RICHELIEU ET LA MONARCHIE ABSOLUE

 

TOME TROISIÈME. — ADMINISTRATION GÉNÉRALE (SUITE).

CULTES. — LE CLERGÉ CATHOLIQUE.

CHAPITRE III. — LES CURÉS ET LES PAROISSES.

 

 

Les curés primitifs, cures unies aux abbayes, curés non résidents, vicaires perpétuels. — Le salaire du prêtre desservant et la portion congrue, augmentée sous Louis XIII. — Comparaison de l'état matériel du curé de campagne en 1640, en 1789 et en 1886. — Logement du curé, les presbytères. — Casuel ; creux des allocations payées pont les messes et pour les mariages et enterrements. — Cimetières et tombes. — Recettes et dépenses des églises ; budget des fabriques. — Leur gestion, nomination et pouvoirs des marguilliers. — Célébration du culte ; ornements, objets sacrés, cloches, livres. — Payement des prédicateurs. — Les sermons et la chaire chrétienne en ce temps. — Réparation5et entretien des églises. — Rapports du curé avec le pouvoir civil et avec la population. — Registres paroissiaux, administration des sacrements.

 

Ici, pas de bulles de pape comme pour les chapitres et les abbayes, pas de diplômes de rois ni de chartes vénérables qui nous reportent à dix siècles en arrière ; la paroisse n'a pas d'histoire : humble elle a vécu, et pauvre comme aujourd'hui, et même davantage. Voici pourquoi : parmi les paroisses riches, les unes étaient unies à la mense capitulaire ; elles étaient censées administrées par le chapitre d'églises collégiales ou cathédrales, les autres avaient pour curés nominaux — curés primitifs — des couvents voisins, qui peut-être y avaient à l'origine exercé le ministère. Abbés ou chanoines laissaient depuis longtemps le soin de leurs ouailles à des suppléants — vicaires perpétuels — nommés par eux. Ils confiaient à ceux-ci la besogne pastorale, et se réservaient l'honneur et l'argent, l'autorité et les revenus. Au curé primitif le droit de dire la grand'messe aux fêtes solennelles, de bénir les buis du dimanche des Rameaux ; l'hommage de la cire et du vin ; le produit de la dime. Au vicaire perpétuel, — que le peuple appelle curé, car de fait il l'est, — les s'oins du sacerdoce, de l'instruction de la jeunesse, et une indemnité pour ne pas-mourir de faim[1]. Le curé bénéficier, c'est-à-dire propriétaire de la cure, lors même qu'il ne dépend ni d'un monastère ni d'un chapitre, ne réside pas non plus ; c'est l'ordinaire en Guyenne et en Languedoc. En basse Bretagne, une paroisse est une circonscription très-étendue, elle a à sa tête un recteur, qui n'y habite guère ; il se fait représenter par des curés ou subcurés fermiers des devoirs rectoriaux auxquels il donne un traitement fixe, faible partie des revenus qu'ils perçoivent pour lui ; et dans les hameaux sont des églises succursales — nommées fillettes ou tréves — dont les desservants préfèrent souvent habiter au bourg paroissial, près de l'église mère[2].

L'archevêque de Bordeaux se plaignait que les curés pour se dispenser de la résidence prenaient prétexte de divers procès qu'ils se procuraient eux-mêmes, et se faisaient faire à plaisir sous des noms empruntés ; d'on ils tiraient comme conséquence la nécessité d'aller les solliciter aux sièges mêmes des Parlements. Les évêques d'Angers, de Senlis et autres, plaident contre les chanoines pour les obliger à quitter les cures qu'ils ne peuvent desservir ; longs procès qu'il fallait bien du courage pour entamer, et pour mener à bonne fin. Les curés obtenaient à Rome des bulles qui les dispensaient de résider ; l'évêque en appelait de ces bulles au Parlement comme d'abus ; les curés aussi en appelaient comme d'abus, contre les ordres de leur évêque. Toujours les tribunaux donnaient raison aux prélats ; les curés perdaient leurs procès toujours, mais ne résidaient pas davantage ; de façon que le mal paraissait sans remède. Il s'imagine, disait d'un ecclésiastique l'avocat général Talon, qu'il est loisible d'abandonner sa paroisse, pourvu que l'on y commette un vicaire, comme si le devoir qui consiste en la fonction personnelle du sacerdoce, pouvait être accompli par le ministère d'un procureur. C'est chose étrange que ceux qui sont établis pour avoir le soin des âmes, séparent le titre d'avec le revenu, l'utilité d'avec l'office, fassent consister le seul exercice de leurs charges en la perception, des fruits, et non en l'administration des sacrements, qu'ils commettent d'ordinaire à l'industrie d'un prêtre mercenaire.... Par cette corruption qui s'autorise insensiblement, les pauvres gens, dans la campagne, se trouvent destitués de tout secours, et vivent dans l'ignorance des choses nécessaires à leur salut. La négligence des pasteurs qui aboutit à un scandale public, exige que l'autorité du Roi s'interpose[3]. Ces graves paroles honorent l'homme illustre qui les prononça, mais n'avaient aucune sanction possible, parce que l'autorité du Roi, c'est-à-dire l'immixtion de l'État dans l'Église, était le mal même dont elle souffrait.

Dans la pratique, les populations s'estimaient encore heureuses d'obtenir des non-résidents l'entretien d'un de ces vicaires, dont parle un peu dédaigneusement l'avocat général. Les instances judiciaires introduites dans ce but par les municipalités sont fréquentes. Le clergé même, aux états de 1614, exigeait en cas de congé illimité des titulaires, l'installation d'un desservant à leurs frais. Une commune de Bourgogne qui ne peut en entretenir un vu sa pauvreté, demande aux décimateurs de lui en fournir ; procès-verbal est dressé (1645) par un notaire royal, à la requête des habitants de Changé, en Anjou, de l'abandon de tout service régulier dans leur église. En Picardie, plusieurs prêtres doivent dire deux messes parce qu'ils ont plusieurs paroisses à desservir[4]. Cependant tous ces fidèles payent exactement la dîme, et les clercs ne manquent pas ; l'injustice à leur égard est donc considérable.

Ce vicaire perpétuel que le gros décimateur, les poches pleines, envoie faire avec les poches vides un ministère de charité, ne possède pas le nécessaire : l'un a 75 livres par an, l'autre 100, et il a di], pour les avoir, aller à la barre du parlement de Toulouse. Ailleurs, en 1608, on fixe à 6 écus par an, les gages des vicaires de Mn. les chanoines ; en 1640, ils sollicitent une augmentation de traitement ; on ne saurait s'en étonner. Les cahiers de Champagne (1560) parlaient des prêtres qui, au grand opprobre du clergé, sont contraints, les uns de travailler en journée, les autres de mendier leur vie ; quelques-uns labouraient la terre, comme fermiers[5]. Leur sort s'améliora légèrement sous le ministère de Richelieu. Le cardinal projeta d'assurer aux curés un revenu net de 300 livres afin qu'ils ne puissent être empêchés de faire leur devoir par pauvreté ; et que l'on trouve des personnes capables. La portion congrue avait été fixée sous Charles IX à 120 livres[6] ; congrue voulait dire suffisante et convenable. Pour prouver qu'elle ne l'était guère, il suffit de voir le sens donné dans les derniers siècles à ce terme de portion congrue, pour exprimer un état de gêne à peine supportable, une misère décente. Ils étaient rares les seigneurs qui, comme Mathieu d'Harcourt, à Reugny, abandonnaient à leur curé les dîmes de la paroisse, dîmes laïcisées qu'ils étaient en droit de percevoir. Un pasteur aussi favorisé fait des économies et achète des terres.

A tous, la portion congrue, de 200 livres dans le centre et le midi de la France (au sud de la Loire) et de 300 livres dans le Nord et l'Ouest, telle qu'elle fut décrétée sous Louis XIII, apparut comme un bienfait ; aussi la réclament-ils avec ardeur, mais sans pouvoir tous l'obtenir. Cette portion ne devant jamais dépasser le quart de la dîme, si cette dernière n'atteignait pas 800 livres, le gros décimateur n'était tenu à donner au curé que 25 pour 100 sur ce qu'il recevait lui-même. Or il y avait des paroisses où la dime tout entière ne valait pas 200 livres[7]. Selon le conseil d'État, le prêtre portionné devait abandonner tous les autres produits de la paroisse sauf le dedans et le creux de l'église — le casuel ; — selon le Parlement, il pouvait jouir des fondations mortuaires et des petites ou vertes dîmes. De cette divergence d'appréciations naissaient des difficultés nombreuses[8].

Comparé au desservant de commune rurale en 1886, le curé à portion congrue du dix-septième siècle était beaucoup plus à l'aise. Les 2 ou 300 livres de pension de ce dernier, représentent près de 12 ou 1.800 francs, en tenant compte de la valeur monétaire, et s'élèvent par conséquent au tiers et quelquefois à moitié plus du traitement si exigu de 900 à 1.200 francs, que reçoivent aujourd'hui les curés de campagne. Actuellement, sans le bon marché du pain, et sans les messes qui lui sont payées beaucoup plus cher, le prêtre ne pourrait joindre les deux bouts de l'année, avec son salaire officiel[9]. En outre, les portions congrues étaient franches de tout impôt, même des décimes ecclésiastiques ; tandis que les appointements présents du clergé y sont soumis, comme ceux de tous les autres fonctionnaires. Mais si l'on examine la situation matérielle des curés depuis Louis XIII jusqu'à la Révolution, on s'apercevra que ce qui était congru en 1640 ne l'était plus en 1700, et surtout en 1789. L'élévation du prix des objets nécessaires à la vie, et la diminution de poids d'une monnaie qui n'avait pas changé de nom, dépassaient de beaucoup les augmentations successives de la portion congrue, que le gouvernement décrétait à de longs intervalles[10]. Les deux cents, les trois cents livres de 1640 en valaient 8 ou 1.200 en 1789 ; or les curés n'en recevaient alors que 500 au plus. Ils étaient donc extrêmement pauvres, aussi pauvres qu'aujourd'hui, quelquefois plus ; et le paraissaient surtout davantage par le contraste de leur état avec celui du haut clergé, dont les dîmes et les revenus fonciers avaient grossi, suivant le mouvement ascensionnel des denrées agricoles.

Les desservants étaient, comme de nos jours, logés aux frais des communes ; les habitants devaient leur fournir un presbytère, et même le meubler, mais non le réparer ni l'entretenir. Ces soins incombaient aux prêtres jusqu'au règne de Louis XIV, où ils furent déchargés souvent des grosses réparations[11]. Tantôt les paroissiens devaient à l'église les ornements indispensables, et s'imposaient extraordinairement pour en acheter. Tantôt ces dépenses étaient à la charge des gros décimateurs. Quelques honoraires payés pour les messes, et pour les baptêmes, mariages et enterrements, complétaient le budget du curé ; maigre casuel. Ici une messe vaut 3 ou 4 sous ; chaque couple de mariés donne trois sous, parfois une livre de cire, pour l'entretien des cierges ; là, en Bretagne, la location d'une tombe dans le chœur, varie de quatre à soixante sous, dont un tiers pour le recteur, et deux tiers pour la fabrique. Les tarifs sont dressés par la municipalité ; le conseil communal de Bourg se plaint que les vicaires exigent plus qu'il n'est dû pour les enterrements des pauvres. Personne n'aime à payer, et tous les curés ne sont pas aussi énergiques que celui d'Aydies, en Béarn, qui, ne parvenant pas à toucher les frais de funérailles d'une dame de Souberbielle, s'empare d’une petite pièce de terre ayant appartenu à la défunte, et la vend à son fils Jean de Souberbielle[12]. Même dans les pays les plus pieux, ces taxes étaient impopulaires : le Code paysan promulgué par les campagnes bretonnes, dans la révolte de 1675, porte que les prêtres seront gagés pour le service de leurs ouailles, sans qu'ils puissent prétendre aucun salaire pour toutes leurs fonctions curiales. Il est vrai que les mêmes campagnards demandaient qu'il fût distribué aux messes paroissiales, du tabac avec le pain bénit, pour la satisfaction des habitants[13].

On enterre un peu partout ; chaque seigneur a sa chapelle, chaque couvent a son cimetière. Ni par hygiène ni par sentiment, on ne croit utile ou agréable d'éloigner les morts. L'église est pavée de tombes ; en vertu de conventions anciennes, chacun a son banc dessus, avant de descendre en dessous. La place vient à manquer souvent, on se l'arrache ; la veuve d'un conseiller au Grand Conseil s'avise de faire ouvrir pendant la nuit toutes les tombes des Boissimon, inhumés depuis 120 ans dans une chapelle dont ils sont patrons, de jeter les ossements hors de l'église, et d'y établir un caveau pour les siens[14].

Le mélange du temporel et du spirituel, très-sensible dans les hautes sphères administratives, s'accentue beaucoup lorsqu'on foule le sol peu fréquenté de la paroisse. Paroisse et commune sont même chose à la campagne ; les limites de l'une sont les limites de l'autre : il n'est pas d'autre mairie que le porche de l'église. Les fabriciens, ou fabriqueurs, sont aussi conseillers municipaux ; par suite le curé est un peu maire, mais le maire est encore bien plus curé. Élus chaque année au suffrage universel par le général des habitants, — les femmes comprises sans doute, —les membres de la fabrique s'occupent aussi de la voirie, des droits de pacage, de la levée des troupes ; ils tiennent lieu d'assemblées communales, quand il n'en existe pas[15]. Quand au contraire le bourg possède des consuls ou des échevins, les marguilliers ou gagers d'église se bornent à gouverner le culte extérieur. Ils le font sous la surveillance de leurs concitoyens, qui approuvent ou modifient les comptes notariés que le procureur de fabrique rend publiquement chaque année. En fait de gestion paroissiale, plus qu'en toute autre matière, il n'existe rien d'uniforme, aucun règlement applicable partout. L'usage local, des titres anciens ont force de loi. Ici, interdiction aux maires et échevins de prendre connaissance des deniers des fabriques ; là, obligation d'en compter devant eux ; ici, les marguilliers ont plein pouvoir d'acquérir et d'aliéner ; là, le curé doit assembler tous les habitants pour être autorisé à vendre trois quartiers de terre, restés en friche[16].

Les évêques et les archidiacres, dit le Mercure, ont droit de vérifier, en faisant leurs visites, les rentes et revenus des fabriques. Mais comme le prélat et les dignitaires diocésains ne s'aventurent qu'accidentellement dans les profondeurs des champs, la paroisse rurale vit pauvre et libre en son isolement. Il lui fut ordonné sous Louis XIII de porter chaque année ses comptes à l'évêché. Elle le fit avec répugnance, mettant près de soixante ans à obéir. La hiérarchie s'établit cependant ; au dix-huitième siècle, l'archevêque de Lyon enjoint aux fabriques de ne rien dépenser au delà de 15 livres, que de l'avis et consentement des curés, parce que souvent elles emploient leurs fonds à choses inutiles ou fort peu nécessaires. S'ils supportaient mal en effet l'autorité épiscopale, les administrateurs laïques faisaient bon marché de la volonté du curé. Non-seulement ils nomment les chappiers, les clercs de l’œuvre et autres employés auxquels le curé ne peut ôter le surplis sans leur assentiment, mais ils choisissent les prédicateurs, contestent au recteur le droit de régler le service divin, lui refusent quelquefois les ornements et la clef de la sacristie, jusqu'à ce qu'ils y soient obligés par les tribunaux. Il est vrai que s'il y a quelque grosse réparation à faire, ou si les charités sont tellement refroidies pour les quêtes, que le budget soit en déficit, ils abdiquent volontiers entre les mains du curé, lequel gérera désormais les affaires de l'église, jouissant de tout le revenu et payant toutes les dépenses[17]. En quelques provinces, ce n'est pas la fabrique, c'est au contraire le conseil de ville, régulièrement organisé, qui délibère sur la construction d'une chaire, sur l'entretien de la lampe du chœur, qui règle la sonnerie des cloches ; car les cloches et le clocher appartiennent souvent à la commune[18].

Les recettes paroissiales consistent en quêtes, en une foule de rentes foncières dont la plupart n'atteignaient pas même 20 sous, mais qui par leur multiplicité formaient une somme. Les églises, et dans les églises les chapelles, ont leurs bienfaiteurs, leurs donateurs ; tel seigneur, tel bourgeois est fondateur de la chapelle Saint-Nicolas, de l'autel Sainte-Marthe ; c'est quelque chose, on perpétue son nom. La location des bancs, la sonnerie des cloches aux obsèques, partie des amendes de police que la commune abandonne à titre de subvention, telles sont les ressources.

Les dépenses varient fort : dans les grandes villes, des bedeaux à 100 livres de gages, des suisses[19], une musique religieuse pour laquelle on se pique d'émulation entre cités voisines, des crieurs de patenôtres qui vont la nuit avertir et inciter les citoyens à prier Dieu pour les trépassés ; des embellissements et reconstructions d'autels qui coûtent plusieurs milliers de livres, des tapisseries, des tableaux, des dorures ; de beaux antiphonaires, des missels imprimés sur vélin, à 50 livres la pièce ; certaines délicatesses, édifiantes inventions, comme ces ressorts et machines qui, dans l'église des Jésuites de la rue Saint-Antoine, font descendre l'ostensoir jusque dans les mains de l'officiant[20]. Dans les paroisses rurales, c'est le culte réduit à son expression la plus simple : le vin destiné aux messes et à communier le peuple à Pâques, jusqu'à ce que la communion sous les deux espèces fût supprimée, un bréviaire de 30 sous, des motets en musique de 8 sous, une chape de damas cafard du prix de 30 livres, ou quelque autre ornement depuis longtemps attendu.

Beaucoup d'églises, au temps des guerres de religion, avaient été fortifiées et mises en état de résister aux coups de main. Durant la Ligue, les paysans s'y retiraient avec leurs biens. Telle abbaye de l'Ordre de Cluny possède un château fort ; c'est dans un mâchicoulis de ce château qu'elle dépose son chartrier sous la garde d'un gouverneur laïque[21]. Attaqués et défendus suivant toutes les règles, ces temples avaient été pillés et brûlés si souvent, qu'ils étaient dénués de tout meuble et de toute argenterie[22]. J'ai si grande honte, disait dans son testament la duchesse de Longueville, de voir que la moindre de nos maisons mange dans de l'argent, et que le corps de Notre-Seigneur est dans le cuivre ou l'étain, que je désire qu'on donne des ciboires à toutes les églises des villages qui dépendent de nous. Il n'en coûte que 6 sous pour faire accoutrer un calice d'étain, 50 sous pour un bénitier de fonte, 3 liv. 10 sous pour un confessionnal ; 5 sous à M. le curé pour ses étrennes, 2 sous et demi à la marguillière, et 15 deniers au clerc ; tels sont les types des frais modestes d'une fabrique moyenne[23].

Nous allions oublier les salaires des prédicateurs de l'Avent et du Carême, le coût de leur nourriture et de leur logement. Grandes questions que celles-là ! Qui choisira et surtout qui payera le prédicateur ? Entre tous les pouvoirs locaux, c'est à qui le choisira, et c'est à qui ne le payera pas. Il en faut un pourtant ; n'en pas avoir serait pour la paroisse une profonde humiliation. Des Capucins qui ont prêché à Astaffort (Languedoc) reçoivent pour 12 livres de mouchoirs et de sandales. Dans le Maine, on donne 20 livres au Dominicain chargé du dernier carême, celui de 1G32. Le payement des missions incombe souvent à l'évêque ou aux bénéficiers de l'endroit, soit en totalité, soit en partie ; par exemple, le prédicateur est à la charge des habitants pendant l'Avent, et du chapitre pendant le Carême. Sur les 400 livres que le prieur de Capbreton afferme son bénéfice, il en doit 00 à 1a paroisse pour cette dépense. A l'Avent comme au Carême, c'est à celui qui perçoit les dimes de loger celui qui apporte la parole de Dieu, et le logement doit être convenable. Une chambre insuffisante est-elle offerte ? la municipalité la refuse, et dresse du fait procès-verbal[24].

Au contraire, quand il ne s'agit que de désigner le missionnaire, les marguilliers, les consuls, à Paris comme en province, entrent en lutte avec le curé, s'abstiennent de voter la gratification ordinaire pour un ecclésiastique qu'ils n'ont pas nominé. Impossible d'accorder le conseil communal de Bourg avec le chapitre, qui s'obstine à appeler un prédicateur jacobin, quand M. le duc d'Enghien, lieutenant du Roi, ne veut souffrir qu'un Capucin ou un Jésuite[25]. La pieuse avidité que manifestent en ce temps pour les sermons les populations urbaines ou rurales, parait à notre goût moderne bien méritoire, en raison de l'état de profond abaissement où était tombée, avant Bossuet, l'éloquence de la chaire. Le pathos et la trivialité s'en étaient emparés, et la défiguraient. Ce sujet étant en dehors de notre cadre, nous n'avons pas à nous appesantir sur l'illustre abbé Cottin, un bon Phébus, dit Tallemant, — on sait par cœur les plaisanteries de Boileau, — qui, prêchant à l'époque où Richelieu avait mis la comédie à la mode, s'exprimait ainsi : Quand Jésus-Christ acheva sur le théâtre de la Croix la pièce de notre salut. Le petit Père André, religieux augustin très-apprécié du public, racontant le miracle de saint Christophe, disait : Ce grand saint pensa jeter le petit Jésus dans l'eau, tant il le trouvait pesant ; mais on ne saurait noyer qui a à être pendu. Le même orateur parlait-il sur Marie-Madeleine, il décrivait ses galants, expliquait ses parfums[26], etc. Ce Père André continua avec succès sur ce singulier ton jusqu'au jour où, s'étant avisé de déclamer contre l'archevêque de Paris, M. de Lamoignon lui imposa silence, et ses supérieurs le firent disparaître pour parer au dessein qu'avait M. de Gondi de le coffrer, s'il le pouvait attraper[27]. Un autre, prêchant sur la tentation devant les religieuses de Montmartre, dit qu'il ne fallait pas se mettre en peine lorsqu'on était tenté, qu'il n'y avait qu'à dire non ; que David étant vieux et comme usé, lorsqu'il fit tuer le mari de Bethsabée, ne pouvait pas avoir une grande tentation, qu'il y succomba parce qu'il ne sut pas dire non ; que Joseph au contraire, qui était jeune, sanguin et vigoureux, en devait avoir une fort grande, qu'il n'y succomba pas pourtant parce qu'il sut dire non, et laisser sa casaque ; mais que si elle avait tenu au bouton, il ne savait pas ce qui serait arrivé ! Ce genre burlesque, ces familiarités inconvenantes de la chaire chrétienne, autorisaient, il est vrai, une audace excessive que l'opinion actuelle ne supporterait plus. Le P. Gonthery, Jésuite, occupait la chaire de Saint-Gervais, Henri IV, la marquise de Verneuil, et la plus grande partie des dames de la cour s'y trouvaient. Le Roi était au banc d'œuvre ; la marquise, non loin de là, lui faisait des signes pour le faire rire. Le P. Gonthery s'arrête, et se tournant vers le Roi : Sire, lui dit-il, ne vous lasserez-vous jamais de venir avec un sérail entendre la parole de Dieu, et de donner un si grand scandale dans ce lieu saint ?[28] Pourrait-on dire la même chose aujourd'hui, ou quelque chose d'analogue, à un simple sous-préfet qui ferait du bruit pendant un sermon ?

Jusqu'à ces dernières années, les dépenses de reconstruction des églises étaient obligatoires pour les communes, en cas d'insuffisance constatée des ressources de la fabrique ; et les ressources de la fabrique étant presque toujours insuffisantes, le Conseil municipal était tenu de voter les fonds. Au dix-septième siècle, les réparations étaient, d'office, mises à la charge du clergé. Il en était de même des travaux neufs, s'il s'agissait du chœur et de ses dépendances ; s'il s'agissait de la nef et des chapelles, les habitants devaient y pourvoir à leurs frais, et établissaient un impôt dans ce but[29]. Souvent même les communes ne doivent que la main-d'œuvre et le charroi, jusqu'à trois lieues de distance, et le bois de leurs forêts si elles en ont. Tout le reste de la dépense était supporté par les détenteurs des biens ecclésiastiques sis dans la paroisse. Des uns, on exigeait le tiers ou le quart des dîmes, des autres le sixième au moins du revenu foncier. En cas de procès, la saisie de ce sixième du revenu est toujours autorisée. Les évêques ne sont pas exempts de ce prélèvement ; celui d'Uzès y est contraint pour sa cathédrale. Et si quelque bénéficier a su, durant sa vie, esquiver cette obligation, cette responsabilité retombe sur sa famille. Les héritiers de l'évêque de Condom sont condamnés à faire réparer l'église Saint-Nicolas, suivant le devis, ou à consigner une somme de 36.000 livres[30].

La province ou le diocèse prennent part aux frais de construction des évêchés et des églises métropolitaines : pour celle de Mende, les États du Gévaudan donnent 3.000 écus ; pour celle de Nîmes, les habitants s'imposent 100.000 livres. Quant au Roi, il ne donne jamais rien : les dépenses du culte, pas plus que celles de l'instruction, n'étaient des dépenses d'État. Très-peu de demandes de secours lui sont faites, et nous n'en avons pas vu qui ait été accueillie. Un irrésistible courant d'opinion tendait à faire supporter les charges à qui jouissait des profits[31]. Ne donnant rien, l'État n'a rien à voir dans les volontés communales, relatives aux édifices religieux ; le bon sens le voulait ainsi. Le lieutenant général du bailliage dresse quelquefois procès-verbal des réparations à faire, et en arrête le chiffre ; mais le plus souvent les jurades et conseils de ville décident seuls et règlent toutes choses à leur gré, sauf le droit des tiers. La tutelle administrative les privera peu à peu de cette liberté. En 1631, les habitants de Notre-Dame-la-Riche, près Tours, emploient les pierres tombales de l'église et de la sacristie pour exécuter à l'une et à l'autre des travaux urgents. Eu 1783, pour démolir un pilier qui menace ruine, et qui obstrue la porte principale, ils doivent en demander permission à Monsieur l'Intendant[32].

Il est extrêmement rare, dit-on au dix-huitième siècle, de trouver un curé qui n'ait pas plaidé contre son seigneur, ou même un seigneur qui n'ait pas plaidé contre son curé. Nous n'en avons guère rencontré dans ce cas, sous le règne de Louis XIII ; s'ils plaident, les curés de campagne, c'est pour la portion congrue, le pain quotidien ; hors de là, ils demeurent silencieux comme leurs ouailles, sous l'absolutisme bien ordonné du pouvoir royal. On n'entendra parler d'eux que plus tard, au jour du serment du Jeu de paume, où leur appoint décidera du sort de la Révolution. Est-ce à dire que ce fussent des mécontents, des frondeurs, ces simples prêtres qui invitent le dimanche leurs paroissiens à prier Dieu pour la santé et prospérité du roi de France, leur souverain seigneur, de la Reine son épouse, de Monsieur, le frère unique du Roi, de tous les princes de la maison royale et de tout son bon conseil ? Nullement ; le bas clergé était fort éloigné de la politique et des affaires humaines, auxquelles le haut clergé était mêlé. Un curé de Paria savait tenir tête aux puissants de la terre. Celui de Saint-Paul, au Marais, quitte son église un jour où la Reine y vient assister au sermon, en disant qu'il va visiter ses malades, ce qui fait croire qu'il n'est pas porté de bonne intention pour voire service, écrit cette princesse au Roi. Mais les curés de village demeurent soumis à toutes les autorités possibles. Avec le peuple, leurs relations sont cordiales ; les fidèles supportent assez mal un ecclésiastique qui ne leur plaît pas. A la mort du curé de Saint-Eustache, Merlin, les dames des Halles refusèrent de recevoir le successeur nommé par l'archevêque de Paris (un abbé Poncet) ; elles députèrent à la cour en déclarant que les Merlins avaient été leurs curés de père en fils, que le dernier avait désiré que son neveu lui succédât, qu'elles n'en pourraient souffrir d'autres. Les bourgeois se barricadèrent, et il fallut leur donner le curé qu'ils voulaient[33]. Par contre, le curé de Saint-Gengoul, en Champagne, se plaint que, depuis deux ans qu'il est pourvu, les habitants lui ont fait toutes les traverses qu'ils ont pu, jusques à lui serrer les ornements de l'église, lui fermer les portes les jours solennels pour l'empêcher de faire le service. Quelques-uns, n'ayant la crainte de Dieu, sont venus nuitamment en sa maison pour l'assassiner, ont battu et excédé sa mère.

Par les sacrements qu'il administre, par les obsèques qu'il célèbre, le curé est un rouage actif de la vie communale[34] ; par les livres où il consigne ces baptêmes, mariages et inhumations, — registres d'état civil, qu'il tient à ses frais, — il est le gardien de la filiation légitime ou légitimée. Car il est une forme rudimentaire de légitimation religieuse, pour les enfants procréés avant le mariage, consistant à les mettre sous le drap pendant la bénédiction nuptiale[35]. En certaines provinces, le clergé avait jadis constaté la reconnaissance même d'un enfant naturel, ou accepté comme une preuve sacrée les serments des mères, dans la recherche de la paternité. En Béarn, au quinzième siècle, Guirautine de Casso jure sur l'autel de saint Antoine que Bernard son fils a été engendré par le commandeur de Sus ; elle lui met l'enfant entre les bras, et le commandeur l'accepte, en présence de trois ecclésiastiques. Frezade de Prée, femme de Grassiot de Crabites, jure sur le même autel, avec l'autorisation de son mari, que l'enfant qu'elle a eu avant son mariage est fils de Guicharnaud de Bordenave[36]. Ces singularités, plus naïves qu'immorales, avaient disparu ; mais le rôle prépondérant du curé avait subsisté ; précepteur de la doctrine religieuse, il apparait au sein de ces populations rudes et incultes, dont lui-même est issu, comme le pionnier de la civilisation.

 

 

 



[1] Arrêts du Parlement du 15 avril et du 7 septembre 1630, du 15 mars 1631. — Les vicaires perpétuels étaient non destituables le plus souvent, mais pas partout, puisqu'une déclaration de Louis XIV (1685) porte qu'aucune cure ne pourra plus être desservie par des prêtres amovibles (Arch. dép. Lot-et-Garonne, B, 98).

[2] Arch. dép. Morbihan, préf. 74. — DE MONTCHAL, arch. de Toulouse, Mémoires, I, 232. — Au-dessus des églises paroissiales étaient les collégiales ; l'érection d'une catégorie à l'autre se faisait par simple ordonnance de l'évêque. (Arch. dép. Ain, G, 8.)

[3] Arrêt du Parlement du 27 janvier 1612. — Autre arrêt du 11 décembre 1623. — Arrêt du Conseil privé du 12 décembre 1639.

[4] Arch. dép. de Maine-et-Loire, G. 1899 ; de l'Yonne, H, 236 ; de Lot-et-Garonne (Astaffort, CC, 6, Mézin, BB, 6). — DESHAYES DE COURMENIN, Voyage en Danemark, II. — M. PICOT, États Généraux, III, 570. — Certains religieux (les Prémontrés, par exemple) étant en même temps curés de paroisses, il s'élevait de perpétuels conflits entre les évêques, leurs supérieurs séculiers, et les abbés et prieurs leurs supérieurs réguliers.

[5] Recueil de pièces sur les États Généraux (LA LOURCÉ et DUVAL.), XII, 69. — Arch. dép. Lozère, G. 434, 1075. — Arch. dép. Haute-Garonne, B, 399, 437. — On dit d'un homme qu'il est vêtu en prêtre, d'un habit vieux, sans bas aux jambes. Aff. Etrang., t. 805, fol. 16.

[6] Par édit du 16 avril 1571.

[7] Arrêts du parlement de Paria du 18 juillet 1626, du 6 mai 1632, du 27 mai 1634 ; arrêt du conseil d'État du 30 mai 1634. — Arrêts du parlement de Toulouse, Arch. dép. Haute-Garonne, B, 300, 364. — Arch. dép. Indre-et-Loire, G, 930. — Lettres et papiers d'État, II, 174, 763. — Aff. Étrang., t. 780, fol. 272 ; t. 802, fol. 151. — Déclaration du Roi, d'août 1632. — Un arrêt du parlement de Toulouse ayant adjugé 300 Uvées de portion congrue à un curé du diocèse d'Auch, l'archevêque de cette ville la fit réduire à 200 livres, avec défense au curé de rien demander au delà. — Arrêt du Conseil privé du 11 août 1634. La vie était moins chère dans le midi de la France que dans le nord ; de là cette différence de 100 livres dans la portion congrue. — Voyez pour la dîme les chapitres suivants.

[8] Un arrêt du Parlement (8 mai 1629) adjuge au curé de Besson la portion congrue de 200 livres, et les dimes menues et nouvelles. Si le gros décimateur aimait mieux les percevoir, il devrait donner au curé 400 livres au lieu de 200. — Le tiers état demandait, en 161, que tous les curés jouissant d'un revenu de 300 livres et au-dessus, eussent avec eux un vicaire pour les assister, et le payassent de leurs deniers. Arch. dép. Lozère, G. 107.

[9] Aujourd'hui, sur 29.000 desservants, 18.000 âgés de moins de soixante ans reçoivent 900 francs de traitement ; 11.000 reçoivent 4.000, 1.100 et 1.200 francs (2.590 seulement touchent cette dernière somme). 2.500 curés de canton touchent 12 et 1.300 francs ; 900 curés de première classe touchent 15 et 1.600 francs.

[10] Par déclaration de 1686, elle fut portée à 300 livres pour tout le royaume ; par édit de 1768, à 500 livres ; mais cet édit ne fut pas exécuté également partout, et l'on vit jusque vers 1789 des portions congrues de 300 livres. — Les cahiers de Bresse (tiers état) aux Etats Généraux projetés en 1649, déclaraient déjà que les curés n'étaient pas suffisamment portionnés. Mss. Godefroy (Bibl. de l'Institut), t. 280, fol. 70. L'Assemblée constituante, après avoir confisqué les biens du clergé, vota aux curés en 1790 des traitements gradués suivant l'importance de leurs paroisses, et dont les moins élevés étaient de 1,200 francs. Encore ce chiffre souleva-t-il des réclamations de plusieurs membres qui demandèrent un traitement minimum de 1.500 francs. — En tout cas ; 1.200 francs de 1789 en représentent aujourd'hui près de 2.000.

[11] Arch. dép. de Maine-et-Loire, G, 1892, 2745. — Sentence de la sénéchaussée d'Angers en 1627 ; transaction entre le curé et les paroissiens de Thorigné en 1628. — Arch. dép. de Lot-et-Garonne (Contand. CC. 13, BR, 2). — D'Indre-et-Loire, G, 835. — De Haute-Garonne, B, 475, 445. — Arch. com. d'Avallon, DD, 128. Si la ville devait le logement au curé, elle ne le devait pas au vicaire perpétuel ; le curé devait loger ce remplaçant, De fait, il le logeait dans la cure. — Règlement du 14 avril 1636.

[12] En 1634 ; Arch. dép. des Basses-Pyrénées, E, 1106 ; du Morbihan, préface, 53, 65. — Arch. com. de Nevers, BB, 82. — Au seizième siècle, le prix des messes était d'un sou et demi et deux sous. — Arch. com. de Bourg, BB, 99.

Une sentence du bailli d'Ymeray condamne un particulier (1638) à payer 3 livres 10 sous à la fabrique de Villeneuve-Saint-Nicolas pour la fosse et le luminaire fournis aux funérailles d'un de ses parents. — Arch. dép. Eure-et-Loir, B. 1719.

[13] Comte DE CARNÉ, Histoire des états de Bretagne, I, 379.

[14] Arch. com. de Nevers, GG, 67. — Arch. dép. d'Indre-et-Loire, G, 860.

[15] Nous les étudions sous ce point de vue dans le tome IV : l'Administration municipale.

[16] Arch. dép. Indre-et-Loire, G, 695, 848. — Autre assemblée d'habitants pour autoriser le curé à acquérir un jardin, près le bourg, avec les 90 livres léguées par son prédécesseur. — Arch. dép. Haute-Garonne, B, 464. — Arrêts du Parlement du 12 décembre 1624 et du 26 février 1637. — En quelques endroits, les comptes étaient simplement rendus devant le juge des lieux, le curé et trois habitants appelés à cette fin. En Champagne, les habitants nomment quatre d'entre eux pour examiner les pièces comptables et faire leur rapport. Les marguilliers dans cette province restaient deux ans en fonction. — M. BABEAU, Le village sous l'ancien régime, p. 358.

[17] Arch. com. de Nevers, GG, 48 ; de Bourg, CG, 139. — Arch. dép. Haute-Garonne, B. 408. — Arrêt du Parlement 27 juillet 1640. — Aff. Étrang., t. 780, fol. 270. — Lettres et papiers d'État, II, 173. — Le Mercure, an 1608, p. 293. — Les églises royales avaient un bailli et un chambrier laïques, chargés de la police. Ceux de Notre-Dame rendent une ordonnance (16 août 1639) disant que les promenades et confabulations qui se font dans l'église causent murmure et scandale ; que le bruit des aveugles de l'hôpital des Quinze-Vingts, et des pauvres qui vont mendiant leur vie, interrompent les dévotions des chrétiens qui se transportent en cette église pour faire leurs prières.

[18] Arch. dép. Lot-et-Garonne (Mézin, BB, 1 et 2. — Francescas, BB, 13 et 14). — Arch. com. de Bourg, BB, 83. Défense de sonner à l'avenir la grosse cloche pour les petits enterrements, à moins de payer deux quarts d'écu. — On se plaint à Rablay que le soir de la Toussaint plusieurs personnes s'enferment dans le clocher pour sonner pendant toute la nuit, et boivent avec excès. Arch. dép. Maine-et-Loire, G. 2204. — L'usage subsiste en certains départements.

[19] Les suisses étaient Français pour la plupart, ils louaient les chaises ; mais ils gagnaient plus, dit FURETIÈRE, à savoir les intrigues des femmes du quartier. Roman bourgeois, I, 37.

[20] Journal d'un voyage à Paris en 1657, publié par M. FAUGÈRE, p. 42. Arch. dép. de Maine-et-Loire, G. 378, 2197. — Construction d'un grand autel en 1623, au Puy-Notre-Dame ; on paye 2.000 livres au sculpteur pour l'autel de pierre, 106 livres pour une pièce de tapisserie, 240 livres pour un tableau de l'Assomption, 100 livres au menuisier pour le tabernacle, 80 livres pour deux chérubins dorés, 110 livres pour la dorure du tabernacle. — Arch. dép. de la Haute-Garonne, B, 448 ; de la Sarthe, G, 21 ; d'Indre-et-Loire, G, 876, 893, 902, 935, 938, 961, 998 (Livre des revenus des cures). Arch. dép. de l'Ain, G. 213 ; de l'Yonne, H, 388. — Arrêt de la chambre des amortissements, 21 novembre 1639. — Les recettes de l'église Saint-Pierre, à Nevers, en 1620, sont de 311 livres, les dépenses de 330 livres. (Arch. com. Nevers. GG, 44.) — Les recettes de la fabrique de Bourg sont de 602 livres en 1641, de 2.844 livres en 1649, de 4.553 livres en 1652. (Arch. com. Bourg, G. G, 189.)

[21] Aff. Étrang., t. 806, fol. 136, 137. — Richelieu fit démanteler ce château et indemniser l'abbé. — BASSOMPIERRE, Mémoires, 101. — Arch. dép. du Morbihan, E, supplément, 507 ; de l'Yonne, H, 388 ; de l'Aube, G, 1295 ; de la Sarthe, G, 868. — Arch. com. d'Avallon, GG, 81. Acquisition de livres pour tenir le Concile de ce lieu, comme il se tient en la plus grande part de la France.

[22] Certaines églises détruites par les calvinistes avaient tout à fait disparu ; on en comptait plus de 300 dans ce cas rien qu'en Beauce. (Abbé HOUSSAYE, Vie du card. de Bérulle, II, 4.) Dans le diocèse de Mende, 28 églises avaient été brûlées par les fanatiques. En beaucoup de paroisses les habitants faisaient paître leur bétail dans le cimetière. — Arch. dép. Lozère, G, 985.

[23] Aff. Etrang., t. 794, fol. 104. — Arch. dép. Aube, G, 537, 592. — Lettres et papiers d'État, II, 761. — On sait qu'aujourd'hui les calices et les ciboires doivent être au moins en argent. — En certains pays, le décimateur est tenu de fournir les ornements, cloches et luminaires pour le service divin. — Arch. dép. Haute-Garonne, B. 475.

[24] Arch. com. d'Avallon, GG, 80 ; de Nevers, BB, 21. — Arch. dép. des Landes (Capbreton, GG, 24.) ; de la Sarthe, G. 21 ; de Lot-et-Garonne (Astaffort, CC, 7 ; le Mas d'Agenais, AA, 1) ; de l'Isère, B, 2316. Saint François de Sales prêcha deux fois de suite le carême à Grenoble, sans vouloir accepter d'honoraires. En souvenir de cette générosité, le Dauphiné donna plus tard 1.000 livres pour contribuer aux frais de sa canonisation.

[25] Arch. com. de Bourg, RB, 98. — TALLEMANT, X, 55. — Arch. dép. Lot-et-Garonne (Aiguillon, BR, 2, 7 ; Astaffort, CC, 8). Dans cette dernière paroisse, le carême coûtait 12 livres en 1620, et 49 livres en 1739.

[26] TALLEMANT, VI, 44 ; IX, 121. — Puis c'étaient des calembours ; l'évêque de Belley, prêchant à Saint-Magloire, prend ce teste : Meam gloriam non dabo, je ne donnerai point ma gloire ; un autre, parlant de saint Luc, disait que c'était le peintre de la Reine mère à meilleur titre que Rubens, qui a peint la galerie du Luxembourg, car il est le peintre de la Reine Mère de Dieu. FURETIÈRE (Roman bourgeois, I, 10) prétend que les prédicateurs voulaient que l'on jugeât de l'excellence de leurs sermons par le nombre des chaises louées, qu'ils cherchent à avoir des gens à carrosse, etc.

[27] Aff. Étrang., t. 809, fol. 90. — A. JACQUINET, Des prédicateurs du dix-septième siècle avant Bossuet. — Un M. Amyrault, professeur de théologie, publiait deux volumes sur la morale d'Adam avant le péché, et il est dit que sa grande félicité était de nager. TALLEMANT, IX, 190 ; X, 161.

[28] Mémoires de LESTOILE, mars 1604. — P. CLÉMENT, Une abbesse de Fontevrault, p. 26. — Le P. Amatis réconcilia Louis XIII avec sa mère, en lui reprochant en chaire de tirer l'épée pour verser le sang dont il était formé.

[29] Arrêts du Parlement du 21 avril 1633, du 4 janvier 1642. — Arch. dép. Indre-et-Loire, G, 158. — DE BEAUREPAIRE, Cahiers des États de Normandie, II, 27. — M. PICOT, États Généraux, III, 484. — Les communes ne peuvent s'imposer que jusqu'à 150 livres de leur propre mouvement.

[30] Arch. dép. Landes, G, 11 ; Haute-Garonne, B, 284, 287 (Mas d'Azil, Miradoux), 289, 302, 364, 393, 411 (Saint-Amans). — Arrêts du parlement de Paris, 14 juillet 1629 ; du Conseil privé, 7 juin 1641. Dans certaines villes, l'évêque et le chapitre contribuent, chacun pour moitié, aux grosses réparations.

[31] Arch. dép. de la Côte-d'Or, C, 2101 ; de la Lozère, G. 699 ; de la Haute-Garonne, C. 705. — Lettres et papiers d'État, I, 90. — Arch. Com. Nîmes, II, 2. —Les orgues de la cathédrale de Nîmes, construites en 1643, suivant les plans de Louis de Aranda, de Séville, fameux organiste, coûtent 6.000 livres ; elles ont deux buffets, comprenant 22 jeux, le second jeu ayant 57 tuyaux en étain poli.

[32] Arch. dép. Indre-et-Loire, G, 880, 999 ; Yonne, H, 1032 ; Lot-et-Garonne (Sainte-Colombe, BB, 1 ; Francescas, GG, 4). La tour de l'église de Francescas, qui a environ 24 mètres de haut (12 cannes et demie), coûte 1.750 livres.

[33] MONTPENSIER, Mémoires, 24. — Arch. nat. KK, 1355, 6 — RENAULDON, Dictionnaire des fiefs (curé). — Arch. dép. Aube, G, 664.

[34] On voit de grands seigneurs prendre, pour tenir leurs enfants sur les fonts baptismaux, deux pauvres nécessiteux. — Jusqu'à Louis XIII, on avait toujours deux parrains et une marraine pour les garçons, deux marraines et un parrain pour les filles. Le concile de Trente prescrivit de ne mettre qu'un parrain et une marraine, pour ne pas multiplier les empêchements résultant de la parenté spirituelle. — Les registres paroissiaux, prescrits par l'ordonnance de François ne furent tenus réellement qu'à partir de la fin du seizième siècle. On en voit de 1560 et même au delà ; mais il y a aussi bien des communes où ils n'existent que depuis 1620 ou 1630. — Arch. dép. Morbihan, E, sup. 79, f. 725, 728. — Arch. com. Nevers, GG, 43 et 116.

[35] Arch. com. Sens, CG, 62. — Même usage en Bretagne. — Il n'était pas rare de voir baptiser des enfants de cinq ou dix ans qui, sans doute, avaient été seulement ondoyés. Le fils du Sr de Thorigny est baptisé à l’âge de quinze ans. — Sur les registres paroissiaux, cf. l'édit de mai 1635.

[36] Arch. dép. Basses-Pyrénées, E, 15914 1601. (En 1405 et 1415.) Sur le même autel, Condor de Bonefont jure que Guilhamet, son fils, a été engendré par Sans de Pétrègne, prêtre d'Aren ; ce serment est fait à la requête de ce dernier et pour lui ôter tout soupçon ; témoin Arnaud de Vignau, prêtre de Saint-Gois. Même serment de la mère pour sa fille, en 1405, engendrée par Sans de Pétrègne sans que nul autre homme y ait eu part. Ce mot de prêtre ne doit pas nous scandaliser ; il s'agit de cures laïcisées, dont les propriétaires prenaient le titre. Voyez le chapitre suivant.