Né l'an 15 avant J.-C. Germanicus est mort l'an 19 après. Note 26. Drusus, fils de Tibère et de sa première femme, Agrippine, servit avec assez d'éclat en Illyrie, où son père deux fois[142] l'envoya. Il avait déjà été honoré d'un triomphe et de deux consulats, lorsque le sénat sous proposition de Tibère lui accorda la puissance tribunitienne[143]. Il parait n'avoir pas eu un bon caractère, car lorsque en son nom et en celui de Germanicus il donna à Rome des combats de gladiateurs, son immense joie à la vue du sang, qui coulait à grands flots, fut remarquée et quoique, dit Tacite, ce fût un sang vil, le peuple s'en alarma ; son père[144] même en fut si frappé qu'il lui en fit des reproches. Ensuite il se permettait des emportements qui n'allaient pas du tout avec sa position. C'est ainsi que dans une querelle de moment avec Séjan il leva[145] la main sur lui qui, en voulant se défendre, reçut un soufflet. Depuis lors Séjan chercha à se venger, et commença par se faire l'amant de sa femme, Livie. Il l'entraîna d'abord dans l'adultère, ensuite l'amena a vouloir l'épouser, à usurper l'empire et à assassiner son mari. Pour mieux la persuader de sa passion Séjan répudia[146] sa femme Apicata, dont il avait déjà trois enfants. Drusus périt en effet victime de ce complot ; où trempa aussi un médecin, Eudemus, qui à cause de cela subit plus tard la torture. Ce fut pendant un festin où se trouvait aussi. Tibère que l'eunuque Ligdus présenta à Drusus dans la coupe un poison, que Séjan[147] choisit, lent et insensible dans son action, de manière à imiter les progrès d'une maladie naturelle. La mort de Drusus consolida la domination de Séjan si fatale[148] à la république, Tibère n'ayant découvert qu'elle provenait d'un crime que huit ans plus tard. En vérité Drusus fut empoisonné l'an 23 de Jésus-Christ, étant consuls Pollion et Vetus, et la découverte et la punition de la conjuration de Séjan, qui donnèrent lieu aux révélations d'Apicata, arrivèrent l'an 31, pendant le 5e consulat de Tibère et du même Séjan. Tibère sévit avec une vigueur extrême et fut inexorable envers tous les inculpés sans exception de Livie, qu'il condamna à mourir de faim. Drusus laissa : deux jumeaux[149] dont un mourut quelque temps après lui, et l'autre fut tué à l'improviste par ordre de Caligula et Julie qui épousa Néron, fils des Germanicus. Les funérailles de Drusus furent splendides, la pompe des images les distingua d'une manière spéciale, les portraits d'Énée, tige des Jules, ceux des rois d'Alba, de Romulus, fondateur de Rome, d'Altus Claude, et d'autres Claudes et des nobles Sabins y parurent dans un appareil imposant[150]. Cela fit comprendre au peuple que ce n'était plus par sa voix ou par son consentement que les princes tenaient la suprême puissance, mais qu'ils retiraient leur forée et leur autorité- des traditions de l'histoire et de la gloire de leurs ancêtres. Au MUSÉE DE NAPLES on peut voir la statue de Drusus, fils de Tibère ; elle se trouve au rez-de-chaussée et porte le n. 202. Note 27. D'après le récit de Suétone l'instruction du procès de l'empoisonnement de Drusus par sa femme Livie et par Séjan aurait eu lieu simultanément à Rome et à Capri où, à proportion que les accusés étaient condamnés, on les précipitait du haut du rocher[151]. De nos jours il y a eu des accidents funestes au Salto di Tiberio. Nous avons entendu qu'on y a bâti le parapet, qui maintenant sert d'appui lorsqu'on veut regarder le précipice, après qu'un individu s'est suicidé en s'y élançant. Près du Salto un autre accident aussi triste et aussi regrettable est arrivé, il y a à peine quatre ans. Un jeune suédois, poète remarquable, M. Montgommery-Cederhjelm d'une des plus nobles familles de son pays, s'y était rendu avec une grande société ; tout le monde était très-content, très-gai, et le malheureux jeune homme, par une imprudence fatale, s'étant dirigé en courant vers le précipice, s'est assis sur le bord. En regardant l'abîme il fut à l'instant saisi d'un vertige, et roula dans l'espace. Une scène indescriptible d'horreur et d'épouvante s'en suivit ; les dames se trouvèrent mal et s'évanouirent ; on courut à droite et à gauche, en poussant des cris de désespoir, on s'adressa au jeune homme, on l'appela par de hauts cris : mais inutilement ; pas une réponse, pas même un gémissement. C'était vers la fin de la soirée et la nuit allait bientôt arriver. On alla cependant chercher au village des pêcheurs et des matelots, mais il était trop tard : on partit donc, le désespoir au cœur. Le lendemain, à l'aube, on recommença les recherches et on aperçut le cadavre du malheureux jeune homme retenu par des buissons pas loin de la mer, et après une peine inouïe on l'a retiré, mais horriblement maltraité, en quelque sorte broyé. Le jeune suédois repose au cimetière protestant de Naples, où on l'a transporté et enseveli. Note 28. La délation fut un arbre qui, planté et arrosé par Tibère, acquit sous son règne des proportions gigantesques, une grande vigueur et une telle vitalité, qu'il se perpétua et fleurit encore sous les empereurs suivants. Écoutons Tacite[152] : Peu de temps après, Granius Marcellus, gouverneur de Bithynie, fut accusé de crime de lèse-majesté par son questeur, Cristinus Cepio. Cet homme créa une profession que, depuis, le malheur des temps et l'impudence de ce siècle n'ont rendu que trop commune. Né pauvre, obscur, ennemi du repos, il s'éleva en servant à la cruauté de Tibère, d'abord par des mémoires secrets, bientôt par des délations publiques, inquiétant les plus illustres citoyens, bravant l'exécration de tous, pour capter la faveur d'un seul ; il laissa après lui une foule d'imitateurs qui d'indigents devinrent riches, de méprisés, redoutables. Note 29. Ce fut en effet sous le règne de Tibère et par son initiation que fut étendu l'emploi de la torture, comme élément de procédure criminelle. Il s'agissait d'une extravagante accusation portée contre Libon, à qui on faisait un crime d'avoir demandé à quelqu'un s'il aurait un jour assez d'argent pour couvrir la 'voie Appienne depuis Rome jusqu'à Brindisi, et d'avoir aussi écrit le nom de Tibère avec des caractères sanglants ou mystérieux. L'accusé niant le fait, on proposa d'appliquer la torture à ses esclaves. Mais comme un ancien sénatus-consulte défendait l'application de cette procédure aux esclaves lorsqu'il s'agissait des crimes de leurs maîtres, Tibère, dit Tacite, fécond en ressources et habile à inventer des formes nouvelles, fit acheter les esclaves par un agent du fisc, afin qu'on pût les entendre, sans que la loi fut en effet violée[153]. Cette interprétation de Tibère prévalut dans l'avenir et fut constamment[154] appliquée. Note 30. Pour confirmer notre assertion, écoutons Tacite : Anciennement il y avait bien une loi de ce nom (lèse-majesté) ; mais elle embrassait des objets tout différents : les trahisons à l'armée, les séditions dans Rome, enfin les grandes malversations qui compromettaient la dignité du peuple romain. Mais elle punissait les actions et jamais les paroles. Mais Tibère consulté par le préteur Pompeius Macer, à propos de vers anonymes sur la cruauté du prince, sur son orgueil et ses querelles avec sa mère, si on recevrait les accusations de lèse-majesté, répondit, que les lois étaient faites pour être observées[155]. Note 31. On était poursuivi, dit Tacite, également par les siens ou par les étrangers, par des inconnus, pour des faits vieillis ou récents : sur quelque sujet, en quelque lieu qu'on parlât, au Forum, dans un festin, on était dénoncé, tous se hâtant de se prévenir, et ne ménageant pas les autres, les uns pour leur sureté, la plupart comme infectés d'une rage épidémique[156]. Note 32. Les soldats, qui étaient dans le secret de la conspiration contre Caligula, cherchaient à écarter tout le monde des approches des appartements de ce prince, lorsque Claude, qui par hasard s'y était présenté, reçut, malgré ses cinquante ans et sa position, l'ordre de se retirer. Il obéit immédiatement et s'enferma dans un cabinet ; mais quelques moments après, ayant entendu, au milieu d'un grand bruit, que Caligula venait d'être assassiné, saisi par la peur, il sortit de cette retraite et ne sachant pas où aller, se cacha derrière un paravent. Les soldats couraient ça et là, lorsque l'un d'eux, ayant aperçu les deux pieds de quelqu'un qui se tenait derrière le paravent, voulut savoir qui c'était et, ayant poussé la tapisserie, il se trouva en face de Claude, qu'il arracha de cette place, et tandis que, plein de frayeur, Claude se précipitait à ses genoux, le soldat s'avisa de répondre à cette gentillesse en le saluant empereur. Ce fut encore ce même soldat, qui conduisit Claude à ses quelques compagnons, qui le mirent en litière et qui, en traversant la foule, qui le plaignait croyant qu'on le menait au supplice, le conduisirent au camp, où il arriva le cœur gonflé et tout tremblant. La nuit, qu'il y passa entouré de sentinelles fut pour lui horrible, mais le lendemain, sa présence ayant été réclamée par un tribun, il dut comparaître au Forum, où il déclara que c'était par la force qu'on l'avait amené et retenu dans le camp. La foule, que ses excentricités et ses extravagances intéressaient, l'applaudit, et le salua empereur. Mais l'empire devenait déjà un objet de commerce, car l'armée ne le reconnut que sous la promesse, qu'il remplit, de donner quinze mille sesterces (296 fr. 94. cent.) à chaque soldat[157]. Claude fut, comme l'on sait un homme extraordinaire, moins intelligent que bête, moins humain que cruel. Ivrogne, joueur et glouton, il a laissé un traité sur le jeu, et passa toute sa vie dans un état d'alcoolisation très-condensée[158]. Antonia la jeune, sa mère, l'a bien compris et bien défini[159] : Auguste, son grand-père, dans une lettre à Livie, s'exprimait de la sorte à son égard : Quoiqu'il en soit, dans la conjoncture présente je ne m'oppose point à ce qu'il (Claude) prenne soin de la table des pontifes dans les fêtes de Mars, pourvu qu'il ait auprès de lui le fils de Silanus, un parent qui l'empêchera de rien faire de ridicule et de déplacé. — Pendant ton absence, je l'inviterai à souper, afin qu'il ne mange pas toujours avec Sulpicius et son Athénodore : je voudrais qu'il choisît moins follement et avec plus de soin quelque ami, dont il pût imiter les mouvements, la tenue et la démarche[160]. Cependant il faut dire qu'Auguste ne l'aurait jamais cru capable de jouer son rôle d'empereur comme il l'a fait. En vérité, quoiqu'il s'occupât de l'alphabet et d'y joindre trois lettres[161] qu'il avait autrefois imaginées et dont quelque temps après personne ne se rappela plus qu'en lisant les tables d'airain où étaient gravés ses édits, il dirigea ses vues vers des objets très-sérieux comme les aqueducs, le port d'Ostie et le desséchement du lac Fucin. L'émissaire du lac Fucin, dont l'idée avait été mise à jour par César, lui coûta onze ans d'un travail non interrompu pendant lesquels il employa sans relâche trente mille ouvriers[162], de sorte que cette entreprise l'occupa presque pendant tout son règne, qui fut de quatorze ans[163]. Ambitieux de la gloire militaire il entreprit une toute petite expédition, d'où en retournant il s'arrêta au champ de Mars pour y attendre, d'après la loi, que le sénat lui accordât le triomphe : mais il n'en obtint que les honneurs. Il accepta tout de même, mais en rongeant son frein il tomba un beau jour sur la Bretagne, où il y avait du désordre et ramassant à droite et à gauche des légions il fit une campagne si heureuse qu'au bout de six mois tout était fini sans combat ni effusion de sang. On lui accorda alors avec le nom de Britannicus le triomphe qu'il célébra avec une telle joie, que tout en y invitant des personnages des pays voisins il permit aux exilés de venir pour cette occasion à Rome[164]. Claude fut très-cruel car, il attendit une fois à Tivoli, exposé à la pluie et au vent, pendant des heures que l'on amenât de Rome le bourreau, qui devait massacrer des criminels qui devaient subir le supplice à la mode ancienne[165]. Il multiplia les spectacles des gladiateurs, et il s'y montrait fort communicatif et joyeux, avançant sa main gauche, comme faisait le peuple, et comptant tout haut sur les doigts les pièces d'or qu'il offrait aux vainqueurs : il y mêlait toute sorte de plaisanterie, mais lorsqu'un gladiateur ne voulait pas se laisser tuer, il s'indignait et ordonnait qu'il y consentît pour examiner son visage expirant[166]. Dans la naumachie qu'il donna au lac Fucin le jour de l'inauguration de l'émissaire, il menaça et pria au même temps les combattants, qui refusaient de se battre. Dans cette naumachie deux flottes, chacune de douze trirèmes, l'une représentant une flotte de la Sicile et l'autre une flotte de Rhodes, entamèrent le combat au signal, qui fut donné par la trompette d'un Triton d'argent, qu'un ressort fit surgir au milieu du lac. Abruti par le vin et la bonne chère, il se couchait après son dîner et ne se relevait qu'après qu'on lui avait introduit dans le gosier une plume pour l'obliger à décharger son estomac[167]. Gouverné par des eunuques ou des affranchis, comme Possides, Felia, Harpocras, Polybe, Narcisse et Pallas, qui contrefaisaient sa signature et s'enrichissaient à ses dépens[168], il souffrit la plus grand ignominie qui ait jamais souillé le caractère d'un empereur. En effet, Messaline, sa femme, pendant une excursion qu'il fit à Ostie, se maria avec un de ses sujets, Silius, qui, après l'avoir épousée avec toutes les formalités prescrites par les lois, devant le sénat et le collège des aruspices où il lui constitua une dot, l'amena au milieu des joies et des fêtes publiques célébrer des pompeuses noces dans sa maison[169]. Cependant, Claude l'aurait encore reçue et pardonnée si on ne l'en eût pas empêché ; car les absences d'esprit et les oublis formaient un des caractères de son imbécillité ; c'est ainsi le jour après le meurtre de Messaline, qu'il avait ordonné, se mettant à table, il l'attendit quelque temps et finit par demander pourquoi l'impératrice ne venait pas[170]. En effet, Messaline, qui le connaissait, comptait avec sa bonhomie, car tout le monde lui avait impunément joué les tours les plus forts ; les avocats le tirant par la robe ou le pied à la sortie des tribunaux et les plaideurs lui adressant des injures et lui jetant des tablettes à la figure au point de le blesser[171]. Du reste elle savait qu'il avait une grande faiblesse pour elle et pour tout son sexe, car il voltigea toute sa vie autour des belles femmes, ce qui fut son moindre défaut. En réalité, on peut le dire, car il eut d'abord deux fiancées ; Emilia Lepida, fille d'Antonia l'ainée et Livia Medullina, de la famille des Camilles ; mais il se défit de la première en la répudiant, et la seconde lui fut enlevée précisément le jour fixé pour ses noces. Il épousa de suite Plautia Urgulamilla, et Elia Petina, qu'il répudia l'une après l'autre. Ce fut alors qu'il épousa Valérie Messaline, fille de son cousin Messala Barbatus, mais lorsqu'il sut que, tout en étant sa femme, elle s'était mariée avec Caïus Silius, il la fit tuer. Mais le célibat ne lui allant pas, il retourna une autre fois à Petina, et ensuite s'adressa à Lollia Paulina, qui avait été femme de Caligula. Non content de toutes ces galanteries il s'amouracha éperdument et même scandaleusement d'Agrippine, fille de son frère Germanicus et obtint que le sénat[172] l'autorisât et l'invitât à contracter ce mariage, jusqu'alors considéré comme incestueux, et dont personne ne voulut être imitateur qu'un affranchi et un centurion, aux noces duquel Claude et Agrippine assistèrent[173]. De sorte qu'il eut en tout six femmes, dont trois seulement lui donnèrent des enfants : Plautia, Drusus et Claudia : Petina, Antonia : Messaline, Octavie et Britannicus. Ses enfants ne furent pas heureux : Drusus périt à Pompéi, étranglé par une poire ; Claudia, quoique née cinq mois après son mariage avec Plautia, fut acceptée par lui jusqu'à ce qu'un jour il la fit exposer nue devant la porte de sa mère, qu'il avait déjà répudiée. Il maria Antonia d'abord à Pompée et en-. suite à Faustus Sylla, jeunes gens de la première noblesse, mais qu'il fit tous deux périr. H donna Octavie à Néron, qu'il adopta et fut son successeur au préjudice de Britannicus. Claude avait le cou prononcé, la taille élancée ; mais lorsqu'il marchait, ses genoux chancelaient : il avait un rire affreux, une colère plus hideuse encore, qui faisait écumer sa bouche immense, ce dont il demanda excuse par un édit[174], un bégaiement continuel et un tremblement de tête qui redoublait à la moindre contrariété. Il jouit pendant son règne d'une bonne santé, mais il souffrait quelquefois de crampes d'estomac si fortes qu'il eut l'idée de se suicider. Il périt, comme presque tous les Césars, d'une mort violente : Agrippine ayant fait préparer par Locuste, empoisonneuse célèbre, un poison qu'elle mit dans des champignons, mets favori du prince. Mais une abondante évacuation ayant rejeté le poison, Agrippine, saisie d'effroi, recourut au médecin Xénophon qu'elle avait depuis longtemps mis dans ses intérêts. Celui-ci, sous prétexte de provoquer des vomissements, introduisit dans le gosier de Claude une plume imprégnée d'un poison violent qui fit son effet[175]. Après sa mort le premier soin d'Agrippine fut de retenir Britannicus, Antonia et Octavie dans le palais dont elle fit fermer toutes les issues. Enfin les portes s'ouvrirent, et Néron, accompagné de Burrhus, se présenta aux prétoriens qui le conduisirent au camp où, après un discours, où il promit aux soldats une gratification pareille à celle de son oncle Claude, la troupe l'acclama empereur. Le sénat se conforma à la décision des soldats et les provinces l'adoptèrent sans balancer. On accorda de suite par l'initiative d'Agrippine, les honneurs divins à Claude, dont les obsèques furent aussi solennelles que celles d'Auguste[176]. Au MUSÉE DE NAPLES : rez-de-chaussée premier portique, on peut voir : Claude, statue colossale, assis sur un trône, numéro 235-153. Note 33. Tremblement de terre en Asie Mineure. En reconnaissance de cette libéralité onze villes de cette contrée se firent représenter au sénat par des députés qui, en plaidant, disputèrent chacun pour sa ville l'honneur d'ériger un temple à Tibère. Après plusieurs jours de discussion acharnée, et après avoir .exclu du concours une ville après l'autre, le sénat donna gain de cause à Smyrne, où l'on envoya un lieutenant surnuméraire chargé spécialement de surveiller la construction du temple[177]. De cet événement il nous est arrivé lin témoignage dans le piédestal trouvé à Pouzzoles, érigé en commémoration de la largesse de Tibère, où l'on voit gravés les noms des villes rebâties et leurs allégories. On peut le voir : Au MUSÉE DE NAPLES, rez-de-chaussée, dernière salle, où on l'a transporté. L'indemnisation aux propriétaires à l'occasion de l'incendie des quartiers du mont Celius, coûta à Tibère cent millions de sesterces[178] (19.880.000 francs). Note 34. Le Christ fut condamné et subit une mort ignominieuse pendant une émeute ; le peuple étant dominé par une si forte exaltation fanatique, que même de nuit il n'y eut pas de repos à Jérusalem pour personne ; pas pour le Christ, pas pour le peuple devenu furieux, pas pour les magistrats, qui furent obligés de fonctionner éclairés par des torches. De sorte que le Christ devint sous tous les rapports une victime, car pendant ce tumulte toutes les formalités légales prescrites pour les procès des accusés furent violées, comme l'a démontré Dupin (l'aîné), une des gloires du barreau français, dans une dissertation juridique, qui se trouve dans ses œuvres complètes et qui a souvent été imprimée à part. Après la Pentecôte, l'Evangile étant annoncé, on poursuivit les chrétiens, et les apôtres furent obligés de se disperser ; mais Tibère dans cette circonstance défendit, sous des menaces, que l'on continuât à les molester. C'est pour cela, qu'après cette persécution, où figure comme acteur St. Paul, il faut attendre jusqu'à Néron pour nous trouver en face d'une autre. En effet, CALMET rapporte que Pilate, en qualité de gouverneur de la Judée, envoya à Tibère l'interrogatoire et les actes du jugement du Christ ; ce qui, dit-il, ne se faisait que lorsqu'il s'agissait d'objets graves. Tibère en fut si impressionné, continue Calmet, en s'appuyant sur l'opinion des écrivains anciens, qu'il adressa au sénat une lettre où, d'une manière dissimulée il approuvait les actes et tout ce qui avait été fait, et émettait de la même sorte l'opinion qu'on plaçât le Christ parmi les dieux. Mais le sénat froissé qu'on eut adressé des honneurs divins au Christ, sans qu'il eût été entendu, refusa d'y adhérer[179]. EUSÈBE dit, que la divinité du Christ était déjà crue par plusieurs, lorsque Tibère l'affirma par ses lettres au sénat[180]. Enfin, TERTULLIEN, un des plus anciens des écrivains chrétiens (il est né l'an 160 de notre ère), affirme que : Tibère convaincu de la divinité du Christ, en apporta la connaissance au sénat, qui était le compétent pour en décider : mais le sénat n'ayant pas approuvé la proposition, Tibère empêcha toutefois par des menaces, qu'on poursuivît et qu'on inquiétât les chrétiens[181]. Cependant nous ne devons pas cacher que la vérité de ce récit a été quelquefois contestée. Quant à nous, il est si vraisemblable, que nous le croyons exact, la conduite de Tibère dans cette circonstance étant parfaitement logique et d'accord avec les principes qu'il avait suivi. Il avait exilé les juifs et défendu leur culte, et visiblement dans le but de les exterminer, il avait disséminé leur jeunesse[182] dans les provinces malsaines. Cette persécution provenait de ce que les juifs professaient une religion qui froissait le dogme païen : ils adoraient un être incorporel, un esprit ; tandis que les païens adoraient des hommes, des bêtes, enfin des œuvres de la nature et de l'art. Tacite dit[183] : Les juifs conçoivent par l'esprit seul l'être unique qu'ils honorent. Ils regardent comme impies ceux qui, avec des matières périssables, figurent la divinité à l'image de l'homme. Leur dieu est un être suprême et éternel, qui n'a point changé, qui ne finira point. Aussi ne souffrent-ils pas de statues dans leurs villes, encore moins dans leurs temples. Ailleurs Tacite dit encore[184] : Le premier des romains qui dompta les juifs, fut Pompée et il entra dans le temple par droit de conquête. C'est par lui qu'on a su qu'il n'y avait en dedans aucune image des dieux, que tout était nu, que le sanctuaire ne renfermait rien. Puis Tacite, en bon païen (il méconnut entièrement le christianisme), ajoute : Ils (les juifs) ont horreur de tout ce que nous révérons ; à leur tour ils se permettent ce qui nous révolte ; ils sacrifient le bélier pour insulter Jupiter Hammon : ils ont institué la circoncision pour se reconnaître, et la première instruction qu'ils reçoivent, c'est de mépriser les dieux. Mais on doit remarquer que, si la théologie païenne ne pouvait pas admettre le dogme de l'essence spirituelle de la divinité hébraïque, elle ne se trouvait pas froissée par le dogme chrétien qui, quoique établissant et consacrant le principe de l'incarnation du Verbe, enseignait l'adoration du Christ qui, tout en étant Dieu, avait un corps et était Homme. Ensuite, dans le premier temps, les apôtres ne faisaient que baptiser, prêcher la divinité du Christ et anathématiser comme abominable la religion hébraïque[185]. De sorte que la conduite de Tibère a une raison d'être et est parfaitement compréhensible, d'autant plus, que les rapports de Pilate devaient lui avoir fait savoir, que déjà au jour de la Pentecôte, trois mille personnes s'étaient converties et que la nouvelle croyance tout en continuant à faire de nombreux prosélytes[186], avait pour but principal d'anéantir la religion juive, si offensive pour les païens, et fort attaquée par Tibère. Ainsi le récit, si naturellement fait par Tertullien, qui se limite à exposer les faits sans les entourer de commentaires fallacieux, ne peut pas être mis en doute par la critique historique, pourvu qu'elle soit impartiale, calme et juste. De sorte que la démarche de Tibère auprès du sénat, et la défense qu'il fit de poursuivre les chrétiens doivent être considérées comme des faits authentiques. Note 35. Macron était aussi préfet de Tibère[187]. Ce fut lui qui arrêta Séjan lors de la conspiration[188]. Le pouvoir de Macron, dit Tacite, était devenu excessif, il n'avait jamais négligé la faveur de Caligula, et de jour en jour il la cultivait plus ardemment. Depuis la mort de Claudia, femme de Caligula, Macron avait cherché les moyens d'inspirer à Caligula de l'amitié pour sa femme Ennia ; il voulait qu'à son tour elle s'en fit aimer et l'enchainât par une promesse de mariage. Pour arriver au pouvoir suprême, Caligula consentit à tout, car malgré l'emportement de son caractère il s'était formé dans le sein de son aïeul, Tibère, à la dissimulation la plus profonde[189]. Ce passage explique complètement l'intérêt qu'avait Macron à se débarrasser de Tibère, et ce qui le porta au meurtre. Macron et Ennia finirent mal : Caligula, après son avènement à l'empire les fit égorger[190]. Note 36. C'est ce même Caïus, fils de Germanicus et Agrippine, adopté par Tibère et qui lui succéda. Par plaisanterie les soldats lui mirent le sobriquet de Caligula, car étant né dans un camp, on lui faisait porter, étant tout petit, la caligula, nom de leur chaussure. Il accompagna son père en Syrie et après son retour il demeura chez sa mère à Rome. Après qu'elle fut exilée, il vécut auprès de Livie, et ensuite près d'Antonia la jeune, l'une sa bisaïeule et l'autre son aïeule. Tibère l'appela à Capri lorsqu'il eut atteint vingt et un ans, et dans le même jour le fit prendre la toge prétexte et se raser la barbe[191]. Il ne quitta depuis lors Tibère, et il se conduisit avec une telle souplesse et une telle élasticité de sentiments envers lui et tout son entourage qu'après on a dit de lui : Qu'il n'y avait jamais eu de meilleur valet, ni de plus méchant maitre[192]. Cependant il révélait bien son caractère lorsqu'à Capri il assistait avec une extrême satisfaction aux supplices des condamnés. Tibère s'en est aperçu, et quelquefois il a dit tout haut : J'élève une hydre pour le peuple romain, et un Phaéton pour l'univers[193]. Il épousa Junia Claudilla, fille de Marcus Silanus, l'un des plus nobles romains[194] : mais elle mourut peu de temps après à la suite des couches[195]. Il enleva alors Lolia à son mari et l'épousa ; quelque temps après il la renvoya, et s'éprit de Césonia qu'il montrait aux soldats en la promenant à cheval revêtue d'une chlamyde et portant le casque et le baudrier. Lorsqu'elle accoucha d'une fille, Julie Drusilla, il l'épousa et reconnut l'enfant[196]. Caligula, dit Suétone, n'était sain ni de corps ni d'esprit : épileptique dès son
enfance, dans l'âge adulte il était sujet à des défaillances subites, qui le
surprenaient au milieu de ses travaux : alors il ne pouvait ni marcher, ni se
tenir debout. L'on croit que Césonia lui a donna : un philtre qui le rendit
furieux. Il ne dormait pas plus de trois heures, et ce sommeil était encore
interrompu par des visions terribles : aussi il passait la plus grande partie
de la nuit assis sur son lit, ou en parcourant les portiques du palais, en
attendant et en invoquant le jour. Aussi avait-il une peur extraordinaire du
tonnerre et au moindre éclair il s'enveloppait la tête et allait se coucher ;
mais si l'orage était un tant soit peu fort, il se cachait sous son lit[197]. Il s'habillait comme un fou qu'il était, et portait tantôt des robes de soie et traînantes, tantôt des chaussures de femme ou de soldat. Il se présentait aussi avec des vêtements des dieux, la barbe en or, le caducée, le trident, la foudre à la main. Pour plus commodément se prêter à ces exercices et fonctions de dieu, il fit bâtir un passage, un véritable pont, entre son palais et le Capitole, du quel il reste encore des ruines. Il mettait souvent la cuirasse d'Alexandre le Grand, qu'il avait fait enlever de son tombeau et quelquefois il se travestissait en Vénus[198]. Il s'amusait beaucoup et amusait beaucoup le peuple avec des jeux, fêtes et spectacles de toute sorte. Cependant le plus curieux de tous, ce fut un pont qu'il fit construire sur la mer depuis Baïa jusqu'à Pouzzoles, long de trois mille six cents pas. Ce pont était établi sur des bâtiments de toute sorte, retenus par des ancres et placés sur une double rangée. Caligula fit couvrir le tout avec des planches et de la terre, imitant la voie Appienne, et pendant deux jours il ne fit qu'aller et venir sur ce pont ; le premier jour sur un cheval richement harnaché, le second conduisant un char en habits de cocher[199]. Comme une foule immense regardait de la plage, il l'invita à se promener sur le pont, et lorsqu'une masse de gens l'avaient envahi, il les fit poursuivre et les poursuivit lui-même en les obligeant à se jeter à la mer, où plusieurs périrent ; ceux qui cherchaient leur salut dans le pont, ou dans les barques qui le maintenaient, étant assommés à coups d'avirons et de rames[200]. Caligula était intelligent et les commencements de son règne montrent qu'il aurait pu être un bon prince. Mais l'institution imaginée par Auguste était si défectueuse qu'enivré par un pouvoir illimité, sans fiscalisation pi contrôle, comme tous les Césars, Caligula dut bientôt dérailler de la bonne voie et se précipiter dans les excès les plus inouïs. La puissance immense octroyée dans ce régime aux princes, les honneurs excessifs, l'adoration dont ils étaient l'objet, dénaturaient l'homme et en faisaient bientôt un être irrégulier, inhumain, un monstre. Aussi ils envisageaient tout sous un point de vue anormal et faux, la vie de leurs semblables ne leur étant d'aucune valeur dans un état social où la liberté avait péri, et où ils étaient les seuls maîtres. Caligula donc comme Tibère, son antécesseur, comme Claude et Néron, ses successeurs, se jouait autant de la vie que de la liberté des hommes, de leur propriété et de tout ce qu'ils avaient de plus cher ; jeune, passionné, maladif, il fut adultère, incestueux, prodigue, rapace et cruel. Il est vrai que d'abord il s'occupa avec grand soin des lois, de l'organisation de l'armée, de la magistrature, des travaux publics, ce que le recommanda à l'estime publique[201]. Mais quelque temps après, l'adulation, la corruption, la flatterie le firent tellement dégénérer qu'il est devenu un monstre, une hydre, comme l'appelait Tibère, qui se plaisait à s'abreuver des larmes et du sang de ses semblables, qu'il faisait périr par des masses et par toute sorte de supplices. Il ne respecta rien, et ce fut lui qui s'avisa de faire nourrir les bêtes destinées aux Amphithéâtres avec des prisonniers ; ce fut lui qui pour se réjouir du spectacle d'une famine ferma quelquefois les greniers publics à Rome[202] ; il destitua des consuls et laissa pendant assez longtemps l'empire sans autorité souveraine ; il fit battre de verges, après les avoir fait déshabiller, des questeurs et traita avec la même violence tous les ordres de l'État[203]. Il s'était tellement fait à la cruauté qu'il ne pouvait plus s'en passer. En vérité Suétone rapporte que dans ses orgies ou dans ses dîners il faisait souvent à coté de lui appliquer la torture à des accusés. Deux fois l'on sait qu'il trempa sa main dans le sang : l'une lorsque dans un temple il prit la masse des mains d'un sacrificateur qui se disposait à immoler quelques victimes et l'assomma ; l'autre ce fut en jouant aux armes avec un gladiateur qui exprès se laissa tomber, et qu'il tua sur le coup en lui plantant un poignard dans le cœur[204]. Lorsqu'il ordonnait la mort de quelqu'un il ajoutait toujours : Fais en sorte qu'il se sente mourir. Un jour que pendant un spectacle le peuple fut d'un avis contraire au sien, il s'emporta et hors de lui-même il s'écria : Plut aux dieux que le peuple romain n'eût qu'une tête ![205] Il aimait aussi les plaisanteries sanguinaires ; ainsi lorsqu'il embrassait sa femme ou sa maîtresse il avait l'habitude de dire : Cette tête tombera quand je voudrai. Dans un festin de grand cérémonial où il se trouvait assis au- milieu des deux consuls il commença tout-à-coup à rire aux grands éclats, et à la demande que lui firent ces magistrats du motif de sa joie il répondit : C'est que je songe qu'à un signe de tête je puis vous faire égorger tous deux[206]. Il voulait faire consul son cheval Incitatus, à qui il avait donné un palais, des esclaves et un mobilier, lorsqu'il fut tué par Cassius Chéréa, chef d'une conspiration qui réussit, plusieurs autres ayant échouées. Caligula est mort à l'âge de vingt-neuf ans et après un règne de trois ans, dix mois et huit jours. Après sa mort, ses sœurs, qu'il avait exilés, exhumèrent son corps qu'avait été à la hâte enterré dans un jardin, le brulèrent et en ensevelirent les cendres. Sa femme Césonia fut percée de l'épée d'un centurion, et sa fille écrasée contre un mur, et cela le même jour du meurtre de Caligula[207]. Une personne fort compétente, employée dans les fouilles, nous a montré au Palatin la place où il a été assassiné ; c'est dans un corridor pavé en mosaïque, par où il devait passer pour se rendre de ses appartements au théâtre, où l'on allait jouer. A Pouzzoles on voit des belles ruines d'un amphithéâtre construit par Caligula ; c'est un des mieux conservés qui nous restent. Au MUSÉE DE NAPLES, rez-de-chaussée, premier portique, on peut voir, sous le n° 242-159, une assez belle statue de Caligula. FIN DES DÉVELOPPEMENTS |
[1] PLINE, Hist. natur., lib. III, 5, rapporte : In Campano autem agro Stabiæ oppidum fuere usque ad Cn. Pompeium et L. Carbonem Consules, pridie Calendas Maji, quo die L. Sylla legatus bello sociali id deluit, quod nunc in villas abiit.
[2] PLINE, Hist. nat., VII, 34.
[3] PLINE, Hist. nat., VII, 35. SUÉTONE, Tibère, 2.
[4] PLINE, Hist. nat., III, 6.
[5] PLINE, Hist. nat., III, 7.
[6] PLINE, Hist. nat., II, 88.
[7] PLINE, Hist. nat., III, 6 ... Prochyta quia profusa ab Ænaria erat.
[8] ROMANELLI, Isola di Capri, page 114.
[9] TACITE, Annales, VI, 21.
[10] TACITE, Annales, VI, 20.
[11] DIODORE DE SICILE, XV, 60.
[12] SUÉTONE, Auguste, 94, 98.
[13] TACITE, Annales, VI, 21.
[14] SUÉTONE, Tibère, 14.
[15] SUÉTONE, Caligula, 19.
[16] SUÉTONE, Tibère, 62, 54.
[17] TACITE, Annales, VI, 20.
[18] TACITE, Annales, VI, 21. SUÉTONE, Tibère, 14.
[19] TACITE, Annales, VI, 20, 46.
[20] TACITE, Annales, IV, 58.
[21] SUÉTONE, Tibère, 36.
[22] TACITE, Annales, IV, 59 ; voyez la note sur Séjan.
[23] SUÉTONE, Tibère, 67.
[24] TACITE, Annales, VI, 22.
[25] Ils occupèrent ensuite (l'an 827) la Sicile, et quelque temps après (l'an 840) la côte Napolitaine et Amalphitaine. En Sicile et dans la partie méridionale de la péninsule italienne, de même qu'en Espagne, les Sarrasins portèrent assez haut l'étude de l'architecture, ce dont, outre ce qu'on trouve en Sicile, les ruines de Ravello près Amalphi sont un témoignage. Quelques historiens leur attribuent la fondation de la célèbre école de médecine de Salerno ; en effet, ayant étudié les auteurs grecs, les Sarrasins sont devenus très-instruits dans la médecine, dans la dialectique, dans les mathématiques, surtout dans l'arithmétique, qu'ils ont développé au point d'en créer l'algèbre. Ce sont eux aussi, qui ont inventé les chiffres que nous employons maintenant dans la comptabilité, où jusqu'alors on employait les caractères romains, ce qui était un grand embarras. En Italie, de même qu'en Espagne, les Sarrasins ont laissé l'empreinte de leur langage, en enrichissant le vocabulaire d'une infinité des mots de leur langue. Ils ont eu aussi une influence assez grande sur la poésie populaire italienne, en y introduisant la rime, qui l'a rendue si harmonieuse. Mais ils furent surtout sectaires fanatiques de l'astrologie, qu'ils cultivèrent avec grand entrain à l'avantage de l'astronomie, qui en profita et s'en enrichit. Voyez MURATORI, dissert. 26, 33, 46 48. ADINOLFI, Storia della Cava, p. 114 et suivantes. Du reste, à Otranto le peuple parle encore le Sarrasin.
[26] STRABON, Géographie, V.
[27] PLINE, Hist. nat., III, 6. D'après PERSINO, Noz. Did. Rom., il faut prendre 1,m475 pour chaque pas. La collection de marbres du Dr. CERIO démontre la magnificence des bâtisses des deux empereurs. Ce jeune savant a aussi une collection d'outils et armes de l'âge de pierre trouvés dans l'île, où il continue ses recherches.
[28] SUÉTONE, Tibère, 1, 2. PLINE, Hist. nat., VII, 35.
[29] SUÉTONE, Tibère, 1, 2, 4.
[30] SUÉTONE, Tibère, 4.
[31] SUÉTONE, Caligula, 25.
[32] TACITE, Annales, V, 1.
[33] TACITE, Annales, V, 1.
[34] TACITE, Annales, IV, 71.
[35] TACITE, Annales, V, 3.
[36] TACITE, Annales, V, 1.
[37] DION CASSIUS, LVIII.
[38] PLINE, Hist. nat., XIV, 8.
[39] SUÉTONE, Auguste, 62. TACITE, Annales, II, 27.
[40] SUÉTONE, Auguste, 72, 73.
[41] SUÉTONE, César, 27.
[42] SUÉTONE, Auguste, 63.
[43] TACITE, Annales, II, 41.
[44] Énéide, VI, 860-864, 882-883. — Auguste aimait à réciter ces vers, qui sont d'une grande beauté d'après l'avis des gens compétents ; Octavie le priait quelquefois de le faire et alors, dit un écrivain de ce temps, les larmes et les sanglots des deux frères en interrompaient souvent la lecture.
[45] PLUTARQUE, Antoine.
[46] SUÉTONE, Néron, 5.
[47] TACITE, Annales, IV, 75.
[48] TACITE, Annales, XII, 64.
[49] SUÉTONE, Claude, 1. TACITE, Annales, IV, 75.
[50] DION CASSIUS, lib. 57.
[51] PLINE, Hist. nat., IX, 55, Murœnos inaures addidit. VII, 19, Antonia numquam expuisse.
[52] SUÉTONE, Claude, 8.
[53] JOSÈPHE, Antiquités, XVIII, 8. BROT., sup. au. V. lib. de Tacite.
[54] SUÉTONE, Caligula, 23, 29.
[55] SUÉTONE, Auguste, 61.
[56] SUÉTONE, Auguste, 29.
[57] SUÉTONE, César, 6.
[58] SUÉTONE, César, 1.
[59] SUÉTONE, César, 6.
[60] SUÉTONE, César, 74.
[61] CICÉRON, ad Atticus, I, 14, 16.
[62] SUÉTONE, César, 21, 26.
[63] SUÉTONE, César, 27.
[64] SUÉTONE, César, 45.
[65] SUÉTONE, César, 45.
[66] PLINE, Hist. nat., VII, 25.
[67] SUÉTONE, César, 88.
[68] SUÉTONE, César, 82.
[69] SUÉTONE, Auguste, 63.
[70] TACITE, Annales, I, 3.
[71] CORNELIUS NEPOS, Nuits Attiques, XIX. SUÉTONE, Tibère, 7.
[72] SUÉTONE, Auguste, 39.
[73] SUÉTONE, Auguste, 65. TACITE, Annales, I, 8.
[74] TACITE, Annales, I, 8, 6.
[75] TACITE, Annales, II, 40.
[76] SUÉTONE, Claude, 1.
[77] TACITE, Annales, I, 83.
[78] SUÉTONE, Claude, 1.
[79] SUÉTONE, Claude, 1.
[80] SUÉTONE, Claude, 17.
[81] SUÉTONE, César, 37.
[82] SUÉTONE, Auguste, 38.
[83] PLINE, Hist. nat., VIII, 2.
[84] Voyez la carte Roma urbs de Kliepert.
[85] CORNELIUS NEPOS, Atticus, 12. SUÉTONE, Tibère, 7.
[86] CORNELIUS NEPOS, Atticus, 19.
[87] TACITE, Annales, II, 43.
[88] SUÉTONE, Tibère, 7.
[89] TACITE, Annales, I, 12.
[90] TACITE, Annales, VI, 28.
[91] TACITE, Annales, III, 19.
[92] SUÉTONE, Tibère, 72
[93] TACITE, Annales, IV, 59.
[94] TACITE, Annales, IV, 39, 40.
[95] Voyez la note sur OCTAVIE.
[96] TACITE, Annales, IV, 3, 7, 8, II. BROT., Sup. au lib. V. des Annales de Tacite ; voyez la note sur DRUSUS, fils de Tibère.
[97] SUÉTONE, Auguste, 65.
[98] TACITE, Annales, III, 25.
[99] SUÉTONE, Auguste, 70.
[100] SUÉTONE, Auguste, 64, 66.
[101] TACITE, Annales, IV, 72, III, 24.
[102] SUÉTONE, Auguste, 4.
[103] SUÉTONE, Auguste, 8.
[104] SUÉTONE, Auguste, 4. César, 83.
[105] SUÉTONE, César, 83.
[106] SUÉTONE, Auguste, 8.
[107] TACITE, De Orat., 28.
[108] SUÉTONE, Auguste, 8.
[109] SUÉTONE, Auguste, 8.
[110] SUÉTONE, Auguste, 11.
[111] SUÉTONE, Auguste, 11, 12.
[112] SUÉTONE, Auguste, 12.
[113] SUÉTONE, Auguste, 25.
[114] SUÉTONE, Auguste, 13.
[115] SUÉTONE, Auguste, 13.
[116] SUÉTONE, Auguste, 14.
[117] SUÉTONE, Auguste, 17.
[118] SUÉTONE, Auguste, 17. César, 52.
[119] TACITE, Annales, I, 2.
[120] TACITE, Annales, I, 2. SUÉTONE, Auguste, 27.
[121] TACITE, Annales, III, 60.
[122] TACITE, Annales, I, 1, III, 56.
[123] TACITE, Annales, I, 2.
[124] TACITE, Annales, I, 1-4.
[125] SUÉTONE, Auguste, 52.
[126] TACITE, Annales, III, 56.
[127] TACITE, de Orat., 17.
[128] SUÉTONE, Auguste, 13, 15, 17, 27.
[129] SUÉTONE, Auguste, 51 jusqu'à 57.
[130] TACITE, Annales, I, 5. SUÉTONE, Auguste, 98.
[131] TACITE, Annales, IV, 57, 67.
[132] PLINE, Hist. nat., VII, 13. Silanus qui d'après la loi pour être proconsul devait avoir 43 ans. Voyez TACITE, Annales, XIII, 1, III, 4, et confrontez les dates.
[133] SUÉTONE, Auguste, 100.
[134] SUÉTONE, Auguste, 99.
[135] TACITE, Annales, II, 71. SUÉTONE, Caligula, 7.
[136] TACITE, Annales, VI, 15.
[137] TACITE, Annales, II, 72.
[138] SUÉTONE, Tibère, 53.
[139] TACITE, Annales, I, 33.
[140] TACITE, Annales, III, 15.
[141] TACITE, Annales, III, 16.
[142] TACITE, Annales, II, 44, III, 7.
[143] TACITE, Annales, III, 56, 57.
[144] TACITE, Annales, I, 76.
[145] TACITE, Annales, IV, 8.
[146] TACITE, Annales, IV, 8.
[147] TACITE, Annales, IV, 8.
[148] TACITE, Annales, IV, 7.
[149] TACITE, Annales, IV, 15. SUÉTONE, Caligula, 23.
[150] TACITE, Annales, IV. 9. Sur sa fille Julie, III, 29. XIII, 32, 43.
[151] SUÉTONE, Tibère, 63.
[152] TACITE, Annales, I, 74. Histoires, I, 2.
[153] TACITE, Annales, II, 30.
[154] TACITE, Annales, III, 67, 69.
[155] TACITE, Annales, I, 78 et suivants.
[156] TACITE, Annales, VI, 7.
[157] SUÉTONE, Claude, 10. Voyez la note sur Caligula.
[158] SUÉTONE, Claude, 5.
[159] Voyez ANTONIA la jeune, note 13.
[160] SUÉTONE, Claude, 5.
[161] L'une de ces lettres était un I barré, l'autre était un F renversé et la troisième avait à peu près la forme d'x.
L'I barré était pour remplacer l'i dans les mots où il est précédé d'un v comme virtute. Le F renversé était employé à la place du V.
Le x s'appelait antisigma et remplaçait le ψ ou ps des Grecs.
[162] SUÉTONE, Claude, 20.
[163] Le rétablissement de l'émissaire du lac Fucin, accompli par le prince Torlonia et à ses propres frais ; le percement de l'isthme de Suez et celui du mont Cenis sont des témoignages éclatants, que loin d'être morte, la race latine, capable de concevoir les plus hardies entreprises, a aussi l'intelligence, les moyens et l'énergie nécessaires pour les mener à bout.
[164] SUÉTONE, Claude, 17.
[165] SUÉTONE, Claude, 34.
[166] SUÉTONE, Claude, 21, 34.
[167] SUÉTONE, Claude, 33.
[168] SUÉTONE, Claude, 25, 28, 29. TACITE, Annales, XI, 35, 37, XII, 1.
[169] TACITE, Annales, XI, 26, 27.
[170] SUÉTONE, Claude, 39, 40. TACITE, Annales, XI, 37.
[171] SUÉTONE, Claude, 15.
[172] TACITE, Annales, XII, 3, 5, 6.
[173] TACITE, Annales, XII, 7. SUÉTONE, Claude, 86.
[174] SUÉTONE, Claude, 38.
[175] TACITE, Annales, XII, 66, 67.
[176] TACITE, Annales, XII, 68, 69.
[177] TACITE, Annales, IV, 56.
[178] TACITE, Annales, VI, 45. IV, 64.
[179] CALMET, Hist. Universelle, XLIX.
[180] EUSÈBE, Hist. Ecclésiastique, II, 2.
[181] Tiberius ergo, cujus tempore nomen Christianum in sæculum introiuit, adnuntiatum sibi ex Syria Palæstina, quod illic veritatem ipsius divinitatis revelaverat, detulit ad senatum cum prærogativa suffragii sui. Senatus, quia non ipse probaverat, respuit; Cæsar in sententia mansit, comminatus periculum accusatoribus Christianorum. TERTULLIEN, Apologétique, 5.
[182] SUÉTONE, Tibère, 36. TACITE, Annales, II, 85.
[183] TACITE, Histoires, V, 5.
[184] TACITE, Histoires, V, 9.
[185] ACTES, II, 38, 40.
[186] ACTES, II, 41, 47. IV, 4.
[187] TACITE, Annales, VI, 15.
[188] TACITE, Annales, VI, 23.
[189] TACITE, Annales, VI, 45.
[190] SUÉTONE, Caligula, 26.
[191] SUÉTONE, Caligula, 10.
[192] TACITE, Annales, VI, 20. SUÉTONE, Caligula, 10.
[193] SUÉTONE, Caligula, 11.
[194] TACITE, Annales, VI, 20, XIII, 1. SUÉTONE, Caligula, 12.
[195] SUÉTONE, Caligula, 12.
[196] SUÉTONE, Caligula, 25.
[197] SUÉTONE, Caligula, 50-51.
[198] SUÉTONE, Caligula, 52.
[199] SUÉTONE, Caligula, 19.
[200] SUÉTONE, Caligula, 32.
[201] SUÉTONE, Caligula, 14 jusqu'à 21.
[202] SUÉTONE, Caligula, 26.
[203] SUÉTONE, Caligula, 26.
[204] SUÉTONE, Caligula, 32.
[205] SUÉTONE, Caligula, 30.
[206] SUÉTONE, Caligula, 32.
[207] SUÉTONE, Caligula, 58, 59. Voyez Claude, note 32.