François Ier vers la fin de sa vie, le roi et l'homme ; sa mère Louise de
Savoie, sa sœur Marguerite de Navarre : les reines Claude et Eléonore ; Mme
de Châteaubriant, la duchesse d'Étampes ; les enfants du roi ; les
conseillers du prince. Montmorency, l'amiral d'Annebaut, le cardinal de
Tournon. Cadre et personnel de la maison du roi. Les réunions de la cour,
bals, fêtes, joutes. Voyages du roi. Luxe de François Ier et des courtisans. Gaspillage
des finances, une victime : Semblançay. Goût de François Ier pour les lettres
et les arts. Caractère personnel de la littérature du temps, Clément Marot,
Marguerite de Navarre, Rabelais, Dolet. François Ier encourage les érudits ;
la bibliothèque de Fontainebleau, le Collège de France. Les arts, la Renaissance.
Évolution de l'art français ; les précurseurs : Jean Fouquet, Bourdichon,
Perréal, Colombe. Transformation progressive de l'architecture, Amboise,
Blois ; grandes constructions de François Ier, Chambord, Madrid,
Fontainebleau. La décoration italienne, le Rosso, le Primatice, Benvenuto
Cellini ; l'école de Fontainebleau.
Il existe au Cabinet des estampes de la Bibliothèque
nationale un curieux dessin au crayon de l'époque de Jean Clouet, représentant
François Ier vers la fin de sa vie. Le roi a fortement vieilli, bien qu'il
n'ait encore que cinquante-quatre ans ; les traits sont tirés par l'âge et
une fatigue apparente ; sous la barbe grise, la bouche dessine un pli amer,
comme si le prince n'avait plus d'illusion ; le regard est triste ; l'œil
s'éteint ; l'ensemble donne l'impression de quelqu'un alourdi par les
déceptions de l'existence, désabusé et péniblement résigné. De fait, à ne
considérer que l'histoire politique du règne, il en est peu dans les annales
françaises — sinon celui de Jean le Bon — qui aient compté des désastres
aussi lamentables que la défaite de Pavie et la captivité de Madrid, peu qui
aient vu une suite pareillement interminable de guerres malheureuses, de
complications sans cesse renouvelées et d'échecs diplomatiques mortifiants.
Cependant le règne de François Ier a, tout compte fait, laissé la réputation
d'une époque brillante de notre histoire. Cette réputation est due au
caractère du roi, à ses goûts, à tout ce qu'il a fait pour les lettres et les
arts.
L'ambassadeur vénitien Marino Cavalli arrivant à la cour
de France en 1546, quelques mois avant la mort de François Ier, envoyait à
son gouvernement l'impression que lui avait faite la vue du roi. C'est un
témoignage des plus précis. Toujours grand, fort d'aspect et droit, François Ier
avait la dignité lente et noble des gestes que donnent l'habitude de la
représentation et le poids de l'âge ; il était imposant, très majestueux et
royal. Comme Louis XIV, on l'eût reconnu entre tous par son grand air.
Robuste, dur à la fatigue, inlassable dans les courses, les chasses et les
déplacements, gros mangeur, buvant ferme, dormant mieux encore, il paraissait
jouir d'une santé excellente. — Ce qu'on a dit d'une prétendue maladie très
grave qui l'aurait rongé ne paraît pas prouvé ; il était atteint seulement
d'un abcès qui se reformait et s'ouvrait tous les ans, affection que les
médecins estimaient heureuse parce qu'elle purgeait
les humeurs : de fait, en 1547, l'abcès ne se produira pas et François Ier
mourra assez rapidement. — C'était de plus un élégant. Constamment très bien
mis, il donnait le ton à la mode. Il y avait même un peu de recherche et
d'affectation dans ses toilettes ; il ne voulait porter que des costumes
galonnés, chamarrés, couverts de pierreries ; ses pourpoints étaient tissus
d'or, et s'ouvraient pour laisser voir une chemise très fine bordée de
dentelle rare. On ne comptait pas ses somptueux habits.
Surtout il était causeur charmant. Plein d'entrain et de gaieté,
se faisant à tous, il animait les réunions par sa verve et sa bonne humeur.
Puis, sans avoir beaucoup lu et sans avoir étudié méthodiquement, il savait
de tout. Ses connaissances variées et infinies émerveillaient ses
interlocuteurs. Parlât-il de guerre, de peinture, de littérature, de langues,
de géographie, de chasse, d'exercices physiques, d'agriculture, il avait sur
chaque chose des connaissances précises et des idées pleines de bon sens : Non seulement les artistes auraient profité à l'entendre,
écrivait le Liégeois Thomas Hubert, qui accompagna en 1533 l'électeur palatin à
Paris, mais aussi les jardiniers et les laboureurs.
Sa mémoire fidèle lui permettait de causer avec les gentilshommes de leurs
généalogies qu'il savait à fond, comme il connaissait tous les nobles de son
royaume. Avec les hommes de guerre, il s'entretenait de stratégie, de
conduite d'armée, d'artillerie, d'approvisionnements et il les confondait par
la sûreté, la netteté de ses idées ; et si ceux-ci s'en étonnaient, le roi en
riant ajoutait qu'en effet il voyait bien ce qu'il fallait faire, mais qu'il
ne savait pas appliquer ses conceptions, ou plutôt qu'il ne s'en souciait
pas, et que malheureusement il n'avait jamais trouvé personne qui sût les
réaliser. Avec les érudits enfin, il aimait parler de philosophie, de livres,
de manuscrits. Contradiction bizarre, c'était peut-être ce genre de
conversation que préférait ce roi si gentilhomme, si représentatif d'une race
aimable, pas très sérieux au fond. En réalité, esprit curieux, il avait le
talent de s'instruire en faisant parler ceux qui savaient ; il s'assimilait
très bien, puis doué de bon sens et de jugement, il arrivait à ce qu'il n'y eût chose, comme dit Cavalli, ni étude, ni art sur lesquels il ne pût raisonner très
pertinemment et qu'il ne jugeât d'une manière aussi assurée que ceux-là mêmes
qui s'y étaient spécialement adonnés. Aucun roi de France, pas même
Henri IV auquel il ressemble tant par certains côtés, n'a su donner à ses dîners,
à ses réunions de cour, petites ou grandes, un attrait plus distingué.
A le bien prendre, toutefois, ce n'était qu'un homme de
plaisir. Si dans sa jeunesse il avait affectionné les jeux bruyants et
dangereux, jusqu'à risquer à se tuer vingt fois ; s'il avait eu des goûts un
peu rudes tels que celui de faire lutter un taureau contre trois lions dans
les fossés d'Amboise ; si, jeune homme gâté de famille riche, il s'était
diverti à des folies telles que de se masquer, de se déguiser avec des
camarades, et d'aller, comme le raconte le Journal d'un bourgeois de Paris,
parmi la ville en aucunes maisons jouer, gaudir,
et y commettre Dieu sait quels excès que le
populaire prenait mal à gré, il avait conservé dans l'âge mûr une
tendance marquée pour la dissipation. Chasses, fêtes, conversations, voyages
perpétuels, toilettes, recherche des jolies choses, tout sollicitait
continuellement un esprit qui devenait incapable de s'attarder longuement aux
affaires sérieuses. Avec du jugement et des connaissances, le défaut
d'application faisait de François Ier un homme léger.
De cette légèreté, il témoigna surtout dans les questions
concernant son gouvernement. Il détestait s'occuper de l'État : les soucis de
sa charge de roi l'obsédaient ; il fallait qu'on lui en parlât le moins
possible. Assez facile d'accueil, bienveillant, simple, il acceptait une idée
émise par ses conseillers et l'approuvait sans difficulté pour en avoir plus
tôt fini. La reine Marguerite, sa sœur, s'en plaignait assez à l'ambassadeur
Giustiniano, surtout en pensant à Charles-Quint, l'adversaire si jaloux, si
réservé, si réfléchi ! Heureusement que pour les très graves affaires
François Ier reprenait ses droits et entendait décider : volontiers même dans
ces cas-là affectait-il un autoritarisme tranchant. Le bon côté de cette
légèreté fut son absence de rancune ; il pardonnait aisément et oubliait ; le
mauvais côté fut cette politique inintelligente qui l'amena peut-être à faire
preuve de bravoure et d'élan, deux qualités qu'il possédait, mais attesta son
défaut de finesse et d'adresse dont il aurait eu beaucoup plus besoin.
Peut-être à cette légèreté ne furent pas étrangères les influences féminines
qui, dès sa jeunesse, s'étaient exercées continuellement sur lui et prirent
dans l'âge mûr une telle importance autour de sa personne.
De ces influences, la première fut certainement celle de
Louise de Savoie, sa mère. Les historiens qui, au XVIIe siècle, reprenant
l'histoire de Charles de Bourbon et voulant, devant la famille du connétable
montée sur le trône, excuser un peu la trahison du personnage, ont accablé
Louise de Savoie, la représentent comme une Ame fielleuse, avide, bassement
rancunière, sacrifiant ceux-ci ou ceux-là au dépit de ne pouvoir se faire
épouser. Qu'elle ait été très regardante dans ses intérêts, cela semble
certain ; mais qu'elle ait eu le caractère bas, c'est douteux. Fière de son
fds dans lequel elle avait mis toutes ses affections, elle l'a trop adulé
pour avoir eu la force de le bien diriger. Son rôle, pendant la captivité de
Madrid, fut digne, intelligent et ferme. François Ier l'estimait infiniment —
les lettres qu'il lui écrivait le prouvent. Lorsque cette pâle et mince
personne mourut, le 22 septembre 1531, âgée de cinquante-six ans, elle fut
regrettée partout, et la mélancolique épitaphe que le roi son fils composa
sur sa tombe :
Ci-gist le corps dont l'âme est
faite glorieuse, etc.,
parut justifiée à tout le monde.
La seconde de ces influences a été celle de la sœur du
roi, Madame Marguerite d'Orléans, comme on
l'appelait, la charmante reine de Navarre, qui, veuve du duc d'Alençon, mort
après la bataille de Pavie, fut mariée, le 31 janvier 1527, sans
enthousiasme, au roi de Navarre, Henri d'Albret, dont elle aura Jeanne
d'Albret, la mère d'Henri IV. La fine et intelligente créature, si
accueillante, si gracieuse, bonne, douce, charitable, incapable de mépriser
personne, l'esprit très ouvert à toutes les idées, aimant causer avec les
savants, écrivant des contes — la Marguerite des Marguerites, — des
comédies, des pastorales, des chansons et composant des vers, adorait trop aussi
ce frère gâté qui l'appelait sa mignonne,
pour ne pas tout accepter de lui sans chercher à corriger ses défauts. Ne parlons pas de celle-là, disait François Ier à
quelqu'un qui lui dénonçait les tendances luthériennes de sa sœur ; elle m'aime trop ; elle ne croira que ce que je croirai !...
Elle croyait et voulait ce que son frère désirait. Cette admiration
approbative ou, tout au moins, si la princesse désapprouvait, son inaptitude
à hasarder des remontrances faisait de la spirituelle mais peu énergique
Marguerite une aide insuffisamment efficace à ceux qui eussent voulu voir
conseiller au roi plus de suite et de sérieux. Peut-être s'en affligeait-elle
au fond d'elle-même, et sa fleur préférée, sa devise, le souci,
trahissait-elle les inquiétudes secrètes de sa pensée !
Les reines, femmes successives de François Ier, n'ont pas
compté : la première, Claude, morte, trop jeune, à vingt-cinq ans, la
seconde, Eléonore, sœur de Charles-Quint, épousée par nécessité politique,
n'ayant pas eu d'enfant du roi et vivant à l'écart un peu seule, isolée
malgré un personnel de cour nombreux, étrangère, dépourvue d'influence,
paraissant à peine et ne jouant aucun rôle.
Les amies du souverain ont tenu au contraire une place
bien plus considérable. François Ier a eu la réputation d'avoir été un des
princes les plus gais et les plus volages qui aient régné en France. On a
exagéré. Jeune, peut-être a-t-il fait preuve de vivacité de sentiments très
changeants. Il n'a eu en réalité que trois affections principales qui, il est
vrai, l'ont tenu toute sa vie, ce qui est beaucoup. La première, la moins
importante, fut celle que provoqua Anne de Graville, demoiselle d'honneur
d'Anne de Bretagne, blonde et fine jeune fille, intelligente, gracieuse,
attrayante avec ses yeux noirs, son grand front, sa petite bouche et son
teint rose. L'histoire ne dura guère. Anne se sauva un jour en compagnie de
son cousin, Pierre de Balzac d'Entraigues, et on les maria ensemble avec une
petite dot pour la peine ; ils eurent beaucoup d'enfants.
La seconde liaison fut plus sérieuse. Françoise de Foix,
sœur de deux capitaines de cette maison de Foix qu’on trouve sur tous les
champs de bataille du temps : Odet de Foix, vicomte de Lautrec, vingt fois
blessé à Ravenne ; André de Foix, seigneur de Lesparre, aveuglé d'un coup de
feu, — avait été mariée jeune, en 1509, au Breton Jean de Laval, sire de Châteaubriant.
C'était une grande et forte créature, brune, plantureuse, solide. Elle
écrivait des poésies, plus abondantes que délicates ; elle avait l'esprit cultivé.
Mais elle était coquette de sentiments, peu distinguée, manquait de réserve
et n'aimait pas son mari. Les préférences du roi pour elle datèrent de 1516,
au retour de Marignan : ce furent des relations peu tranquilles dans
lesquelles furent échangés beaucoup de vers — la mode en ce temps-là étant de
s'écrire en vers — et beaucoup d'aigreurs : elle, vive, impérieuse, jalouse ;
lui, insouciant et rieur. Elle fut un peu encombrante :
Ci-gist un rien, là où tout
triompha...
écrivait avec raison plus tard Marot en composant son épitaphe.
La comtesse de Châteaubriant fut remplacée vers 1523 par la duchesse
d'Etampes, qui était tout son opposé.
Anne de Pisseleu, demoiselle d'Heilly, plus tard duchesse
d'Etampes était, en 1523, une blonde et pâle jeune fille de dix-sept ans,
charmante, distinguée, mince et gracieuse, demoiselle d'honneur de Louise de
Savoie, aussi tendre et retenue que l'autre était véhémente et en dehors.
François Ier la remarqua dans l'élégante petite troupe des filles d'honneur
de sa mère ; il dissimula son émotion. Louise de Savoie et Marguerite la
devinèrent. Au moment du départ du roi pour Pavie, la cour ne savait rien ;
elle apprit tout au retour. La rivale, Mme de Châteaubriant, fut hors d'elle
; elle s'emporta, répétant qu'Anne d'Heilly avait les cheveux crêpés ; il
fallut que François Ier lui signifiât la rupture et son congé, ce qu'il fit
par une lettre rimée, dans laquelle il la comparait à une bête insensée.
Accomparée à la beste insensée,
Fut envoyée, avec, aux champs
paître !
écrivait ironiquement la reine Marguerite. La nouvelle
affection du prince qui devait durer vingt-quatre ans, jusqu'à la mort, lui
procura un attachement fidèle et intelligent, une amie exquise, spirituelle,
aimante et calme. Après la mort de Louise de Savoie, M"^ d'Étampes fut
nommée gouvernante des filles du roi, Marguerite et Madeleine, qui avaient
dix et sept ans, témoignage singulier d'estime et d'affection. En 1534, à
vingt-huit ans, elle avait été mariée à Jean de Brosse, comte de Penthièvre :
le roi donna aux époux le comté d'Étampes qu'il érigea en duché deux ans
après.
Ce fut surtout au milieu de ce groupe de femmes que
François Ier vécut, ne les quittant pas, se plaisant en leur compagnie, se
faisant suivre d'elles dans ses voyages.
Il faudrait ajouter ses filles. Il a eu de la reine Claude
six enfants : trois garçons : François, Henri et Charles ; trois filles :
Louise, Madeleine, Marguerite. Des trois garçons, l'aîné mourut assez
brusquement en 1536, après avoir bu un verre d'eau trop froide à la suite
d'un exercice violent ; le troisième, le duc d'Orléans, fut emporté, en 1545,
à vingt-trois ans, d'une maladie épidémique contractée près d'Abbeville ; le
second, Henri, est celui qui va devenir Henri II. Des trois filles, Louise
mourut n'étant encore que fiancée ; Madeleine fut reine d'Ecosse : à sa mort
François Ier avait encore près de lui Marguerite, âgée de vingt-deux ans,
qu'on n'avait pas pu arriver à marier, et qui, intelligente et très bien
douée comme sa tante, savait le latin, le grec, l'italien. Ce fut une
charmante enfant que son père aimait beaucoup. Elle complétait le cadre
agréable qui entourait François Ier et qui le distrayait.
Devant l’insouciance du prince adonné à la vie de société,
tout aux plaisirs et aux joies de l'existence, les conseillers de François Ier,
jouissant de la faveur du maître, prirent une place considérable. Au début du
règne, le roi avait quatre ou cinq favoris, ses anciens amis, Bonnivet,
Brion, Montchenu, Montmorency. A la suite de sa brillante campagne contre
Charles-Quint, Montmorency devint prépondérant. Il avait au gouvernement près
de lui l'amiral Chabot de Brion et le chancelier Poyet. Il y eut entre eux
mésintelligence. Montmorency et Poyet détestant Brion le perdirent, le firent
chasser et lui firent faire son procès. A son tour, Montmorency connut la
disgrâce, lorsque la politique, qu'il avait préconisée, d'entente avec
l'empereur, eut échoué : Poyet fut entraîné dans la même chute. Vers la fin
de sa vie, François Ier avait placé toute sa confiance dans l'amiral Claude
d'Annebaut, un bon capitaine, plein d'honneur, un peu bègue, mais très brave
homme, et le cardinal de Tournoi !. Il ne voyait plus que par leurs yeux,
s'en remettait à eux du soin de diriger les affaires, approuvait tout ce
qu'ils faisaient. Il ne prend plus aucune décision,
écrivait l'ambassadeur vénitien, il ne fait aucune
réponse qu'il n'ait écouté leurs conseils ; en toutes choses il s'en tient à
leur avis, et si jamais — ce qui est fort
rare — on donne une réponse à quelque
ambassadeur, ou si l'on fait une concession qui ne soit pas approuvée par ces
deux conseillers, il la révoque ou la modifie. Ayant ainsi trouvé dans
son manque d'application aux affaires, deux administrateurs auxquels il
pouvait délaisser le souci du gouvernement, François Ier était libre de
s'abandonner à la vie de son choix, la vie de cour, de plaisir et de voyages.
La cour de François Ier a été la première en date de ces
royales réunions de seigneurs et de grandes dames toujours parés, toujours en
fête, qui, par leur air de joie perpétuelle, le souci de la représentation,
le brillant et l'éclat, sont demeurés si longtemps un achèvement raffiné de
la vie sociale. Le cadre même de la cour, avec ses fonctions et ses titres,
existait depuis très longtemps, s'était lentement formé à travers les siècles
du Moyen âge et durera sans beaucoup de changements ou d'adjonctions
nouvelles, jusqu'à Louis XIV et jusqu'à Louis XVI. En donnant aux femmes une
place spéciale, en provoquant le souci chez tous d'être magnifiquement paré
et en multipliant les assemblées, François Ier a, pour ainsi dire, vivifié ce
cadre et lui a donné ce caractère de grandeur, de richesse et d'élégance dont
l'apogée a été atteint au temps de Louis XIV. Une
cour sans dames, écrivait Brantôme, est un
jardin sans aucunes belles fleurs. Les femmes ont particulièrement
brillé sous François Ier ; mais, à côté, un luxe de personnel, de titres, de domestiques, entoure le roi d'un cortège sans
nombre pour rehausser sa dignité et accroître son prestige. Parcourons
rapidement cette galerie.
Sous la direction du grand maître de la maison du roi qui
fut successivement Boissy et Montmorency, voici le service particulier du
souverain hiérarchisé : le chambellan, qui gouverne la chambre du roi ; les
quatre gentilshommes de la chambre, qu'on appellera plus tard les premiers
gentilshommes, servant chacun par quartier, c'est-à-dire trois mois par trois
mois, ne quittant jamais le prince et ayant douze pages de la chambre sous
leurs ordres ; toute une phalange ensuite de gentilshommes de la chambre les
secondant, le nombre en a varié de vingt à cinquante-quatre. Puis viennent
une vingtaine de maîtres d'hôtel, chargés de la partie matérielle de la vie
du roi, la nourriture surtout, — ce sont des gentilshommes encore — et ayant
sous leurs ordres pour l'accomplissement de leurs fonctions une trentaine de
panetiers, vingt-cinq échansons, quinze valets tranchants. Ce qui est
secrétairerie, correspondance, papiers d'Etat est du ressort de sept
secrétaires de la chambre parmi lesquels on trouve la famille célèbre des
Robertet, François, un filleul du roi, Jean, tous casés par Florimond,
l'ancêtre ; puis un Nicolas de Neuville, qui ouvre la série interminable de
ces secrétaires du roi et secrétaires d'Etat du même nom, devenus ensuite des
Villeroy et qui se sont pendant trois siècles, pour ainsi dire, transmis de
père en fils les charges près des personnes royales. François Ier a pour
pages ce qu'il appelle des enfants d'honneur,
une trentaine, ayant mission de menus offices, tels que celui d'apporter au
roi un objet qu'il demande et surtout de parer les réceptions de leur grâce
juvénile et de leurs beaux costumes d'argent.
Puis vient la chapelle du roi avec le grand aumônier, qui
est cardinal, le maître de l'oratoire, qui est un évoque ; le confesseur du
souverain, qui est dominicain ; cinquante aumôniers du roi parmi lesquels
François Ier ira chercher les évoques qu'il nomme aux sièges épiscopaux du
royaume, conformément au concordat de Bologne ; enfin ses sept chapelains et
ses sept sommeliers de chapelle.
Au-dessous s'étagent les séries inférieures d'emplois subalternes
plus particulièrement domestiques : les
quatre huissiers de la chambre, manières de personnages tout de même ; les
vingt à quarante valets de chambre ; — le titre n'étant pas seulement donné à
ceux qui remplissent la fonction, mais aussi à des gens que le roi désire
honorer, la qualité s'accompagnant d'une pension annuelle de 240 livres : Clément
Marot, François Budé ; — un maître de la garde-robe, deux portemanteaux, sept
chantres, sept médecins, six chirurgiens, quatre barbiers, un libraire, de
huit à quatorze gens de métier, huit clercs d'office, huit huissiers de
salle.
Les cuisines comprennent un personnel considérable, divisé
en deux séries : ceux qui s'occupent de la nourriture du prince, la cuisine bouche, ceux qui s'occupent de la nourriture
du reste de la cour, la cuisine commun ; et
ce sont pour chacune de ces cuisines, quatre écuyers, six queux, puis
potagers, hâteux, sauciers, pâtissiers, garde-vaisselle, enfants de cuisine,
barilliers, sans compter les aides, et, au-dessous ou à côté, cette foule de
fonctions diverses, cortège inévitable d'une cour compliquée, fruiterie,
fourrière. tapissiers, maréchaux de logis, musique — tambourins, fifres,
joueurs de cornet ou autres instruments, — trésoriers et le reste.
L'écurie est à part, commandée par le grand écuyer Galiot
de Genouillac ayant sous ses ordres vingt-cinq écuyers d'écurie, tous
gentilshommes dirigeant une armée de cochers et de palefreniers. Car Dieu
sait si l'écurie de François Ier doit être nombreuse pour fournir aux
déplacements perpétuels du souverain et de son monde !
A part aussi, le personnel des chasses, non moins nombreux
: un capitaine des toiles et cent archers destinés à disposer des toiles dans
des parties de forêt pour les envelopper, — on rabat le gibier dans ce clos
et on le tire, — cinquante chariots, douze veneurs, des valets de chiens ;
plus de cent chiens et limiers ; puis la fauconnerie et ses trois cents
oiseaux de proie, entretenus par cinquante aides-fauconniers, cinquante
gentilshommes sous les ordres du grand fauconnier, René de Cossé.
Chacune des reines, reine de France, reine de Navarre,
chacun des princes a des maisons, satellites de celle du roi, sinon aussi
fastueuses, au moins aussi hiérarchisées. Les reines ont, en plus, des dames,
une dame d'honneur qui est, pour Claude de France, — rencontre ironique ! —
Mme de Châteaubriant ; des dames proprement dites, quinze pour Claude, dix
pour Marguerite ; des demoiselles d'honneur, qu'on appelle filles demoiselles, seize pour la première, huit
pour la seconde. Les filles du roi ont dix-neuf dames, dont trois
gouvernantes, sans parler des nombreuses femmes de chambre.
Aux fils du roi sont attachés deux gouverneurs, cinq
chanceliers, dix maîtres d'hôtel, trois gentilshommes, quatorze enfants
d'honneur et une foule de serviteurs analogues à ceux du roi.
Cette esquisse rapide ne serait pas complète, si nous ne
mentionnions la garde du roi, quatre cents archers de la garde, dont trois
cents Français et cent Ecossais, origine des gardes du corps ; les cent
Suisses, hallebardiers vêtus de la livrée du roi ; les deux cents gentilshommes
ayant chacun sur leurs épaules un bâton à bec de
faucon, plus tard gentilshommes à bec de corbin, avec des costumes aux
couleurs variées rehaussant les cérémonies de leurs uniformes chamarrés.
Ces cérémonies, il faut se les figurer dans tout l'éclat
des habits d'or et d'argent affectionnés par François Ier, se détachant sur
le cadre blanc, noir et tanné de la livrée du
prince. A la vérité, François Ier a eu un peu de peine à trouver à Paris un
logis convenable pour semblables déploiements. Il n'habite pas le Louvre,
vieille forteresse carrée et sombre, incommode, encombrée au milieu d'un
donjon énorme qui obscurcit les salles et les rend lugubres ; le Louvre,
d'ailleurs, ne sert que de prison et de trésor : le roi réside plutôt aux
Tournelles près de la
Bastille, amas de constructions disparates de tous âges et
de tous styles, fouillis de salles et de cours sans grandeur et sans
commodité ; ou bien il s'installe au Palais, le logis du parlement. Il y a au
Palais une grande salle, la salle des procureurs, à deux vaisseaux gothiques,
ornée des statues en bois sculpté et peint de tous les rois de France, qui
est en somme la plus belle salle de Paris ; et c'est là principalement que
François Ier reçoit. On tend les murs de tapisseries ; s'il s'agit de
l'audience solennelle donnée à quelque ambassadeur, on dresse un échafaud
garni de tentures, au fond, près de la table de marbre, échafaud sur lequel
se place le fauteuil, ou, comme on dit en ce temps, la
chaire du roi ; s'il s'agit d'un banquet, d'un bal ayant lieu le soir,
on remplit la salle d'une profusion de cierges de
cire ardente pendant en croix par le haut ; et, dans ce cadre de
somptueuses tapisseries, sous le flot de lumières tombant de la voûte,
scintille et miroite la profusion des costumes dorés des seigneurs ou des
dames de la cour. A défaut de la grande salle du Palais. François Ier recevra
dans la maison de l'évêque de Paris, derrière Notre-Dame. Il donnera encore
des banquets dans la cour de la
Bastille, toute la cour tendue de tapisseries sur
lesquelles sont attachées des guirlandes de lierre, douze cents torches
illuminant ; on appelle cela une fête à torches
ardentes, et après le banquet suit un bal. Avec les dîners et les
bals, la grande fête des courtisans est encore la joute, qui a lieu devant
l'hôtel des Tournelles, au milieu d'échafauds couverts de tapisseries sur
lesquels prennent place des dames en toilettes élégantes, pendant que les
chevaliers habillés de pied en cap de ces magnifiques armures damasquinées
dont nous avons conservé des exemplaires remarquables, rivalisent d'adresse,
de vigueur et d'endurance. Deux fois par semaine, François Ier aime à réunir
sa cour en une joyeuse et brillante assemblée. C'est un peu politique chez
lui. Plus tard, sa belle-fille Catherine de Médicis écrira à Charles IX : J'ai ouï dire au roi votre grand-père (François Ier) qu'il
fallait, pour vivre en repos avec les François et qu'ils aimassent leur roi,
deux jours les tenir joyeux, sinon ils s'emploient à autres choses plus
dangereuses.
En réalité, le roi reste peu à Paris : il ne sait rester
nulle part ; d'humeur très changeante, il va et vient perpétuellement,
toujours en voyage, demeurant à peine quinze jours au plus en un endroit et
repartant au hasard d'un côté ou d'un autre. Et la cour entière doit le
suivre ; immense attirail exigeant un train
considérable ; Benvenuto Cellini écrit dans ses Mémoires qu'il faut douze
mille chevaux, et quand la suite est complète, dix-huit mille pour mener tout
ce monde ! Au dire de Soranzo, l'ensemble représente une masse de six mille
cavaliers et de douze mille piétons. Or, la vie n'est pas plaisante au cours
de ces pérégrinations extraordinaires. Si l’on arrive le soir dans un pays où
il n'y a que peu ou pas de maisons, force est de camper, de dresser des
tentes, des baraques en toiles ; cela ressemble quelque peu, ajoute Cellini,
qui en souffrit beaucoup, à des installations de bohémiens
! Chacun pâtit. Seul le roi ne paraît pas subir autrement les conséquences
d'une vie aussi instable. Rien ne lui manque, Il a des tapissiers, nommés repos-teros, qui vont devant lui, installant pour
le soir son gîte, dressant son lit — on transporte son mobilier de chambre —
et allant par les champs tendre les tapisseries,
nettoyer les tapis velus que l'on met en terre en la chambre (tapis de pied d'Orient) et nettoyer les habillemens. Sa table ne manque de
rien ; il est servi à souhait : Dans un village, dans
des forêts, en l'assemblée, écrit Brantôme, il
est traité comme s'il eût été dans Paris. En traversant la France, Charles-Quint en
était étonné. Mais la suite gémit et récrimine. Les seigneurs se ruinent à
ces déplacements dispendieux où tout leur représente des frais excessifs, et
les ambassadeurs étrangers qui ne quittent pas le roi en marche, ne tarissent
pas de plaintes amères. En créant la première cour moderne, François Ier a
conservé l'humeur errante des premiers Capétiens vagabonds.
Or, cette existence voyageuse lui coûtait très cher, à lui
aussi. Il n'a jamais regardé à la dépense. François Ier est un des rois de
France qui ont le plus gaspillé d'argent, de la façon la plus magnifique
peut-être, mais la plus inconsidérée et la plus insouciante.
Ce gaspillage, il l'apporta dans tout. Il adorait le luxe
pour le luxe lui-même. Nous avons dit qu'arbitre de l'élégance, il dirigeait
la mode : la mode fut, de son temps, extraordinairement onéreuse. Tout ce que
François Ier avait sur lui était en or : en or, les breloques nombreuses dont
il aimait à se couvrir ; en or, ses éperons, ses miroirs, les boutons et les
agrafes de ses vêtements ; la mule qu'il montait avait une housse garnie d'or
et une bride de soie plaquée d'or, avec des boutons d'or sur les houppes ;
ses habits étaient en drap d'or, brodé, frisé, profilé d'or, comme des
ornements sacerdotaux. Il couvrait ses doigts de bagues, de diamants, de
rubis. Il portait du linge de la plus fine toile de Hollande, des chemises
brodées de soie noire que l'on conservait dans des étuis de maroquin parfumé.
Les objets servant à son usage familier étaient en argent : encrier, flacons,
chandeliers, vaisselle, rebec (instrument de
musique dont il jouait) et pupitre ; on ne comptait pas ses élégantes
fourrures de zibeline ou de martre ; le fourreau de son épée était de velours
blanc. Certaine année, son tailleur présenta une note de 15.600 livres.
Il fallut qu'autour de lui la cour suivît l'exemple. Aux
jours de belles cérémonies, les deux cents gentilshommes de la garde étaient
vêtus de drap d'or, tandis que le roi paraissait tout blanc, en toile
d'argent, et qu'à côté de lui se tenait le chancelier de France en robe de
cérémonie avec un manteau écarlate ; les pages et les gens de l'écurie
étaient aussi en blanc, moitié velours, moitié toile d'argent ; courtisans et
dames devaient rivaliser de splendeur et d'éclat, y mettre jusqu'à leur
dernier écu ; et tout en admirant le public se moquait ; à la place Maubert,
les moralités jouées sur les planches raillaient les seigneurs qui emportaient leurs terres sur leurs épaules.
C'était surtout le roi qui se ruinait. En un autre temps
que cette période de notre histoire dans laquelle la fortune publique a été
large, la misère due au gaspillage eût été extraordinaire. Il n'est pas très
aisé d'avoir des chiffres sûrs, la comptabilité, comme on va le voir, n'ayant
pas pu être rigoureuse. Les revenus réguliers paraissent avoir été de 3
millions d'écus d'or. Sur le papier, les dépenses semblaient s'équilibrer :
on prévoyait au compte du roi 50.000 écus pour ses habillements, dons,
dépenses courantes ; 50.000 écus pour ses menus plaisirs : 200.000 pour
l'entretien des gardes ; 70.000 pour la reine et sa maison ; 300.000 pour le
dauphin ; 40.000 pour la chasse. Mais, en réalité, François Ier donnant ou
commandant sans réflexion ni réserve, le chapitre des dépenses s'étendait
indéfiniment. Les guerres dispendieuses, les pensions payées à l'étranger,
les sommes remises au roi d'Angleterre, contribuèrent à approfondir le
gouffre : il est impossible de savoir ce que le règne de François Ier a
coûté. Dès 1518, le déficit était de 1.261.203 livres.
On usa de tous les moyens : on emprunta à tout le monde et tout le temps, aux
villes, au clergé, aux banquiers français et étrangers ; on inventa les
rentes de l'Hôtel de Ville, premier essai de crédit public et de grand livre
; on aliéna ; on usa d'expédients de tout genre : on augmenta les droits ; on
vendit les offices. C'est miracle que le gouvernement n'ait pas fait
banqueroute ! Mais la prospérité était telle que les sujets payèrent sans
trop récriminer ; un ambassadeur italien admirait leur soumission ; à sa
mort, François Ier trouva le moyen de laisser encore dans ses coffres plus de
deux millions d'or ! Le désordre du roi dans ses finances devait faire au
moins une victime : ce fut Semblançay. L'histoire de Semblançay est
caractéristique de l'insouciance et de la légèreté du prince dans ses
gaspillages, comme elle éclaire le mode et l'organisation de l'administration
du temps.
On a raconté que Semblançay avait été perdu par Louise de
Savoie, laquelle l'avait empêché d'expédier à Lautrec, se battant en Italie,
certaine somme d'argent réclamée par celui-ci, afin de se venger des dédains
à son égard de Lautrec qu'elle aimait, ce qui aurait amené la défaite du
malheureux à la
Bicoque. Cette version est controuvée. Vieux serviteur
blanchi dans l'administration des finances, Jacques de Beaune de Semblançay,
fils d'un simple marchand de Tours, avait été successivement trésorier au
service d'Anne de Bretagne, général (receveur
général) du Languedoc en 1490, de la Langue d'oïl en 1509, et en 1518 était devenu
une manière de surintendant des finances du royaume avec la charge, connaissance et intendance du fait et maniement de
toutes nos finances, comme disait l'acte royal. Il gérait les deniers
du roi et en même temps la fortune privée de Louise de Savoie. C'était un
personnage considérable. Malheureusement pour un financier, s'il avait de
l'habileté, il n'avait pas d'ordre ; sa comptabilité laissait à désirer.
Lorsque les prodigalités de François Ier endettèrent le trésor royal et qu'il
fallut user d'expédients afin de remplir celui-ci, les opérations de
trésorerie compliquées achevèrent de brouiller la gestion de Semblançay. Il
ne s'en préoccupa pas. A tort ou à raison, en outre, il crut que Louise de
Savoie entendait que sa fortune vînt en aide, dans les cas extrêmes, au
trésor royal épuisé, et il usa de cette permission, — réelle d'ailleurs, en
principe. Le résultat fut beaucoup de confusion. Aussi, lorsqu'on fut sur le
point d'envoyer de l'argent à Lautrec, il se trouva que le trésor royal
devait à la cassette de Louise de Savoie une somme équivalente à celle qui
allait passer les monts, et qu'au lieu de gagner l'Italie, l'argent resta à
la mère du roi. Les emprunts, les aliénations, les ventes d'offices se
succédaient et tous autres procédés du même genre : les difficultés des
finances publiques ne faisaient que croître. En 1522, le déficit fut de 2.000.000 livres.
Le roi, moins attentif à la manière dont il dépensait à pleines mains
qu'impatienté de la gêne perpétuelle dans laquelle étaient ses finances, au
dire de Semblançay, s'avisa enfin que le même Semblançay était extrêmement
riche, qu'il paraissait de jour en jour devenir plus opulent, qu'il achetait
des domaines immenses, bâtissait des châteaux et faisait parade d'une fortune
étrange. L'inquiétude et le soupçon saisissant le roi, il demanda à son surintendant des comptes ; l'autre répondit d'une
façon évasive. François Ier et Louise de Savoie insistèrent et, à plusieurs
reprises, revinrent à la charge. Finalement le roi, lassé des atermoiements
dilatoires de Semblançay, nomma une commission qui fut chargée de revoir et
d'apurer les pièces de comptabilité. Après bien des tergiversations,
Semblançay produisit ses dossiers. La commission les examina. Elle prononça
que les pièces étaient en règle. Les choses demeurèrent en l'état. Deux ans
se passèrent, lorsque au bout de ce temps, un commis de Semblançay mis en
prison pour un délit quelconque, avoua, par vengeance, que son maître lui
avait fait faire, à lui et à d'autres, des actes faux, des bordereaux
antidatés, des quittances falsifiées, en somme que Semblançay avait suborné
et corrompu ses sous-ordres, afin de fabriquer la comptabilité qui avait été
soumise à la commission. François Ier, furieux, décida qu'un procès criminel
serait intenté au surintendant. Semblançay, interrogé, confronté et jugé, fut
convaincu, selon la sentence, de vols, de faux, de malversations, d'abus de
confiance ; il fut condamné à la confiscation de ses biens et à être pendu.
Les juges avaient espéré que le roi n'exécuterait pas leur sentence et ils
avaient été inexorables. François Ier l'exécuta. Ce fut un spectacle
lamentable, que celui de ce vieillard, — Semblançay avait soixante-quinze
ans, — dont l'existence avait été si enviée, conduit au gibet de Montfaucon.
Il mourut le 11 août 1527 avec constance et courage. Le lieutenant criminel
du Châtelet, Maillart, qui le conduisait, tremblait plus que lui :
Et Semblançay fut si ferme
vieillard
Que l'on cuidoit au vrai qu'il
menât pendre
A Montfaucon le lieutenant
Maillart,
comme disait Marot. C'était la revanche ou la rançon des
magnificences de la cour !...
Des effets de ce gaspillage financier de François Ier,
tout ce qui était fêtes a disparu. Il en reste à peine le souvenir à demi
effacé. Pour la gloire du prince une partie et non la moindre a subsisté,
c'est ce que le roi a fait à l'égard des lettres — le Collège de France
toujours vivant en témoigne ; et à l'égard des arts — les châteaux
subsistants bâtis par lui l'attestent.
L'intérêt que François Ier a porté aux lettres et aux arts
est bien provenu un peu, comme chez les mécènes italiens de son temps, du
souci de paraître grand et généreux par une intelligente protection accordée
aux artistes ; mais il y a eu chez lui plus que de cette orgueilleuse pensée
de Louis XIV de rendre son règne illustre au moyen de l'éclat provoqué ou
soutenu des littérateurs, des peintres, des architectes, des sculpteurs ; il
y a eu un goût personnel et désintéressé pour les belles choses. Elevé dans
le luxe délicat des œuvres d'art, il a gardé toute sa vie une prédilection
marquée à l'égard de ce qui était forme élégante ; il avait du discernement ;
il s'est plu à provoquer des créations, à les suivre, à les corriger. Ce
n'est donc pas seulement à titre d'homme riche et prodigue multipliant les
commandes, permettant aux artistes de produire sans compter, qu'il a eu sa
part dans le mouvement artistique considérable de son siècle ; par ses
préférences il a contribué en une certaine mesure au développement des modes
nouvelles qui peu à peu s'introduisaient ; son exemple a incité grands
seigneurs et financiers à l'imiter. Il a eu son influence sur le
développement de la
Renaissance en France.
Cette influence a été moins importante à l'égard de la
littérature. La littérature de la première moitié du XVIe siècle est trop
personnelle pour qu'une action quelconque ait pu être exercée sur elle. Il
n'y a pas lieu de parler du talent de François Ier à écrire. Il composait des
vers ; il échangeait des épîtres rimées avec sa mère, sa sœur, Mme de
Châteaubriant ou Anne d'Heilly ; il a laissé des rondeaux, des madrigaux, des
chansons, des épigrammes. C'est de la versification médiocre plus que de la
poésie.
Mais il était à même d'apprécier les bons vers. Il sut
reconnaître, protéger et encourager le poète le plus en renom de son règne,
Clément Marot, bien du temps par son humeur indépendante, sa nature très
française, ses poésies aisées et gracieuses qui rappellent joliment la vie
des champs. La reine Marguerite qui le goûtait infiniment lui avait fait une
pension de 155 livres
; François Ier lui donna le titre de valet de chambre avec une pension de 240 livres. Le roi
suivait ses compositions ; il le poussa à donner une traduction en vers des psaumes,
qui en effet parut. Mais Clément Marot était de tendance luthérienne ; les
psaumes qui eurent un succès considérable dans le monde protestant et que
tous les huguenots du XVIe siècle chantèrent, lui valurent de vives attaques
à la suite desquelles il dut prendre le chemin de l'exil ; il allait mourir à
Turin en 1544. François Ier lui resta fidèle. Les états de la maison du
prince portent encore le nom de Marot comme valet de chambre du roi, avec la
pension afférente, deux ans après la mort du poète.
Indépendant et personnel était bien aussi ce Bonaventure
des Périers, également pensionné de Marguerite de Navarre, admis à la cour,
poète comme elle et prosateur, qui dans son Cymbalum mundi fait preuve
d'un scepticisme moqueur analogue à celui de Voltaire, Devenu protestant ou
peut-être simple athée, il fut persécuté de tout le monde, même de Calvin, et
finit, dit-on, par se tuer, en 1544.
Mais c'est moins la poésie — sauf avec Clément Marot — que
le conte, la nouvelle qui ont fleuri sous François Ier. Le genre, à
l'imitation de ce qui se faisait en Italie, eut un vif succès au milieu des
courtisans du prince et auprès du prince lui-même. Marguerite de Navarre s'y
adonna personnellement avec application et nous a laissé dans l’Heptaméron
son meilleur titre de gloire littéraire, plus assurément que dans ses
innombrables poésies trop pâles. Les contes de Marguerite manquent peut-être
de relief, mais ils témoignent d'une ingéniosité agréable et ils tranchent
sur les productions similaires contemporaines par un choix d'histoires plus
vivantes et plus modernes. François Ier, qui
est le sujet d'au moins un de ses contes, les goûta, comme il lut
certainement le premier livre, paru en 1535, et le troisième paru en 1545, de
l'œuvre qui représente à un si haut degré ce XVIe siècle varié, jalousement
libre d'esprit, hardi et prompt aux idées neuves : le Pantagruel. Avec
son érudition étendue et son indépendance de caractère, jointes à l'audace de
la pensée, à l'esprit ouvert et moqueur, au jugement critique et averti,
Rabelais a charmé un temps qui se reconnaissait en lui. La puissance d'une
imagination créatrice unique et d'une richesse verbale presque sans égale au
milieu d'un flot mêlé de beautés inimitables et de grossièretés, le tout d'une
portée philosophique et sociale indiscutée, font de son œuvre un monument
hors pair. Mais combien personnel et isolé encore il se trouve, entièrement
compris, peut-être de lui seul, et sans doute ayant eu besoin de n'être pas
trop compris en raison de la témérité des idées, ou de la vivacité des
critiques ! D'une existence plus simple qu'on ne l'a dit, peut-être brave
homme sans trop de prétentions, Rabelais n'a pas été un héros tenté d'exposer
ses jours pour l'affirmation de ses systèmes.
Un de ses contemporains l'a osé et l'a payé de sa vie :
c'est Etienne Dolet, savant imprimeur de Lyon, sceptique, athée. Il imprima
et colporta des livres hérétiques, ce qui le fit poursuivre. Au dire de
Calvin, il méprisait ostensiblement l'Evangile
et déclarait que la vie de l'âme ne différait en
rien de celle des chiens et des pourceaux. Le parlement le brûla. La
peine aujourd'hui paraît sévère. En l'absence de code pénal en ce temps, le
parlement appréciait lui-même les châtiments à infliger pour les crimes qui lui étaient soumis et généralement ces
châtiments étaient très durs. Chez Dolet, l'indépendance de la pensée allait
jusqu'au bout de ses droits : ce n'était pas sur des natures de ce genre que
l'action quelconque d'un roi de France pouvait s'exercer autrement que pour
laisser ou non ses parlements sévir. De par son caractère, la littérature de
son temps échappe donc à l'influence de François Ier.
Avec l'érudition, le roi eut plus de prise. Non pas qu'il
ait suscité ou dirigé des vocations, mais sa protection contribua notablement
au mouvement des études philologiques. Grâce à l'invention de l'imprimerie,
les éditions des auteurs grecs et latins allaient de jour en jour se
multipliant. La curiosité pour les textes anciens, jusque-là peu facilement
accessibles, s'étendait. Des publications telles que les Commentaires sur
la langue grecque de Budé ou le Thesaurus linguæ latinæ de Robert
Estienne facilitaient la pratique des auteurs de l'antiquité et nombre de
gens prenaient goût à l'étude attentive des formes latines ou grecques.
Curieux comme il l'était de tout ce qui était occupation intellectuelle,
François Ier s'intéressa à ce mouvement. Il voulut le suivre, connaître ceux
qui en étaient les meilleurs ouvriers, se tenir au courant par eux de ce qui
se faisait et de ce qu'il Y aurait à faire. Ainsi petit à petit, les savants
les plus en renom de son règne furent introduits près de sa personne. Il en
fit ses commensaux, ses interlocuteurs familiers et ses conseillers sur la
matière.
Le plus illustre a été Guillaume Budé, l'omniscient Budé,
juriste, théologien, mathématicien, philologue, historien, critique, archéologue,
surtout helléniste, un des doctes personnages de la
chrétienté, comme on disait, le prodige de la France, suivant
Erasme, le type du savant du XVIe siècle, un des premiers qui s'appliquèrent
à l'étude de l'antiquité. Louis XII l'avait déjà remarqué et plein do
confiance en lui l'avait envoyé en ambassadeur auprès de Jules II. François
Ier lui donna le litre de valet de chambre et la pension correspondante ; il
l'écoutait beaucoup. C’est surtout d'après les indications du savant
helléniste qu'il allait poursuivre et réaliser deux ou trois idées.
A côté de Budé, c'est Lefèvre d'Etaples, Faber Stapulensis, comme il signe ses livres,
ce qui lui valut le surnom de Stapoul,
un philosophe, mathématicien, moraliste, exégète, peu philologue, celui-là ;
le roi qui avait beaucoup d'estime pour lui le nomma précepteur de son
troisième fils. C'est encore l'helléniste Jacques Toussaint, Tussanus, le maître de Robert Estienne ; Robert
Estienne lui-même ; Vatable, un hébraïsant, de son vrai nom Watebled,
helléniste aussi à ses heures et qui va être professeur au Collège de France
; Guillaume Postel, surtout, orientaliste, un des premiers qui aient
débrouillé l'écheveau des langues orientales, mais bizarre, plein de visions,
n'échappant à l'Inquisition, plus tard, qu'à condition d'être considéré comme
un peu fou. François Ier aimait s'entretenir avec tous d'érudition et de
science philologique.
Au cours de ces conversations furent agités des projets
dont l'exécution restera l'honneur de François Ier. Son attention fut d'abord
attirée, afin d'aider les savants, sur l'utilité qu'il y aurait à faire
rechercher et acheter de toutes parts, principalement à l'étranger, les
manuscrits précieux et de les centraliser dans un dépôt où ils pussent être
consultés par les érudits. Cette double pensée va être l'origine de la Bibliothèque
royale destinée à poursuivre à travers les siècles l'achat et la conservation
des textes les plus utiles à la science. François Ier' entra vivement dans ce
projet. Venise était le grand marché des manuscrits provenant soit de Grèce,
soit de l'Italie. L'ambassadeur du roi à Venise, Guillaume Pellicier, fut
chargé du soin d'en recueillir le plus grand nombre possible et des fonds à
cet effet lui furent envoyés. En 1541, Pellicier expédiait quatre caisses de
manuscrits grecs à Fontainebleau. On donna mission à Guillaume Postel d'aller
en Orient rechercher des manuscrits : il gagna Constantinople, la Syrie, l'Egypte ; sa
moisson fut abondante. D'autres contribuèrent à des acquisitions analogues.
Ainsi se formèrent les éléments d une bibliothèque qui avec des vicissitudes
diverses continuera à progresser et est devenue aujourd'hui la Bibliothèque
nationale. François Ier installa son dépôt de manuscrits, auxquels
s'adjoignirent des livres, à Fontainebleau, au-dessus de la petite galerie
peinte par le Rosso, au second, sous les toits. Un instant, Guillaume Budé en
fut le gardien ; la charge passa ensuite à Pierre Gille.
François Ier a fondé le Collège de France. A la vérité,
comme pour la
Bibliothèque et moins encore que pour elle, il a exécuté
l'idée première de l'institution plutôt qu'il ne lui a donné un grand
développement. Ce fut sur l'initiative de Budé que le roi entreprit cette
création. Il s'agissait de constituer hors du cadre vieilli et rigide des
Universités une sorte de groupement de cours libres sur des matières et des
sciences plus diversifiées que celles qu'on enseignait dans ces Universités.
Les débuts furent modestes. Le roi alloua 400 livres de gages
aux professeurs qui furent choisis : Vatable pour l'hébreu, Postel pour les
langues orientales, Oronce Finé pour les mathématiques, Galland pour le latin.
Budé n'enseigna pas, mais suivit de près l'organisation. A défaut d'immeuble
spécial, les cours se firent dans les salles du collège de Cambrai. Chaque
professeur prenait un texte, le lisait et en faisait le commentaire ; tel
était l'enseignement, d'où le nom de lecteur qu'on donnait à un professeur et
qui s'est conservé jusqu'aujourd'hui. François Ier aurait voulu avoir Erasme
; il lui fit écrire ; le savant hollandais ne se soucia pas de venir. C'est
en 1530 que l'institution a été fondée et que les lecteurs
royaux commencèrent leurs cours, humbles et précaires débuts ! Le
Collège n'avait pas pour les contemporains l'éclat illustre qu'il eut plus
tard ; on le considérait avec indifférence ou avec jalousie. François Ier,
instable et léger, ne le suivit pas d'une sollicitude soutenue et plus d'une
fois les gages des professeurs oubliés subirent au moins des retards. Mais
l'établissement était l'ait ; il devait vivre et se développer. Le roi a eu
la bonne fortune de bénéficier pour son honneur de cette chance de survie et
de cette célébrité ultérieure.
Peut-être a-t-il moins bénéficié qu'il ne devrait de
l'éclat incomparable des arts !
On a beaucoup écrit pour savoir si la Renaissance,
c'est-à-dire cette transformation, principalement dans les arts, qui, au
gothique réaliste, varié, pittoresque, fantaisiste, d'allure libre et
d'apparence désordonnée, fit succéder un art idéalisé, réglé, soumis à des
normes géométriques, à une discipline équilibrée, est le produit immédiat de
l'influence exclusive de l'Italie ou l'effet d'une modification spontanée du
génie français. Les partisans de la première théorie ont attribué à des
Italiens les grands châteaux de la
Loire, les seconds ne veulent voir d'Italien nulle part. Il
y a apparence que la vérité est également éloignée de ces deux affirmations
extrêmes. Le mot Renaissance lui-même qui implique une résurrection — ce
serait la résurrection des principes artistiques de l'antiquité remis en
honneur — est-il exact ? La réponse est plus douteuse ; mais il n'y a pas
lieu de modifier un vocable qui exprime ce que chacun entend.
En réalité, il y a eu d’abord une évolution du goût
français qui après avoir aimé la rudesse vivante de l'art du XVe siècle et
son architecture tourmentée, a préféré l'ordre, l'harmonie et la grâce. Cette
évolution ne s'est pas faite brusquement et elle n'est pas tout à fait due à
la découverte inopinée de l'Italie par les armées conquérantes des rois de
France. Depuis longtemps la
France avait des relations étroites avec la péninsule. Les
commerçants et les banquiers, surtout à Lyon, grand centre d'opérations
commerciales internationales, connaissaient les villes italiennes. Prélats et
dignitaires ecclésiastiques passaient constamment les Alpes, allaient à Rome
pour leurs affaires ; et ils n'étaient pas sans avoir aperçu ou apprécié les
œuvres d'art de la civilisation italienne très avancée à cette date. La
preuve en est que tel comme Thomas James, évêque de Dol en Bretagne, s'était
fait faire, en Italie, en 1478, un sceau que l'on croirait du meilleur moment
de la Renaissance
et que l'abbé de Fécamp avait commandé à Gênes en 1507 un tabernacle du Saint
Sang, aujourd'hui dans l'église de l'ancienne abbaye, qui est une des œuvres
les plus exquises de l’art du XVIe siècle. Les grands amateurs du XVe siècle
avaient fait travailler des artistes italiens ; le bon roi René, qui séjourna
longtemps en Italie, avait pris à son service Pierre de Milan, Francesco
Laurana ; on lui doit le tombeau de Charles du Maine à la cathédrale du Mans,
œuvre italienne toute du style nouveau. D'autres avaient connu ces monuments
de l'antiquité au genre mesuré desquels on paraissait vouloir revenir : Jean,
duc de Berry, avait eu des antiques dans sa collection, des camées, des
médailles. On n'était donc pas ignorant à ce point, au début du XVIe siècle,
de l'Italie, ou même tout à fait de l'art des anciens. Néanmoins peu à peu
des œuvres et des artistes paraissaient qui témoignaient d'une modification
progressive dans la conception du beau en France et acheminaient
insensiblement l'esprit public vers l'idéal qui allait prédominer au XVIe
siècle.
C'était, par exemple, en peinture, Jean Fouquet qui né
vers 1415, mort en 1480, a
travaillé pour Charles VII, Louis XI, et Etienne Chevalier. Son œuvre
incomparable de conscience et de talent reste encore réaliste par beaucoup de
côtés, quoique son réalisme soit moins dur que celui des Flamands de cette
époque, mais comme chez lui les fonds d'architecture classique, la noblesse
de la composition, l'ordonnance des sujets, trahissent le changement qui
s'opère dans les données de ses devanciers ! La transition se décèle. Elle
s'accuse d'une façon plus précise dans les miniatures de Jean Bourdichon, de
Tours (1437-1521), qui a servi quatre
rois et peint les grandes heures de la reine Anne de Bretagne, ce
chef-d'œuvre où la pureté des figures de la reine et des saintes qui
l'environnent, la délicatesse légère et distinguée du détail ainsi que des
nuances nous rapprochent bien plus des séduisantes compositions du XVIe
siècle que de la pensée gothique belle en son genre, mais rigide et engoncée.
On pourrait ajouter un autre artiste de la fin du XVe siècle, attaché aussi
comme Bourdichon à Charles VII, Jean Perréal, dit Jean de Paris, si les
attributions qu'on a faites de ses œuvres n'étaient pas encore trop
incertaines.
En sculpture c'est Michel Colombe (1430-1512), un des meilleurs artistes français, qui, né en Bretagne,
s'est installé sur les bords de la
Loire et ne paraît être jamais allé en Italie. Avec
Bourdichon, Colombe représente à un haut degré cette évolution du goût
français vers des formes plus affinées. Son saint Georges combattant le
dragon, fait par lui pour le château de Gaillon, est une œuvre de notre pays,
en tous points, de ton et d'allure, nullement italienne ; surtout son tombeau
de François II de Bretagne, à la cathédrale de Nantes, commandé par la reine
Anne en 1501, témoigne des modifications qui s'opèrent. Aux quatre coins de
ce tombeau, les Vertus debout, étonnantes d'harmonie, de souplesse,
d'intelligence, de mesure et de simplicité, indiquent comment l'art français
sait déjà, avant le mouvement proprement dit de la Renaissance,
appliquer les meilleures qualités de goût, de tact, d'élégance sans qu'il ait
été besoin des chevauchées répétées de nos armées dans la vallée du Pô pour
aller les apprendre des Italiens. A Colombe il faudrait joindre l'auteur
anonyme des belles sculptures de Solesmes ou celui des tombeaux des enfants
de Charles VIII à Tours et nombre d'œuvres isolées que les critiques
cherchent à attribuera Colombe ou à son école. La sculpture française du XVIe
siècle n'est pas spontanée, elle a ses antécédents.
On doit en dire autant de l'architecture. Les
constructions de la fin du XVe et du début du XVIe siècle, Amboise, le Blois
de Louis XII, Gaillon sont gothiques et œuvres de Français. Les comptes du
château de Gaillon publiés par M. Deville signalent plus de 100 artistes sur
lesquels on reconnaît à peine trois Italiens dont deux établis en France
depuis longtemps et n'ayant pas d'ailleurs joué un rôle important dans
l'édification ou l'ornementation du château. Mais les éléments qui vont
constituer l'art nouveau de la
Renaissance : arcs en plein cintre, colonnes engagées à
chapiteaux corinthiens, niches entre les fenêtres, frises sculptées,
apparaissent peu à peu. Les peintres du XVe siècle ne les ignoraient pas ;
ils en ont constitué à maintes reprises des fonds de décoration de leurs
œuvres. Evidemment ils ne les ont pas inventés et seule l'Italie a pu leur
fournir les modèles. C'est probablement inspirés par eux que déjà à Amboise
les maçons s'exerçaient à des arcs à plein cintre, à des niches à statues,
qui se voient dans les plans d'Amboise donnés par Du Cerceau en son livre des
Plus excellent bastimens de France. La première construction où ces
principes aient été le plus largement appliqués est la partie du château de Blois
élevée sous François Ier.
On a beaucoup cherché à savoir quels étaient les
architectes dos châteaux du temps de François Ier ; on a été étonné de ne
jamais en rencontrer, mais seulement des noms de maîtres maçons. C'est qu'en
réalité l'architecte, dans le sens où nous entendons ce mot-là, n'existe pas
encore et qu'il n'y a alors, comme aujourd'hui dans les campagnes, que des
entrepreneurs de constructions, des ouvriers, beaucoup gens habiles et de
goût, avec lesquels on s'entend pour élever des édifices, lesquels se
trouvent être ainsi le produit d'une collaboration des fantaisies du maître
avec les idées de l'exécutant. Héritière de Blois par son père Louis XII, la
reine Claude voulut avoir autre chose devant elle que les sombres et froides
murailles du château féodal qui s'élevait sur la cour, à droite de l'élégante
construction de Louis XII. Dès 1513, à l'avènement de François Ier, elle fit
travailler. Un architecte comme nous l'entendons, aurait démoli ce qui
existait et dressé le plan d'un grand monument bien compris. Le maître maçon
auquel Claude eut affaire, Jacques Sourdeau, conserva par économie ce qui
existait et arrangea la façade. De là l'irrégularité hasardeuse de cette
façade, qui pour nous ajoute à son caractère. Les fenêtres sont à des distances
inégales les unes des autres, les souches de cheminées s'élèvent sans
symétrie. Il y avait à construire un escalier. Dans l'impossibilité de le
pratiquer à l'intérieur, Sourdeau l'a mis à l'extérieur, sur la façade, même
pas au milieu de celle-ci, mais il a conçu une cage dont l'élégance et la
richesse font notre admiration. La forme des fenêtres continue à être la
croisée de Louis XII, maintenant encadrée de petits pilastres à chapiteaux.
L'ensemble conserve du gothique la composition irrégulière et asymétrique ;
le goût nouveau se révèle par plus de simplicité géométrique et un genre
d'élégance produit de la pureté des lignes. La façade extérieure, du côté du
nord, allait mieux trahir encore le caractère empirique d'un art qui ne
résultait pas de conceptions théoriques d'un architecte imaginant tout a
priori, mais de la pratique habile de maçons construisant au jour le jour
suivant des volontés imprévues. Contre l'ancienne façade du Moyen âge
conservée on avait établi une terrasse ; sur cette terrasse ensuite on éleva
des loggias afin de constituer une autre terrasse pour l'étage supérieur et
ainsi de suite jusqu'au toit, lequel ne se raccordant pas, on dut faire une
petite galerie à pilastres différente du reste de la façade afin de
dissimuler le défaut.
Le Blois de Madame Claude paraît avoir été achevé en 1519.
François Ier en avait suivi les travaux avec grand intérêt ; il résolut à son
tour de construire.
François Ier a été un des plus grands, sinon le plus grand
bâtisseur des rois de France. On lui doit huit ou neuf châteaux et palais. En
fournissant largement aux artistes les moyens de travailler, en donnant un
exemple qui a été imité, en collaborant, en homme de goût, avec les
constructeurs, par ses idées et ses préférences, il a contribué à l'invention
et au développement des formes nouvelles ; il a fait et entraîné la mode.
La première œuvre qu'il entreprit dès 1519, fut Chambord.
Peu de châteaux révèlent mieux la manière dont les constructions se sont
élevées en ce temps, non tout d'une pièce, conçues une fois d'ensemble, mais
parties par parties, à la suite d'idées successives. On ne sait pas pourquoi
François Ier choisit l'endroit pour y bâtir. L'hypothèse d'une histoire
d'amour est une légende. Peut-être s'agissait-il d'un rendez-vous de chasse.
Il est possible qu'il y eût déjà à l'endroit un château féodal. La partie
centrale de Chambord n'est en effet, de plan, qu'un château féodal du XVe
siècle analogue à celui de Vincennes, carré avec quatre grosses tours aux
angles, les murs seulement percés de hautes fenêtres. On étendit la façade
après coup à droite et à gauche jusqu'à des tours, espèces de colombiers, qui
se trouvaient à quelque distance, et pour achever la silhouette générale, on
éleva, plus tard encore, en 1544, la lanterne centrale, suivant un marché
spécial passé avec le maçon Jacques Coqueau qui fournit le dessin. Il se
trouve que le résultat de cette construction ainsi faite est une façade de
l'aspect le plus magnifiquement royal. Mais, à la regarder de près — et ceci
n'est pas une critique, le bel effet de l'ensemble tenant peut-être à ce
détail, — rien n'est régulier ; il y a plus de fenêtres d'un côté que de
l'autre, les souches de cheminées montent au hasard, les fenêtres des combles
ne se correspondent pas, telle tourelle à l'aile droite n'a pas son pendant à
l'aile gauche. Les maçons Denis Sourdeau, Pierre Neveu dit Trinqueau, Jacques
Coqueau, Jean Grossier ont mis un temps infini, plus de trente ans, avec des
arrêts prolongés. Après 1530, revenu de Madrid, François Ier employa jusqu'à
dix-huit cents ouvriers. Les charpentes des combles s'élevaient en 1534 :
Chambord n'a été terminé que vers 1550. En réalité, il ne représente guère
qu'une splendide façade devant un superbe escalier, monumental et de grand
effet ; le château n'est pas habitable ; c'est une fantaisie artistique d'un
roi très riche et très dépensier ; mais il est remarquable à tous égards pour
nous expliquer la genèse de l'art architectural de la Renaissance et les
conditions du développement de cet art. Ce fut surtout à son retour de la
captivité de Madrid que François Ier s'adonna avec une activité
extraordinaire à sa passion de bâtir. Il ouvrit des chantiers un peu partout.
A Paris, il songea à aménager pour l'habitation le vieux château du Louvre.
Sur son ordre, en 1528, on abattit la grosse tour, le donjon, qui occupait la
cour de la forteresse. Le public la regretta, car
elle estoit, dit le Journal d’un Bourgeois de Paris, belle, haute et forte. On arrangea les intérieurs ;
on construisit de grands communs, cuisines, écuries, du côté de la rue
Froidmantel, vers l'ouest. En 1534, la cour pouvait s'installer au Louvre. En
même temps, à la porte même de Paris, auprès du Bois
de Boulogne et du couvent des religieuses de Longchamp, le roi, dit le
même Bourgeois de Paris, commençoit à faire
bâtir et édifier un château et lieu de plaisance et le nomma Madrid, parce
qu'il étoit semblable à celui d'Espagne auquel le roi avoit été longtemps
prisonnier, ce qui d'ailleurs est douteux. Le maître maçon
entrepreneur était Pierre Gadier. Quand on compare la façade de Madrid donnée
par Androuet du Cerceau dans ses Plus excellens bastimens de France,
avec celle du château de Blois — la façade nord de l'aile de François Ier —
on constate que l'ouvrier s'est inspiré des loggias fortuitement réalisées
dans ce dernier édifice. En 1532 le château de Villers-Cotterêts fut
entrepris par les maîtres maçons Jacques et Guillaume le Breton ; en 1533,
c'est l'Hôtel de Ville de Paris que le roi a l'idée de faire reconstruire par
Pierre Chambiges, le maître des œuvres de maçonnerie
de la ville de Paris, déclarent les uns, ou par l'Italien Dominique de
Cortone dit Boccador, affirment les autres ; l'œuvre est cependant française
et ne se ressent pas de l'influence italienne. A Saint-Germain-en-Laye , dont
le roi affectionnait le site, il fut décidé de raser le vieux château féodal
à forme pentagonale, qui s'y trouvait, et de bâtir à la place une œuvre
nouvelle, éclairée, ajourée, haute et vaste. Ce nouveau château, qui avait le
même plan que l'ancien, fut élevé en 1539 par les maîtres maçons Pierre
Chambiges, Guillaume Guillain, Jean Langeois qui empruntèrent leurs idées au
château de Madrid. Mais le lieu de prédilection de François Ier, celui où il
allait de préférence à la fin de sa vie et où il construisit l'édifice qui
lui tint le plus à cœur, fut Fontainebleau.
Harmonie d'âge et de saison,
dit Michelet, Fontainebleau est surtout un paysage
d'automne, le plus original, le plus sauvage et le plus doux, le plus
recueilli. Ses roches chaudement ensoleillées où s'abrite le malade, ses
ombrages fantastiques, empourprés des teintes d'octobre qui font rêver avant
l'hiver ; à deux pas, la petite Seine, entre des raisins dorés ; c'est un
délicieux nid pour reposer et boire encore ce qui resterait de la vie !
Au dire de Benvenuto Cellini, Fontainebleau était l'endroit
de son royaume qui plaisait le plus à François Ier. Le roi commença à
y faire travailler dès 1528. Là aussi il y avait un vieux château pentagonal
contemporain de Louis VII et de saint Louis. Sans se mettre autrement en
frais, on rasa l'édifice ancien et sur ses substructions on éleva les bâtisses
nouvelles ; de là la forme bizarre de la cour ovale ; le donjon seul, au
fond, et la chapelle de Saint-Saturnin, à gauche, étant conservés.
L'ensemble, à distance, n'offrait rien d'imposant. Pourquoi, plus loin,
François Ier eut-il l'idée de faire faire la grande cour, dite plus tard du
Cheval-Blanc, et de réunir les deux groupes de constructions par une galerie,
la galerie de François Ier, de façon à faire de ce château de Fontainebleau
une série bizarre d'édifices isolés sans liaison logique, formant un tout
incompréhensible et incommode ? C'est ce qu'on ne peut s'expliquer que par la
persistance de l'indifférence gothique à l'égard de l'ordre symétrique et les
fantaisies successives d'un propriétaire faisant exécuter les pensées qui lui
venaient à l'esprit sans suffisamment s'assurer si elles se joignaient aux
précédentes. Les maîtres maçons auxquels on doit l'édifice sont Gilles le
Breton et Pierre Chambiges. On a parlé et on parle encore de Serlio, mais
Serlio n'est venu en France qu'en 1541 ; à cette date le château était meublé
depuis huit ou neuf ans. Après ses longs vagabondages, François Ier revenait
volontiers à Fontainebleau pour lui esbattre, à cause
que le lieu et pays est beau et plaisant et propre pour le déduit de la
chasse ; il y avait son appartement ; il en choya et surveilla
assidûment la décoration.
Pour cette décoration, commencée vers 1532, il fit appel à
des ouvriers italiens. C'est ici enfin que va se préciser l'influence
italienne en France. L'appel qu'adressa François Ier aux praticiens d'outre-monts
fut déterminé par plusieurs raisons. La France était d'abord assez pauvre en artistes ;
à part les Clouet, portraitistes sur lesquels on sait peu de chose et qui
maintinrent la tradition française réaliste, mais avec beaucoup de tact et de
mesure, dans leurs crayons surtout, si à la mode au XVIe siècle et d'une
exécution si nette et si forte, on ne trouvait guère d'artistes de valeur.
Lorsque Charles-Quint vint en France, François Ier voulut lui faire cadeau
d'un Hercule d'argent ciselé ; on lui fournit un travail pitoyable et les
ouvriers parisiens assurèrent qu'ils ne pouvaient donner mieux. D'autre part,
esprit curieux et averti, François Ier aimait à s'entourer d'objets d'art ;
il avait à Fontainebleau, au haut du pavillon Saint-Louis, un cabinet où il
conservait et venait voir souvent vases, médailles, statuettes, dessins. Des
marchands achetaient pour lui un peu partout à l'étranger, des tapisseries,
des pièces d'orfèvrerie, des pierres gravées. Les tableaux figurèrent dans
ses collections. Il fit venir d'Italie nombre de toiles, le portrait de
l'Arétin par Salviati, Vénus et l'Amour de Bronzino, la Madeleine du Titien, la Joconde de Léonard de
Vinci, la Léda
de Michel-Ange ; des bronzes, des statues. Il était au courant de l'éclat des
arts dans la péninsule à cette époque du début du XVIe siècle qui est le beau
temps de la Renaissance
italienne. Il ne fut pas le premier qui eut l'idée d'appeler des artistes en
France afin de leur faire exécuter sous ses yeux ce qu'il désirait avoir.
Louis XII avait voulu posséder Léonard de Vinci, d'ailleurs en vain ; les
d'Amboise avaient fait travailler Andréa Solario. Le premier artiste
important que François Ier demanda et obtint fut le Rosso.
Rosso, appelé en 1531 à Fontainebleau, entreprit la
décoration de la galerie dite de François Ier et y travailla jusqu'en 1541. —
Ce que l'on voit aujourd'hui a été très restauré sous Louis-Philippe. — Ce
fut de l'art décoratif purement italien, avec ses qualités et ses défauts. Le
goût français n'avait en rien modifié la conception ultramontaine de
l'artiste, ce qu'il aurait bien singulièrement réussi sur les architectes, si
les architectes italiens étaient les véritables auteurs de nos châteaux de la Renaissance. Après
le Rosso, François appela en 1533 le Primatice, Francesco Primaticcio (1504-1570), qui restera en France jusqu'à sa
mort, secondera et continuera le Rosso dans sa décoration picturale de
Fontainebleau et jouira d'une grande autorité sous Henri II. François Ier
payait largement, en prince généreux et libéral.
Apprenant que la place était fructueuse, d'autres artistes
accoururent, entre autres Benvenuto Cellini, sculpteur, graveur, orfèvre,
ciseleur, homme de talent, mais de caractère difficile. Le roi l'accueillit,
lui fit faire une nymphe en bronze pour Fontainebleau, surtout des travaux
d'orfèvrerie, salière d'or, Jupiter d'argent, aiguières, plats, mais le garda
à peine cinq ans. Il y eut autour du Rosso et du Primatice une petite pléiade
d'artistes et de collaborateurs italiens dont aucun n'a eu un mérite éminent,
qui donnèrent en dehors de leur tâche de manœuvre, eux et quelques élèves,
des tableaux d'un genre particulier, un peu pâles, sans transcendance et sans
grande vigueur, non dépourvus toutefois d'élégance et de facilité ; on
désigne ces artistes de l'épithète d'école de Fontainebleau. Ce que ce groupe
de décorateurs italiens et en général l'influence italienne ont surtout
apporté à l'art français, c'est le détail de l'ornementation. A vrai dire,
de bonne heure même, cette sorte d'influence s'était fait sentir. Oves,
méandres, candélabres, enfants nus folâtrant, les mille détails des
grotesques se relèvent de bonne heure dans les œuvres de nos artistes. Le
développement en est allé grandissant au XVIe siècle. Si la statuaire, peu
représentée sous François Ier, témoigne avec les statues des d’Amboise et de
Louis de Brézé à Rouen, de l'amiral de Chabot ou de Genouillac, la
continuation des meilleures qualités de Colombe : la simplicité, la fermeté,
le goût, la décoration sculpturale recherchée et fouillée décèle les
principes de décoration italienne. C'est donc principalement ainsi que
l'Italie a surtout exercé son action sur le mouvement des arts en France au
XVIe siècle.
SOURCES. Les textes indiqués au chapitre précédent, plus,
pour la maison du roi, le manuscrit français 7833 de la Bibl. nat., puis : Poésies
du roi François Ier, de Louise de Savoie, éd. Champollion-Figeac, 1847 ; Lettres
de Catherine de Médicis, éd. La Ferrière, 1880 ; Th. Hubert, De vita et
rebus gestis Frederici II, 1624 ; Benvenuto Cellini, Mémoires, éd.
Leclanché, 1843 ; Deville, Comptes de dépenses de la construction du
château de Gaillon, 1850 ; Compte des bâtiments du roi, de 1528 à 1571,
1877 ; A. du Cerceau, Les plus excellens bastimens de France, 1576.
OUVRAGES. Ceux indiqués au précédent chapitre et :
Rouard, François Ier chez Mme de Boisy, 1863 ; Louis de Brézé, Les
chasses sous François Ier, 1869 ; de Boislisle, Semblançay et la
surintendance des finances (Annuaire-Bulletin de la Soc. de l'hist. de France,
1881) ; Jacqueton, Semblançay, 1895 ; Petit de Julleville, Histoire
de la langue et de la littérature françaises, t. III, 1897 ; Darmesteter
et Hatzfeld, Le XVIe siècle en France, 1883 ; Faguet, XVIe siècle,
études littéraires, 1893 ; L. Delisle, Le cabinet des manuscrits de la Bibliothèque
impériale, 1868 ; A. Lefranc, Histoire du Collège de France, 1893
; E. Müntz, La
Renaissance en Italie et en France à l'époque de
Charles VIII, 1885 ; L. Palustre, La Renaissance
en France, 1885 ; E. Müntz, Histoire de l'art pendant la Renaissance,
1889 ; L. Gourajod, Leçons professées à l'école du Louvre, 1901 ; P.
Vitry, Michel Colombe et la sculpture française de son temps, 1901 ;
J. de Croy, Nouveaux documents pour l'histoire de la création des
résidences royales des bords de la
Loire, 1894 ; de Geymüller, Geschichte der Baukunst
der Renaissance in Frankreich, 1896 ; le P. Dan, Trésor des merveilles
de Fontainebleau, 1642 ; Dimier, Le Primatice, 1900 ; F. Bournon, Blois
et les châteaux de la Loire,
1908.
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