HISTOIRE DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

LIVRE TREIZIÈME

 

CHAPITRE PREMIER. — CONTRE-RÉVOLUTION

 

 

Impression produite par la mort de Robespierre en France et à l'étranger. — La Terreur blanche s'annonce. — Triste attitude du peintre David. — Changement subit dans la physionomie de l'Assemblée. — Parti thermidorien. — Abolition de la loi du 22 prairial. — Fouquier-Tinville anathématisé par Fréron. — Attaque prématurée de Lecointre contre Barère, Billaud-Varenne, Collot-d'Herbois et Vadier. — Explosion de la poudrière de Grenelle. — Renouvellement des comités. — Tallien chassé du club des Jacobins. — Fréron reprend son journal l'Orateur du peuple. — Marat au Panthéon : comédie jouée par les Thermidoriens. — Tableau des grands services du Comité de Salut public présenté par Robert Lindet à l'Assemblée. — La Jeunesse dorée. — Translation des cendres de Jean-Jacques au Panthéon. — Carrier mis en jugement. — Fin du club des Jacobins. — Nouvelle direction donnée à l'esprit public. — L'ère des salons dorés commence. — Changements introduits dans les mœurs. — Rapport de Romme contre Carrier ; honorable et courageuse franchise de Romme. — Carrier décrété d'accusation ; sortie de Legendre. — Arrestation de Carrier ; on l'empêche de se brûler la cervelle. — Rappel au sein de l'Assemblée des soixante-treize députés signataires de la protestation contre le 31 mai. — Etrange décision prise par l'Assemblée à l'égard des vingt-deux députés girondins mis hors la loi. — Procès de Carrier. — Contraste entre son attitude et celle de son co-accusé Goullin. — Défense de Carrier ; cruautés des Vendéens rappelées. — Carrier et deux de ses co-accusés sont condamnés à mort. — Acquittement des autres membres du Comité nantais. — Scène touchante. — La Convention ne sanctionne pas les acquittements. — Réorganisation du tribunal révolutionnaire. — Exécution de Carrier.

 

Le 9 thermidor marque la fin d'une période historique aussi imposante que terrible, et le commencement d'une période tout à fait distincte. Mais comme la seconde sert à éclairer d'un jour très-vif la sombre grandeur de la première, nous poursuivrons notre récit. Seulement, nous hâterons le pas.

Robespierre étant devenu, grâce à la calomnie, secondée par les dehors d'un pouvoir qu'il ne possédait pas, le bouc émissaire de la Révolution, sa chute fut saluée par beaucoup comme la clôture du régime de la Terreur. Pour mieux vouer sa mémoire à l'exécration publique et faire bénir leur triomphe, les vainqueurs, tout en se réservant de continuer le Terrorisme pour leur propre compte, s'étudièrent à donner au nom de Robespierre, mort, un son effrayant. Ils trépignèrent sur la cendre de cet homme qu'ils venaient d'assassiner. Insultant jusqu'à son tombeau, ils lui composèrent l'épitaphe suivante :

PASSANT, QUI QUE TU SOIS, NE PLEURE PAS MON SORT. SI JE VIVAIS, TU SERAIS MORT[1].

La Terreur, pourtant, était loin de toucher à son terme, et le contraire ne sera que trop prouvé. Mais il est très-vrai qu'elle n'était plus possible que revêtue d'autres formes et mise au service d'autres idées. La guillotine était un ressort qu'on avait usé à force de le tendre. Elle avait d'abord épouvanté, puis fait horreur ; maintenant, elle... ennuyait. Le temps était venu où le couperet allait être remplacé par le poignard, et la décollation en place publique, par l'assassinat en pleine rue. La Terreur blanche préparait son entrée. Quant à la Terreur rouge, il était dans la nature des choses qu'elle finît par la défaite de Robespierre, comme elle aurait fini par sa victoire.

Quoi qu'il en soit, la nouvelle de ce grand événement ne produisit point l'unanimité de transports joyeux qu'ont affirmée, en présence des vaincus réduits au silence, tant d'écrivains salariés, dominés ou inspirés par les Thermidoriens unis aux royalistes.

Les faubourgs, mornes d'abord, manifestèrent bientôt une vague inquiétude. Suivant la forte expression d'un auteur du temps, peu suspect de sympathies ultra-révolutionnaires, la confiance s'égara, sans trouver où se reposer. Le peuple avait des vapeurs[2].

Généralement parlant, les royalistes tressaillirent de bonheur : cela devait être ; et cependant, même parmi eux, on en vit qui se demandaient avec effroi ce qui résulterait d'une victoire qui sauvait Fouché, couronnait Tallien, partageait le pouvoir entre Billaud-Varenne et Collot-d'Herbois, et arrachait à Carrier des hurlements de joie. En province, partout où Robespierre jeune et Couthon avaient passé, on se disait à mi-voix, dans les rangs de ceux que troublait l'image du bourreau : Qu'allons-nous devenir ? Nos malheurs ne sont pas finis puisqu'il nous reste encore des parents, des amis, et que MM. Robespierre sont morts. — Et cette crainte, ajoute Charles Nodier, n'était pas sans motif ; car le parti de Robespierre venait d'être immolé par le parti de la Terreur[3].

L'allégresse fut et dut être extrême dans les prisons, à cause du fameux mot que le Comité de sûreté générale avait eu soin d'y faire circuler : C'est Robespierre qui le veut, et parce que le 9 thermidor ne pouvait manquer d'apporter à la situation un changement quelconque.

Et toutefois, là non plus, l'impression sur tous ne fut point la même. Ceux d'entre les prisonniers qui connaissaient le mieux les hommes et les choses avaient toujours compté sur le triomphe de Robespierre pour leur salut[4] : ceux-là, tout d'abord, furent consternés[5]. Mais il n'est point douteux que, par la majorité des détenus, le 9 thermidor fut salué comme un signal de délivrance.

Le dernier coup de hache à peine donné, des commissaires obligeants s'étaient hâtés de porter aux prisons, sous la doublure de leurs chapeaux, — tant ils craignaient encore le parti terrassé, — les journaux qui contenaient la nouvelle. Dans une prison, des jeunes gens, inquiets de l'agitation environnante, montent au plus haut de l'édifice, et, promenant leurs regards de tous côtés, aperçoivent une femme qui, après avoir montré une robe et une pierre, faisait sur son cou un signe expressif : ils comprirent[6].

Chez les nations étrangères et ennemies, il y eut étonnement d'abord[7], puis satisfaction mêlée de dédain et d'espoir. Robespierre l'avait pris avec elles sur un ton de dignité et de hauteur[8] qui avait beaucoup contribué à le grandir à leurs yeux. Au fond, elles le regardaient comme le seul homme capable de consolider la Révolution. Lui par terre, elles crurent la France à la veille d'entrer dans une période de désordre et de confusion qui la livrerait à leurs coups[9].

Ce qui est certain, c'est que le Terrorisme en France ne songeait nullement à abdiquer. Dès le lendemain du 10 thermidor, Fouquier-Tinville disait à Joly, huissier du Tribunal révolutionnaire : Le peuple doit être content. La guillotine marche, elle marchera, et cela ira encore mieux[10]. De son côté, non content de proposer le maintien de Fouquier-Tinville comme accusateur public[11], Barère s'écriait, dans la séance du 14 thermidor : La révolution est une plante dont on ne saurait arrêter la végétation sans la faire périr[12], et l'on sait en quoi cette végétation consistait, aux yeux d'un homme qui ne s'était jamais fait scrupule de battre monnaie sur la place de la Révolution, et qui disait : La planche de la guillotine n'est qu'un lit un peu plus mal fait qu'un autre[13]. Peu de temps après, Louchet qui, le premier, avait demandé l'arrestation de Robespierre, tenait le langage que voici, du haut de la tribune de la Convention : Persuadé que, pour tarir la source de nos troubles intérieurs, il n'est d'autre moyen que de mettre la Terreur à l'ordre du jour... Et comme on l'interrompait par ce cri : La justice ! la justice ! il ajouta : J'entends la justice la plus sévère contre le lâche modérantisme[14]. Il est à remarquer que l'homme qui fit ordonner l'impression de ce discours fut Tallien[15]. Et certes, lui dont le nom faisait frissonner Bordeaux, lui le défenseur de Jourdan coupe tête, il était ici dans son rôle ; mais, en même temps, combien il donnait raison à cette apostrophe du Girondin Mercier : Tallien ! Tallien ! Tu te levas, ainsi qu'un grabataire poltron, quand le feu prend à la paillasse de son lit ; tu représentas en comédien dans la tragédie qui finit le règne de Robespierre[16].

Et en effet, sous les dominateurs nouveaux, la Terreur ne fit que changer d'objet. La guillotine de M. Louis, qui ne fut que plus tard remplacée par la transportation, cette guillotine sèche dont l'abbé Sieyès fournit l'idée[17], reçut, pendant les premiers jours de la régénération prétendue, son contingent habituel de victimes : soixante-dix le 11 thermidor, et, le 12 thermidor, treize. Il est vrai que, cette fois, c'étaient des révolutionnaires qu'on tuait, au nom de la Révolution ! Quand Coffinhal fut conduit au supplice, on lui criait : Tu n'as pas la parole !

Mais ceux qui avaient la parole maintenant s'en servirent pour comprendre dans l'égorgement en masse de la municipalité un honnête commis expéditionnaire, et un garçon de bureau auxquels on n'avait à reprocher d'autre délit que de s'être trouvés par état en compagnie des municipaux[18]. Les prisons, dont on se hâta de tirer les royalistes, se peuplèrent de patriotes. Duplay, sa femme, son jeune fils, avaient été incarcérés à Sainte-Pélagie dès le soir du 9 thermidor : quelques jours après, la veuve de Lebas et sa sœur aînée furent arrêtées. Deux autres sœurs, alors en Belgique, et même des parents plus éloignés, qui n'avaient jamais connu Robespierre, furent enveloppés dans la proscription[19]. Des mégères de l'ordre rétabli coururent chercher madame Duplay jusque dans son cachot, où on la trouva étranglée[20] ! Certains royalistes, détenus, rentrèrent en prison presque aussitôt qu'ils en furent sortis : témoin la sœur du Vendéen Botidoux, qu'on incarcéra de nouveau, pour forcer son frère à abandonner le parti des rebelles[21]. Voilà ce qu'on appelait le retour à la justice et à l'humanité !

Au nombre de ceux que Robespierre entraîna dans sa chute, figurèrent Rossignol, qui s'était conduit si bravement en Vendée, et le peintre David. L'attitude de ce dernier fut misérable. Il s'excusa d'avoir été partisan de Robespierre sur ce qu'à l'exemple de beaucoup d'autres, il l'avait cru vertueux. On ne peut concevoir, ajouta-t-il, jusqu'à quel point ce malheureux m'avait trompé[22].

Ceci dit le 15 thermidor ; et, le 8, David s'était offert à boire la ciguë avec son ami ! Maignet fut sur le point d'être arrêté, lui aussi. Son crime était d'avoir été lié avec Couthon, et son accusateur fut Rovère[23], le même qui ne rougissait pas de dire : J'ai souvent caressé le petit chien de Couthon pour gagner les bonnes grâces de son maître[24].

Triste et singulière mobilité des choses humaines ! Il suffit de quelques jours pour changer complètement la physionomie de l'Assemblée. Il y avait plus de six mois, écrit Levasseur, que je n'avais siégé au milieu de mes collègues quand je reparus dans la Convention. Son aspect me frappa. Le sommet de la Montagne, où se pressaient naguère les deux tiers des députés, était maintenant dégarni et presque désert. Un grand nombre de ses membres s'étaient rapprochés du Marais, où ils espéraient se faire oublier en se confondant avec la tourbe banale des appuis de tous les partis vainqueurs. D'autres, sans quitter le côté gauche, étaient descendus plus bas, et de leurs bancs nouveaux, comme d'un terrain neutre, ils étudiaient la nouvelle marche de la Révolution. Mais ce qui m'étonna davantage, ce fut de voir Tallien, Legendre, Merlin, Fréron, assis au côté droit. Il régnait dans toute l'Assemblée une grande confusion. Je ne pouvais consulter personne pour savoir quel parti prendre, au milieu d'une Assemblée que je ne connaissais plus. Il y restait cependant une trentaine de patriotes décidés à donner leur vie pour leurs principes : le véhément Duhem, Rühl, Ruamps, Bourbotte, Soubrani, et cet intéressant Goujon, dont nous avons eu, depuis, à déplorer la perte : c'est au milieu d'eux que je choisis ma place[25].

Les anciens chefs du parti terroriste : Billaud-Varenne, Collot-d'Herbois, Barère, Tallien, Fouché, Fréron, Barras, Cambacérès ; les Dantonistes, tels que Thuriot, Legendre, Bourdon (de l'Oise), Merlin (de Thionville) ; les Hébertistes, tels qu'André Dumont ; d'anciens Montagnards qui, comme Thibaudeau, étaient entrés dans leur période de lassitude, tels furent les éléments hétérogènes dont se composa, le lendemain de la chute de Robespierre, la majorité qu'on nomma thermidorienne.

Son premier soin fut de compléter le Comité de Salut public, par la nomination de Bréard, Eschasseriaux l'aîné, Laloi, Thuriot, Treilhard, Tallien[26], et le Comité de Sûreté générale, par celle de Legendre, Goupilleau (de Fontenay), Merlin (de Thionville), André Dumont et Bernard (de Saintes)[27]. Jean Debry ayant été désigné, on fit observer qu'il ne pouvait faire parti d'aucun Comité, parce qu'il avait protesté contre le 31 mai. Lui, se démit, et personne ne réclama[28]. Le moment de répudier le 31 mai n'était pas encore venu pour les Thermidoriens ; mais ils étaient sur une pente où s'arrêter était impossible ; et le mouvement de réaction, une fois commencé, devait, par une loi fatale, les ramener à la Gironde d'abord ; puis, au royalisme.

La décision de l'Assemblée, relativement au Tribunal révolutionnaire, montra la prédominance momentanée de l'élément représenté par les Billaud-Varenne et les Tallien ; la loi du 22 prairial fut abolie, mais le Tribunal révolutionnaire, tel qu'il existait avant cette loi, maintenu[29], les vainqueurs voulant bien détruire tout ce qui était l'œuvre particulière des vaincus, mais non se désarmer. Le sceptre d'airain de la Terreur ne fut donc pas brisé ; seulement, comme il convenait de le faire passer en d'autres mains, on applaudit à ce cri de Fréron : Je demande que Fouquier-Tinville aille cuver dans les enfers le sang qu'il a versé[30]. Fouquier-Tinville avait toujours été opposé à Robespierre, mais c'était un coup de parti que d'abattre ce personnage odieux, comme complice des victimes du 9 thermidor ; il n'en fallut pas davantage.

Fouquier-Tinville se vit frappé d'une destitution qui servait une calomnie ; il fut même arrêté sur la proposition de Turreau[31], dont le tour allait bientôt venir, la logique inexorable de la situation étant désormais que les révolutionnaires fussent dévorés les uns après les autres. Et c'est ce dont une proposition de Lecointre vint de bonne heure les avertir.

De tous les ennemis de Robespierre, Lecointre avait été certainement le plus sincère. Prompt à suivre les impulsions de son cœur, dont son intelligence n'était ni assez ferme ni assez éclairée pour régler les battements, les calculs de la politique lui étaient étrangers. Il s'était étonné de voir prendre place parmi ceux qui, le 9 thermidor, avaient tant crié à la tyrannie, des hommes tels que Billaud-Varenne, Collot-d'Herbois, Barère, Vadier. Sa conscience lui disait que les personnages vraiment comptables de l'affreux mois de messidor étaient les dépositaires du pouvoir pendant cette période sombre. Il résolut donc de les accuser en face, sans prendre conseil que de lui-même. Le 12 fructidor (29 août), il paraît soudain à la tribune, et déclare que, par pièces authentiques et par témoins, il est en mesure de prouver la culpabilité de Billaud-Varenne, de Collot-d'Herbois, de Barère, comme membres du Comité de salut public, et de Vadier, Amar, Voulland, David, comme membres du Comité de sûreté générale. Il donna ensuite lecture de vingt-six chefs d'accusation contre les hommes qu'il avait nommés[32].

Tous les regards se fixèrent sur les membres que Lecointre dénonçait. Le long maniement du pouvoir imprimait à leur attitude quelque chose de singulièrement hautain. La dissimulation était peinte sur leur visage en traits qu'y avaient gravés l'habitude et la nécessité du mystère. Leur teint flétri témoignait des ravages d'un travail excessif et nocturne. Leurs yeux caves brillaient d'une sorte d'éclat sinistre ; et cependant, aux efforts visibles qu'ils faisaient pour adoucir leur contenance, on devinait déjà que leur fortune touchait à son terme. Il n'était pas jusqu'à Billaud-Varenne qui, en ce moment, ne tâchât de donner à sa voix tranchante une inflexion plus moelleuse, et plus de sérénité à son front pâle[33].

Si Lecointre n'avait eu le malheur d'avoir un extérieur et une physionomie ridicules[34], peut-être sa dénonciation eût-elle produit quelque effet ; mais, même dans ce cas, il est peu probable qu'elle eût emporté un vote fatal aux accusés. L'heure du déclin avait sonné pour eux, non celle de la mort, et beaucoup, parmi les Montagnards défectionnaires, s'intéressaient à leur destinée, de peur d'avoir plus tard à la partager. De là une agitation qui prit un instant des proportions tragiques. Goujon anathématisa l'esprit de discorde ; Cambon fit observer rudement que si les Comités étaient criminels, criminelle aussi devait être l'Assemblée qui, chaque mois et unanimement, avait prorogé leurs pouvoirs. Billaud-Varenne, avec plus d'adresse que de dignité, s'était abrité derrière le souvenir de sa conduite au 9 thermidor. Vadier se montra tout à coup à la tribune, un pistolet à la main, prêt, disait-il, à se faire sauter la cervelle en cas de vote hostile. La réaction connaissait encore si peu toute l'étendue de ses forces, qu'elle hésita ; les révolutionnaires de nuances diverses firent faisceau, et l'Assemblée décréta que, rejetant avec la plus profonde indignation la dénonciation de Lecointre, elle passait à l'ordre du jour[35].

Mais l'ordre du jour, bien que motivé d'une manière en apparence péremptoire, ne faisait, après tout, qu'écarter une accusation qui voulait être approfondie, même dans l'intérêt des membres dénoncés. La Convention rapporta donc son décret le lendemain, et Lecointre fut sommé de produire les pièces dont il se prétendait armé. C'est ce qu'il fit ; et comment aurait-il pu s'acquitter de cette tâche, sans donner à d'autres que ceux qu'il désignait la conscience d'un prochain péril, sans éveiller mille noires conjectures, sans mettre en question tout le passé révolutionnaire ? Un effroyable orage éclata sur la tête de l'orateur. Il fut injurié, vilipendé, et son accusation repoussée solennellement comme calomnieuse[36]. Il avait ressemblé, en cette occasion, à un canonnier qui, ayant mis le feu à la pièce avant que la manœuvre fût terminée, aurait blessé ses camarades[37].

Mais son acte d'accusation a surnagé, et il constitue, avec les pièces à l'appui, un document historique d'une importance décisive. La justification des vaincus de thermidor est là[38].

Un événement inattendu et susceptible d'interprétations funestes vint ajouter à l'agitation que ces débats produisirent parmi le peuple. Le 14 fructidor (31 août), à sept heures et demie du matin, la poudrerie de Grenelle sauta. Un grand coup, suivi de plusieurs autres très-éclatants, annonça l'explosion, et l'on ressentit au loin comme un tremblement de terre. Ce fut un spectacle émouvant que celui de toutes ces fenêtres qui, s'ouvrant tout à coup, laissèrent voir des milliers de visages pâles d'effroi. D'où venait le bruit ? La réponse, c'était une immense colonne de fumée qui s'élevait du côté du couchant. A neuf heures, des cadavres furent aperçus, qu'on ramenait sur des brancards. Des femmes éplorées, courant çà et là, remplissaient la rue de Grenelle-Saint-Germain. Le désastre fut effroyable. Autour du magasin, ce n'était qu'un amas confus de ruines. Des maraîchers avaient là leurs maisons ; elles semblaient être descendues sous terre. Les remparts du champ de Mars furent en partie renversés ; tous les arbres des environs apparaissaient blancs de poussière, plusieurs étaient fendus du haut en bas. Sous des monceaux de pierres, on trouva des lambeaux de chair humaine, des têtes broyées. On eût dit un vomissement du Vésuve. L'auteur contemporain qui nous a légué ce tableau, s'écrie : Ô Paris, que de coups divers et ténébreux t'ont porté les ennemis de ta splendeur ![39]

L'opinion populaire fut que cet horrible événement, où soixante personnes périrent et où beaucoup d'autres furent blessées, n'était pas l'ouvrage du hasard ; et ce qui confirmait les soupçons, c'était l'incendie de l'Abbaye, qui, par une coïncidence effroyable, se trouvait avoir précédé immédiatement l'explosion de la poudrerie de Grenelle[40].

Le 15 fructidor (1er septembre), Treilhard vint annoncer à la Convention que les membres du Comité de salut public avaient tiré au sort pour savoir quels seraient les trois d'entre eux qui seraient remplacés, et que le sort avait désigné Carnot, Lindet, Barère. Collot-d'Herbois et Billaud-Varenne, ajouta-t-il, donnent leur démission. Montant aussitôt à la tribune, Collot expliqua que son collègue et lui se retiraient : d'abord, parce qu'un trop long séjour des mêmes membres dans les Comités pouvait être dangereux pour la liberté publique ; ensuite parce que la partie du travail dont ils avaient été chargés jusqu'alors passant à d'autres, leur présence au pouvoir devenait inutile. La déclaration suivante de Tallien étonna : Si la présence d'un homme dans un Comité peut être une pierre d'achoppement, il doit se condamner à une espèce d'ostracisme. Et il conclut par l'offre de sa démission ; sacrifice qui ne lui était point demandé, mais qu'on accepta[41].

Il y avait conséquemment quatre membres à élire ; le choix de l'Assemblée tomba sur Delmas, Cochon de l'Apparent, Fourcroy et Merlin (de Douai).

Ces choix accusaient vivement les deux traits caractéristiques du parti thermidorien : haine de Robespierre et amour de la Terreur. Delmas, en effet, avait été l'adjoint de Barras, au 9 thermidor[42] ; Cochon de l'Apparent était l'un des deux commissaires en mission à Valenciennes, lorsque cette ville capitula, capitulation que Robespierre avait flétrie en termes si fiers ; Fourcroy, le chimiste, avait été président des Jacobins, dont on le regardait comme un des membres les plus fougueux, et l'on se rappelait que, blâmé de son silence à la Convention, il s'était excusé sur ses travaux, qui nourrissaient le sans-culotte son père et les sans-culottes ses sœurs[43]. Quant à Merlin (de Douai), c'était lui qui avait fait adopter la division du tribunal révolutionnaire en quatre sections[44], et indiqué le mode d'exécution de la loi des suspects[45] ; il était le légiste de la Terreur.

Le renouvellement du Comité de sûreté générale suivit celui du Comité de salut public. Les trois membres manquants, Jagot, David, Lavicomterie, et les quatre membres sortants, Élie Lacoste, Voulland, Vadier, Moyse-Bayle, furent remplacés par Bourdon (de l'Oise), Colombel, Meaulle, Clauzel, Mathieu, Montmayou et Lesage Senault[46].

Pendant ce temps, une agitation très-vive régnait au club des Jacobins ; des adresses, envoyées de presque tous les points de la France, leur montraient les contre-révolutionnaires déjà ivres d'orgueil, les patriotes dénoncés ou persécutés, l'ère des vengeances prête à s'ouvrir, et le terrorisme invoqué, non plus comme moyen de défendre la Révolution, mais comme moyen d'en finir avec elle. Le 23 fructidor (9 septembre), le secrétaire chargé de lire la correspondance, prononça, au moment d'en donner communication, ces mots, où l'histoire de la situation était contenue : Je vais vous déchirer le cœur en vous apprenant que les patriotes sont opprimés dans toutes les parties de la France[47]. Il fallait, ou résister énergiquement, ou périr. Les Jacobins ne voulurent point périr sans combattre. La décision par laquelle, le 17 fructidor (3 septembre), ils chassèrent de leur sein Lecointre, Tallien et Fréron[48], indiquait assez qu'entre eux et les Thermidoriens il n'y avait plus de possible qu'une lutte à mort. Tallien et Fréron, à la sortie du club d'où l'on venait de les exclure, s'étant jetés dans les bras l'un de l'autre[49], cette scène inattendue fut signalée comme la preuve d'un concert sinistre. Les deux partis se mirent à aiguiser leurs armes.

Si, parmi celles qu'ils pouvaient employer, les Jacobins avaient admis l'assassinat politique, grande eût été leur folie, et il était absurde de les en supposer capables, après tant de discours enflammés dont leur club avait retenti contre ceux qui avaient recours à des tentatives semblables. Mais cette considération n'arrêta pas leurs ennemis. Le 23 fructidor (10 septembre), vers minuit, un coup de pistolet ayant été tiré sur Tallien[50], les Thermidoriens se répandirent en clameurs menaçantes. Tallien avait été blessé à l'épaule, mais très-légèrement[51]. Pour quel motif ? mystère. Et l'assassin ? disparu. Il eût donc été d'équité stricte d'attendre, avant d'accuser, le résultat d'une enquête. Mais non ; à peine la Convention est-elle informée de l'événement, que Merlin (de Thionville) se lève et désigne les Jacobins comme les auteurs du meurtre. Son discours se terminait par cette violente apostrophe : Peuple, si tu veux conserver la Convention, arme-toi de ta puissance, et, la loi à la main, fonds sur ce repaire de brigands[52].

Dussault, collègue de Merlin (de Thionville), dit de lui que c'était un Hercule dans les mains duquel on surprenait quelquefois un fuseau à la place d'une massue[53] ; mais ses services militaires, sa réputation méritée de bravoure, et la rude franchise de son éloquence n'étaient pas sans lui donner de l'influence sur la majorité. Cependant son appel au peuple, au peuple de Tallien et de Fréron, parut prématuré, même aux plus ardents.

Entre les Jacobins et les Thermidoriens, la masse de la Convention en était encore à chercher sa route ; et, quant aux meneurs de la réaction, ils craignaient, en précipitant le mouvement, de le compromettre.

C'est ce qui explique l'accueil fait par l'Assemblée à une adresse des Jacobins dont l'objet était d'obtenir, d'abord qu'on chassât du Panthéon les cendres de Mirabeau ; ensuite, qu'on y transférât la dépouille mortelle de Marat[54]. Cette translation fut décrétée le 26 fructidor (12 septembre)[55]. Qui le croirait ? Fréron fut le premier à faire bruit de son culte pour la mémoire de Marat. Il venait de reprendre son journal, l'Orateur du peuple, ce journal monstrueux qui, après avoir servi tant de fureurs, allait fournir un porte-voix à des fureurs toutes contraires. Or, de même qu'il s'était couvert du nom de Marat pour enfiévrer la Révolution, de même il se couvrait aujourd'hui de ce nom pour la détruire. Attaqué par Granet et Moyse Bayle sur sa conduite à Toulon, il leur reprocha comme le plus noir des crimes... d'avoir écrit contre Marat[56]. Et quelques jours auparavant, il avait demandé la liberté indéfinie de la Presse !

La cérémonie de la translation des cendres de l'Ami du peuple cadra, aux termes du décret, avec la fête du dernier jour sans-culottide. On se rappelle avec quelle singulière prescience, Marat avait prédit qu'un jour on porterait sa poussière au Panthéon, et quel cri profond lui avait arraché l'idée d'honneurs où son génie sombre devinait d'avance un outrage : J'aimerais mieux ne jamais mourir ! Quel autre cri, plus terrible, n'eût-il pas poussé — si, pour un instant, il lui eût été donné de revivre — en voyant la comédie de son immortalité jouée par ces Thermidoriens qui, moins de cinq mois après, firent ou laissèrent jeter son buste dans un égout ! Mais la réaction comprenait la nécessité de régler sa marche. Les choses se firent donc avec une pompe extraordinaire. Le char traversa Paris, ombragé de quatorze drapeaux destinés aux quatorze armées de la République. En tête s'avançaient d'un pas solennel les sociétés populaires ; puis venaient les diverses autorités constituées ; puis, les élèves de l'Ecole de Mars. La Convention en corps suivait le char, entourée d'un ruban tricolore que portaient des vieillards et des enfants. A trois heures et demie, le cortège arrivait au Panthéon ; et le journal officiel du moment termine le tableau de la cérémonie par ces mots : Tandis qu'on descendait du char le cercueil de Marat, on rejetait du temple, par une porte latérale, les restes impurs du royaliste Mirabeau[57].

Ce fut vers ce temps que Robert Lindet mit sous les yeux de la Convention, dans un grave et noble rapport, le tableau de tout ce que le Comité de salut public avait accompli de prodiges. On le couvrit d'applaudissements, tant il y avait de grandeur dans ce passé que, cependant, on allait clore !

Et en effet, le brûlant foyer d'où la vie révolutionnaire, après s'y être concentrée, avait rayonné si puissamment, était alors à la veille de s'éteindre sous les pieds de la Jeunesse dorée de Fréron.

Commis-marchands, garçons de magasin, clercs d'avoué ou de notaire, enfants perdus de la noblesse, jeunes libertins, voilà de quels éléments se composaient ces troupes légères de la contre-révolution connues sous le nom de Jeunesse dorée : étrange assemblage de frivolité et de violence, de mœurs efféminées et d'entraînements farouches. Nous aurons à décrire plus loin d'une manière complète cette ligue des héros de cabaret avec les héros de boudoir : à l'époque où nous sommes, ils ne faisaient encore que paraître sur la scène, et on les distinguait à leurs cadenettes poudrées, à leurs cravates vertes, aux collets noirs de leurs habits[58].

Leur journal, c'était l'Orateur du peuple, feuille frénétique où ils allaient prendre leur mot d'ordre[59], espèce de cor sauvage qui sonnait la chasse aux hommes ; et leur oracle, c'était Fréron, que sa rage, en changeant d'objet, avait désigné à leurs sympathies. Car Fréron était resté, en passant d'un camp à l'autre, l'énergumène dont le Midi se souvenait en frissonnant. Au nom de la Terreur, il avait démoli l'Hôtel de Ville de Marseille ; et au nom de la modération, il demanda qu'on abolît l'Hôtel de Ville de Paris[60]. Il appelait Marat son divin maître[61], et cela en soufflant la flamme des passions qui se préparaient à traîner Marat aux gémonies.

L'histoire des Thermidoriens est pleine de traits pareils. C'est ainsi que, le 20 vendémiaire (11 octobre), ils portèrent en grande pompe au Panthéon les cendres de ce Jean-Jacques dont Robespierre n'avait cessé d'avoir les livres ouverts sur sa table. Ils mettaient le maître au rang des dieux mortels, après avoir assassiné le disciple !

En réalité, jamais position ne fut plus fausse que la leur ; ils avaient contre eux la logique même de leur défection, logique formidable qui menait droit au châtiment des Terroristes de la Révolution par ceux de la contre-révolution. Et bien vainement auraient-ils espéré se soustraire à la nécessité de se frapper en frappant un à un leurs anciens complices. La réaction à laquelle ils s'étaient livrés voulait des gages, et les voulait sanglants.

Carrier fut la première tête qu'elle demanda. La lui accorder, les Thermidoriens ne le pouvaient qu'à la condition de flétrir leur politique passée. La lui refuser, ils ne le pouvaient qu'à la condition d'affronter les passions que le 9 thermidor avait déchaînées. Ils s'abandonnèrent au courant, les malheureux, n'ayant plus même le choix des abîmes !

Et en effet, le 22 vendémiaire (13 octobre), quatorze membres de l'ancien Comité révolutionnaire de Nantes ayant été traduits en justice, leur procès avait mis au jour un ensemble de forfaits tels, que Paris s'était cru en présence d'une révélation de l'enfer. Nous les avons racontés déjà[62]. Et quel homme devait-on en rendre principalement comptable ? Si l'on interrogeait les accusés sur ce point, leur réponse était : C'est Carrier qui l'a voulu ; c'est Carrier qui l'a ordonné ; que Carrier vienne ici nous démentir, s'il l'ose ! Carrier ! cria l'auditoire. Carrier ! répéta tout Paris ; et le bruit de ce nom sinistre se prolongeant d'écho en écho, la Convention, à son tour, cria : Carrier ! Carrier !

Le 8 brumaire (29 octobre), elle avait décidé, sur la proposition de Tallien[63], que toute dénonciation contre un représentant du peuple serait renvoyée aux Comités de salut public, de sûreté générale et de législation, et qu'en cas d'affirmative, une commission serait désignée pour l'examen et le rapport des faits[64]. Cette mesure, qui donnait la minorité à dévorer aux meneurs de la majorité, et que Lejeune baptisa de son vrai nom, Chambre ardente[65], fut aussitôt appliquée à Carrier[66], qu'on plaça sous une surveillance active, de peur qu'il ne prît la fuite[67].

Les Jacobins grondèrent, moins par intérêt pour Carrier, que parce que le gouffre, une fois ouvert, menaçait d'engloutir d'autres coupables, et pêle-mêle avec eux, une nouvelle série de victimes. Ces plaintes hâtèrent une catastrophe prévue.

La Révolution siégeant encore au club des Jacobins, il était naturel qu'il devînt le point de mire de Fréron et de la Jeunesse dorée. Après le 9 thermidor, les vainqueurs s'étaient vus un instant maîtres du club des Jacobins ; mais leur domination n'avait pu s'y maintenir. De là l'établissement d'une société rivale, à Clichy. Les contre-révolutionnaires y furent reçus à bras ouverts par les Thermidoriens, au nombre desquels les anciens amis de Danton[68] ; et de cette alliance adultère il résulta que, bientôt, l'esprit du club de Clichy ne différa point de celui qui régnait à Coblentz[69].

Mais la réaction sentait bien qu'il lui serait interdit de dormir, aussi longtemps que les Jacobins veilleraient. Dans leur séance du 13 brumaire (3 novembre), Billaud-Varenne avait prononcé ce mot, qui produisit dans Paris une sensation immense : Le lion n'est pas mort ![70] La destruction du club fameux fut jurée.

Le 18 brumaire (8 novembre), la Jeunesse dorée s'ameute, part du Palais-Royal, cloaque où fermentaient en ce temps-là tous les genres de corruption, et court assiéger les Jacobins. Ceux-ci, pris à l'improviste, se défendent néanmoins avec vigueur ; ils font des sorties comme dans une place de guerre[71]. Les assaillants étaient venus, les poches pleines de pierres[72] ; en outre, ils étaient armés de ce bâton court et plombé qui, depuis, fit partie intégrante du costume à la mode. Accablés par la supériorité du nombre, jointe à la soudaineté de l'attaque, lés membres du club succombent ; des enfants et des femmes, mêlés parmi eux, sont indignement assommés[73] ; on brise les portes, on enlève les serrures ; des représentants du peuple, accourus pour rétablir l'ordre, sont frappés à leur tour. Duroy, l'un d'eux, qui ne faisait point partie de la société, raconta, le lendemain, à la Convention, sur le ton de l'indignation la plus profonde, qu'il avait été témoin de ce spectacle ignoble ; qu'il avait reçu la première nouvelle de ces violences d'une femme rencontrée par lui à quelque distance de là, et dont le visage était tout en sang ; qu'il avait vu des membres du club sortir au milieu des huées et couverts de boue ; enfin, que les patrouilles passaient et repassaient sans rien empêcher[74].

La joie fut grande dans les salons de l'ancienne noblesse, ceux qu'on nommait les salons dorés. Il y en eut qui se hâtèrent d'illuminer. Les vainqueurs firent acte de puissance, en fouettant des femmes dans les rues : lâcheté où le libertinage trouvait son compte. Les uns coururent les cafés, donnant l'exemple de boire à l'extermination des Jacoquins ; et ce fut sur l'air de la Carmagnole[75], que les autres exécutèrent des rondes joyeuses, dans les jardins, pour mieux fêter la défaite du sans-culottisme. L'enthousiasme de Fréron était au comble.

Il annonça triomphalement que la gaieté française allait renaître, et en donna pour preuve l'idée émise par quelques citoyens de brûler en public un beau lion de paille, portant une crinière semblable à la perruque de Billaud-Varenne[76].

Les Comités avaient eu hâte de faire mettre les scellés sur la salle des Jacobins[77], sous prétexte que des rassemblements se formaient dans les environs ; Rewbell demanda que les séances fussent suspendues[78]. La clôture du club n'ayant point tardé à être prononcée par les Comités, la Convention, que les Thermidoriens dominaient en attendant que ce fût le tour des royalistes, n'hésita pas à confirmer l'arrêté. Environ dix mois plus tard, à l'étranger s'informant du lieu où les Jacobins avaient siégé, on répondait : Ah ! c'est le marché du 9 thermidor que vous voulez voir ? Les Thermidoriens avaient effectivement obtenu un décret, pour effacer jusqu'à ce nom de Jacobins qui les accablait du souvenir de leur passé. Vaine ressource ! Le nom et le souvenir resteront unis à jamais sur les tables d'airain de l'histoire.

A partir de ce moment, la réaction se précipita. Chaque jour ajoutait aux symptômes par où se révélaient les conséquences du 9 thermidor. Au théâtre, on n'applaudissait plus les mêmes passages. Les hymnes patriotiques ne retentissaient plus que de loin en loin. Si, apercevant au coin d'une rue la foule rassemblée autour d'un chanteur, vous approchiez, dans l'espoir d'entendre la Marseillaise, ce qui frappait votre oreille, c'était la romance de Mont-Jourdain[79].

Non que l'âme du peuple fût soudainement devenue incapable de vibrer ; mais l'impulsion manquait, ou, pour mieux dire, elle tendait maintenant à s'exercer en sens inverse. L'ère des salons dorés commençait. L'austérité des mœurs républicaines et le viril enthousiasme qu'elles avaient enfanté faisant place peu à peu à des goûts d'élégance raffinée et à des influences de boudoir, la mode élevait des trônes à la beauté, sans lui demander compte de son emploi, et à l'esprit, sans l'interroger sur ses desseins. Madame de Staël, madame Récamier s'essayaient à porter le sceptre qu'avaient tenu avant la Révolution et sous l'empire d'autres pensées, madame Geoffrin et mademoiselle L'Espinasse. Les royalistes, qui, tout bas, appelaient madame Tallien Notre-Dame de Septembre, l'appelaient tout haut Notre-Dame de Thermidor. Et ces déesses du moment, attirant autour d'elles, à force de regards humides et de paroles emmiellées, les rudes nourrissons de la liberté militante, la corruption monarchique se glissait partout inaperçue. Une fois admis dans l'Olympe où les jeux, les ris et les grâces ourdissaient leurs légers complots, les révolutionnaires étaient à demi perdus. Au contact des gens de l'ancien régime, les plébéiens dont l'esprit était faible s'enivraient à leur insu du sentiment trompeur de leur importance accrue, tout entiers au charme des séductions dont on les entourait, et se doutant peu que, dès qu'ils avaient le dos tourné, on faisait des gorges chaudes de leur vanité prise au piège. Même les plus fermes cédaient insensiblement à la contagion. Une jolie femme venait-elle à lancer contre la Révolution un mot cruel enveloppé dans un doux sourire, ils tremblaient de paraître ridicules en se fâchant. Et c'est ainsi que, de l'aveu de Thibaudeau, le parti républicain éprouva beaucoup de défections ; que les uns firent des concessions, et que les autres se vendirent entièrement au royalisme[80].

Tel était l'état des esprits, lorsque, le 21 brumaire (11 novembre), Romme lut à la Convention un- rapport qui concluait à la mise en accusation de Carrier[81].

La défense de cet homme de sang fut habile et ferme. Ce procès, dit-il, est celui de Charette contre les vainqueurs de la Vendée. Tirant avantage de la précaution qu'il avait prise de donner de vive voix ses ordres meurtriers, il défia qu'on produisît, revêtu de sa signature, l'ordre de noyer des femmes et des enfants. Des atrocités commises par les Vendéens, il dressa un tableau à faire dresser les cheveux. Il se rejeta sur ce qu'une situation sans exemple dans l'histoire avait eu de pressant, d'irrésistible et de fatal. La pâleur dut monter au visage de Tallien, de Fouché, de Fréron, lorsque, de cette voix qui avait si souvent commandé à la mort, il s'écria : Entendez-vous donc mettre en cause tous les députés en mission ?[82]

Quoique rapporteur contre Carrier, Romme, le rigide et honnête Romme, eut la loyauté de déclarer que la loi en vertu de laquelle existait la commission qui l'avait choisi pour organe était de celles qui aisément se transforment en poignards. Il dit que, parmi les faits allégués, il avait trouvé des choses contradictoires, évidemment calomnieuses. Il opina pour que désormais nul ne fût reçu à poursuivre un représentant du peuple d'accusations anonymes, et se plaignit qu'on lui eût envoyé des dénonciations non signées, partant sans valeur, puisque la moralité des dénonciateurs restait un mystère. Cette probité courageuse excita des applaudissements ; elle provoqua aussi des murmures ; et Pierret ne rougit pas de crier à l'orateur à qui sa conscience prescrivait d'être juste envers tous, à tout prix : Romme, tu te conduis lâchement ![83] La séance se termina par un décret qui permettait à l'accusé de rester chez lui sous la garde de quatre gendarmes[84].

Plusieurs séances furent consacrées à l'examen de la conduite de Carrier. Dans celle du 29 brumaire (19 novembre), on lut une adresse de la commune de Nantes qui lui imputait d'avoir fait périr jusqu'à des enfants, qu'il nommait des louveteaux[85]. Dans une autre séance, il prononça ces mots qui retentirent comme une cloche funéraire : Il n'y avait pas une seule famille patriote qui n'eût à pleurer un père, un fils, une épouse, une sœur, un ami. Les massacres de Machecoul et de Saumur étaient récents. On entendait encore les cris des femmes suspendues par les pieds sur des brasiers ardents, et les gémissements des hommes à qui les brigands avaient crevé les yeux et coupé les oreilles. L'air semblait retentir encore des chants civiques de vingt mille martyrs de la liberté, qui avaient répété : Vive la République ! au milieu des tortures. Comment l'humanité, morte dans ces crises terribles, eût-elle pu faire entendre sa voix ?

Bourbotte fut le seul qui osa défendre Carrier. Encore ne le défendit-il que faiblement. Mais cet abandon n'ôta rien à Carrier de son audace. S'il était coupable, que d'autres avaient perdu le droit de le condamner ! Un terrible mot de lui fut celui-ci : Tout ici est coupable, tout jusqu'à la sonnette du président[86].

Le 5 frimaire (25 novembre), Carrier fut décrété d'accusation[87]. L'avant-veille, un membre de l'Assemblée ayant insisté pour la production de preuves matérielles, Legendre, qui occupait le fauteuil, s'était élancé à la tribune, et, frémissant, s'était écrié : Des preuves matérielles ? Eh bien, faites refluer la Loire à Paris ; faites amener les bateaux à soupape ; faites venir les morts, ils sont en assez grand nombre pour cacher les vivants ![88]

Il était nuit lorsque le domicile de Carrier fut envahi : on le trouva couché ! Le décret lui est lu, et on l'invite à se lever. Il demande alors qu'on lui permette de fermer les rideaux de son lit : l'officier refuse sur ce que la décence ne s'oppose pas à ce qu'un homme s'habille devant d'autres hommes. Lui, se penche vers la ruelle de son lit, saisit de la main droite un pistolet et le porte à sa bouche, mais on eut le temps de le désarmer. Il dit amèrement à l'officier : Les patriotes ne te pardonneront jamais de m'avoir empêché de me brûler la cervelle[89].

Un des résultats de cette invincible logique des choses qui forçait la Convention à punir des excès que ses propres votes avaient, ou encouragés, ou couverts, fut le retour de la Gironde sur la scène politique. Le 18 frimaire (8 décembre), à la suite d'un rapport de Merlin (de Douai), les soixante-treize députés, signataires de la protestation contre le 31 mai, furent rappelés dans l'Assemblée et accueillis par elle avec transport[90]. Ils n'avaient fait qu'affirmer un principe vrai, l'inviolabilité du suffrage universel, loyalement exprimé ; et l'on ne pouvait pas leur reprocher à eux d'avoir couru la France, les torches de la guerre civile à la main. Aussi Robespierre les avait-il disputés au minotaure de la Terreur, avec autant de sollicitude que de persévérance.

Mais il y avait loin de leur position à celle des vingt-deux Girondins qui étaient et s'étaient mis sous le coup d'un décret de hors la loi. Ceux-ci avaient soufflé la révolte, pactisé avec les royalistes, poussé les départements contre Paris, et placé la France, déjà envahie, à deux doigts de sa perte. Cependant, les soixante-treize n'étaient pas plutôt réinstallés, que, dans une assemblée particulière, ils demandèrent le rappel des vingt-deux. Je portai la parole, raconte Mercier ; Legendre combattit la proposition, et s'écria : Je mourrai plutôt à la tribune. — Eh bien, lui dis-je, tu y mourras ![91]

L'opposition de Legendre ici avait quelque chose de bien frappant ; elle prouvait que les Thermidoriens, les anciens amis de Danton, commençaient à prendre souci de la rapidité du mouvement en arrière qui les entraînait. Au fond, leur demander de voter le rappel des vingt-deux, c'était leur demander de flétrir eux-mêmes un acte auquel ils avaient puissamment concouru, et dont ils s'étaient mille fois vantés comme de leur plus beau titre de gloire. Mais, forts de l'appui que soixante-treize voix leur apportaient, les royalistes masqués et les nouveaux convertis insistèrent. Un compromis eut lieu : le 27 frimaire (17 décembre), Merlin (de Douai), parlant au nom des Comités, proposa de décréter que les députés hors la loi ne pourraient rentrer à la Convention, mais qu'ils ne seraient point inquiétés ; c'est ce qui fut adopté, après d'orageux débats, et au milieu d'une violente agitation[92].

Ainsi, les vingt-deux, au nombre desquels figuraient des hommes tels que Defermon, Pontécoulant, Kervélégan, Henri Larivière, Lanjuinais, étaient déclarés à la fois innocents et coupables ; trop innocents pour être poursuivis, et trop coupables pour reprendre leurs sièges de représentants du peuple. A leur égard, suivant l'expression de Levasseur, les Thermidoriens s'arrogeaient une espèce de droit de grâce royal[93]. La minorité, au contraire, disait : qu'on leur donne des juges, afin qu'ils soient ou frappés s'ils ont failli, ou réhabilités, dans le cas contraire, nul doute que ce fût là le langage de la raison et de la justice.

La question, au reste, ne devait pas tarder à être reprise, et il est, dès à présent, facile de prévoir quelle solution les progrès de la réaction lui donnèrent.

Le procès de Carrier avait commencé le 3 frimaire (25 novembre), il se termina le 26 frimaire (16 décembre). L'accusé se réfugia d'abord dans un système de dénégations opiniâtres ; mais ceux qui lui avaient servi d'instruments étaient maintenant les premiers à lui demander compte de tout le sang que ses ordres avaient fait couler. Le plus fanatique de ses coaccusés, le créole Goullin, lui cria d'une voix terrible : Carrier, tu as menti à ta conscience ; tu t'obstines à nier des faits authentiques. Imite-moi, sache avouer tous tes torts : sinon, tu t'avilis aux yeux du peuple[94]. Goullin avait droit de parler ainsi, n'ayant rien caché de ce qui le concernait lui-même, et s'étant mis à braver l'échafaud avec un singulier mélange de dédain farouche et de noblesse. En un moment de trouble, il lui était arrivé de promettre la révélation d'un secret de nature à compromettre un des accusés : le lendemain, il déclara que, rendu par la réflexion à son caractère, il ne révélerait rien ; qu'il n'entendait pas, en dénonçant un patriote, préparer une jouissance aux aristocrates, et que s'il leur avait donné lieu d'espérer cela de lui, il en demandait pardon à la chose publique[95]. Faisant allusion à ces mots d'une lettre de Hérault de Séchelles à Carrier : Quand un représentant est en mission, et qu'il frappe, il doit frapper de grands coups et laisser toute la responsabilité aux exécuteurs ; il ne doit jamais se compromettre par des mandats écrits ! Goullin ajouta : Mes fautes sont à moi, et, quoi qu'elles doivent me coûter, je ne serai pas assez lâche pour les déverser sur autrui. Entièrement opposé au système machiavélique d'Hérault de Séchelles, je méprise également, et celui qui le prêcha, et celui qui put le pratiquer. Nul de mes écrits n'est équivoque ; j'appelle un chat un chat, et mon vocabulaire n'offre pas pour synonymes le mot noyade et le mot translation. Toutes mes démarches sont franches, et jamais je n'eus la bassesse d'interposer des victimes entre la justice et moi. Mes actes sont ostensibles : si l'on me juge d'après eux, certes je suis coupable, et j'attends mon sort avec résignation ; mais si l'on juge mes intentions, je le dis avec orgueil : je ne redoute ni le jugement des jurés, ni celui du peuple, ni celui de la postérité[96].

Cette fière attitude de Goullin jetait sur Carrier l'ombre d'un triste contraste : soit qu'il le sentît, ou que l'inutilité de lutter jusqu'au bout contre un ensemble écrasant de témoignages lui apparût, il releva enfin la tête, reconnut qu'en plusieurs circonstances il avait caché la vérité, assura que beaucoup de détails étaient échappés de sa mémoire, et dit qu'on pouvait prendre, si l'on voulait, ses incertitudes pour des aveux[97].

Sa défense consista en partie dans un épouvantable tableau des cruautés qu'avaient commises les Vendéens.

Les brigands, dit-il, ont donné les premiers le signal et l'exemple des meurtres, des massacres. A Machecoul, ils hachèrent et mirent en pièces huit cents patriotes ; on les enterra, en ne couvrant de terre que leurs corps, et en laissant à découvert les bras et les jambes ; on fit assister des femmes au supplice de leurs maris, et on les cloua ensuite toutes vivantes aux portes de leurs maisons. Le moins barbare des supplices infligés à nos braves défenseurs était de les fusiller ou de les tuer à coups de baïonnette : le plus commun était de les suspendre à des arbres par les pieds, en allumant un brasier sous leur tête, ou de les clouer à des arbres, et de leur enfoncer dans le nez et dans la bouche des cartouches auxquelles on mettait le feu... Il faut se reporter au temps. Nos frontières envahies du Nord au Midi, — la trahison dans les armées, — Toulon vendu aux Anglais, — Marseille, Lyon, Bordeaux, armés avec tous les départements du Midi, — les départements du Nord-Ouest agités, — la Vendée devenue formidable par ses victoires, — la Bretagne en ébullition, — les côtes, menacées de la descente de trente mille Anglais ou émigrés stationnés devant Jersey et Guernesey, — le Morbihan en rébellion ouverte, — Nantes vivant au jour la journée, désolée par la contagion, entourée de brigands qui s'introduisaient dans ses murs, correspondaient avec des Nantais, en recevaient des armes et des munitions ; — dans les prisons, le soulèvement, et une grande conspiration dans la ville. Faut-il s'étonner si tant de périls d'une part, et, d'autre part, tant d'atrocités ont fait outrer les mesures ?[98]

Il termina en ces termes :

Si la justice nationale doit peser sur quelqu'un, qu'elle pèse sur moi seul[99].

Le tribunal le condamna à mort, et, avec lui, deux de ses coaccusés, Pinard et Grandmaison. Quant aux autres, les débats avaient révélé une foule de faits tendant à prouver que ces hommes, d'une si grande exaltation politique, avaient des vertus, et même des vertus douces.

De la probité sans tache de Bachelier, du patriotisme et de la bienfaisance de Chaux, de l'humanité de Proust, il fut donné des preuves irrécusables[100]. Réal produisit sur l'auditoire une impression profonde lorsque, après avoir passé en revue tous les actes qui déposaient en faveur de la moralité de Goullin, son client, il s'écria : Sa tête fut exaltée ; son cœur est celui d'un patriote pur, d'un homme de bien[101]. Et l'émotion fut à son comble, quand on vit tout à coup se lever, pâle, tremblant, éperdu, les yeux pleins de larmes, l'accusé Gallon, ami de Goullin, et qu'on entendit ces paroles proférées par une voix qu'étouffaient à demi les sanglots : Goullin est un honnête homme ; c'est mon ami ; il a élevé mes enfants ; tuez-moi, mais sauvez-le[102]. Le désespoir de Gallon était tel, qu'il fallut l'entraîner hors de la salle. Sont-ce là des hommes féroces ? demanda Réal. L'auditoire répondit par des pleurs, et le Tribunal par un acquittement[103].

Mais la réaction exigeait plus de trois victimes expiatoires : de violentes clameurs s'élevèrent du sein de cette faction, de jour en jour plus puissante, dont la jeunesse dorée représentait l'esprit, et la Convention fut pressée au point de refuser sa sanction aux acquittements prononcés par le Tribunal révolutionnaire. Un premier décret[104] ordonna l'arrestation provisoire des individus acquittés, et un second[105] les renvoya par devant le Tribunal criminel d'Angers. Du même coup, sur la motion de Merlin (de Douai), l'Assemblée décréta la réorganisation du Tribunal révolutionnaire, et cela dans un sens dont la justice et l'humanité n'eurent qu'à s'applaudir. Le nouveau tribunal dut se composer de douze juges et de trente jurés ; il fut décidé que le jury, ainsi que le Tribunal, serait renouvelé en entier de mois en mois, et le droit de récusation fut formellement reconnu aux accusés[106] : Rien de plus louable que cette dernière mesure, à laquelle, malheureusement, la marche générale de la réaction fut loin de répondre.

Ce fut le 27 frimaire (16 décembre) que Carrier monta sur l'échafaud. Presque sous le couperet, il entendit les sons d'une clarinette qui célébrait sa mort[107]. Il mourut avec un courage dont ses ennemis eux-mêmes ont témoigné[108], mais qui n'absout pas sa mémoire.

 

 

 



[1] Elle fut imprimée dans la plupart des journaux réactionnaires du temps. Voyez Annual Register, 1794, vol. XXXVI, p. 168.

[2] Dussault, Fragment pour servir à l'Histoire de la Convention nationale, p. 19. Bibl. Histoire de la Révol., 1338-40.

[3] Charles Nodier. Voyez, dans le Dictionnaire de la Conversation, la biographie de Robespierre jeune par cet écrivain.

[4] C'est l'opinion que Thouret n'avait cessé d'exprimer, selon le témoignage de son compagnon de captivité, le royaliste Beaulieu.

[5] Tel fut l'effet produit dans la prison où se trouvait alors M. Félix Desportes, mort il y a quelques années, et de qui nous tenons le fait.

[6] Rapport de Courtois sur les événements du 9 thermidor, p. 3.

[7] They were uncommonly astonished when they heard of his overthrow. Voyez Annual Register, 1794. Vol. XXXVI, p. 171.

[8] During the plenitude of his power, he had occasionally assumed a great appearance of superior dignity and importance. Annual Register, 1794. Vol. XXXVI, p. 172.

[9] They began to expect that it would be followed by disorders and confusion that might be advantageous to themselves. Annual Register, 1794. Vol. XXXVI, p. 171.

[10] Voyez la déposition de Joly dans le procès de Fouquier-Tinville, Histoire parlementaire, t. XXXV, p. 89 et 90.

[11] Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 25.

[12] Moniteur, an II (1794), n° 315.

[13] Prud'homme, Histoire générale et impartiale, etc., t. I, p. 85.

[14] Moniteur, an II (1794), n° 333.

[15] Il voulut bien dire toutefois qu'il ne fallait pas mettre la Terreur à l'ordre du jour. Et pourquoi ? Parce qu'il avait vu l'effet produit par ces mots sur l'Assemblée. Ce trait est caractéristique. Voyez le Moniteur, an II (1794), numéro 333.

[16] Mercier, le Nouveau Paris, chap. XXI.

[17] Voyez le rapport de Sieyès sur une loi de grande police, dans le Moniteur, an III (1795), séance du 1er germinal (21 mars).

[18] Nogaret, Histoire abrégée, liv. XXIV, p. 445.

[19] Voyez l'article Duplay, dans le Dictionnaire de la Conversation.

[20] Nogaret dit, p. 445, qu'elle se pendit, pendant la nuit, derrière la porte.

[21] Mémoires de Puisaye, t. IV, p. 178.

[22] Moniteur, an II (1794), n° 315.

[23] Moniteur, an II (1794), n° 316.

[24] Mémoires de Levasseur, t. IV, chap. IV, p. 108.

[25] Mémoires de Levasseur, t. IV, chap. II, p. 24.

[26] Moniteur, an II (1794), n° 315.

[27] Moniteur, an II (1794), n° 315.

[28] Mémoires de Levasseur, t. IV, chap. II, p. 37.

[29] Moniteur, an II (1794), n° 324.

[30] Séance du 14 thermidor (1er août).

[31] Moniteur, an II (1794), n° 315.

[32] Moniteur, an II (1794), n° 344.

[33] Dussault, Fragment pour servir à l'Histoire de la Convention nationale, p. 28. Bibl. Histoire de la Révol., 1338-40.

[34] Dussault, Fragment pour servir à l'Histoire de la Convention nationale, p. 27.

[35] Voyez le Moniteur, an II (1794), n° 344.

[36] Moniteur, an II (1794), n° 345.

[37] Dussault, Fragment pour servir à l'Histoire de la Convention nationale, p. 30.

[38] Voyez les chapitres précédents, passim.

[39] Mercier, le Nouveau Paris, chap. CXLII.

[40] Mercier, le Nouveau Paris, chap. CXLII.

[41] Voyez la séance du 15 fructidor, dans le Moniteur, an Il (1794), n° 347.

[42] Moniteur, an II (1794), n° 312.

[43] Moniteur, an II (1793), n° 82.

[44] Moniteur, 1792, n° 249.

[45] Moniteur, 1792, n° 262.

[46] Moniteur, an II (1794), n° 347.

[47] Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 70.

[48] Moniteur, an II (1794), n° 351.

[49] Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 69.

[50] Dubarran l'annonça à la Convention dans la séance du 24 fructidor (10 septembre). Voyez le Moniteur, an II (1794), n° 356.

[51] Voyez le rapport des officiers de santé, dans le Moniteur, an II (1794), n° 347.

[52] Moniteur, an II (1794), n° 356.

[53] Fragments pour servir à l'Histoire de la Convention nationale, par J.-J. Dussault, Bibl. hist. de la Révol., 1338-40.

[54] Voyez le Moniteur, an II (1794), n° 354.

[55] Moniteur, an II (1794), n° 358.

[56] Voyez séance du 2 vendémiaire (23 septembre), Moniteur, an III (1794), n° 6.

[57] Moniteur, an III (1794), n° 4.

[58] Thibaudeau, chap. XII, p. 143.

[59] Mémoires de Levasseur, t. IV, chap. IV, p. 126.

[60] Mémoires de Levasseur, t. IV, chap. I, p. 14.

[61] Mémoires de Levasseur, t. IV, chap. IV, p. 126.

[62] Voyez, dans le volume précédent, le chapitre intitulé les Proconsuls.

[63] Mémoires de Levasseur, t. IV, chap. IV, p. 134-135.

[64] Moniteur, an III (1794), n° 41.

[65] Mémoires de Levasseur, t. IV, chap. IV, p. 134-135.

[66] Moniteur, an III (1794), n° 41.

[67] Moniteur, an III (1794), n° 44.

[68] Mémoires de Levasseur, t. IV, chap. IV, p. 126.

[69] Mémoires de Levasseur, t. IV, chap. IV, p. 126.

[70] Moniteur, an III (1794), n° 47.

[71] Récit de Duhem dans la séance de la Convention du 18 brumaire (8 novembre).

[72] Récit de Duhem dans la séance de la Convention du 18 brumaire (8 novembre).

[73] Récit de Duhem dans la séance de la Convention du 18 brumaire (8 novembre).

[74] Discours de Durov dans la séance de la Convention du 19 brumaire (9 novembre). Voyez le Moniteur, an III (1794), n° 52.

[75] Ce trait nous est fourni par le journal même de Fréron. Voyez le n° XXXI de l'Orateur du peuple.

[76] Journal de Fréron, n° XXXI de l'Orateur du peuple.

[77] Moniteur, an III (1794), n° 53.

[78] Moniteur, an III (1794), n° 53.

[79] Voyez le numéro des Annales patriotiques du 2 frimaire, reproduit dans l'Histoire parlementaire, t. XXXVI, p. 185-187.

[80] Mémoires de Thibaudeau, chap. IX, p. 139.

[81] Moniteur, au III (1794), n° 53.

[82] Moniteur, au III (1794), n° 53.

[83] Moniteur, au III (1794), n° 53.

[84] Moniteur, au III (1794), n° 53.

[85] Moniteur, au III (1794), n° 61.

[86] Mémoires de Thibaudeau, t. I, p. 142.

[87] Moniteur, an III (1794), n° 68.

[88] Histoire parlementaire, t. XXXIV, p. 154.

[89] Moniteur, an III (1794), n° 74.

[90] Moniteur, an III (1794), n° 80.

[91] Mercier, le Nouveau Paris, chap. XXXVI.

[92] Moniteur, an III (1794), n° 89.

[93] Mémoires de Levasseur, t. IV, chap. VI, p. 187

[94] Voyez le procès de Carrier dans l'Histoire parlementaire, t. XXXIV, p. 193.

[95] Histoire parlementaire, t. XXXIV, p. 192.

[96] Histoire parlementaire, t. XXXIV, p. 192.

[97] Histoire parlementaire, t. XXXIV, p. 210 et 212.

[98] Histoire parlementaire, t. XXXIV, p. 214-217.

[99] Histoire parlementaire, t. XXXIV, p. 214-217.

[100] Ces faits et ces témoignages, nous les avons déjà fait connaître dans le chapitre du dixième volume de cet ouvrage, intitulé les Proconsuls.

[101] Procès de Carrier, Histoire parlementaire, t. XXXIV, p. 213.

[102] Procès de Carrier, Histoire parlementaire, t. XXXIV, p. 213.

[103] Histoire parlementaire Voyez le jugement, t. XXXIV, p. 217-221.

[104] Du 28 frimaire (18 décembre) 1794.

[105] Du 2 floréal (21 avril) 1795.

[106] Voyez le texte du décret qui fut rendu le 8 nivôse (28 décembre) 1794, dans l'Histoire parlementaire, t. XXXIV, 223-232.

[107] Mercier, le Nouveau, Paris, chap. XXXVI.

[108] Voyez les Mémoires de Thibaudeau, chap. XII.