LOUIS XVII, SA VIE, SON AGONIE, SA MORT

CAPTIVITÉ DE LA FAMILLE ROYALE AU TEMPLE

TOME PREMIER

 

LIVRE QUATORZIÈME. — SOLITUDE DE LOUIS XVII. - MORT DE MADAME ÉLISABETH.

30 nivôse - 9 thermidor an II (19 janvier - 27 juillet 1794).

 

 

Simon n'a pas de successeur. — La porte de Louis XVII est scellée et grillée. — Isolement absolu. — Ennui et peur. — Hébert et ses partisans guillotinés. — Danton. — Chaumette. — Adresse de la Commune de Paris à la Convention nationale. — Procès et exécution de Madame Elisabeth. — La Terreur. — Catherine Théot. — Les municipaux ; visites nocturnes. — Souffrance inexprimable du jeune Roi. — Démarche de M. Le Monnier. — Tableau de la France au moment du 9 thermidor.

 

On a vu les tourments que le fils de Louis XVI a subis sous l'autorité de Simon ; on a vu avec quelle patience il les souffrit jusqu'au moment où il ploya, pour ainsi parler, sous le poids des souffrances humaines, et où son corps brisé laissa fléchir son âme. On a vu, dans ce duel effroyable, le bourreau souvent vaincu par la victime. Cet excès de misère n'est encore qu'un commencement ; tout ce que ce malheureux enfant a enduré n'est rien auprès de ce qui l'attend. Il n'a eu à combattre que les hommes : il va avoir à lutter contre l'abandon, contre le silence, contre l'ennui de la solitude et les fantômes de la peur.

Les comités décidèrent que Simon n'aurait point de successeur. C'était un homme si difficile à remplacer ! Chaumette et Hébert, qui dirigeaient tout ce qui concernait le Temple, acceptèrent cette décision, qui ne laissait aucun intermédiaire entre l'autorité municipale et la tour du Temple.

Ils déclarèrent qu'ils prendraient des moyens infaillibles pour avoir la sûreté que l'absence d'un gardien permanent leur refusait, et, dès le lendemain, c'est-à-dire le 1er pluviôse an II (20 janvier 1794), ils firent restreindre à une pièce le logement  du prisonnier : l'enfant fut relégué dans la chambre du fond, qui avait été celle de Cléry, et, plus tard, celle de la femme il Simon pendant sa maladie. La porte de communication entre l'antichambre et cette pièce fut coupée à hauteur d'appui, scellée à clous et à vis, et grillée de haut en bas avec des barreaux de fer. A la hauteur d'appui fut posée une tablette sur laquelle les barreaux, en s'écartant, formaient un guichet fermé lui-même avec d'autres barreaux mobiles que fixait un énorme cadenas. C'est par ce guichet qu'on faisait parvenir au petit Capet ses mets grossiers, et c'est sur ce rebord qu'il devait remettre ce qu'il avait à renvoyer. Le système cellulaire, dont se plaignent aujourd'hui les natures les plus fortes, avait été, on le voit, inventé par le génie révolutionnaire, qui a épuisé les ressources de la souffrance, et il avait été inventé contre un enfant. Bien que restreint, son appartement était encore vaste pour une tombe. Comment pouvait-il se plaindre ! Il avait une chambre où se promener, un lit où reposer, il avait du pain, il avait de l'eau, il avait du linge, il avait des vêtements. On ne lui donnait ni feu ni lumière ; sa chambre n'était chauffée que par le tuyau d'un poêle placé dans la première pièce ; elle n'était éclairée que par la lueur d'un réverbère suspendu en face des barreaux ; c'est entre ces barreaux aussi que passait le tuyau du poêle.

Tout cet arrangement fut arrêté et entrepris dans la journée du 1er pluviôse ; il fut achevé le soir même à la clarté des lanternes ; et, soit calcul atroce, soit fatale coïncidence, le royal orphelin inaugura sa nouvelle prison le jour même où son père était monté sur l'échafaud (2 pluviôse an II, - 21 janvier 1794).

Mais il n'y avait pour lui ni date ni anniversaire ; l’année, les mois, la semaine, tout était confondu dans sa pensée ; le temps, semblable à un lac aux eaux dormantes et silencieuses avait cessé de couler. Les jours ne se marquaient pour lui que par les souffrances ; ils ne se distinguaient plus les uns des autres, puisqu'il souffrait tous les jours.

Il est présumable cependant qu'il avait vu sans effroi et les changements qu'on opérait dans sa demeure et la solitude dans laquelle on l'enfermait. Depuis que le malheur, en le séparant de sa mère, avait clos pour jamais les temps insoucieux de son enfance, le Prince n'avait pas encore éprouvé ce moment de calme. Hélas ! il se crut peut-être à l'abri des hommes. Il se sentit libre enfin dans sa prison, comme au creux d'une vallée un jeune daim échappé aux chiens des chasseurs. Peut-être pensa-t-il même que son isolement n'était qu'une transition à un état plus doux, que sais-je ? une amélioration due à une influence qui pouvait plus tard lui rendre sa mère et sa liberté. L'espérance vient si vite à ceux qui n'ont pas encore une longue habitude de la vie, et qui, grâce à leur âge, sont nouveaux dans le malheur !

Nous entrons dans une période de maux qu'il nous devient difficile de décrire et d'énumérer : misère terne, sombre, monotone, privée du pompeux appareil qui entoure d'ordinaire les infortunes royales.

Qui dira jamais les tortures étouffées dans ce cachot ! Qui dira jamais les combats, intérieurs qui se sont livrés dans cette jeune âme, et les invisibles angoisses qui ont déchiré ce cœur que Dieu avait fait si plein de courage et de mansuétude ! Pendant plus de six mois (depuis le 20 janvier jusqu'au 27 juillet 1794), l'air du ciel n'est pas descendu dans cette chambre ; le jour y arrivait à peine à travers les grilles et les abat-jour, dont l'épaisseur et la solidité étaient l'objet d'une surveillance incessante  de la part du conseil[1]. La victime ne voyait pas même la main avare qui lui faisait passer ses chétifs aliments par l'espèce de tour pratiqué dans la porte grillée, ni la main imprévoyante qui, chargée d'allumer le poêle, le laissait parfois sans feu par un froid rigoureux, et parfois, à force de l'entretenir, faisait une étuve de la prison. Il n'entendait jamais d'autre bruit que celui des verrous. Seulement, vers la fin du jour, une voix sévère lui criait de se coucher, parce qu'on ne voulait pas lui donner de lumière.

Il était obligé de balayer lui-même sa chambre, s'il voulait y conserver quelque propreté ; mais malheureusement ses forces affaiblies par d'indignes traitements, par la mauvaise nourriture et par le défaut d'exercice, ne purent lui permettre de prendre longtemps ce soin.

On se fait difficilement une idée des tourments de ce pauvre petit être luttant dans l'obscurité d'une prison contre des monstres dont il ne pouvait connaître ni la force ni le nombre ! Chaque soir, ne lui semblait-il pas que c'était une voix nouvelle qui lui ordonnait de se coucher ? N'était-il pas là comme au milieu d'un rêve effrayant ? La solitude ne pesait-elle pas sur son âme comme un poids de plomb ? Privé de tout travail, de tout jeu, de tout objet qui pût l'occuper, de toute parole qui put réveiller son oreille, combien ses journées devaient être longues ! Encore avait-il, tant qu'elles duraient, une faible lueur pour éclairer son abandon. Voir, c'est vivre, c'est penser, c'est posséder, c'est se défendre. Mais le soir, le soir, quand cette apparence de vie qu'entretient un reflet de lumière cesse ; quand les ténèbres et le silence viennent séparer l'homme du monde extérieur et l'enferment seul avec lui-même, oh ! c'est alors, surtout pendant ces longues heures qui précédaient le sommeil, que devaient venir à lui les amères réflexions, la fièvre douloureuse des pensées, puis la peur, la peur aussi tenace que l'ombre, sombre comme la nuit, la peur avec ses vagues menaces et ses insaisissables fantômes, la peur pleine de sursauts, d'excitations, de périls ! On peut croire que bien des traits alors lui ont traversé l'âme, tels peut-être que son ennemi le plus acharné n'y ajouterait pas foi.

Tandis que la pauvre petite victime se débattait, la révolution continuait, et ses acteurs se dévoraient les uns les autres. Robespierre et Danton, s'apercevant qu'Hébert et ses partisans cherchaient à élever la puissance de la Commune de Paris au-dessus de celle de la Convention, se réunirent, malgré leur antipathie mutuelle, pour perdre les ennemis communs. Hébert et les hébertistes, subitement arrêtés, furent condamnés à mort le 4 germinal an II (24 mars 1794)[2]. Les dominateurs de la Convention prétendaient qu'un complot avait été ourdi entre madame la comtesse de Rochechouart et Hébert pour faire évader la famille royale ; que déjà Hébert avait, pour récompense de son adhésion à ce projet, touché un million payé par les princes coalisés, et qu'un autre million lui devait être compté après le succès. Puis on assurait que, la peur ayant saisi le traître, il avait lui-même dénoncé la conspiration.

Couthon, le digne ami de Robespierre, accusa Hébert à la tribune même de la Convention : On a tenté, dit-il, de faire parvenir au Temple, aux enfants Capet, une lettre, un paquet de cinquante louis en or ; le but de cet envoi était de faciliter l'évasion du fils de Capet ; car les conjurés ayant formé le projet d'établir un conseil de régence, la présence de l'enfant était nécessaire à l'installation du régent. Qu'ils tremblent, les scélérats qui voulaient donner u maitre aux Français ! leur dernière heure est sonnée, ils périront[3].

On le voit, la frêle et lamentable existence du petit Capet troublait encore l'existence des-tyrans. Leur dictature devenait de jour en jour plus ombrageuse. Le moindre signe de pitié à l'égard des enfants de Louis XVI était regardé comme un crime. Le 7 germinal (27 mars), c'est-à-dire trois jours après l'exécution d'Hébert, il était question de renouveler la commission des sept membres du conseil général de la Commune qui étaient spécialement chargés de la surveillance du Temple. Cressend, de la section de la Fraternité, est proposé ; sa nomination est combattue, on l'accuse d'avoir osé plaindre le sort du petit Capet, et d'avoir épié ses collègues plutôt que surveillé le prisonnier. Une telle imputation donna lieu, comme on le pense bien, à de vives discussions dont le résultat fut d'exclure Cressend du conseil et de l'envoyer immédiatement à l'administration de la police[4].

Le mois suivant, pareille exclusion eut lieu. Un autre commissaire, qui avait mérité par ses procédés que Madame Royale lui recommandât son frère, essaya de parler contre la solitude, la privation d'air et l'abandon du fils de Louis XVI ; il fut aussitôt éliminé du conseil. A cette époque de liberté, l'exclusion ou la destitution d'un emploi faisait de droit passer dans la classe des suspects ; de là il n'y avait qu'un pas à la prison, qu'un pas de la prison au tribunal révolutionnaire, et le tribunal révolutionnaire était le vestibule de l'échafaud.

Cressend et son complice ne parcoururent pas toutefois cette voie fatale ; leur interrogatoire avait bien démontré que c'étaient deux hommes peu révolutionnaires, mais leurs collègues, par intérêt personnel, hésitèrent à entrer dans un système de proscriptions intérieures qui pouvaient d'un jour à l'autre atteindre les proscripteurs eux-mêmes. Les deux membres éliminés ne furent point incarcérés. L'exclusion du conseil les sauva même de la mort ; car leurs anciens collègues, membres de la Commune, furent, quelque temps après, entraînés par le 9 thermidor vers cet échafaud vengeur où montèrent les oppresseurs de la France.

La mort d'Hébert avait accru le goût du sang. Les chefs de la Montagne commencèrent à s'entre-dévorer ; les ambitieux ne semblaient monter au pouvoir que pour passer de plain-pied à l'échafaud. Quand on s'élève si rapidement, on ne descend pas, on tombe. Le 16 germinal an II (5 avril 1794), Danton était envoyé au supplice comme agent d'une conspiration tendant — qui le croirait ? — au rétablissement de la monarchie ! Robespierre lui avait donné quatorze compagnons de mort[5] ; mais ce cortège suprême ne suffisait pas au grand fondateur du tribunal révolutionnaire, qui s'écria sur la charrette du bourreau : J'entraîne Robespierre, Robespierre me suit ! Quatre mois ne s'étaient pas écoulés, et les prophétiques paroles de Danton s'étaient réalisées.

Danton est une des plus-frappantes victimes de cette loi du talion que la Providence se plaît quelquefois à appliquer aux hommes :

Le 5 juillet 1793 Danton fit instituer le tribunal révolutionnaire, et le 5 avril 1794 le tribunal révolutionnaire envoyait Danton à la mort.

Ce tribunal, d'après l'inique mesure que Danton avait fait adopter, pouvait imposer silence aux accusés, quand ce silence convenait aux juges ; et lorsque l'accusé Danton voulut se défendre, le tribunal lui interdit la parole, conformément à la loi que Danton lui-même avait faite.

Danton avait dit quelquefois : Tout ira bien, tant que l'on dira Robespierre et Danton : malheur à moi, si jamais l'on disait Danton et Robespierre. Dans les révolutions, s'écriait-il encore, l'autorité reste au plus scélérat.

Une singularité très-frappante, dit Riouffe[6], c'est que Danton, Hébert, Chaumette et Robespierre ont été dans le même cachot. Tant de travaux, de dissimulations, d'extravagances et de crimes ont abouti à leur conquérir quatre pieds de terrain à la Conciergerie, et me planche à la place de la Révolution.

La prédiction de Danton était répétée quelques jours après, le 24 germinal (13 avril), par Chaumette, que Robespierre encore envoyait à l'échafaud avec la jeune veuve de Camille Desmoulins, Arthur Dillon et quelques autres, pour lesquels on avait inventé un nouveau crime, la conspiration des prisons[7]. Les ennemis de la révolution, disaient les vainqueurs du jour, semblent renaître de leurs cendres ; ils reparaissent comme le polype sous l'instrument qui le mutile. Et cette crainte même de la royauté prouvait encore l'existence morale de la royauté ; l'ombre d'un enfant enfermé entre quatre murs suffisait pour livrer les anarchistes au trouble aussi bien que la Vendée à l'espérance.

Bien que Chaumette et Hébert eussent disparu des conseils de la Commune, le Temple fut plus que jamais livré aux investigations les plus sévères, au régime le plus rigoureux[8]. Madame Élisabeth ne pouvait plus obtenir aucune nouvelle de son neveu, Madame Royale ne prononçait plus le nom de son frère sans que le silence protestât ou que l'injure répondît. La terreur était partout. Du haut de ses échafauds, ses sanglantes forteresses, la minorité commandait à la nation de se taire, à la liberté de s'agenouiller, à l'humanité de se voiler et de subir des lois sauvages. Le soupçon suffisait pour remplir les prisons, le bourreau pour les vider. Les Collot d'Herbois, les Lebon, les Saint-Just, les Carrier, allèrent porter dans les grandes villes l'épouvante et la mort. La tache de sang qui est tombée sur une place de Paris s'élargit jusqu'à couvrir toute la France. La guillotine stationne sur la place publique ; son couteau infatigable descend, remonte et redescend sans cesse entre ses deux poteaux et le long de ses rainures humides. Magistrats et généraux, clergé, peuple et noblesse, citadins, campagnards, jeunes filles beaux printemps de l'année, vieillards aux confins de la vie, tous périssent moissonnés ensemble, populations de martyrs qui suivent dans leur pèlerinage un Roi et une Reine. La sublime tâche que M. de Malesherbes avait accomplie, l'échafaud venait de lui en donner le prix[9] (3 floréal an II - 22 avril 1794). Je n'aime point à entendre dire que la France attaquée par l'Europe dut son triomphe à ses excès. Non, ce ne sont pas les massacres de septembre qui empêchaient la liberté de périr ; non, ce n'est pas le bourreau qui enfantait l'héroïsme de nos armées ; ne mentons pas à l'histoire, ne calomnions pas le patriotisme. Disons au contraire, pour être juste, aux dictateurs de ce temps : Les exploits de la France contre l’étranger peuvent à peine racheter vos crimes contre vos concitoyens ; ses victoires se multiplient sans pouvoir répondre à vos assassinats, et son glorieux drapeau n'a pas assez de plis pour cacher toutes les hontes dont vous salissez la patrie.

Depuis la mort de la Reine, les deux augustes prisonnières ignoraient absolument comment allaient les choses au dehors de la tour du Temple. J'ai dit qu'elles ne pouvaient savoir même ce qui se passait à côté d'elles, dans la chambre du jeune orphelin ; elles vivaient de leurs souvenirs, de leurs craintes, mêlées de bien peu d'espérances, mais d'une entière soumission à la volonté de Dieu. C'est à cette pieuse résignation que nous devons la belle prière que l'histoire a conservée de Madame Elisabeth. Retenue autrefois à la cour par son dévouement pour son frère, elle n'y avait vécu que pour prendre sa part des tribulations et des larmes. Aujourd'hui, tout ce que la tendresse a de plus touchant, tout ce que la religion a de plus sublime, tout ce que la sensibilité a de plus consolateur, Madame Élisabeth le mettait en œuvre pour former le cœur et l'esprit de sa royale nièce, dont elle était devenue la mère de par le bourreau.

Le nouvel orage qu'elle attendait pour terminer ou changer son sort éclata bientôt.

Déjà, dès le quintidi frimaire de l'an II (25 novembre 1793), la Commune de Paris avait adressé à la Convention nationale la pétition suivante :

LÉGISLATEURS,

Vous avez décrété l'égalité source du bonheur public ; elle s'établit sur des bases désormais inébranlables, et cependant elle est violée, cette égalité, et de la manière la plus révoltante, dans les vils restes de la tyrannie, dans les prisonniers du Temple. Pourraient-ils encore, ces restes abominables, être comptés pour quelque chose dans les circonstances actuelles, ce ne serait qu'en raison de l'intérêt que la patrie aurait d'empêcher qu'ils ne déchirassent son sein et ne renouvelassent les atrocités commises par les deux monstres qui leur ont donné le jour. Si donc tel est à leur égard le seul et unique intérêt de la République, c'est sous sa surveillance entière qu'ils doivent être placés, et ils ne sont plus, ces temps horribles où une faction liberticide, dont le glaive de la loi a fait justice, avait choisi comme moyen de vengeance, contre une Commune patriote qu'elle abhorrait, une responsabilité qui outrageait toutes les lois et qui pèse depuis plus de quinze mois sur la tête de chacun des membres de la Commune de Paris.

La raison, la justice, l'égalité vous crient, législateurs, de faire cesser cette responsabilité.

Et comme il est plus que temps de rendre à leurs travaux deux cent cinquante sans-culottes qu'on emploie injustement chaque jour à la garde des prisonniers du Temple, la Commune de Paris attend de votre sagesse :

1° Que vous enverrez au plus tôt l'infâme Élisabeth au tribunal révolutionnaire ;

2° Qu'à l'égard de la postérité du tyran, vous prendrez des mesures promptes pour la faire transférer dans telle prison que vous aurez choisie, pour y être renfermée avec les précautions convenables, à l'effet d'y être traitée dans le système de l'égalité et de la même manière que les autres détenus dont la République a eu besoin de s'assurer.

DUNOUY[10]. RENARD[11]. LE CLERC[12].

LEGRAND[13], r. de la Commune. DORIGNY[14].

 

Cette adresse avait été envoyée le jour même au Comité de sûreté générale. Elle y avait sommeillé six mois, mais les vœux qu'elle exprimait n'étaient point oubliés dans la région la plus ardente de la révolution. Le 20 floréal an II (9 mai 1794), vers sept heures du soir, l'huissier Monet se rendit au Temple, accompagné des citoyens Fontaine, adjudant général d'artillerie de l'armée parisienne, et Saraillée, aide de camp du général Hanriot ; il présenta aux membres du conseil, Mouret, Eudes, Magendie et Godefroi, une lettre de Fouquier, accusateur public près le tribunal révolutionnaire, portant invitation de remettre entre les mains desdits susnommés la sœur de Louis Capet[15].

La Princesse se disposait à se coucher, lorsqu'elle entendit ouvrir les verrous. Elle se hâta de passer sa robe. Citoyenne, descends tout de suite, on a besoin de toi, lui dirent d'un ton brusque ses sinistres visiteurs. Ma nièce reste-t-elle ici ?Cela ne te regarde pas ; on s'en occupera après. Madame Élisabeth embrassa la pauvre orpheline, et, pour calmer ses inquiétudes, lui dit : Soyez tranquille, je vais remonter. — Non, tu ne remonteras pas, répond le commissaire Eudes[16], prends ton bonnet et descends. Elle obéit, relève Madame Royale, qui tombe dans ses bras, lui dit d'avoir du courage et de la fermeté, d'espérer toujours en Dieu, de se servir des bons principes de religion que ses parents lui ont donnés, et d'être fidèle aux dernières recommandations de son père et de sa mère. La tante et la nièce demeurent un instant embrassées, puis la tante, s'arrachant brusquement à cette étreinte, se dirige d'un pas rapide vers la porte extérieure, en disant encore : Pensez à Dieu, mon enfant !

Madame Élisabeth est partie. On la fait entrer au bas de l'escalier dans la salle du conseil ; là, pendant que l'on rédige le procès-verbal de décharge du geôlier, on visite ses poches et on l'accable d'injures. Elle traverse, sous une pluie battante, le jardin et la première cour ; elle monte en fiacre avec l'huissier du tribunal et les deux officiers, est conduite à la Conciergerie, interrogée par Gabriel Deliége, vice-président du tribunal révolutionnaire, et le lendemain elle paraît devant les juges, accusée de complicité dans les crimes de sa famille. Chauveau-Lagarde, nommé d'office son défenseur, fait observer qu'il n'y avait au procès ni pièces ni témoins, et que là où il n'existait aucun élément légal de conviction, il ne pouvait y avoir de conviction légale. Il termine ainsi : Celle qui a été à la cour de France le plus parfait modèle de toutes les vertus ne peut pas être l'ennemie des Français. A ces mots, Dumas[17], qui présidait le tribunal, se lève avec indignation et reproche violemment au défenseur de corrompre la morale publique. On abrège les formalités ; on clôt bien vite un débat inutile, dans lequel on avait même interdit toute conférence entre le défenseur et l'accusée, et l'on prononce l'arrêt de mort. On avait associé à sa condamnation vingt-quatre personnes. Réunie à elles, Madame Elisabeth les édifie par sa touchante résignation. Dans la charrette du supplice, elle les exhorte, elle les console. A la descente du pont Neuf, dit un témoin oculaire[18], le mouchoir blanc qui couvrait la tête de la Princesse se détacha et tomba aux pieds de l'exécuteur, qui le ramassa. Dès ce moment, Madame Elisabeth, demeurant seule la tête nue au milieu de ses compagnons d'infortune, attira par là même tous les regards, et c'est ainsi que tant de personnes, qui sans ce hasard ne l'eussent peut-être point remarquée, ont pu rendre témoignage du calme et de la sérénité de ses traits. Arrivées au pied de l'échafaud, les femmes, parmi lesquelles on comptait la vénérable sœur de M. de Malesherbes — madame de Sénozan — et la veuve de M. de Montmorin[19], ancien ministre des affaires étrangères, lui demandent la permission de l'embrasser, ce qu'elle leur accorde, en les encourageant avec sa honte ordinaire. On raconte que, comme la fournée était considérable, on avait, ce jour-là, placé auprès de la guillotine une banquette pour faire asseoir les condamnés. Les victimes se levaient une à une, à l'appel de leur nom, et, en passant devant Madame Elisabeth, toutes s'inclinaient profondément avant de monter à l'échafaud. Madame Elisabeth se leva la dernière. Comme on l'attachait à la planche, le bourreau fit un geste qui mit à nu ses épaules : Au nom du ciel, dit-elle, couvrez-moi.

 

Les portes du Temple s'étaient refermées sur la jeune Marie-Thérèse, désormais condamnée à lutter seule contre la douleur et l'iniquité. L'isolement commençait pour la sœur comme il avait commencé pour le frère depuis le 20 janvier 94 ; mais la sœur du moins voyait encore ou l'espion qui venait la surveiller, ou le guichetier qui lui apportait sa nourriture ; tandis que son pauvre petit frère, retranché de tout contact avec l'humanité, comme le lépreux du moyen âge, ne connaissait pas la - figure des bourreaux qui le réveillaient la nuit, ou qui, le jour, lui apportaient des aliments pour lui donner la force de souffrir encore.

Pendant que l’on guillotinait Madame Elisabeth, Madame Royale demandait aux municipaux ce qu'elle était devenue ; ils lui dirent : Elle a été prendre l'air. Madame Royale renouvela sa demande d'être réunie à sa mère, puisqu'elle était séparée de sa tante ; ils lui répondirent qu'ils en parleraient.

Le lendemain, c'est-à-dire le 22 floréal (11 mai), elle reçut la visite de Robespierre. Elle ne lui adressa pas un seul mot. Elle lui remit seulement un papier sur lequel elle avait écrit :

Mon frère est malade. J'ai écrit à la Convention pour obtenir d'aller le soigner ; la Convention ne m'a pas encore répondu. Je réitère ma demande. Après avoir donné ce papier, elle détourna la tête et se remit à lire.

Les catastrophes se succédaient sans relâche, le sang coulait dans toutes les cités, le deuil entrait par toutes les portes. Mais la peur étouffait les sanglots et les gémissements. Pour peindre ces jours de calamités, inouïs dans l'histoire, la voix du peuple n'a pu trouver d'autre nom que le nom de la terreur. Le moindre soupçon d'attachement à la monarchie suffisait pour ouvrir la prison et dresser l'échafaud. La royauté cependant avait encore des amis prêts à se dévouer pour elle ; mais je ne sais quelle fatalité s'attachait à leurs projets, toujours mal formés, ou dérangés ou trahis. M. le baron de Batz fut un des plus infatigables, des plus actifs, des plus adroits de ces vertueux conspirateurs. Ses plans comme sa personne échappaient aux investigations des comités[20]. Furieux de ne pouvoir s'en prendre à cet ennemi invisible, Robespierre s'en prit du moins à son ombre, autour de laquelle il groupa une multitude de victimes désignées à la hache du bourreau. Un rapport fut fait à la Convention par Élie Lacoste, le 26 prairial an II (14 juin 1794), au nom des comités de salut public et de sûreté générale réunis. Ce rapport aussi long qu'incohérent, et qui repose sur des données qui furent réfutées plus tard[21], livra au tribunal révolutionnaire de nombreuses victimes, étrangères les unes aux autres, différentes de relations, de rang et d'opinion, et cependant accusées par les comités d'avoir agi de complicité, condamnées à mort, par amalgame et en masse, selon les expressions de Fouquier-Tinville, et exécutées le 29 prairial an II (17 juin 1794), comme coupables d'avoir tenté le rétablissement de la royauté[22].

Deux jours auparavant, c'est-à-dire le 27 prairial, Vadier avait fait encore un rapport sur l'affaire de Catherine Théot[23], dite la Mère de Dieu, véritable illuminée de ce temps, se disant appelée à régénérer le genre humain, et dont Villate — dans ses Mystères de la Mère de Dieu dévoilés — trace ainsi le portrait : Cette mère Théot, grande, sèche, presque diaphane, comme la sibylle de Cumes. Vadier imagina de faire de cette pauvre femme, logée dans un galetas de la maison n° 1078 de la rue Contrescarpe Saint-Jacques, section de l'Oratoire, où elle tenait ses conciliabules, l'instrument de la plus absurde et la plus atroce conspiration qu'ait inventée le génie révolutionnaire. C'est à propos de cette affaire comme de la précédente que Robespierre s'écria : Des conspirations chimériques pour en cacher de réelles. En effet, Vadier ne se proposait rien moins que de faire exterminer les prêtres dans toute la France, afin de rendre hommage au principe posé par la Convention A le 19 novembre, que toutes les religions sont nulles et qu'il n'y a point dé Dieu. Étonné de voir transformer une vieille folle en sérieuse conspiratrice, Barère dit à Vadier : Ainsi, la Mère de Dieu n’enfantera pas son Verbe divin. Vadier répondit de même, avec une métaphore ironique : L’œuf que la poule couve n'aura pas de germe.

Hélas ! cette prophétie ne devait que trop se réaliser ; mais les oracles de la vieille sibylle devaient s'accomplir aussi lors qu'elle annonçait que l’Être Suprême régirait seul l'univers, confondant l’orgueil des hommes vains et ignorants, conduisant les armées à la victoire, aplanissant les montagnes, desséchant les mers, fortifiant les justes et les simples ; ils devaient s'accomplir prochainement lorsqu'ils déclaraient que la Convention nationale serait, comme le chêne superbe, foudroyée à son sommet.

Au-dessus dès vagues noires et mugissantes de l'océan révolutionnaire, nous n'avons point perdu de vue cette petite tête blonde naguère rayonnante de paix et d'innocence, mais aujourd'hui dépouillée de son auréole et livrée à toutes les horreurs de la captivité ; car il n'a pas eu le bonheur, lui, d'être assassiné comme son père et comme sa mère. Son père et sa mère régneront encore dans l'avenir par les terribles magnificences, de- leurs malheurs, comme ils ont régné un instant par les splendeurs de la fortune. Leur longue agonie retentira dans les-âges, l'histoire de tous les peuples s'en indignera avec une colère unanime, et leur martyre sera racheté par l'apothéose des siècles futurs.

Mais pour leur enfant point de trône, point d'éclat, point de puissance et point de bruit ; pour toute misère, la misère discrète du cachot. Il ne peut parler qu'à des murs, ou à des hommes plus durs encore que les murs. Pareil aux victimes de la fatalité antique, il se débat dans son impuissance sous la colère d'un dieu ennemi. Pour lit une paillasse et un matelas inondés de ses larmes, et que ses bras affaiblis cessèrent bientôt de remuer ; pour nourriture, une espèce de soupe à l'eau avec des restes de pain, et dont il recevait deux petites portions par jour, avec un morceau de bœuf, un pain et une cruche d'eau : on voit que le louveteau était à peu près traité comme le chien. Les commissaires de la Commune, qui chaque-jout se renouvelaient et rôdaient à la porte de sa loge,' étaient presque tous de ces natures ignobles que le vent de la révolution avait fait monter à la surface de la société. Ceux qui étaient plus stupides que méchants puisaient, ainsi qu'il arrive toujours dans les émotions populaires, une excitation et une violence qui n'étaient pas dans leur nature, et s'irritaient au bruit de leurs propres paroles. Ainsi s'explique comment, dans les temps de vertige, la populace arrive souvent, à son insu, par une exaltation progressive, à l'accomplissement des folies les plus cruelles et des crimes les plus inouïs. Quelques municipaux, surpris de l'attitude et de la résignation muette de l'enfant prisonnier, se troublaient parfois un moment dans leur rôle ; mais, gourmandés sur leur faiblesse par un remords civique ou par la peur, ils recommençaient à vociférer eux-mêmes pour se donner la force d'accomplir leur mission. Comme ils voyaient dénoncer au nom de l'humanité, et égorger au nom de la fraternité, ils devaient se dire qu'il était simple et juste qu'on emprisonnât au nom de la liberté. A force de contempler les plus hardis outrages, ils apprenaient à les oser. Puis c'était le fils du tyran confié par la nation à leur surveillance, et dont ils étaient responsables corps pour corps : le conseil général avait en effet décidé que la responsabilité qui incombait naguère à Simon incomberait désormais aux commissaires de garde au Temple. Peu importait à ceux-ci la nourriture, et le sommeil, et la santé, et la vie même de l'enfant : toute leur vigilance ne s'exerçait que sur son corps, et se bornait à veiller sur sa personne, morte ou vive. Ils devaient un corps à la Convention, vivant ou mort, peu lui importait ; pourvu qu'ils le lui représentassent à la fin de la journée, elle aurait reçu, sans chicaner, un cadavre. Les commissaires qui n'étaient pas cruels par nature le devenaient par peur : à la tombée de la nuit, ils se faisaient ouvrir par Gourlet ou Baron la pièce qui précédait le cachot du Prince ; ils regardaient par la grille ce que faisait le malheureux enfant, et ils lui criaient de se coucher, parce qu'ils ne voulaient pas lui donner de lumière. La victime s'étendait sur son grabat, et ses surveillants se retiraient. Mais ce n'était pas là la dernière ronde des agents de la Commune : la crainte de perdre un dépôt reçu le jour même, et qu'ils devaient transmettre le lendemain, la terrible responsabilité qui pesait sur eux, les jetaient dans des inquiétudes qui livraient leur victime à des tourments continuels. Disons aussi que l'irrégularité avec laquelle les municipaux étaient relevés ajoutait au supplice du jeune prisonnier. Ce n'était, la plupart du temps, qu'à une heure avancée de la soirée que les nouveaux commissaires étaient désignés par le conseil général, de sorte qu'ils n'arrivaient au Temple qu'au milieu de la nuit. Alors les nouveaux venus avaient à constater la présence du captif pour en donner décharge à leurs devanciers. Précédés d'un porte-clefs, ils montaient ensemble au chenil du louveteau ; il leur était indifférent qu'il dormît on qu'il fût éveillé : éveillé, c'était la peur qu'on lui apportait ; endormi, c'était la peur et la privation du repos tout ensemble. Une voix impitoyable l'appelait tout à coup afin de s'assurer qu'on ne l'avait pas enlevé. Si parfois, plongé dans l'oubli que donne le sommeil, il différait un instant de répondre, un bras inquiet ouvrait avec fracas le guichet du tour, et une voix terrible s'écriait : Capet ! Capet ! dors-tu ? où es-tu donc ? race de vipère, lève-toi ! L'enfant, réveillé en sursaut, descendait du lit et arrivait tout tremblant, les pieds plus froids que le plancher humide sur lequel ils se traînaient : Me voilà, citoyen, répondait-il d'une voix douce. — Viens ici que je te voie. — Me voici, que me voulez-vous ?Te voir, répliquait le cerbère en inclinant sa lanterne à l'entrée du tour : c'est bon, va te coucher, housse ! décanille !

Deux ou trois heures après, les énormes clefs grinçaient de nouveau bruyamment, et la porte de fer tournait encore sur ses gonds : c'était le tour de quelques commissaires attardés, qui, non moins zélés ou aussi curieux que les premiers arrivés, voulaient voir le prisonnier ; ils apportaient ainsi le trouble dans un repos qui commençait à renaître, et la frayeur dans une imagination qui commençait à s'apaiser. L'enfant était encore obligé de se lever et de passer à l'inspection. Dans la visite faite en commun par les municipaux de garde et par ceux qu'ils relevaient, parfois l'entretien se prolongeait : mille questions oiseuses s'échangeaient entre les collègues, et amenaient un long interrogatoire, où l'enfant avait à subir, demi-nu, et tout trempé de la moiteur du sommeil glacée par la nuit, les paroles brutales qui lui troublaient l'esprit, les durs propos qui lui blessaient le cœur, et jusqu'aux dangereuses clartés de la lanterne, qui, dirigées sur sa pâle figure, éblouissaient à les aveugler ses pauvres yeux malades, auxquels depuis si longtemps n'était arrivé un seul rayon de soleil ! Et quelquefois encore un geste menaçant, un rire satanique accompagnaient de loin, jusqu'à son misérable lit, ce frêle fantôme de roi tombé dans le dernier des opprobres, et qui n'avait pas l'âge de mourir : le bourreau n'eût pas voulu de lui.

Souvent, par négligence, on différait de lui apporter sa chétive nourriture quand il en avait le plus pressant besoin ; n'importe, il ne faisait aucun reproche, il n'ex primait aucun désir. Mais alors, pressé par la faim, il mangeait quelquefois plus vite et plus que de coutume.

Cependant des jours s'étaient écoulés, et puis des jours, et puis des semaines, et puis des mois. La privation d'air, l'abandon, la solitude, avaient amaigri le corps, énervé l'esprit, desséché le cœur. Au fond des pauvres yeux, cavés par la douleur, par l'obscurité, par l'ennui, les larmes ne se faisaient plus jour. Les mains affaiblies ne soulevaient plus qu'avec peine les plats de terre commune qui contenaient ses aliments, et la cruche d'eau plus lourde qu'un garçon de cuisine apportait silencieusement chaque jour sur le rebord du guichet, avec l'injonction, sous peine de mort, de ne lier aucun entretien avec le prisonnier.

Depuis longtemps l'enfant avait cessé de balayer sa chambre ; il n'essayait plus de remuer la paillasse de son lit ; l'idée ne lui venait plus de soulever seulement son matelas ; ses forces, d'ailleurs, ne lui auraient plus permis de le faire. Il ne pouvait renouveler ses draps qui étaient sales, et sa couverture qui tombait en lambeaux. Pendant quelque temps on lui avait donné, par le tour, du linge blanc ; plus tard on ne put obtenir de lui le linge sale, et dès lors on cessa de le remplacer. Il ne pouvait réparer ses vêtements troués, ni se laver et se nettoyer. Bientôt il n'ôta plus son pantalon déchiré et sa carmagnole en loques. Le jour vint où il ne songea plus à traverser le couloir qui conduisait aux latrines placées dans la tourelle. Ses forces épuisées le condamnaient à une désolante immobilité. Quelquefois son regard se portait sur le guichet, veillant, guettant, -désireux tout à la fois et craignant d'entendre une voix humaine ; puis II s'abandonnait encore à cette oisiveté somnolente, pleine de -secousses et de tressaillements : il s'étendait tout habillé sur son lit durci, et il s'y endormait la plus grande partie de la journée, se préparant ainsi pour la nuit cette insomnie cruelle que venaient troubler encore les visites de ses gardiens. Ses instincts comme ses forces ne suffisent plus qu'à peine à ses besoins. Des débris de sa nourriture sont répandus par terre ou restent sur son lit. Les rats et les souris infestent sa chambre ; ces animaux, attirés par la mauvaise odeur, par les viandes et le pain qu'on servait au petit prisonnier, avaient fait des trous dans les encoignures du corridor communiquant à sa chambre, où ils s'étaient établis, ils avaient pullulé d'une manière effrayante et venaient partager la nourriture de la victime, qui, pour les éloigner, leur jetait une partie de son pain et des mets qu'on lui servait. Aux rats et aux souris se joignaient de grosses araignées noires, telles qu'on en voit dans les cachots ; ces hôtes immondes couraient la nuit sur le lit de l'enfant, qui souvent prenant le parti de leur abandonner la place, se levait, se plaçait sur sa chaise et passait le reste de la nuit les deux coudes appuyés sur la table[24]. Partout la poussière, la malpropreté : la putridité infecte l'air de cette chambre fétide, dont la fenêtre, depuis bientôt six mois, n'a pas été ouverte ; des draps humides qui ne ressemblent plus à des draps ; un matelas qu'on ne peut dépeindre, et, pour surcroît d'opprobre, la vermine, que tant de saleté a engendrée, environne de toutes parts l'héritier de tant de rois, qui ne peut s'en purger ni s'en défendre ! Tout est vivant dans cette chambre, dit un jour le jeune Caron (l'aide de cuisine) en reprenant la vaisselle et en plongeant un regard au fond de cette geôle affreuse. Oui, tout est vivant dans cette chambre, excepté celui qu'on y tue à petits coups et que l'on y assassine en détail ! Ce bel enfant, tant admiré à Versailles et aux Tuileries, délicieuse créature qui flattait tant l'orgueilleux amour de sa mère qui est au ciel, regardez-le maintenant. Il ne se reconnaîtrait pas lui-même, s'il se voyait dans un miroir ; ce n'-est presque plus une forme humaine ; c'est quelque chose qui végète, des os et de la peau qui bougent. Il faut maintenant des ordres donnés à haute voix, il faut des menaces sévères pour réveiller de son atonie ce petit être chancelant et lui faire rapporter au guichet l'écuelle, le plat de terre et la cruche que la nation généreuse lui envoie comme à un chien dans son chenil. Épuisé par l'effort qu'exige cet acte d'obéissance, il se traîne et retourne péniblement à son grabat, où il retombe en proie aux angoisses qui le torturent et à la vermine qui le ronge. Non, jamais on n'a rêvé une misère plus nue, plus terne, plus menaçante, plus horrible.

Voilà, autant qu'on peut lire dans une histoire fermée, quelles furent les journées et les nuits de ce pauvre petit être pendant cette longue séquestration. Qui pourrait même affirmer qu'elles ne dépassèrent pas encore l'idée que nous cherchons à nous en faire ? Qui sait, chose horrible à penser ! s'il n'a pas plus d'une fois regretté Simon ? Hélas ! sa pauvre mère a vainement prié Dieu de donner à son enfant un jour de bonheur pour tant de jours de souffrances qu'elle-même a comptés. Dieu en a décidé autrement ; mais la colère de Dieu est encore sa miséricorde ; le fils ne sera pas longtemps séparé de sa mère ; lui aussi peut due : J'irai à elle, mais elle ne reviendra point à moi[25].

Malheureux enfant ! depuis qu'il a quitté sa famille, nulle voix amie ne s'est fait entendre à son oreille : nulle voix amie, ni le jour ni la nuit, n'a parlé à son chevet, s'enquérant de ses souffrances et lui donnant du courage. Oh ! c'eût été une trop puissante consolation ; c'est un mal trop doux que celui qui amène autour de notre lit ceux que nous aimons.

Durant ces longues nuits, pleines. de terreur aussi bien que durant ce sombre crépuscule qui lui tenait lieu de jour, il n'a entendu que des bruits de verrous et des voix ennemies qui parlaient dans l'ombre. Plus d'une fois, sans doute, il s'est dressé sur son lit, et ses cheveux, ramenés en arrière par sa main tremblante, dégageaient sa joue pâle et amaigrie ; la sueur ruisselait sur ses tempes ; ses yeux restaient fixes ; il étendait les bras comme pour repousser une attaque menaçante. Puis les fantômes disparaissant, il se recouchait le feu dans la poitrine.

La force de son âme s'usait à ce supplice. Ses ennemis espéraient-ils qu'un si long tourment amènerait le désespoir, et qu'une terreur si grande déterminerait la démence ?

On doit s'imaginer aussi que parfois, sans dormir, il demeurait des heures entières accablé sous l'air épais et humide, sous l'air fétide et mortel qui pesait si lourdement sur sa poitrine ; qu'il ne pleurait plus ; que ses yeux taris n'avaient plus de larmes ; mais que sa lèvre aride, son palais desséché imploraient en vain une goutte d'eau ; qu'il essayait de se soulever sur son lit et ne pouvait y réussir ; qu'avec bien de la peine et bien de la lenteur, il se traînait vers le guichet, rampant sur le carreau froid qui glaçait son corps endolori ; et que plus d'une fois la force lui manqua même totalement pour arriver jusqu'à la cruche contenant l'eau qui lui était donnée. Ces tourments ignorés ne seront jamais dits : on ne saura jamais combien de douleurs ardentes cet enfant a éprouvées à l'aspect de cette cruche qu'il ne pouvait saisir, combien de jours il eut donnés pour une goutte de cette eau qui était près de lui !

Quelquefois, on se le figure aussi absorbé par son mal, mais c'était un rare bonheur. Alors, son œil hagard ne voyait plus, son oreille n'entendait plus ; un engourdissement complet s'emparait de lui et lui faisait oublier jusqu'à sa soif, jusqu'à la vie ! Puis son sang se reprenait à couler, la fièvre le ressaisissait, et en lui permettant de quitter sa couche et de se traîner jusqu'à la cruche remplie d'eau, elle lui rendait aussi la force de sentir ces deux grandes infortunes humaines : la misère et l'abandon.

Aussi, de jour en jour, son énergie s'en alla, son âme s'affaissa énervée par la douleur, ses membres s'engourdirent, sa respiration oppressée eut peine à se faire passage, son esprit se troubla, l'excès de ses souffrances lui en ôta en quelque sorte la conscience.

Il n'a pas la force, il n'a plus même la volonté de crier du fond de ce tombeau ouvert par la violence avant l'heure. Joie et larmes, prières et désespoir, tout est fini ; il n'y a plus là qu'un corps qui se désorganise et une intelligence qui s'éteint. Il cache sa tête entre ses mains, comme s'il avait à éviter la lumière, ou à donner passage à ses sanglots. Il sent l'orage sur sa tête et l'abîme sous ses pieds ; mais voilà tout. Il ne se rend plus d'autre compte des sentiments tumultueux de son âme, et ne cherche pas à savoir d'où partira la foudre qui doit le briser. Dans son anéantissement, il n'a plus même ni la pensée de mesurer ses souffrances, ni l'énergie de les supporter.

Et tout ce que je vous dis là est vrai : ces vexations, ces outrages, ces tortures ont été accumulés sur la tête d'un enfant. Je vous les dépeins non pas même tels qu'ils étaient, mais bien au-dessous de ce qu'ils étaient ; car il faudrait, pour les représenter dans toute leur horreur et dans toute leur honte, il faudrait posséder à la fois le pinceau de Tacite et la verve satirique de Pétrone, ou, mieux encore, la voix gémissante de Job se lamentant sur son fumier et s'écriant : Mon âme préfère la mort, la mort à la vie d'un cadavre, ou disant au ver du sépulcre : Tu es mon frère ; à la corruption : Tu es ma mère et ma sœur.

Peut être tant de tortures avaient-elles révolté son cœur encore plus qu'elles n'avaient épuisé son corps ; peut-être même qu'à son premier effroi avait succédé comme une sorte de contentement amer ; peut-être entrevoyait-il l'avenir sous de si noires couleurs qu'il remerciait instinctivement au fond du cœur le Seigneur d'abréger ses peines. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'il ne proféra aucune plainte, et que, croisant ses deux pauvres petites mains sur sa poitrine, il semblait attendre que la Providence disposât de lui. Plus d'une fois peut-être, en se couchant sur son grabat, pensa-t-il avec bonheur qu'il ne s'en relèverait plus. Quelle révélation, ô mon Dieu ! avez-vous donc faite à un enfant, à force de souffrances, pour que la pensée de la mort lui soit venue ? Et quel crime avait donc commis ce pauvre innocent, pour que vous ayez tant tardé à lui envoyer ce grand libérateur que nous appelons la mort ? C'est que devant votre éternité, Seigneur, tous les jours sont égaux ; les heures qui s'écoulent si cruelles pour cet enfant martyr ne sont cependant pas plus longues que celles qui s'écoulent pour les enfants heureux ! Ou plutôt, c'est que, par le mystère de la réversibilité des souffrances, l'innocent expie les torts du coupable ; et un philosophe vraiment chrétien l'a dit avec un grand sens à ceux qui demandent pourquoi et pour qui l'innocent souffre dans ce monde : Pour vous, si vous voulez[26].

Je comprends Louis XVI, son supplice de roi, son échafaud de martyr : le dogme chrétien de l'expiation m'explique le douloureux mystère de l'immolation du juste. Mais comment comprendre que l'on se plaise à persécuter lentement un enfant, à le flétrir avec persévérance, à compter ses larmes une à une, et à ne le tuer qu'à force d'humiliations et de douleurs ?

Lâches et cruels que vous êtes ! que ne preniez-vous un couteau pour immoler la brebis ? Oh ! que n'avez-vous étendu sur cette petite tête le réseau sanglant dont vous avez enveloppé sa famille ? Pourquoi vous êtes-vous arrêtés dans cette ivresse de meurtre ? Il valait mieux boire cette dernière goutte de sang royal que d'y mêler l'absinthe, le fiel et le poison ; il valait mieux étouffer l'enfant, comme l'avaient fait déjà les émissaires de Richard III à la tour de Londres, que de dégrader et de souiller son intelligence par ce lent assassinat qui cherchait à tuer l'âme avant de tuer le corps. Il fallait le frapper un an, deux ans plus tôt ; il fallait aider ses petits pas à monter les rudes degrés de la guillotine. Ah ! si elle avait pu savoir ce que vous lui réserviez, la fille de Marie-Thérèse, selon l'exemple de sa mère, aurait demandé à prendre son enfant dans ses bras ; elle aurait partagé avec lui sa dernière victoire, et l'ange de Dieu aurait préparé ensemble la couronne des martyrs et la couronne des innocents. Hélas ! l'histoire a été condamnée à regretter pour Louis XVII l'échafaud maternel.

Sans connaitre positivement ce qui se passait dans la tour du Temple, on sut dans le public que la santé du Dauphin déclinait à vue d'œil, et que, morne et languissant, il ne pouvait plus rester ni debout ni assis. Mais nul au dehors ne se faisait une idée de l'état exact de ce malheureux Prince, et du grabat immonde sur lequel il était obligé de rester couché. Cependant, quelques âmes compatissantes s'étaient émues. M. Le Monnier, médecin d'un grand mérite, homme d'un noble cœur[27], était venu de sa retraite de Montreuil solliciter le dangereux honneur de visiter le fils de Louis XVI, et de lui donner des soins. Les régicides méprisèrent ses propositions. Le médecin du dernier roi aurait encore pu sauver ou prolonger les jours de l'enfant royal : leurs intentions infernales auraient donc été combattues par son zèle et ses lumières, et ils étaient bien résolus à ne laisser pénétrer dans la tour un homme de l'art que lorsqu'ils pourraient l'y admettre impunément. Ils ne devaient trouver qu'il était temps de donner des soins au malade que lorsqu'ils seraient bien sûrs qu'il était trop tard.

La famine cependant ravageait la France ; les passions révolutionnaires s'agitaient par les rues et hâtaient l'action mortelle de la misère. Tout était tumulte, désordre, vertige et rage.

Onze mille quatre cents aristocrates de toutes classes étaient entassés dans les palais et dans les couvents de Paris transformés en prisons.

Au front de chaque maison pend un écriteau qui proclame la République une et indivisible, ou la mort. Sur chaque porte est écrite la liste des habitants de la maison, moyen de contrôle si l'on veut savoir, table de proscription si l'on veut tuer[28]. Le crime et la peur sont partout, dans les rues on évite de se reconnaître, ou si l'on s'aborde, on échange deux mots à voix basse ; on marche vite, à moins qu'un crieur proclamant l'arrêt des condamnés, on ne s'arrête pour écouter le nom d'un ami, d'un parent, peut-être son propre nom.

La nuit est aussi troublée que le jour. Des arrestations se font aux flambeaux ; des domestiques vous ont dénoncé aux sections, tandis que d'autres servent sans gages des maîtres restés sans fortune.

Comme si le temps manquait aux juges pour condamner, on adopte le système des jugements en masse : au Luxembourg, cent cinquante-cinq prisonniers sont partagés en trois fournées, par ordre verbal du Comité de salut public. C'est à ce sujet que Collot d'Herbois dit à Fouquier-Tinville : Que vous restera-t-il donc quand vous aurez démoralisé le supplice ?[29]

La guillotine, toujours debout, abat les têtes sans les compter. Le sang qui coule, loin d'étancher la soif des tyrans, semble l'irriter encore. Au milieu de tant d'immolations, la tristesse de la physionomie était devenue une trahison, et la gaieté un devoir. Dans la séance du 25 ventôse an II (15 mars 1794), Barère disait :

Allez aujourd'hui dans les rues de Paris, vous y reconnaîtrez les aristocrates à leur mine allongée. —

Oui, ajoutait Couthon, en temps de révolution tous les bons citoyens doivent être physionomistes : c'est sur la physionomie que vous reconnaîtrez un conspirateur, le complice des traîtres mis sous la loi de la justice ; ces hommes ont l'œil hagard, l'air consterné, des mines basses et patibulaires. Bons citoyens, saisissez ces traîtres, et arrêtez-les ![30] (Vifs applaudissements.)

Il n'y a plus de rois à jeter en holocauste au sphinx de la révolution, et la nation épouvantée se trouve face à face avec la sombre énigme de son existence. La civilisation et la barbarie se cherchent dans les ténèbres pour s'arracher leur secret : duel horrible, pareil à celui de ces deux hommes enfermés dans une cave avec des poignards, et qui ne se voyaient qu'aux éclairs de leurs yeux. — Vous lirez ces choses un jour, nous disaient nos pères, mais vous n'y croirez pas !

L'intelligence politique s'était retirée dans quelques âmes méditatives qui réfléchissaient à l'écart, ou dans quelques cerveaux astucieux qui remuaient la multitude. Le reste n'avait plus de confiance en soi-même, et laissait faire, comme courbé sous la main de Dieu : tremblant et résigné, tout un peuple attendait dans une muette épouvante, pareil à ces Indiens qui lorsque le tigre apparaît se prosternent et restent immobiles jusqu'à ce que la bête rugissante ait choisi sa proie.

La patience des opprimés apparaît dans ces temps horribles comme un phénomène aussi inexplicable que la perversité des oppresseurs. Il a fallu que ceux-ci, en se divisant, travaillassent au salut de l'humanité ; le crime peureux conspira contre le crime menaçant, et le 9 thermidor arriva.

 

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1. Henry Admiral, âgé de 50 ans, natif de Auzolet, département du Puy-de-Dôme, domicilié à Paris, rue Favart, n° 4, ci-devant domestique ensuite attaché à la loterie ci-devant royale en qualité de garçon de bureau.

2. François Cardinal, instituteur et maître de pension, âgé de 40 ans, natif de Bussières, département de la Haute-Marne, domicilié à Paris, rue de Tracy, n° 7.

3. Pierre-Balthasard Roussel, âgé de 26 ans, natif de Paris, y domicilié, rue Helvétius, n° 70.

4. Marie-Suzanne Chevalier, âgée de 34 ans, native de Saint-Sauvan, département de la Vienne, domiciliée à Paris, rue Chabannais, n° 47, femme séparée depuis trois ans de Lamartinière.

5. Claude Paindavoine, âgé de 53 ans, natif de Lépine, département de la Marne, domicilié à Paris, rue Neuve-des-Petits-Champs, n° 19, concierge de la maison des ci-devant loteries.

6. Aimée-Cécile Renault, âgée de 20 ans, native de Paris, y domiciliée, rue de la Lanterne, fille de Antoine Renault et de

7. Antoine Renault, papetier et cartier, âgé de 62 ans, natif de Paris, y domicilié, rue de la Lanterne, section de la Cité.

8. Antoine-Jacques Renault, papetier, âgé de 31 ans, natif de Paris, y domicilié, rue de la Lanterne, fils d'Antoine Renault et de

9. Edme-Jeanne Renault, ex-religieuse, âgée de 60 ans, native de Paris, y domiciliée, rue Babylone, n° 698.

10. Jean-Baptiste Portebœuf, âgé de 43 ans, natif de Thoiré, département de la Seine-Inférieure, domicilié à Paris, rue Honoré, n° 510.

11. André Saintanac, élève en chirurgie et employé à l'hôpital militaire de Choisy-sur-Seine, âgé de 22 ans, natif de Bordeaux, département de Bec-d'Ambès, domicilié audit Choisy, et précédemment à Paris, rue Quincampoix, maison garnie, ci-devant dite de la Couronne.

12. Anne-Madeleine-Lucile Parmentier, âgée de 52 ans, native de Clermont, département de l'Oise, domiciliée à Paris, rue Honoré, n° 510, mariée à Alexandre Lemoine Crécy.

13. François Lafosse, chef de la surveillance de police de Paris, âgé de 44 ans, natif de Versailles, département de Seine-et-Oise, domicilié à Paris, rue du Faubourg-du-Temple, n° 32.

14. Jean-Louis-Michel Devaux, employé, âgé de 29 ans, natif de Doulans, département de la Somme, domicilié à Paris, rue Barbe, section de Bonne-Nouvelle.

15. Louis-Eustache-Joseph Potier (Delille), âgé de 44 ans, natif de Lille, département du Nord, domicilié à Paris, rue Favart, imprimeur e membre du comité révolutionnaire de la section Lepelletier.

16. François-Charles Virot Sombreuil, ex-gouverneur des Invalides, âgé de 64 ans, natif de Insishain (sic), département du Haut-Rhin, domicilié à la maison nationale des Invalides.

17. Stanislas Virot Sombreuil, âgé de 26 ans, natif de Lechoisier, département de la Haute-Vienne, domicilié à Poissy, ex-capitaine de busards et ex-capitaine de la garde nationale de Poissy.

18. Jean-Guet Henoc Rohan Rochefort, ex-noble, domicilié à Rochefort, département de la Charente-Inférieure.

19. Pierre Laval Montmorency, ex-noble, âgé de 25 ans, natif de Paris, y domicilié rue du Rac.

20. Étienne Jardin, âgé de 48 ans, natif de Versailles, département de Seine-et-Oise, domicilié à Paris, rue Cadet, directeur des transports militaires depuis la révolution, et avant piqueur du tyran.

21. Charles-Marie-Antoine Sartine, ex-maître des requêtes, âgé de 34 ans, natif de Paris, y domicilié, rue Vivienne, fils de

22. Barthélemy Constant, gendarme, âgé de 42 ans, natif de Grasse, département du Var, domicilié à Paris, rue du Faubourg-Martin, n° 185.

23. Joseph-Henry Burlandeux, ex-officier de paix, âgé de 39 ans, natif de Saullier, département du Var, domicilié à Paris, rue du Faubourg-Martin, n° 64.

24. Louis-Marie-François Saint-Mauris de Montbarey, ex-prince et ancien militaire, âgé de 38 ans, natif de Paris, y domicilié faubourg Honoré, n° 49.

25. Joseph-Guillaume Lescuyer, musicien, âgé de 46 ans, natif d'Antibes, département du Var, domicilié à Paris, rue Poissonnière, n° 19.

26. Achille Viart, ci-devant militaire, âgé de 51 ans, natif de ....., en Amérique, domicilié à Mariac, département de Bec-d'Ambès.

27. Jean-Louis Biret Tissot, domestique de la femme Grandmaison, âgé de 35 ans, natif de Paris, y domicilié, rue de Mesnard.

28. Théodore Jauge, banquier, âgé de 47 ans, natif de Bordeaux, département de Bec-d'Ambès, domicilié à Paris, rue du Mont-Blanc.

29. Catherine-Suzanne Vincent, âgée de 45 ans, native de Paris, y domiciliée, rue de Mesnard, mariée à ..... Gryois.

30. Françoise-Augustine Santuare, âgée de 40 ans, native de l'ile Bourbon, en Afrique, domiciliée à Marefosse, département de la Seine-Inférieure, mariée à ..... Desprémenil.

31. Charles-Armand-Augustin Depont, ex-noble, âgé de 49 ans, natif de Paris, y domicilié, rue Notre-Dame-des-Champs.

32. Joseph-Victor Cortey, épicier, âgé de 37 ans, natif de Symphorien, département - de la Loire, domicilié A Paris, rue de la Loi.

33. François Paumier, ci-devant marchand de Lois, âgé de 39 ans, natif de Aunay, département de la Nièvre.

34. Jean-François Deshayes, âgé de 68 ans, natif de Herserange, département de la Moselle, domicilié à Luçon, marchand, et membre du comité de surveillance dudit lieu. 35. François-Augustin Ozanne, ex-officier de paix, âgé de 40 ans, natif d Paris, y domicilié, rue de là Vieille-Monnaie.

36. Charles-François-René Duhardaz Dauteville, ex-noble, âgé de 23 ans, natif du Mans, département de la Sarthe, domicilié à Paris, rue Basse-du-Rempart, n° 20.

37. Louis Comte, négociant, âgé de 49 ans, natif de Varennes, département de Saône-et-Loire, domicilié à Paris, rue Thomas-du-Louvre, grande maison de France.

38. Jean-Baptiste Michonis, limonadier, et ex-administrateur de police, âgé de 59 ans, natif de Paris, y domicilié.

39. Philippe-Charles-Élysée Baussancourt, sous-lieutenant de carabiniers, âgé - de 27 ans, natif de Vitry-le-François.

40. Louis Karadec, agent de change, âgé de 45 ans, natif de Lisieux, département du Calvados, domicilié à Paris, rue du Faubourg-du-Temple.

41. Théodore Marsan, âgé de 27 ans, natif de Toulouse, département de la Haute-Garonne, domicilié à Paris, rue de Cléry, n° 95.

42. Nicolas-Joseph Égrée, brasseur, âgé de 40 ans, natif de Cateau-Cambrésis, département du Nord, domicilié à Suresnes, département de Paris.

43. Henri Menil-Simon, ci-devant capitaine de cavalerie, âgé de 53 ans, natif de Buley, département de la Nièvre, domicilié à Vigneux, département de Seine-et-Oise.

44. Jeanne-Françoise-Louise Demier Sainte-Amarante, âgée de 42 ans, native - de Saintes, département de la Charente, domiciliée à Cercy, département de Seine-et-Oise.

45. Charlotte-Rose Sainte-Amarante, âgée de 19 ans, native de Paris, domiciliée à Cercy, département de la Nièvre, mariée à Sartine.

46. Louis Sainte-Amarante, âgé de 17 ans, natif de Paris, domicilié à Cercy.

45. Gabriel-Jean-Baptiste Briel, ex-prêtre, âgé de 56 ans, natif de Montier-sur-Vaulx, département du Mont-Blanc, domicilié à Arcueil, et auparavant à Paris, rue Helvétius.

43. Marie Grandmaison, ci-devant Buret, ci-devant actrice des Italiens, âgée de 27 ans, native de Blois, département de Loir-et-Cher, domiciliée à Paris, rue Mesnard, n° 7.

49. Marie-Nicole Bouchard, âgée de 18 ans, native de Paris, y domiciliée, rue Mesnard, n° 7.

50. Jean-Baptiste Marino, peintre en porcelaine, administrateur de police, âgé de 37 ans, natif de Sceaux, district du bourg de l'Égalité, domicilié à Paris, rue Helvétius.

51. Nicolas-André-Marie Froidure, ex-administrateur de police, âgé de 29 ans, natif de Tours, département d'Indre-et-Loire, domicilié à Paris, rue Honoré, n° 91.

52. Antoine-Prosper Soulés, ex-administrateur de police et officier municipal âgé de 31 ans natif de Avisse, département de la Marne, domicilié à Paris, rue Tarante, 28.

53. François Daugé, ex-administrateur de police, âgé de 47 ans, natif de Chesey, département de Cher-et-Loir, domicilié à Paris, rue de la Roquette, n° 36.

54. Marie-Maximilien-Hercule Rossay, se disant comte de Fleury, âgé de 23 ans, domicilié à Paris.

Vu l'extrait du jugement du Tribunal révolutionnaire et du procès-verbal d'exécution, en date du 29 prairial.

Signé ; LÉCRIVAIN, greffier.

Paris, le 9 messidor an II de la République.

CLAUDE-ANTOINE DELTROIT, officier public.

 

 

 



[1] Commune de Paris.

Extrait du registre des délibérations du conseil du Temple.

Paris, le 2 nivôse de l' an II de la République (22 décembre 1793).

Cejourd'hui, 2 nivôse, trois heures de. relevée, se sont présentés au conseil les citoyens Lépine, Lelièvre et Langlois, de service hier au Temple lesquels nous ont fait part de la conférence qu'ils ont eue ce matin avec le citoyen maire, sur les motifs du sursis à l'occasion de l'arrêté du conseil général, sur les abat-jour à poser dans la chambre de Simon, au second, d'où il résulte que tous les obstacles du moment sont levés, le conseil du Temple de service aujourd'hui et le conseil d'hier réunis ont arrête que le citoyen Coru serait à l'instant prévenu de faire venir l'ouvrier à l'effet d'exécuter l'arrêté du conseil général, et qu'il serait délivré copie du procès-verbal au citoyen Coru.

TONNELIER, LEVASSEUR, LECHENARD.

Cette affaire des abat-jour avait déjà occupé le conseil général et le conseil du Temple ; et à la date des 14 et 15 décembre 1793, on trouve deux arrêtés tendant à faire établir les abat-jour apposés aux fenêtres de l'appartement qu'occupent Simon et le petit Capet, tels qu'ils étaient avant qu'on eu détachés une partie.

[2] Les actes officiels des exécutions et des décès donnent leurs noms écrits dans l'ordre suivant :

1. Jacques-René Hébert, substitut de l'agent national de la Commune de Paris, âgé de 35 ans, natif d'Alençon, département de l'Orne, domicilié à Paris, rue Neuve-de-l'Egalité.

2. Charles-Philippe Ronsin, avant la révolution homme de lettres, puis commissaire de guerre ordonnateur, adjoint au ministre de la guerre, général de l'armée révolutionnaire, âgé de 42 ans, natif de Soissons, département de l'Aisne, domicilié à Paris, boulevard Montmartre, n° 27.

3. Antoine-François Momoro, imprimeur-libraire et administrateur du département de Paris, âgé de 38 ans, natif de Besançon, département du Doubs, domicilié à Paris, rue de la Harpe, n° 71.

4. François-Nicolas Vincent, ci-devant clerc de procureur, puis membre de la Commune, et actuellement secrétaire général du département de la guerre, âgé de 27 ans, natif de Paris, y domicilié rue des Citoyennes, section de Mutius-Scévola.

5. Michel Laumur, ci-devant lieutenant-colonel de la marine et colonel d'infanterie au 6e régiment de l'armée du Nord, et général de brigade, âgé de 63 ans, natif de Paris, y domicilié, rue Croix-des-Petits-Champs, n° 42.

6. Jean-Conrad Kock, banquier, âgé de 38 ans, natif d'Ulin, en Hollande, habitant en France depuis 1787, demeurant à Passy, près Paris, et encore à Paris, rue Neuve-de-l'Égalité, n° 314.

7. Pierre-Jean Proly, négociant, puis rédacteur de journal, âgé de 42 ans, natif de Bruxelles, en France depuis 1782, demeurant à Paris, rue Vivienne, n° 7.

8. François Desfieux, marchand de vin de Bordeaux, âgé de 39 ans, natif de Bordeaux, domicilié à Paris, rue des Filles-Saint-Thomas, n° 20.

9. Anacharsis Clootz (Jean-Baptiste), homme dé lettres, ci-devant député à la Convention nationale, âgé de 38 ans, natif de Clèves, dans la Belgique, habitant en France depuis 27 ans, demeurant à Paris, rue de Mesnard, n° 563.

10. Jacob Pereyra, manufacturier de tabac, âgé de 51 ans, natif de Bayonne, département des Basses-Pyrénées, demeurant à Paris, rue Saint-Denis, n° 413, section Bon-Conseil.

11. Marie-Anne-Catherine Latreille, âgée de 34 ans, native de Montreuil-Belley, département de Rhône-et-Loire, demeurant à Paris depuis six mois, rue et maison Bussy, femme Questineau.

12. Jean-Antoine-Florent Armand, élève en chirurgie, âgé de 26 ans, natif de Chaylac, département de l'Ardèche, domicilié à Paris depuis un an, rue et maison Bussy.

13. Jean-Baptiste Aucard, employé au comité des recherches du département de Paris, âgé de 52 ans, natif de Grenoble, département de l'Isère, domicilié à Paris, rue des Mauvais-Garçons Saint-Germain, ci-devant coupeur de gants, journalier.

14. Frédéric-Pierre Ducroquet, ci-devant perruquier-coiffeur et parfumeur, - et depuis commissaire aux accaparements, âgé de 31 ans, natif d'Amiens, département de la Somme, demeurant à Paris, rue du Paon, n° 2, section de Marat.

15. Armand-Hubert Leclerc, chef de division au bureau de la guerre, âgé de 44 ans, natif de Cany, département de la Seine-Inférieure, domicilié à Paris, rue Grange-Batelière, n° 10, et ancien archiviste du ci-devant évêché de Beauvais.

16. Jean-Charles Bourgeois, ci-devant menuisier, employé dans les bureaux de la guerre, et commandant de la force armée de sa section, âgé de 26 ans, natif de Paris, y demeurant, rue des Sans-Culottes, ci-devant Guisarde, section de Mutius-Scévola.

17. Albert Mazuel, ancien cordonnier, depuis brodeur, et après aide de camp de Bouchotte, ministre de la guerre, chef d'escadron de.la cavalerie révolutionnaire, commandant temporaire de la Ville-Affranchie, âgé de 28 ans, natif de Commune-Affranchie.

18. Antoine Descomble, ancien garçon épicier, âgé de 29 ans, natif de Besançon, département du Doubs, domicilié à Paris, rue Sainte-Croix de la Bretonnerie, n° 21, section des Droits-de-l'Homme.

19. Pierre-Ulric Dubuisson, homme de lettres, nommé à différentes époques commissaire du pouvoir exécutif, âgé e 48 ans, natif de Laval, département de la Mayenne, domicilié à Paris, rue Saint-Honoré, n° 1447.

Vu l'extrait du jugement du tribunal criminel révolutionnaire et du procès-verbal d'exécution, en date du 4 de ce mois.

Signé : WOLF, commis greffier.

Le 13 germinal, l'an II de la République.

CLAUDE-ANTOINE DELTROIT, officier public.

 

Le Moniteur du 5 germinal an II dit que la femme Questineau s'étant déclarée enceinte, a obtenu un sursis. Nous voyons pourtant le nom de cette femme parmi ceux des victimes. Le Moniteur ajoute :

Le citoyen Taboureau, de la section de Marat, est le seul des accusés qui ait été acquitté.

C'est Laboureau qu'il faut lire. Ce Laboureau était un médecin qui fit plus tard un rapport sur ce qu'il avait vu et entendu dans la prison sur les accusés. En 1790, il avait publié un journal sous ce titre : l’Avocat du peuple.

[3] Séance du 26 ventôse an II (16 mars 1794).

[4] Un membre fait des inculpations très-graves contre Cressend, de la section de la Fraternité, membre du conseil proposé pour aller au Temple ; il dit que le citoyen Cressend s'est permis de plaindre le sort du petit Capet, et faisait un relevé de la liste des membres du conseil qui étaient de garde au Temple. Après discussion, et sur la proposition de plusieurs membres, le conseil arrête que le citoyen Cressend est exclu du sein du conseil, et qu'il sera envoyé à la police sur-le-champ, avec les pièces à J'appui. et que les scellés seront apposés sur ses papiers.

(Conseil général de la Commune, séance du 7 germinal an II, 27 mars 1794.)

[5] Voici les noms de ces quinze hommes, tels qu'ils sont écrits et rangés dans le procès-verbal de leur exécution, et dans l'acte officiel de leur décès :

1. Philippe-François-Nazaire Fabre Déglantine, ci-devant homme de lettres et député à la Convention nationale, âgé de 39 ans, natif de Carcassonne, domicilié à Paris, rue Ville-l'Évêque.

2. Joseph Launay, homme de loi et député à la Convention nationale, âgé de 39 ans, natif d'Angers. domicilié ordinairement à Anvers, et à Paris, boulevard Montmartre, n° 5.

3. François Chahot, ci-devant capucin et représentant du peuple, âgé de 37 ans, natif de Saint-Geniest, département de l'Aveyron, domicilié à Paris, rue d'Anjou, n4 19.

4. Lucie-Simplice-Camille-Benoist Desmoulins, homme de lettres, âgé de 33 ans, natif de Guise, district de Vervins, domicilié à Paris, place du Théâtre-Français.

5. Jean-François Lacroix, soldat, capitaine de milice, puis homme de loi et ex-député à la Convention nationale, âgé de 40 ans, natif de Pont-Audemer, département de l'Eure, domicilié à Paris, rue Lazare, n° 6.

6. Pierre Phélippeaux, homme de loi et député à la Convention nationale, âgé de 35 ans, natif de Ferrière, département de l'Oise, domicilié à Paris, rue de l'Échelle, n° 3.

7. Claude Bazire, commis aux Archives des états de la Bourgogne, commandant de la garde et député à la Convention nationale, âgé de 29 ans, natif de Dijon, département de la Côte-d'Or, domicilié à Paris, rue Saint-Pierre-Montmartre.

8. Marie-Jean Hérault de Séchelles, député à la Convention nationale, âgé de 34 ans, natif de Paris, y domicilié, rue Basse-du-Rempart, ne 14.

9. Georges-Jacques Danton, député à la Convention nationale, âgé de 34 ans, natif de Darcy-sur-Aube, département de l'Aube, domicilié à Paris, rue et section de Marat.

10. Marc-René Sahuguet Despagnac, ci-devant abbé et employé aux fournitures des haras, âgé de 41 ans. natif de IIrie, département de la Corrèze, domicilié à Paris, rue de l'Université, près l'ancienne barrière.

11. Simon Kotloo Junius Frey, fournisseur à l'armée, âgé de 36 ans, natif de Bruyen, en Moravie, domicilié à Paris, rue d'Anjou Saint-Honoré, n° 19.

12. André-Marie Gusman, âgé de 41 ans, natif de Grenade, en Espagne, naturalisé Français en 1751.

13. Emmanuel Frey, âgé de 27 ans, natif de Bruyen, en Moravie, domicilié, à Paris, rue d'Anjou Saint-Honoré, n° 19.

14. Jean-Frédéric Deidcrinchen, avocat de la cour du roi de Danemark, âgé de 51 ans, natif de Luxembourg, pays de Holstein, en Danemark, domicilié à Paris, rue des Petits-Augustins.

15. François-Joseph Westermann, ci-devant aide de camp de Dumouriez, depuis général de division, âgé de 38 ans, natif de Motzheim, département du Bas-Rhin.

Vu l'extrait du jugement du tribunal criminel révolutionnaire I et du procès-verbal d'exécution en date du 16 germinal.

Signé : LÉCRIVAIN, greffier.

Paris, le 7 floréal, l'an II de la République.

CLAUDE-ANTOINE DELTROIT, officier public.

[6] Mémoires d'un détenu, pour servir à l'histoire de la tyrannie de Robespierre. Paris, Anjubault, an III, page 93.

[7] Cette fournée se composait de :

1. Philibert Simon, député à la Convention nationale, natif de Rumilly (Mont-Blanc), domicilié à Paris, rue Traversière-Honoré.

2. Arthur Dillon, ci-devant général divisionnaire, âgé de 43 ans, natif de Braywick, en Angleterre, domicilié à Paris, rue Jacob, n° 38.

3. Jean-Baptiste Gobel, ci-devant évêque de Paris, âge de 67 ans, natif de Thann-, département du Haut-Rhin, domicilié à Paris, île de la Fraternité, quai de l'Égalité, n° 13.

4. Jean-Michel Beysser, général de brigade dans l'armée de l'Ouest, âgé de 40 ans, natif de Ribauviller, en Alsace, département du Haut-Rhin, domicilié ordinairement à Lorient.

5. Gaspard Chaumette, agent national de la Commune de Paris, ci-devant - procureur de ladite Commune, âgé de 31 ans, natif de Nevers (Nièvre), domicilié à Paris, rue de l'Observatoire, aux Visitandines, et avant rue du Paon, section de Marat.

6. Marie-Marguerite-Françoise Goupile, âgée de 38 ans, native de Paris, y domiciliée, rue Neuve-de-l'Égalité, cour des Forges, veuve de ..... Hébert

7. Jean-Baptiste-Ernest Bucher (de l'Épinois), commandant de la garde nationale de Mesnil-Saint-Denis, âgé de 43 ans, natif d'Amiens, département de la Somme, domicilié à Mesnil-Saint-Denis, district de Versailles, département de Seine-et-Oise.

8. Marie-Marc-Antoine Barras, ancien administrateur du district de Toulouse, âgé de 30 ans, natif de Toulouse, département de la Haute-Garonne, y domicilié.

9. Jean-Jacques Lacombe, vivant de son revenu, âgé de 33 ans, natif de Cajac (Lot), domicilié à Paris, maison garnie des Français, rue de Thionville, n° 30, section de Marat.

10. Jean-Maurice-François Lebrasse, lieutenant de gendarmerie près les tribunaux, âgé de 31 ans, natif de Rennes, département de l'Ille-et-Vilaine, domicilié à Paris, rue Jacques, n° 27.

11. Anne-Lucile-Philippe Laridon Duplessis, âgée de 23 ans, native de Paris, y domiciliée, rue du Théâtre-Français, veuve de Lucie-Simplice-Camille-Benoit Desmoulins.

12. Antoine Duret, adjudant général de l'armée des Alpes, âgé de 44 ans, natif de Roanne-en-Forez, domicilié à Montbrissey, département de la Loire, lors de son arrestation à Feure.

13. Guillaume Lassalle, officier de marine, âgé de 24 ans, natif de Boulogne-sur-Mer, département du Pas-de-Calais, domicilié à Paris, maison de France, rue Neuve-de-l'Égalité,

14. Alexandre Nourry Grammont, officier de la cavalerie révolutionnaire, et avant employé au bureau de la guerre, âgé de 19 ans, natif de Limoges, département de la Haute-Vienne, domicilié à Paris, passage des Petits-Pères, na 3, section de Guillaume-Tell.

15. Nourry Grammont, ci-devant artiste du théâtre Montansier, ensuite adjudant général de rarmée révolutionnaire, âgé de 42 ans, natif de La Rochelle (Charente-Inférieure), domicilié à Paris, passage des Petits-Pères, section de Guillaume-Tell.

16. Jean-Marie Lepallus, juge de la commission révolutionnaire de Feure, âgé de 26 ans, natif de Matour, district de Charonne, département de Saône-et-Loire, domicilié ordinairement à Néardor, département de Rhône-et-Loire.

17. Jean-François Lambert, porte-clefs de la maison d'arrêt du Luxembourg, âgé de 25 ans, natif de Boisne, département du Loiret, domicilié à Paris, rue de la Convention.

18. Marie-Sébastien Brumeau-Lacroix, membre du comité révolutionnaire de la section de l'Unité, âgé de 26 ans, domicilié à Paris, rue du Colombier.

19. Edme Rameau, prêtre, âgé de 41 ans, natif d'Auxerre, département de l'Yonne, domicilié à Paris, rue Sauveur.

20. Louis Guillaume-André Brossard, secrétaire du comité révolutionnaire de la ville de Périgueux, âgé de 32 ans, natif de Térasson, département de la Dordogne, demeurant à Périgueux.

21. Étienne Ragondet, ci-devant marchand de chevaux, commandant du bataillon de la section de la République, et inspecteur dans les charrois des armées, âgé de 46 ans, natif de Paris, demeurant à Capy, près Péronne, département de la Somme.

Vu l'extrait du jugement du tribunal criminel révolutionnaire et du procès-verbal d'exécution, en date du 24 germinal.

Signé : LÉCRIVAIN, greffier.

Le 7 floréal, l'an II de la République.

CLAUDE-ANTOINE DELTROIT, officier public.

[8] Cette rigueur allait jusqu'au ridicule, et se manifestait chaque jour par quelques nouveaux arrêtés. Voici deux documents qui donneront une idée de ceux que nous ne citons pas :

Commune de Paris.

Le 19 pluviôse, l'an II de la République française une et indivisible (7 février 1794).

Extrait du registre des délibérations du conseil général.

Le conseil du Temple fait part que le citoyen Langlois a apporté une bouteille du contenu d'environ demi-setier, scellée d'un cachet formé de plusieurs lettres que nous n'avons pu distinguer, et sur laquelle était une inscription portant ces mots : Bouillon pour Marie-Thérèse.

Ayant interpellé ledit Langlois de dire de quel ordre il apportait ces bouillons, a dit que depuis environ quatre à cinq mois il avait toujours continué d'en apporter sans empêchement.

Le conseil du Temple, considérant qu'aucun officier de sauté n'ayant ordonné les bouillons mentionnés ci-dessus, et la fille Capet et sa tante jouissant d'une santé parfaite, ainsi que s'en est assuré le conseil cejourd'hui ;

Considérant que ce ne peut être que par une espèce d'habitude et sans aucun besoin, que l'usage de ces bouillons a été conservé, et qu'il est en -même temps de l'intérêt de la République, ainsi que du devoir des magistrats, d'arrêter toute espèce d'abus, à l'instant qu'ils viennent à leur connaissance ;

Arrête qu'à compter de ce jour l’usage de tous remèdes qui pourraient être apportés au Temple par qui que ce soit cessera, jusqu'à ce qu'il en ait été référé au conseil général de la Commune, pour être statué par lui définitivement ce qu'il appartiendra.

Le conseil adopte l'arrêté du conseil du Temple dans tout son contenu.

Signé : LUBIN, vice-président.

DORAT-CUBIÈRES, secrétaire-greffier adjoint.

Pour extrait conforme :

DORAT-CUBIÈRES, secrétaire-greffier adjoint.

 

Le secrétaire-greffier annonce au conseil qu'en exécution d'un de ses précédents arrêtés, il a acheté deux dés en ivoire pour les prisonnières du Temple. Il ajoute que demain il portera à la Monnaie le dé d'or, pour le prix en être distribué par les ordres du conseil.

Le conseil général donne acte au secrétaire-greffier de sa déclaration.

(Conseil général de la Commune, séance du 8 germinal an II, vendredi 28 mars 1794.)

[9] Les registres du tribunal révolutionnaire et ceux des actes mortuaires donnent, dans l'ordre suivant, les noms de ses compagnons d'infortune, parmi lesquels figurent sa fille, sa petite-fille et son petit-fils :

1. Jacques Duval Desprémenil, ex-constituant, âgé de 48 ans, natif de Pondichéry, domicilié à Mériffou, commune de La Remuée, département de Seine-Inférieure.

2. Jacques-Guillaume Thouret, ex-constituant, ex-président du tribunal de cassation, âgé de 4S ans, natif de Pont-l’Évêque, département du Calvados, domicilié à Paris, rue des Petits-Augustins, n° 21.

3. Isaac-René-Gui Lechappelier, ex-constituant, âgé de 39 ans, natif de Rennes, département de l'Ille-et-Vilaine, y domicilié, et ayant un domicile à Paris, rue Montmartre.

4. François Hell, ci-devant procureur général syndic des états d'Alsace, grand bailli de Langres et administrateur du département du Haut-Rhin, âgé de 63 ans, natif de Keseinhem, susdit département, domicilié à Paris, rue Helvétius.

5. Chrétien-Guillaume Lamoignon Malesherbes, ex-noble et ex-ministre du tyran, âgé de 72 ans, natif de Paris, domicilié à Malesherbes, département du Loiret.

6. Antoinette-Marguerite-Thérèse Lamoignon Malesherbes, native de Paris domiciliée à Malesherbes, département du Loiret, veuve de Lepelletier Rozambo.

7. Aline-Thérèse Lepelletier Rozambo, âgée de 23 ans, native de Paris, domiciliée à Malesherbes, département du Loiret, mariée à ..... Châteaubriand.

8. Jean-Baptiste-Auguste Châteaubriand, ex-noble et ex-capitaine de cavalerie, âgé de 34 ans, natif de Saint-Malo, département de l'Ille-et-Vilaine, domicilié à Malesherbes, département du Loiret.

9. Diane-Adélaïde Rochechouart, ex-noble, âgée de 62 ans, native de Paris, y domiciliée, rue Grange-Batelière, veuve de Duchatelet.

10. Béatrix Choiseul, ex-noble, âgée de 64 ans, native de Lunéville, domiciliée à Paris, rue Grange-Batelière, mariée à ..... Grammont.

11. Victoire Boucher Rochechouart, ex-noble, âgée de 49 ans, native de Paris, y domiciliée, rue du Mont-Blanc, veuve de ..... Pontville.

12. Louis-Pierre Mousset, charpentier et ci-devant procureur de la Commune de Donnery, âgé de 42 ans, natif de Saint-Marceau d'Orléans, département du Loiret, domicilié audit Donnery.

Vu l'extrait du jugement du tribunal criminel révolutionnaire et du procès-verbal d'exécution, en date du 3 de ce mois.

Signé : LÉCRIVAIN, greffier

Le 13 floréal de l'an Il de la République.

CLAUDE-ANTOINE DELTHOIT, officier public.

[10] Dunouy (l'aîné) Jean-Honoré, trente-huit ans, ingénieur, quai Bernard, n° I14, section des Sans-Culottes.

[11] Renard (Pierre-Jean), citoyen, rue du Faubourg-Denis, n° 56.

[12] Leclerc (Louis), quarante-quatre ans, peintre, rue du Vertbois, n° 18, section des Gravilliers.

[13] Legrand (Pierre-Jacques), cinquante et un ans, homme de loi, rue d'Enfer, n° 5, section de la Cité.

[14] Dorigny (Louis-François), charpentier, mis hors la loi par décret de la Convention du 9 thermidor an II, comme traître à la patrie, pour avoir participé à la révolte de la Commune ; exécuté le 12.

[15] Procès-verbal de la translation d'Élisabeth-Marie Capet à la Conciergerie.

[16] Guillotiné le 11 thermidor an II.

[17] René-François Dumas, mis hors-la loi et guillotiné le 10 thermidor an II.

[18] Moelle, Six journées passées au Temple, p. 75. — Paris, Dentu, 1820.

[19] Nous croyons devoir citer les noms de tous ceux qui ont eu la gloire de partager le martyre de Madame Elisabeth ; il est juste que les victimes gardent auprès d'elle dans l'histoire la place qu'elles ont eue auprès d'elle sur l'échafaud :

1. Elisabeth-Marie-Hélène Capet, sœur de Louis Capet, âgée de 30 ans, native de Versailles, département de Seine-et-Oise, domiciliée à Paris.

2. Anne Duwaes, âgée de 55 ans, native de Keisnith, en Allemagne, domiciliée à la Montagne-du-Bon-Air, département de Seine-et-Oise, veuve de ..... Laigle, ci-devant marquis.

3. Louis-Bernardin Leneuf Sourdeval, ex-comte, âgé de 69 ans, natif de Gaen, département du Calvados, domicilié à Chatou, département de Seine-et-Oise.

4. Anne-Nicole Lamoignon, âgée de 76 ans, native de Paris, y domiciliée, veuve du ci-devant marquis de Sénozan.

5. Glaude-Louise-Angélique Bersin, ex-marquise, âgée de 64 ans, native de Paris, y domiciliée, femme séparée de corps et de biens de Crussol d'Amboise.

6. Georges Follope, pharmacien, ex-officier municipal. de là Commune, âgé de 64 ans, natif des Ecalles-Alix, près Yvetot, domicilié à Paris, rue et porte Honoré.

7. Denise Buard, âgée de 52 ans, native de Paris, y domiciliée, rue Florentin, n° 674.

8. Louis-Pierre-Marcel Letellier, dit Bullier, ci-devant employé à l'habillement des troupes, âgé de 21 ans et demi, natif de Paris, y domicilié, rue Florentin, n° 674.

9. Charles Cressy Champmilon, ex-noble, et ci-devant officier de marine, âgé de 33 ans, natif de Courtoin, près Sens, département de l'Yonne, y domicilié.

10. Théodore Hall, manufacturier et négociant, âgé de 26 ans, natif de Sanzy, département de l'Yonne, y domicilié.

11. Alexandre-François Loménie, ex-comte, et ci-devant colonel du régiment des chasseurs dit Champagne, âgé de 36 ans, natif de Marseille, domicilié à Brienne, département de l'Aube.

12. Louis-Marie-Athanase Loménie, ex-ministre de la guerre et maire de Brienne, âgé de 64 ans, natif de Paris, domicilié à Brienne, département de l'Aube.

13. Antoine-Hugues-Calixte Montmorin, sous-lieutenant dans le 5e régiment des chasseurs à cheval, âgé de 22 ans, natif de Versailles, département de Seine-et-Oise, domicilié à Passy.

14. Jean-Baptiste Lhoste, agent et domestique de Megret de Sérilly, âgé de 47 ans, natif de Forgère, domicilié à Paris.

15. Martial Loménie, ex-noble et coadjuteur de l'évéché'du département de l'Yonne, âgé de 30 ans, natif de Marseille, domicilié à Sens.

16. Antoine-Jean-François Megret de Sérilly, ci-devant trésorier général de la guerre, et depuis cultivateur, âgé de 48 ans, natif de Paris, domicilié à Passy, près Sens.

17. Antoine-Jean-Marie Megret Detigny, ex-noble, ci-devant sous-aide-major du régiment des ci-devant gardes françaises, âgé de 46 ans, natif de Paris, domicilié à Sens,

18. Charles Loménie, ci-devant chevalier des ordres dits de Saint-Louis et de Cincinnatus, âgé de 33 ans, natif de Marseille, domicilié à Brienne, département de l'Aube.

19. Françoise-Gabrielle Tanneffe, âgée de 50 ans, native de Chadieu, département du Puy-de-Dôme, domiciliée chez Megret Sérilly, à Passy, département de l'Yonne, veuve de Montmorin, ministre des affaires étrangères.

20. Anne-Marie-Charlotte Loménie, âgée de 29 ans, native de Paris, domiciliée à Sens, et à Paris, rue Georges, section du Mont-Blanc, n° 18, divorcée de l'émigré Canizy.

21. Marie-Anne-Catherine Rosset, âgée de 44 ans, native de Rochefort, département de la Charente, domiciliée à Sens, mariée à Charles-Christophe Rosset Cercy, ci-devant officier de marine, émigré.

22. Elisabeth-Jacqueline Lhermitte, âgée de 65 ans, mariée au ci-devant comte Rosset, ex-noble, et ci-devant lieutenant-colonel des carabiniers et maréchal de camp, émigré.

23. Louis-Claude Lhermitte Chambertrand, ex-chanoine de la ci-devant cathédrale de Sens, ex-noble, âgé de 60 ans, natif de Sens.

24. Anne-Marie-Louise Thomas, âgée de 31 ans, native de Paris, domiciliée à Passy, département de l'Yonne, mariée à Megret Sérilly *.

26. Jean-Baptiste Dubois, domestique de Megret Detigny, âgé de 41 ans, natif de Merfy, district de Reims, département de la Marne, domicilié chez ledit Megret Detigny.

Vu l'extrait du jugement du tribunal criminel révolutionnaire et du procès-verbal d'exécution, en date du 21 floréal.

Signé : LÉCRIVAIN, greffier.

CLAUDE-ANTOINE DELTROIT, officier public.

* Le tribunal, attendu l'incertitude sur l'état d'Anne-Marie-Louise Thomas, femme Sérilly, résultant du rapport des officiers de santé du tribunal, ordonna qu'il fût sursis à l’exécution de jugement à son égard, jusqu'à ce qu'il en eût été autrement ordonné.

[20] Mis deux fois en état d'arrestation, il parvint toujours à s'échapper. La Restauration lui tint compte des périls qu'il avait bravés pendant la révolution ; il fut nommé maréchal de camp, et peu de temps après fut mis en retraite. Il mourut en 1822.

[21] Voyez la Conjuration de Batz, ou la Journée des Soixante, 1795, in-8°.

[22] Voir leurs noms, comme nous les fournissent les pièces officielles de leur exécution et de leur décès, en fin de ce chapitre. Au nombre de ces cinquante-quatre victimes se trouvent trois jeunes gens de dix-sept à vingt-trois ans, et trois jeunes femmes de dix-huit à vingt ans.

[23] Et non Théos, comme disaient ses adeptes, substituant à dessein au nom vulgaire de Théot le mot grec Théos, qui signifie la Divinité.

[24] Louis XVII, par Simien-Despréaux, 1817.

[25] Andro a lei, ma ella non ritornerà a me.

Inscription que Byron fit mettre sur le tombeau de sa fille Allegra, morte à Baguacavallo, en Toscane (le 22 avril 1822), à l'âge de cinq ans.

[26] Le comte Joseph de Maistre (Soirées de Saint-Pétersbourg).

[27] Mort le 21 fructidor an VII (7 septembre 1799), à l'âge de 82 ans.

[28] Voici comment, dès le 6 avril 1793, la Commune de Paris avait prescrit l'exécution de cette mesure :

Le Conseil général, considérant la négligence que les citoyens apportent à l'exécution de la loi concernant l'affiche, à l'extérieur des maisons, des noms de tous les individus qui y habitent ;

Arrête que l'instruction suivante sera imprimée, affichée, et que les commissaires de police des sections seront tenus sous leur responsabilité de faire mettre ladite loi à exécution.

Instruction relative au tableau qui doit être fait de tous les citoyens habitants de Paris, et placé à l'extérieur de chaque maison, au terme du décret du 29 mars dernier.

1° Indiquer en tête le nom du propriétaire, s'il habite la maison, ou à son défaut le principal locataire, s'il y en a un, ou du régisseur.

2° Diviser par étages de la manière suivante :

REZ-DE-CHAUSSÉE.

N. N.

ENTRE-SOL.

PREMIER ÉTAGE. ETC.

L'état doit présenter sans interruption toutes les personnes qui logent au même étage, et même toutes celles qui composent un ménage.

Exemple :

A tel étage : Le citoyen tel, son épouse, tant d'enfants de tel sexe ; ensuite les domestiques.

Il est nécessaire de mettre les prénoms ou noms de baptême, et les surnoms, le sexe et l'âge de chacun. Le nom principal à désigner est celui que porte ordinairement l'individu, et sous lequel il est généralement connu, et non celui de sa famille, si ce n'est pas celui qu'on lui donne dans le public.

On ne peut se dispenser de faire connaître l'état de chaque individu, ou de déclarer qu'il est sans état, car le titre de citoyen ou de citoyenne est une désignation trop vague, ou plutôt n'en est pas une.

L'affiche doit être écrite lisiblement, placée au lieu le plus apparent à l'extérieur, et de manière que tout le monde puisse aisément la parcourir des yeux tout entière, sans en perdre un seul nom.

Il ne doit être omis aucune personne ; une seule omission enfreint la loi, et expose à des peines sévères.

Chaque fois qu'il y a du changement, il faut en faire mention dans l'affiche, soit en retranchant le nom des personnes qui ont quitté la maison, soit en ajoutant celui des nouveaux locataires et de ceux mêmes qui ne logent que momentanément.

Toutes les contraventions seront imputées aux propriétaires ou principaux locataires, ou régisseurs, et seront punies avec sévérité ; car on ne veut pas que cette mesure de salut public reste sans exécution, ou soit éludée et tournée en dérision.

Le Conseil général arrête que le double des tableaux d'inscription sera visé par les comités des sections ;

Que les commissaires de police vérifieront l'exactitude desdits tableaux, et prendront les mesures nécessaires pour empêcher qu'ils ne soient enlevés ou détériorés.

(Séance du Conseil général de la Commune de Paris du samedi 6 avril 1793.)

[29] Procès de Fouquier-Tinville, dépositions de Réal et de Thierriet-Grandpré dans l'audience du 26 germinal an III.

[30] Moniteur du 26 ventôse an II, 16 mars 1794.