PARIS - HACHETTE ET Cie - 1904
CHAPITRE I. — Comment Tacite est devenu historien.CHAPITRE II. — La conception de l'histoire dans Tacite.CHAPITRE III. — Le jugement de Tacite sur les Césars.CHAPITRE IV. — Les opinions politiques de Tacite.LES ÉCOLES DE DÉCLAMATION À ROME.LE JOURNAL DE ROME.LE POÈTE MARTIAL.Les Romains avaient un très juste sentiment du mérite de leurs historiens. Quintilien, dans la revue rapide qu'il a faite des écrivains de son pays, affirme qu'il y a trois genres littéraires dans lesquels ils soutiennent la comparaison avec ceux de la Grèce. La satire, dit-il, nous appartient tout entière.... Dans l'élégie, nous sommes leurs rivaux.... Nos historiens ne sont pas au-dessous des leurs[1]. Remarquons que, lorsque Quintilien s'exprimait ainsi, il ne connaissait pas les ouvrages de Tacite, c'est-à-dire du plus grand d'entre eux. De son temps, on disputait pour savoir lequel était le premier, de Salluste ou de Tite-Live. Les classiques préféraient Tite-Live, qui les charmait par le flot abondant et pur de son éloquence. La nouvelle école était séduite par les touches vigoureuses et la profondeur de Salluste, et Martial, qui aimait à formuler dans ces vers bien frappés les opinions de son temps, n'hésitait pas à dire : Crispus romana primus
in historia. Aujourd'hui nous mettons Tacite au-dessus des deux autres; il a même ce privilège, dans le déclin des études classiques, d'avoir conservé toute sa popularité. Non seulement on le lit encore, quoiqu'on ne lise plus guère les auteurs anciens, mais parler de lui est presque une raison de se faire lire. Je n'ai pas la prétention, en ces quelques pages, d'épuiser ce qu'on en pourrait dire. J'insisterai sur quelques questions qu'on a beaucoup agitées, en Allemagne et chez nous, à propos de la manière dont il a conçu l'histoire et sur sa façon de juger les événements et les hommes. Je demande la permission de joindre à ce travail sur Tacite quelques études publiées à diverses époques, et qui peuvent aider à le mieux comprendre. |
[1] Satira tota nostra est... elegia Græcos provocamus... non historia cesserit Græcis. Inst. orat., X, 1.