RICHELIEU ET LA MONARCHIE ABSOLUE

 

TOME TROISIÈME. — ADMINISTRATION GÉNÉRALE (SUITE).

CULTES. — LE CLERGÉ CATHOLIQUE.

CHAPITRE VII. — LIBRE RENAISSANCE RELIGIEUSE. - ORDRES NOUVEAUX OU RÉFORMÉS.

 

 

Saint Vincent de Paul, Bérulle, Eudes, Bourdoise, Olier. — La congrégation de la Mission. — Les Sulpiciens ; l'Oratoire. — Les Jésuites ; leurs rapports avec Richelieu. — Ordres nouveaux de femmes : Carmélites, Visitandines, Ursulines, Filles-du-Calvaire. — Port-Royal des Champs. — Ermites laïques. — Fondation de couvents nouveaux ; formalités imposées par l'État. — Défenses des Parlements. — Indépendance des villes ; leur attitude à ce sujet. — Utilité des religieux, dévouement pendant les épidémies. Réforme des Ordres anciens, Carmes, Augustins, Cîteaux, Cluny, etc. — Comment elle s'opère, façon d'agir de Richelieu. — Les résultats. — On termine la querelle des réguliers et des séculiers.

 

Nous venons d'exposer ce que l'État avait su faire de l'Église ; qu'on admire maintenant ce que l'Église sait faire d'elle-même. Par une coïncidence providentielle, c'est au lendemain des rudes assauts du seizième siècle que, des diverses couches du clergé, surgissent les réformateurs. Au-dessus d'eux tous apparaît l'apôtre moderne, Vincent de Paul, figure sublime, l'un des hommes qui ont rendu le plus de services à la France, au christianisme, au genre humain. Ce saint et bienfaisant génie, à qui l'on pourrait demander la seule solution possible de la question sociale qui nous hante, a, par ses fondations multiples, doté l'Église d'un patrimoine plus durable que ses biens temporels. Il l'a enrichi de tous les pauvres, des malades, des enfants trouvés et des vieillards abandonnés, des fous, des galériens, des esclaves, de toute la clientèle évangélique qu'oubliaient les prélats bien rentés et les abbés de cour. Il soigna les âmes autant que les corps.

Nous trouverons, à l'Assistance publique, cet institut qu'il avait appelé les Filles de la Charité, et que le peuple, dans sa justice reconnaissante, continue à nommer les Sœurs de Saint-Vincent de Paul ; dès à présent, nous assistons à l'éclosion de cet Ordre dont les débuts furent si modestes, le développement si rapide et les œuvres si abondantes : la Congrégation de la Mission. Sou but était l'enseignement du catéchisme, son public le, masses rurales, aussi dénuées que possible d'instruction religieuse[1]. Cette association qui, en 1625, ne comptait que trois personnes : Monsieur Vincent, Portail son premier disciple, et un prêtre auquel ils donnaient cinquante écus par an, se recruta d'hommes d'élite venus des diocèses les plus divers. Quand les premiers missionnaires quittaient leur maison pour aller de village en village, ils en confiaient la clef à un voisin, n'ayant pas de quoi payer un domestique ; en moins de vingt-cinq ans, les Lazaristes — on leur donna le nom du couvent où ils logeaient — étaient devenus assez nombreux pour fournir aux évêques un personnel capable de diriger des séminaires[2]. Qui m'eût dit cela, s'écriait le vénérable fondateur, j'aurais cru qu'il se serait moqué de moi ! Car ni moi, ni le pauvre M. Portail n'y pensions pas ; hélas ! nous en étions bien éloignés !

Vincent de Paul, nous apprend son historien, avait l'esprit posé, circonspect, difficile à surprendre. Il ne s'empressait jamais dans les affaires, et ne se troublait point par leur multitude. Cette mesure, ce bon sens supérieur, qui sont un de ses caractères distinctifs, M. de Bérulle, le fondateur de l'Oratoire français, ne les possédait pas au même degré. Créé en 1611, l'Oratoire comptait, quinze ans plus tard, cinquante maisons. Bérulle avait songé d'abord à former des ecclésiastiques pour les mettre à la disposition des évêques ; on lui reprocha d'avoir abandonné son premier dessein en établissant des compagnies religieuses, à la vérité agréables à Dieu, mais qui ne mettaient pas la main à l'œuvre. Richelieu lui représentait qu'il eût mieux valu se contenter de quelques maisons dans les meilleures villes du royaume, en attendant que son Ordre fût fortifié d'hommes savants et spirituels ; au lieu qu'il en prenait un si grand nombre qu'il n'en pouvait fournir aucune[3].

Et puis, Bérulle s'occupait trop de politique. Pendant qu'il s'acquittait à Rome ou ailleurs des missions dont Richelieu le chargeait, et qui lui valurent le chapeau de cardinal, il perdait un peu de vue la pure mission apostolique. De degré en degré, il n'est pas impossible que l'ambition du poste suprême lui soit venue, et qu'il ait rêvé la succession de celui qu'il remplaçait déjà dans la faveur de la Reine mère. Cela ne l'empêche pas d'avoir exercé l'action la plus salutaire pour l'Église, par le rayonnement d'une sincère piété, plus encore que par l'autorité d'une grande place.

Austérités, longues prières, grandes aumônes, tout ce qui distingue les enfants privilégiés du Christ, sont le partage d'Olier, le fondateur du séminaire de Saint-Sulpice, du Père Eudes, de Bourdoise. Mais ils ne prêchent ni ces longues prières, ni ces austérités ; ils n'en prescrivent même qu'un petit nombre, dans les règles qu'ils tracent à leurs disciples. Ce mouvement religieux ne ressemble en rien à tous ceux qui l'ont précédé ; il frappe par son côté pratique. Il ne prône ni le silence, ni la retraite, ni la méditation ; il ne pousse personne vers le cloître ; son but est de faire des chrétiens effectifs de ceux qui ne sont chrétiens que de nom, y compris les clercs. La religion que l'on enseigne est, si l'on peut parler ainsi, toute laïque, c'est-à-dire à la portée des laïques. L'Évangile et le catéchisme sondes livres à répandre ; l'école, la chaire, le confessionnal sont les lieux de combat des nouveaux zélateurs ; le prosélytisme est le premier objectif de leur foi expansive. Les nouveaux Ordres sont à peine des Ordres : Eudistes, Lazaristes, Oratoriens, Sulpiciens n'ont d'autre costume que la soutane séculière ; et en un temps où c'était une espèce d'injure de dire à un ecclésiastique de qualité qu'il était un prêtre, le curé Bourdoise répond au Roi, qui lui demande de quel Ordre il est : De celui de Saint-Pierre, tout simplement. — Je n'en ai jamais entendu parler, répond le prince[4].

Olier, le plus jeune de cette courageuse phalange, avait, depuis son enfance, une abbaye en Auvergne ; c'est là, qu'arrivé à l'âge adulte, il brûle de se rendre pour faire des missions dans les montagnes. Il prêche tous les jours, passe la moitié du temps à confesser, assemble les pauvres, leur donne à manger, les sert tète nue, et se nourrit de leurs restes. Il est moins aisé à ces saints personnages de réformer les pasteurs que les troupeaux. C'est que les uns souffrent des abus, tandis que les autres en vivent. Bourdoise se fait d'irréconciliables ennemis, en voulant interdire à ses pénitents clercs la pluralité des bénéfices. Vincent de Paul a grand'peine, en Bresse, à empêcher les prêtres d'exiger de l'argent pour entendre les confessions des pauvres gens[5].

Quelques Ordres nouveaux, apparus sous le règne de Henri IV, s'étaient développés durant la minorité de Louis XIII : les chanoines de Saint-Augustin du P. Fourier, les Barnabites qui s'installent dans le Midi, les Feuillants qui n'avaient que trois maisons en 1600, les Récollets ou Frères Mineurs de l'étroite observance, dont le premier établissement à Nevers date de 1597[6]. Le plus important des nouveaux Ordres, par le nombre et par le talent, par l'influence qu'il acquiert, par les sympathies et les antipathies passionnées qu'il inspire, ce sont les Jésuites, nés d'hier, un instant anéantis ou supposés tels, puis ressuscités en France, par un édit de 1603. Aucune association religieuse n'étendait le champ de son activité sur d'aussi vastes espaces et dans des sphères aussi variées. Du fond de l'Orient, à l'extrémité de l'Amérique, les Jésuites traduisent des Évangiles dans toutes les langues, occupent des postes considérables, tantôt négociants, tantôt diplomates, tantôt martyrs. Au Japon, chez le Grand Mogol, au cap Vert et aux îles Fortunées, au Mexique, au Brésil, ce sont, au commencement du dix-septième siècle, les vrais et seuls pionniers de la civilisation. En Europe, ils dirigent la conscience des rois, distribuent l'instruction à la jeunesse, montent dans toutes les chaires, et publient des bibliothèques sur l'histoire, la théologie, la physique, des poésies et des controverses. Ils empruntent à tous les Ordres ce qui avait fait la gloire et la force de chacun d'eux : aux Bénédictins leur érudition, aux Dominicains leur éloquence, aux Capucins leur pauvreté. En eux s'incarne l'esprit démocratique de la primitive Église, l'esprit dominateur de l'Église des temps féodaux ; mais le tout approprié aux temps modernes, aux situations, aux circonstances. Nuls, mieux que les Jésuites, n'ont su défendre la thèse et se contenter de l'hypothèse, selon le langage théologique. L'obéissance, dont Ignace avait fait le principal ressort de son Institut, est devenue plus absolue depuis deux siècles dans toute l'Église ; et la Compagnie de Jésus n'a pas peu contribué à cet affermissement d'une discipline qui a permis au catholicisme de braver de sérieuses épreuves.

Pour les contemporains de Richelieu, pour Richelieu lui-même, les Constitutions de la Compagnie ont un aspect mystérieux qu'elles n'ont pas tout à fait perdu dans le plein jour actuel. Une note de la main du cardinal, en marge d'un mémoire sur les Jésuites, porte : Cette Société est timentibus leo, audentibus lepus. Il dit de l'un deux qu'ayant fait son quatrième vœu, il était informé de toutes leurs lois particulières et de leurs secrets. Il croirait volontiers aux Jésuites de robe courte, à ceux que les Jésuites reçoivent dans leur Compagnie pour demeurer néanmoins dans le monde[7]. La Société avait ceci de spécial : que ses membres n'étaient religieux qu'après les grands vieux ; que le général jouissait, en vertu d'une bulle pontificale, du pouvoir d'absoudre de ces vœux mêmes ; que du reste ceux qui étaient admis à les prononcer, — les profès, — qui seuls prenaient part à l'élection du général, étaient en fort petit nombre[8]. Par suite, quoique faisant vœu d'étroite pauvreté, quoique assimilés à ce titre aux Ordres mendiants devant les parlements, les Jésuites conservaient néanmoins la pleine possession de leurs biens personnels, jusqu'à la prononciation de vœux que les uns ne faisaient jamais, et que les autres ne faisaient qu'à un âge avancé. Ils s'affranchissaient, en pratique. des édits qui avaient réglé leurs droits de succession ; le concile de Trente les avait dispensés des décrets qui défendaient aux Ordres monastiques de tenir des biens immeubles, en propriété particulière de couvent[9]. Ils étaient donc à l'état d'exception unique, vis-à-vis de la loi civile, comme vis-à-vis de la loi religieuse. A la fois riches et -pauvres, et comme Ordre, et comme individus, on les a vus toujours avoir peu et dépenser beaucoup. Ils crochètent, disent leurs ennemis, plusieurs bons bénéfices ; ce à quoi le plomb de Rome ne leur manque pas, non plus que la cire de France. Une bulle du Pape unit un prieuré à leur collège de Toulouse ; des lettres patentes en unissent un autre à leur collège de Charleville. A l'occasion d'une concession de ce genre, faite pour élargir un peu notre maison, le Père Binet remercie chaudement Richelieu, au nom de notre petite Compagnie et en particulier au nom du P. général, qui craint d'être importun à Son Éminence par ses lettres trop fréquentes[10]. Le cardinal était médiocrement favorable à ces accroissements. Il disait au confesseur du Roi : Faites que vos Pères ne poursuivent plus d'unions de bénéfices à leurs collèges ; ce grand soin qu'ils ont de bien fonder leurs maisons leur attire l'envie, et fait dire qu'ils s'attendent moins que les autres religieux à la Providence divine.

Toutefois, la soi-disant richesse des Jésuites est une légende. Ils n'avaient, en 1610, que 12 ou 15.000 écus de revenu en toute la France. J'offre de faire voir, disait le P. Coton quinze ans plus tard, que nous n'avons pas 200 francs par homme, en y comprenant vivres, vêtement, livres, sacristie, bâtiments, procès, voyages, et toute autre dépense commune et particulière. Nous sommes prêts à en faire la preuve ; et nous nommerions plusieurs ecclésiastiques, dont le moindre lui seul a plus de bénéfices que nous tous ensemble[11].

Les rapports du premier ministre avec la Compagnie de Jésus ont toujours été moitié miel et moitié vinaigre. Ces deux puissances s'allièrent quelquefois, se flattèrent souvent, se redoutèrent toujours, et ne se plurent jamais. Le prince de Condé, pour être estimé bon catholique, affectait d'aimer plus les Jésuites que les autres religieux, les tenant pour les plus autorisés.  Bien des gens l'imitaient. Richelieu faisait commencer à ses frais le grand autel de leur église, rue Saint-Antoine ; il espérait gagner l'Ordre par des bienfaits. Les Jésuites recevaient les faveurs, se confondaient en protestations, mais ne cédaient rien[12]. L'un était tout de la terre, les autres étaient tout du ciel ; chez l'un comme chez les autres les moyens étaient les mêmes, mais les buts différaient : ce que Richelieu savait faire dans l'intérêt de la politique française, les Jésuites y excellaient dans l'intérêt de la politique chrétienne. A l'extérieur, l'un poursuivait la grandeur de la France, les autres la gloire de l'Église universelle ; à l'intérieur, l'un travaillait à soumettre l'Église à l'État, les autres à subordonner l'État à l'Église, c'est-à-dire les intérêts temporels aux spirituels. Absolus, l'un par système, les autres par devoir, ces rivaux pesaient en sens inverse sur l'esprit du Roi : celui-ci au conseil, ceux-là au confessionnal ; celui-ci lui parlant de sa puissance sur la terre, ceux-là de son salut dans l'éternité. Un Jésuite du nom de Jarrige, dont nous avons parlé plus haut[13], prétend qu'au moment de la prise de Corbie par Jean de Werth, la joie fut si grande au collège de Bordeaux, qu'une dizaine de Pères firent un feu de joie clandestin, sous la voûte de la chapelle, avec quelques fagots et les balais de leurs chambres, et que le provincial fit rayer des litanies de chaque jour la prière que l'on faisait pour le Roi : Hostes superare. Il est difficile d'ajouter une foi entière aux assertions de ce personnage, qui, après avoir déversé l'injure sur un Ordre où il avait passé vingt-quatre ans, se repentit et se rétracta[14]. Mais il est probable que des religieux, qui avaient voué leur vie à la défense et à la propagation du catholicisme, ne pouvaient voir avec plaisir l'heureuse issue d'une guerre qui consacrait le triomphe des protestants dans le centre de l'Europe. L'excès du patriotisme, en cette occurrence, eût été pour eux une sorte d'apostasie ; ils se bornèrent à prodiguer aux blessés des deux nations les soins de leur ministère. On demande des Jésuites à Pignerol ; il en vient deux accompagnés d'un serviteur ; ils vivent avec 10 francs par personne et par mois, qui suffisent ric à ric à leur nécessité. Ils désireraient seulement se remeubler, car ils couchent sur la paille, faute de matelas, et se couvrent de leurs habits, faute de couverture.

Le soin des malades dans les épidémies était l'apanage des Ordres religieux ; à Toulouse, pendant la peste de 1628, personne ne veut courir les hasards de l'assistance ; des Jésuites, des Cordeliers et des Récollets s'offrent seuls. A Rouen, dix-neuf Capucins meurent en soignant les pestiférés (1622). Les Minimes d'Avallon rappelaient que la ville les avait demandés en temps de peste, et qu'alors  leurs Pères étaient tous morts[15]. C'est ainsi que les moines payaient leur bienvenue ! De telles alliances, cimentées par le sang, tout au moins par d'importants services, créaient entre le couvent et la cité des lieus qui paraissaient respectables. Il n'est pas mauvais de le rappeler en effet, ce n'est pas seulement par dévotion, c'est par intérêt que les populations attiraient et maintenaient dans leurs murs ces religieux et ces religieuses. Ce n'est ni la volonté royale, ni l'autorité des évêques qui ont déterminé le mouvement de piété d'alors. Ces couvents que peuple la parole de quelques missionnaires, c'est le sentiment public qui les réclame, c'est la libre initiative des villes qui les dote. Légalement, rien n'est plus compliqué ni plus difficile que la fondation d'une maison nouvelle : lettres patentes, permission de construire du seigneur suzerain, autorisation de l'évêque diocésain, arrêts du parlement ordonnant l'enregistrement, et vingt autres formalités. Nous ne voyons que des entraves, et aucun encouragement officiel[16]. Le parlement de Rouen déclare, en 1631, que depuis vingt ou trente ans se sont introduits en cette ville, tant et de si divers Ordres, surtout mendiants, que le nombre excède tout ce qui en avait été institué mille ans auparavant ; que des rues sont presque entièrement occupées par des maisons de religions nouvelles. Joignant les décisions aux remontrances, il ordonnait que les Augustins déchaussés sortiraient, dans les trois jours, de la ville et des faubourgs. Richelieu estime qu'il est de la prudence de S. M. d'arrêter le trop grand nombre de monastères qui s'établissent tous les jours. Il faut, en ce faisant, mépriser l'opinion de certains esprits, aussi faibles que dévots, et plus zélés que sages... L'excès en est incommode, et pourrait venir à un tel point qu'il serait ruineux. Il défendait, par des règlements sévères, d'en créer aucun, si ce n'est là où les évêques le jugeraient indispensable. Et les prélats ne montraient pas plus de bonne volonté : l'archevêque de Reims proteste contre des religieuses qui se sont établies dans son diocèse ; le vicaire général de la Charité se plaint de l'installation, trop proche de lui, des Cordeliers de Saint-Louis et des Sœurs de Sainte-Élisabeth. Des Ordres anciens traitent les nouveaux en intrus. Les Capucins cherchent-ils à fonder un couvent, les Minimes s'y opposent, et obtiennent une lettre de la Reine mère qui demande à la ville de surseoir[17].

Même si l'évêque, favorable à la création projetée, s'emploie de son mieux à la faire réussir, ses efforts demeurent infructueux, lorsque le chapitre et les curés y sont hostiles. C'est le cas des Jésuites à Troyes ; la population est partagée. Loin de les soutenir, le Roi leur interdit d'y rester : Je ne veux pas qu'il y ait collège, ni maison des Pères Jésuites en ma ville de Troyes, écrit-il au maire ; ils vous reporteront les clefs du logis où ils sont. Cependant, un bourgeois dit avoir vu un Jésuite au fond d'une chapelle privée prêt à dire la messe. Le présidial informe ; on décide que si les Jésuites persistent dans leur refus de se retirer, ils seront mis dans un carrosse, pour être conduits au dehors, avec douceur et sûreté. En attendant, un curé, par ordre de la municipalité, envahit leur chapelle et emporte leur ciboire à l'église voisine[18].

Les villes sont absolument souveraines ; aussi libres d'accueillir que de repousser, souvent elles ne reçoivent les nouveaux couvents que sous conditions[19]. Elles mettent d'ailleurs autant d'empressement et de persévérance à obtenir ceux qu'elles désirent que d'énergie à repousser ceux dont elles ne veulent pas. Troyes appelle dans ses murs les Ursulines, leur achète un immeuble de valeur, et passe avec elles un traité. Avallon fait pétition sur pétition pour parvenir g à ce que les Capucins demeurent en permanence a. Plus de cent notables — parmi lesquels pas un ecclésiastique — présentent requêtes à cet effet au parlement, au gouverneur de province. Les échevins délibèrent dans ce sens ; chacun fait du zèle, chacun veut pouvoir s'attribuer le succès. Ce sera un titre à faire valoir aux élections prochaines. On acquiert alors la popularité en amenant les Capucins, en les assistant, en devenant leur père temporel, comme on l'acquiert peut-être aujourd'hui en les chassant, en demandant leur renvoi[20].

Les Clarisses arrivent à Roquefort ; elles sont visitées de tous les habitants, de l'une et l'autre religion, avec de grandes démonstrations de joie et offres de service. Le conseil communal d'Angers achète un prieuré de l'Ordre de Fontevrault ; il abandonne une rue aux Ursulines. Ailleurs on préfère les Visitandines ; on leur offre une maison dans le faubourg. Les habitants de Château-du-Loir font une assemblée pour solliciter à la fois un couvent de Bénédictines et un autre d'Ursulines ; si l'évêque ne consent pas à autoriser les deux en même temps, ils demandent au moins les premières, parce qu'ils les jugent plus utiles, et en espèrent tirer un plus grand fruit. Les religieux Carmes et Jacobins, dit le conseil de Nevers, ne sont point à charge à cette ville, chacun d'eux pouvant subsister fort honnêtement avec 150 livres par an. Il peut y en avoir douze sur le pied de cette dépense. La ville de Bourg négocie pendant vingt ans, sans se lasser, afin de posséder un collège de Jésuites. Elle promet une subvention annuelle de 600, puis de 1.200 livres. Le conseil des bourgeois entretient une correspondance suivie avec le Père provincial de Lyon, avec de grands personnages pour avoir leur protection dans l'affaire. Les Cordeliers s'offrent bien à régir le collège en fournissant les maîtres convenables ; mais ce sont des Jésuites que l'on veut. Les assemblées généralissimes font des remontrances dans ce but, députent les syndics à Dijon, à Paris, et aboutissent enfin après mille démarches.

On se trouve en présence de gens qui savent ce qu'ils veulent, et pourquoi ils. le veulent : toujours un but utile ; tantôt c'est pour défricher un communal inculte et malsain, tantôt c'est pour instruire les garçons ou les filles, tantôt pour soigner les malades, pour prêcher et remplir le ministère ecclésiastique[21]. Ces libres et cordiales relations des couvents avec les municipalités, honorent les uns autant que les autres ; les bons offices mutuels n'empêchent pas chacun de faire valoir ses droits : les PP. Carmes, en procès avec la commune d'Aiguillon, ayant méconnu, dans les termes de leur requête, l'autorité des consuls, seront à l'avenir privés de toute gratification[22].

Le mouvement de ce temps, avons-nous dit, poussait les couvents vers les villes, au contraire de à vocation cénobitique qui dispersait les premiers moines dans les champs. L'ermite, si abondant au moyen âge, disparaît peu à peu, on remarque, comme des singularités d'une autre époque, ces ermites du Mans, d'Aix ou d'Amiens, qui sont reclus, suivant les anciennes cérémonies, par un évêque ou un abbé. Quelques-uns, en se séparant à jamais du reste des hommes, ne font aucun vœu : ce sont des ermites laïques, qui vivent d'aumônes dans les bois. L'ermitage est souvent propriété communale ; la ville le répare, à bon marché du reste : Avallon donne pour cet objet 3 livres, en 1625. Au siècle suivant, l'ermitage est vide ; un particulier le prend en location et le fait valoir[23]. Parmi les nouveaux Ordres de femmes, les plus nombreux se livrent à l'éducation ; telles les Ursulines, qui comptent en France, à l’avènement de Louis XIV, plus de trois cents maisons ; les Visitandines, créées par saint François de Sales et la baronne de Chantal[24] ; et les illustres Sœurs de Port-Royal, qui pratiquent la règle de saint Benoît dans sa primitive rigueur[25]. Comment ne pas l'admirer, tout en déplorant la mauvaise tournure qu'elle prit ensuite, cette renaissance de Port-Royal des Champs, cette famille Arnauld et cette famille Pascal, d'un ascétisme si peu contagieux, d'un caractère si haut ? Cette Angélique Arnauld et cette Mère Agnès, sa sœur, toutes deux jeunes, belles, instruites, uniquement occupées du soin de leur perfection et de celle des autres, dévouées toutes deux à une vie d'humilité dont l'éclat de leurs vertus fait presque une gloire mondaine.

L'Influence exercée sur une société par de telles personnes et de tels exemples est profondément salutaire ; elles inspirent le goût du bien, elles le mettent en quelque sorte à la mode[26]. C'est un spectacle profitable que celui d'une princesse de Lorraine qui se fait Franciscaine, d'une demoiselle de Ligne qui se fait Capucine, d'une Séguier ou d'une la Rochefoucauld qui entrent au Carmel, où l'austérité dépassait de beaucoup tout ce que l'on avait jamais vu dans notre pays. Ces Carmélites que ce siècle entrevoit, le Christ en main, couvertes du voile noir et du grand manteau blanc des filles de sainte Thérèse, derrière des grilles inaccessibles qui menacent étrangement, dit Bossuet, tous ceux qui approchent, ces Carmélites ont marqué leur empreinte sur ce monde qu'elles avaient dédaigné. La venue de ces congrégations qui accusaient, par la manifestation de leur foi, la vitalité de l'Église, eut pour premier effet de rendre plus saillant le relâchement de la plupart des Ordres anciens, et de les contraindre à se réformer. La réforme n'était autre chose que le rétablissement de la règle imposée par les fondateurs, et observée par les premiers disciples. Elle était urgente et demandée de tous côtés, aussi bien par le clergé que par la magistrature[27]. On se plaignait du grand nombre de moines que l'on voyait à la cour ; le grand aumônier était impuissant à interdire ces fréquentes allées et venues. Il faut, disait le parlement de Paris, que l'on ne voie plus de religieux vagabonds s'abandonner à toutes sortes de débauches, et devenir la honte de l'état monastique. Le mal est arrivé aujourd'hui à tel excès que, si l'on n'y apportait un prompt secours, il serait à craindre qu'il oc causât quelque funeste révolution. Les répressions individuelles, dirigées par le conseil d'État ou les tribunaux contre tel ou tel, pour essayer de le ramener à une meilleure vie, les procès faits et parfaits aux coupables étaient insuffisants. Rétablir dans leur première splendeur et pureté des Ordres réguliers, était une tâche au-dessus des forces du bras séculier ; d'autant que ce bras séculier les avait, comme nous l'avons dit, privés de leurs chefs naturels, par le système des commendes[28]. Laubardemont pouvait bien informer contre des abbés, qui ont fait des exécrations si étranges, dit Richelieu, qu'il est impossible de les entendre sans horreur ; mais quel remède apporter aux désordres d'un monastère où non-seulement il ne se fait plus aucun service divin, mais où les religieux même ont été chassés par le prieur ? Sans offrir l'image de pareils scandales, bien des congrégations étaient fort éloignées de leur institution originelle. Il fallait réformer à la fois les Augustins, les Mathurins, les Carmes, les Franciscains, les Prémontrés, les Dominicains, surtout les Bénédictins, autant la branche de Cîteaux que celle de Cluny[29]. Presque seuls, les Chartreux s'étaient conservés en leur entier, et n'avaient point fait parler d'eux comme les autres ; leur règle du reste était moins sévère que de nos jours[30].

Une tâche aussi délicate s'accomplit par un pieux zèle, par une prière persuasive, non par des décrets royaux ni par autorité de justice. De saints personnages, comme Vincent de Paul et Bérulle, y sont infiniment plus propres que des maitres des requêtes ou des conseillers d'État[31]. Ces fonctionnaires furent pourtant employés de préférence par Richelieu. Députés dans les couvents, ils opéraient partout d'une façon uniforme, mettaient de nouveaux religieux en possession de l'abbaye, et licenciaient les anciens en leur donnant une pension qui leur permit de vivre. Quelquefois on partageait en deux les bâtiments claustraux ; les réformés en avaient une moitié, l'autre demeurait à ceux qui ne voulaient pas prendre la réforme. Il y avait ainsi, dans une même maison, deux groupes de moines entièrement étrangers, ou plutôt hostiles l'un à l'autre, ayant chacun son grand prieur et ses dignitaires particuliers. Situation éminemment fâcheuse ; huit ou dix ans après, il ne restait presque aucun vestige d'observance ni de discipline régulière dans les monastères mêmes où les réformés avaient été introduits. Un arrêt du conseil le constate[32].

Aussi le cardinal se faisait-il peu d'illusions sur la portée de son entreprise. Il se console, en voyant que le dérèglement des monastères est plus rare qu'en ses premières années. Le mieux, selon lui, était d'établir des réformes modérées que l'on pût observer à l'aise, plutôt que d'en entreprendre de si austères qu'on eût de la peine à en supporter la rigueur. Quelque accommoda nient, fait à cet égard avec le ciel, par un ministre qui n'avait rien d'un apôtre, beaucoup de considérations, dit-il, donnent lieu de craindre que les réformes qui se sont faites de notre temps ne soient pas de très-longue durée[33]. Selon son usage, il n'avait pourtant pas hésité devant les grands moyens ; pour mieux supprimer toute résistance, il s'était fait nommer lui-même général de l'Ordre de Cluny, puis de l'Ordre de Cîteaux, enfin de celui des Prémontrés. Et cela, malgré les réclamations de la cour de Rome, malgré les protestations plus ou moins fondées des monastères qu'il voulait soumettre. Le Saint-Siège représentait qu'un cardinal ne pouvait être général d'Ordre, encore moins général de plusieurs Ordres, et moins encore coadjuteur d'un régulier. Il obtint, malgré tout, les bulles de général de Cluny, niais le Pape lui refusa celles de Cîteaux et de Prémontré. Il s'en passa, administra de son autorité privée le spirituel de ces deux derniers, et en prit le temporel ; si bien que, de tous les abus qu'il voulait extirper, il était lui-même un des plus grands, et que la première réforme eût dû commencer par le réformateur. Les Bénédictins firent observer que les changements, dans leur discipline, devaient être faits par un chapitre général, et non par un homme seul, qu'ils ne refusaient pas d'obéir à des chefs légitimement élus, mais qu'ils voulaient, selon les ordonnances, avoir des religieux pour abbés[34]. Richelieu avait affaire à forte partie, puisque Cîteaux passait pour comprendre 3.500 monastères sur la surface de l'Europe. Parmi ceux de France, plusieurs tentèrent d'échapper à la férule du nouveau général, soit en obtenant leur sécularisation, soit en s'agrégeant à des congrégations étrangères ; ils n'y réussirent pas[35]. Mais, dans cette guerre de moines, où le Souverain Pontife même était contre lui, le ministre ne remporta que des victoires sans lendemain. Des occupations multiples, dont la moindre eût suffi à absorber un homme ordinaire, l'empêchaient d'ailleurs d'assurer l'exécution de tant de volontés. Un coup d'œil sur cette campagne, à peu près avortée, montre l'impuissance de l'État hors de son domaine : la ferveur obligatoire, la méditation légale, était une conception impraticable.

Le cardinal fut mieux inspiré lorsqu'il intervint dans la querelle fameuse entre le clergé séculier et les Ordres monastiques, parce qu'il se borna à susciter des conférences, à prêcher la concorde, et qu'il procéda plutôt par un accommodement que par la rigueur du droit. La dispute avait donné le jour à des opinions insensées ; tandis que l'Ouvrage des moines de le Camus contenait des allégations blessantes pour tous les religieux, un livre sur la Hiérarchie de l'Église mettait les Sœurs converses et les Frères lais au-dessus des prélats et du Pape[36]. Une commission composée mi-partie d'évêques et de réguliers examina les griefs, et le P. de la Salle, supérieur des Jésuites de Paris, proposa une formule approuvée par Richelieu, qui termina le différend[37]. Les religieux reconnurent qu'ils n'ont pouvoir de confesser et de prêcher qu'autant qu'ils obtiennent de l'ordinaire une permission, qui peut toujours leur être retirée. Ils perdirent la plupart de leurs exemptions et de leurs dispenses, et furent soumis à la juridiction épiscopale. C'était le vœu du concile de Trente, et celui des États généraux. Le gouvernement de Louis XIII accomplit là son meilleur acte en matière d'administration religieuse, le seul du reste qui rentrât dans son rôle. Il mérite également des éloges pour la pacification qu'il apporta, dars la mesure de son autorité, aux querelles que des prétentions rivales suscitaient entre les divers Ordres. Comme propriétaires Fonciers, les couvents avaient de nombreux intérêts temporels. Sans cesse, un monastère nouveau était vassal d'un ancien : ici les Barnabites sont les seigneurs des Cordeliers ; là ce sont les Cordeliers qui sont suzerains des Jésuites. Généralement le couvent suzerain exigeait de l'autre des-prédications et quelques exercices du culte n'occasionnant aucun revenu ; il lui défend par contre toute fonction plus ou moins lucrative. Les derniers venus, comme les Jésuites, supportaient mal la suprématie de leurs devanciers (le cardinal le leur reprocha plus d'une fois) ; ils ne voyaient pas d'un œil meilleur la concurrence que les Oratoriens, plus récents qu'eux, leur faisaient sur le terrain de l'instruction publique.

Noble émulation, à tout prendre, que cette jalousie dans le bien ; inséparable de la liberté, qui fécondait tant d'œuvres dont profitait la nation[38].

 

 

 



[1] Les Lazaristes s'obligeaient à ne prêcher ni administrer aucun sacrement dans les villes où il y aura archevêché, évêché ou présidial, sinon en cas de notable nécessité. ABÉLY, Vie de saint Vincent de Paul, I, 103.

[2] L'Ordre avait été approuvé par une bulle du Pape, de 1832.

[3] RICHELIEU, Mémoires, II, 52. — Abbé HOUSSAYE, Card. de Bérulle, II, 565 et suiv. Pour l'histoire de l'Oratoire, nous renvoyons le lecteur à cet ouvrage.

[4] Vincent de Paul était le doyen de ces ecclésiastiques. Il était né en 1576 à Pouy (diocèse de Dax), où, disait-il, sa première occupation avait été de garder les pourceaux. Mais il se vante, son père était un paysan aisé, qui le fit instruire au collège. Bourdoise était né en 1581, Eudes en 1601, Olier en 1608.

[5] ABÉLY, Vincent de Paul, 60. — Un autre abus du pays était de faire confesser les enfants en commun depuis l'âge de sept à huit ans jusqu'à quatorze ; les interrogeant publiquement sur les péchés qu'ils pourraient avoir commis.

[6] On peut citer aussi les chevaliers Gloriosœ Conceptionis Immaculatœ Virginis, institués en 1623 par le duc de Nevers, et l'Ordre de l'Exaltation de la Sainte Croix, fondé en 1637.

[7] Mémoires de FONTENAY-MAREUIL, 289 ; de RICHELIEU, III, 225. — Aff. Étrang., t. 787, fol. 33. — DE GRAMMONT, Relations sur Alger, II, 7. CRÉTINEAU-JOLY, Histoire de la Compagnie de Jésus, II, 363.

[8] Le Père Oliva fut nommé général, eu 1661, par 49 voies, sur 91 votants seulement.

[9] Édit de septembre 1603. — RAPINE, Cahiers du Tiers État, 15. — Arch. Haute-Garonne B. 516.

[10] Aff. Étrang., t. 800, fol. 373. — Arch. Haute-Garonne B. 472. — Arch. Guerre, XLII, 14, — Lettres et papiers d'État, VI, 7. — FLOQUET, Histoire du Parlement de Normandie, IV, 14.

[11] CRÉTINEAU-JOLY, Hist. de la Compagnie de Jésus, III, 41. — On ne put, avec leur revenu, entretenir à Bourges ou à Lyon, 7 ou 8 régents, au seizième siècle, lors de leur expulsion ; et cependant les Jésuites y vivaient au nombre de 30 à 40, preuve qu'ils se contentaient de peu.

[12] Mémoires de RICHELIEU, III, 225 ; de FONTENAY-MAREUIL, 171 ; de MONTCHAL, I, 36. — Lettres et papiers d'État, II, 157.

[13] Au chapitre IV, le Clergé propriétaire.

[14] Il mourut à Tulle, en 1670. — Son livre, paru en 1649, a pour titre : Jésuites mis sur l'échafaud, p. 19. — Par édit de septembre 1603, il était défendu aux supérieurs d'avoir aucun religieux étranger dans les maisons de France, sans la permission du Roi.

[15] Arch. com. d'Avallon, B. 147. — Arch. Haute-Garonne, B. 490. — Aff. Étrang., t. 796, fol. 229 ; t. 804, fol. 2.

[16] Nous soyons l'abbesse de Jouarre recevoir 7.000 livres pour les réparations de l'abbaye (Plumitif Chambre des comptes, P, 2757, fol. 242), mais ce sont des dons extrêmement rares. Richelieu créa personnellement 2.000 livres de rente au profit du noviciat réformé des Frères Prêcheurs. — Quand il s'agissait d'exemption d'impôts, le Parlement refusait souvent d'enregistrer les lettres patentes qui les accordaient. (Arch. Haute-Garonne, B. 445.)

[17] Aff. Étrang., t 780, fol. 273. — Lettres et papiers d'État, II, 174. — RICHELIEU, Testament politique, I, 165. — Déclaration du 21 novembre 1629. — L'arrêt du parlement de Paris, du 27 janvier 1632, demande la diminution des religieux mendiants, les aumônes, en quelques lieux, n'étant pas suffisantes pour les entretenir. — Arch. Lot-et-Garonne, B. 11. — FLOQUET, Hist. du Parlement de Normandie, IV, 430. — Les religieux de Montferrat doivent obtenir lettres patentes pour avoir permission de faire quêtes en France. Arch. Guerre, LXVII, 3.

[18] Arch. dép. Aube, G, 1296. — En 1631, la aille de Troyes agit de même avec les religieuses de la Visitation ; elle a, dit-elle, huit couvents, dont moitié récemment fondés ; cela lui suffit. Arch. Guerre, XXIV, 39 ; XLIX, 5. — Aff. Étrang., t. 778, fol. 82.

[19] Saint-Sever ne laisse établir de nouveaux religieux qu'après avoir acquis ta certitude qu'ils ont les moyens de construire une église et un couvent. (Arch. dép. Landes, Saint-Sever, BB. 2.) Toulon s'oppose à l'introduction des Observantins et des Récollets, attendu qu'il y a déjà trop de besaciers. Arch. com. Toulon, BB. 56.

[20] Arch. dép. Aube, G. t297. — Arch. com. de Bourg, BB. 97 ; d'Avallon, BB. 4.

[21] Arch. Guerre, LXII, 9. — Arch. com. de Bourg, BB. 78 3 80, 91,97 ; de Nevers, BB. 21, 58 ; CC. 258, 595 ; d'Avallon, BB. 3 ; CG. 97 ; d'Angers, BB. 61, 77. — Arch. dép. Landes, H. 258 ; de la Sarthe, H, t183 ; de l'Aube, G. 1297.

[22] Arch. Lot-et-Garonne, Aiguillon, BB. 1. — La ville de Bourg (Arch. com., BB. 82) donne un certificat de bonne vie à un religieux Jacobin expulsé par son prieur.

[23] Arch. com. Avallon, GG. 108. — Arch. dép. de la Sarthe, G. 21.

[24] D'abord nommées Bénédictines ; elles s'établirent à Paris, rue de Vaugirard, près du Petit-Luxembourg, en 1621. Les Ursulines avaient été introduites en France par madame Lhuillier, sur le conseil du P. Gonthery, Jésuite.

[25] On voit de nouveaux établissements sans lien entre eux, des couvents de chanoinesses. Un particulier fonde, à Agen, une maison de chasteté, affectée an logement de 4 filles orphelines, qui feront résolution de vivre pudiquement et chastement tout le temps de leur vie (Arch. Lot-et-Garonne, B. 38, 57).

[26] On lit dans le Pasquil de la cour pour apprendre à discourir (Variétés historiques d'Éd. FOURNIER, III, 264) :

Il faut doncques en premier lieu

Que c'est que méditations ;

Apprendre à bien parler de Dieu.

Visiter l'Ordre Sainte-Ursule,

Si faut-il faire la dévote,

Connaître le P. Bérulle,

Porter le cordon Saint-François,

Lui parler de dévotion ;

Communier à chaque mois,

Avoir des tantes et cousines

Aller à vêpres à l'Oratoire ;...

Dans le couvent des Cartnélines. Etc.

Savoir où sont les stations,

 

 

[27] Cf. Lettres et papiers d'État, II, 160 ; IV, 197. Beaucoup d'Ordres ont eu plusieurs réformes dans le cours des siècles ; c'est ce qui explique les termes d'étroite observance, de plus étroite observance, etc. — PICOT, États Généraux, III, 474.

[28] Arch. Guerre, XXV, 292 ; XXVIII, 112 ; LXVII, 6. — Arrêt du Parlement du 17 janvier 1632. — Arrêt du conseil du 16 mars 1633. — Aff. Étrang., t. 779, fol. 81. — Arch. Haute-Garonne, B. 458. — Lettres et papiers d'État, II, 339 ; III, 458 ; V, 790 ; VII, 226.

[29] Aff. Étrang., t. 803, fol. 349 à 355 ; t. 806, fol. 148 ; t. 807, fol. 69 ; t. 812, fol, 256. — Arch. Haute-Garonne, B. 411, 491. — Il y avait 145 couvents de Dominicains et 14 noviciats en 1634 ; le défaut de l'observance, dit un Mémoire, procède de ce qu'ils manquent de religieux ayant fait leur noviciat e. — La réforme, dit-on, est introduite dans le grand couvent des Carmes avec paix et douceur. On continue à travailler aux autres avec plus de peine. Lettres et papiers d'État, V, 476. — Arch. dép. Yonne, II, 1217. — Arch. Guerre, XXIV, 212 ; LXXI, 4.

[30] FAUGÈRE, Journal d'un voyage à Paris, 375. Chaque Père avait un valet et un appartement de trois chambres ; mais ils ne mangeaient jamais de viandes, et ne se parlaient qu'à certains jours de la semaine.

[31] Le couvent des Grands Augustins fut réformé par Bérulle. Cf. l'Histoire de ce dernier, par TABARAUD, II, 45. — La réforme de l'Ordre de Saint-Benoît fut confiée, par un bref du Pape, au card. de la Rochefoucauld, mais le rôle actif fut réservé aux magistrats.

[32] Arrêt du conseil privé du 15 novembre 1641. Il nomme d'Aligre, Rignon, Vertamont et Fouquet pour prendre connaissance des abus. En 1632 on avait déjà formé une commission composée de 4 conseillers d'État et de 8 maîtres des requêtes. — Réformation de Saint-Denis, du 26 septembre 1633 ; Arrêt du conseil, du 16 mars 1633. — Aff. Étrang., t. 806, fol. 134.

[33] RICHELIEU, Testament politique, I, 104, 163.

[34] Aff. Étrang., t. 799, f. 276 (Ordonnance de Richelieu pour la réformation de l'Ordre de Cluny) ; t. 802, f. 244 ; t. 813, f. 17, — Mémoires de RICHELIEU, III, 185, 180 ; de BASSOMPIERRE, 353 ; de MONTCHAL, I, 34 ; — Lettres et papiers d'État, II, 501 ; 1 V, 452. — Ordonnance Michaud, de janvier 1629.

[35] Arch. Haute-Garonne, B. 456, 478. — Aff. Étrang., t. 810, fol. 332, 335.

[36] Aff. Étrang., t.802, fol. 203 ; t. 810, fol. 65. — MONTCHAL, Mémoires, I, 340.

[37] Une Lettre des religieux au cardinal de Richelieu, qui fut rendue publique, et dont une minute raturée et corrigée de la main du ministre, existe dans ses papiers, dénote la part active qu'il prit aux négociations. Elle contenait une plainte contre l'ouvrage de Le Camus. — Aff. Étrang., t. 802, fol. 83 ; t. 894, fol. 161 ; t. 807, fol. 106. — PICOT, États Généraux, III, 503. — Un arrêt du Conseil privé, du 4 janvier 1639, montre qu'il subsista bien des germes d'animosité.

[38] Arch. dép. Landes, H. 165. — Lettres st papiers d'Etat, II, 157, 483. — Sur les démêlés des Oratoriens et des Jésuites, voyez abbé HOUSSAYE, le Cardinal de Bérulle, II, 463, 597, et CRÉTINEAU-JOLY, Histoire de la Compagnie de Jésus, IV, 349. — Variétés historiques, Éd. FOURNIER, I, 127.