L'histoire des premiers temps de Les Éléens, d'après Pausanias[5], regardaient comme leur premier roi Aëthlius. Aëthlius eut pour successeurs Endymion, dont les poètes ont fait un berger aimé de Diane ; Épéus[6] et Éléus, qui donnèrent successivement leur nom au pays ; Augias, dont Hercule nettoya les fabuleuses étables, et dont il punit l'ingratitude en conduisant contre lui une armée d'Argiens et d'Arcadiens. L'hostilité de ce dernier peuple prouve que si jamais l'Élide avait fait partie de l'Arcadie, comme les Arcadiens le prétendaient, le lien était déjà brisé à cette époque, et que la communauté d'origine était presque effacée des souvenirs. Les Éléens étaient de race pélasgique, comme les Arcadiens, et se croyaient également autochtones. Hercule prit et pilla Élis, battit les Pyliens de l'Élide,
qui la secoururent, et n'épargna les Piséens, qui suivirent cet exemple, que
par respect pour un oracle de Les rois que je viens de nommer ne possédaient pas toute l'Élide, mais probablement le seul territoire d'Élis. Les autres princes, moins puissants et souverains de villes qui restèrent obscures, furent eux-mêmes promptement oubliés. Cependant nous lisons qu'Augias, menacé par Hercule, avait appelé à son secours Actor et ses fils, souverains de l'Élide. Après sa mort, le pouvoir, ou plutôt le pays, est[7] partagé entre quatre rois que l'on retrouve cités par Homère[8]. Des quarante vaisseaux qui composaient la flotte des Éléens, vingt suivaient Amphinuchus et Thalpius, dix suivaient Diorès, fils d'Amaryncée, dix Polyxénus, fils d'Agasthène et petit-fils d'Augias. Dius fut le dernier roi aborigène : le contrecoup de l'invasion dorienne le fit tomber du trône. L'histoire de l'usurpateur qui prit sa place est singulière. Les Héraclides, qui se souvenaient de leur défaite à l'Isthme cinquante ans auparavant, ne savaient comment pénétrer dans le Péloponnèse. L'oracle leur. avait conseillé de prendre pour guide de leur entreprise celui qui avait trois yeux. Naturellement, leur embarras allait croissant, lorsque le hasard leur fit rencontrer un homme qui conduisait un mulet borgne. Cet homme, nommé Oxylus, leur conseilla de rentrer par mer dans le Péloponnèse, conduisit leurs. vaisseaux de Naupacte à Molycrium, et obtint en récompense le pays des Éléens qu'il avait habité un an et dont il connaissait la fertilité. Mais, craignant que les Doriens, s'ils voyaient l'Élide, ne voulussent plus la lui donner, Oxylus les conduisit à travers les montagnes de l'Arcadie. Après leur établissement en Messénie, en Laconie, en Argolide, il alla prendre possession de ses États à la tète d'un corps d'Étoliens convint avec Dius d'éviter une bataille générale et de choisir de chaque côté un combattant qui déciderait de leurs droits. Son champion fut vainqueur, et il monta sans obstacle sur le trône. Il eut l'esprit de respecter les coutumes du pays[9] et de combler Dius d'honneurs ; la ville d'Élis, accrue par les Étoliens qui l'avaient suivi, par les habitants des bourgs qu'il eut l'art d'attirer dans ses murs, devint bientôt peuplée et florissante. Parmi les descendants d'Oxylus, le seul Iphitus mérite d'être nommé. Contemporain de Lycurgue, il remit en vigueur, d'après ses conseils, les jeux Olympiques. Un siècle après, en 780, nous trouvons la dignité royale abolie chez les Éléens, sans que l'histoire explique cette révolution. Ils choisirent deux magistrats suprêmes[10], qui étaient en même temps présidents des jeux : c'est pourquoi on leur donna le nom d'Hellanodices. Il y en eut d'abord deux, ensuite dix, un par tribu. Ce nombre varia encore, suivant les changements que subit la division en tribus. On élut aussi un sénat composé de quatre-vingt-dix membres, dont les fonctions étaient à vie ; Aristote en fait mention. L'histoire des Éléens ne devint celle de toute l'Élide qu'après la destruction de Pise. La rivalité des deux villes est célèbre, et, pour la suivre, il faut remonter plusieurs siècles. Œnomaüs est le premier roi de Pise qui nous soit connu. Il
était contemporain d'Épéus, roi des Éléens. Tout le monde sait comment Pélops
conquit sa fille et son trône ; mais ce qu'il faut remarquer surtout, c'est que
Pélops, fils de Tantale, chassé de Les enfants de Pélops, grâce aux richesses de leur père, trouvèrent des trônes dans le Péloponnèse : ainsi Pitthée, Trœzen, Atrée, Thyeste ; mais on ne sait pas quel fut son successeur dans le petit royaume de Pise, qui pendant plusieurs siècles resta enseveli dans l'oubli. Pausanias cite un certain Pantaléon[12], qui, dans la
34e olympiade, s'empara de la tyrannie et la transmit à ses fils Démophon et
Pyrrhus. Sous ce dernier, Pise fut vaincue et détruite, et il semble qu'elle
ait tout fait pour s'attirer ce désastre, en bravant à plaisir les Éléens.
Dès la 8e olympiade, les Piséens avaient appelé Phidon d'Argos[13], le plus violent
des tyrans de Dès lors, les Éléens, maitres de toute l'Élide, se
livrèrent entièrement à la paix, à l'agriculture[15] et à la
célébration des fêtes solennelles qui attiraient toute Agis avait entrepris cette expédition, disait-il, pour venger Lycas, athlète lacédémonien que les Hellanodices avaient fait frapper de verges. Comme les Éléens avaient exclu les Lacédémoniens des jeux, il s'était donné pour Thébain ; la sévérité avec laquelle cette supercherie fut punie prouve avec quelle autorité les Éléens maintenaient leurs privilèges contre les plus puissants États. Mais l'âge d'or de l'Élide ne devait plus renaître. Affaiblis par des divisions intestines, dont les causes et les détails sont ignorés, ils subirent l'alliance de Philippe, roi de Macédoine ; et, si leur patriotisme refusa de combattre avec lui à Chéronée, leur haine contre Lacédémone les poussa à le suivre dans son invasion en Laconie. Après la mort d'Alexandre, ils s'unirent aux Grecs contre Antipater. Leur fin fut obscure, et la domination romaine les trouva prêts pour la servitude. Peut-être cette période de leur histoire fut-elle la plus heureuse, sinon la plus honorable. Ils retrouvèrent forcément cette paix intérieure et extérieure qu'ils avaient depuis longtemps oubliée. Leurs fêtes et leurs pompes leur restaient, occupations qui ressemblaient à la vie politique, source de richesse, sacerdoce que les Romains eux-mêmes continuèrent de respecter. |
[1]
Histoire des premiers temps de
[2] L. VIII, p. 53.
[3] L. III, c. 12, § 1.
[4] Am. rom., l. I, c. 61.
[5] Pausanias, Elid., l. I, c. I.
[6] Les Éléens s'appelèrent pendant quelque temps Épéens, du nom de ce prince. Homère leur conserve ce nom.
[7] Pausanias, Elid., I, c. I.
[8] Iliade, II, v. 620.
[9] Quant aux généalogies qui rattachaient à la fois Oxylus aux Héraclides, ses protecteurs, et aux Atlandides, premiers souverains du pays, c'est une de ces flatteries que les courtisans prodiguent aux rois, dans les temps civilisés, et que les conquérants ménagent à leurs peuples, dans les temps primitifs où le pouvoir a besoin de prestige.
[10] Pausanias, Elid., I, c. IX.
[11] Thucydide, l. I, § 9.
[12] Pausanias, Elid., II,
c. XXI.
[13] Pausanias, Elid., I, c. XXII.
[14] Pausanias, Elid., I, c. XVI.
[15] Polybe, l. IV, § 73.
[16] Dans le principe, au contraire, tous les Péloponnésiens s'étaient refusés à le reconnaître et à se soumettre à la trêve sacrée. Il fallut une peste, avertissement des dieux, et la voix toute-puissante de l'oracle de Delphes pour les persuader.
[17] Phlégon de Tralles, Fragm. sur les Olympiques, dans Gronovius.